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Document 61998CC0208

    Conclusions de l'avocat général Léger présentées le 28 octobre 1999.
    Berliner Kindl Brauerei AG contre Andreas Siepert.
    Demande de décision préjudicielle: Landgericht Potsdam - Allemagne.
    Rapprochement des législations - Crédit à la consommation - Directive 87/102 - Champ d'application - Contrat de cautionnement - Exclusion.
    Affaire C-208/98.

    Recueil de jurisprudence 2000 I-01741

    Identifiant ECLI: ECLI:EU:C:1999:537

    61998C0208

    Conclusions de l'avocat général Léger présentées le 28 octobre 1999. - Berliner Kindl Brauerei AG contre Andreas Siepert. - Demande de décision préjudicielle: Landgericht Potsdam - Allemagne. - Rapprochement des législations - Crédit à la consommation - Directive 87/102 - Champ d'application - Contrat de cautionnement - Exclusion. - Affaire C-208/98.

    Recueil de jurisprudence 2000 page I-01741


    Conclusions de l'avocat général


    1 La présente demande de décision préjudicielle porte sur la directive 87/102/CEE du Conseil, du 22 décembre 1986, relative au rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres en matière de crédit à la consommation (1) (ci-après la «directive 87/102» ou la «directive») (2).

    Le Landgericht Potsdam (Allemagne) souhaite savoir si cette directive est susceptible de s'appliquer à un contrat de cautionnement conclu par un «consommateur» en vue de garantir le remboursement d'un crédit consenti à un tiers par un établissement commercial.

    I - Le cadre juridique

    La directive 87/102

    2 La directive 87/102 garantit aux consommateurs des États membres une protection minimale dans le domaine du crédit à la consommation.

    3 L'article 1er de ce texte dispose:

    «1. La présente directive s'applique aux contrats de crédit.

    2. Aux fins de la présente directive, on entend par:

    a) `consommateur' toute personne physique qui, pour les transactions régies par la présente directive, agit dans un but pouvant être considéré comme étranger à son activité commerciale ou professionnelle;

    b) `prêteur' toute personne physique ou morale ou tout groupement de ces personnes qui consent un crédit dans le cadre de l'exercice de ses activités commerciales ou professionnelles;

    c) `contrat de crédit' un contrat en vertu duquel un prêteur consent ou s'engage à consentir à un consommateur un crédit sous la forme d'un délai de paiement, d'un prêt ou de toute autre facilité de paiement similaire.

    ...

    d) `coût total du crédit au consommateur' tous les coûts, y compris les intérêts et les autres frais, que le consommateur est tenu de payer pour le crédit;

    e) `taux annuel effectif global' le coût total du crédit au consommateur exprimé en pourcentage annuel du montant du crédit consenti, et calculé conformément [aux dispositions de la directive].»

    4 Aux termes de l'article 2 de la directive 87/102:

    «1. La présente directive ne s'applique pas:

    ...

    b) aux contrats de location sauf si ces contrats prévoient que le titre de propriété sera finalement transféré au loueur;

    ...

    f) aux contrats de crédit portant sur des montants inférieurs à 200 Écus ou supérieurs à 20 000 Écus;

    ...»

    5 En vertu de l'article 4 de la directive 87/102:

    «1. Les contrats de crédit sont établis par écrit. Le consommateur reçoit un exemplaire du contrat écrit.

    2. Le contrat écrit contient:

    a) une indication du taux annuel effectif global;

    b) une indication des conditions dans lesquelles le taux annuel effectif global peut être modifié.

    ...

    c) un relevé du montant, du nombre et de la périodicité ou des dates des versements que le consommateur doit effectuer pour rembourser le crédit et payer les intérêts et les autres frais, ainsi que le montant total de ces versements lorsque cela est possible;

    d) un relevé des [frais liés au crédit] qui ne sont pas compris dans le calcul du taux annuel effectif global mais qui incombent au consommateur dans certaines conditions, ainsi qu'une liste précisant ces conditions...

    3. Le contrat écrit comporte en outre les autres conditions essentielles du contrat.

    À titre d'exemple, l'annexe [I] de la présente directive comprend une liste de conditions jugées essentielles dont les États membres peuvent exiger la mention dans le contrat écrit.»

    6 Selon l'annexe I de la directive 87/102, la liste des «autres conditions essentielles du contrat» comprend:

    «1. [S'agissant des] Contrats de crédit ayant pour objet le financement de la fourniture de biens ou de services:

    i) une description des biens ou des services qui font l'objet du contrat;

    ii) le prix au comptant et le prix à payer en vertu du contrat de crédit;

    iii) le montant de l'acompte éventuel, le nombre et le montant des paiements échelonnés ainsi que leurs échéances...

    iv) une indication précisant que le consommateur aura droit, conformément à l'article 8 [de la directive], à une réduction en cas de remboursement anticipé [du crédit];

    v) l'identité du propriétaire des biens (s'il n'y a pas immédiatement transfert de propriété au consommateur) et les conditions dans lesquelles le consommateur en devient propriétaire;

    vi) des précisions sur les garanties éventuellement demandées;

    vii) l'indication du délai de réflexion éventuel;

    viii) l'indication de la ou des assurances éventuellement demandées et, si le choix de l'assureur n'est pas laissé au consommateur, du coût de celle(s)-ci;

    ix) l'indication de l'obligation éventuelle pour le consommateur de constituer une épargne d'un certain montant devant être placée sur un compte spécial.

    ...»

    7 L'article 15 de la directive 87/102 énonce:

    «La présente directive n'empêche pas les États membres de maintenir ou d'adopter des dispositions plus strictes pour la protection des consommateurs, compte tenu des obligations qui leur incombent au titre du traité.»

    Les dispositions nationales

    8 La République fédérale d'Allemagne a transposé la directive en droit interne par le Verbraucherkreditgesetz du 17 décembre 1990 (3) (loi sur le crédit à la consommation, ci-après le «VerbrKrG»).

    9 Aux termes de son article 1er, le VerbrKrG s'applique aux contrats de crédits conclus «... entre une personne, qui accorde un crédit dans l'exercice de son activité professionnelle (le donneur de crédit) ... et une personne physique, sous réserve que le crédit ... ne soit pas destiné à l'activité professionnelle déjà exercée par cette dernière (le consommateur)» (4).

    La législation allemande protège ainsi, outre les personnes physiques qui souscrivent un crédit à des fins privées, celles qui souscrivent un crédit en vue de financer la création d'une activité professionnelle future. En revanche, elle exclut de son champ d'application les personnes physiques qui souscrivent un crédit en vue de financer une activité professionnelle existante.

    10 L'article 7 du VerbrKrG confère au consommateur le droit de révoquer le contrat de crédit dans un délai déterminé (5). Ce délai est fixé à une semaine à compter du jour où l'intéressé a été dûment informé de l'existence de son droit de révocation. À défaut d'avoir reçu une telle information, le consommateur peut exercer son droit de révocation pendant toute la durée du contrat de crédit, mais au plus tard dans un délai d'un an à compter de la date de son engagement.

    II - Les faits et la procédure au principal

    11 Le 8 décembre 1993, la société Berliner Kindl Brauerei AG (ci-après la «brasserie») a consenti à M. Diesterbeck (autrement dénommé le «débiteur principal») un prêt d'un montant de 32 000 DEM ainsi qu'une location de mobilier d'une valeur de 58 523 DEM. La conclusion de ces contrats visait à permettre au débiteur principal de financer la création d'un restaurant.

    12 Par une déclaration écrite du 20 décembre 1993, M. Siepert s'est porté caution des obligations de M. Diesterbeck envers la brasserie pour un montant de 90 000 DEM. Il est constant que cette déclaration est intervenue en dehors du cadre de l'activité professionnelle de M. Siepert (6). Par ailleurs, ce dernier n'a pas été informé de l'existence d'un droit de révoquer le cautionnement (7).

    13 En juin 1994, M. Siepert est revenu sur son consentement. Lors d'un entretien avec un préposé de la brasserie, il a indiqué ne plus vouloir se porter caution de M. Diesterbeck et a révoqué sa déclaration de cautionnement (8).

    14 M. Diesterbeck ne s'étant pas conformé à ses obligations, la brasserie a décidé de résilier le contrat de prêt et de poursuivre le recouvrement de sa créance par voie judiciaire. Elle a ainsi obtenu la condamnation du débiteur principal à lui verser une somme de 28 952,43 DEM.

    15 En outre, la brasserie a assigné M. Siepert en paiement de la somme litigieuse au titre du contrat de cautionnement.

    16 Le 8 décembre 1997, le Landgericht Potsdam a rendu un jugement par défaut condamnant l'intéressé à s'exécuter.

    17 M. Siepert a cependant fait opposition contre ce jugement. Il soutient qu'il a valablement révoqué le contrat de cautionnement dans le délai d'un an prescrit par l'article 7 du VerbrKrG.

    18 Dans son ordonnance de renvoi, le Landgericht Potsdam constate que le contrat de prêt conclu entre la brasserie et le débiteur principal relève du champ d'application du VerbrKrG. En revanche, le juge de renvoi se demande si les dispositions de la législation allemande sont applicables au contrat de cautionnement conclu par M. Siepert.

    III - La question préjudicielle

    19 Considérant que, pour se prononcer sur ce point, il était nécessaire de déterminer le champ d'application de la directive 87/102, le Landgericht Potsdam a décidé de surseoir à statuer et de vous soumettre la question suivante:

    «Un contrat de cautionnement qui a été conclu par une personne physique n'agissant pas dans le cadre d'une activité professionnelle tombe-t-il dans le champ d'application de la directive du Conseil, du 22 décembre 1986, relative au rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres en matière de crédit à la consommation (JO L 42 du 12 février 1987, p. 48) quand il garantit le remboursement d'une dette que le débiteur principal n'a pas contractée dans le cadre de l'activité professionnelle qu'il exerce déjà?»

    IV - Sur la compétence de la Cour

    20 Lors de la procédure orale, la brasserie a contesté la recevabilité du renvoi préjudiciel.

    21 Elle soutient que, indépendamment de la question posée, la directive 87/102 n'est pas applicable au litige au principal.

    Premièrement, la directive définirait le «consommateur» comme une personne physique agissant dans un but étranger à son activité professionnelle. Elle ne serait donc pas susceptible de s'appliquer à un particulier qui, comme en l'espèce, souscrit un crédit en vue de financer la création d'une activité commerciale. Seule la législation allemande protégerait cette catégorie de «consommateurs».

    Deuxièmement, la directive ne s'appliquerait pas aux contrats de crédit dont le montant est supérieur à 20 000 écus. Or, le crédit souscrit par le débiteur principal excéderait ce plafond puisqu'il porterait sur un montant total de 90 523 DEM, soit 46 903 écus (9). Sur ce point, les contrats litigieux relèveraient néanmoins du champ d'application du VerbrKrG. En effet, pour les crédits destinés au financement de la création d'une activité professionnelle, la législation allemande fixerait un plafond supérieur à celui de la directive, à savoir 100 000 DEM.

    Troisièmement, la directive ne conférerait pas au consommateur le droit de révoquer le contrat de crédit. Dès lors, à supposer même que la protection prévue par la directive s'étende à la caution, M. Siepert ne pourrait, en tout état de cause, se fonder sur le droit communautaire en vue de renoncer aux effets de sa déclaration de cautionnement. Seul l'article 7 du VerbrKrG lui accorderait cette faculté.

    En conclusion, le litige au principal échapperait à l'application de la directive et relèverait exclusivement des dispositions du VerbrKrG.

    22 L'argumentation de la brasserie soulève a priori un problème analogue à celui qui se trouve à l'origine de votre jurisprudence Dzodzi (10). La brasserie pose, en substance, la question de savoir si votre Cour est compétente, au titre de l'article 177 du traité, pour interpréter la directive 87/102 alors que le litige au principal se situerait en dehors du champ d'application de cette directive.

    23 Rappelons que, aux termes de la jurisprudence Dzodzi, votre «Cour s[e] ... déclar[e] compétente pour statuer sur des demandes préjudicielles portant sur des dispositions communautaires dans des situations dans lesquelles les faits au principal se situ[ent] en dehors du champ d'application du droit communautaire, mais dans lesquelles lesdites dispositions de ce droit [ont] été rendues applicables par le droit national...» (11).

    Vous avez également dit pour droit que: «La Cour est compétente, au titre de l'article 177 du traité CE, pour interpréter le droit communautaire lorsque celui-ci ne régit pas directement la situation en cause, mais que le législateur national a décidé, lors de la transposition en droit national des dispositions d'une directive, d'appliquer le même traitement aux situations purement internes et à celles régies par la directive, en sorte qu'il a aligné sa législation interne sur le droit communautaire» (12).

    24 Cependant, cette jurisprudence ne nous paraît pas pertinente en l'espèce (13).

    25 En effet, la jurisprudence Dzodzi (14) vise le cas où les autorités d'un État membre ont, de leur propre initiative et de manière unilatérale, étendu le champ d'application du droit communautaire à des situations que ce droit n'avait pas vocation à régir.

    Ainsi, dans l'affaire Gmurzynska-Bscher (15), le législateur allemand avait renvoyé à la nomenclature du tarif douanier commun - applicable aux importations en provenance de pays tiers - pour déterminer le taux d'une taxe nationale applicable à l'importation de marchandises en provenance d'un autre État membre.

    De même, dans l'affaire Dzodzi (16), la législation belge avait étendu le bénéfice de certains droits communautaires - notamment le droit de séjour - au conjoint étranger du ressortissant belge même dans le cas où ce dernier n'avait jamais exercé son droit de libre circulation à l'intérieur de la Communauté.

    Dans l'affaire Leur-Bloem (17) également, le législateur néerlandais avait étendu le régime de la directive 90/434/CEE (18) - applicable aux fusions, scissions, apports d'actifs et échanges d'actions intéressant des sociétés d'États membres différents - aux opérations de fusions «internes» intervenant entre sociétés néerlandaises.

    26 Or, la présente affaire diffère fondamentalement de ces cas de figure.

    En effet, la directive 87/102 prévoit une harmonisation minimale. Elle autorise explicitement les États membres à maintenir ou à adopter des dispositions plus strictes pour la protection des consommateurs.

    Dès lors, en étendant l'application de la directive à des personnes et des situations qu'elle ne visait pas expressément, les autorités allemandes n'ont pas agi de manière autonome ou unilatérale, mais en vertu de la directive elle-même et en parfaite conformité avec la volonté du législateur communautaire. L'«extension» du champ d'application de la directive opérée par les autorités allemandes revêt en ce sens un fondement communautaire.

    En outre, cette extension est manifestement intervenue dans les limites du domaine que la directive avait pour vocation de régir, à savoir le crédit à la consommation (19).

    27 Dans ces conditions, nous pensons que les contrats de crédit conclus par les parties au principal relèvent du champ d'application de la directive 87/102 et, plus particulièrement, de son article 15 qui édicte la clause minimale.

    28 Nous proposons donc à votre Cour de se déclarer compétente pour statuer sur la présente demande de décision préjudicielle.

    V - La réponse à la question préjudicielle

    29 Le juge de renvoi demande, en substance, si la directive est susceptible de s'appliquer à un contrat de cautionnement conclu par une personne physique en vue de garantir le remboursement d'un crédit consenti à un tiers par un établissement commercial.

    30 La question n'apparaît pas entièrement nouvelle devant votre Cour. En effet, dans l'affaire Dietzinger (20), vous avez été saisis d'une demande similaire portant sur la directive 85/577/CEE relative à la protection des consommateurs dans les situations de «démarchage à domicile» (21). Vous avez considéré qu'un contrat de cautionnement conclu par un consommateur en dehors des établissements d'une institution financière relevait du champ d'application de la directive 85/577 lorsqu'il garantissait le remboursement d'une dette contractée par un autre consommateur en vertu d'un contrat régi par cette même directive (22).

    31 Votre Cour est donc appelée à dire si la directive 87/102 peut recevoir une interprétation analogue à celle de la directive 85/577.

    32 En vue de répondre à cette question, il y a lieu, conformément aux méthodes d'interprétation retenues par votre Cour (23), d'examiner le libellé, l'économie ainsi que les objectifs de la directive 87/102.

    Le libellé de la directive 87/102

    33 La directive 87/102 définit son champ d'application de manière explicite.

    34 Aux termes de son article 1er, elle s'applique aux «contrats de crédit», c'est-à-dire aux contrats par lesquels «un prêteur consent ou s'engage à consentir à un consommateur un crédit sous la forme d'un délai de paiement, d'un prêt ou de toute autre facilité de paiement similaire».

    35 Or, telle qu'elle est définie ci-dessus, la notion de «contrat de crédit» ne couvre pas le cautionnement.

    36 En effet, le cautionnement constitue une sûreté personnelle. Plus exactement, il s'agit d'un contrat par lequel une personne s'engage envers le créancier, à titre de garantie, à remplir l'obligation du débiteur principal pour le cas où ce dernier n'y aurait pas lui-même satisfait (24). Le cautionnement ne représente donc ni un «prêt», ni un «délai de paiement», ni aucune «autre facilité de paiement similaire» au sens de la directive.

    37 Par ailleurs, dans la mesure où l'engagement de la caution ne donne lieu à aucune contrepartie de la part du créancier ou du débiteur principal, le cautionnement constitue également un contrat unilatéral.

    38 Il est vrai que, dans l'arrêt Dietzinger, votre Cour a jugé que ce caractère unilatéral ne permettait pas d'exclure le cautionnement du champ d'application de la directive 85/577. Elle a précisé que «rien dans le libellé de la directive [85/577] n'exige que la personne qui a conclu le contrat en vertu duquel des biens doivent être livrés ou des services effectués soit le destinataire de ces biens ou services» (25).

    39 Cependant, la directive 87/102 contient une série de dispositions qui font apparaître que son champ d'application est strictement limité aux contrats synallagmatiques.

    Ainsi, dans le cadre de la définition du «contrat de crédit», l'expression «un prêteur consent ou s'engage à consentir à un consommateur un crédit» révèle déjà que les rapports contractuels régis par la directive sont des rapports bilatéraux.

    De même, l'article 1er, paragraphe 2, sous d), de la directive énonce que le «coût total du crédit au consommateur» comprend «tous les coûts ... que le consommateur est tenu de payer pour le crédit» (26).

    L'article 4, paragraphe 2, sous c), de la directive prévoit encore que le «contrat de crédit contient ... un relevé du montant, du nombre et de la périodicité ... des versements que le consommateur doit effectuer pour rembourser le crédit et payer les intérêts» (27).

    Un autre exemple est fourni par l'article 8 de la directive qui dispose que «Le consommateur a le droit de s'acquitter par anticipation des obligations qui découlent pour lui du contrat de crédit» (28).

    40 Il ressort du libellé de ces dispositions que les conventions régies par la directive 87/102 sont caractérisées par l'existence d'obligations réciproques entre les parties concernées. Sur ce point, la jurisprudence Dietzinger ne nous paraît donc pas transposable au cas d'espèce.

    41 Les dispositions précitées permettent également de préciser la notion de «consommateur» qui figure à l'article 1er de la directive.

    En effet, la directive 87/102 semble adopter une définition très large du «consommateur». Elle couvre - rappelons-le - «toute personne physique qui ... agit dans un but pouvant être considéré comme étranger à son activité commerciale ou professionnelle». A priori, une personne physique qui accepterait de se porter caution des obligations d'un tiers en dehors du cadre de son activité professionnelle serait donc susceptible d'être qualifiée de «consommateur» au sens de la directive.

    Toutefois, les dispositions précitées (29) restreignent sensiblement la portée de cette définition. Leur libellé indique très clairement que, dans le cadre de la directive, le consommateur est le débiteur principal. À chaque fois que le législateur communautaire désigne le «consommateur», il lui confère des droits ou des obligations qui sont précisément énoncées comme étant celles qui incombent au bénéficiaire ou au destinataire du crédit. Le législateur considère donc que, par «consommateur» au sens de la directive 87/102, il faut entendre le preneur de crédit.

    Les travaux préparatoires confirment cette interprétation. En effet, dans sa proposition de directive, la Commission avait suggéré de définir le contrat de crédit comme «un contrat en vertu duquel un prêteur consent à un consommateur un crédit ... et en vertu duquel le consommateur rembourse le crédit, intérêts et frais éventuels compris...» (30).

    42 Or, dans la mesure où la caution n'est pas partie au contrat de crédit, elle ne saurait être considérée comme un «consommateur» au sens de la directive 87/102.

    43 On retiendra donc que, au terme d'une interprétation littérale, la directive 87/102 n'est pas susceptible de s'appliquer à un contrat de cautionnement.

    L'économie de la directive 87/102

    44 Dans leurs observations écrites, le gouvernement français (31) et la Commission (32) ont souligné que le cautionnement n'était pas expressément exclu du champ d'application de la directive 87/102. En particulier, il ne figurerait pas à l'article 2 de ce texte qui énumère les différents contrats et situations auxquels la directive n'est pas applicable. La Commission en conclut que le législateur communautaire n'a adopté aucune position particulière - ni favorable ni défavorable - à l'égard du cautionnement.

    45 Nous éprouvons quelques difficultés à suivre la Commission sur ce terrain.

    46 En effet, la directive 87/102 contient plusieurs références aux sûretés réelles et personnelles.

    L'article 2, paragraphe 3, par exemple, prévoit que «[certaines] dispositions [de la directive] ne s'appliquent pas aux contrats de crédit ou promesses de crédit garantis par une hypothèque sur un bien immeuble...» (33).

    De même, au titre des conditions essentielles du contrat de crédit dont les États membres peuvent exiger la mention écrite, l'annexe I de la directive cite «[l]es garanties éventuellement demandées» au consommateur (34).

    47 Les propositions de directive présentées par la Commission au Conseil contenaient également de telles références.

    Dans sa proposition initiale, la Commission avait, par exemple, suggéré que le contrat de crédit «comporte les clauses essentielles qui ont été convenues et notamment ... des précisions sur les sûretés éventuellement demandées» (35).

    De manière similaire, la proposition modifiée de directive prévoyait que «Le document écrit contient au moins ... une indication des sûretés éventuellement demandées» (36).

    48 L'ensemble de ces références révèle que, dans le cadre de l'élaboration de la directive, le législateur communautaire a eu conscience de l'existence des sûretés réelles et personnelles. En particulier, il était averti de ce que l'octroi d'un crédit était fréquemment subordonné à la condition que le consommateur garantisse, d'une manière ou d'une autre, le remboursement de sa dette. Dans ces conditions, le fait que la directive ne contienne aucune disposition définissant le statut ou le régime des «garanties demandées» atteste de la volonté du législateur de maintenir les sûretés en dehors du champ d'application de la directive.

    49 Au demeurant, plusieurs institutions communautaires ont adopté des positions qui témoignent encore plus clairement de l'intention du législateur.

    En effet, en 1995 et en 1997, la Commission a présenté au Conseil deux rapports sur l'application de la directive 87/102 et la manière dont les États membres avaient transposé ce texte en droit interne (37).

    Or, dans ses deux rapports, elle a constaté que: «Bien que la directive 87/102 ne traite pas des cautions, des dispositions ont été prises dans plusieurs États membres [à leur égard]. La Commission propose d'étendre aux cautions certaines des obligations d'informations prévues par la directive» (38).

    Le Parlement européen, pour sa part, s'est prononcé sur le premier rapport de la Commission dans une résolution du 11 mars 1997. A cet égard, il a «fait observer qu'il y a lieu de prendre en compte, pour ce qui est de l'extension aux garants et cautions de certaines des obligations visées à la directive 87/102/CEE, des différences de fait par rapport [à l'] emprunteur...» (39).

    50 Comme l'a souligné à juste titre la brasserie, la Commission et le Parlement examinent, dans les documents précités, la question de savoir si de lege ferenda les dispositions de la directive doivent être étendues aux sûretés personnelles. Il en résulte que de lege lata le cautionnement est exclu du champ d'application de la directive.

    51 S'agissant des autres dispositions de la directive 87/102, nous proposons d'examiner leur fonction à la lumière des objectifs qu'elles poursuivent.

    Les objectifs de la directive 87/102

    52 La directive 87/102 poursuit un objectif général de protection des consommateurs (40). Son préambule énonce:

    «considérant que les programmes de la Communauté économique européenne pour une politique de protection et d'information des consommateurs prévoient notamment que le consommateur doit être protégé contre des conditions abusives de crédit et qu'il y a lieu d'harmoniser en priorité les conditions générales relatives au crédit à la consommation; [sixième considérant]

    considérant que les disparités entre les législations et les pratiques font que le consommateur ne bénéficie pas, en matière de crédit à la consommation, de la même protection dans tous les États membres» [septième considérant] .

    53 La directive 87/102 vise, plus spécifiquement, à fournir au consommateur une information adéquate sur le coût et les conditions du crédit (41). En effet, son neuvième considérant indique:

    «considérant que le consommateur devrait recevoir des informations adéquates sur les conditions et le coût du crédit, ainsi que sur ses obligations; que ces informations devraient comporter, notamment, le taux annuel effectif global afférent au crédit ou, à défaut, le montant total que le consommateur est tenu de payer au titre du crédit; que, en attendant une décision sur la ou les méthode(s) communautaire(s) de calcul du taux annuel effectif global, les États membres devraient être en mesure de continuer d'appliquer les méthodes ou pratiques existantes pour le calcul de ce taux, ou, à défaut, devraient fixer des dispositions pour indiquer le coût total du crédit à la consommation» (42).

    54 La plupart des dispositions de la directive visent, dès lors, à permettre au consommateur de connaître précisément le coût du crédit ainsi que les frais qui y sont liés.

    L'article 3 de la directive prévoit ainsi que toute publicité ou toute offre de crédit affichée dans des locaux commerciaux qui contient une indication concernant le coût du crédit - telle que le taux d'intérêt - doit mentionner le «taux annuel effectif global» (43).

    De même, l'article 4 de la directive impose la forme écrite pour les contrats de crédit. Par le biais du contrat écrit, le consommateur doit notamment être informé du montant, du nombre et de la périodicité des versements qu'il est tenu d'effectuer pour rembourser le crédit. Le contrat doit également fournir un relevé des frais liés au crédit qui ne sont pas compris dans le calcul du taux annuel effectif global, mais qui incombent au consommateur. En outre, le document écrit doit contenir les «autres conditions essentielles du contrat». À titre d'exemple de ces conditions, l'annexe I de la directive cite, entre autres, le plafond du crédit; les conditions de remboursement du crédit; le prix au comptant et le prix à payer en vertu du contrat de crédit; le montant de l'acompte éventuel, le nombre et le montant des paiements échelonnés ainsi que leurs échéances; le coût des assurances éventuellement demandées au consommateur en vue de garantir le remboursement du crédit, etc.

    De telles obligations d'information se retrouvent encore à l'article 6 de la directive. Le premier paragraphe de cette disposition énonce que, «lorsqu'un contrat a été passé entre un établissement de crédit ... et un consommateur pour l'octroi d'un crédit sous la forme d'une avance sur compte courant ... le consommateur est informé au moment de la conclusion du contrat ou avant celle-ci ... du plafond éventuel du crédit [ainsi que] du taux d'intérêt annuel et des frais applicables...». Le paragraphe 2 précise que: «De plus, en cours de contrat, le consommateur est informé de toute modification du taux d'intérêt annuel ou des frais au moment où intervient cette modification».

    55 Toutes ces dispositions tendent à informer le consommateur sur la portée exacte de ses engagements. En particulier, elles visent à lui permettre de connaître précisément le montant des sommes qu'il s'engage à payer ou à rembourser en vertu du contrat de crédit.

    56 Il en résulte que la directive a notamment pour objectif de permettre au consommateur de conclure et d'exécuter le contrat de crédit en pleine connaissance de cause. Elle entend ainsi le protéger contre certains risques inhérents au crédit à la consommation, tels que les éventuelles pratiques abusives des professionnels du crédit, les engagements financiers inconsidérés ou encore ce que l'on pourrait appeler le «pouvoir d'achat illusoire».

    57 L'interprétation téléologique de la directive confirme donc que ce texte est essentiellement destiné à protéger le preneur de crédit.

    58 Certains intervenants (44) ont cependant fait valoir que la directive 87/102 visait à accorder aux consommateurs le plus haut degré de protection.

    Ils soutiennent que la protection prévue par la directive doit être étendue à la caution lorsque celle-ci s'engage à titre privé, en dehors du cadre de son activité commerciale ou professionnelle. En effet, dans le domaine du crédit à la consommation, la caution se trouverait dans une position de «fragilité» comparable à celle du preneur de crédit. Il s'agirait souvent d'un proche de l'emprunteur - un ami ou un parent - qui souscrirait son engagement dans un contexte de pression affective. La nécessité de protéger la caution serait d'autant plus grande que celle-ci accepterait de répondre du remboursement du crédit sans que son engagement donne lieu à une contrepartie de la part du prêteur ou du débiteur principal.

    59 Nous partageons largement les préoccupations exprimées par ces intervenants. Toutefois, indépendamment du fait que la directive 87/102 n'a pas vocation à s'appliquer aux sûretés personnelles, il nous semble que l'extension qu'ils préconisent n'est pas de nature à assurer une protection adéquate aux cautions.

    60 En effet, les risques auxquels s'exposent les sûretés personnelles sont d'une nature différente de ceux qui caractérisent le crédit à la consommation. Ils proviennent essentiellement de l'état d'insolvabilité du débiteur principal ainsi que de l'ignorance du mécanisme du cautionnement.

    61 En conséquence, une protection adéquate des sûretés personnelles impliquerait que celles-ci soient informées d'éléments autres que les conditions et le coût du crédit. Comme l'ont souligné à juste titre les gouvernements allemand (45) et finlandais (46), une telle information devrait notamment porter sur la solvabilité du preneur de crédit, sur le régime juridique du cautionnement (régime général, cautionnement subsidiaire, cautionnement solidaire, etc.) et sur les conditions précises dans lesquelles la caution peut être tenue de rembourser le crédit. On peut également penser que, dans l'hypothèse où le preneur de crédit aurait souscrit une assurance en vue de garantir le remboursement de sa dette, il serait utile d'informer la caution des voies de recours éventuelles dont elle disposerait à l'encontre de l'assureur.

    62 De ce point vue, les obligations d'information prévues par la directive 87/102 ne paraissent donc pas adaptées aux besoins des sûretés personnelles qui s'engagent à titre privé à garantir le remboursement d'un crédit à la consommation.

    63 Plusieurs intervenants (47) ont également soutenu que le cautionnement présentait un lien étroit avec le contrat de crédit. Ils ont rappelé que, dans l'arrêt Dietzinger, votre Cour s'était fondée sur l'existence de ce lien pour parvenir à la conclusion qu'un cautionnement était susceptible de relever de la directive 85/577.

    De fait, dans l'arrêt précité, votre Cour a constaté que «... l'octroi d'un crédit constitue un service et [que] le contrat de cautionnement n'existe qu'accessoirement à un contrat principal, dont il est, en pratique, le plus souvent une condition préalable» (48).

    Vous avez jugé que: «Eu égard au lien étroit entre le contrat de crédit et le cautionnement en garantissant l'exécution ainsi qu'au fait que la personne s'engageant à garantir le remboursement d'une dette peut avoir la qualité de codébiteur solidaire ou de caution, il ne saurait être exclu que le cautionnement relève de la directive [85/577]» (49).

    64 Le cautionnement présente effectivement un lien étroit avec le contrat de crédit à deux égards.

    D'une part, sur le plan économique, les organismes de crédit et les établissements financiers subordonnent fréquemment l'octroi d'un crédit à la condition que le bénéficiaire du crédit soit en mesure de garantir le remboursement de sa dette au moyen d'une sûreté réelle ou personnelle.

    D'autre part, sur le plan juridique, le cautionnement constitue un contrat accessoire au contrat principal, en l'occurrence le contrat de crédit. La possibilité, pour le créancier, de se retourner contre la caution dépend donc de l'existence et de l'étendue de la dette principale dont elle garantit l'exécution.

    65 Cependant, nous ne sommes pas convaincu par les raisons pour lesquelles votre Cour a déduit de l'existence de ce lien étroit qu'un cautionnement était susceptible de relever de la directive 85/577.

    La motivation de l'arrêt Dietzinger sur ce point est, du reste, laconique. Elle se limite à présenter quelques caractéristiques du cautionnement - son lien étroit avec le contrat de crédit et le fait que le «garant» puisse avoir la qualité de codébiteur solidaire ou de caution - pour établir, de manière quasi automatique, le principe selon lequel un contrat de cautionnement peut relever du champ d'application de la directive 85/577.

    Certes, la référence au caractère accessoire du cautionnement révèle que l'arrêt Dietzinger a fait une application particulière de l'adage accessorium sequitur principale (50). Votre Cour a considéré que, dans la mesure où le contrat de crédit relevait du champ d'application de la directive 85/577, le contrat de cautionnement devait suivre le sort du contrat principal.

    66 Toutefois, cet élément nous paraît insuffisant pour justifier, en l'espèce, l'incorporation du cautionnement dans le champ d'application de la directive 87/102 (51). En effet, il résulte clairement du libellé, de l'économie et des objectifs de la directive 87/102 que ce texte n'est pas susceptible de s'appliquer à un contrat de cautionnement conclu en vue de garantir le remboursement d'un crédit à la consommation.

    67 Comme l'a souligné à juste titre l'avocat général Jacobs dans ses conclusions dans l'affaire Dietzinger:

    «Il n'est naturellement pas contestable que la directive [85/577] vise la protection des consommateurs. Il n'en résulte cependant pas que tous les consommateurs sont protégés en toutes circonstances par la directive [85/577]: comme d'autres directives visant à la protection du consommateur, la directive [85/577] s'applique uniquement à certaines transactions...» (52).

    68 En l'espèce, la directive 87/102 s'applique aux contrats de crédit. Elle ne nous paraît pas applicable aux contrats de cautionnement.

    69 Pour conclure, nous souhaiterions - comme l'a fait l'avocat général Jacobs dans ses conclusions précitées (53) - attirer l'attention du juge de renvoi sur le fait que notre constatation n'est pas de nature à le priver de la possibilité d'interpréter différemment le VerbrKrG. En effet, l'article 15 de la directive 87/102 autorise les États membres à maintenir ou à adopter des dispositions plus strictes pour la protection des consommateurs, sous réserve des obligations qui leur incombent au titre du traité. Dès lors, rien dans le droit communautaire ne s'opposerait à ce que le Landgericht Potsdam conclue que, en droit allemand, un contrat de cautionnement est susceptible de relever du champ d'application du VerbrKrG.

    Conclusion

    70 Sur la base des considérations qui précèdent, nous vous proposons de dire pour droit:

    «Un contrat de cautionnement conclu par une personne physique agissant dans un but étranger à son activité commerciale ou professionnelle et destiné à garantir le remboursement d'un crédit consenti par un prêteur à un tiers ne relève pas du champ d'application de la directive 87/102/CEE du Conseil, du 22 décembre 1986, relative au rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres en matière de crédit à la consommation.»

    (1) - JO 1987, L 42, p. 48.

    (2) - La directive 87/102 a été modifiée à deux reprises, par la directive 90/88/CEE du Conseil, du 22 février 1990 (JO L 61, p. 14), et par la directive 98/7/CE du Parlement européen et du Conseil, du 16 février 1998 (JO L 101, p. 17). Sauf indication contraire, nous utiliserons les termes «directive 87/102» ou «directive» pour désigner la directive 87/102, telle que modifiée par les deux textes précités.

    (3) - BGBl. I, p. 2840.

    (4) - L'article 1er, paragraphe 2, du VerbrKrG définit le «contrat de crédit» comme «... un contrat par lequel un donneur de crédit accorde ou promet à un consommateur, à titre onéreux, un crédit, prenant la forme d'un prêt, d'un report de paiement ou d'une autre aide financière».

    (5) - L'article 7 du VerbrKrG est libellé comme suit:

    «1) La déclaration par laquelle le consommateur dit vouloir conclure un contrat de crédit ne prend effet que si l'intéressé ne l'a pas révoquée par écrit dans un délai d'une semaine.

    2) L'envoi de la révocation en temps utile suffit pour le respect du délai. Celui-ci ne court qu'à partir du moment où le consommateur reçoit une information clairement lisible sur la disposition de la première phrase, son droit à révocation. Cet avis doit être signé à part par le consommateur et comporte le nom et l'adresse de la personne à qui la révocation doit être envoyée. Si le consommateur n'est pas informé de la teneur du point 2, le droit à révocation ne s'éteint que lorsque les deux parties ont accompli en totalité la prestation, mais au plus tard un an après que le consommateur a déclaré vouloir conclure un contrat de crédit.»

    (6) - Point I.1 de l'ordonnance de renvoi.

    (7) - Point I.2 de l'ordonnance de renvoi.

    (8) - Dans ses observations écrites (points 1 et 2), la brasserie a formellement contesté cet élément de fait. Elle soutient que M. Siepert n'a jamais procédé, fût-ce oralement, à la révocation de sa déclaration de cautionnement. Sur ce point, nous rappellerons que la procédure visée par l'article 177 du traité CE (devenu article 234 CE) est fondée sur une nette séparation des fonctions entre les juridictions nationales et la Cour et que toute appréciation ou vérification des faits de la cause relève de la compétence exclusive du juge national (voir, notamment, les arrêts du 19 décembre 1968, Salgoil, 13/68, Rec. p. 661, 672; du 16 mars 1978, Oehlschläger, 104/77, Rec. p. 791, point 4; du 16 juillet 1998, Dumon et Froment, C-235/95, Rec. p. I-4531, point 25, et du 5 octobre 1999, Lirussi et Bizzaro, C-175/98 et C-177/98, non encore publié au Recueil, point 37). Votre Cour est uniquement habilitée à se prononcer sur l'interprétation ou la validité d'un texte communautaire à partir des faits qui lui sont indiqués par la juridiction nationale (voir, notamment, les arrêts Oehlschläger, précité, point 4; du 2 juin 1994, AC-ATEL Electronics Vertriebs, C-30/93, Rec. p. I-2305, point 16, et du 20 mars 1997, Phytheron International, C-352/95, Rec. p. I-1729, point 11). Or, dans son ordonnance de renvoi (point I.2), le Landgericht Potsdam a indiqué que: «Lors d'un entretien fin juin 1994, le défendeur [M. Siepert] a fait savoir à un préposé de la demanderesse [la brasserie] qu'il n'avait aucune intention de se porter caution et révoquait sa déclaration en ce sens». Le juge de renvoi a également rejeté un argument de la brasserie selon lequel la révocation orale de la déclaration de cautionnement de M. Siepert ne serait pas valable en droit national (point III.1 de l'ordonnance de renvoi). Dans ces conditions, nous ne pouvons - pas plus que votre Cour - remettre ces données factuelles en cause, sous peine d'empiéter sur les prérogatives des juridictions nationales appelées à connaître du litige au principal.

    (9) - À la date de la conclusion des contrats entre la brasserie et le débiteur principal, le 8 décembre 1993, le taux de change entre l'écu et le DEM était de 1 écu pour 1,93002 DEM.

    (10) - Sur cette jurisprudence, inaugurée en 1985, voir les arrêts du 26 septembre 1985, Thomasdünger (166/84, Rec. p. 3001); du 18 octobre 1990, Dzodzi (C-297/88 et C-197/89, Rec. p. I-3763); du 8 novembre 1990, Gmurzynska-Bscher (C-231/89, Rec. p. I-4003); du 24 janvier 1991, Tomatis et Fulchiron (C-384/89, Rec. p. I-127); du 25 juin 1992, Federconsorzi (C-88/91, Rec. p. I-4035); du 12 novembre 1992, Fournier (C-73/89, Rec. p. I-5621); du 28 mars 1995, Kleinwort Benson (C-346/93, Rec. p. I-615); du 17 juillet 1997, Leur-Bloem (C-28/95, Rec. p. I-4161); Giloy (C-130/95, Rec. p. I-4291), et du 3 décembre 1998, Schoonbroodt (C-247/97, Rec. p. I-8095).

    (11) - Arrêt Schoonbroodt, précité, point 14.

    (12) - Arrêt Leur-Bloem, précité, point 1 du dispositif.

    (13) - La jurisprudence Dzodzi a suscité un important débat dans les milieux du droit communautaire. Parmi vos avocats généraux, voir les conclusions de l'avocat général Mancini dans l'affaire Thomasdünger, précitée; les conclusions de l'avocat général Darmon dans les affaires Dzodzi et Gmurzynska-Bscher, précitées; les conclusions de l'avocat général Tesauro dans l'affaire Kleinwort Benson, précitée, et les conclusions de l'avocat général Jacobs dans les affaires Leur-Bloem et Giloy, précitées. Dans la doctrine, voir notamment Rodière P., «Sur les effets directifs du droit (social) communautaire», dans Revue trimestrielle de droit européen, 1991, p. 565 à 586; Martin D., «Du bon usage de l'article 177 du Traité de Rome», dans Revue de jurisprudence de Liège, Mons et Bruxelles, 1991, p. 189 à 191; Simon D., note sous les arrêts Dzodzi et Gmurzynska-Bscher, précités, dans Journal du droit international, 1991, p. 455 à 457, et Bravo-Ferrer Delgado M. et La Casta Muñoa N., note sous les arrêts Dzodzi et Gmurzynska-Bscher, précités, dans Common Market Law Review, 1992, p. 152 à 159.

    (14) - À l'exception des arrêts Federconsorzi et Fournier, précités, auxquels il convient de réserver une place particulière dans votre jurisprudence (voir, sur ce point, les conclusions de l'avocat général Jacobs dans les affaires Fournier, précitée, points 17 à 20, et Leur-Bloem et Giloy, précitées, point 77).

    (15) - Précitée.

    (16) - Précitée.

    (17) - Précitée.

    (18) - Directive du Conseil, du 23 juillet 1990, concernant le régime fiscal commun applicable aux fusions, scissions, apports d'actifs et échanges d'actions intéressant des sociétés d'États membres différents (JO L 225, p. 1).

    (19) - Voir, à cet égard, le raisonnement développé par l'avocat général Jacobs dans ses conclusions dans les affaires Leur-Bloem et Giloy, précitées, point 80.

    (20) - Arrêt du 17 mars 1998 (C-45/96, Rec. p. I-1199, ci-après l'«arrêt Dietzinger»).

    (21) - Directive du Conseil, du 20 décembre 1985, concernant la protection des consommateurs dans le cas de contrats négociés en dehors des établissements commerciaux (JO L 372, p. 31).

    (22) - Arrêt Dietzinger, points 17 à 22.

    (23) - Sur les méthodes d'interprétation de la Cour de justice, voir notamment Mertens de Wilmars J., «Réflexions sur les méthodes d'interprétation de la Cour de justice des Communautés européennes», dans Cahiers de droit européen, 1986, p. 5 à 20; Fennelly N., «Legal interpretation at the European Court of Justice», dans Fordham international law journal, 1997, p. 656 à 679, et Murray J., «Observations on the Interpretative Process of the Court of Justice», dans Community law in practice. Including facets of consumer protection law, 1997, p. 41 à 61.

    (24) - Voir Cornu G., Vocabulaire juridique, Presses universitaires de France, Paris, 1987, p. 125.

    (25) - Point 19 (souligné par nous). Dans ses conclusions dans l'affaire Dietzinger, l'avocat général Jacobs avait toutefois indiqué que: «Il est clair à la lecture de l'article 1er [de la directive 85/577] ... que les contrats couverts sont ceux en application desquels un commerçant fournit des biens ou des services à un consommateur» (point 19).

    (26) - Souligné par nous.

    (27) - Souligné par nous.

    (28) - Souligné par nous.

    (29) - Rappelons qu'il s'agit des articles 1er, paragraphe 2, sous a) et d), 4, paragraphe 2, sous c), et 8 de la directive 87/102.

    (30) - Article 1er, paragraphe 2, sous c), de la proposition modifiée de directive du Conseil relative au rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres en matière de crédit à la consommation (JO 1984, C 183, p. 4, souligné par nous).

    (31) - Point 4.1 de ses observations.

    (32) - Point 6 de ses observations.

    (33) - Souligné par nous.

    (34) - Points 1, sous vi), et 4, sous ii) (souligné par nous).

    (35) - Article 6, paragraphe 2, sous a), point 7, de la proposition de directive du Conseil relative au rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres en matière de crédit à la consommation (JO 1979, C 80, p. 4, souligné par nous).

    (36) - Article 6, paragraphe 2, sous a), point 7, de la proposition modifiée de directive, précitée (souligné par nous).

    (37) - Rapport de la Commission, du 11 mai 1995, sur l'application de la directive 87/102 [COM(95) 117 final] et rapport de la Commission, du 24 septembre 1997, sur l'application de la directive 87/102 - COM(95) 117 final du 11 mai 1995. Compte rendu succinct des réactions et commentaires [COM(97) 465 final].

    (38) - Rapport du 11 mai 1995, précité, point 345 (souligné par nous). Dans son rapport du 24 septembre 1997, précité, la Commission a confirmé que: «Comme la caution est souvent moins protégée sur le plan juridique que l'emprunteur ... et qu'elle ne ressortit pas à la directive 87/102, plusieurs États membres ont introduit différentes formes de protection des cautions. Le rapport propose d'étendre aux cautions certaines obligations d'informations prévues dans la directive» (point 80, souligné par nous).

    (39) - Résolution du Parlement européen, du 11 mars 1997, sur le rapport de la Commission sur l'application de la directive 87/102 [COM(95)0117 - C4-0185/95] (JO C 115, p. 27, point 16, souligné par nous).

    (40) - La directive 87/102 poursuit également un second objectif, à savoir la «création d'un marché commun du crédit à la consommation» (cinquième considérant). À cet effet, elle entend supprimer les distorsions de concurrence entre les prêteurs établis sur le territoire de la Communauté (deuxième considérant) ainsi que les obstacles à la libre circulation des biens et des services susceptibles d'être affectés d'un crédit (quatrième considérant).

    (41) - La directive 87/102 vise également à imposer certaines conditions valables pour toutes les formes de crédit (dixième considérant).

    (42) - Les directives 90/88 et 98/7 ont modifié la directive 87/102 en vue d'introduire une méthode de calcul unique du taux annuel effectif global dans l'ensemble de la Communauté européenne.

    (43) - Rappelons que la directive 87/102 définit le «taux annuel effectif global» comme «le coût total du crédit au consommateur exprimé en pourcentage annuel du montant du crédit consenti, et calculé conformément à l'article 1er bis» [article 1er, paragraphe 2, sous e)].

    (44) - Voir, notamment, les observations de la Commission (point 7); les observations de M. Siepert (point III.6), et les arguments développés par le gouvernement français lors de la procédure orale.

    (45) - Points 15 et 18 de ses observations.

    (46) - Point 9 de ses observations.

    (47) - Voir les observations du gouvernement espagnol (point 8); les observations du gouvernement français (point 4.2); les observations de la Commission (point III.1), et les observations de M. Siepert (point III.4).

    (48) - Point 18.

    (49) - Arrêt Dietzinger, point 20.

    (50) - Cette interprétation est confirmée par le point 22 de l'arrêt Dietzinger où votre Cour a jugé: «... il découle du libellé de l'article 1er de la directive [85/577] ainsi que du caractère accessoire du cautionnement que seul peut relever de la directive [85/577] un cautionnement accessoire à un contrat par lequel un consommateur s'est engagé, lors d'un démarchage à domicile, envers un commerçant en vue d'obtenir de lui des biens ou des services.»

    (51) - En ce qui concerne la directive 85/577, voir les arguments développés par l'avocat général Jacobs dans ses conclusions dans l'affaire Dietzinger.

    (52) - Point 39.

    (53) - Point 43.

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