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Document 62009CJ0230

    Arrêt de la Cour (première chambre) du 5 mai 2011.
    Hauptzollamt Koblenz contre Kurt und Thomas Etling in GbR (C-230/09) et Hauptzollamt Oldenburg contre Theodor Aissen et Hermann Rohaan (C-231/09).
    Demande de décision préjudicielle: Bundesfinanzhof - Allemagne.
    Agriculture - Secteur du lait et des produits laitiers - Règlement (CE) nº 1788/2003 - Prélèvement dans le secteur du lait et des produits laitiers - Règlement (CE) nº 1782/2003 - Régimes de soutien direct dans le cadre de la politique agricole commune - Transfert de quantités de référence individuelles - Répercussions sur le calcul du prélèvement - Répercussions sur le calcul de la prime aux produits laitiers.
    Affaires jointes C-230/09 et C-231/09.

    Recueil de jurisprudence 2011 I-03097

    Identifiant ECLI: ECLI:EU:C:2011:271

    Affaires jointes C-230/09 et C-231/09

    Hauptzollamt Koblenz

    contre

    Kurt und Thomas Etling in GbR
    et
    Hauptzollamt Oldenburg
    contre
    Theodor Aissen et Hermann Rohaan

    (demandes de décision préjudicielle, introduites par le Bundesfinanzhof)

    «Agriculture — Secteur du lait et des produits laitiers — Règlement (CE) nº 1788/2003 — Prélèvement dans le secteur du lait et des produits laitiers — Règlement (CE) nº 1782/2003 — Régimes de soutien direct dans le cadre de la politique agricole commune — Transfert de quantités de référence individuelles — Répercussions sur le calcul du prélèvement — Répercussions sur le calcul de la prime aux produits laitiers»

    Sommaire de l'arrêt

    1.        Agriculture — Organisation commune des marchés — Lait et produits laitiers — Prélèvement dans le secteur du lait et des produits laitiers — Réallocation de la partie inutilisée de la quantité de référence nationale affectée aux livraisons

    (Règlement du Conseil nº 1788/2003, tel que modifié par le règlement nº 2217/2004, art. 5, j), et 10, § 3)

    2.        Agriculture — Organisation commune des marchés — Lait et produits laitiers — Prélèvement dans le secteur du lait et des produits laitiers — Réallocation de la partie inutilisée de la quantité de référence nationale affectée aux livraisons

    (Règlement du Conseil nº 1788/2003, tel que modifié par le règlement nº 2217/2004)

    3.        Agriculture — Politique agricole commune — Régimes de soutien direct dans le cadre de la politique agricole commune — Régime de paiement unique — Notion de quantité individuelle de référence admissible au bénéfice de la prime et disponible dans l'exploitation

    (Règlements du Conseil nº 1782/2003, tel que modifié par le règlement nº 118/2005, art. 95, § 1, et nº 1788/2003, tel que modifié par le règlement nº 2217/2004, art. 5, k))

    1.        L’article 10, paragraphe 3, du règlement nº 1788/2003, établissant un prélèvement dans le secteur du lait et des produits laitiers, tel que modifié par le règlement nº 2217/2004, doit être interprété en ce sens que la réallocation de la partie inutilisée de la quantité de référence nationale affectée aux livraisons doit être effectuée proportionnellement à la quantité de référence individuelle de chaque producteur ayant livré en excès, à savoir celle déterminée à la date du 1er avril de la période de douze mois pertinente, ou selon des critères objectifs à fixer par les États membres. La notion de quantité de référence individuelle, telle que définie à l'article 5, sous j), dudit règlement, en ce qu'elle se réfère à la date du début de la période de douze mois pertinente, ne permet pas la prise en compte de transferts de quantités de référence intervenus au cours de cette période.

    (cf. points 72, 79, disp. 1)

    2.        Une réglementation nationale qui met en œuvre la faculté, prévue à l’article 10, paragraphe 3, du règlement nº 1788/2003, établissant un prélèvement dans le secteur du lait et des produits laitiers, tel que modifié par le règlement nº 2217/2004, de fixer des critères objectifs selon lesquels est effectuée la réallocation de la partie inutilisée de la quantité de référence nationale affectée aux livraisons doit respecter, notamment, les principes généraux du droit de l’Union ainsi que les objectifs poursuivis par la politique agricole commune, et plus particulièrement ceux visés par l’organisation commune des marchés dans le secteur du lait.

    Ces objectifs ne s’opposent pas à une réglementation nationale, adoptée dans le cadre de la mise en œuvre de cette faculté, qui permet aux producteurs ayant livré en excès, lorsqu’ils se sont vu transférer, conformément aux dispositions du règlement nº 1788/2003, tel que modifié, au cours de la période de douze mois pertinente, une quantité de référence individuelle pour laquelle du lait avait déjà été produit et livré pour cette même période par le producteur qui en disposait précédemment, de participer à cette réallocation en incluant une partie ou la totalité de cette quantité de référence. Dans ce cadre, les États membres devaient toutefois veiller à ce qu’une telle réglementation ne donne pas lieu à des transferts qui, malgré un respect formel des conditions prévues par ce règlement, auraient eu pour seul but de permettre à certains producteurs ayant livré en excès de se ménager une position plus favorable lors de ladite réallocation.

    (cf. point 79, disp. 2-3)

    3.        La notion de «quantité individuelle de référence admissible au bénéfice de la prime et disponible dans l’exploitation», contenue dans l’article 95, paragraphe 1, du règlement nº 1782/2003, établissant des règles communes pour les régimes de soutien direct dans le cadre de la politique agricole commune et établissant certains régimes de soutien en faveur des agriculteurs, tel que modifié par le règlement nº 118/2005, qui correspond à la notion de «quantité de référence disponible» définie à l’article 5, sous k), du règlement nº 1788/2003, établissant un prélèvement dans le secteur du lait et des produits laitiers, tel que modifié par le règlement nº 2217/2004, doit être interprétée en ce sens que, lorsqu’un producteur s’est vu transférer, au cours de la période de douze mois pertinente, une quantité de référence sur laquelle du lait avait déjà été livré par le cédant au cours de la même période, elle n’englobe pas, en ce qui concerne le cessionnaire, la partie de la quantité de référence transférée sur laquelle du lait avait déjà été livré en exemption de prélèvement par le cédant.

    (cf. point 93, disp. 4)







    ARRÊT DE LA COUR (première chambre)

    5 mai 2011 (*)

    «Agriculture – Secteur du lait et des produits laitiers – Règlement (CE) n° 1788/2003 – Prélèvement dans le secteur du lait et des produits laitiers ? Règlement (CE) n° 1782/2003 ? Régimes de soutien direct dans le cadre de la politique agricole commune ? Transfert de quantités de référence individuelles – Répercussions sur le calcul du prélèvement ? Répercussions sur le calcul de la prime aux produits laitiers»

    Dans les affaires jointes C‑230/09 et C-231/09,

    ayant pour objet des demandes de décision préjudicielle au titre de l’article 234 CE, introduites par le Bundesfinanzhof (Allemagne), par décisions du 31 mars 2009, parvenues à la Cour le 25 juin 2009, dans les procédures

    Hauptzollamt Koblenz (C-230/09)

    contre

    Kurt und Thomas Etling in GbR,

    en présence de:

    Bundesministerium der Finanzen,

    et

    Hauptzollamt Oldenburg (C-231/09)

    contre

    Theodor Aissen,

    Hermann Rohaan,

    en présence de:

    Bundesministerium der Finanzen,

    LA COUR (première chambre),

    composée de M. A. Tizzano, président de chambre, MM. A. Borg Barthet, M. Ilešič (rapporteur), M. Safjan et Mme M. Berger, juges,

    avocat général: M. J. Mazák,

    greffier: M. B. Fülöp, administrateur,

    vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 11 mai 2010,

    considérant les observations présentées:

    –        pour le Hauptzollamt Koblenz, par M. C. Busse, Regierungsdirektor,

    –        pour Kurt und Thomas Etling in GbR, par Me G. Zulauf, Rechtsanwalt,

    –        pour le Hauptzollamt Oldenburg, par Mme A. Kramer et M. W. Uhlig, Regierungsdirektoren,

    –        pour M. Aissen, par Me A. Enninga, Rechtsanwalt,

    –        pour M. Rohaan, par Me D. Schuhmacher, Rechtsanwalt,

    –        pour la Commission européenne, par M. G. von Rintelen et Mme H. Tserepa-Lacombe, en qualité d’agents.

    ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 14 septembre 2010,

    rend le présent

    Arrêt

    1        Les demandes de décision préjudicielle portent sur l’interprétation du règlement (CE) n° 1788/2003 du Conseil, du 29 septembre 2003, établissant un prélèvement dans le secteur du lait et des produits laitiers (JO L 270, p. 123), tel que modifié par le règlement (CE) n° 2217/2004 du Conseil, du 22 décembre 2004 (JO L 375, p. 1, ci-après le «règlement n° 1788/2003»).

    2        Ces demandes ont été présentées dans le cadre de litiges opposant, dans l’affaire C‑230/09, le Hauptzollamt Koblenz (bureau de douane principal de Coblence) à Kurt und Thomas Etling in GbR et, dans l’affaire C‑231/09, le Hauptzollamt Oldenburg (bureau de douane principal d’Oldenburg) à MM. Aissen et Rohaan, concernant respectivement, d’une part, la détermination de la quantité de référence en fonction de laquelle le montant de la prime aux produits laitiers est fixé et, d’autre part, la détermination de la base sur laquelle est fixée la participation à la réallocation de la partie inutilisée de la quantité de référence nationale affectée aux livraisons.

     Le cadre juridique

     La réglementation de l’Union

     La réglementation en matière de prélèvement dans le secteur du lait

    3        En 1984, en raison de la persistance d’un déséquilibre entre l’offre et la demande dans le secteur du lait, un régime de prélèvement supplémentaire dans ledit secteur, qui reposait sur le principe qu’un prélèvement est dû pour des quantités de lait et/ou d’équivalent lait qui dépassent une quantité de référence à déterminer, a été institué par le règlement (CEE) n° 856/84 du Conseil, du 31 mars 1984, modifiant le règlement (CEE) n° 804/68 portant organisation commune des marchés dans le secteur du lait et des produits laitiers (JO L 90, p. 10).

    4        Le même jour a été adopté le règlement (CEE) n° 857/84 du Conseil portant règles générales pour l’application du prélèvement visé à l’article 5 quater du règlement (CEE) n° 804/68 dans le secteur du lait et des produits laitiers (JO L 90, p. 13).

    5        Le régime de prélèvement supplémentaire a été prolongé à diverses reprises, notamment par le règlement (CEE) n° 3950/92 du Conseil, du 28 décembre 1992, établissant un prélèvement supplémentaire dans le secteur du lait et des produits laitiers (JO L 405, p. 1), lequel a été modifié plusieurs fois.

    6        Notamment par souci de simplification et de clarification, ce dernier règlement a été abrogé et remplacé par le règlement n° 1788/2003 qui, à son tour, a été abrogé et remplacé par le règlement (CE) n° 1234/2007 du Conseil, du 22 octobre 2007, portant organisation commune des marchés dans le secteur agricole et dispositions spécifiques en ce qui concerne certains produits de ce secteur (règlement «OCM unique») (JO L 299, p. 1), avec effet au 1er avril 2008. Les litiges au principal demeurent néanmoins régis, ratione temporis, par le règlement n° 1788/2003.

    7        Les cinquième, dixième et quatorzième considérants du règlement n° 1788/2003 étaient rédigés comme suit:

    «(5)      Il convient que le prélèvement soit fixé à un niveau dissuasif et soit dû par les États membres dès que la quantité de référence nationale est dépassée. Il convient ensuite que le prélèvement soit réparti par l’État membre entre les producteurs qui ont contribué au dépassement. Ceux-ci sont redevables envers l’État membre du paiement de leur contribution au prélèvement dû par le seul fait du dépassement de leur quantité disponible.

    […]

    (10)      […] La somme des quantités attribuées aux producteurs par les États membres ne devrait pas dépasser les quantités de référence nationales. […]

    […]

    (14)      Dans le but de maintenir une certaine souplesse dans la gestion du régime, il convient d’autoriser les États membres à réallouer les quantités de référence inutilisées en fin de période, au niveau national ou entre acheteurs.»

    8        Le règlement n° 1788/2003 établissait des règles de répartition entre les producteurs, sous la forme de quantités de référence individuelles, de chaque quantité de référence nationale.

    9        L’article 4 dudit règlement prévoyait:

    «Le prélèvement est entièrement réparti, conformément aux articles 10 et 12, entre les producteurs qui ont contribué à chacun des dépassements des quantités nationales de référence visés à l’article 1er, paragraphe 2.

    Sans préjudice de l’article 10, paragraphe 3, et de l’article 12, paragraphe 1, les producteurs sont redevables envers l’État membre du paiement de leur contribution au prélèvement dû, calculée selon le chapitre 3, du seul fait du dépassement de leur ou leurs quantités de référence disponibles.»

    10      L’article 5 du règlement n° 1788/2003 disposait:

    «Aux fins du présent règlement, on entend par:

    […]

    i)      ‘quantité de référence nationale’: la quantité de référence fixée pour chaque État membre à l’annexe I;

    j)      ‘quantité de référence individuelle’: la quantité de référence du producteur à la date du 1er avril d’une période de douze mois;

    k)      ‘quantité de référence disponible’: la quantité à la disposition du producteur le 31 mars de la période de 12 mois pour laquelle le prélèvement est calculé, compte tenu de tous les transferts, cessions, conversions et réallocations temporaires prévus au présent règlement et intervenus au cours de cette période de douze mois.»

    11      Aux termes de l’article 6, paragraphe 5, du règlement n° 1788/2003:

    «Les quantités de référence individuelles sont modifiées, le cas échéant, pour chacune des périodes de douze mois concernées, afin que, pour chaque État membre, la somme des quantités de référence individuelles pour les livraisons et celle pour les ventes directes ne dépasse pas la partie correspondante de la quantité de référence nationale adaptée conformément à l’article 8, compte tenu des réductions éventuelles imposées pour alimenter la réserve nationale visée à l’article 14.»

    12      L’article 10, paragraphe 3, du même règlement prévoyait la possibilité de procéder à une réallocation de la partie inutilisée de la quantité de référence nationale affectée aux livraisons. Il disposait:

    «Selon la décision de l’État membre, la contribution des producteurs au paiement du prélèvement dû est établie, après réallocation ou non, proportionnellement aux quantités de référence individuelles de chaque producteur ou selon des critères objectifs à fixer par les États membres, de la partie inutilisée de la quantité de référence nationale affectée aux livraisons:

    a)      soit au niveau national en fonction du dépassement de la quantité de référence disponible de chacun des producteurs,

    b)      soit d’abord au niveau de l’acheteur et ensuite, le cas échéant, au niveau national.»

    13      Les articles 15 à 20 du règlement n° 1788/2003 fixaient certaines conditions dans lesquelles les quantités de référence individuelles pouvaient être transférées.

    14      L’article 16, paragraphe 1, premier alinéa, de ce règlement prévoyait:

    «Avant la fin de chaque période de douze mois, les États membres autorisent, pour ladite période, la cession temporaire d’une partie de la quantité de référence individuelle qui n’est pas destinée à être utilisée par le producteur qui en dispose.»

    15      L’article 17, paragraphe 1, dudit règlement disposait:

    «La quantité de référence individuelle est transférée avec l’exploitation aux producteurs qui la reprennent, en cas de vente, location, transmission par héritage, anticipation d’héritage ou tout autre transfert qui comporte des effets juridiques comparables pour les producteurs, selon des modalités à déterminer par les États membres en tenant compte des surfaces utilisées pour la production laitière ou d’autres critères objectifs et, le cas échéant, d’un accord entre les parties. La partie de la quantité de référence qui, le cas échéant, n’est pas transférée avec l’exploitation est ajoutée à la réserve nationale.»

    16      L’article 18, paragraphe 1, du règlement n° 1788/2003 prévoyait:

    «Afin de mener à bien la restructuration de la production laitière ou d’améliorer l’environnement, les États membres peuvent, selon des modalités qu’ils déterminent en tenant compte des intérêts légitimes des parties:

    […]

    b)      déterminer, sur la base de critères objectifs, les conditions selon lesquelles les producteurs peuvent obtenir au début d’une période de douze mois, contre paiement, la réaffectation par l’autorité compétente ou par l’organisme qu’elle a désigné, de quantités de référence individuelles libérées définitivement à la fin de la période de douze mois précédente par d’autres producteurs contre le versement, en une ou plusieurs annuités, d’une indemnité égale au paiement précité;

    […]

    e)      déterminer, sur la base de critères objectifs, les régions et les zones de collecte à l’intérieur desquelles sont autorisés, dans le but d’améliorer la structure de la production laitière, les transferts définitifs de quantités de référence sans transfert de terres correspondant;

    f)      autoriser, sur demande du producteur à l’autorité compétente ou à l’organisme qu’elle a désigné, dans le but d’améliorer la structure de la production laitière au niveau de l’exploitation ou de permettre l’extensification de la production, le transfert définitif de quantités de référence sans transfert de terres correspondant ou vice versa.»

     La réglementation en matière de soutien direct dans le cadre de la politique agricole commune

    17      Notamment en vue d’assurer un niveau de vie équitable à la population agricole, le règlement (CE) n° 1782/2003 du Conseil, du 29 septembre 2003, établissant des règles communes pour les régimes de soutien direct dans le cadre de la politique agricole commune et établissant certains régimes de soutien en faveur des agriculteurs et modifiant les règlements (CEE) n° 2019/93, (CE) n° 1452/2001, (CE) n° 1453/2001, (CE) n° 1454/2001, (CE) n° 1868/94, (CE) n° 1251/1999, (CE) n° 1254/1999, (CE) n° 1673/2000, (CEE) n° 2358/71 et (CE) n° 2529/2001 (JO L 270, p. 1), tel que modifié par le règlement (CE) n° 118/2005 de la Commission, du 26 janvier 2005 (JO L 24, p. 15, ci-après le «règlement n° 1782/2003»), a instauré le régime de paiement unique ainsi que d’autres régimes de soutien prévoyant des paiements directs, parmi lesquels figurait celui relatif à la prime aux produits laitiers et aux paiements supplémentaires. Ce règlement a été abrogé et remplacé par le règlement (CE) n° 73/2009 du Conseil, du 19 janvier 2009, établissant des règles communes pour les régimes de soutien direct en faveur des agriculteurs dans le cadre de la politique agricole commune et établissant certains régimes de soutien en faveur des agriculteurs, modifiant les règlements (CE) n° 1290/2005, (CE) n° 247/2006 et (CE) n° 378/2007, et abrogeant le règlement (CE) n° 1782/2003 (JO L 30, p. 16). Néanmoins, le litige au principal dans l’affaire C‑230/09 demeure régi, ratione temporis, par le règlement n° 1782/2003.

    18      Le système institué par ce dernier règlement reposait, notamment, sur les principes du passage du soutien de la production au soutien du producteur, en introduisant un système découplé d’aide au revenu pour chaque exploitation agricole, ainsi que du regroupement d’un certain nombre de paiements directs versés au titre de différents régimes en un paiement unique défini sur la base de droits antérieurs au cours d’une période de référence.

    19      La dernière phrase du vingt-neuvième considérant dudit règlement énonçait que le paiement unique devrait être fixé au niveau de l’exploitation.

    20      L’article 62 du règlement n° 1782/2003 était relatif à la mise en œuvre régionale du régime de paiement unique. Cet article disposait:

    «[…] l’État membre peut décider que les montants provenant de la prime aux produits laitiers et des paiements supplémentaires, prévus par les articles 95 et 96, seront inclus, en tout ou en partie, dans le régime de paiement unique à partir de 2005. Les droits établis aux termes du présent paragraphe seront modifiés en conséquence.

    Le montant de référence pour ces paiements est égal aux montants à octroyer conformément aux articles 95 et 96, calculés sur la base de la quantité individuelle de référence pour le lait dont dispose l’exploitation au 31 mars de l’année où ces paiements seront inclus, en tout ou en partie, dans le régime de paiement unique.

    […]»

    21      L’article 95 du règlement n° 1782/2003 prévoyait:

    «1.      À partir de 2004 et jusqu’en 2007, les producteurs de lait peuvent bénéficier d’une prime aux produits laitiers. Celle-ci est octroyée par année civile, par exploitation et par tonne de quantité individuelle de référence admissible au bénéfice de la prime et disponible dans l’exploitation.

    […]

    3.      Les quantités de référence individuelles ayant fait l’objet de cessions temporaires conformément à l’article 6 du règlement (CEE) n° 3950/92 […] ou à l’article 16 du règlement (CE) n° 1788/2003 […] au 31 mars de l’année civile concernée sont considérées comme étant à la disposition de l’exploitation du cessionnaire pour ladite année civile.

    […]»

     La réglementation nationale

    22      L’article 14, paragraphe 1, de l’arrêté relatif au prélèvement sur le lait [Verordnung zur Durchführung der EG-Milchabgabenregelung (Milchabgabenverordnung)] du 9 août 2004 (BGBl. I, p. 2143, ci-après la «MilchAbgV») disposait:

    «L’acheteur peut allouer les quantités de référence affectées aux livraisons qui n’ont pas été utilisées pendant la période de douze mois considérée (sous-livraisons) à d’autres producteurs de lait dont les livraisons ont dépassé la quantité de référence affectée aux livraisons qui leur était allouée (producteurs ayant livré en excès). L’allocation des quantités de référence affectées aux livraisons inutilisées aux différents producteurs ayant livré en excès s’effectue selon la formule arithmétique suivante:

    Somme des sous-livraisons x Quantité de référence pour les livraisons du producteur ayant livré en excès

    Somme des quantités de référence pour les livraisons des producteurs ayant livré en excès.

    […]»

    23      Conformément à l’article 2, paragraphe 1, de la loi d’application du régime de paiement unique [Gesetz zur Durchführung der einheitlichen Betriebsprämie (Betriebsprämiendurchführungsgesetz)] du 26 juillet 2004 (BGBl. I 2004, p. 1868), la République fédérale d’Allemagne a mis en œuvre le régime de paiement unique à l’échelle régionale à partir du 1er janvier 2005.

    24      L’article 6 de l’arrêté relatif à la prime aux produits laitiers [Verordnung über die Durchführung der Milchprämie und der Ergänzungszahlung zur Milchprämie (Milchprämienverordnung)] du 18 février 2004 (BGBl. I, p. 267, ci-après la «MilchPrämV») a été rendu applicable au calcul du paiement unique en vertu de l’article 34, paragraphe 1, de l’arrêté relatif au système intégré de gestion et de contrôle [Verordnung über die Durchführung von Stützungsregelungen und gemeinsamen Regeln für Direktzahlungen nach der Verordnung (EG) Nr. 1782/2003 im Rahmen des Integrierten Verwaltungs- und Kontrollsystems sowie zur Änderung der Kartoffelstärkeprämienverordnung (InVeKoS-Verordnung)] du 3 décembre 2004 (BGBl. I, p. 3194).

    25      L’article 6 de la MilchPrämV disposait:

    «1.      Les quantités de référence déterminantes pour l’octroi de la prime aux produits laitiers et du paiement supplémentaire, dont dispose le producteur laitier au 31 mars de l’année de la demande, sont attestées par un certificat [...], dans le cas de quantités de référence ‘livraison’ pour l’acheteur désigné au paragraphe 2, point 2, délivré par le bureau de douane compétent (bureau de douane principal) (certificat déterminant les quantités de référence).

    2.      Dans le certificat déterminant les quantités de référence, il convient d’indiquer en même temps

    1)      les quantités de lait et d’équivalent lait qui ont été effectivement livrées ou commercialisées par le producteur de lait au cours de la période de douze mois qui se termine le 31 mars de l’année de la demande [...]

    [...]»

     Les litiges au principal et les questions préjudicielles

     L’affaire C-231/09

    26      La demande de décision préjudicielle dans l’affaire C‑231/09 concerne deux procédures pendantes devant la juridiction de renvoi, l’une initiée par M. Aissen et l’autre par M. Rohaan, tous deux producteurs de lait ayant effectué des livraisons pendant la période de douze mois 2004/2005. Chacun a repris, au cours de cette période, une exploitation produisant du lait, à laquelle correspondait une quantité de référence qui lui a été transférée avec cette exploitation, mais qui avait été en partie utilisée pour ladite période par l’exploitant précédent.

    27      L’un et l’autre ont demandé à l’autorité compétente de certifier que la quantité de référence de l’exploitant précédent lui avait été transférée en totalité. Cette autorité a délivré à chacun d’eux un certificat en ce sens, mais elle y a précisé que, en cas de transfert au cours de la période de douze mois, la laiterie doit indiquer au nouvel exploitant la quantité de référence qui reste à livrer, en tenant compte de la quantité déjà livrée par l’exploitant précédent au cours de la même période.

    28      Sur la base de ces certificats et des informations fournies par la laiterie concernée, le Hauptzollamt Oldenburg a recalculé les quantités de référence de M. Aissen et de M. Rohaan et n’a alloué à chacun d’eux, pour la période de douze mois 2004/2005, que la partie de la quantité de référence transférée pour laquelle du lait n’avait pas été livré par l’exploitant précédent, l’autre partie étant laissée à ce dernier pour cette période.

    29      MM. Aissen et Rohaan ayant tous les deux dépassé leurs quantités de référence affectées aux livraisons respectives, le Hauptzollamt Oldenburg a fixé la contribution de chacun d’eux au prélèvement.

    30      Dans le cadre de la fixation du prélèvement, le Hauptzollamt Oldenburg a procédé à la réallocation de la partie inutilisée de la quantité de référence nationale affectée aux livraisons, prévue à l’article 10, paragraphe 3, du règlement n° 1788/2003. Pour cette réallocation, tant dans le cas de M. Aissen que dans celui de M. Rohaan, il n’a pas tenu compte de la partie de la quantité de référence correspondant à l’exploitation reprise au cours de la période concernée qui avait déjà été utilisée par l’exploitant précédent.

    31      MM. Aissen et Rohaan ont formé des recours contre les avis de fixation de la contribution au prélèvement les concernant respectivement.

    32      Le Finanzgericht Hamburg (tribunal des finances de Hambourg) a fait droit auxdits recours, car il a estimé que la totalité de la quantité de référence correspondant à l’exploitation ainsi reprise doit être prise en compte, au profit du nouvel exploitant, lors de la réallocation de la partie inutilisée de la quantité de référence nationale affectée aux livraisons, sans tenir compte des livraisons de lait effectuées par l’exploitant précédent.

    33      Le Hauptzollamt Oldenburg a introduit un recours en «Revision» devant le Bundesfinanzhof (Cour fédérale des finances).

    34      Selon ce dernier, il découle de l’article 5, sous k), du règlement n° 1788/2003 qu’il convient de prendre en considération les transferts, cessions, conversions ou réallocations temporaires de quantités de référence intervenus au cours d’une période de douze mois lorsqu’on examine, après l’expiration de cette période, si le producteur a livré plus de lait qu’il n’en avait le droit en exemption de prélèvement. Ce droit serait épuisé lorsqu’il a été utilisé. Le transfert d’une quantité de référence déjà utilisée une fois ne pourrait donc pas, quel que soit le contexte juridique dans lequel il est effectué, restituer le droit de livrer du lait en exemption de prélèvement pendant la période de douze mois pertinente.

    35      Le Bundesfinanzhof estime toutefois qu’une conception de la quantité de référence en tant que droit abstrait pourrait être envisagée. À cet égard, le droit de l’Union ne prévoirait pas, dans l’hypothèse d’un transfert d’exploitation au cours d’une période de douze mois, la fixation ou le calcul d’une deuxième quantité de référence, mais prévoirait la prise en considération d’une seule quantité de référence, dont l’utilisation serait toutefois à la disposition d’abord d’un producteur, puis de l’autre, ce dernier ne pouvant l’utiliser que dans la mesure où elle n’est pas déjà épuisée en raison des livraisons de lait effectuées par le premier. Il ne semblerait donc pas que la quantité de référence doive être répartie selon une méthode quelconque entre les producteurs successifs.

    36      Ainsi, il serait envisageable, dans le cadre de la réallocation de la partie inutilisée de la quantité de référence nationale, de tenir compte, en cas de transfert d’exploitation dans le cours d’une période de douze mois, de la quantité de référence individuelle totale se trouvant à la disposition du nouvel exploitant à l’expiration de cette période, même si ce dernier n’a jamais détenu le plein droit de livrer cette quantité de lait en exemption de prélèvement.

    37      En revanche, le Bundesfinanzhof n’exclut pas que, notamment en raison du risque de transferts spéculatifs susceptibles d’être effectués dans le seul but de se ménager une meilleure position dans le cadre de la réallocation de la partie inutilisée de la quantité de référence nationale, une telle dissociation conceptuelle entre l’utilisation de la quantité de référence individuelle et la prise en compte de cette quantité de référence dans le cadre de la réallocation comme la «quantité de référence disponible», au sens de l’article 5, sous k), du règlement n° 1788/2003, puisse être contraire à la lettre et à l’esprit du droit de l’Union, y compris les principes généraux de l’organisation du marché du lait.

    38      Dans ces conditions, le Bundesfinanzhof a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:

    «1)      Le droit [de l’Union], spécialement l’article 5, sous k), du règlement [n° 1788/2003], doit-il être entendu en ce sens que la quantité de référence d’un producteur qui a repris une exploitation d’un autre producteur dans le courant d’une période de douze mois n’inclut pas la quantité sur laquelle du lait a déjà été livré par cet autre producteur au cours de la période de douze mois considérée?

    2)      Les dispositions du droit [de l’Union] ou les principes généraux de l’organisation commune des marchés du lait et des produits laitiers font-ils obstacle à une disposition de droit national qui, dans le cadre de la [réallocation] de la partie inutilisée de la quantité de référence nationale [entre les producteurs ayant opéré des] surlivraisons, prévue à l’article 10, paragraphe 3, du règlement n° 1788/2003, permet au producteur visé dans la première question, qui a repris l’exploitation au cours de la période de douze mois, de participer à l’allocation de ladite partie en incluant aussi la part de la quantité de référence livrée par l’autre producteur?»

     L’affaire C-230/09

    39      Kurt und Thomas Etling in GbR, société civile de droit allemand, produit du lait. Pour la campagne laitière 2004/2005, cette société s’est vu attribuer une quantité de référence pour les livraisons de 553 678 kg, compte tenu, notamment, du fait que, depuis l’année 2000, elle avait cédé à bail une partie de sa quantité de référence affectée aux livraisons à hauteur de 50 000 kg. Le contrat de bail a été résilié dans le courant du mois de février 2005, de sorte que cette partie de la quantité de référence a été transférée à ladite société à partir du 1er mars 2005.

    40      À la demande de celle-ci, l’autorité agricole compétente a délivré un certificat attestant qu’une quantité de référence affectée aux livraisons de 50 000 kg lui était transférée à partir du 1er mars 2005, dans lequel il était cependant précisé que seule pouvait être utilisée, pour la période de douze mois 2004/2005, la partie non encore épuisée de cette quantité de référence, partie qui serait déterminée par la laiterie.

    41      Le preneur sortant avait, avant la résiliation du bail, déjà livré 50 000 kg de lait pour cette période de douze mois. Sur la base du certificat mentionné ci-dessus et des informations fournies par la laiterie, le Hauptzollamt Koblenz a, notamment aux fins de l’établissement du prélèvement dû, recalculé la quantité de référence pour les livraisons de Kurt und Thomas Etling in GbR et celle dudit preneur, et a estimé que, la quantité de référence transférée ayant été complètement épuisée par ce dernier, il convenait de l’inscrire, pour ladite période de douze mois, au compte de celui-ci, et non pas au compte de Kurt und Thomas Etling in GbR.

    42      Aux fins du calcul de la prime aux produits laitiers, le Hauptzollamt Koblenz a délivré à cette société un certificat dans lequel il n’était pas tenu compte de la reprise de la quantité de référence précédemment cédée à bail, de sorte que seule la quantité de référence de 553 678 kg y était indiquée.

    43      Sa réclamation contre ledit certificat ayant été rejetée, Kurt und Thomas Etling in GbR a formé un recours devant le Finanzgericht Rheinland-Pfalz (tribunal des finances de Rhénanie-Palatinat), auquel ce dernier a fait droit, estimant que, dans les circonstances de la cause au principal, l’obtention d’une telle prime, au titre du règlement n° 1782/2003, ne dépend pas des éventuelles livraisons effectuées par le preneur.

    44      Le Hauptzollamt Koblenz a introduit un recours en «Revision» contre cette décision devant le Bundesfinanzhof.

    45      Ce dernier estime qu’il est envisageable, dans le cadre de l’article 95, paragraphe 1, du règlement n° 1782/2003, qui prévoit que le calcul de la prime aux produits laitiers est effectué en fonction, notamment, de la quantité individuelle de référence admissible au bénéfice de cette prime et disponible dans l’exploitation, d’allouer, en cas de transfert d’une quantité de référence individuelle au cours d’une période de douze mois, ladite prime en fonction de la quantité de référence individuelle totale se trouvant, à l’expiration de cette période, à la disposition de l’acquéreur de la quantité de référence transférée, même si ce dernier n’a jamais détenu le plein droit de livrer cette quantité de lait en exemption de prélèvement.

    46      Le Bundesfinanzhof n’exclut toutefois pas qu’une telle dissociation conceptuelle entre l’utilisation de la quantité de référence individuelle et la prise en compte de cette quantité de référence dans le cadre du calcul de la prime aux produits laitiers comme la «quantité de référence disponible», au sens de l’article 5, sous k), du règlement n° 1788/2003, puisse être contraire à la lettre et à l’esprit du droit de l’Union, y compris les principes généraux de l’organisation du marché du lait.

    47      Dans ces conditions, le Bundesfinanzhof a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante:

    «Le droit [de l’Union], spécialement l’article 5, sous k), du règlement [n° 1788/2003], doit-il être entendu en ce sens que, pendant la période durant laquelle une quantité de référence a été transférée par un producteur à un autre, la quantité de référence [de ce dernier] n’inclut pas [la partie de] la quantité [de référence transférée] sur laquelle du lait a déjà été livré par [le premier] producteur au cours de la période de douze mois considérée?»

    48      Par ordonnance du président de la Cour du 6 août 2009, les affaires C‑230/09 et C‑231/09 ont été jointes aux fins des procédures écrite et orale ainsi que de l’arrêt.

     Sur les questions préjudicielles

     Observations liminaires

    49      Le règlement n° 1788/2003 prévoyait différents cas de transfert, entre producteurs, de quantités de référence individuelles ou de parties de celles-ci. À cet égard, le législateur avait estimé opportun, d’une part, de prévoir des exceptions au principe selon lequel la quantité de référence correspondant à une exploitation est transférée avec celle-ci et, d’autre part, de maintenir des mécanismes de transfert ou de réallocation temporaires visant à permettre à certains producteurs d’accroître, dans les limites de la quantité de référence nationale, la quantité de lait commercialisée en exemption de prélèvement pour une période de douze mois donnée. Constituait un tel mécanisme, notamment, celui prévu à l’article 10, paragraphe 3, du règlement n° 1788/2003, qui permettait de réallouer la partie inutilisée de la quantité de référence nationale aux producteurs ayant opéré des surlivraisons au cours d’une période de douze mois.

    50      Ce règlement prévoyait en outre, à ses articles 17 et 18, des transferts de quantités de référence qui, tout en étant intervenus pendant cette période ou en début de celle-ci, affectaient habituellement la quantité de référence d’un producteur au-delà de la fin de ladite période. S’agissant de ces transferts, il découle de l’économie générale du règlement n° 1788/2003, de l’objectif, poursuivi par celui-ci, de rétablir l’équilibre entre l’offre et la demande sur le marché laitier, caractérisé par des excédents structurels, au moyen d’une limitation de la production laitière ainsi que du principe énoncé à son dixième considérant et consacré à son article 6, paragraphe 5, selon lequel la somme des quantités attribuées aux producteurs par un État membre et de celles attribuées par celui-ci à la réserve nationale ne doit pas dépasser la quantité de référence nationale, que la quantité de référence individuelle faisant l’objet d’un tel transfert ne peut permettre au producteur cessionnaire de commercialiser du lait en exemption de prélèvement pour la même période que dans la mesure où l’ancien détenteur de cette quantité de référence ne l’a pas utilisée.

     Sur les deux questions dans l’affaire C-231/09

    51      Par ses deux questions dans l’affaire C-231/09, qu’il convient d’examiner ensemble et en premier lieu, la juridiction de renvoi interroge la Cour, en substance, sur les conditions dans lesquelles il est permis de fixer la participation à la réallocation de la partie inutilisée de la quantité de référence nationale affectée aux livraisons, prévue à l’article 10, paragraphe 3, du règlement n° 1788/2003, d’un producteur ayant livré en excès, lorsque ce producteur a repris, au cours de la période de douze mois pertinente, une exploitation à laquelle correspond une quantité de référence individuelle et dans laquelle du lait avait été produit et livré pour cette même période par le producteur qui l’exploitait précédemment.

    52      Il convient, d’emblée, de relever que l’article 10, paragraphe 3, du règlement n° 1788/2003 laissait aux États membres le choix de procéder ou non à une réallocation de la partie inutilisée de la quantité de référence nationale affectée aux livraisons aux producteurs ayant opéré des surlivraisons avant d’établir, selon les modalités prévues au point a) ou au point b) de cette disposition, la contribution de chacun de ces producteurs au paiement du prélèvement dû pour la période de douze mois pertinente.

    53      Il importe ensuite d’observer que l’opération de réallocation de la partie inutilisée de la quantité de référence nationale affectée aux livraisons et celle d’établissement de la contribution des producteurs au paiement du prélèvement dû constituent deux opérations distinctes, même si elles sont liées, dans la mesure où la première est un préalable facultatif de la seconde et affecte le résultat de celle-ci.

    54      En outre, il résulte du libellé même de l’article 10, paragraphe 3, du règlement n° 1788/2003 que les modalités prévues au point a) ou au point b) de cette disposition ne se rapportent qu’à l’opération d’établissement de la contribution des producteurs au paiement du prélèvement dû.

    55      Il s’ensuit que, à la différence de ce qu’estime la Commission européenne, le critère du «dépassement de la quantité de référence disponible» de chacun des producteurs, prévu à l’article 10, paragraphe 3, sous a), du règlement n° 1788/2003, ne se rapporte pas à l’opération de réallocation de la partie inutilisée de la quantité de référence nationale affectée aux livraisons.

    56      En tout état de cause, la quantité de référence disponible, telle que définie à l’article 5, sous k), du règlement n° 1788/2003, ne saurait constituer un critère aux fins de cette réallocation. En effet, il résulte de cette définition que cette quantité est déterminée, notamment, compte tenu des «réallocations temporaires prévu[e]s [à ce] règlement», dont fait partie la réallocation prévue à l’article 10, paragraphe 3, dudit règlement. La quantité de référence disponible, au sens dudit article 5, sous k), n’est donc connue qu’après cette réallocation, pour autant que cette dernière ait lieu.

    57      En revanche, il y a lieu d’examiner si d’autres critères prévus audit article 10, paragraphe 3, sont applicables dans l’hypothèse où un État membre décide de procéder à une telle réallocation.

    58      À cet égard, dans les versions allemande, française, portugaise et slovène de cette disposition, le législateur a employé, respectivement, la formulation «Neuzuweisung […], die proportional zu den Referenzmengen der einzelnen Erzeuger oder nach objektiven, von den Mitgliedstaaten festzulegenden Kriterien erfolgt» (réallocation qui s’effectue proportionnellement aux quantités de référence de chaque producteur ou selon des critères objectifs à fixer par les États membres), la formulation «après réallocation ou non, proportionnellement aux quantités de référence individuelles de chaque producteur ou selon des critères objectifs à fixer par les États membres, de la partie inutilisée de la quantité de référence nationale affectée aux livraisons», la formulation «após eventual reatribuição – proporcionalmente às quantidades de referência individuais de cada produtor ou de acordo com critérios objectivos a definir pelos Estados-Membros – da parte não utilizada da quantidade de referência nacional afectada às entregas» (après éventuelle réallocation, proportionnellement aux quantités de référence individuelles de chaque producteur ou selon des critères objectifs à définir par les États membres, de la partie inutilisée de la quantité de référence nationale affectée aux livraisons) et la formulation «porazdeljen ali ne, v sorazmerju z individualnimi referenčnimi količinami vsakega proizvajalca ali skladno z objektivnimi merili, ki jih določijo države članice» (réalloué[e] ou non, proportionnellement aux quantités de référence individuelles de chaque producteur ou selon des critères objectifs déterminés par les États membres).

    59      Il appert cependant d’autres versions linguistiques du règlement n° 1788/2003, telles les versions bulgare, anglaise et néerlandaise, que les termes «proportionnellement aux quantités de référence (individuelles) de chaque producteur ou selon des critères objectifs à fixer par les États membres», contenus dans l’article 10, paragraphe 3, de ce règlement, se rapportent non pas à l’éventuelle réallocation de la partie inutilisée de la quantité de référence nationale affectée aux livraisons, mais à l’établissement de la contribution des producteurs au paiement du prélèvement dû.

    60      Selon une jurisprudence constante, d’une part, la formulation utilisée dans une des versions linguistiques d’une disposition du droit de l’Union ne saurait servir de base unique à l’interprétation de cette disposition ou se voir attribuer, à cet égard, un caractère prioritaire par rapport aux autres versions linguistiques (voir, notamment, arrêts du 3 avril 2008, Endendijk, C‑187/07, Rec. p. I‑2115, point 23, ainsi que du 9 octobre 2008, Sabatauskas e.a., C‑239/07, Rec. p. I‑7523, point 38). D’autre part, les diverses versions linguistiques d’un texte du droit de l’Union doivent être interprétées de façon uniforme et, dès lors, en cas de divergence entre ces versions, la disposition en cause doit être interprétée en fonction de l’économie générale et de la finalité de la réglementation dont elle constitue un élément (voir, en ce sens, arrêts Endendijk, précité, point 24, ainsi que du 29 avril 2010, M e.a., C‑340/08, non encore publié au Recueil, point 44).

    61      À cet égard, il importe de relever, en premier lieu, que, ainsi qu’énoncé au quatorzième considérant du règlement n° 1788/2003, le législateur a souhaité apporter une certaine souplesse dans la gestion du régime du prélèvement dans le secteur du lait et des produits laitiers en autorisant les États membres à réallouer les quantités de référence inutilisées en fin de période.

    62      Il n’apparaît cependant pas que cette possibilité ait été une innovation par rapport au régime préexistant ou bien qu’une modification notable de ce dernier ait été apportée par le législateur sur ce point.

    63      Au contraire, le septième considérant du règlement n° 3950/92, auquel le règlement n° 1788/2003 a été substitué, énonçait déjà que, «dans le but de maintenir une forme assez souple de gestion du régime, il convient de prévoir la péréquation des dépassements sur l’ensemble des quantités de référence individuelles de même nature à l’intérieur du territoire de l’État membre». C’est dans cette même logique que l’article 2, paragraphe 1, second alinéa, du règlement n° 3950/92, auquel a correspondu ensuite l’article 10, paragraphe 3, du règlement n° 1788/2003, prévoyait que, «[s]elon la décision de l’État membre, la contribution des producteurs au paiement du prélèvement dû est établie, après réallocation ou non des quantités de référence inutilisées, soit au niveau de l’acheteur en fonction du dépassement subsistant après avoir réparti, proportionnellement aux quantités de référence dont chacun de ces producteurs dispose, les quantités de référence inutilisées, soit au niveau national en fonction du dépassement de la quantité de référence dont chacun de ces producteurs dispose».

    64      Or, il résulte clairement de toutes les versions linguistiques de cette dernière disposition que c’était bien la répartition des quantités de référence inutilisées, c’est-à-dire la réallocation de ces quantités, qui devait être effectuée «proportionnellement aux quantités de référence dont chacun de ces producteurs dispose» et que la contribution des producteurs au paiement du prélèvement dû était, pour sa part, établie en fonction du dépassement de la quantité de référence dont chacun de ces producteurs dispose.

    65      Force est de constater, en second lieu, que, si l’article 10, paragraphe 3, du règlement n° 1788/2003 devait être interprété en ce sens que les termes «proportionnellement aux quantités de référence (individuelles) de chaque producteur ou selon des critères objectifs à fixer par les États membres» se rapportent à l’établissement de la contribution des producteurs au paiement du prélèvement dû, les critères contenus dans cette formulation viendraient s’ajouter à celui prévu au point a) dudit article 10, paragraphe 3, à savoir «en fonction du dépassement de la quantité de référence disponible de chacun des producteurs», ce qui, à tout le moins, compliquerait inutilement l’application du régime du prélèvement.

    66      Il résulte de ce qui précède que les critères contenus dans ladite formulation s’appliquent à la réallocation de la partie inutilisée de la quantité de référence nationale affectée aux livraisons.

    67      Quant à la portée précise de ces critères, il importe de relever que la version allemande de l’article 10, paragraphe 3, du règlement n° 1788/2003 employait le terme «Referenzmengen» (quantités de référence).

    68      Ainsi que rappelé au point 60 du présent arrêt, la formulation utilisée dans une des versions linguistiques d’une disposition du droit de l’Union ne saurait servir de base unique à l’interprétation de cette disposition.

    69      Or, force est de constater que les versions linguistiques dudit article 10, paragraphe 3, autres que la version allemande avaient recours aux termes «quantités de référence individuelles», qui étaient par ailleurs définis à l’article 5, sous j), du règlement n° 1788/2003 comme «la quantité de référence du producteur à la date du 1er avril d’une période de douze mois».

    70      Dans ces conditions, ainsi que le font valoir le Hauptzollamt Koblenz et le Hauptzollamt Oldenburg, l’article 10, paragraphe 3, du règlement n° 1788/2003 doit être interprété en ce sens que la réallocation de la partie inutilisée de la quantité de référence nationale affectée aux livraisons doit être effectuée proportionnellement à la quantité de référence individuelle de chaque producteur ayant livré en excès, à savoir celle déterminée à la date du 1er avril de la période de douze mois pertinente, ou selon des critères objectifs à fixer par les États membres.

    71      À cet égard, il incombe à la juridiction de renvoi de vérifier si, en adoptant l’article 14, paragraphe 1, de la MilchAbgV, la République fédérale d’Allemagne a entendu faire application de l’option, prévue à l’article 10, paragraphe 3, du règlement n° 1788/2003, selon laquelle cette réallocation s’effectue proportionnellement à la quantité de référence individuelle de chaque producteur ayant livré en excès ou bien si cet État membre a entendu, en recourant à la faculté, également prévue à cette même disposition, de fixer d’autres critères objectifs aux fins de ladite réallocation, permettre à un tel producteur qui, au cours de la période de douze mois pertinente, s’est vu transférer une quantité de référence sur laquelle du lait avait déjà été produit et livré pour cette même période par le producteur qui en disposait précédemment de participer à ladite réallocation en incluant une partie ou la totalité de cette quantité de référence.

    72      Pour l’hypothèse où la République fédérale d’Allemagne aurait opté pour la première solution, il convient de relever que la notion de «quantité de référence individuelle», telle que définie à l’article 5, sous j), du règlement n° 1788/2003, en ce qu’elle se réfère à la date du début de la période de douze mois pertinente, ne permet pas, en tout état de cause, la prise en compte de transferts de quantités de référence intervenus au cours de cette période.

    73      Pour l’hypothèse où la République fédérale d’Allemagne aurait opté pour la seconde solution, il y a lieu de constater que, en prévoyant la possibilité pour les États membres d’établir, aux fins de la réallocation de la partie inutilisée de la quantité de référence nationale affectée aux livraisons, des critères objectifs autres que celui de la quantité de référence individuelle, le législateur de l’Union leur avait laissé, à cette fin, une marge d’appréciation assez large. Il n’en reste pas moins que les États membres n’étaient pas habilités à introduire tout type de critères à cet égard.

    74      En effet, lorsqu’ils adoptent des mesures d’application d’une réglementation de l’Union, les États membres sont tenus d’exercer leur pouvoir discrétionnaire dans le respect, notamment, des principes généraux du droit de l’Union (voir, en ce sens, arrêts du 20 juin 2002, Mulligan e.a., C‑313/99, Rec. p. I‑5719, point 35, ainsi que du 25 mars 2004, Azienda Agricola Giorgio, Giovanni et Luciano Visentin e.a., C‑495/00, Rec. p. I‑2993, point 40), parmi lesquels figurent les principes de sécurité juridique, de protection de la confiance légitime, de proportionnalité et de non-discrimination. De même, de telles mesures d’application doivent respecter les droits fondamentaux, tels que le droit de propriété (voir, en ce sens, arrêt Mulligan e.a., précité, point 36).

    75      En outre, eu égard au fait que l’adoption d’une réglementation nationale telle que celle applicable au principal s’inscrit dans le cadre de la politique agricole commune, une telle réglementation ne saurait être établie ou appliquée de manière à compromettre les objectifs poursuivis par cette politique, et plus particulièrement ceux visés par l’organisation commune des marchés dans le secteur du lait (voir, en ce sens, arrêt Mulligan e.a., précité, point 33). Il convient de citer, à ce sujet, notamment les principes de fonctionnement du système du prélèvement, établis par le règlement n° 1788/2003, y compris ceux relatifs aux transferts de quantités de référence.

    76      À cet égard, si le principe mentionné au point 50 du présent arrêt, selon lequel la somme des quantités attribuées aux producteurs par un État membre et de celles attribuées par celui-ci à la réserve nationale ne doit pas dépasser la quantité de référence nationale, affecte le droit d’un producteur qui s’est vu transférer une quantité de référence individuelle déjà utilisée, en partie ou en totalité, de livrer du lait en exemption de prélèvement, ce principe ne peut pas avoir une incidence sur l’opération de réallocation prévue à l’article 10, paragraphe 3, du règlement n° 1788/2003. En effet, dans la mesure où cette opération a pour seul but de permettre aux États membres de répartir, à la fin d’une période de douze mois, la partie inutilisée de la quantité de référence nationale affectée aux livraisons entre les producteurs ayant livré en excès, elle n’a pas d’influence sur le volume de cette partie inutilisée et n’est donc pas susceptible d’affecter l’égalité entre, d’une part, la somme des quantités de référence individuelles et des quantités de référence attribuées par l’État membre concerné à la réserve nationale et, d’autre part, la quantité de référence nationale.

    77      Il était, par conséquent, loisible aux États membres, dans le cadre de la mise en œuvre de la faculté prévue à l’article 10, paragraphe 3, du règlement n° 1788/2003 de fixer des «critères objectifs», de permettre à ces producteurs, lorsqu’ils se sont vu transférer, au cours de la période de douze mois pertinente, une quantité de référence pour laquelle du lait avait déjà été livré pour cette même période par le producteur qui en disposait précédemment de participer à ladite réallocation en incluant une partie ou la totalité de cette quantité de référence, pour autant que cette réglementation respecte les autres impératifs mentionnés aux points 74 et 75 du présent arrêt.

    78      Les États membres devaient toutefois veiller à ce qu’une telle réglementation soit établie de manière à ce qu’elle ne donne pas lieu à des transferts qui, malgré un respect formel des conditions prévues par le règlement n° 1788/2003, auraient eu pour seul but de permettre à certains producteurs ayant livré en excès de se ménager une position plus favorable lors de la réallocation de la partie inutilisée de la quantité de référence nationale affectée aux livraisons. En effet, il résulte de la jurisprudence de la Cour que l’application des règlements de l’Union ne saurait être étendue jusqu’à couvrir des pratiques abusives d’opérateurs économiques (voir, en ce sens, arrêts du 2 mai 1996, Paletta, C‑206/94, Rec. p. I‑2357, point 24 et jurisprudence citée, ainsi que du 14 décembre 2000, Emsland-Stärke, C‑110/99, Rec. p. I‑11569, point 51).

    79      Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de répondre aux questions posées dans l’affaire C‑231/09 comme suit:

    –        L’article 10, paragraphe 3, du règlement n° 1788/2003 doit être interprété en ce sens que la réallocation de la partie inutilisée de la quantité de référence nationale affectée aux livraisons doit être effectuée proportionnellement à la quantité de référence individuelle de chaque producteur ayant livré en excès, à savoir celle déterminée à la date du 1er avril de la période de douze mois pertinente, ou selon des critères objectifs à fixer par les États membres. La notion de quantité de référence individuelle, employée à cette disposition, ne permet pas la prise en compte de transferts de quantités de référence intervenus au cours de cette période.

    –        Une réglementation nationale qui met en œuvre la faculté, prévue à l’article 10, paragraphe 3, du règlement n° 1788/2003, de fixer des critères objectifs selon lesquels est effectuée la réallocation de la partie inutilisée de la quantité de référence nationale affectée aux livraisons doit respecter, notamment, les principes généraux du droit de l’Union ainsi que les objectifs poursuivis par la politique agricole commune, et plus particulièrement ceux visés par l’organisation commune des marchés dans le secteur du lait.

    –        Ces objectifs ne s’opposent pas à une réglementation nationale, adoptée dans le cadre de la mise en œuvre de cette faculté, qui permet aux producteurs ayant livré en excès, lorsqu’ils se sont vu transférer, conformément aux dispositions du règlement n° 1788/2003, au cours de la période de douze mois pertinente, une quantité de référence individuelle pour laquelle du lait avait déjà été produit et livré pour cette même période par le producteur qui en disposait précédemment, de participer à cette réallocation en incluant une partie ou la totalité de cette quantité de référence. Les États membres devaient toutefois veiller à ce qu’une telle réglementation ne donne pas lieu à des transferts qui, malgré un respect formel des conditions prévues par ce règlement, auraient eu pour seul but de permettre à certains producteurs ayant livré en excès de se ménager une position plus favorable lors de ladite réallocation.

     Sur la question dans l’affaire C-230/09

    80      Il ressort de la décision de renvoi dans l’affaire C‑230/09 que le litige au principal dans cette affaire concerne la détermination de la quantité de référence en fonction de laquelle le montant de la prime aux produits laitiers dont bénéficiait Kurt und Thomas Etling in GbR devait être fixé. À cet égard, la juridiction de renvoi ne demande l’interprétation de l’article 5, sous k), du règlement n° 1788/2003 que dans la mesure où elle estime que l’article 95, paragraphe 1, du règlement n° 1782/2003, qui régissait le calcul de cette prime au moment des faits au principal, renvoyait, au sujet dudit calcul, audit article 5, sous k).

    81      Dans ces conditions, il convient de comprendre la question de la juridiction de renvoi en ce sens que cette dernière demande, en substance, si l’expression «quantité individuelle de référence admissible au bénéfice de la prime et disponible dans l’exploitation», contenue dans l’article 95, paragraphe 1, du règlement n° 1782/2003, doit être entendue en ce sens que, lorsqu’un producteur s’est vu transférer, au cours de la période de douze mois pertinente, une quantité de référence déjà utilisée par son détenteur précédent au cours de la même période, cette expression englobe également cette dernière quantité de référence.

    82      Il y a lieu d’examiner, tout d’abord, si la prémisse selon laquelle l’article 95, paragraphe 1, du règlement n° 1782/2003 renvoyait à la notion de «quantité de référence disponible», telle que définie à l’article 5, sous k), du règlement n° 1788/2003, est correcte.

    83      Ainsi que l’ont relevé tant la Commission, dans ses écritures, que M. l’avocat général, aux points 19 et 20 de ses conclusions, l’article 95, paragraphe 1, du règlement n° 1782/2003 n’employait pas exactement les termes «quantité de référence disponible» définis à l’article 5, sous k), du règlement n° 1788/2003. Il n’en reste pas moins que, dans la mesure où ledit article 95, paragraphe 1, employait l’expression «quantité individuelle de référence», le recours à la partie «disponible dans l’exploitation» aurait été inutile si le législateur avait entendu se référer à la notion de «quantité de référence individuelle», visée à l’article 5, sous j), du règlement n° 1788/2003.

    84      En outre, il résulte de l’article 95, paragraphe 3, du règlement n° 1782/2003 que sont considérées comme étant à la disposition de l’exploitation du cessionnaire les quantités de référence individuelles ayant fait l’objet de cessions temporaires conformément à l’article 16 du règlement n° 1788/2003 au 31 mars de l’année civile. C’est donc à cette date que la situation d’un producteur susceptible de bénéficier de la prime aux produits laitiers doit être appréciée aux fins du calcul de cette prime.

    85      Or, c’est la «quantité de référence disponible» qui, aux termes de l’article 5, sous k), du règlement n° 1788/2003, est déterminée en se référant à ladite date.

    86      Eu égard à ces considérations, il y a lieu de constater que, à l’article 95, paragraphe 1, du règlement n° 1782/2003, le législateur a effectivement visé la notion de «quantité de référence disponible», telle que définie à l’article 5, sous k), du règlement n° 1788/2003.

    87      Il convient ensuite d’examiner si, lorsqu’un producteur s’est vu transférer, au cours de la période de douze mois pertinente, une quantité de référence déjà utilisée par le détenteur précédent au cours de la même période, ladite notion englobe également cette dernière quantité de référence.

    88      La notion de «quantité de référence disponible», définie à l’article 5, sous k), du règlement n° 1788/2003, désigne «la quantité à la disposition du producteur le 31 mars de la période de douze mois pour laquelle le prélèvement est calculé, compte tenu de tous les transferts, cessions, conversions et réallocations temporaires prévus [à ce] règlement et intervenus au cours de cette période de douze mois». Elle joue donc un rôle particulier dans le système dudit règlement et, partant, ne saurait être analysée en dehors de ce contexte.

    89      En effet, il résulte du libellé du cinquième considérant du règlement n° 1788/2003 ainsi que de celui de ses articles 4, second alinéa, et 10, paragraphe 3, sous a), que cette quantité de référence sert uniquement en tant que base de détermination des éventuelles surlivraisons effectuées par les producteurs et, par conséquent, du montant du prélèvement dû, les termes «quantité de référence disponible» n’étant employés dans aucune autre disposition de ce règlement.

    90      À cet égard, si une quantité de référence individuelle ou bien une partie de celle-ci pouvait, en cas de transfert, être utilisée par un producteur pour livrer en exemption de prélèvement pour une période de douze mois et, ensuite, par le producteur bénéficiaire du transfert afin de l’inclure dans sa quantité de référence disponible et de réduire ainsi sa surlivraison pour cette même période, une même quantité de référence serait utilisée à deux reprises pour la même période de douze mois, ce qui irait à l’encontre du principe mentionné au point 50 et rappelé au point 76 du présent arrêt, selon lequel la somme des quantités attribuées aux producteurs par les États membres et de celles attribuées à la réserve nationale ne doit pas dépasser la quantité de référence nationale.

    91      Cette solution est également conforme à l’économie générale du règlement n° 1782/2003, dans la mesure où elle évite le risque qu’une prime aux produits laitiers soit octroyée pour une même période à deux producteurs différents sur la base d’une même quantité de référence disponible.

    92      Dès lors, la notion de quantité de référence disponible ne saurait être dissociée de l’utilisation que les producteurs en font et ne saurait donc englober une quantité de référence individuelle transférée, ou bien une partie de celle-ci, qui a déjà été utilisée par un autre producteur pour la même période de douze mois.

    93      Par conséquent, eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de répondre à la question posée dans l’affaire C‑230/09 que la notion de «quantité individuelle de référence admissible au bénéfice de la prime et disponible dans l’exploitation», contenue dans l’article 95, paragraphe 1, du règlement n° 1782/2003, qui correspond à la notion de «quantité de référence disponible» définie à l’article 5, sous k), du règlement n° 1788/2003, doit être interprétée en ce sens que, lorsqu’un producteur s’est vu transférer, au cours de la période de douze mois pertinente, une quantité de référence sur laquelle du lait avait déjà été livré par le cédant au cours de la même période, elle n’englobe pas, en ce qui concerne le cessionnaire, la partie de la quantité de référence transférée sur laquelle du lait avait déjà été livré en exemption de prélèvement par le cédant.

     Sur les dépens

    94      La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

    Par ces motifs, la Cour (première chambre) dit pour droit:

    1)      L’article 10, paragraphe 3, du règlement (CE) n° 1788/2003 du Conseil, du 29 septembre 2003, établissant un prélèvement dans le secteur du lait et des produits laitiers, tel que modifié par le règlement (CE) n° 2217/2004 du Conseil, du 22 décembre 2004, doit être interprété en ce sens que la réallocation de la partie inutilisée de la quantité de référence nationale affectée aux livraisons doit être effectuée proportionnellement à la quantité de référence individuelle de chaque producteur ayant livré en excès, à savoir celle déterminée à la date du 1er avril de la période de douze mois pertinente, ou selon des critères objectifs à fixer par les États membres. La notion de quantité de référence individuelle, employée à cette disposition, ne permet pas la prise en compte de transferts de quantités de référence intervenus au cours de cette période.

    2)      Une réglementation nationale qui met en œuvre la faculté, prévue à l’article 10, paragraphe 3, du règlement n° 1788/2003, tel que modifié par le règlement n° 2217/2004, de fixer des critères objectifs selon lesquels est effectuée la réallocation de la partie inutilisée de la quantité de référence nationale affectée aux livraisons doit respecter, notamment, les principes généraux du droit de l’Union ainsi que les objectifs poursuivis par la politique agricole commune, et plus particulièrement ceux visés par l’organisation commune des marchés dans le secteur du lait.

    3)      Ces objectifs ne s’opposent pas à une réglementation nationale, adoptée dans le cadre de la mise en œuvre de cette faculté, qui permet aux producteurs ayant livré en excès, lorsqu’ils se sont vu transférer, conformément aux dispositions du règlement n° 1788/2003, tel que modifié par le règlement n° 2217/2004, au cours de la période de douze mois pertinente, une quantité de référence individuelle pour laquelle du lait avait déjà été produit et livré pour cette même période par le producteur qui en disposait précédemment, de participer à cette réallocation en incluant une partie ou la totalité de cette quantité de référence. Les États membres devaient toutefois veiller à ce qu’une telle réglementation ne donne pas lieu à des transferts qui, malgré un respect formel des conditions prévues par ce règlement, auraient eu pour seul but de permettre à certains producteurs ayant livré en excès de se ménager une position plus favorable lors de ladite réallocation.

    4)      La notion de «quantité individuelle de référence admissible au bénéfice de la prime et disponible dans l’exploitation», contenue dans l’article 95, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 1782/2003 du Conseil, du 29 septembre 2003, établissant des règles communes pour les régimes de soutien direct dans le cadre de la politique agricole commune et établissant certains régimes de soutien en faveur des agriculteurs et modifiant les règlements (CEE) n° 2019/93, (CE) n° 1452/2001, (CE) n° 1453/2001, (CE) n° 1454/2001, (CE) n° 1868/94, (CE) n° 1251/1999, (CE) n° 1254/1999, (CE) n° 1673/2000, (CEE) n° 2358/71 et (CE) n° 2529/2001, tel que modifié par le règlement (CE) n° 118/2005 de la Commission, du 26 janvier 2005, qui correspond à la notion de «quantité de référence disponible» définie à l’article 5, sous k), du règlement n° 1788/2003, tel que modifié par le règlement n° 2217/2004, doit être interprétée en ce sens que, lorsqu’un producteur s’est vu transférer, au cours de la période de douze mois pertinente, une quantité de référence sur laquelle du lait avait déjà été livré par le cédant au cours de la même période, elle n’englobe pas, en ce qui concerne le cessionnaire, la partie de la quantité de référence transférée sur laquelle du lait avait déjà été livré en exemption de prélèvement par le cédant.

    Signatures


    * Langue de procédure: l’allemand.

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