Choisissez les fonctionnalités expérimentales que vous souhaitez essayer

Ce document est extrait du site web EUR-Lex

Document 62007CJ0071

    Arrêt de la Cour (deuxième chambre) du 17 juillet 2008.
    Franco Campoli contre Commission des Communautés européennes.
    Pourvoi - Fonctionnaires - Rémunération - Pension - Application du coefficient correcteur calculé en fonction du coût moyen de la vie dans le pays de résidence - Régime transitoire établi par le règlement modifiant le statut des fonctionnaires - Exception d’illégalité.
    Affaire C-71/07 P.

    Recueil de jurisprudence - Fonction publique 2008 II-B-2-00101
    Recueil de jurisprudence 2008 I-05887;FP-I-B-2-00013

    Identifiant ECLI: ECLI:EU:C:2008:424

    ARRÊT DE LA COUR (deuxième chambre)

    17 juillet 2008 ( *1 )

    «Pourvoi — Fonctionnaires — Rémunération — Pension — Application du coefficient correcteur calculé en fonction du coût moyen de la vie dans le pays de résidence — Régime transitoire établi par le règlement modifiant le statut des fonctionnaires — Exception d’illégalité»

    Dans l’affaire C-71/07 P,

    ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice, introduit le 8 février 2007,

    Franco Campoli, ancien fonctionnaire de la Commission des Communautés européennes, demeurant à Londres (Royaume-Uni), représenté par Mes G. Vandersanden, L. Levi et S. Rodrigues, avocats,

    partie requérante,

    les autres parties à la procédure étant:

    Commission des Communautés européennes, représentée par MM. V. Joris et D. Martin, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

    partie défenderesse en première instance,

    Conseil de l’Union européenne, représenté par Mmes M. Arpio Santacruz et I. Šulce, en qualité d’agents,

    partie intervenante en première instance,

    LA COUR (deuxième chambre),

    composée de M. C. W. A. Timmermans, président de chambre, MM. L. Bay Larsen, K. Schiemann, P. Kūris et Mme C. Toader (rapporteur), juges,

    avocat général: M. P. Mengozzi,

    greffier: M. R. Grass,

    vu la procédure écrite,

    ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 8 avril 2008,

    rend le présent

    Arrêt

    1

    Par son pourvoi, M. Campoli demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de première instance des Communautés européennes du 29 novembre 2006, Campoli/Commission (T-135/05, RecFP p. I-A-2-297 et II-A-2-1527, ci-après l’«arrêt attaqué»), par lequel celui-ci a rejeté comme partiellement irrecevable et partiellement non fondé son recours tendant, en substance, à l’annulation de ses bulletins de pension des mois de mai à juillet 2004, en tant qu’ils appliqueraient pour la première fois un coefficient correcteur calculé illégalement en fonction du coût moyen de la vie dans son pays de résidence, et non plus par rapport au coût de la vie dans la capitale de ce pays.

    I — Le cadre juridique

    2

    L’article 82, paragraphe 1, deuxième alinéa, du statut des fonctionnaires des Communautés européennes, dans sa rédaction en vigueur avant le 1er mai 2004 (ci-après l’«ancien statut»), prévoyait que les pensions étaient affectées du coefficient correcteur fixé pour le pays, situé à l’intérieur des Communautés, où le titulaire de la pension justifiait avoir sa résidence.

    3

    Aucune disposition spécifique de l’ancien statut n’arrêtant la méthode de calcul des coefficients correcteurs applicables aux pensions, ces dernières avaient, en pratique, été affectées des coefficients correcteurs calculés pour les rémunérations des fonctionnaires en activité en application de l’article 64, premier alinéa, et de l’annexe XI de ce statut, c’est-à-dire selon une méthode visant à assurer le même pouvoir d’achat quel que soit le lieu d’affectation des fonctionnaires. Cette méthode tendait à refléter la différence moyenne pour un fonctionnaire type entre le coût de la vie dans la capitale du pays de son affectation et le coût de la vie à Bruxelles (Belgique) (ci-après la «méthode ‘capitale’»). Pour ce qui est des pensionnés, l’élément de référence était constitué par le coût de la vie de la capitale du pays de résidence comparé au coût de la vie à Bruxelles.

    4

    Le règlement (CE, Euratom) no 723/2004 du Conseil, du 22 mars 2004, modifiant le statut des fonctionnaires des Communautés européennes ainsi que le régime applicable aux autres agents de ces Communautés (JO L 124, p. 1), a introduit une profonde réforme de l’ancien statut. L’une des innovations apportées par ce règlement concerne la suppression, à partir du 1er mai 2004, des coefficients correcteurs affectant les pensions.

    5

    À titre de motivation, le trentième considérant du règlement no 723/2004 expose:

    «L’intégration accrue de l’Union européenne et la liberté dont disposent les pensionnés pour choisir leur lieu de résidence dans l’Union européenne ont rendu obsolète le système des coefficients correcteurs pour les pensions. Ce système a également engendré des problèmes concernant la vérification du lieu de résidence des pensionnés, qu’il convient de régler. Par conséquent, il y a lieu de supprimer ledit système en prévoyant une transition appropriée pour les pensionnés ainsi que pour les fonctionnaires recrutés avant l’entrée en vigueur du présent règlement.»

    6

    En conséquence, l’article 82, paragraphes 1, deuxième alinéa, et 3, du statut, dans sa rédaction en vigueur à partir du 1er mai 2004 (ci-après le «nouveau statut»), prévoit qu’aucun coefficient correcteur ne s’applique aux pensions non plus qu’aux allocations d’invalidité.

    7

    Cette suppression des coefficients correcteurs ne concerne pas les fonctionnaires qui ont été mis à la retraite avant le 1er mai 2004. Ainsi, l’article 20, paragraphe 1, premier alinéa, de l’annexe XIII du nouveau statut énonce que les pensions de ces fonctionnaires restent affectées du coefficient correcteur fixé pour l’État membre où ils justifient avoir établi leur résidence principale.

    8

    Dans le même temps, l’article 20, paragraphe 1, deuxième alinéa, de l’annexe XIII du nouveau statut a introduit la règle selon laquelle le coefficient correcteur minimal affectant les pensions s’élève à 100 %.

    9

    Selon l’article 20, paragraphe 4, de l’annexe XIII du nouveau statut, le régime transitoire concernant les coefficients correcteurs s’applique également aux allocations d’invalidité.

    10

    Les coefficients correcteurs applicables en vertu de ce régime transitoire sont déterminés, selon les articles 1er, paragraphe 3, sous a), et 3, paragraphe 5, sous b), de l’annexe XI du nouveau statut, par la différence moyenne entre le coût de la vie dans l’État membre de résidence du pensionné en cause et le coût de la vie en Belgique (ci-après la «méthode ‘pays’»), alors que la méthode «capitale» est toujours appliquée pour les rémunérations des fonctionnaires en activité.

    11

    En vue de faciliter, pour les pensionnés concernés, le passage de la méthode «capitale» à la nouvelle méthode «pays», cette dernière est introduite graduellement pendant une période transitoire de quatre années. À cet effet, l’article 20, paragraphe 2, de l’annexe XIII du nouveau statut échelonne la composition proportionnelle du montant des pensions selon le calendrier suivant:

    à partir du 1er mai 2004: 80 % méthode «capitale» et 20 % méthode «pays»;

    à partir du 1er mai 2005: 60 % méthode «capitale» et 40 % méthode «pays»;

    à partir du 1er mai 2006: 40 % méthode «capitale» et 60 % méthode «pays»;

    à partir du 1er mai 2007: 20 % méthode «capitale» et 80 % méthode «pays»;

    à partir du 1er mai 2008: 100 % méthode «pays».

    12

    En outre, l’article 24, paragraphe 2, deuxième alinéa, de l’annexe XIII du nouveau statut prévoit la garantie du montant nominal de la pension nette perçue avant le 1er mai 2004.

    II — Les antécédents du litige

    13

    À partir de sa mise à la retraite au mois de février 2003, le requérant a bénéficié d’une pension d’invalidité au titre des articles 53 et 78 de l’ancien statut qui, en vertu de l’article 82 de ce dernier, était affectée du coefficient correcteur fixé pour le pays où l’intéressé justifiait avoir sa résidence, à savoir le Royaume-Uni, celui-ci s’étant installé à Londres où il avait acheté une maison. À partir du 1er janvier 2004, la pension d’invalidité du requérant a ainsi été affectée du coefficient correcteur fixé à 139,6 % pour le Royaume-Uni. Ce coefficient correcteur a été calculé selon la méthode «capitale», de manière à refléter la différence du coût de la vie entre Londres et Bruxelles.

    14

    Par une lettre datée du 13 mai 2004, l’office «Gestion et liquidation des droits individuels» de la Commission des Communautés européennes a informé le requérant des conséquences sur ses droits à pension de l’entrée en vigueur du nouveau statut. Cette lettre indiquait, notamment, que les droits à pension du requérant n’étaient pas modifiés si sa pension avait été fixée avant le mois de mai 2004.

    15

    Cependant, le requérant s’est rendu compte de ce que son régime pécuniaire subissait des réductions en vertu du nouveau statut, le coefficient correcteur applicable aux pensions versées aux anciens fonctionnaires résidant à Londres étant graduellement supprimé et remplacé par un nouveau coefficient correcteur, inférieur à l’ancien.

    16

    En conséquence, le requérant a, le 20 août 2004, saisi l’autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après l’«AIPN») d’une réclamation, au titre de l’article 90 du statut, dirigée contre la décision de la Commission constituée par les bulletins de pension des mois de mai à juillet 2004. Il a fait valoir que la réduction, selon lui, injustifiée de ses droits à pension, et notamment du coefficient correcteur, violait plusieurs principes généraux du droit. Par décision du 13 décembre 2004, la Commission a rejeté cette réclamation (ci-après la «décision litigieuse»).

    III — L’arrêt attaqué

    17

    Par l’arrêt attaqué, le Tribunal a rejeté le recours du requérant tendant à l’annulation de la décision litigieuse prise ensemble avec, d’une part, la décision de l’AIPN contestée dans la réclamation de l’intéressé et qui a modifié au 1er mai 2004 le coefficient correcteur, l’allocation de foyer et l’allocation scolaire forfaitaire applicables à sa pension ainsi que, d’autre part, ses bulletins de pension en tant qu’ils portent application de cette dernière décision à partir du mois de mai 2004.

    18

    Le Tribunal a d’abord considéré irrecevable le chef de conclusions visant l’allocation de foyer et l’allocation scolaire en raison du fait qu’il ne figurait pas dans la réclamation du requérant, ainsi que les chefs de conclusions tendant à l’annulation de la décision contenue dans les bulletins de pension des mois de mai et de juin 2004, pour défaut d’intérêt à agir. Le Tribunal a, en revanche, reconnu un tel intérêt pour attaquer le bulletin de pension relatif au mois de juillet 2004 étant donné que le coefficient correcteur applicable aux rémunérations des fonctionnaires en activité affectés au Royaume-Uni avait été fixé selon la méthode «capitale» à 142,7 %, avec effet rétroactif pour ce mois, alors que le montant de la pension du requérant restait figé, selon la garantie du montant nominal, à un niveau égal à celui obtenu par application du coefficient correcteur de 139,6 % à cette même date.

    19

    Le Tribunal a ensuite jugé non fondées les sept branches de l’exception d’illégalité de l’article 20 de l’annexe XIII du nouveau statut, constituant l’unique moyen avancé par le requérant, tirées, respectivement, d’une violation des principes de protection de la confiance légitime, de sécurité juridique, de non-rétroactivité et des droits acquis, d’une violation des principes d’égalité de traitement, de proportionnalité et de bonne administration ainsi que d’un détournement de pouvoir et d’une motivation insuffisante.

    20

    En ce qui concerne la branche dudit moyen tirée d’une violation du principe d’égalité de traitement, dont l’appréciation par le Tribunal est contestée dans le cadre du présent pourvoi, quatre arguments avaient été invoqués à l’appui de celle-ci.

    21

    Ainsi le Tribunal a, aux points 99 à 109 de l’arrêt attaqué, écarté le premier argument du requérant selon lequel l’application de la méthode «pays» au calcul des coefficients correcteurs transitoires affectant les pensions des fonctionnaires mis à la retraite avant le 1er mai 2004 violerait le principe d’égalité de traitement, puisque les coefficients correcteurs calculés selon cette nouvelle méthode ne garantiraient pas le maintien d’un pouvoir d’achat équivalent pour tous les pensionnés. Il a d’abord rappelé sa conclusion dans l’arrêt du 26 février 2003, Drouvis/Commission (T-184/00, RecFP p. I-A-51 et II-297, point 60), selon laquelle un coefficient correcteur unique par pays peut constituer un indicateur approprié pour refléter, de façon nécessairement approximative, le coût de la vie à l’intérieur d’un État membre et pour servir convenablement l’objectif consistant à assurer une égalité de traitement entre pensionnés.

    22

    Le Tribunal a également considéré que, en remplaçant la méthode «capitale» par la méthode «pays», le législateur n’a pas excédé les limites fixées à l’exercice de son pouvoir d’appréciation en la matière. Au point 105 de l’arrêt attaqué, il a notamment relevé que celui-ci est libre d’adopter des dispositions plus défavorables que les précédentes pour les fonctionnaires concernés, à condition de fixer une période transitoire d’une durée suffisante. Cette liberté ne saurait non plus être entravée par l’invocation du principe d’égalité du pouvoir d’achat, d’autant plus que le régime transitoire garantit aux pensionnés le maintien du montant nominal de la pension nette perçue avant l’entrée en vigueur du nouveau statut.

    23

    Aux points 110 à 115 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a rejeté le deuxième argument du requérant, tiré d’une discrimination entre les fonctionnaires en activité, auxquels s’applique toujours la méthode «capitale», et les fonctionnaires retraités, en relevant que ces deux catégories de fonctionnaires se trouvent dans des situations objectivement différentes.

    24

    Le troisième argument du requérant, tendant à démontrer l’existence d’une discrimination par rapport aux pensionnés résidant en Belgique en raison du fait que les pensions de ces derniers seraient fixées en tenant compte du coût de la vie à Bruxelles en tant que capitale, a été écarté aux points 116 à 130 de l’arrêt attaqué. À cet égard, le Tribunal a d’abord constaté que, conformément aux dispositions combinées des articles 1er, paragraphe 3, sous a), ii), et 3, paragraphe 5, sous b), de l’annexe XI du nouveau statut, les coefficients correcteurs applicables aux pensions versées dans les États membres autres que le Royaume de Belgique sont déterminés «par référence à la Belgique» et que rien dans le nouveau régime des pensions ne permet de conclure que le législateur ait voulu faire profiter les pensionnés résidant en Belgique d’un coefficient correcteur tenant compte du coût de la vie à Bruxelles en tant que capitale.

    25

    Il a ajouté, aux points 120 à 123 de l’arrêt attaqué, qu’il est vrai que, lors du passage de la méthode «capitale» à la méthode «pays», ni le montant des pensions de base «belges» ni le coefficient correcteur de 100 % appliqué à ce montant n’ont fait l’objet d’une réduction qui aurait tenu compte de la nouvelle méthodologie. À cet égard, la Commission aurait exposé, lors de l’audience, que, en pratique, les statisticiens étaient arrivés à la conclusion que la méthode consistant à mesurer la différence entre les prix à Bruxelles et les prix dans une autre capitale, telle que Londres, fournit une estimation tout à fait valable de la différence entre les prix en Belgique et les prix au Royaume-Uni en ce qui concerne tous les produits, à une exception près, à savoir les loyers. La Commission aurait précisé que, pour déterminer les coefficients correcteurs applicables aux pensions, les statisticiens comparent les loyers moyens dans le pays en question avec les loyers moyens en Belgique. Sur cette base, il pourrait être estimé que «la différence entre Bruxelles et la moyenne de la Belgique est de l’ordre de 2 %». Néanmoins, il n’aurait pas été procédé à la fixation d’un coefficient correcteur de 98 % pour la Belgique.

    26

    Le Tribunal a constaté à cet égard, au point 124 de l’arrêt attaqué, que les explications fournies par la Commission concernent la mise en œuvre du nouveau régime des pensions, telle que réalisée par l’office statistique des Communautés européennes (Eurostat) et finalisée dans les règlements d’adaptation des coefficients correcteurs affectant les pensions, alors que l’exception d’illégalité soulevée par le requérant vise le seul article 20 de l’annexe XIII du nouveau statut. Or, la légalité d’un acte réglementaire communautaire ne saurait dépendre de la manière dont cet acte est appliqué en pratique. Il a ajouté, au point 125 de l’arrêt attaqué, que, en tout état de cause, dans la mesure où la pratique décrite par la Commission favoriserait les pensionnés résidant en Belgique en s’écartant de la nouvelle méthode «pays», il y a lieu de rappeler que le respect du principe d’égalité de traitement doit se concilier avec le respect du principe de légalité, selon lequel nul ne peut invoquer, à son profit, une illégalité commise en faveur d’autrui.

    27

    Enfin, aux points 131 à 140 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a rejeté le quatrième argument, par lequel le requérant invoquait une discrimination par rapport aux pensionnés résidant dans l’un des États membres «peu chers» qui avaient connu un coefficient correcteur inférieur à 100 % avant le 1er mai 2004 et pour lesquels le nouveau régime des pensions a introduit un coefficient correcteur minimal de 100 % avec le résultat que ces pensionnés bénéficieraient d’un coefficient correcteur manifestement supérieur au coût de la vie effectif de leur lieu de résidence.

    28

    Le Tribunal a ainsi retenu, aux points 132 à 135 de l’arrêt attaqué, que cet argument était irrecevable étant donné que le requérant n’avait pas établi qu’il pourrait bénéficier financièrement d’un arrêt déclarant illégale l’application d’un coefficient correcteur minimal de 100 % aux pensions versées aux personnes résidant dans les États membres «peu chers». Il n’aurait notamment pas affirmé que le prétendu «cadeau financier» offert aux pensionnés résidant dans un tel État membre implique nécessairement une perte financière correspondante pour les pensionnés résidant dans un État membre «cher». Par ailleurs, le régime communautaire des pensions reposant non pas sur le modèle d’un fonds de pension mais sur le principe de solidarité, la règle introduisant un coefficient correcteur minimal de 100 % n’aurait juridiquement pas pour effet d’enrichir les pensionnés visés aux dépens de la catégorie de pensionnés à laquelle appartient le requérant.

    29

    Le Tribunal a déclaré, au point 136 de l’arrêt attaqué que, en tout état de cause, l’introduction d’un coefficient correcteur minimal de 100 % ne saurait être qualifiée de manifestement arbitraire ou inadéquate étant donné que cette règle a été adoptée afin de rapprocher autant que possible le régime transitoire, sauvegardant les coefficients correcteurs applicables aux pensions, du régime définitif, qui les supprime. En ce sens, ladite règle ne ferait qu’anticiper, pour un grand nombre d’États membres et à l’égard des pensionnés concernés, la suppression des coefficients correcteurs applicables aux pensions.

    IV — Sur le pourvoi

    30

    Par son pourvoi, M. Campoli demande à la Cour:

    d’annuler l’arrêt attaqué;

    de lui accorder le bénéfice de ses conclusions de première instance, modifiées au regard de l’irrecevabilité de ses demandes concernant l’allocation de foyer et l’allocation scolaire, et, partant, d’annuler la décision de l’AIPN du 13 décembre 2004 rejetant sa réclamation, prise ensemble avec, d’une part, la décision de l’AIPN contestée dans ladite réclamation et qui a modifié au 1er mai 2004 le coefficient correcteur applicable à sa pension ainsi que, d’autre part, ses bulletins de pension en tant qu’ils portent application de cette dernière décision à partir du mois de mai 2004, et

    de condamner la défenderesse à l’ensemble des dépens.

    31

    La Commission, qui a également formé un pourvoi incident, conclut à ce que la Cour:

    à titre principal, rejette le pourvoi comme irrecevable;

    à titre subsidiaire, le rejette dans sa totalité comme non fondé, et

    condamne M. Campoli aux entiers dépens.

    32

    Le Conseil de l’Union européenne demande à la Cour:

    de rejeter le pourvoi comme non fondé, et

    de condamner M. Campoli aux dépens.

    33

    Par son pourvoi, le requérant conteste l’appréciation qu’a faite le Tribunal des premier, troisième et quatrième arguments avancés au soutien de la branche de son moyen tirée d’une violation du principe d’égalité de traitement. En invoquant un moyen unique dans son pourvoi, le requérant invoque, à cet égard, une méconnaissance par le Tribunal du principe d’égalité de traitement, du principe des droits de la défense, du principe d’égalité des parties devant le juge communautaire, de l’obligation de motivation s’imposant aux institutions, de la notion d’intérêt à agir dans le cadre d’une exception d’illégalité et de sa propre obligation de motivation.

    34

    Avant d’examiner le bien-fondé de ce moyen, il convient de statuer sur le pourvoi incident formé par la Commission, dès lors que celui-ci tend à faire déclarer irrecevable le pourvoi introduit par le requérant.

    A — Sur le pourvoi incident

    1. Argumentation des parties

    35

    La Commission estime que le Tribunal aurait dû déclarer d’office irrecevable les premier, troisième et quatrième arguments invoqués au soutien de la branche du moyen tirée de la violation du principe d’égalité de traitement, dès lors qu’ils n’avaient pas été soulevés lors de la phase précontentieuse. Elle fait valoir à cet égard que, dans sa réclamation précontentieuse, le requérant avait soulevé, dans le cadre de cette branche, seulement le deuxième argument, fondé sur la discrimination entre fonctionnaires et pensionnés, et que celui-ci était distinct des trois autres arguments invoqués ultérieurement.

    36

    La Commission précise, dans son mémoire en duplique, que son pourvoi incident a pour objet de faire déclarer irrecevable le pourvoi, puisque celui-ci se réfère exclusivement aux trois arguments irrecevables. Elle admet que, même formulé de la sorte, l’objet de son pourvoi incident ne correspond pas intégralement au libellé de l’article 56 du statut de la Cour de justice, mais elle estime que la Cour est toutefois tenue d’examiner d’office la question de savoir si le Tribunal a commis une erreur de droit en ne déclarant pas d’office irrecevables les trois arguments en cause.

    37

    Selon le requérant, le pourvoi incident est irrecevable étant donné que, contrairement à ce qu’exige ledit article 56, la Commission n’a pas succombé en ses conclusions en première instance. Elle n’aurait notamment pas conclu à l’irrecevabilité du recours et le Tribunal aurait fait entièrement droit à ses conclusions en rejetant ce dernier comme non fondé. Par ailleurs, bien que formant un pourvoi incident, la Commission ne conclurait pas à l’annulation totale ou partielle de l’arrêt attaqué.

    38

    À titre subsidiaire, le requérant estime que le pourvoi incident est non fondé. Les premier, troisième et quatrième arguments en question seraient, en effet, rattachés à la violation du principe d’égalité de traitement invoquée dans sa réclamation. Dans la décision litigieuse, la Commission, elle-même, aurait clairement identifié son argumentation comme constituant une critique du fait que «les habitants d’une région ‘chère’ se voient dès lors privés d’un pouvoir d’achat équivalent à ceux ayant établi leur résidence dans des régions ‘moins chères’» et que «les pensionnés ne bénéficieront plus du même pouvoir d’achat selon leur résidence». Le rapport d’audience du Tribunal exposerait clairement les quatre arguments invoqués par le requérant au soutien de l’argumentation tirée de la violation du principe de non-discrimination sans que la Commission ait critiqué ce rapport ou la recevabilité de ces arguments.

    2. Appréciation de la Cour

    39

    En vertu de l’article 56, deuxième alinéa, du statut de la Cour de justice, le pourvoi peut être formé par toute partie ayant partiellement ou totalement succombé en ses conclusions.

    40

    Or, ainsi que la Commission l’affirme elle-même dans son mémoire en duplique, l’arrêt attaqué fait entièrement droit à ses conclusions présentées devant le Tribunal. Il convient notamment de faire observer que, devant le Tribunal, tout en relevant l’irrecevabilité des demandes du requérant afférentes à l’allocation de foyer et à l’allocation scolaire, au motif qu’elles ne figuraient pas dans la réclamation, la Commission n’a aucunement excipé de l’irrecevabilité de la branche tirée de la violation du principe d’égalité de traitement.

    41

    Par ailleurs, ainsi qu’il ressort notamment de l’article 61 du statut de la Cour de justice, tout pourvoi doit tendre à l’annulation totale ou partielle d’un arrêt du Tribunal, la Cour pouvant, en cas d’annulation, soit statuer elle-même définitivement sur le litige, lorsque celui-ci est en état d’être jugé, soit renvoyer l’affaire devant le Tribunal pour qu’il statue.

    42

    Or, en l’espèce, le pourvoi incident de la Commission tend à obtenir non pas une annulation de l’arrêt attaqué, mais bien une déclaration d’irrecevabilité du pourvoi principal introduit par le requérant.

    43

    Il s’ensuit que ledit pourvoi incident doit être rejeté comme irrecevable.

    B — Sur le pourvoi principal

    1. Sur l’appréciation faite par le Tribunal du premier argument, portant sur une violation du principe d’égalité de traitement et tiré de ce que la nouvelle méthode «pays» ne garantit pas un pouvoir d’achat équivalent pour tous les pensionnés

    a) Argumentation des parties

    44

    Le requérant fait valoir que, en rejetant ce premier argument, le Tribunal a méconnu le principe d’égalité de traitement et l’obligation de motivation qui incombe au juge communautaire. En fait, l’arrêt attaqué placerait le large pouvoir d’appréciation dont jouit le législateur au-dessus de ce principe. Le point 105 de cet arrêt serait déterminant à cet égard. L’existence d’une période de transition d’une durée suffisante, mise en avant par le Tribunal, serait un élément opérant en vue de l’examen du respect des principes de sécurité juridique, de non-rétroactivité et des droits acquis, mais serait étranger à l’examen de la légalité d’une mesure au regard du principe d’égalité de traitement.

    45

    Le requérant souligne, par ailleurs, qu’un coefficient correcteur fixé selon la méthode «pays» méconnaît le principe d’égalité de traitement en tant qu’il ne permet pas de refléter, ne serait-ce qu’approximativement, le coût de la vie à l’intérieur d’un pays et de servir ainsi l’objectif d’égalité du pouvoir d’achat entre anciens fonctionnaires. La nouvelle méthode pénaliserait, en fait, les pensionnés qui résident dans la capitale ou dans d’autres villes ou régions «chères» et qui se trouveraient dans l’impossibilité de faire face aux coûts liés à leur lieu de résidence.

    46

    Selon la Commission, le point 105 de l’arrêt attaqué ne fait que tirer les conséquences de la marge d’appréciation dont dispose le législateur dans la matière concernée. Dans ce point, le Tribunal aurait notamment jugé que l’égalité du pouvoir d’achat comme forme particulière du principe d’égalité ne serait pas violée par le changement de méthode en question en l’absence de différenciation arbitraire ou manifestement inadéquate dépassant la marge d’appréciation dont bénéficie le législateur, d’autant plus que le régime transitoire garantit le maintien du montant nominal de la pension nette.

    47

    Le Conseil soutient que le requérant confond le principe d’égalité de traitement et le «principe d’équivalence du pouvoir d’achat». En effet, le point 105 de l’arrêt attaqué se référerait non pas au principe d’égalité de traitement en général, mais au «principe d’équivalence du pouvoir d’achat», qui ne serait qu’un des moyens possibles d’assurer l’égalité de traitement. Par ailleurs, tout autant que la méthode «capitale», la méthode «pays» respecterait le principe d’égalité de traitement et ne porterait pas davantage atteinte à la liberté de circulation des pensionnés. En effet, l’ancien système aurait privilégié, dans la même mesure que le système actuel, le choix des lieux où la vie est moins chère à l’intérieur d’un État et aurait ainsi conditionné le choix du lieu de résidence.

    b) Appréciation de la Cour

    48

    Par ses critiques de l’appréciation portée par le Tribunal sur l’argument tiré d’une violation du principe d’égalité de traitement faute, pour la nouvelle méthode «pays», de garantir un pouvoir d’achat équivalent pour tous les pensionnés, le requérant vise, en substance, à faire déclarer que c’est à tort que le Tribunal a jugé que le législateur communautaire, en substituant la méthode «pays» à la méthode «capitale» aux fins de la fixation des coefficients correcteurs dans le cadre du régime des pensions transitoire, n’a pas excédé les limites de son pouvoir d’appréciation en la matière.

    49

    Pour apprécier le bien-fondé de cette argumentation, il convient d’abord d’établir si l’application aux pensions d’un coefficient correcteur unique par pays, calculé selon la méthode «pays», est compatible ou non avec le principe d’égalité de traitement.

    50

    À cet égard, il convient de rappeler que le principe d’égalité de traitement ou de non-discrimination exige que des situations comparables ne soient pas traitées de manière différente et que des situations différentes ne soient pas traitées de manière égale, à moins qu’un tel traitement ne soit objectivement justifié (arrêts du 10 janvier 2006, IATA et ELFAA, C-344/04, Rec. p. I-403, point 95, et du 11 septembre 2007, Lindorfer/Conseil, C-227/04 P, Rec. p. I-6767, point 63).

    51

    En ce qui concerne les articles de l’ancien statut prévoyant l’application d’un coefficient correcteur aux rémunérations et aux pensions des fonctionnaires, la Cour a déjà jugé qu’il ne saurait être soutenu qu’une disposition ayant pour finalité de maintenir un pouvoir d’achat équivalent pour tous les fonctionnaires à la retraite quel que soit le lieu de leur résidence soit incompatible avec le principe d’égalité de traitement (voir ordonnance du 29 avril 2004, Drouvis/Commission, C-187/03 P, points 25 et 26 ainsi que jurisprudence citée).

    52

    Or, ainsi que l’a relevé à juste titre le Tribunal aux points 99 à 101 de l’arrêt attaqué, un système de coefficient correcteur, de par sa nature même, ne peut assurer une égalité de traitement absolue entre les anciens fonctionnaires, étant donné qu’il est manifestement impossible de tenir compte du coût de la vie et de ses variations dans toutes les localités des différents États membres où les pensionnés sont susceptibles de fixer leur résidence, et d’appliquer, pour chacune de ces localités, un coefficient correcteur spécifique. Dans ces conditions, un coefficient correcteur unique par pays peut constituer un indicateur approprié pour refléter, de façon nécessairement approximative, le coût de la vie à l’intérieur d’un État membre.

    53

    Quant à la méthode devant être choisie pour calculer un tel coefficient correcteur unique par pays, il est constant, ainsi que l’a relevé M. l’avocat général aux points 69 et 70 de ses conclusions, que, quel qu’il soit, le système choisi pourra tout au plus constituer une approximation raisonnable du coût de la vie effectif supporté par chaque ancien fonctionnaire, et que, dans cette optique, tant la méthode «capitale» que la méthode «pays» présentent des avantages et des inconvénients.

    54

    Au vu du caractère nécessairement approximatif d’un coefficient correcteur unique par pays, le but de garantir une certaine équivalence du pouvoir d’achat entre les anciens fonctionnaires résidant dans les différents États membres doit, en effet, être considéré comme respecté dans la mesure où ce coefficient correcteur unique est fixé selon des critères qui en garantissent la représentativité. Or, il est incontestable que la méthode «pays» reflète le coût de la vie à l’intérieur d’un État d’une manière au moins aussi représentative que la méthode «capitale».

    55

    La méthode «pays» constituant, dès lors, un mode de calcul approprié pour assurer, dans la mesure du possible, l’équivalence du pouvoir d’achat entre les pensionnés, le Tribunal n’a pas commis d’erreur de droit en jugeant que le législateur communautaire n’a pas violé le principe d’égalité de traitement en substituant la méthode «pays» à la méthode «capitale» aux fins de la fixation des coefficients correcteurs dans le cadre du régime des pensions transitoire.

    56

    En ce qui concerne les critiques dirigées par le requérant contre le point 105 de l’arrêt attaqué, il convient de constater que celles-ci se révèlent infondées. Il résulte du raisonnement développé aux points 99 à 104 de l’arrêt attaqué que, contrairement à ce que soutient le requérant, le Tribunal a effectivement répondu par la négative à la question de savoir si la nouvelle méthode de fixation des coefficients correcteurs constitue une différenciation arbitraire ou manifestement inadéquate au regard de l’objectif poursuivi. Ce faisant, il n’a nullement retenu que la seule limite au pouvoir du législateur est constituée par l’existence d’une période transitoire suffisante, ainsi que le suggère le requérant, mais a, au contraire, examiné, suivant un raisonnement analogue à celui développé aux points 51 à 54 du présent arrêt, la question de savoir si le législateur communautaire avait violé le principe d’égalité de traitement en substituant la méthode «pays» à la méthode «capitale». À la lecture, dans son contexte, du point contesté, il est donc évident que le raisonnement du Tribunal n’est pas fondé sur la prémisse selon laquelle, dans le cadre de l’aménagement du régime des pensions, le législateur communautaire serait lié par les principes de sécurité juridique et des droits acquis, mais non par le principe d’égalité de traitement.

    57

    Il résulte de ce qui précède que la première branche du moyen unique du pourvoi, tirée d’une violation du principe d’égalité de traitement et de l’obligation de motivation incombant au juge communautaire, doit être écartée comme non fondée.

    2. Sur l’appréciation par le Tribunal du quatrième argument, tiré de l’existence d’une discrimination par rapport aux pensionnés résidant dans l’un des États membres «peu chers», en raison de l’introduction d’un coefficient correcteur minimal de 100 %

    a) Argumentation des parties

    58

    Le requérant soutient que, contrairement à ce qui a été jugé aux points 132 à 135 de l’arrêt attaqué, il justifie d’un intérêt à agir. Il conteste le fait qu’un tel intérêt ne puisse résulter que d’un enrichissement des pensionnés résidant dans un État membre «peu cher» au détriment des pensionnés résidant dans un État membre «cher», en soulignant que sa critique est fondée sur une atteinte au «principe d’égalité du pouvoir d’achat». À supposer même qu’il faille s’interroger sur les relations existant entre les prestations payées à un groupe de pensionnés et celles qui sont versées à un autre groupe, il conviendrait de constater que le coût engendré par l’application d’un coefficient correcteur minimal de 100 % est «compensé» par l’introduction de la méthode «pays».

    59

    En ce qui concerne la constatation faite par le Tribunal au point 136 de l’arrêt attaqué, selon laquelle l’introduction d’un coefficient correcteur minimal de 100 % ne saurait en tout état de cause être qualifiée de manifestement arbitraire ou inadéquate, le requérant fait valoir que la simple référence au large pouvoir du législateur et à l’objectif de rapprocher le régime transitoire du régime définitif ne saurait justifier cette conclusion. En outre, aucun régime transitoire n’aurait été établi pour les pensionnés résidant dans les pays «peu chers». La différenciation résultant du fait que la règle instituant un coefficient correcteur minimal accorde à ces pensionnés le bénéfice de prestations qui dépassent substantiellement le coût de la vie sur leur lieu de résidence ne trouverait aucune justification objective dans la nature et les caractéristiques du régime transitoire.

    60

    La Commission et le Conseil estiment que c’est à bon droit que le Tribunal a déclaré l’argument du requérant irrecevable. Ils font valoir, à cet égard, que, même si le Tribunal avait jugé cet argument fondé, il s’en serait suivi pour les pensionnés résidant dans les États membres «peu chers» une réduction du montant de leur pension, ce qui n’aurait en rien modifié la situation du requérant. À titre subsidiaire, ils soutiennent que, en opérant l’alignement du régime transitoire sur le régime définitif pour un grand nombre d’États membres et en faveur des pensionnés résidant dans des États membres «peu chers», le législateur a fait un choix cohérent et adéquat. Le Conseil souligne que, pour ces derniers, il n’y avait pas d’attentes légitimes à sauvegarder, ce qui explique que, à leur égard, des mesures transitoires n’étaient pas nécessaires.

    b) Appréciation de la Cour

    61

    Les critiques des motifs de l’arrêt attaqué par lesquels le Tribunal a rejeté l’argument du requérant tiré d’une discrimination par rapport aux pensionnés résidant dans l’un des États membres «peu chers», résultant de l’introduction d’un coefficient correcteur minimal de 100 %, visent tant l’appréciation par le Tribunal de la recevabilité de cet argument que l’examen de cet argument au fond. En effet, le requérant tend à démontrer que, contrairement à ce qu’a jugé le Tribunal, cet argument est recevable et fondé.

    62

    Avant de répondre à ces critiques, il convient d’examiner l’exception d’irrecevabilité soulevée par la Commission. Cette dernière fait valoir que le Tribunal aurait dû déclarer d’office l’argument irrecevable étant donné qu’il avait été avancé par le requérant seulement au stade de la réplique, dans le cadre de la procédure de première instance, de sorte qu’il s’agit d’un argument nouveau.

    63

    À cet égard, il suffit de constater que, comme l’a relevé M. l’avocat général aux points 103 et 104 de ses conclusions, l’argument en question figurait, ne fût-ce que sous une forme embryonnaire, dans les développements de la requête consacrés au détournement de pouvoir ainsi qu’à une violation du principe de proportionnalité et de l’obligation de motivation. Or, il résulte de la jurisprudence qu’un moyen qui constitue une amplification d’un moyen énoncé antérieurement, directement ou implicitement, dans la requête introductive d’instance doit être considéré comme recevable (voir, en ce sens, arrêts du 19 mai 1983, Verros/Parlement, 306/81, Rec. p. 1755, point 9, et du 26 avril 2007, Alcon/OHMI, C-412/05 P, Rec. p. I-3569, points 38 à 40).

    64

    Quant au bien-fondé des critiques du requérant, il convient d’abord d’examiner celles qui sont formulées à l’égard du point 136 de l’arrêt attaqué, par lequel le Tribunal, après avoir conclu à l’irrecevabilité de l’argument en question pour défaut d’intérêt à agir du requérant, a jugé que, en tout état de cause, l’introduction d’un coefficient correcteur minimal de 100 % ne saurait être qualifiée de manifestement arbitraire ou d’inadéquate étant donné que cette règle a été adoptée afin de rapprocher autant que possible le régime transitoire, sauvegardant les coefficients correcteurs applicables aux pensions, du régime définitif, qui les supprime. En effet, c’est seulement dans l’hypothèse où cette constatation serait entachée d’une erreur de droit que la présente branche du moyen invoqué par le requérant pourrait finalement prospérer. Or, tel n’est pas le cas.

    65

    Ainsi que l’a relevé à bon droit le Tribunal, l’introduction, dans le cadre du régime transitoire, d’un coefficient correcteur minimal de 100 % ne fait qu’anticiper, pour une partie des pensionnés, la suppression des coefficients correcteurs prévue par le régime définitif. C’est donc dans cette perspective que la conformité du régime transitoire avec le principe d’égalité de traitement doit être analysée.

    66

    Or, force est de constater que la décision du législateur communautaire de réformer le régime des pensions en supprimant les coefficients correcteurs applicables à ces dernières n’est pas incompatible avec le principe d’égalité de traitement. S’il est vrai que l’ancien régime des pensions, fondé sur un système de coefficients correcteurs et, par conséquent, sur une certaine compensation du pouvoir d’achat selon l’État membre de résidence du pensionné, constituait un moyen approprié pour mettre en œuvre ledit principe, il ne saurait être inféré de cela que tout autre système est incompatible avec ce même principe.

    67

    En effet, ainsi que l’a relevé à juste titre le Conseil, un régime de pensions visant l’équivalence du pouvoir d’achat est seulement l’un des moyens possibles d’assurer le principe d’égalité de traitement. Ce principe est tout autant respecté par un système selon lequel les pensionnés reçoivent, à contribution équivalente, une pension nominale égale, ce qui est d’ailleurs, ainsi que l’a constaté la Commission, en règle générale le cas des régimes de retraite existant dans les États membres et dans d’autres organisations internationales.

    68

    Étant donné que le régime des pensions définitif résultant du nouveau statut, en tant qu’il ne poursuit plus l’objectif de garantir une certaine équivalence du pouvoir d’achat entre les pensionnés indépendamment de leur lieu de résidence, est, dès lors, compatible avec le principe d’égalité de traitement, le régime transitoire, qui ne fait qu’anticiper le principe d’une pension au montant «unique» au profit des pensionnés pour lesquels ce principe est favorable, ne saurait être constitutif d’une discrimination.

    69

    Il convient donc de constater que c’est à bon droit que le Tribunal a jugé non fondé l’argument du requérant tiré d’une discrimination par rapport aux pensionnés résidant dans l’un des États membres «peu chers» du fait de l’introduction, par le régime transitoire, d’un coefficient correcteur minimal de 100 %. Dans ces conditions, il n’y a plus lieu, pour la Cour, de se prononcer sur l’objection tirée de ce que ledit argument serait irrecevable en raison d’un défaut d’intérêt à agir du requérant.

    70

    Il résulte de ce qui précède que la présente branche du moyen unique, tirée d’une violation du principe d’égalité de traitement et de la notion d’intérêt à agir, doit être rejetée.

    3. Sur l’appréciation par le Tribunal du troisième argument, portant sur une discrimination par rapport aux pensionnés résidant en Belgique

    a) Argumentation des parties

    71

    Le requérant soutient à cet égard que, contrairement à ce que retient l’arrêt attaqué, le nouveau régime des pensions comporte un rattachement au coût de la vie à Bruxelles. Ainsi, l’article 3 de l’annexe XI du nouveau statut préciserait que l’adaptation des rémunérations et des pensions repose sur une série d’éléments visés à l’article 1er de la même annexe, au titre desquels figure l’évolution du coût de la vie à Bruxelles (indice international de Bruxelles). Le fait qu’aucun coefficient correcteur n’est applicable pour la Belgique, ainsi que le prévoit l’article 3, paragraphe 5, de l’annexe XI du nouveau statut, signifierait que les pensions sont affectées, de facto, d’un coefficient correcteur de 100 %. Partant, les revenus des pensionnés résidant en Belgique seraient fixés compte tenu uniquement du coût de la vie à Bruxelles, capitale de cet État membre.

    72

    Le requérant critique, en outre, les motifs de l’arrêt attaqué, exposés tant au point 124 de ce dernier, selon lesquels «la légalité d’un acte réglementaire communautaire ne saurait dépendre de la manière dont cet acte est appliqué en pratique», qu’au point 125 de cet arrêt, où il est fait référence à la jurisprudence en vertu de laquelle le respect du principe d’égalité de traitement doit se concilier avec le respect du principe de légalité selon lequel nul ne peut invoquer, à son profit, une illégalité commise en faveur d’autrui. Le requérant invoque à cet égard une violation des principes d’égalité de traitement et d’égalité des parties devant le juge communautaire, des droits de la défense, ainsi que de l’obligation de motivation incombant au juge communautaire et aux institutions.

    73

    La Commission et le Conseil renvoient au libellé des articles 1er, paragraphe 3, sous a), et 3, paragraphe 5, deuxième alinéa, sous b), de l’annexe XI du statut en soulignant que le premier de ces articles dispose qu’Eurostat calcule les parités économiques «par référence à la Belgique». Le nouveau régime ne comporterait donc aucun rattachement au coût de la vie à Bruxelles. La mise en pratique du régime transitoire résulterait des règlements d’application du Conseil qu’Eurostat ne ferait que mettre en œuvre. Le requérant se serait privé de contester ces règlements d’application en n’excipant que de l’illégalité du règlement no 723/2004.

    b) Appréciation de la Cour

    74

    Comme il a été relevé aux points 68 et 69 du présent arrêt ainsi qu’au point 136 de l’arrêt attaqué, l’introduction, par le régime transitoire, d’un coefficient correcteur minimal de 100 % n’implique pas une violation du principe d’égalité de traitement. Dans ces conditions, force est de constater que l’application, en droit ou en fait, d’un coefficient correcteur de 100 % aux pensionnés résidant en Belgique ne saurait être constitutive d’une telle violation.

    75

    En effet, même dans l’hypothèse où le coût de la vie en Belgique, calculé selon la méthode «pays», serait inférieur à celui qui est pris en considération pour le calcul du traitement de base, avec pour résultat que, en appliquant la logique propre à l’ancien régime des pensions, il aurait dû être procédé à la fixation d’un coefficient correcteur inférieur à 100 %, le fait que les pensionnés résidant en Belgique bénéficient, à l’instar, du reste, de l’ensemble des pensionnés résidant dans l’un des États membres «peu chers» dont il est question au point 69 du présent arrêt, du montant entier de la pension de base et donc d’un pouvoir d’achat supérieur à celui du requérant ne constitue pas, dans l’optique du régime transitoire, une discrimination.

    76

    Il résulte de ce qui précède que, même si la motivation de l’arrêt attaqué, notamment celle des points 124 et 125 de ce dernier, devait être entachée d’une erreur de droit, comme l’affirme le requérant, la constatation d’une telle erreur ne serait pas de nature à entraîner l’annulation de cet arrêt dès lors que l’argument du requérant tiré d’une discrimination par rapport aux pensionnés résidant en Belgique doit, en tout état de cause, être écarté pour les motifs énoncés aux points 74 et 75 du présent arrêt lesquels, en outre, ont également été exposés par le Tribunal dans l’arrêt attaqué.

    77

    Dans ces conditions, la présente branche du moyen unique, tirée d’une violation des principes d’égalité de traitement et d’égalité des parties devant le juge communautaire, des droits de la défense ainsi que de l’obligation de motivation incombant au juge communautaire et aux institutions, doit être écartée.

    78

    Dès lors qu’aucune des branches du moyen unique invoqué par le requérant n’est fondée, le pourvoi introduit par M. Campoli doit être rejeté.

    V — Sur les dépens

    79

    Selon l’article 122, premier alinéa, du règlement de procédure, lorsque le pourvoi n’est pas fondé, la Cour statue sur les dépens.

    80

    En vertu de l’article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 118 de ce règlement, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Conformément à l’article 69, paragraphe 3, dudit règlement, la Cour peut, cependant, répartir les dépens ou décider que chaque partie supporte ses propres dépens si les parties succombent respectivement sur un ou plusieurs chefs, ou pour des motifs exceptionnels. Chacune des parties ayant succombé partiellement en ses moyens, il y a lieu de décider que chacune supporte ses propres dépens.

    81

    Conformément à l’article 69, paragraphe 4, du règlement de procédure, également applicable en vertu de l’article 118 du même règlement, les institutions qui sont intervenues au litige supportent leurs propres dépens. Dès lors, il y a lieu de condamner le Conseil à supporter ses propres dépens.

     

    Par ces motifs, la Cour (deuxième chambre) déclare et arrête:

     

    1)

    Le pourvoi principal et le pourvoi incident sont rejetés.

     

    2)

    M. Campoli, la Commission des Communautés européennes et le Conseil de l’Union européenne supportent leurs propres dépens.

     

    Signatures


    ( *1 ) Langue de procédure: le français.

    Haut