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Document 61998CJ0310

Arrêt de la Cour (cinquième chambre) du 23 mars 2000.
Hauptzollamt Neubrandenburg contre Leszek Labis (C-310/98) et Sagpol SC Transport Miedzynarodowy i Spedycja (C-406/98).
Demande de décision préjudicielle: Bundesfinanzhof - Allemagne.
Libre circulation des marchandises - Opération de transit externe - Circulation sous le couvert d'un carnet TIR - Infractions ou irrégularités - Preuve du lieu où l'infraction ou l'irrégularité a été commise - Délai pour rapporter la preuve - Moyens de preuve admissibles - Procédure de compensation.
Affaires jointes C-310/98 et C-406/98.

Recueil de jurisprudence 2000 I-01797

Identifiant ECLI: ECLI:EU:C:2000:154

61998J0310

Arrêt de la Cour (cinquième chambre) du 23 mars 2000. - Hauptzollamt Neubrandenburg contre Leszek Labis (C-310/98) et Sagpol SC Transport Miedzynarodowy i Spedycja (C-406/98). - Demande de décision préjudicielle: Bundesfinanzhof - Allemagne. - Libre circulation des marchandises - Opération de transit externe - Circulation sous le couvert d'un carnet TIR - Infractions ou irrégularités - Preuve du lieu où l'infraction ou l'irrégularité a été commise - Délai pour rapporter la preuve - Moyens de preuve admissibles - Procédure de compensation. - Affaires jointes C-310/98 et C-406/98.

Recueil de jurisprudence 2000 page I-01797


Sommaire
Parties
Motifs de l'arrêt
Décisions sur les dépenses
Dispositif

Mots clés


1 Libre circulation des marchandises - Transit communautaire - Transports effectués sous le couvert d'un carnet TIR - Infractions ou irrégularités - Lieu de l'infraction ou de l'irrégularité - Moyens de preuve - Application du droit national

(Règlement de la Commission n_ 2454/93, art. 454, § 3, al. 1, et 455, § 3)

2 Libre circulation des marchandises - Transit communautaire - Transports effectués sous le couvert d'un carnet TIR - Infractions ou irrégularités - État membre compétent pour le recouvrement des droits et autres impositions - État du lieu de l'infraction ou de l'irrégularité - Recouvrement par l'État membre du lieu de constatation de l'infraction, n'ayant, à tort, pas considéré comme suffisants les éléments de preuve produits pour établir le lieu de l'infraction - Application du mécanisme de compensation

(Règlement de la Commission n_ 2454/93, art. 454, § 2 et 3, al. 3 et 4)

3 Libre circulation des marchandises - Transit communautaire - Transports effectués sous le couvert d'un carnet TIR - Infractions ou irrégularités - Lieu de l'infraction ou de l'irrégularité - Production de la preuve - Délai

(Règlement du Conseil n_ 2112/78; règlement de la Commission n_ 2454/93, art. 454, § 3, al. 1, et 455, § 1)

Sommaire


1 L'article 454, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement n_ 2454/93, fixant certaines dispositions d'application du règlement n_ 2913/92 établissant le code des douanes communautaire, qui s'applique lorsque les transports internationaux de marchandises sont effectués sous le couvert de carnets TIR, doit être interprété en ce sens que la preuve du lieu où l'infraction ou l'irrégularité aux dispositions douanières a été commise, requise par les autorités douanières de l'État membre où ladite infraction ou irrégularité a été constatée, n'a pas à être rapportée uniquement par la production de documents écrits établissant que les autorités compétentes d'un autre État membre ont constaté que l'infraction ou l'irrégularité a été commise sur leur territoire.

En l'absence d'une réglementation communautaire de la notion de preuve, tous les moyens de preuve que les droits procéduraux des États membres admettent dans des procédures similaires sont, en principe, recevables. Une appréciation différente ne saurait être déduite de la rédaction de l'article 455, paragraphe 3, du règlement n_ 2454/93, dans sa version résultant du règlement n_ 12/97. En effet, cette disposition vise une situation différente, à savoir la preuve de l'infraction ou de l'irrégularité en tant que telle. Si le législateur communautaire a limité, à compter de 1997, les moyens de preuve admissibles s'agissant de l'établissement de la régularité de l'opération de transit, il ne saurait en être déduit qu'il a également voulu le faire, de manière implicite, s'agissant de l'établissement du lieu de l'infraction ou de l'irrégularité.

(voir points 29, 31, 33, disp. 1)

2 L'article 454, paragraphe 3, troisième et quatrième alinéas, du règlement n_ 2454/93, fixant certaines dispositions d'application du règlement n_ 2913/92 établissant le code des douanes communautaire, qui s'applique lorsque les transports internationaux de marchandises sont effectués sous le couvert de carnets TIR, doit être interprété en ce sens que le mécanisme de compensation qu'il prévoit s'applique également dans le cas où les droits et autres impositions ont été perçus par l'État membre où l'infraction aux dispositions douanières a été constatée, alors qu'il avait été prouvé de manière satisfaisante que le lieu effectif de l'infraction se situait dans un autre État membre.

En effet, si le mécanisme de compensation joue lorsqu'un État membre a procédé au recouvrement alors qu'il n'était pas compétent au regard de la règle de principe édictée à l'article 454, paragraphe 2, du règlement n_ 2454/93, comme n'étant pas l'État où le lieu de l'infraction, déterminé ultérieurement, se situe, il doit donc également jouer dans la situation, non fondamentalement différente, dans laquelle l'État membre qui a procédé au recouvrement n'était pas compétent en vertu de la même règle de principe, mais n'a, à tort, pas initialement considéré comme suffisants les éléments de preuve produits pour établir le lieu de l'infraction.

(voir points 39-40, disp. 2)

3 Les articles 454, paragraphe 3, premier alinéa, et 455, paragraphe 1, du règlement n_ 2454/93, fixant certaines dispositions d'application du règlement n_ 2913/92 établissant le code des douanes communautaire, qui s'appliquent lorsque les transports internationaux de marchandises sont effectués sous le couvert de carnets TIR, doivent être interprétés en ce sens que les autorités douanières de l'État membre où l'infraction ou l'irrégularité aux dispositions douanières a été constatée ne peuvent imposer au titulaire du carnet TIR un délai de forclusion de trois mois pour fournir une preuve satisfaisante du lieu effectif de l'infraction ou de l'irrégularité.

L'article 454, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement n_ 2454/93 renvoie sans ambiguïté, quant à la durée du délai en cause, à l'article 455, paragraphe 1, du même règlement, qui renvoie à son tour, quant à la durée du délai qu'il édicte, à l'article 11, paragraphe 1, de la convention douanière relative au transport international de marchandises sous le couvert de carnets TIR. Le délai que ce dernier article mentionne étant d'un an, le délai imparti par l'article 454, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement n_ 2454/93 pour rapporter la preuve du lieu où l'infraction ou l'irrégularité a été commise est, en conséquence, d'un an.

(voir points 44, 49, disp. 3)

Parties


Dans les affaires jointes C-310/98 et C-406/98,

ayant pour objet des demandes adressées à la Cour, en application de l'article 177 du traité CE (devenu article 234 CE), par le Bundesfinanzhof (Allemagne) et tendant à obtenir, dans les litiges pendants devant cette juridiction entre

Hauptzollamt Neubrandenburg

et

et

Leszek Labis, agissant sous le nom commercial «Przedsiebiorstwo Transportowo-Handlowe `Met-Trans'» (C-310/98),

Sagpol SC Transport Miedzynarodowy i Spedycja (C-406/98),

une décision à titre préjudiciel sur l'interprétation des articles 454 et 455 du règlement (CEE) n_ 2454/93 de la Commission, du 2 juillet 1993, fixant certaines dispositions d'application du règlement (CEE) n_ 2913/92 du Conseil établissant le code des douanes communautaire (JO L 253, p. 1),

LA COUR

(cinquième chambre),

composée de MM. L. Sevón, président de la première chambre, faisant fonction de président de la cinquième chambre, P. J. G. Kapteyn, P. Jann (rapporteur), H. Ragnemalm et M. Wathelet, juges,

avocat général: M. J. Mischo,

greffier: M. H. A. Rühl, administrateur principal,

considérant les observations écrites présentées:

- pour M. Labis (C-310/98), par Me P. Galuszka, avocat à Engelskirchen,

- pour Sagpol SC Transport Miedzynarodowy i Spedycja (C-406/98), par Me M. Leis, avocat à Greifswald,

- pour le gouvernement français (C-406/98), par Mmes K. Rispal-Bellanger, sous-directeur à la direction des affaires juridiques du ministère des Affaires étrangères, et C. Vasak, secrétaire adjoint des affaires étrangères à la même direction, en qualité d'agents,

- pour le gouvernement néerlandais (C-310/98), par M. M. Fierstra, conseiller juridique adjoint au ministère des Affaires étrangères, en qualité d'agent,

- pour le gouvernement finlandais (C-406/98), par Mme T. Pynnä, conseiller juridique au ministère des Affaires étrangères, en qualité d'agent,

- pour le gouvernement suédois (C-310/98 et C-406/98), par M. A. Kruse, departementsråd au ministère des Affaires étrangères, en qualité d'agent,

- pour la Commission des Communautés européennes (C-310/98 et C-406/98), dans l'affaire C-310/98, par M. R. Tricot, membre du service juridique, et Mme K. Schreyer, fonctionnaire national détaché auprès du même service, et, dans l'affaire C-406/98, par MM. R. B. Wainwright, conseiller juridique principal, et J. C. Schieferer, membre du service juridique, en qualité d'agents,

vu le rapport d'audience,

ayant entendu les observations orales de M. Labis, représenté par Me P. Galuszka, de Sagpol SC Transport Miedzynarodowy i Spedycja, représentée par Me M. Leis, du gouvernement danois, représenté par M. J. Molde, chef de division au ministère des Affaires étrangères, en qualité d'agent, du gouvernement français, représenté par Mme C. Vasak, du gouvernement néerlandais, représenté par M. M. Fierstra, du gouvernement finlandais, représenté par Mme T. Pynnä, du gouvernement suédois, représenté par M. A. Kruse, et de la Commission, représentée par MM. R. Tricot et J. C. Schieferer, à l'audience du 14 octobre 1999,

ayant entendu l'avocat général en ses conclusions à l'audience du 9 décembre 1999,

rend le présent

Arrêt

Motifs de l'arrêt


1 Par ordonnances des 7 juillet 1998 (C-310/98) et 6 octobre 1998 (C-406/98), parvenues à la Cour respectivement les 10 août et 16 novembre suivants, le Bundesfinanzhof a posé, en application de l'article 177 du traité CE (devenu article 234 CE), cinq questions préjudicielles relatives à l'interprétation des articles 454 et 455 du règlement (CEE) n_ 2454/93 de la Commission, du 2 juillet 1993, fixant certaines dispositions d'application du règlement (CEE) n_ 2913/92 du Conseil établissant le code des douanes communautaire (JO L 253, p. 1).

2 Ces questions préjudicielles ont été soulevées dans le cadre de deux litiges opposant l'administration des douanes allemande, le Hauptzollamt Neubrandenburg (ci-après le «Hauptzollamt»), à deux entrepreneurs de transports polonais, d'une part, M. Labis, agissant sous le nom commercial «Przedsiebiorstwo Transportowo-Handlowe `Met-Trans'» (ci-après «Met-Trans») (C-310/98), d'autre part, Sagpol SC Transport Miedzynarodowy i Spedycja (ci-après «Sagpol») (C-406/98), au sujet du recouvrement des droits de douane à l'importation dus en raison d'infractions commises au cours de transports internationaux, effectués sous le couvert de carnets TIR, de marchandises placées sous le régime communautaire du transit externe.

Le cadre juridique

3 La convention douanière relative au transport international de marchandises sous le couvert de carnets TIR, en date, à Genève, du 14 novembre 1975 (ci-après la «convention TIR»), a été approuvée au nom de la Communauté européenne par le règlement (CEE) n_ 2112/78 du Conseil, du 25 juillet 1978 (JO L 252, p. 1).

4 L'opération de transit externe sous le couvert d'un carnet TIR se trouve régulièrement apurée lorsque les marchandises en cause sont représentées au bureau de sortie du territoire de la Communauté ou au bureau de destination sur le territoire de la Communauté, à savoir le bureau de destination, et que ce bureau en avise le bureau de départ, à savoir le bureau d'entrée sur le territoire de la Communauté.

5 L'article 454, paragraphes 2 et 3, du règlement n_ 2454/93 dispose:

«2. Quand il est constaté que, au cours ou à l'occasion d'un transport effectué sous le couvert d'un carnet TIR, ou d'une opération de transit effectuée sous le couvert d'un carnet ATA, une infraction ou une irrégularité a été commise dans un État membre déterminé, le recouvrement des droits et autres impositions éventuellement exigibles est poursuivi par cet État membre...

3. Lorsqu'il n'est pas possible de déterminer le territoire sur lequel l'infraction ou l'irrégularité a été commise, celle-ci est réputée avoir été commise dans l'État membre où elle a été constatée à moins que, dans le délai prévu à l'article 455 paragraphe 1, la preuve ne soit apportée, à la satisfaction des autorités douanières, de la régularité de l'opération ou du lieu où l'infraction ou l'irrégularité a été effectivement commise.

Si, à défaut d'une telle preuve, ladite infraction ou irrégularité demeure réputée avoir été commise dans l'État membre où elle a été constatée, les droits et autres impositions afférents aux marchandises en cause sont perçus par cet État membre conformément aux dispositions communautaires ou nationales.

Si, ultérieurement, l'État membre où ladite infraction ou irrégularité a effectivement été commise vient à être déterminé, les droits et autres impositions - à l'exception de ceux perçus, conformément au deuxième alinéa, au titre de ressources propres de la Communauté - dont les marchandises sont passibles dans cet État membre lui sont restitués par l'État membre qui avait initialement procédé à leur recouvrement. Dans ce cas, l'excédent éventuel est remboursé à la personne qui avait initialement acquitté les impositions.

Si le montant des droits et autres impositions initialement perçus et restitués par l'État membre qui avait procédé à leur recouvrement est inférieur au montant des droits et autres impositions exigibles dans l'État membre où l'infraction ou irrégularité a été effectivement commise, cet État membre perçoit la différence conformément aux dispositions communautaires ou nationales.

...»

6 En vertu de l'article 455 du règlement n_ 2454/93:

«1. S'il est constaté que, au cours ou à l'occasion d'un transport effectué sous le couvert d'un carnet TIR ou d'une opération de transit effectuée sous le couvert d'un carnet ATA, une infraction ou une irrégularité a été commise, les autorités douanières en donnent notification au titulaire du carnet TIR ou du carnet ATA et à l'association garante, dans le délai prévu, selon le cas, à l'article 11 paragraphe 1 de la convention TIR ou à l'article 6 paragraphe 4 de la convention ATA.

2. La preuve de la régularité de l'opération effectuée sous couvert d'un carnet TIR ou d'un carnet ATA au sens de l'article 454 paragraphe 3 premier alinéa doit être apportée dans le délai prévu, selon le cas, à l'article 11 paragraphe 2 de la convention TIR ou à l'article 7 paragraphes 1 et 2 de la convention ATA.

3. La preuve peut notamment être apportée à la satisfaction des autorités douanières:

a) par la production d'un document certifié par les autorités douanières, établissant que les marchandises en cause ont été présentées au bureau de destination. Ce document doit comporter l'identification desdites marchandises

ou

b) par la production d'un document douanier de mise à la consommation délivré dans un pays tiers ou de sa copie ou photocopie; cette copie ou photocopie doit être certifiée conforme, soit par l'organisme qui a visé le document original, soit par les services officiels du pays tiers concerné, soit par les services officiels d'un des États membres. Ce document doit comporter l'identification des marchandises en cause

ou

c) en ce qui concerne la convention ATA, par les moyens de preuve prévus à l'article 8 de ladite convention.»

7 L'expression «notamment» qui figure à l'article 455, paragraphe 3, première phrase, du règlement n_ 2454/93 a été supprimée lors d'une modification résultant du règlement (CE) n_ 12/97 de la Commission, du 18 décembre 1996 (JO 1997, L 9, p. 1). Cette nouvelle version n'était toutefois pas en vigueur à la date des faits au principal.

8 En vertu de l'article 11, paragraphes 1 et 2, de la convention TIR:

«1. En cas de non-décharge d'un carnet TIR, ou lorsque la décharge d'un carnet TIR comporte des réserves, les autorités compétentes n'auront pas le droit d'exiger de l'association garante le paiement des sommes visées à l'article 8 paragraphes 1 et 2 si, dans un délai d'un an, à compter de la date de la prise en charge du carnet TIR par ces autorités, elles n'ont pas avisé par écrit l'association de la non-décharge ou de la décharge avec réserves. Cette disposition sera également applicable en cas de décharge obtenue d'une façon abusive ou frauduleuse, mais alors le délai sera de deux ans.

2. La demande de paiement des sommes visées à l'article 8 paragraphes 1 et 2 sera adressée à l'association garante au plus tôt trois mois, à compter de la date à laquelle cette association a été avisée que le carnet n'a pas été déchargé, qu'il a été déchargé avec réserves ou que la décharge a été obtenue d'une façon abusive ou frauduleuse, et au plus tard deux ans à compter de cette même date. Toutefois, en ce qui concerne les cas qui sont déférés à la justice dans le délai sus-indiqué de deux ans, la demande de paiement sera adressée dans un délai d'un an à compter de la date à laquelle la décision judiciaire est devenue exécutoire.»

Les litiges au principal

9 Le 9 août 1994, Met-Trans, en qualité de titulaire d'un carnet TIR, a fait placer sous le régime communautaire du transit externe, auprès d'un bureau de douane allemand, bureau de départ, un envoi de sucre blanc au départ de la Pologne et à destination du Portugal. La date limite de représentation des marchandises au bureau de douane de Porto, bureau de destination, a été fixée au 16 août 1994.

10 À l'occasion d'un contrôle ultérieur du carnet TIR, qui lui avait été retourné revêtu de la signature et du cachet d'un bureau de douane portugais indiquant la date du 16 août 1994, le Hauptzollamt a constaté que le cachet ainsi que la signature avaient été manifestement falsifiés. Selon les informations fournies par les autorités douanières portugaises, la marchandise ne leur avait en réalité jamais été présentée.

11 Le Hauptzollamt a donc informé Met-Trans de l'absence de représentation de la marchandise transportée au bureau de destination et lui a indiqué que, n'ayant pu déterminer le lieu de l'infraction, celle-ci serait présumée avoir été commise en Allemagne, par application de l'article 454, paragraphes 2 et 3, du règlement n_ 2454/93, à moins que puissent être prouvés, dans un délai de trois mois, soit la régularité de l'opération de transit, soit le lieu effectif de l'infraction.

12 Met-Trans a alors soutenu que l'infraction avait été commise au Portugal. Pour preuve de ses dires, elle a transmis au Hauptzollamt, notamment, une déclaration de son chauffeur affirmant que les marchandises avaient été déchargées dans la zone franche du port commercial de Porto et qu'une personne se présentant comme un commissionnaire en douane avait procédé aux formalités douanières.

13 Considérant ces indications comme insuffisantes pour établir la preuve du lieu effectif de l'infraction à sa satisfaction et renverser la présomption selon laquelle l'infraction avait été commise en Allemagne, État membre où elle avait été constatée, le Hauptzollamt a estimé qu'il était compétent pour procéder au recouvrement des droits à l'importation et autres impositions. Il a donc exigé de Met-Trans, en qualité de débiteur de la dette douanière, le paiement de la somme de 24 724,11 DEM. La réclamation introduite par Met-Trans à l'encontre de l'avis de mise en recouvrement a été rejetée.

14 Le Finanzgericht Mecklenburg-Vorpommern, saisi sur requête de Met-Trans, a jugé que le Hauptzollamt n'était pas compétent pour procéder au recouvrement des droits et impositions en cause et a annulé l'avis de mise en recouvrement. Le Hauptzollamt a introduit un recours en «Revision» contre cette décision devant le Bundesfinanzhof.

15 Le 2 juin 1994, Sagpol, en qualité de titulaire d'un carnet TIR, a fait placer sous le régime communautaire du transit externe, auprès du bureau de douane allemand de Pomellen, bureau de départ, un lot de beurre au départ de la Pologne et à destination de l'Espagne. La date limite de représentation de la marchandise au bureau de douane de Madrid, bureau de destination, a été fixée au 9 juin 1994.

16 N'ayant reçu aucune information en retour de la part du bureau de destination, le Hauptzollamt lui a adressé une demande de renseignements quant à l'endroit où se trouvait la marchandise. Cette demande est restée sans réponse.

17 Par lettre du 23 décembre 1994, le Hauptzollamt a informé Sagpol que la marchandise n'avait pas été représentée au bureau de destination et qu'il n'était pas possible de déterminer le lieu où l'infraction avait été commise. Il a fixé à Sagpol un délai de trois mois pour prouver soit la régularité de l'opération de transit, soit le lieu effectif de l'infraction, faute de quoi, à l'expiration du délai imparti, l'infraction serait réputée avoir été commise en Allemagne.

18 N'ayant pas obtenu la preuve réclamée dans le délai imparti, le Hauptzollamt a adressé à Sagpol, le 18 mai 1995, un avis de mise en recouvrement des droits à l'importation et autres impositions pour un montant de 162 251,69 DEM.

19 Le 8 août 1995, le Hauptzollamt a été informé par les autorités douanières espagnoles du fait qu'il était enfin avéré que le cachet apposé sur le carnet TIR avait été falsifié.

20 Dans le cadre de sa réclamation contre l'avis de mise en recouvrement devant le Hauptzollamt, Sagpol a, par lettre du 31 août 1995, produit la lettre de voiture portant un accusé de réception apposé par une entreprise espagnole. Par lettre du 21 décembre 1995, Sagpol a également fourni une attestation écrite du chauffeur du camion ayant effectué le transport litigieux indiquant que la marchandise avait bien été livrée à Madrid. Sagpol a enfin fait valoir qu'une procédure pénale avait été ouverte en Pologne pour contrebande de marchandises, mais que la procédure en cause n'était pas dirigée contre elle. La réclamation de Sagpol a été rejetée par le Hauptzollamt.

21 Sur requête de Sagpol, le Finanzgericht Mecklenburg-Vorpommern a jugé que le Hauptzollamt n'était pas compétent pour procéder au recouvrement des droits et impositions en cause dès lors que Sagpol avait, dans les délais, prouvé de manière satisfaisante que le lieu effectif de l'infraction se situait à Madrid. En conséquence, il a annulé l'avis de mise en recouvrement. Le Hauptzollamt a introduit un recours en «Revision» contre cette décision devant le Bundesfinanzhof.

22 Le Bundesfinanzhof a décidé de surseoir à statuer dans chacune des deux affaires et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:

Dans l'affaire C-310/98:

«1) Quelles conditions faut-il exiger de la preuve du lieu effectif de l'infraction commise au cours d'un transport sous le couvert du carnet TIR, pour qu'elle satisfasse les autorités douanières [article 454, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement (CEE) n_ 2454/93 de la Commission, du 2 juillet 1993, JO L 253 p. 1]? Les déclarations du titulaire du carnet et le témoignage du chauffeur du camion qui a effectué le transport pour celui-ci peuvent-ils suffire à établir cette preuve, ou ne peut-elle être apportée qu'au moyen de documents dont il résulte clairement que les autorités compétentes de l'autre État membre ont constaté que l'infraction avait été commise sur leur territoire?

2) Si la Cour devait admettre la possibilité d'apporter la preuve du lieu effectif de l'infraction au moyen de déclarations du titulaire du carnet et du témoignage du chauffeur du camion qui a exécuté le transport, les troisième et quatrième alinéas de l'article 454, paragraphe 3, du règlement (CEE) n_ 2454/93 doivent-ils être interprétés en ce sens qu'ils s'appliquent également dans le cas où les droits et autres impositions ont été perçus dans l'État membre où l'infraction a été constatée, bien qu'il soit prouvé de manière satisfaisante que le lieu effectif de l'infraction se situait dans un autre État membre?»

Dans l'affaire C-406/98:

«1) a) Est-il compatible avec l'article 454, paragraphe 3, premier alinéa, et avec l'article 455, paragraphe 1, du règlement (CEE) n_ 2454/93 de la Commission, du 2 juillet 1993, fixant certaines dispositions d'application du règlement (CEE) n_ 2913/92 du Conseil établissant le code des douanes communautaire (JO L 253, p. 1), de convenir qu'au cas où un lot de marchandises placé sous le régime du transit externe sous couvert d'un carnet TIR n'a pas été présenté au bureau de destination, les autorités douanières de l'État membre de départ imposent au titulaire du carnet un délai de forclusion de trois mois pour fournir une preuve satisfaisante du lieu effectif de l'infraction avec pour conséquence que les éléments de preuve qui sont fournis par la suite n'affectent pas la compétence de l'État membre de départ en ce qui concerne la perception des taxes?

b) Au cas où la question qui vient d'être posée appelle une réponse négative: dans quel délai le titulaire du carnet TIR est-il en droit de faire la preuve du lieu effectif de l'infraction?

2) Dans la mesure où la réponse aux questions posées sous 1) conduit à conclure que le titulaire du carnet n'a pas laissé passer le délai pour faire la preuve du lieu effectif de l'infraction:

Quelles conditions faut-il exiger de la preuve du lieu effectif de l'infraction commise au cours d'un transport sous couvert du carnet TIR, pour qu'elle satisfasse les autorités douanières [article 454, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement (CEE) n_ 2454/93]? Les déclarations du titulaire du carnet et le témoignage du chauffeur du camion qui a effectué le transport pour celui-ci peuvent-ils suffire à établir cette preuve, ou ne peut-elle être apportée qu'au moyen de documents dont il résulte clairement que les autorités compétentes de l'autre État membre ont constaté que l'infraction avait été commise sur leur territoire?

3) Si la Cour devait admettre que la preuve du lieu effectif de l'infraction a été apportée dans les délais et si elle était d'avis que la preuve du lieu effectif de l'infraction peut être fournie de la manière qui a été décrite:

L'article 454, paragraphe 3, troisième et quatrième alinéas, du règlement (CEE) n_ 2454/93 doit-il être interprété en ce sens qu'il s'applique également dans le cas où les droits et autres impositions ont été perçus dans l'État membre où l'infraction a été constatée, bien qu'il ait été prouvé de manière satisfaisante dans le délai prescrit à cette fin en application de l'article 454, paragraphe 3, premier alinéa, et de l'article 455, premier alinéa, du règlement n_ 2454/93 que le lieu effectif de l'infraction se situait dans un autre État membre?»

23 Par ordonnance du président de la Cour du 30 avril 1999, les deux affaires ont été jointes aux fins de la procédure orale et de l'arrêt.

Sur la première question dans l'affaire C-310/98 et la deuxième question dans l'affaire C-406/98

24 Par sa première question dans l'affaire C-310/98 et sa deuxième question dans l'affaire C-406/98, qui ont le même objet, la juridiction de renvoi demande en substance si l'article 454, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement n_ 2454/93 doit être interprété en ce sens que la preuve du lieu où l'infraction ou l'irrégularité a été commise, requise par les autorités douanières de l'État membre où ladite infraction ou irrégularité a été constatée, ne peut être rapportée que par la production de documents écrits établissant que les autorités compétentes d'un autre État membre ont constaté que l'infraction ou l'irrégularité a été effectivement commise sur leur territoire.

25 Selon Met-Trans, Sagpol et les gouvernements danois et suédois, la réponse à la question ressort du libellé même de l'article 454, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement n_ 2454/93. En effet, cette disposition ne viserait aucun moyen de preuve particulier, en sorte que tous les moyens de preuve classiques, y compris la preuve testimoniale, seraient admis. Une interprétation restrictive limitant les moyens de preuve admissibles à la production de documents officiels serait donc contraire au règlement n_ 2454/93. Quant aux détails du régime des preuves ainsi qu'à la force probante requise, il conviendrait de recourir aux droits procéduraux nationaux qui, à défaut d'une réglementation communautaire plus explicite en la matière, trouveraient pleinement application.

26 Les gouvernements français, néerlandais et finlandais ainsi que la Commission partagent en revanche pour l'essentiel l'avis exprimé par la juridiction de renvoi, selon lequel il serait souhaitable que la preuve du lieu effectif de l'infraction ou de l'irrégularité soit établie de manière objective, à savoir par des documents écrits dont il ressortirait clairement que les autorités compétentes d'un autre État membre ont constaté que l'infraction ou l'irrégularité a été effectivement commise sur leur territoire. Plus particulièrement, le témoignage d'une personne susceptible de se voir reprocher une participation à l'irrégularité ne serait pas fiable. Le recours à de tels modes de preuve risquerait en outre d'avoir souvent pour conséquence que le droit de recouvrer les impositions se trouverait prescrit avant que soit résolue la question de l'autorité compétente pour l'exercer. Ainsi se trouverait compromise la finalité du règlement n_ 2454/93, qui consiste à assurer la perception des ressources propres de la Communauté ainsi que de certaines ressources de l'État membre dans lequel les marchandises ont été illégalement mises en circulation.

27 De surcroît, une analogie s'imposerait entre les articles 454, paragraphe 3, premier alinéa, et 455, paragraphe 3, du règlement n_ 2454/93. Depuis la modification introduite en 1997 par le règlement n_ 12/97, cette dernière disposition limiterait, pour une question analogue à celle réglée par l'article 454 du règlement n_ 2454/93, à savoir la régularité de l'opération effectuée sous le couvert d'un carnet TIR, les moyens de preuve admissibles à la production de documents établis par les autorités douanières.

28 À cet égard, il convient de constater qu'il ressort du libellé de l'article 454, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement n_ 2454/93 que, à l'inverse de ce que prévoit l'article 455, paragraphe 3, du même règlement, dans sa version résultant du règlement n_ 12/97, la preuve du lieu où l'infraction a été commise n'est pas limitée à certains moyens de preuve.

29 Il en résulte que, en l'absence d'une réglementation communautaire de la notion de preuve, tous les moyens de preuve que les droits procéduraux des États membres admettent dans des procédures similaires sont, en principe, recevables.

30 En conséquence, dans une situation telle que celle en cause au principal, il incombe aux autorités nationales de déterminer, selon les principes de leur droit national applicables en matière de preuve, si, dans le cas concret qui leur est soumis et au vu de l'ensemble des circonstances, la preuve du lieu où l'infraction ou l'irrégularité a été commise a été rapportée à leur satisfaction, par exemple si un témoignage doit ou non être admis et se voir reconnaître une force probante. En particulier, il leur revient d'apprécier la fiabilité d'un témoin qui a participé au transport entaché de l'irrégularité en cause.

31 Une appréciation différente ne saurait être déduite de la rédaction de l'article 455, paragraphe 3, du règlement n_ 2454/93, dans sa version résultant du règlement n_ 12/97. En effet, ainsi que M. l'avocat général l'a relevé aux points 96 à 101 de ses conclusions, cette disposition vise une situation différente, à savoir la preuve de l'infraction ou de l'irrégularité en tant que telle. Si le législateur communautaire a limité, à compter de 1997, les moyens de preuve admissibles s'agissant de l'établissement de la régularité de l'opération de transit, il ne saurait en être déduit qu'il a également voulu le faire, de manière implicite, s'agissant de l'établissement du lieu de l'infraction ou de l'irrégularité.

32 Quelles que soient les raisons qui pourraient être invoquées pour exiger une preuve objective du lieu de l'infraction, telles celles avancées par les gouvernements français, néerlandais et finlandais ainsi que par la Commission, il n'appartient pas à la Cour de se substituer au législateur communautaire et d'interpréter une disposition à l'encontre de son contenu exprès. C'est à la Commission de faire les propositions pour des modifications législatives utiles à cet effet.

33 Il convient donc de répondre à la première question dans l'affaire C-310/98 et à la deuxième question dans l'affaire C-406/98 que l'article 454, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement n_ 2454/93 doit être interprété en ce sens que la preuve du lieu où l'infraction ou l'irrégularité a été commise, requise par les autorités douanières de l'État membre où ladite infraction ou irrégularité a été constatée, n'a pas à être rapportée uniquement par la production de documents écrits établissant que les autorités compétentes d'un autre État membre ont constaté que l'infraction ou l'irrégularité a été commise sur leur territoire.

Sur la seconde question dans l'affaire C-310/98 et la troisième question dans l'affaire C-406/98

34 Par sa seconde question dans l'affaire C-310/98 et sa troisième question dans l'affaire C-406/98, la juridiction de renvoi demande en substance si l'article 454, paragraphe 3, troisième et quatrième alinéas, du règlement n_ 2454/93 doit être interprété en ce sens que le mécanisme de compensation qu'il prévoit s'applique également dans le cas où les droits et autres impositions ont été perçus par l'État membre où l'infraction a été constatée alors qu'il avait été prouvé de manière satisfaisante que le lieu effectif de l'infraction se situait dans un autre État membre.

35 Met-Trans et Sagpol soutiennent qu'il ressort à l'évidence des dispositions en cause que le mécanisme de compensation qu'elles instaurent ne vise que le cas d'un recouvrement effectué par un État membre initialement compétent en vertu de la présomption de compétence prévue à l'article 454, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement n_ 2454/93 avant que, à la suite de constatations factuelles additionnelles, soit identifié l'État membre où l'infraction a été commise, et non pas le cas d'un recouvrement illégal parce que effectué par un État membre incompétent dès l'origine. Dans le second cas, les autorités ayant commis l'erreur devraient restituer les sommes indûment perçues, tandis que celles de l'État membre du lieu effectif de l'infraction pourraient procéder au recouvrement des droits et autres impositions, sans que le mécanisme de compensation soit ouvert à cet égard.

36 Les gouvernements danois, français, néerlandais et finlandais ainsi que la Commission considèrent, quant à eux, qu'il convient également d'appliquer le mécanisme de compensation dans un cas comme celui envisagé par la juridiction de renvoi, dans lequel l'incompétence des autorités douanières qui ont procédé au recouvrement des droits et autres impositions ne résulte que de la reconnaissance a posteriori du caractère suffisant de la preuve initialement fournie. Si le mécanisme de compensation n'était pas admis, il existerait un risque grave de prescription des droits dans tous les cas où le caractère suffisant de la preuve fournie ne serait reconnu que tardivement.

37 À cet égard, il y a lieu de constater que le système de compensation prévu à l'article 454, paragraphe 3, troisième et quatrième alinéas, du règlement n_ 2454/93 instaure un mécanisme de simplification administrative et de recouvrement des droits et autres impositions dans les cas où une incertitude sur le lieu de commission des irrégularités ou infractions aux dispositions douanières risque d'entraîner une perte totale des sommes dues. À cette fin, il est prévu que, lorsque l'État membre sur le territoire duquel l'infraction a été commise ne peut pas être déterminé avec certitude, une présomption de compétence joue provisoirement au profit de l'État membre sur le territoire duquel l'infraction ou l'irrégularité a été constatée. Lorsque, ultérieurement, la compétence du premier État se trouve établie, la présomption édictée au profit du second État tombe et un mécanisme de compensation intervient entre les deux États membres, ce qui permet d'éviter que le premier État, pour des raisons de prescription, ne puisse plus recouvrer les droits et autres impositions.

38 Ce mécanisme répond donc à l'idée, d'une part, que les États membres forment, vis-à-vis des pays tiers qui sont concernés par une opération menée sous le régime communautaire du transit externe, un seul territoire douanier et, d'autre part, que la question de la détermination de l'État membre compétent pour recouvrer les droits de douane est un problème interne à la Communauté, en sorte qu'un changement de l'État membre compétent est sans conséquence sur le fait que le débiteur de la dette douanière doit s'acquitter de ces droits.

39 Si le mécanisme de compensation joue lorsqu'un État membre a procédé au recouvrement alors qu'il n'était pas compétent au regard de la règle de principe édictée à l'article 454, paragraphe 2, du règlement n_ 2454/93, comme n'étant pas l'État où le lieu de l'infraction, déterminé ultérieurement, se situe, il doit donc également jouer dans la situation, non fondamentalement différente, dans laquelle l'État membre qui a procédé au recouvrement n'était pas compétent en vertu de la même règle de principe, mais n'a, à tort, pas initialement considéré comme suffisants les éléments de preuve produits pour établir le lieu de l'infraction.

40 Il en résulte qu'il y a lieu de répondre à la seconde question posée dans l'affaire C-310/98 et à la troisième question posée dans l'affaire C-406/98 que l'article 454, paragraphe 3, troisième et quatrième alinéas, du règlement n_ 2454/93 doit être interprété en ce sens que le mécanisme de compensation qu'il prévoit s'applique également dans le cas où les droits et autres impositions ont été perçus par l'État membre où l'infraction a été constatée alors qu'il avait été prouvé de manière satisfaisante que le lieu effectif de l'infraction se situait dans un autre État membre.

Sur la première question dans l'affaire C-406/98

41 Par sa première question dans l'affaire C-406/98, la juridiction de renvoi demande en substance si les articles 454, paragraphe 3, premier alinéa, et 455, paragraphe 1, du règlement n_ 2454/93 doivent être interprétés en ce sens que les autorités douanières de l'État membre dans lequel l'infraction ou l'irrégularité a été constatée sont en droit d'imposer au titulaire du carnet TIR un délai de forclusion de trois mois pour fournir une preuve satisfaisante du lieu effectif de l'infraction ou de l'irrégularité, en sorte que les éléments de preuve fournis après l'écoulement de ce délai n'affectent plus la compétence de cet État membre en ce qui concerne le recouvrement des droits et impositions. En cas de réponse négative, la juridiction de renvoi demande quelle est la durée du délai imparti par l'article 454, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement n_ 2454/93 pour établir le lieu de commission de l'infraction ou de l'irrégularité.

42 Selon Sagpol, il résulte du libellé des dispositions en cause que le délai dans lequel le titulaire du carnet TIR peut apporter la preuve du lieu de l'infraction doit être d'un an et non pas de trois mois. En effet, l'article 454, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement n_ 2454/93 renverrait, quant à la durée du délai imparti pour rapporter la preuve requise, à l'article 455, paragraphe 1, du même règlement qui, lui-même, renverrait sans ambiguïté à l'article 11, paragraphe 1, de la convention TIR, dans lequel le seul délai mentionné serait un délai d'un an. Outre qu'un délai de forclusion de trois mois serait donc contraire à la loi, il rendrait impossible, en pratique, la preuve du lieu de commission de l'infraction.

43 Les gouvernements danois, français et finlandais ainsi que la Commission font cependant valoir que les dispositions en cause sont obscures et qu'il existe un vide ou une négligence juridique, étant donné que le délai édicté à l'article 11, paragraphe 1, de la convention TIR, auquel il est renvoyé, court à l'encontre des autorités douanières et non du titulaire du carnet TIR et que, en outre, le point de départ de ce délai est la prise en charge du carnet TIR par les autorités douanières, qui constitue un fait sans rapport avec la survenance d'une infraction ou d'une irrégularité. Ces gouvernements et la Commission font valoir que le vide juridique existant en l'état actuel des textes a été comblé par un accord administratif entre les États membres qui a fixé à trois mois le délai pour rapporter la preuve du lieu de commission de l'infraction ou de l'irrégularité. Le contenu de cet accord correspondrait d'ailleurs aux dispositions des articles 378 et 379 du règlement n_ 2454/93, qui régissent le régime du transit communautaire externe, ainsi qu'au principe d'effet utile des règles du droit communautaire en général, puisqu'un délai plus long constituerait un obstacle à la perception des droits des douanes pour des raisons de prescription.

44 À cet égard, il suffit de constater que l'article 454, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement n_ 2454/93 renvoie sans ambiguïté, quant à la durée du délai en cause, à l'article 455, paragraphe 1, du même règlement. Cette dernière disposition renvoie à son tour, quant à la durée du délai qu'elle édicte, à l'article 11, paragraphe 1, de la convention TIR. Un seul délai est mentionné à l'article 11, paragraphe 1, de la convention TIR; il s'agit d'un délai d'un an.

45 Dans ces circonstances, il ne saurait être constaté un quelconque vide juridique. En particulier, il ressort à l'évidence des dispositions citées que le renvoi indiqué se limite à la seule durée du délai, sans prendre en compte les circonstances visées par les différentes dispositions.

46 S'il est vrai, ainsi que M. l'avocat général l'expose aux points 31 à 42 de ses conclusions, que, en comparant les articles 454 et 455 du règlement n_ 2454/93, certains éléments permettent de présumer que le législateur a voulu régler la situation du délai de manière différente, de telles présomptions ne suffisent pas à fonder une interprétation dans le sens préconisé par les gouvernements danois, français et finlandais ainsi que par la Commission. Même en admettant qu'un délai de trois mois serait plus avantageux pour l'administration douanière, une telle interprétation s'éloignerait trop du libellé de la disposition en cause qui, par des renvois explicites et clairs, accorde aux justiciables un délai d'un an pour établir le lieu de l'infraction ou de l'irrégularité.

47 S'il s'avère que la législation en la matière est peu cohérente et inadaptée aux besoins de contrôle et de lutte contre la fraude, il revient au législateur communautaire d'intervenir à cet égard et de prendre les mesures appropriées.

48 Par ailleurs, dans la mesure où le texte de la loi prévoit un délai d'un an, cette réglementation ne saurait être écartée par un accord administratif entre États membres, prévoyant un délai plus court, qui n'a pas de valeur légale.

49 Il y a donc lieu de répondre à la première question posée dans l'affaire C-406/98 que les articles 454, paragraphe 3, premier alinéa, et 455, paragraphe 1, du règlement n_ 2454/93 doivent être interprétés en ce sens que les autorités douanières de l'État membre où l'infraction ou l'irrégularité a été constatée ne peuvent imposer au titulaire du carnet TIR un délai de forclusion de trois mois pour fournir une preuve satisfaisante du lieu effectif de l'infraction ou de l'irrégularité. Le délai imparti par l'article 454, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement n_ 2454/93 pour rapporter la preuve du lieu où l'infraction ou l'irrégularité a été commise est d'un an.

Décisions sur les dépenses


Sur les dépens

50 Les frais exposés par les gouvernements danois, français, néerlandais, finlandais et suédois ainsi que par la Commission, qui ont soumis des observations à la Cour, ne peuvent faire l'objet d'un remboursement. La procédure revêtant, à l'égard des parties au principal, le caractère d'un incident soulevé devant la juridiction nationale, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens.

Dispositif


Par ces motifs,

LA COUR

(cinquième chambre)

statuant sur les questions à elle soumises par le Bundesfinanzhof, par ordonnances des 7 juillet 1998 (C-310/98) et 6 octobre 1998 (C-406/98), dit pour droit:

1) L'article 454, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement (CEE) n_ 2454/93 de la Commission, du 2 juillet 1993, fixant certaines dispositions d'application du règlement (CEE) n_ 2913/92 du Conseil établissant le code des douanes communautaire, doit être interprété en ce sens que la preuve du lieu où l'infraction ou l'irrégularité a été commise, requise par les autorités douanières de l'État membre où ladite infraction ou irrégularité a été constatée, n'a pas à être rapportée uniquement par la production de documents écrits établissant que les autorités compétentes d'un autre État membre ont constaté que l'infraction ou l'irrégularité a été commise sur leur territoire.

2) L'article 454, paragraphe 3, troisième et quatrième alinéas, du règlement n_ 2454/93 doit être interprété en ce sens que le mécanisme de compensation qu'il prévoit s'applique également dans le cas où les droits et autres impositions ont été perçus par l'État membre où l'infraction a été constatée alors qu'il avait été prouvé de manière satisfaisante que le lieu effectif de l'infraction se situait dans un autre État membre.

3) Les articles 454, paragraphe 3, premier alinéa, et 455, paragraphe 1, du règlement n_ 2454/93 doivent être interprétés en ce sens que les autorités douanières de l'État membre où l'infraction ou l'irrégularité a été constatée ne peuvent imposer au titulaire du carnet TIR un délai de forclusion de trois mois pour fournir une preuve satisfaisante du lieu effectif de l'infraction ou de l'irrégularité. Le délai imparti par l'article 454, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement n_ 2454/93 pour rapporter la preuve du lieu où l'infraction ou l'irrégularité a été commise est d'un an.

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