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Document 62008CJ0194

    Arrêt de la Cour (troisième chambre) du 1er juillet 2010.
    Susanne Gassmayr contre Bundesminister für Wissenschaft und Forschung.
    Demande de décision préjudicielle: Verwaltungsgerichtshof - Autriche.
    Politique sociale - Directive 92/85/CEE - Mise en œuvre des mesures visant à promouvoir l’amélioration de la sécurité et de la santé des travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes au travail - Articles 5, paragraphe 3, et 11, points 1 à 3 - Effet direct - Travailleuse enceinte dispensée de travailler pendant sa grossesse - Travailleuse en congé de maternité - Droit au paiement d’une indemnité pour astreinte sur le lieu de travail.
    Affaire C-194/08.

    Recueil de jurisprudence 2010 I-06281

    Identifiant ECLI: ECLI:EU:C:2010:386

    Affaire C-194/08

    Susanne Gassmayr

    contre

    Bundesminister für Wissenschaft und Forschung

    (demande de décision préjudicielle, introduite par

    le Verwaltungsgerichtshof (Autriche))

    «Politique sociale — Directive 92/85/CEE — Mise en œuvre des mesures visant à promouvoir l’amélioration de la sécurité et de la santé des travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes au travail — Articles 5, paragraphe 3, et 11, points 1 à 3 — Effet direct — Travailleuse enceinte dispensée de travailler pendant sa grossesse — Travailleuse en congé de maternité — Droit au paiement d’une indemnité pour astreinte sur le lieu de travail»

    Sommaire de l'arrêt

    1.        Politique sociale — Protection de la sécurité et de la santé des travailleurs — Travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes au travail — Directive 92/85

    (Directive du Conseil 92/85, art. 5 à 8 et 11, points 1 à 3)

    2.        Politique sociale — Protection de la sécurité et de la santé des travailleurs — Travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes au travail — Directive 92/85

    (Directive du Conseil 92/85, art. 5, § 3, et 11, point 1)

    3.        Politique sociale — Protection de la sécurité et de la santé des travailleurs — Travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes au travail — Directive 92/85

    (Directive du Conseil 92/85, art. 8 et 11, points 2 et 3)

    1.        L’article 11, points 1 à 3, de la directive 92/85, concernant la mise en oeuvre de mesures visant à promouvoir l’amélioration de la sécurité et de la santé des travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes au travail (dixième directive particulière au sens de l’article 16, paragraphe 1, de la directive 89/391), a un effet direct et engendre, au profit des particuliers, des droits que ceux-ci peuvent faire valoir à l’encontre d’un État membre qui n’a pas transposé cette directive en droit national ou qui l’a transposée de manière incorrecte, droits que les juridictions nationales sont tenues de sauvegarder. Cette disposition met à la charge des États membres, dans des termes non équivoques, une obligation de résultat précise consistant à assurer, à la suite d’un aménagement des conditions de travail, d’une affectation provisoire dans un autre emploi et pendant des périodes d’absence du travail intervenues lors de la grossesse visées aux articles 5 à 7 de la même directive ainsi que pendant le congé de maternité visé à l’article 8 de celle-ci, les droits liés au contrat de travail des travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes ainsi que le maintien d’une rémunération et/ou le bénéfice d’une prestation adéquate.

    (cf. points 46, 53, disp. 1)

    2.        L’article 11, point 1, de la directive 92/85, concernant la mise en oeuvre de mesures visant à promouvoir l’amélioration de la sécurité et de la santé des travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes au travail (dixième directive particulière au sens de l’article 16, paragraphe 1, de la directive 89/391), doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à une réglementation nationale prévoyant qu’une travailleuse enceinte dispensée provisoirement de travailler en raison de sa grossesse a droit à une rémunération équivalente au salaire moyen qu’elle a perçu au cours d’une période de référence antérieure au début de sa grossesse, à l’exclusion de l’indemnité pour astreinte sur le lieu de travail.

    Si cette disposition laisse aux États membres une certaine marge d’appréciation lorsqu’ils définissent les conditions d’exercice et de mise en œuvre du droit à un revenu des travailleuses enceintes provisoirement dispensées de travailler lors et en raison de leur grossesse, l’exercice de cette marge d’appréciation ne saurait, d’une part, porter atteinte à l’objectif de protection de la sécurité et de la santé des travailleuses enceintes poursuivi par la directive 92/85 ni, d’autre part, ignorer le fait que cette dispense constitue une mesure de protection de dernier ressort qui s’impose uniquement lorsqu’une affectation provisoire sur un autre poste est techniquement et/ou objectivement impossible ou ne peut être raisonnablement exigée pour des motifs dûment justifiés.

    Lorsque les États membres et, le cas échéant, les partenaires sociaux choisissent, conformément audit article 11, point 1, d’assurer à une travailleuse enceinte dispensée de travail ou à laquelle il est interdit de travailler en vertu de l’article 5, paragraphe 3, de cette directive un revenu sous la forme d’une rémunération, d’une prestation adéquate ou d’une combinaison des deux, ce revenu doit en tout état de cause être composé du salaire mensuel de base de cette travailleuse ainsi que des éléments de la rémunération ou des primes se rattachant à son statut professionnel - statut qui n’est nullement remis en cause par cette dispense de travail - telles que les primes se rattachant à sa qualité de supérieur hiérarchique, à son ancienneté et à ses qualifications professionnelles.

    (cf. points 67-68, 72, 76, disp. 2)

    3.        L’article 11, points 2 et 3, de la directive 92/85, concernant la mise en œuvre de mesures visant à promouvoir l’amélioration de la sécurité et de la santé des travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes au travail (dixième directive particulière au sens de l’article 16, paragraphe 1, de la directive 89/391), doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à une réglementation nationale prévoyant qu’une travailleuse en congé de maternité a droit à une rémunération équivalente au salaire moyen qu’elle a perçu au cours d’une période de référence antérieure au début dudit congé, à l’exclusion de l’indemnité pour astreinte sur le lieu de travail.

    Conformément à l’article 11, points 2 et 3, de la directive, un employeur doit, lors d’un congé de maternité, assurer le maintien d’une rémunération et/ou le bénéfice d’une prestation adéquate, le revenu garanti aux travailleuses pendant un tel congé, lorsqu’il est versé sous la forme d’une prestation, d’une rémunération ou, le cas échéant, d’une combinaison de celles-ci, devant être adéquat au sens dudit point 3. Lorsqu’une travailleuse est absente du travail parce qu’elle bénéficie d’un congé de maternité, la protection minimale exigée par ledit article 11, points 2 et 3, n’implique donc pas le maintien intégral de la rémunération de l’intéressée ni le paiement de l’indemnité pour astreinte sur le lieu de travail.

    Toutefois, l’article 11, points 2 et 3, de la directive 92/85 ne prévoit qu’une protection minimale à l’égard du droit à un revenu des travailleuses enceintes dispensées de travailler pendant leur congé de maternité en vertu de l’article 8 de cette directive. Aucune disposition de celle-ci n’empêche les États membres ou, le cas échéant, les partenaires sociaux, de prévoir le maintien de tous les éléments de la rémunération et de toutes les primes, y compris l’indemnité pour astreinte sur le lieu de travail, auxquels la travailleuse enceinte avait droit avant sa grossesse et son congé de maternité. Dès lors que le système de rémunération prévu par une réglementation nationale constitue une mesure de protection plus favorable aux travailleuses en congé de maternité que celle exigée par la directive 92/85, l’exclusion de certains éléments de la rémunération du calcul du revenu dû pendant ce congé ne saurait être considérée comme contraire à l’article 11, points 2 et 3, de cette directive.

    (cf. points 85-86, 88, 90-91, disp. 3)







    ARRÊT DE LA COUR (troisième chambre)

    1er juillet 2010 (*)

    «Politique sociale − Directive 92/85/CEE − Mise en œuvre des mesures visant à promouvoir l’amélioration de la sécurité et de la santé des travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes au travail – Articles 5, paragraphe 3, et 11, points 1 à 3 − Effet direct − Travailleuse enceinte dispensée de travailler pendant sa grossesse − Travailleuse en congé de maternité − Droit au paiement d’une indemnité pour astreinte sur le lieu de travail»

    Dans l’affaire C‑194/08,

    ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 234 CE, introduite par le Verwaltungsgerichtshof (Autriche), par décision du 28 mars 2008, parvenue à la Cour le 9 mai 2008, dans la procédure

    Susanne Gassmayr

    contre

    Bundesminister für Wissenschaft und Forschung,

    LA COUR (troisième chambre),

    composée de M. J. N. Cunha Rodrigues, président de la deuxième chambre, faisant fonction de président de la troisième chambre, Mme P. Lindh, MM. A. Rosas, A. Ó Caoimh (rapporteur) et A. Arabadjiev, juges,

    avocat général: M. M. Poiares Maduro,

    greffier: M. K. Malacek, administrateur,

    vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 20 mai 2009,

    considérant les observations présentées:

    –        pour le gouvernement autrichien, par Mme M. Winkler, en qualité d’agent,

    –        pour la Commission des Communautés européennes, par MM. V. Kreuschitz et M. van Beek, en qualité d’agents,

    ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 3 septembre 2009,

    rend le présent

    Arrêt

    1        La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 11, points 1 à 3, de la directive 92/85/CEE du Conseil, du 19 octobre 1992, concernant la mise en œuvre de mesures visant à promouvoir l’amélioration de la sécurité et de la santé des travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes au travail (dixième directive particulière au sens de l’article 16 paragraphe 1 de la directive 89/391/CEE) (JO L 348, p. 1).

    2        Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Mme Gassmayr au Bundesminister für Wissenschaft und Forschung (ministère fédéral des Sciences et de la Recherche, ci-après le «Bundesminister») quant au refus de ce dernier de lui maintenir le bénéfice de l’indemnité pour astreinte sur le lieu de travail lors des périodes au cours desquelles elle était dispensée ou il lui était interdit d’exercer son activité professionnelle en raison de sa grossesse et, par la suite, de son congé de maternité.

     Le cadre juridique

     La réglementation de l’Union

    3        Les neuvième, seizième et dix-huitième considérants de la directive 92/85 sont libellés comme suit:

    «considérant que la protection de la sécurité et de la santé des travailleuses enceintes, allaitantes ou accouchées ne doit pas défavoriser les femmes sur le marché du travail et ne doit pas porter atteinte aux directives en matière d’égalité de traitement entre hommes et femmes;

    […]

    considérant que les mesures d’organisation du travail visant la protection de la santé des travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes n’auraient pas d’effet utile si elles n’étaient pas assorties du maintien des droits liés au contrat de travail, y compris le maintien d’une rémunération et/ou le bénéfice d’une prestation adéquate;

    […]

    considérant que la notion de prestation adéquate en cas de congé de maternité doit être considérée comme un point technique de référence en vue de fixer le niveau de protection minimale et ne devrait en aucun cas être interprétée comme impliquant une analogie de la grossesse à la maladie».

    4        L’article 2 de ladite directive énonce:

    «Aux fins de la présente directive, on entend par:

    a)      ‘travailleuse enceinte’: toute travailleuse enceinte qui informe l’employeur de son état, conformément aux législations et/ou pratiques nationales;

    b)      ‘travailleuse accouchée’: toute travailleuse accouchée au sens des législations et/ou pratiques nationales, qui informe l’employeur de son état, conformément à ces législations et/ou pratiques;

    c)      ‘travailleuse allaitante’: toute travailleuse allaitante au sens des législations et/ou pratiques nationales, qui informe l’employeur de son état, conformément à ces législations et/ou pratiques.»

    5        L’article 4 de la même directive, intitulé «Évaluation et information», prévoit à son paragraphe 1:

    «Pour toute activité susceptible de présenter un risque spécifique d’exposition aux agents, procédés ou conditions de travail, dont une liste non exhaustive figure à l’annexe I, la nature, le degré et la durée de l’exposition, dans l’entreprise et/ou l’établissement concernés, des travailleuses au sens de l’article 2 devront être évalués par l’employeur, directement ou par l’intermédiaire des services de protection et de prévention visés à l’article 7 de la directive 89/391/CEE [du Conseil, du 12 juin 1989, concernant la mise en œuvre de mesures visant à promouvoir l’amélioration de la sécurité et de la santé des travailleurs au travail (JO L 183, p. 1)], afin de pouvoir:

    –        apprécier tout risque pour la sécurité ou la santé ainsi que toute répercussion sur la grossesse ou l’allaitement des travailleuses au sens de l’article 2,

    –        déterminer les mesures à prendre.»

    6        L’article 5 de la directive 92/85, intitulé «Conséquences des résultats de l’évaluation», énonce à ses paragraphes 1 à 3:

    «1.      Sans préjudice de l’article 6 de la directive 89/391/CEE, si les résultats de l’évaluation visée à l’article 4 paragraphe 1 révèlent un risque pour la sécurité ou la santé ainsi qu’une répercussion sur la grossesse ou l’allaitement d’une travailleuse au sens de l’article 2, l’employeur prend les mesures nécessaires pour que, par un aménagement provisoire des conditions de travail et/ou du temps de travail de la travailleuse concernée, l’exposition de cette travailleuse à ce risque soit évitée.

    2.      Si l’aménagement des conditions de travail et/ou du temps de travail n’est pas techniquement et/ou objectivement possible ou ne peut être raisonnablement exigé pour des motifs dûment justifiés, l’employeur prend les mesures nécessaires pour assurer à la travailleuse concernée un changement de poste.

    3.      Si le changement de poste n’est pas techniquement et/ou objectivement possible ou ne peut être raisonnablement exigé pour des motifs dûment justifiés, la travailleuse concernée est, conformément aux législations et/ou pratiques nationales, dispensée de travail pendant toute la période nécessaire pour la protection de sa sécurité ou de sa santé.»

    7        L’article 8 de ladite directive, intitulé «Congé de maternité», dispose à son paragraphe 1:

    «Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que les travailleuses au sens de l’article 2 bénéficient d’un congé de maternité d’au moins quatorze semaines continues, réparties avant et/ou après l’accouchement, conformément aux législations et/ou pratiques nationales.»

    8        L’article 11 de la même directive, intitulé «Droits liés au contrat de travail», est libellé comme suit:

    «En vue de garantir aux travailleuses, au sens de l’article 2, l’exercice des droits de protection de leur sécurité et de leur santé reconnus dans le présent article, il est prévu que:

    1)      dans les cas visés aux articles 5, 6 et 7, les droits liés au contrat de travail, y compris le maintien d’une rémunération et/ou le bénéfice d’une prestation adéquate des travailleuses au sens de l’article 2 doivent être assurés, conformément aux législations et/ou pratiques nationales;

    2)      dans le cas visé à l’article 8, doivent être assurés:

    a)      les droits liés au contrat de travail des travailleuses au sens de l’article 2, autres que ceux visés au point b);

    b)      le maintien d’une rémunération et/ou le bénéfice d’une prestation adéquate des travailleuses au sens de l’article 2;

    3)      la prestation visée au point 2 b) est jugée adéquate lorsqu’elle assure des revenus au moins équivalents à ceux que recevrait la travailleuse concernée dans le cas d’une interruption de ses activités pour des raisons liées à son état de santé, dans la limite d’un plafond éventuel déterminé par les législations nationales;

    4)      les États membres ont la faculté de soumettre le droit à la rémunération ou à la prestation visée au point 1 et au point 2 b) à la condition que la travailleuse concernée remplisse les conditions d’ouverture du droit à ces avantages prévues par les législations nationales.

    Ces conditions ne peuvent en aucun cas prévoir des périodes de travail préalable supérieures à douze mois immédiatement avant la date présumée de l’accouchement.»

     La réglementation nationale

     La loi sur la protection de la maternité

    9        En vertu de l’article 3, paragraphe 1, de la loi de 1979 sur la protection de la maternité (Mutterschutzgesetz 1979, ci-après le «MSchG»), les femmes enceintes ne doivent pas travailler pendant les huit dernières semaines précédant la date prévue pour l’accouchement (ci-après le «délai de huit semaines»).

    10      L’article 3, paragraphe 3, du MSchG dispose que, en dehors du délai de huit semaines, l’obligation de ne pas travailler s’impose également aux femmes enceintes lorsqu’il résulte d’un certificat médical produit par elles, établi par un médecin du travail ou un médecin attaché à l’inspection du travail, que la poursuite de l’activité menacerait la vie ou la santé de la mère ou de l’enfant.

    11      L’article 5 du MSchG, intitulé «Interdictions de travail après l’accouchement», prévoit à son paragraphe 1:

    «Les travailleuses ne doivent pas travailler pendant les huit semaines qui suivent l’accouchement. […] Si le délai de huit semaines précédant l’accouchement a été raccourci, la période de protection postérieure à l’accouchement est augmentée d’autant, dans la limite maximale de seize semaines. […]»

    12      L’article 14 du MSchG, intitulé «Maintien du paiement de la rémunération», dans sa version modifiée publiée aux BGBl. 833/1992 et 434/1995, est libellé comme suit:

    «1.      Si l’application des articles 2, sous b), [paragraphe] 4, 4, sous a), 5, paragraphes 3 et 4, ou de l’article 6 – sous réserve que l’article 10 sous a), paragraphe 3, n’en dispose pas autrement – rend nécessaire une modification du travail au sein de l’entreprise, la travailleuse a droit à la rémunération équivalente au salaire moyen qu’elle a perçu au cours des treize dernières semaines précédant la modification. S’il entre dans cette période des durées pendant lesquelles la travailleuse n’a pas perçu intégralement sa rémunération pour raison de maladie ou de travail à temps réduit, la période de treize semaines est prolongée de ces durées; mais ces durées ne sont pas prises en compte pour le calcul du salaire moyen. […]

    2.      Les travailleuses qui, en vertu de l’article 3, paragraphe 3, ne sont pas en mesure de travailler ainsi que celles qui, en vertu des articles 2, sous b), [paragraphe] 4, 4, sous a), 5, paragraphes 3 et 4, ou de l’article 6 n’ont plus de possibilité de travailler au sein de l’entreprise, ont droit à une rémunération dont le calcul est effectué par analogie avec les dispositions du paragraphe précédent.»

     La loi sur les salaires

    13      En vertu de l’article 3, paragraphes 1 et 2, de la loi de 1956 sur les salaires (Gehaltsgesetz 1956, ci-après le «GehG»), applicable à des agents fédéraux du secteur public tels que la requérante au principal, le fonctionnaire a droit à un traitement mensuel et celui-ci se compose du salaire et d’indemnités éventuelles.

    14      L’article 13 quater du GehG, intitulé «Droits en cas d’incapacité de travail», dispose:

    «(1)      Le fonctionnaire empêché d’exercer ses fonctions à la suite d’un accident (sauf accident du travail) ou d’une maladie a droit, à partir d’une incapacité de travail de 182 jours, à 80 % du montant du traitement mensuel auquel il aurait eu droit en l’absence d’une telle incapacité. L’allocation pour enfants est exclue de cette réduction.

    […]

    (3)      La réduction effectuée au titre du paragraphe 1 est diminuée de 80 % du montant correspondant à la base de référence visée au paragraphe 4, cette somme ne pouvant toutefois être supérieure au montant total de la réduction prévue au titre du paragraphe 1.

    (4)      Par base de référence au sens du paragraphe 3, on entend la somme des indemnités (paiements exceptionnels non compris), des primes, indemnisations et rétributions accessoires (exceptés celles visées aux articles 19, 20 ter ou 20 quater) que l’agent aurait perçues s’il n’avait pas été empêché d’exercer ses fonctions et auxquelles il n’a plus droit compte tenu de son absence du service. Dans le cas des rétributions accessoires non forfaitaires au sens de la première phrase, il convient de fonder les calculs sur un douzième de la somme des rétributions accessoires que l’agent a perçues au cours des douze derniers mois avant le début de la première de toutes les périodes de maladie cumulées conformément au paragraphe 2.

    (5)      La réduction du traitement mensuel prend effet à la date à laquelle commence l’incapacité de travail, au plus tôt toutefois le jour suivant l’expiration du délai de 182 jours ouvrables indiqué au paragraphe 1, et prend fin le jour précédant immédiatement celui auquel l’agent reprend ses fonctions.

    […]

    (8)      Pendant toute la durée d’une interdiction de travail conformément au [MSchG] (tant en ce qui concerne le congé prénatal que le congé postnatal), les paragraphes 1 à 6 ne doivent pas être appliqués. Une telle interdiction de travail suspend l’écoulement de tous les délais énumérés aux paragraphes 1 à 6.»

    15      L’article 15 du GehG, intitulé «Rétributions accessoires», prévoit à ses paragraphes 1, 2 et 5:

    «(1)      Par rétributions accessoires, on entend:

    1.      la prime pour heures supplémentaires (article 16),

    […]

    4.      l’indemnité pour astreinte sur le lieu de travail (article 17 bis),

    […]

    Seules les périodes pour lesquelles il existe également un droit à traitement peuvent ouvrir un droit à une rétribution accessoire.

    (2)      Les rétributions accessoires énumérées au paragraphe 1, points 1, 4 à 6 et 8 à 11, ainsi que les primes pour travail le dimanche et les jours fériés visées au paragraphe 1, point 3, peuvent prendre la forme d’un forfait lorsque les prestations de service fondant un droit à une telle rétribution accessoire sont fournies en permanence ou de manière régulière, de sorte que le calcul d’une moyenne mensuelle est possible (forfait spécifique). La fixation d’un montant forfaitaire requiert l’accord du Chancelier fédéral dans les cas visés au paragraphe 1, points 1, 3 à 6 et 10. La fixation d’un forfait unique pour services similaires en substance (forfait groupé) est autorisée. En ce qui concerne les rétributions accessoires forfaitaires pour heures supplémentaires en dehors des heures normales de service, il convient de déterminer la fraction de la rétribution que représente le supplément octroyé pour heures supplémentaires.

    […]

    (5)      Le droit à des rétributions accessoires forfaitaires n’est pas affecté par un congé au cours duquel le fonctionnaire conserve son droit à un traitement mensuel ou par un accident du travail l’empêchant d’exercer ses fonctions. Si, pour un autre motif, le fonctionnaire reste absent de son poste pendant plus d’un mois, la rétribution accessoire forfaitaire est suspendue à partir du jour suivant la date à laquelle ce délai expire jusqu’à la date du dernier jour de son absence du service.»

    16      L’article 17 bis du GehG, intitulé «Indemnité pour astreinte sur le lieu de travail», dispose:

    «1.      Le fonctionnaire auquel il est fait appel pour un service d’astreinte sur le lieu de travail, en plus des heures normales prévues au tableau de service, a droit pour le temps de disponibilité et la prestation qu’implique le service d’astreinte sur le lieu de travail non pas aux rémunérations prévues aux articles 16 et 17, mais à une indemnité pour astreinte sur le lieu de travail.

    2.      Le montant de l’indemnité pour astreinte sur le lieu de travail est fixé en fonction de la durée dudit service et de la mise à contribution moyenne pendant la durée de ce service […]; son calcul requiert l’accord du Chancelier fédéral.»

    17      Il ressort du dossier que, en exécution de l’article 17 bis du GehG, la République d’Autriche a adopté le règlement relatif au calcul forfaitaire des indemnités d’astreinte sur le lieu de travail pour les médecins des cliniques universitaires (Pauschalierungsverordnung für Journaldienstzulage für Ärzte an Universitätskliniken, BGBl. II, 202/2000), qui, pour la rétribution de chaque heure d’astreinte effectuée sur le lieu de travail, prévoit un pourcentage précis du salaire normalisé.

     Loi relative au statut des fonctionnaires

    18      En vertu de l’article 50, paragraphe 1, de la loi de 1979 relative au statut des fonctionnaires (Beamten-Dienstrechtsgesetz 1979), pour des raisons de service, le fonctionnaire peut être tenu d’être disponible sur le lieu de travail ou dans un autre lieu précis, en dehors des heures normales prévues au tableau de service et, en cas de besoin ou sur demande, de reprendre ses activités de service (heures de permanence, astreinte sur le lieu de travail).

     Le litige au principal et les questions préjudicielles

    19      La requérante au principal a travaillé depuis le 1er janvier 1995 en tant que médecin interne à la clinique universitaire d’anesthésie de l’Université de Graz (ci-après l’«employeur»). Elle percevait une indemnité pour astreinte sur le lieu de travail pour des heures supplémentaires qu’elle effectuait en sus des heures normales prévues au tableau de service.

    20      La requérante au principal s’est arrêtée de travailler à partir du 4 décembre 2002 en application, tout d’abord, de l’article 3, paragraphe 3, du MSchG (interdiction de travail sur production d’un certificat médical indiquant que la poursuite de l’activité professionnelle est susceptible de menacer la vie ou la santé de la mère ou de l’enfant), ensuite, du paragraphe 1 du même article 3 (interdiction de travail pendant le délai de huit semaines), et, enfin, de l’article 5, paragraphe 1, de ladite loi (interdiction de travail pendant les huit semaines suivant l’accouchement).

    21      Par lettre du 9 février 2004, adressée à son employeur, elle a fait valoir que, pendant la durée de l’interdiction de travail qui, du fait de son état de femme enceinte puis en raison de son congé de maternité, l’avait empêchée de fournir des services d’astreinte sur le lieu de travail, elle pouvait néanmoins prétendre au paiement d’une indemnité correspondant à la moyenne des astreintes effectuées sur le lieu de travail. Elle a donc demandé que lui soient versées les sommes afférentes à une telle indemnité.

    22      Par décision du 31 août 2004, son employeur a rejeté cette demande. Selon ce dernier, les rétributions versées au titre des divers services d’astreinte effectués sur le lieu de travail au cours des mois ayant précédé l’interdiction de travail ne relèvent pas de la clause de réserve prévue à l’article 14 du MSchG et ne représentent pas des rétributions accessoires forfaitaires au sens de l’article 15 du GehG. L’employeur a notamment fait valoir que, pendant la durée de l’interdiction de travail, la requérante au principal a perçu sa rémunération, à savoir le salaire mensuel et les primes, conformément à l’article 3, paragraphe 2, du GehG, sans aucune restriction. En revanche, cette dernière n’aurait plus été en droit de fournir des services d’astreinte sur le lieu de travail en raison de l’interdiction de travail dont elle a fait l’objet et, de ce fait, elle n’aurait acquis aucun droit à gratification au titre de services d’astreinte sur le lieu de travail pendant cette période. Selon l’employeur, l’indemnité pour astreinte sur le lieu de travail doit correspondre concrètement, dans son montant, à l’ampleur des services effectivement fournis et ne correspond pas à des rétributions accessoires forfaitaires. En aucun cas une telle indemnité ne pourrait donner lieu à un calcul mensuel sur la base d’une moyenne.

    23      La requérante au principal a introduit un recours devant la juridiction de renvoi contre la décision du Bundesminister du 9 mai 2005 relative au refus du maintien de l’indemnité en cause, en se prévalant du principe du droit de l’Union relatif à l’égalité des rémunérations entre hommes et femmes.

    24      Devant la juridiction de renvoi, le Bundesminister soutient que le maintien sans restriction du paiement du traitement de la requérante au principal correspondant à son grade d’assistante universitaire ainsi que des primes visées à l’article 3, paragraphe 2, du GehG pendant la durée de l’interdiction de travailler dont cette dernière a fait l’objet est pleinement conforme aux articles 141 CE et 1er de la directive 75/117/CEE du Conseil, du 10 février 1975, concernant le rapprochement des législations des États membres relatives à l’application du principe de l’égalité des rémunérations entre les travailleurs masculins et les travailleurs féminins (JO L 45, p. 19). Si l’arrêt du 30 mars 2004, Alabaster (C‑147/02, Rec. p. I‑3101), a précisé le principe de non-discrimination dans le contexte des augmentations de salaire en général, le droit dont se prévaut l’intéressée ne porterait pas sur son salaire mensuel ordinaire, à savoir son salaire de référence, ni sur une augmentation générale de celui-ci.

    25      De même, le défendeur au principal souligne que, contrairement à la prime de fin d’année en cause dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 21 octobre 1999, Lewen (C‑333/97, Rec. p. I‑7243), la présente affaire concerne une indemnité d’astreinte sur le lieu de travail payée en fonction de services effectivement fournis au cas par cas. Une telle indemnité accessoire au salaire viserait exclusivement à compenser le surcroît de travail créé pour le travailleur lorsqu’il est concrètement fait appel à lui pour de tels services, en dehors des heures normales prévues au tableau de service. Dès lors qu’un travailleur n’est pas sollicité pour des services d’astreinte sur le lieu de travail, il ne saurait prétendre à une rétribution à ce titre, et ce indépendamment de ses prestations de travail effectuées dans le cadre de son service normal.

    26      Il n’est pas contesté que la requérante au principal a effectué des astreintes sur le lieu de travail pendant la période de référence, prévue à l’article 14, paragraphe 1, du MSchG, avant que ne débute la période d’interdiction de travail dont elle a fait l’objet en vertu de l’article 3, paragraphe 3, de cette même loi ni qu’elle a perçu pour ces prestations une indemnité calculée conformément à l’article 17 bis du GehG.

    27      Estimant qu’il n’est pas possible d’apporter une réponse claire aux questions soulevées par le litige dont il est saisi au regard, notamment, de l’article 11, points 1 à 3, de la directive 92/85, le Verwaltungsgerichtshof a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:

    «1)      a)     L’article 11, points 1, 2 et 3, de la directive [92/85] est-il doté d’un effet direct?

    b)      Dans l’affirmative, les dispositions précitées doivent-elles se comprendre comme créant, pendant la durée de l’interdiction du travail affectant les femmes enceintes et/ou de leur congé de maternité, un droit au maintien du paiement d’une ‘indemnité pour astreinte sur le lieu de travail’?

    c)      Cela vaut-il alors que l’État membre a décidé d’instaurer un système de maintien d’une ‘rémunération’ qui inclut, en principe, l’ensemble du revenu du travail, à l’exception toutefois de ce que l’on appelle (selon l’article 15 du [GehG]) les rétributions accessoires dues pour services rendus (liés aux tâches effectuées) telles que l’‘indemnité pour astreinte sur le lieu de travail’ ici litigieuse?

    2)      Les dispositions précitées doivent-elles sinon – dans le cas où elles ne produisent pas d’effet direct – être transposées par les États membres de telle sorte qu’une travailleuse qui, pendant la durée de l’interdiction de travail affectant les femmes enceintes et/ou du congé de maternité, ne fournit plus de services d’astreinte sur le lieu de travail, devrait se voir reconnaître un droit au maintien du paiement de l’indemnité correspondant à de tels services?»

     Sur la recevabilité de la demande de décision préjudicielle au regard de l’article 11, point 1, de la directive 92/85

    28      Il convient, à titre liminaire, de constater que la Commission des Communautés européennes met en cause la recevabilité des questions préjudicielles en ce qu’elles concernent l’article 11, point 1, de la directive 92/85, en doutant de leur pertinence pour la solution du litige au principal. Elle estime que cette disposition n’est pas pertinente en l’espèce dès lors que la question qui se pose dans ledit litige concerne non pas les droits réglementés aux articles 5, 6 et 7 de la directive, mais seulement le montant de la rémunération due à la requérante pour la période pendant laquelle elle a été absente de son travail en raison de sa grossesse puis de son congé de maternité.

    29      À cet égard, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, il appartient au seul juge national, qui est saisi du litige et qui doit assumer la responsabilité de la décision juridictionnelle à intervenir, d’apprécier, au regard des particularités de l’affaire, tant la nécessité d’une décision préjudicielle pour être en mesure de rendre son jugement que la pertinence des questions qu’il pose à la Cour (voir, notamment, arrêts du 15 décembre 1995, Bosman, C‑415/93, Rec. p. I‑4921, point 59, ainsi que du 26 juin 2007, Ordre des barreaux francophones et germanophones e.a., C‑305/05, Rec. p. I‑5305, point 18).

    30      Néanmoins, la Cour a estimé ne pas pouvoir statuer sur une question préjudicielle posée par une juridiction nationale lorsqu’il apparaît de manière manifeste que l’interprétation ou l’appréciation de la validité d’une règle de l’Union, demandées par la juridiction nationale, n’ont aucun rapport avec la réalité ou l’objet du litige au principal, lorsque le problème est de nature hypothétique ou encore lorsque la Cour ne dispose pas des éléments de fait ou de droit nécessaires pour répondre de façon utile aux questions qui lui sont posées (voir arrêts Bosman, précité, point 61, et du 13 juillet 2000, Idéal tourisme, C‑36/99, Rec. p. I‑6049, point 20).

    31      En outre, il est indispensable que le juge national donne un minimum d’explications sur les raisons du choix des dispositions du droit de l’Union dont il demande l’interprétation et sur le lien qu’il établit entre ces dispositions et la législation nationale applicable au litige au principal (voir, notamment, arrêt du 6 mars 2007, Placanica e.a., C‑338/04, C‑359/04 et C‑360/04, Rec. p. I‑1891, point 34).

    32      Dans l’affaire au principal, la décision de renvoi constate que la requérante s’est arrêtée de travailler pendant sa grossesse en application de l’article 3, paragraphe 3, du MSchG, disposition selon laquelle une femme enceinte ne peut pas travailler pendant sa grossesse lorsqu’il résulte d’un certificat produit par elle et établi par un médecin du travail ou un médecin attaché à l’inspection du travail que la vie ou la santé de la mère ou de l’enfant seraient mises en danger par la poursuite du travail.

    33      Par ses questions, qui visent l’article 11, points 1 à 3, de la directive 92/85, la juridiction de renvoi cherche à déterminer le revenu auquel cette travailleuse peut prétendre pendant l’arrêt de travail intervenu lors de la grossesse, conformément à l’article 5, paragraphe 3, de cette directive, ainsi que pendant le congé de maternité visé à l’article 8 de celle-ci.

    34      Il convient de rappeler que les articles 4, paragraphe 1, et 5 de la directive 92/85 tendent à garantir une protection particulière aux travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes à l’égard de toute activité susceptible de présenter un risque spécifique pour leur sécurité ou leur santé ou d’avoir des répercussions négatives sur la grossesse ou l’allaitement (arrêt du 27 février 2003, Busch, C‑320/01, Rec. p. I‑2041, point 42). Le législateur de l’Union, en adoptant cette directive, a mis en place un dispositif d’évaluation et de communication des risques, ainsi que l’interdiction pour une telle travailleuse d’exercer certaines activités (voir, en ce sens, arrêt du 1er février 2005, Commission/Autriche, C‑203/03, Rec. p. I‑935, point 44).

    35      Lorsque les résultats de l’évaluation des risques effectuée conformément à l’article 4 de la directive 92/85 révèlent un risque pour la sécurité ou la santé ainsi qu’une répercussion sur la grossesse ou l’allaitement d’une travailleuse, l’article 5, paragraphes 1 et 2, de cette directive prévoit que l’employeur est tenu de procéder à un aménagement provisoire des conditions de travail et/ou du temps de travail ou, si cela ne s’avère pas techniquement ou objectivement possible ou ne peut pas être raisonnablement exigé pour des motifs dûment justifiés, à un changement de poste.

    36      Ce n’est que dans l’hypothèse où un tel changement s’avère également impossible que l’article 5, paragraphe 3, de ladite directive prévoit que la travailleuse concernée est, conformément aux législations et/ou pratiques nationales, dispensée de travailler pendant toute la période nécessaire pour la protection de sa sécurité ou de sa santé (arrêts du 19 novembre 1998, Høj Pedersen e.a., C‑66/96, Rec. p. I‑7327, point 57, ainsi que de ce jour, Parviainen, C‑471/08, non encore publié au Recueil, point 32).

    37      Dans la décision de renvoi, le Verwaltungsgerichtshof a cité les dispositions des articles 4 et 5 de la directive 92/85 relatives à l’évaluation des risques ainsi qu’à la prise de mesures à la suite d’une telle évaluation et a posé les questions préjudicielles relatives à l’article 11, point 1, de cette directive, disposition qui renvoie audit article 5.

    38      Lors de l’audience devant la Cour, en réponse aux questions posées par celle-ci, le gouvernement autrichien a confirmé que, conformément à l’article 3, paragraphe 3, du MSchG, il est interdit aux femmes enceintes de travailler lorsque la poursuite de l’activité professionnelle menace leur santé ou leur vie ou celle de leur enfant. Selon ce gouvernement, il s’agit d’une disposition souvent appliquée aux femmes enceintes âgées de plus de 30 ou 35 ans, permettant un arrêt de travail bien avant le début du congé de maternité normal pour éviter des complications. Il s’agirait non pas d’une interdiction liée à l’activité professionnelle, mais plutôt d’une interdiction qui dépend de la situation personnelle de la femme enceinte et de son état physique.

    39      Il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier si la requérante au principal était, pendant sa grossesse, atteinte d’une maladie ou de complications liées à sa grossesse ou bien si elle a été dispensée de travailler afin d’assurer sa sécurité ou sa santé en raison d’un éventuel risque professionnel mettant en péril celles-ci ou la santé de son enfant.

    40      Il convient, toutefois, de relever que, en tout état de cause, dans ces deux cas de figure, le motif d’un arrêt de travail intervenu pendant la grossesse est identique, à savoir la protection de la sécurité ou la santé de la travailleuse enceinte ou de son enfant. En outre, l’article 11, point 1, de la directive 92/85 est la seule disposition de celle-ci régissant, pendant la grossesse, le revenu auquel a droit une travailleuse enceinte.

    41      Dès lors que, d’une part, il n’apparaît pas de manière manifeste que l’interprétation de l’article 11, point 1, de la directive 92/85 demandée par la juridiction de renvoi n’a aucun rapport avec la réalité ou l’objet du litige au principal et que, d’autre part, la Cour dispose de suffisamment d’éléments pour interpréter les règles établies par cette directive au regard de la situation faisant l’objet du litige au principal, il n’y a pas lieu, contrairement à ce que soutient la Commission, de considérer les questions préjudicielles comme irrecevables en ce qu’elles concernent cette disposition.

    42      Dans ces circonstances, il y a lieu de considérer que la demande de décision préjudicielle, en tant qu’elle concerne l’article 11, point 1, de la directive 92/85, est recevable.

     Sur les questions préjudicielles

     Sur la première question, sous a), relative à l’effet direct de l’article 11, points 1 à 3, de la directive 92/85

    43      Par sa première question, sous a), la juridiction de renvoi demande en substance si l’article 11, points 1 à 3, de la directive 92/85 est susceptible de produire un effet direct et d’engendrer, au profit des particuliers, des droits que ceux-ci peuvent faire valoir à l’encontre d’un État membre qui n’a pas transposé ladite directive en droit national ou qui l’a transposée de manière incorrecte, droits que les juridictions nationales sont tenues de sauvegarder.

    44      Selon la jurisprudence constante de la Cour, dans tous les cas où des dispositions d’une directive apparaissent, du point de vue de leur contenu, inconditionnelles et suffisamment précises, les particuliers sont fondés à les invoquer devant le juge national à l’encontre de l’État, soit lorsque celui-ci s’abstient de transposer dans les délais la directive en droit national, soit lorsqu’il en fait une transposition incorrecte (voir, notamment, arrêts du 19 janvier 1982, Becker, 8/81, Rec. p. 53, point 25; du 17 septembre 1996, Cooperativa Agricola Zootecnica S. Antonio e.a., C‑246/94 à C‑249/94, Rec. p. I‑4373, point 17, ainsi que du 17 juillet 2008, Flughafen Köln/Bonn, C‑226/07, Rec. p. I‑5999, point 23 et jurisprudence citée).

    45      Une disposition du droit de l’Union est inconditionnelle lorsqu’elle énonce une obligation qui n’est assortie d’aucune condition ni subordonnée, dans son exécution ou dans ses effets, à l’intervention d’aucun acte soit des institutions de l’Union, soit des États membres. Elle est suffisamment précise pour être invoquée par un justiciable et appliquée par le juge lorsqu’elle énonce une obligation dans des termes non équivoques (voir, notamment, arrêts Cooperativa Agricola Zootecnica S. Antonio e.a., précité, point 19, ainsi que du 26 octobre 2006, Pohl‑Boskamp, C‑317/05, Rec. p. I‑10611, point 41).

    46      Or, l’article 11, points 1 à 3, de la directive 92/85 satisfait à ces critères, étant donné qu’il met à la charge des États membres, dans des termes non équivoques, une obligation de résultat précise consistant à assurer, à la suite d’un aménagement des conditions de travail, d’une affectation provisoire dans un autre emploi et pendant des périodes d’absence du travail intervenues lors de la grossesse visées aux articles 5 à 7 de la même directive ainsi que pendant le congé de maternité visé à l’article 8 de celle-ci, les droits liés au contrat de travail des travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes ainsi que le maintien d’une rémunération et/ou le bénéfice d’une prestation adéquate.

    47      Certes, l’article 11, point 1, de la directive 92/85 prévoit que, s’agissant des travailleuses enceintes dans les cas visés à l’article 5 de celle-ci − à savoir celles concernées par un aménagement provisoire de leurs conditions de travail, par une affectation provisoire sur un autre poste ou, en dernier ressort, par une dispense de travailler − ce revenu doit être assuré conformément aux législations et/ou pratiques nationales.

    48      Toutefois, la précision et le caractère inconditionnel de l’article 11, point 1, de la directive 92/85 ne sont pas affectés par le renvoi à la législation et aux pratiques nationales. En effet, même si cette disposition laisse aux États membres une certaine marge d’appréciation lorsqu’ils adoptent les modalités de sa mise en œuvre, cette circonstance ne remet pas en cause le caractère précis et inconditionnel de ladite disposition. Les modalités d’une telle mise en œuvre ne peuvent, en aucune façon, porter sur le contenu même du droit consacré par cet article 11, point 1, et ne sauraient ainsi conditionner l’existence ou restreindre la portée de ce droit (voir arrêts Parviainen, précité, point 55, et, en ce qui concerne l’article 10 de la directive 92/85, du 4 octobre 2001, Jiménez Melgar, C‑438/99, Rec. p. I‑6915, points 33 et 34; voir également, par analogie, arrêts du 5 octobre 2004, Pfeiffer e.a., C‑397/01 à C‑403/01, Rec. p. I‑8835, point 105, ainsi que du 15 avril 2008, Impact, C‑268/06, Rec. p. I‑2483, point 67).

    49      De même, l’article 11, point 3, de la directive 92/85 prévoit, en ce qui concerne les travailleuses en congé de maternité visées à l’article 8 de cette directive, que la prestation à laquelle se réfère le point 2, sous b), dudit article 11 est jugée adéquate lorsqu’elle assure des revenus au moins équivalents à ceux que recevrait la travailleuse concernée dans le cas d’une interruption de ses activités pour des raisons liées à son état de santé.

    50      Toutefois, le fait que, aux termes de l’article 11, point 3, de la directive 92/85, ces revenus pourraient être prévus dans la limite d’un plafond éventuel déterminé par la législation nationale, de sorte que le montant d’une telle prestation peut varier d’un État membre à l’autre, ne met pas davantage en cause le caractère précis et inconditionnel de cette disposition ni celui du point 2 du même article. Dès lors que les revenus qui doivent être assurés à une travailleuse en congé de maternité sont établis par la loi, l’application du plafond prévu audit article 11, point 3, n’entame pas l’aptitude des points 2 et 3 de cet article à être appliqués par un juge aux données du litige dont il a à connaître et, par conséquent, n’est pas de nature à ôter au contenu de cette disposition son caractère suffisamment précis (voir, par analogie, arrêt Impact, précité, point 61).

    51      Quant à la faculté laissée aux États membres, conformément à l’article 11, point 4, de la directive 92/85, de soumettre le droit à la rémunération ou à la prestation visée aux points 1 et 2, sous b), de cet article, à la condition que la travailleuse concernée remplisse les conditions d’ouverture du droit à ces avantages prévues par les législations nationales, il convient de relever que ces conditions d’ouverture ne mettent pas en cause la protection minimale prévue audit article 11, points 1 à 3, et sont, en tout état de cause, susceptibles d’un contrôle juridictionnel.

    52      Force est donc de constater que les dispositions de l’article 11, points 1 à 3, de la directive 92/85 remplissent toutes les conditions requises pour produire un effet direct.

    53      Dans ces conditions, il y a lieu de répondre à la première question, sous a), que l’article 11, points 1 à 3, de la directive 92/85 a un effet direct et engendre, au profit des particuliers, des droits que ceux-ci peuvent faire valoir à l’encontre d’un État membre qui n’a pas transposé cette directive en droit national ou qui l’a transposée de manière incorrecte, droits que les juridictions nationales sont tenues de sauvegarder.

     Sur la première question, sous b) et c), relative au droit au paiement de l’indemnité pour astreinte sur le lieu de travail

    54      Par sa première question, sous b) et c), la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 11, points 1 à 3, de la directive 92/85 doit être interprété en ce sens que, pendant la durée de l’arrêt de travail ou de l’interdiction de travailler concernant les travailleuses enceintes et/ou celles en congé de maternité, le droit au paiement de l’indemnité pour astreinte sur le lieu de travail doit être maintenu. À cet égard, la juridiction de renvoi demande notamment si la réponse à cette question est influencée par le fait que la réglementation nationale en cause au principal prévoit le droit de la travailleuse enceinte dispensée de travailler pendant la grossesse ou en congé de maternité à une rémunération équivalente au salaire moyen qu’elle a perçu au cours d’une période de référence antérieure à son absence de travail pendant la grossesse ainsi qu’au début de son congé de maternité, à l’exclusion de l’indemnité pour astreinte sur le lieu de travail.

    55      Il convient de préciser d’emblée que, par cette question, la juridiction de renvoi s’interroge sur l’étendue du droit à un revenu d’une travailleuse enceinte pendant deux périodes distinctes, à savoir, d’une part, la période d’arrêt de travail intervenue lors de la grossesse et, d’autre part, la période d’interdiction de travailler correspondant au congé de maternité.

    56      Eu égard au fait que des dispositions différentes de la directive 92/85 régissent ces deux périodes, il convient de répondre séparément à la question posée par la juridiction de renvoi selon que celle-ci concerne le droit à rémunération d’une travailleuse pendant la grossesse ou pendant le congé de maternité.

     Sur le droit à l’indemnité pour astreinte sur le lieu de travail d’une travailleuse enceinte dispensée de travailler pendant la grossesse en raison de risques pour la sécurité ou pour la santé

    57      Il ressort de l’article 11, point 1, de la directive 92/85 que, dans les cas visés aux articles 5 à 7 de celle-ci, les droits liés au contrat de travail, y compris le maintien d’une rémunération et/ou le bénéfice d’une prestation adéquate des travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes, doivent être assurés conformément aux législations et/ou aux pratiques nationales.

    58      À la différence des travailleuses enceintes visées à l’article 5, paragraphes 1 et 2, de la directive 92/85, qui continuent effectivement à travailler et à effectuer les prestations de travail qui leur sont confiées par leur employeur, une travailleuse enceinte visée au paragraphe 3 de cet article est dispensée de travailler pendant toute la période nécessaire pour assurer la protection de sa sécurité ainsi que de sa santé et, implicitement, celles de son enfant.

    59      Cela étant, toutes les mesures de protection visées à l’article 5 de la directive 92/85 interviennent non pas à la demande de la travailleuse enceinte, mais en raison de son état de grossesse. Elles résultent d’une évaluation des risques et d’une interdiction légale imposée par cet article 5 ainsi que par les dispositions pertinentes du droit national et visent à éviter tout risque pour la sécurité ou pour la santé de cette travailleuse ou de son enfant. Dès lors, si le bilan de l’évaluation des risques que l’employeur est tenu d’effectuer en vertu de l’article 4 de la même directive se révèle différent selon le paragraphe dudit article 5 qui s’avère applicable, l’objectif de protection poursuivi par cette directive à l’égard des travailleuses enceintes visées à ce même article demeure inchangé. En outre, ainsi qu’il ressort du libellé de celui-ci, il incombe à l’employeur de respecter l’ordre explicite selon lequel les mesures de protection prévues à cet article doivent être prises et les conditions régissant cet ordre.

    60      Un examen du libellé de l’article 11, point 1, de la directive 92/85 ainsi que de l’objectif de protection de la sécurité et de la santé des travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes poursuivi par cette directive révèle qu’une travailleuse enceinte telle que la requérante au principal, qui est dispensée provisoirement de travailler et dont la rémunération afférente à la période antérieure à cette dispense se compose d’un salaire de base, de certaines primes et d’une indemnité pour astreinte sur le lieu de travail pour des heures supplémentaires effectuées en sus des heures normales prévues au tableau de service, n’a pas droit, sur le fondement de cette disposition, au paiement d’une telle indemnité.

    61      Tout d’abord, même si, étant fondée sur la relation de travail, l’indemnité pour astreinte sur le lieu de travail constitue une rémunération au sens de l’article 141 CE, il n’en demeure pas moins que l’article 11, point 1, de la directive 92/85, dans la plupart des versions linguistiques existant à la date de son adoption, se réfère au maintien d’«une» rémunération et non de «la» rémunération de la travailleuse concernée.

    62      En outre, l’article 11, point 4, de cette directive prévoit que les États membres ont la faculté de soumettre le droit à la rémunération ou à la prestation visée au point 1 du même article à la condition que la travailleuse concernée remplisse les conditions d’ouverture du droit à ces avantages prévues par les législations nationales.

    63      Ensuite, la Cour a déjà relevé que des éléments factuels relatifs à la nature des travaux effectués et aux conditions dans lesquelles ceux-ci sont accomplis peuvent, le cas échéant, être considérés comme constituant des facteurs objectifs et étrangers à toute discrimination fondée sur le sexe susceptibles de justifier d’éventuelles différences de rémunération entre différents groupes de travailleurs (voir, en ce sens, dans le cadre de l’article 141 CE, arrêt du 30 mars 2000, JämO, C‑236/98, Rec. p. I‑2189, point 52).

    64      Or, dans l’affaire au principal, selon les éléments dont dispose la Cour, l’indemnité pour astreinte sur le lieu de travail est versée aux travailleurs en fonction de la durée du service effectué pendant des heures supplémentaires et de la mise à contribution moyenne, pendant la durée de celui-ci, du travailleur concerné. Il est constant que, durant la période de l’interdiction de travail intervenue lors de sa grossesse, une travailleuse enceinte ne fournit pas les prestations ouvrant droit au paiement de cette indemnité.

    65      Ainsi que la Cour l’a jugé aux points 49 et 61 de l’arrêt Parviainen, précité, s’agissant d’une travailleuse enceinte affectée provisoirement sur un autre poste lors et en raison de sa grossesse en vertu de l’article 5, paragraphe 2, de la directive 92/85, les États membres et, le cas échéant, les partenaires sociaux ne sont pas tenus, en vertu de l’article 11, point 1, de celle-ci, de maintenir, lors de cette affectation provisoire, les éléments de la rémunération ou les primes qui dépendent de l’exercice, par la travailleuse concernée, de fonctions spécifiques dans des conditions particulières et qui visent essentiellement à compenser les inconvénients liés à cet exercice. Il en est de même s’agissant d’une travailleuse enceinte dispensée de travailler en vertu de l’article 5, paragraphe 3, de ladite directive et des dispositions du droit national y afférent.

    66      Enfin, l’article 11, point 1, de la directive 92/85 renvoie explicitement aux législations et/ou aux pratiques nationales.

    67      Ainsi qu’il ressort du point 48 du présent arrêt, ladite disposition laisse aux États membres une certaine marge d’appréciation lorsqu’ils définissent les conditions d’exercice et de mise en œuvre du droit à un revenu des travailleuses enceintes visées à l’article 5, paragraphe 3, de la directive 92/85. Il revient donc aux États membres de définir les modalités d’application dudit droit sans pouvoir, toutefois, subordonner à quelque condition que ce soit la constitution même de ce droit qui résulte directement de cette directive et de la relation de travail entre la travailleuse enceinte et son employeur (voir, par analogie, arrêt du 26 juin 2001, BECTU, C‑173/99, Rec. p. I‑4881, point 53, et, également, arrêt Parviainen, précité, point 55).

    68      L’exercice par les États membres et, le cas échéant, par les partenaires sociaux, de cette marge d’appréciation lors de la détermination du revenu auquel a droit une travailleuse enceinte provisoirement dispensée de travailler lors et en raison de sa grossesse ne saurait, d’une part, porter atteinte à l’objectif de protection de la sécurité et de la santé des travailleuses enceintes poursuivi par la directive 92/85 ni, d’autre part, ignorer le fait que cette dispense constitue une mesure de protection de dernier ressort qui s’impose uniquement lorsqu’une affectation provisoire sur un autre poste est techniquement et/ou objectivement impossible ou ne peut être raisonnablement exigée pour des motifs dûment justifiés.

    69      En effet, ainsi qu’il ressort du seizième considérant de la directive 92/85, les mesures d’organisation du travail visant la protection de la santé des travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes n’auraient pas d’effet utile si elles n’étaient pas assorties du maintien des droits liés au contrat de travail, y compris le maintien d’une rémunération et/ou le bénéfice d’une prestation adéquate.

    70      S’agissant de travailleuses enceintes dispensées, en dernier ressort, de travailler en vertu de l’article 5, paragraphe 3, de cette directive, les États membres ou, le cas échéant, les partenaires sociaux peuvent assurer la perception d’un revenu sous la forme d’une prestation adéquate, d’une rémunération ou d’une combinaison des deux, mais les choix qu’ils opèrent à cet égard et le niveau auquel le revenu est établi ne devraient pas porter atteinte audit effet utile.

    71      Il est manifeste que l’effet utile de la directive 92/85 et les objectifs poursuivis par celle-ci ne seraient pas assurés s’il était loisible à un employeur, en raison de l’établissement d’un niveau réduit de revenu en vertu de l’article 11, point 1, de cette directive, de recourir à l’article 5, paragraphe 3, de celle-ci en vue de réduire le préjudice financier qu’il pourrait encourir en raison de l’absence de la travailleuse enceinte pendant sa grossesse.

    72      Lorsque les États membres et, le cas échéant, les partenaires sociaux choisissent, conformément à l’article 11, point 1, de la directive 92/85, d’assurer à une travailleuse enceinte dispensée de travail ou à laquelle il est interdit de travailler en vertu de l’article 5, paragraphe 3, de cette directive un revenu sous la forme d’une rémunération, d’une prestation adéquate ou d’une combinaison des deux, ce revenu doit en tout état de cause être composé du salaire mensuel de base de cette travailleuse ainsi que des éléments de la rémunération ou des primes se rattachant à son statut professionnel − statut qui n’est nullement remis en cause par cette dispense de travail − telles que les primes se rattachant à sa qualité de supérieur hiérarchique, à son ancienneté et à ses qualifications professionnelles (voir, en ce sens, arrêt Parviainen, précité, point 60).

    73      Toute autre interprétation de l’article 11, point 1, de la directive 92/85 concernant le droit à un revenu des travailleuses enceintes visées à l’article 5 de celle-ci serait de nature à porter atteinte à l’effet utile de cette dernière et à vider cette directive d’une partie importante de sa substance.

    74      Il ressort du dossier dont dispose la Cour que la rémunération à laquelle a droit une travailleuse enceinte ayant fait l’objet d’une interdiction de travailler pendant sa grossesse en vertu de l’article 3, paragraphe 3, du MSchG est calculée conformément à l’article 14, paragraphes 1 et 2, de cette même loi. Selon ces dispositions, la travailleuse enceinte a droit à une rémunération équivalente au salaire moyen qu’elle a perçu au cours des treize dernières semaines précédant l’interdiction de travailler. Toutefois, les indemnités pour astreinte sur le lieu de travail auxquelles la travailleuse avait droit pendant cette période de référence ne sont pas prises en compte lors du calcul de cette rémunération moyenne.

    75      Pour les raisons exposées aux points 60 à 67 du présent arrêt, l’exclusion de l’indemnité pour astreinte sur le lieu de travail de la rémunération à laquelle est en droit de prétendre la travailleuse enceinte dispensée provisoirement de travailler pendant sa grossesse ne saurait être considérée comme contraire à l’article 11, point 1, de la directive 92/85.

    76      Eu égard à ce qui précède, il convient de répondre à la juridiction de renvoi que l’article 11, point 1, de la directive 92/85 doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à une réglementation nationale prévoyant qu’une travailleuse enceinte dispensée provisoirement de travailler en raison de sa grossesse a droit à une rémunération équivalente au salaire moyen qu’elle a perçu au cours d’une période de référence antérieure au début de sa grossesse, à l’exclusion de l’indemnité pour astreinte sur le lieu de travail.

     Sur le droit à l’indemnité pour astreinte sur le lieu de travail d’une travailleuse en congé de maternité

    77      La juridiction de renvoi demande également si l’article 11, points 2 et 3, de la directive 92/85 doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une réglementation nationale prévoyant qu’une travailleuse en congé de maternité a droit à une rémunération équivalente au salaire moyen qu’elle a perçu au cours d’une période de référence antérieure au début dudit congé, à l’exclusion de l’indemnité pour astreinte sur le lieu de travail.

    78      Ainsi qu’il ressort des points 61 et 64 du présent arrêt, étant fondée sur la relation de travail et versée au travailleur en fonction de la durée du service effectué pendant des heures supplémentaires et de la mise à contribution moyenne pendant la durée de celui-ci de ce travailleur, l’indemnité pour astreinte sur le lieu de travail relève de la notion de rémunération figurant à l’article 141 CE.

    79      Toutefois, il ne s’ensuit pas qu’une travailleuse absente du travail en raison d’un congé de maternité a droit, en vertu de l’article 11, points 2 et 3, de la directive 92/85, à toutes les primes et indemnités qu’elle perçoit mensuellement lorsqu’elle est au travail et effectue les prestations qui lui sont confiées par son employeur.

    80      En effet, selon la jurisprudence de la Cour, les travailleuses qui bénéficient d’un congé de maternité prévu par la législation nationale se trouvent dans une situation spécifique qui exige qu’une protection spéciale leur soit accordée, mais qui ne peut pas être assimilée à celle d’un homme ni à celle d’une femme soit qui occupent effectivement leur poste de travail, soit qui bénéficient d’un congé de maladie (voir, en ce sens, arrêts du 13 février 1996, Gillespie e.a., C‑342/93, Rec. p. I‑475, point 17; du 27 octobre 1998, Boyle e.a., C‑411/96, Rec. p. I‑6401, point 40, ainsi que Alabaster, précité, point 46).

    81      Le congé de maternité dont bénéficie la travailleuse vise à assurer, d’une part, la protection de la condition biologique de la femme au cours de sa grossesse ainsi qu’à la suite de celle-ci et, d’autre part, la protection des rapports particuliers entre la mère et son enfant au cours de la période postérieure à la grossesse et à l’accouchement (voir arrêts du 12 juillet 1984, Hofmann, 184/83, Rec. p. 3047, point 25; du 30 avril 1998, Thibault, C-136/95, Rec. p. I‑2011, point 25, ainsi que Boyle e.a., précité, point 41).

    82      Dans ces circonstances, les travailleuses ne peuvent utilement invoquer le bénéfice des dispositions de l’article 141 CE ou de l’article 11, points 2 et 3, de la directive 92/85 pour revendiquer le maintien, pendant leur congé de maternité, de leur rémunération intégrale comme si elles occupaient effectivement, comme les autres travailleurs, leur poste de travail (voir, en ce sens, arrêts précités Gillespie e.a., point 20, ainsi que Alabaster, point 46).

    83      Ainsi qu’il ressort de la directive 92/85 et de la jurisprudence de la Cour en la matière, le législateur de l’Union a souhaité garantir que la travailleuse bénéficie, pendant son congé de maternité, d’un revenu d’un montant au moins équivalent à celui de la prestation prévue par les législations nationales en matière de sécurité sociale en cas d’interruption de ses activités pour des raisons de santé (arrêt Boyle e.a., précité, point 32).

    84      La perception d’un revenu d’un tel niveau doit être assurée aux travailleuses pendant leur congé de maternité, que ce revenu soit versé, conformément à l’article 11, point 2, sous b), de la directive 92/85, sous la forme d’une prestation, d’une rémunération ou d’une combinaison des deux (arrêts précités Boyle e.a., point 33, ainsi que Lewen, point 22).

    85      Conformément à l’article 11, points 2 et 3, de la directive, un employeur doit, lors d’un congé de maternité, assurer le maintien d’une rémunération et/ou le bénéfice d’une prestation adéquate, le revenu garanti aux travailleuses pendant un tel congé, lorsqu’il est versé sous la forme d’une prestation, d’une rémunération ou, le cas échéant, d’une combinaison de celles-ci, devant être adéquat au sens dudit point 3 (voir arrêt Boyle e.a., précité, point 34).

    86      Lorsqu’une travailleuse est absente du travail parce qu’elle bénéficie d’un congé de maternité, la protection minimale exigée par l’article 11, points 2 et 3, de la directive 92/85 n’implique donc pas le maintien intégral de la rémunération de l’intéressée ni le paiement de l’indemnité pour astreinte sur le lieu de travail.

    87      Dans l’affaire au principal, la juridiction de renvoi s’interroge toutefois sur l’incidence qu’est susceptible d’avoir sur le droit à rémunération d’une travailleuse en congé de maternité le fait que l’État membre prévoit le droit de cette travailleuse à une rémunération équivalente au salaire moyen qu’elle a perçu au cours d’une période de référence antérieure au début de son congé de maternité, à l’exclusion toutefois de l’indemnité pour astreinte sur le lieu de travail.

    88      À cet égard, il convient de rappeler que l’article 11, points 2 et 3, de la directive 92/85 ne prévoit qu’une protection minimale à l’égard du droit à un revenu des travailleuses enceintes dispensées de travailler pendant leur congé de maternité en vertu de l’article 8 de cette directive. Aucune disposition de celle-ci n’empêche les États membres ou, le cas échéant, les partenaires sociaux, de prévoir le maintien de tous les éléments de la rémunération et de toutes les primes, y compris l’indemnité pour astreinte sur le lieu de travail, auxquels la travailleuse enceinte avait droit avant sa grossesse et son congé de maternité.

    89      En effet, la directive 92/85, qui a été adoptée conformément à l’article 118 A du traité CE (les articles 117 à 120 du traité CE ont été remplacés par les articles 136 CE à 143 CE), n’empêche pas un État membre, ainsi qu’il ressort de l’article 137, paragraphe 4, CE, de maintenir ou d’établir des mesures de protection plus strictes, à condition que celles-ci soient compatibles avec les dispositions de ce traité (voir, en ce sens, arrêt Jiménez Melgar, précité, point 37).

    90      Dès lors que le système de rémunération prévu par une réglementation nationale telle que celle en cause au principal constitue une mesure de protection plus favorable aux travailleuses en congé de maternité que celle exigée par la directive 92/85, l’exclusion de certains éléments de la rémunération du calcul du revenu dû pendant ce congé ne saurait être considérée comme contraire à l’article 11, points 2 et 3, de cette directive.

    91      En conséquence, il convient de répondre à la juridiction de renvoi que l’article 11, points 2 et 3, de la directive 92/85 doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à une réglementation nationale prévoyant qu’une travailleuse en congé de maternité a droit à une rémunération équivalente au salaire moyen qu’elle a perçu au cours d’une période de référence antérieure au début dudit congé, à l’exclusion de l’indemnité pour astreinte sur le lieu de travail.

     Sur la seconde question, relative aux conséquences de l’absence d’effet direct

    92      Par cette question, la juridiction de renvoi demande si, dans le cas où les dispositions de l’article 11, points 2 et 3, de la directive 92/85 n’auraient pas d’effet direct, elles doivent être transposées par les États membres de telle sorte qu’une travailleuse qui, pendant la durée de l’interdiction de travailler visant les femmes enceintes et/ou en congé de maternité, ne fournit plus de services d’astreinte sur le lieu de travail devrait se voir reconnaître un droit au maintien de l’indemnité correspondant à de tels services.

    93      Compte tenu de la réponse donnée à la première question, sous a), il n’y a pas lieu de répondre à la seconde question.

     Sur les dépens

    94      La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

    Par ces motifs, la Cour (troisième chambre) dit pour droit:

    1)      L’article 11, points 1 à 3, de la directive 92/85/CEE du Conseil, du 19 octobre 1992, concernant la mise en œuvre de mesures visant à promouvoir l’amélioration de la sécurité et de la santé des travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes au travail (dixième directive particulière au sens de l’article 16 paragraphe 1 de la directive 89/391/CEE), a un effet direct et engendre, au profit des particuliers, des droits que ceux-ci peuvent faire valoir à l’encontre d’un État membre qui n’a pas transposé cette directive en droit national ou qui l’a transposée de manière incorrecte, droits que les juridictions nationales sont tenues de sauvegarder.

    2)      L’article 11, point 1, de la directive 92/85 doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à une réglementation nationale prévoyant qu’une travailleuse enceinte dispensée provisoirement de travailler en raison de sa grossesse a droit à une rémunération équivalente au salaire moyen qu’elle a perçu au cours d’une période de référence antérieure au début de sa grossesse, à l’exclusion de l’indemnité pour astreinte sur le lieu de travail.

    3)      L’article 11, points 2 et 3, de la directive 92/85 doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à une réglementation nationale prévoyant qu’une travailleuse en congé de maternité a droit à une rémunération équivalente au salaire moyen qu’elle a perçu au cours d’une période de référence antérieure au début dudit congé, à l’exclusion de l’indemnité pour astreinte sur le lieu de travail.

    Signatures


    * Langue de procédure: l’allemand.

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