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Document 62000CJ0171

Arrêt de la Cour (cinquième chambre) du 15 janvier 2002.
Alain Libéros contre Commission des Communautés européennes.
Pourvoi - Possibilité pour le juge rapporteur du Tribunal de statuer en tant que juge unique - Agent temporaire - Classement en grade - Expérience professionnelle.
Affaire C-171/00 P.

Recueil de jurisprudence 2002 I-00451

Identifiant ECLI: ECLI:EU:C:2002:17

62000J0171

Arrêt de la Cour (cinquième chambre) du 15 janvier 2002. - Alain Libéros contre Commission des Communautés européennes. - Pourvoi - Possibilité pour le juge rapporteur du Tribunal de statuer en tant que juge unique - Agent temporaire - Classement en grade - Expérience professionnelle. - Affaire C-171/00 P.

Recueil de jurisprudence 2002 page I-00451


Sommaire
Parties
Motifs de l'arrêt
Décisions sur les dépenses
Dispositif

Mots clés


1. Procédure - Traitement des affaires devant le Tribunal - Possibilité de statuer en formation de juge unique - Conditions - Exclusion des affaires soulevant des questions relatives à la légalité d'un acte de portée générale - Notion d'affaires soulevant des questions relatives à la légalité d'un acte de portée générale - Directive interne d'une institution relative aux critères applicables à la nomination en grade et au classement en échelon lors du recrutement - Inclusion

(Règlement de procédure du Tribunal, art. 11, § 1, al. 1, et 14, § 2, points 1 et 2, a), et § 3)

2. Fonctionnaires - Recrutement - Nomination en grade et classement en échelon - Prise en considération de l'expérience professionnelle - Date retenue comme dies ad quem pour le calcul de la durée de l'expérience professionnelle - Date de l'entrée effective en fonctions - Règle de computation de la durée de l'expérience professionnelle applicable aux agents temporaires différente de celle applicable aux fonctionnaires - Violation du principe d'égalité de traitement

(Statut des fonctionnaires, art. 3 et 31)

Sommaire


1. Conformément à l'article 11, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement de procédure du Tribunal, les affaires dont ce dernier est saisi sont en principe jugées par les chambres. C'est à titre d'exception que l'article 14, paragraphe 2, point 1, dudit règlement de procédure prévoit que certaines catégories déterminées d'affaires, parmi lesquelles des affaires relatives à la fonction publique communautaire, peuvent être jugées par le juge rapporteur statuant en qualité de juge unique lorsqu'elles s'y prêtent compte tenu de l'absence de difficulté des questions de droit ou de fait soulevées, de l'importance limitée de l'affaire et de l'absence d'autres circonstances particulières.

Cependant, l'article 14, paragraphe 2, point 2, sous a), exclut la dévolution à un juge unique des affaires qui soulèvent des questions relatives à la légalité d'un acte de portée générale. Cette disposition est une exception à une première exception et prévoit le retour au principe général. Elle ne saurait donc être interprétée de manière restrictive.

Un acte est de portée générale au sens de cette disposition lorsqu'il s'applique à une situation déterminée objectivement et comporte des effets juridiques à l'égard de catégories de personnes envisagées de manière générale et abstraite.

Une affaire soulève une question relative à la légalité d'un acte de portée générale et, partant, ne peut être dévolue à un juge unique, à tout le moins lorsqu'est introduit un recours en annulation contre un tel acte ou lorsqu'est soulevée, de manière circonstanciée et motivée, une exception d'illégalité à son encontre. Une affaire soulève également une question relative à la légalité d'un acte de portée générale lorsque, au cours de la procédure, une telle question se pose de manière incidente. Dans un tel cas, le juge unique doit, conformément à l'article 14, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, constater que les conditions de la dévolution ne sont plus réunies et renvoyer l'affaire devant la chambre.

Dès lors, une décision d'une institution précisant les critères applicables à la nomination en grade et au classement en échelon lors du recrutement, qui s'applique à une situation déterminée objectivement et comportant des effets juridiques à l'égard de catégories de personnes envisagées de manière générale et abstraite, doit être qualifiée d'acte de portée générale au sens de l'article 14, paragraphe 2, point 2, sous a), du règlement de procédure du Tribunal. En effet, si des mesures d'ordre interne adoptées par l'administration ne sauraient être qualifiées de règle de droit à l'observation de laquelle l'administration serait, en tout cas, tenue, elles énoncent toutefois une règle de conduite indicative de la pratique à suivre dont l'administration ne peut s'écarter, dans un cas particulier, sans donner des raisons qui soient compatibles avec le principe de l'égalité de traitement. De telles mesures constituent un acte de caractère général dont les fonctionnaires et agents concernés peuvent invoquer l'illégalité à l'appui d'un recours formé contre des décisions individuelles prises sur leur fondement.

( voir points 25-27, 31-33, 35-36 )

2. Conformément à l'article 3 du statut, la date de nomination d'un fonctionnaire ne peut être antérieure à celle de son entrée en fonctions. Un fonctionnaire pouvant acquérir une formation ou exercer des activités professionnelles jusqu'au jour précédant celui de son entrée effective en fonctions, c'est la date de cette dernière qui doit être retenue comme dies ad quem pour calculer la durée de l'expérience professionnelle pouvant être prise en considération en vue du classement en grade.

L'article 31 du statut doit dès lors être interprété en ce sens que, dans la mesure où l'expérience professionnelle est prise en considération en vue du classement en grade, le dernier jour utile retenu pour le calcul de la durée de celle-ci doit être le jour précédant celui (dies ad quem) de l'entrée en fonctions.

Il en résulte qu'une décision d'une institution communautaire relative aux critères applicables à la nomination en grade et au classement en échelon lors du recrutement, en ce qu'elle prévoit un dies ad quem correspondant à la date de l'offre d'emploi, ne saurait recevoir application en ce qui concerne l'engagement de fonctionnaires. La même conclusion s'impose à propos du recrutement des agents temporaires dans la mesure où l'institution a rendu applicable à ces derniers, mutatis mutandis, ladite décision. En effet, une telle décision, en ce qu'elle retient comme dies ad quem la date de l'offre d'emploi et non celle de la prise de fonctions, prévoit, pour les agents temporaires et sans que cela soit objectivement justifié, une règle de computation de la durée de l'expérience professionnelle prise en considération différente de celle applicable aux fonctionnaires conformément à l'article 31 du statut et, ce faisant, viole le principe d'égalité de traitement.

( voir points 46-49, 54 )

Parties


Dans l'affaire C-171/00 P,

Alain Libéros, agent temporaire de la Commission des Communautés européennes, demeurant à Bruxelles (Belgique), représenté par Me M.-A. Lucas, avocat, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie requérante,

ayant pour objet un pourvoi formé contre l'arrêt du Tribunal de première instance des Communautés européennes (juge unique) du 9 mars 2000, Libéros/Commission (T-29/97, RecFP p. I-A-43 et II-185), et tendant à l'annulation de cet arrêt et à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées par le requérant en première instance, l'autre partie à la procédure étant:

Commission des Communautés européennes, représentée par M. J. Currall, en qualité d'agent, assisté de Me B. Wägenbaur, avocat, ayant élu domicile à Luxembourg, partie défenderesse en première instance,

LA COUR

(cinquième chambre),

composée de MM. P. Jann, président de chambre, A. La Pergola, L. Sevón, M. Wathelet et C. W. A. Timmermans (rapporteur), juges,

avocat général: Mme C. Stix-Hackl,

greffier: M. H. A. Rühl, administrateur principal,

vu le rapport d'audience,

ayant entendu les parties en leur plaidoirie à l'audience du 4 juillet 2001,

ayant entendu l'avocat général en ses conclusions à l'audience du 22 novembre 2001,

rend le présent

Arrêt

Motifs de l'arrêt


1 Par requête déposée au greffe de la Cour le 10 mai 2000, M. Libéros a, en vertu de l'article 49 du statut CE et des dispositions correspondantes des statuts CECA et CEEA de la Cour de justice, formé un pourvoi contre l'arrêt du Tribunal de première instance du 9 mars 2000, Libéros/Commission (T-29/97, RecFP p. I-A-43 et II-185, ci-après l'«arrêt attaqué»), par lequel celui-ci a rejeté son recours tendant à l'annulation des décisions de la Commission du 15 mars 1996, arrêtant son classement définitif au grade A 7, et du 5 novembre 1996, portant rejet de sa réclamation dirigée contre cette décision de classement.

Le cadre juridique et factuel

Le règlement de procédure du Tribunal

2 L'article 14, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, tel que modifié par la décision de ce dernier, du 17 mai 1999, visant à lui permettre de statuer en formation à juge unique (JO L 135, p. 92), dispose:

«1. Les affaires ci-après, attribuées à une chambre composée de trois juges, peuvent être jugées par le juge rapporteur statuant en tant que juge unique lorsqu'elles s'y prêtent compte tenu de l'absence de difficulté des questions de droit ou de fait soulevées, de l'importance limitée de l'affaire et de l'absence d'autres circonstances particulières et qu'elles ont été dévolues dans les conditions prévues à l'article 51:

a) les affaires introduites en vertu de l'article 236 du traité CE et de l'article 152 du traité CEEA;

[...]

2. La dévolution à un juge unique est exclue:

a) pour les affaires qui soulèvent des questions relatives à la légalité d'un acte de portée générale;

[...]»

3 L'article 14, paragraphe 3, du même règlement de procédure prévoit:

«Le juge unique renvoie l'affaire devant la chambre s'il constate que les conditions de la dévolution ne sont plus réunies.»

4 L'article 51, paragraphe 2, premier alinéa, dudit règlement de procédure est libellé comme suit:

«La décision d'attribuer une affaire à un juge unique dans les cas déterminés par l'article 14, paragraphe 2, est prise à l'unanimité, les parties entendues, par la chambre composée de trois juges devant laquelle l'affaire est pendante.»

Dispositions applicables au classement des fonctionnaires

5 Aux termes de l'article 31 du statut des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après le «statut»):

«1. Les candidats ainsi choisis sont nommés:

- fonctionnaires de la catégorie A ou du cadre linguistique: au grade de base de leur catégorie ou de leur cadre,

[...]

2. Toutefois, l'autorité investie du pouvoir de nomination peut déroger aux dispositions visées ci-avant dans les limites suivantes:

[...]

b) pour les autres grades [que les grades A 1, A 2, A 3 et LA 3], à raison:

- d'un tiers s'il s'agit de postes rendus disponibles,

- de la moitié s'il s'agit de postes nouvellement créés.

Sauf pour le grade LA 3, cette disposition s'applique par série de six emplois à pourvoir dans chaque grade.»

6 Par décision du 1er septembre 1983, la Commission a précisé les critères applicables à la nomination en grade et au classement en échelon lors du recrutement (ci-après la «décision du 1er septembre 1983»). Sous réserve d'exceptions expressément prévues aux articles 1er et 5 de ladite décision, l'article 5 de celle-ci prévoit qu'elle s'applique mutatis mutandis à l'engagement des agents temporaires.

7 L'article 2 de la décision du 1er septembre 1983, intitulé «Fixation du grade et de l'échelon lors du recrutement», prévoit dans ses premier à troisième et sixième alinéas, dans la version existant au 1er juillet 1995:

«L'autorité investie du pouvoir de nomination nomme le fonctionnaire stagiaire au grade de base de la carrière pour laquelle il est recruté.

La durée minimum d'expérience professionnelle pour le classement au premier échelon dans le grade de base de chaque carrière est de:

- 12 ans pour les grades A 5 et LA 5

- 3 ans pour les grades A 7 et LA 7

[...]

L'expérience professionnelle est appréciée en prenant en considération l'activité exercée antérieurement à la date de l'offre d'emploi [...]

[...]

L'expérience professionnelle n'est décomptée qu'à partir de l'obtention du premier diplôme donnant accès, conformément à l'article 5 du statut, à la catégorie dans laquelle l'emploi est à pourvoir, sous réserve de ce qui est prévu à l'article 2 de l'annexe I de la présente décision, et elle doit être d'un niveau correspondant à cette catégorie.»

8 Les faits à l'origine du litige sont décrits par l'arrêt attaqué de la manière suivante:

«7 Le 25 octobre 1993, le requérant a posé sa candidature auprès de la Commission dans le cadre d'une sélection d'agents temporaires. L'avis de sélection pour l'unité 3 `Politique de la qualité et certification et marquage de conformité' de la direction B `Politique réglementaire et normalisation; réseaux télématiques' de la direction générale `Industrie' (DG III) spécifiait que le poste en cause était de niveau A 7/A 4.

8 Le 17 octobre 1994, la Commission a proposé au requérant un emploi d'agent temporaire en précisant qu'il exercerait les fonctions d'administrateur, pour une durée de trois ans, et qu'il serait classé `dans la catégorie A, grade 7, échelon 1 (sous réserve de la confirmation par le comité de classement qui établira ultérieurement [son] classement définitif)'.

9 Le requérant a accepté l'offre de la Commission le 14 novembre 1994 et a, par la même occasion, indiqué qu'il était prêt à se mettre au service de la Commission à compter du 1er juillet 1995.

10 Le 23 juin 1995, le requérant a signé le contrat d'engagement, portant la date du 7 octobre 1994, selon lequel il était engagé pour exercer les fonctions d'administrateur (article 2, premier alinéa) et classé dans la catégorie A, grade 7, échelon 1, l'ancienneté dans cet échelon prenant effet le 1er juillet 1995 (article 3).

11 Le 30 août 1995, le requérant a adressé une note au président du comité de classement portant demande de reclassement au grade A 5 compte tenu de son expérience professionnelle de quinze ans, six mois et six jours à la date d'établissement de son contrat d'engagement à la Commission, le 7 octobre 1994.

12 La Commission a communiqué au requérant un avenant au contrat d'engagement, daté du 15 mars 1996, arrêtant son classement définitif au grade A 7, échelon 3, avec ancienneté dans cet échelon au 1er juillet 1995 (ci-après la `décision du 15 mars 1996').

13 Le 28 mars 1996, le requérant a saisi la Commission d'une réclamation, au titre de l'article 90, paragraphe 2, du statut, contre la décision du 15 mars 1996 en ce qu'elle ne donnait pas suite à sa demande de reclassement au grade A 5 avec bonification d'ancienneté correspondante. La réclamation a été enregistrée au secrétariat général de la Commission le 23 avril 1996.

14 Par décision du 5 novembre 1996, la réclamation a été expressément rejetée (ci-après la `décision du 5 novembre 1996'). Le requérant a accusé réception de ladite décision le 11 novembre 1996. Cette décision précise que, conformément à l'article 2, deuxième et sixième alinéas, de la décision [du 1er septembre] 1983, le diplôme qui a été pris en compte pour le décompte de l'expérience du requérant est sa maîtrise d'administration économique et sociale obtenue en juin 1983 et que, en conséquence, son expérience a été décomptée de juin 1983 à octobre 1994, date de la lettre d'offre d'emploi, ce qui correspond à onze ans et quatre mois. La décision du 5 novembre 1996 mentionne également que l'autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après l' `AIPN') a, pour se conformer au principe dégagé par le Tribunal dans son arrêt du 5 octobre 1995, Alexopoulou/Commission (T-17/95, RecFP p. I-A-227 et II-683), selon lequel il est admissible, à titre exceptionnel, de recruter au grade supérieur d'une carrière, notamment lorsque les besoins spécifiques du service exigent le recrutement d'un titulaire particulièrement qualifié ou lorsque la personne recrutée possède des qualifications exceptionnelles, procédé à un nouvel examen du dossier du requérant, estimé qu'il n'y avait pas lieu de modifier son appréciation et, en conséquence, considéré qu'il n'y avait pas lieu, en l'espèce, d'accorder une telle dérogation.»

La procédure devant le Tribunal et l'arrêt attaqué

9 Conformément aux dispositions des articles 14, paragraphe 2, point 1, et 51, paragraphe 2, premier alinéa, du règlement de procédure du Tribunal, la première chambre a, le 9 novembre 1999, attribué l'affaire au président du Tribunal, siégeant en qualité de juge unique.

10 M. Libéros invoquait trois moyens à l'appui de son recours. Le premier moyen était tiré d'une violation de l'article 2, deuxième alinéa, de la décision du 1er septembre 1983. Le deuxième moyen, présenté à titre subsidiaire, était tiré de l'illégalité de cette même décision en tant qu'elle déclare applicable son article 2, premier alinéa, aux agents temporaires recrutés sur le fondement de l'article 2, sous a), du Régime applicable aux autres agents des Communautés européennes (ci-après le «RAA»). Au point 19 du mémoire en réplique devant le Tribunal, M. Libéros précisait que l'illégalité alléguée visait également l'article 2, troisième alinéa, de la décision du 1er septembre 1983, disposition relative à la date jusqu'à laquelle (dies ad quem) est appréciée l'expérience professionnelle. Le troisième moyen, présenté à titre plus subsidiaire encore, visait, dans sa première branche, le défaut de motivation des décisions du 15 mars et du 5 novembre 1996 et, dans sa seconde branche, la violation de l'article 31, paragraphe 2, du statut.

11 Le Tribunal a tout d'abord statué sur la recevabilité du recours. Aux points 29 à 34 de l'arrêt attaqué, il a constaté que la requête avait été présentée hors délai, mais a considéré que M. Libéros avait commis une erreur excusable en prenant comme point de départ du délai de recours la date d'enregistrement de sa réclamation au secrétariat général de la Commission. En effet, le requérant s'était fié aux Informations administratives n_ 635, du 16 juillet 1990, relatives aux modalités de traitement des demandes et des réclamations introduites au titre de l'article 90 du statut et à la méthode de calcul des délais, publiées par la Commission et prêtant à confusion, ainsi qu'à des informations erronées fournies par un fonctionnaire de la DG IX. En conséquence, le recours a été déclaré recevable.

12 Statuant sur le fond du recours, le Tribunal a examiné, «au vu des circonstances de l'espèce, si l'article 2 de la décision du 1er septembre 1983, tel qu'appliqué individuellement en l'espèce par la Commission qui ne prend en compte que l'expérience professionnelle antérieure à l'offre d'emploi, enfreint la finalité de l'article 31 du statut».

13 À cet égard, le Tribunal a motivé l'arrêt attaqué comme suit:

«48 Le requérant fait valoir que son expérience professionnelle aurait dû être appréciée non pas à la date de l'offre d'emploi, mais à la date de la prise d'effet du contrat d'engagement, soit le 1er juillet 1995. En conséquence, il convient d'examiner, au vu des circonstances de l'espèce, si l'article 2 de la décision du 1er septembre 1983, tel qu'appliqué individuellement en l'espèce par la Commission qui ne prend en compte que l'expérience professionnelle antérieure à l'offre d'emploi, enfreint la finalité de l'article 31 du statut.

49 À cet égard, il ressort de l'arrêt du Tribunal du 9 juillet 1997, Monaco/Parlement (T-92/96, RecFP p. I-A-195 et II-573, point 46), que `[l']exercice du pouvoir discrétionnaire conféré à l'AIPN par l'article 31, paragraphe 2, du statut peut, conformément à la jurisprudence, être réglementé par des décisions internes, telles que les nouvelles directives internes du Parlement. En effet, rien n'interdit, en principe, à l'AIPN d'établir, par la voie d'une décision interne de caractère général, des règles pour l'exercice du pouvoir discrétionnaire que lui confère le statut [...] Une telle directive interne doit être regardée comme une règle de conduite indicative que l'administration s'impose à elle-même et dont elle ne peut s'écarter sans préciser les raisons qui l'ont amenée à le faire, sous peine d'enfreindre le principe de l'égalité de traitement [...]'

50 Or, la décision du 15 mars 1996 applique une décision interne de caractère général, à savoir la décision du 1er septembre 1983 qui indique, expressément, à l'article 2, troisième alinéa, la date retenue pour le calcul de l'expérience professionnelle prise en compte pour le classement, à savoir la date de l'offre d'emploi.

51 Cette règle de conduite est conforme à la finalité du statut, tant pour des raisons administratives que pour des raisons de fond.

52 En effet, en premier lieu, il n'est pas possible de tenir compte au moment de l'établissement de l'offre d'emploi d'une expérience professionnelle éventuellement acquise dans l'intervalle compris entre l'offre d'emploi et la prise effective de fonctions du candidat.

53 En deuxième lieu, il ne s'écoule que très peu de temps, normalement, entre l'établissement de l'offre d'emploi et son envoi au candidat, de même qu'entre ledit envoi et l'acceptation ou le refus de l'offre.

54 En troisième lieu, d'une manière générale, la signature du contrat et la prise de fonctions effective de l'agent ne sont guère éloignées dans le temps.

55 En dernier lieu, imposer à l'institution de revoir les termes de l'offre d'emploi après son acceptation par l'agent recruté afin de tenir compte de l'expérience professionnelle acquise par ce dernier entre le moment de l'offre et la prise de fonctions effective permettrait à l'agent de repousser, sans raison objective ni contrôle effectif possible par l'institution, la prise de fonctions en vue d'obtenir un meilleur classement.

56 Quant à l'argument du requérant tiré de l'arrêt [du Tribunal du 7 février 1991, Tagaras/Cour de justice, T-18/89 et T-24/89, Rec. p. II-53], il convient d'observer que les circonstances de l'espèce se distinguent de celles ayant donné lieu à l'arrêt invoqué. Dans cette affaire, il n'y avait, notamment, pas de décision générale relative à la nomination en grade et au classement en échelon lors du recrutement. En outre, la partie défenderesse avait retenu la date de dépôt de l'acte de candidature - date différente et bien antérieure à celle retenue par la Commission en l'espèce - pour apprécier l'expérience professionnelle de l'intéressé. Cet arrêt est donc dénué de pertinence en l'espèce.

57 Il s'ensuit que la Commission était en droit, dans sa décision du 15 mars 1996, de fixer la date de l'offre d'emploi comme date ultime pour la prise en compte de l'expérience professionnelle, en application de sa décision du 1er septembre 1983.»

14 En conséquence, le Tribunal a rejeté le recours de M. Libéros et a condamné chacune des parties à supporter ses propres dépens.

Le pourvoi

15 M. Libéros conclut à l'annulation de l'arrêt attaqué, à ce qu'il soit fait droit aux conclusions qu'il avait présentées en première instance et à la condamnation de la Commission aux dépens.

16 La Commission conclut au rejet du pourvoi et à la condamnation de M. Libéros aux dépens.

17 M. Libéros invoque trois moyens au soutien de son pourvoi. Le premier est tiré d'une violation de l'article 14, paragraphe 2, point 2, sous a), du règlement de procédure du Tribunal. Par son deuxième moyen, il invoque la violation de l'article 2, deuxième alinéa, de la décision du 1er septembre 1983, ainsi que des articles 31 et 32 du statut, rendus applicables aux agents temporaires par l'article 5 de cette décision. Le troisième moyen est tiré d'une violation de l'obligation de motiver les arrêts.

Sur le premier moyen

18 Ce premier moyen est subdivisé en deux branches.

19 Par la première branche de son premier moyen, M. Libéros soutient que c'est à tort que l'affaire a été jugée par le juge rapporteur siégeant en qualité de juge unique, alors que la recevabilité du recours posait la question de la légalité des Informations administratives publiées par la Commission au sujet des modalités d'introduction et d'instruction des demandes et des réclamations introduites au titre de l'article 90 du statut.

20 Par la seconde branche du même moyen, M. Libéros soutient que c'est à tort que l'affaire a été jugée par le juge rapporteur siégeant en qualité de juge unique, alors que le recours posait la question de la légalité de l'article 2, troisième alinéa, de la décision du 1er septembre 1983, qui dispose notamment que «l'expérience professionnelle est appréciée en prenant en considération l'activité exercée antérieurement à la date de l'offre d'emploi».

21 Il convient d'examiner cette seconde branche en premier lieu.

22 Selon M. Libéros, le Tribunal aurait admis, au point 50 de l'arrêt attaqué, que la décision du 1er septembre 1983 est une décision interne à caractère général et aurait, aux points 48 à 51 dudit arrêt, considéré que l'exception d'illégalité soulevée par M. Libéros n'était pas fondée, afin de rejeter le recours dont ce dernier l'avait saisi.

23 Il soutient à cet égard que l'article 14, paragraphe 2, point 2, sous a), du règlement de procédure du Tribunal doit faire l'objet d'une interprétation large. En effet, il ne conviendrait pas de distinguer selon qu'il s'agit ou non d'un acte législatif, puisque le texte ne le fait pas. Il rappelle par ailleurs que la disposition visée ne constitue pas une exception à un principe, auquel cas il conviendrait de l'interpréter strictement, mais une «exception à une exception à un principe». Eu égard à cette circonstance, il faudrait l'interpréter de la même manière que le principe, c'est-à-dire de façon large. Il fait valoir enfin que l'objectif de l'article 14 dudit règlement de procédure est de permettre à un juge de statuer en qualité de juge unique dans les affaires qui s'y prêtent en raison, notamment, de l'importance limitée de celles-ci. Cet objectif justifierait que soit exclu le recours au juge unique dans les affaires mettant en cause la légalité de décisions qui s'appliquent à de nombreux destinataires, fussent-elles des décisions administratives internes.

24 S'agissant de cette branche du moyen, la Commission rappelle que, au point 48 de l'arrêt attaqué, le Tribunal a indiqué de façon claire et non équivoque que M. Libéros contestait une décision d'application individuelle et non pas la légalité d'un acte de portée générale. Elle soutient par ailleurs que la décision du 1er septembre 1983 ne constitue pas un «acte de portée générale» au sens de l'article 14, paragraphe 2, point 2, sous a), du règlement de procédure du Tribunal dès lors qu'il s'agit d'un texte adopté par une autorité administrative.

25 À cet égard, il convient de rappeler que, conformément à l'article 11, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement de procédure du Tribunal, les affaires dont ce dernier est saisi sont en principe jugées par les chambres.

26 C'est à titre d'exception que l'article 14, paragraphe 2, point 1, dudit règlement de procédure prévoit que certaines catégories déterminées d'affaires, parmi lesquelles des affaires relatives à la fonction publique communautaire, peuvent être jugées par le juge rapporteur statuant en qualité de juge unique «lorsqu'elles s'y prêtent compte tenu de l'absence de difficulté des questions de droit ou de fait soulevées, de l'importance limitée de l'affaire et de l'absence d'autres circonstances particulières».

27 Cependant, l'article 14, paragraphe 2, point 2, sous a), du règlement de procédure du Tribunal exclut la dévolution à un juge unique des affaires qui soulèvent des questions relatives à la légalité d'un acte de portée générale. Cette disposition est une exception à une première exception et prévoit le retour au principe général. Elle ne saurait donc être interprétée de manière restrictive.

28 La notion de «mesure de portée générale» a été interprétée par la Cour et le Tribunal dans le cadre de l'application des articles 230 CE et 249 CE. Selon une jurisprudence constante, une mesure est considérée comme étant de portée générale lorsqu'elle s'applique à des situations déterminées objectivement et comporte des effets juridiques à l'égard de catégories de personnes envisagées de manière générale et abstraite (voir, notamment, arrêts du 17 juin 1980, Calpak et Società Emiliana Lavorazione Frutta/Commission, 789/79 et 790/79, Rec. p. 1949, point 9, et du 31 mai 2001, Sadam Zuccherifici e.a./Conseil, C-41/99 P, Rec. p. I-4239, point 24).

29 Il résulte également de cette jurisprudence que la portée générale d'un acte n'est pas mise en cause par la possibilité de déterminer, avec plus ou moins de précision, le nombre ou même l'identité des sujets de droit auxquels il s'applique à un moment donné, tant qu'il est constant que cette application s'effectue en vertu d'une situation objective de droit ou de fait définie par l'acte, en relation avec la finalité de ce dernier ( arrêt Sadam Zuccherifici e.a./Conseil, précité, point 29).

30 Par souci de cohérence, il convient d'interpréter l'article 14, paragraphe 2, point 2, sous a), du règlement de procédure du Tribunal en tenant compte de cette jurisprudence bien établie.

31 Il s'ensuit qu'un acte est de portée générale, au sens de ladite disposition, lorsqu'il s'applique à une situation déterminée objectivement et comporte des effets juridiques à l'égard de catégories de personnes envisagées de manière générale et abstraite.

32 S'agissant de déterminer dans quelle mesure une affaire «soulève» une question relative à la légalité d'un acte de portée générale, il convient de constater que tel est le cas à tout le moins lorsqu'est introduit un recours en annulation contre un tel acte ou lorsqu'est soulevée, de manière circonstanciée et motivée, une exception d'illégalité à son encontre. Dans une telle hypothèse, l'affaire ne peut être dévolue à un juge unique.

33 Tel peut également être le cas lorsque, au cours de la procédure, la question de la légalité d'un acte de portée générale se pose de manière incidente. Dans un tel cas, le juge unique doit, conformément à l'article 14, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, constater que les conditions de la dévolution ne sont plus réunies et renvoyer l'affaire devant la chambre.

34 S'agissant de la décision du 1er septembre 1983, visée par la seconde branche du premier moyen du pourvoi, il s'agit d'une décision qui, selon son article 1er, «concerne le classement aux grades autres que A 1, A 2, A 3 et LA 3 des fonctionnaires dont les emplois relèvent de l'annexe 1-A du statut autres que ceux affectés au CCR et au projet JET» et qui, selon son article 5, s'applique mutatis mutandis à l'engagement des agents temporaires.

35 Or, statuant au sujet de mesures d'ordre interne adoptées par l'administration, la Cour a déjà jugé que, si elles ne sauraient être qualifiées de règle de droit à l'observation de laquelle l'administration serait, en tout cas, tenue, elles énoncent toutefois une règle de conduite indicative de la pratique à suivre dont l'administration ne peut s'écarter, dans un cas particulier, sans donner des raisons qui soient compatibles avec le principe d'égalité de traitement. De telles mesures constituent dès lors un acte de caractère général dont les fonctionnaires et agents concernés peuvent invoquer l'illégalité à l'appui d'un recours formé contre des décisions individuelles prises sur leur fondement (arrêt du 10 décembre 1987, Del Plato e.a./Commission, 181/86 à 184/86, Rec. p. 4991, point 10).

36 Il s'ensuit que la décision du 1er septembre 1983, qui s'applique à une situation déterminée objectivement et comportant des effets juridiques à l'égard de catégories de personnes envisagées de manière générale et abstraite, doit dès lors être qualifiée d'«acte de portée générale» au sens de l'article 14, paragraphe 2, point 2, sous a), du règlement de procédure du Tribunal.

37 Il convient par ailleurs de constater que, ainsi qu'il ressort de ses écrits devant le Tribunal, le deuxième moyen développé par M. Libéros était tiré de l'illégalité de la décision du 1er septembre 1983. Cet élément a été rappelé par M. Libéros dans une lettre du 27 octobre 1999 adressée au Tribunal, qui l'avait invité, conformément à l'article 51, paragraphe 2, premier alinéa, de son règlement de procédure, à présenter des observations sur l'éventualité de l'attribution de l'affaire au juge rapporteur statuant en qualité de juge unique.

38 Il résulte de l'ensemble de ces considérations que, en tant que le juge rapporteur a statué en qualité de juge unique dans une affaire introduite en vertu de l'article 236 CE, alors que cette affaire soulevait une question relative à la légalité d'un acte de portée générale, le Tribunal a violé l'article 14, paragraphe 2, point 2, sous a), de son règlement de procédure.

39 Le premier moyen étant fondé, il y a lieu d'annuler l'arrêt attaqué, sans qu'il soit nécessaire d'examiner les autres moyens du pourvoi.

Sur le fond

40 Conformément à l'article 54 du statut CE et des dispositions correspondantes des statuts CECA et CEEA de la Cour de justice, l'affaire étant en état d'être jugée, il convient de statuer au fond sur les conclusions de M. Libéros tendant à l'annulation des décisions du 15 mars et du 5 novembre 1996.

41 Le litige au fond porte sur la détermination de la durée de l'expérience professionnelle qui doit être prise en considération lors de l'engagement d'un agent temporaire. Plus particulièrement, la question décisive est celle de savoir quel est le jour (dies ad quem) devant être pris en considération pour le calcul de cette durée, la détermination du jour servant de point de départ du délai (dies a quo) n'étant, quant à elle, pas contestée.

42 M. Libéros fait valoir, tout d'abord, que l'expérience professionnelle doit être calculée de la même manière, que ce soit en vue de l'application de l'article 31 ou de l'article 32 du statut. Il soutient par ailleurs que, selon la jurisprudence communautaire et, notamment, l'arrêt du Tribunal Tagaras/Cour de justice, précité, c'est la date de l'entrée en service qui doit être prise en considération. En ce qu'il prévoit la prise en considération de l'activité professionnelle exercée antérieurement à la date de l'offre d'emploi, l'article 2, troisième alinéa, de la décision du 1er septembre 1983 serait sur ce point contraire au statut. Il considère dès lors que, pour ce qui le concerne, c'est la date de son entrée en service, soit le 1er juillet 1995, qui aurait dû être prise en considération comme dies ad quem pour apprécier la durée de son expérience professionnelle.

43 Dans sa défense devant le Tribunal, la Commission reconnaît que le grade attribué à un agent temporaire, lors de son recrutement, est arrêté conformément à l'article 2 de la décision du 1er septembre 1983. Elle soutient cependant que le choix de la date de l'offre d'emploi se justifie pleinement pour apprécier la durée de l'expérience professionnelle puisque c'est à ce moment que les conditions de l'engagement de l'agent sont fixées. Le choix de ce critère serait également motivé par des raisons budgétaires et afin d'éviter que l'agent temporaire nouvellement recruté puisse retarder, de sa propre initiative, la date de la prise de ses fonctions aux fins d'être recruté dans une carrière supérieure. En outre, il ne s'écoulerait, en général, que peu de temps entre l'offre d'engagement et le recrutement effectif de l'agent. La Commission fait valoir enfin que l'article 32 du statut et la jurisprudence y relative ne sont pas pertinents dans le cadre du présent litige, puisque cette disposition concerne le classement en échelon, tandis que le litige porte sur le classement en grade. Elle considère dès lors que, pour ce qui concerne M. Libéros, c'est la date de l'offre d'emploi, soit le 7 octobre 1994, qui doit être prise en considération.

44 À cet égard, il convient de rappeler que, ainsi qu'il résulte du dossier soumis au Tribunal, cette question se pose dans le contexte de l'engagement de M. Libéros au poste référencé 12T/III/93, de grade A 7/A 4. Si la thèse de M. Libéros était accueillie, il pourrait faire valoir plus de douze années d'expérience professionnelle et, conformément à l'article 2, deuxième alinéa, de la décision du 1er septembre 1983, demander que son dossier soit réexaminé en vue d'un éventuel classement au grade A 5.

45 Il importe au préalable de constater que, si l'article 31 du statut ne fait pas mention explicite de la notion d'expérience professionnelle, il résulte cependant d'une jurisprudence constante que l'expérience professionnelle d'une personne recrutée comme fonctionnaire est l'un des éléments que l'AIPN peut prendre en considération pour déterminer son classement en grade, notamment dans le cadre de l'application de l'article 31, paragraphe 2, du statut (voir, en ce sens, arrêts du 29 juin 1994, Klinke/Cour de justice, C-298/93 P, Rec. p. I-3009, point 15, et du 1er juillet 1999, Alexopoulou/Commission, C-155/98 P, Rec. p. I-4069, point 13).

46 Conformément à l'article 3 du statut, la date de nomination d'un fonctionnaire ne peut être antérieure à celle de son entrée en fonctions. Un fonctionnaire pouvant acquérir une formation ou exercer des activités professionnelles jusqu'au jour précédant celui de son entrée effective en fonctions, c'est la date de cette dernière qui doit être retenue comme dies ad quem pour calculer la durée de l'expérience professionnelle pouvant être prise en considération en vue du classement en grade.

47 L'article 31 du statut doit dès lors être interprété en ce sens que, dans la mesure où l'expérience professionnelle est prise en considération en vue du classement en grade, le dernier jour utile retenu pour le calcul de la durée de celle-ci doit être le jour précédant celui (dies ad quem) de l'entrée en fonctions. Il en résulte que, en ce qu'il prévoit un dies ad quem correspondant à la date de l'offre d'emploi, l'article 2, troisième alinéa, de la décision du 1er septembre 1983 ne saurait recevoir application en ce qui concerne l'engagement de fonctionnaires.

48 Il est toutefois nécessaire de vérifier si la même conclusion s'impose à propos du recrutement d'un agent temporaire.

49 À cet égard, il y a lieu de constater que, si le RAA ne prévoit pas de règles applicables au classement en grade des agents temporaires, la Commission a toutefois rendu applicable à ces derniers, mutatis mutandis, la décision du 1er septembre 1983, ainsi que le précise l'article 5 de celle-ci.

50 Il convient dès lors de vérifier si l'inapplicabilité de l'article 2, troisième alinéa, de la décision du 1er septembre 1983, conclusion à laquelle la Cour est arrivée au point 47 du présent arrêt pour ce qui concerne les fonctionnaires, s'impose également s'agissant des agents temporaires ou si des éléments propres à la situation de ces derniers justifient le maintien de l'application de cette disposition, c'est-à-dire la prise en considération de la date de l'offre d'emploi comme constituant le dies ad quem pour le calcul de la durée de l'expérience professionnelle.

51 La Commission soutient qu'il ne serait pas possible, notamment pour des raisons budgétaires, de tenir compte, au moment de l'établissement de l'offre d'emploi, d'une expérience professionnelle éventuellement acquise dans l'intervalle compris entre l'offre d'emploi et la prise effective de fonctions du candidat. Il convient cependant de constater que c'est la Commission elle-même qui, premièrement, s'est imposé de traiter les agents temporaires de la même manière que les fonctionnaires, deuxièmement, indique, dans sa décision du 1er septembre 1983, que la durée minimale d'expérience professionnelle pour le classement au premier échelon du grade A 5 est de douze ans et, troisièmement, a pour pratique de faire des offres d'emplois d'agents temporaires couvrant plusieurs carrières à la fois. Prenant en considération ces éléments, il lui appartenait d'être prévoyante au plan budgétaire afin de tenir compte des hypothèses dans lesquelles devrait être prise en considération l'expérience professionnelle acquise par un candidat entre la date de l'offre d'emploi et celle de son entrée en service, en vue d'un classement en grade de ce dernier différent de celui qui lui a été proposé dans ladite offre d'emploi.

52 Il ne saurait non plus être soutenu qu'il serait justifié de prendre en considération le moment de l'établissement de l'offre d'emploi au motif que, en principe, il ne s'écoule que très peu de temps entre l'établissement de l'offre d'emploi et la prise de fonctions effective de l'agent. En effet, la rareté alléguée de certaines situations ne saurait justifier une différence de traitement par rapport au candidat fonctionnaire, auquel le statut reconnaît le droit d'obtenir la prise en considération de l'expérience professionnelle acquise jusqu'à la date de son entrée en fonctions.

53 Enfin, il est inexact de prétendre que, en imposant à l'institution de revoir les termes de l'offre d'emploi après son acceptation par l'agent recruté afin de tenir compte de l'expérience professionnelle acquise par ce dernier entre le moment de ladite offre et la prise de fonctions effective, cela permettrait à l'agent de repousser, sans raison objective ni contrôle effectif possible par l'institution, sa prise de fonctions en vue d'obtenir un meilleur classement. En effet, la date de prise de fonctions de l'agent peut être fixée dans l'offre d'emploi et, partant, constituer un élément essentiel de cette dernière. Cela permettrait ainsi à l'institution d'évaluer au préalable l'expérience professionnelle qui, éventuellement, devrait être prise en considération pour le classement de l'agent. L'institution a donc le contrôle à la fois de la détermination de la date de prise de fonctions, mais également de son respect par l'agent concerné.

54 Il résulte de ce qui précède que, en ce qu'il retient comme dies ad quem la date de l'offre d'emploi et non celle de la prise de fonctions, l'article 2, troisième alinéa, de la décision du 1er septembre 1983, lu en combinaison avec l'article 5 de celle-ci, prévoit, pour les agents temporaires et sans que cela soit objectivement justifié, une règle de computation de la durée de l'expérience professionnelle prise en considération différente de celle applicable aux fonctionnaires conformément à l'article 31 du statut. Ce faisant, il viole le principe d'égalité de traitement tel qu'il résulte de la règle que la Commission s'est imposée par l'article 5 de ladite décision.

55 Il s'ensuit que le moyen au fond du requérant doit être accueilli et qu'il convient d'annuler les décisions du 15 mars et du 5 novembre 1996.

Décisions sur les dépenses


Sur les dépens

56 Aux termes de l'article 122, premier alinéa, du règlement de procédure, lorsque le pourvoi est fondé et que la Cour juge elle-même définitivement le litige, elle statue sur les dépens. Aux termes de l'article 69, paragraphe 2, du même règlement, rendu applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l'article 118, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens. M. Libéros ayant conclu à la condamnation de la Commission et cette dernière ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de la condamner à supporter, outre ses propres dépens, la totalité des dépens exposés par M. Libéros, tant devant le Tribunal que devant la Cour.

Dispositif


Par ces motifs,

LA COUR

(cinquième chambre)

déclare et arrête:

1) L'arrêt du Tribunal de première instance des Communautés européennes du 9 mars 2000, Libéros/Commission (T-29/97), est annulé.

2) Les décisions de la Commission des Communautés européennes du 15 mars 1996, arrêtant le classement définitif de M. Libéros au grade A 7, et du 5 novembre 1996, portant rejet de sa réclamation dirigée contre cette décision de classement, sont annulées.

3) La Commission des Communautés européennes est condamnée à supporter l'ensemble des dépens des instances devant le Tribunal et la Cour.

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