COMMISSION EUROPÉENNE
Bruxelles, le 8.7.2020
COM(2020) 299 final
COMMUNICATION DE LA COMMISSION AU PARLEMENT EUROPÉEN, AU CONSEIL, AU COMITÉ ÉCONOMIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN ET AU COMITÉ DES RÉGIONS
Alimenter en énergie une économie neutre pour le climat: une stratégie de l'UE pour l'intégration du système énergétique
1.Un système énergétique intégré pour une Europe climatiquement neutre
Le Pacte vert pour l’Europe met l’Union européenne sur la voie de la neutralité climatique d’ici à 2050, grâce à la décarbonation en profondeur de tous les secteurs de l’économie et à des réductions plus importantes des émissions de gaz à effet de serre pour 2030.
Le système énergétique est essentiel pour atteindre ces objectifs. La récente baisse du coût des technologies liées aux énergies renouvelables, la numérisation de notre économie et l’émergence de technologies dans les domaines des batteries, des pompes à chaleur, des véhicules électriques ou de l’hydrogène offrent l’occasion d’accélérer, au cours des deux prochaines décennies, une transformation profonde de notre système énergétique et de sa structure. L’avenir énergétique de l’Europe doit reposer sur une part toujours croissante d’énergies renouvelables géographiquement réparties, intégrer les différents vecteurs énergétiques de manière flexible, tout en restant efficace dans l’utilisation des ressources et en évitant la pollution et la perte de biodiversité.
Le système énergétique actuel repose encore sur plusieurs chaînes de valeur énergétiques verticales parallèles, qui relient de manière rigide des ressources énergétiques spécifiques et des secteurs d’utilisation finale spécifiques. Ainsi, les produits pétroliers occupent une place prédominante dans le secteur des transports et comme matière première pour l’industrie. Le charbon et le gaz naturel sont principalement utilisés pour produire de l’électricité et du chauffage. Les réseaux d’électricité et de gaz sont planifiés et gérés indépendamment les uns des autres. De même, les règles du marché sont, pour une large part, propres aux différents secteurs. Ce modèle en «silos» distincts ne saurait déboucher sur une économie neutre pour le climat. Il est inefficace sur les plans technique et économique et entraîne des pertes considérables sous forme de chaleur fatale et de faible rendement énergétique.
L’intégration du système énergétique – à savoir la planification et le fonctionnement coordonnés du système énergétique «comme un tout», tous vecteurs énergétiques, infrastructures et secteurs de consommation confondus – constitue la voie à suivre pour permettre une décarbonation efficace, abordable et en profondeur de l’économie européenne conformément à l’accord de Paris et au programme de développement durable à l’horizon 2030 des Nations unies.
La baisse des coûts des technologies liées aux énergies renouvelables, l’évolution du marché, l’innovation rapide en ce qui concerne les systèmes de stockage et les véhicules électriques ainsi que la numérisation sont autant de facteurs qui conduisent naturellement à une intégration accrue du système énergétique en Europe. Nous devons toutefois aller encore plus loin et remédier aux chaînons manquants au sein du système énergétique afin d’atteindre des objectifs de décarbonation plus ambitieux pour 2030 et la neutralité climatique d’ici à 2050 — et ce, d’une manière qui soit à la fois efficace sur le plan des coûts et compatible avec l’engagement de «ne pas nuire» pris dans le cadre du Pacte vert pour l’Europe. En s’appuyant sur une utilisation accrue de procédés et d’outils propres et innovants, la voie vers l’intégration du système stimulera également l’investissement, l’emploi et la croissance, et renforcera le rôle de chef de file de l’UE à l’échelle mondiale sur le plan industriel. Cette intégration peut également être une composante essentielle de la reprise économique après la crise causée par la COVID-19. Le plan de relance de la Commission présenté le 27 mai 2020 souligne la nécessité de mieux intégrer le système énergétique, dans le cadre des efforts déployés pour débloquer des investissements dans des technologies et des chaînes de valeurs propres de première importance et pour accroître la résilience de l’ensemble de l'économie. En outre, la taxonomie de l’Union applicable à la finance durable orientera les investissements dans ces activités en vue de garantir leur conformité avec nos ambitions à long terme. Un système énergétique intégré réduira au minimum les coûts de transition vers la neutralité climatique pour les consommateurs et leur ouvrira de nouvelles possibilités de réduction de leurs factures énergétiques et de participation active au marché.
Le paquet «Une énergie propre pour tous les Européens», adopté en 2018, fournit une base pour une meilleure intégration à travers l’ensemble des infrastructures, des vecteurs énergétiques et des secteurs; il subsiste toutefois des obstacles réglementaires et pratiques. À défaut d’une action politique déterminée, le système énergétique de 2030 s’apparentera davantage à celui de 2020 au lieu de refléter ce qui est nécessaire pour parvenir à la neutralité climatique à l’horizon 2050.
La présente stratégie définit une vision sur la manière d’accélérer la transition afin de parvenir à un système énergétique plus intégré, qui soutienne une économie neutre pour le climat au moindre coût dans tous les secteurs, tout en renforçant la sécurité énergétique, en protégeant la santé et l’environnement et en promouvant la croissance, l’innovation et la primauté dans le domaine industriel au niveau mondial.
Pour faire de cette ambition une réalité, une action résolue est nécessaire et il convient d’agir dès à présent. Les investissements dans les infrastructures énergétiques ont généralement une durée de vie économique de 20 à 60 ans. Les mesures prises au cours des cinq à dix prochaines années seront cruciales pour la mise en place d’un système énergétique qui conduise l’Europe à la neutralité climatique en 2050.
Dès lors, la présente stratégie propose des mesures politiques et législatives concrètes au niveau de l’UE afin de façonner progressivement un nouveau système énergétique intégré, tout en tenant compte de la diversité des situations de départ que connaissent les États membres. Elle contribue aux travaux de la Commission relatifs à un plan global dont le but est de revoir à la hausse, de manière responsable, l’objectif climatique de l’UE à l’horizon 2030 en le portant à au moins 50 % et en visant 55 %, et elle recense les propositions de suivi qui seront élaborées dans le cadre des réexamens législatifs de juin 2021, annoncés dans le Pacte vert pour l’Europe.
La communication publiée en parallèle, relative à une «stratégie de l’hydrogène pour une Europe climatiquement neutre», complète la présente stratégie afin de préciser les possibilités d’accroître le recours à l’hydrogène et les mesures à prendre à cette fin dans le cadre d’un système énergétique intégré.
2.L’intégration du système énergétique et ses avantages pour une décarbonation qui soit efficace sur le plan des coûts
2.1.Qu’entend-on par intégration du système énergétique?
L’intégration du système énergétique fait référence à la planification et au fonctionnement du système énergétique «comme un tout», tous vecteurs énergétiques, infrastructures et secteurs de consommation confondus, en créant des liens plus étroits entre eux dans le but de fournir des services énergétiques à faibles émissions de carbone, fiables et économes en ressources, au moindre coût possible pour la société. Elle recouvre trois concepts complémentaires qui se renforcent mutuellement.
Premièrement, un système énergétique plus «circulaire», centré sur l’efficacité énergétique, dans lequel les choix les moins intensifs en termes d’énergie sont prioritaires, les flux de déchets inévitables sont réutilisés à des fins énergétiques et les synergies sont exploitées à travers les différents secteurs. C’est ce que l’on observe déjà dans les installations de production combinée de chaleur et d’électricité ou grâce à l’utilisation de certains déchets et résidus. Il existe toutefois un potentiel supplémentaire, par exemple dans le cadre de la réutilisation de la chaleur fatale provenant de procédés industriels ou de centres de données, ou de l’énergie produite à partir de biodéchets ou dans les stations d’épuration des eaux usées.
Deuxièmement, une électrification directe accrue des secteurs d’utilisation finale. Grâce à la croissance rapide et à la compétitivité sur le plan des coûts de la production d’électricité renouvelable, il est possible de répondre à une part de plus en plus importante de la demande d’énergie, par exemple en recourant à des pompes à chaleur pour le chauffage des locaux ou les procédés industriels à basse température, à des véhicules électriques pour le transport ou à des fours électriques dans certaines industries.
Troisièmement, l’utilisation de carburants renouvelables et de carburants à faible intensité de carbone, y compris l’hydrogène, pour des applications finales dans lesquelles le chauffage direct ou l’électrification ne sont pas possibles, ne sont pas efficients ou entraînent des coûts plus élevés. Les gaz et liquides renouvelables produits à partir de la biomasse, ou l’hydrogène renouvelable et à faible intensité de carbone, peuvent offrir des solutions permettant de stocker l’énergie produite à partir de différentes sources renouvelables, en exploitant les synergies entre le secteur de l’électricité, celui du gaz et les secteurs d’utilisation finale. À titre d’exemple, l’on peut citer l’utilisation de l’hydrogène renouvelable dans des procédés industriels et dans les transports routiers et ferroviaires lourds, les carburants de synthèse produits à partir d’électricité provenant de sources d’énergie renouvelables dans les transports aérien et maritime, ou la biomasse dans les secteurs où elle présente la plus grande valeur ajoutée.
Un système plus intégré sera également un système «multidirectionnel» dans lequel les consommateurs jouent un rôle actif dans l’approvisionnement énergétique. Sur un plan «vertical», les unités de production décentralisées et les clients contribuent activement à l’équilibre global et à la flexibilité du système — citons l’exemple du biométhane produit à partir de déchets organiques et injecté dans les réseaux de gaz au niveau local, ou celui des services permettant de réinjecter de l’électricité dans le réseau au départ des véhicules (services dits «de véhicule à réseau ou V2G»). Sur un plan «horizontal», les échanges d’énergie ont de plus en plus lieu entre secteurs de consommation — par exemple, les consommateurs d’énergie qui échangent de la chaleur dans des systèmes de chauffage et de refroidissement urbains intelligents, ou qui alimentent le réseau en électricité qu’ils produisent individuellement ou dans le cadre de communautés énergétiques.
2.2.Quels sont les avantages de l’intégration du système énergétique?
L’intégration du système énergétique contribue à réduire les émissions de gaz à effet de serre dans les secteurs plus difficiles à décarboner, par exemple en utilisant, dans les bâtiments et pour le transport routier, de l’électricité produite à partir de sources d’énergie renouvelables, ou en recourant à des carburants renouvelables et à faible intensité de carbone dans les secteurs maritime, aérien ou dans certains procédés industriels.
L’intégration du système énergétique pourrait également garantir une utilisation plus efficace des sources d’énergie, en réduisant la quantité d’énergie nécessaire et les retombées environnementales et climatiques qui y sont liées. Pour certaines utilisations finales, il sera probablement nécessaire de recourir à de nouveaux combustibles, pour la production desquels d’importantes quantités d’énergie sont utilisées, comme l’hydrogène ou les carburants de synthèse. Dans le même temps, l’électrification d’une grande partie de notre consommation peut réduire la demande d’énergie primaire d’un tiers
grâce à l’efficacité des technologies d’utilisation finale d'électricité. En outre, 29 % de la demande d’énergie industrielle est évacuée sous la forme de chaleur fatale, qui peut être réduite ou réutilisée. Les petites et moyennes entreprises peuvent créer des synergies tant en améliorant l’efficacité énergétique qu’en accroissant l’utilisation des ressources renouvelables et de la chaleur fatale. Dans l’ensemble, la transition vers un système énergétique plus intégré devrait réduire d’un tiers d’ici à 2050 la consommation intérieure brute
, tout en soutenant une augmentation de deux tiers du PIB
.
Au-delà des économies d’énergie et de la réduction des émissions de gaz à effet de serre, il serait ainsi également possible de réduire la pollution atmosphérique et l’empreinte sur les ressources en eau, ce qui est essentiel pour l’adaptation au changement climatique, la santé et la préservation des ressources naturelles.
L’intégration du système énergétique renforcera également la compétitivité de l’économie européenne en promouvant des technologies et des solutions plus durables et plus efficaces dans l’ensemble des écosystèmes industriels dans le domaine de la transition énergétique, la normalisation de ces technologies et leur adoption par le marché. Les entreprises spécialisées fourniront des services à l'échelon local et créeront des retombées positives économiques à une échelle plus régionale. L’Union aura ainsi la possibilité de conserver et d’exploiter son rôle de chef de file dans le domaine des technologies propres telles que les technologies de réseaux intelligents et les systèmes de chauffage urbain, et de montrer la voie à suivre s’agissant de technologies et de procédés neufs, plus efficaces et complexes qui devraient jouer un rôle croissant dans les systèmes énergétiques du monde entier, comme les technologies relatives aux batteries ou celles de l’hydrogène. Les territoires, les régions et les États membres rencontrant le plus de difficultés en matière de transition seront soutenus par le mécanisme pour une transition juste (MTJ) et, dans le cadre de celui-ci, par le Fonds pour une transition juste (FTJ).
En outre, une meilleure intégration offrira une plus grande souplesse pour la gestion globale du système énergétique et contribuera ainsi à l’intégration de parts accrues de production d’énergie à partir de sources renouvelables variables. Elle stimulera également les technologies de stockage: l’énergie hydraulique par pompage ainsi que les électrolyseurs et les batteries à l'échelle du réseau offrent de la souplesse dans le secteur de l’électricité. Dans les bâtiments, les batteries domestiques et les véhicules électriques (solutions dites «derrière le compteur») peuvent contribuer à une meilleure gestion des réseaux de distribution. D’ici à 2050, les véhicules électriques pourraient fournir jusqu’à 20 % de la flexibilité requise quotidiennement
. Le stockage thermique dans les usines peut offrir une certaine souplesse dans le secteur industriel. Grâce à une intégration plus poussée du secteur de l’électricité et du chauffage, les appareils de chauffage électriques pourraient déjà utiliser les prix de l’électricité en temps réel pour gérer la demande de manière plus intelligente. Les pompes à chaleur hybrides
et le chauffage urbain intelligent offrent également des possibilités d’arbitrage entre les marchés de l’électricité et du gaz. En outre, les électrolyseurs peuvent transformer l’électricité renouvelable en hydrogène renouvelable, offrant des capacités de stockage à long terme et d’atténuation des variations, et permettant de poursuivre l’intégration des marchés de l’électricité et du gaz.
Enfin, en mettant en lien les différents vecteurs énergétiques et en recourant à la production localisée, à l’autoproduction et à l’utilisation intelligente de l’approvisionnement énergétique distribué, l’intégration du système peut également contribuer à renforcer l’autonomie des consommateurs ainsi qu’à améliorer la résilience et la sécurité de l’approvisionnement. Certaines des technologies nécessaires dans un système énergétique intégré nécessiteront de grandes quantités de matières premières, dont plusieurs figurent sur la liste de l’UE des matières premières critiques. Toutefois, le remplacement du gaz naturel et des produits pétroliers importés par de l’électricité, du gaz et des liquides issus de sources renouvelables et produits localement, conjugué à une mise en œuvre accrue de modèles circulaires, permettra d’abord et avant tout de diminuer la facture des importations et de réduire la dépendance à l’égard des approvisionnements externes en combustibles fossiles, en créant une économie européenne plus résiliente.
3.Des paroles aux actes — Plan d’action pour accélérer la transition vers une énergie propre grâce à l’intégration du système énergétique
La présente stratégie définit six piliers pour lesquels des mesures coordonnées sont définies pour lever les entraves actuelles à l’intégration du système énergétique.
3.1.Un système énergétique plus «circulaire», centré sur le principe de primauté de l’efficacité énergétique.
L'application du principe de primauté de l’efficacité énergétique dans toutes les politiques sectorielles est au cœur de l’intégration du système énergétique. L’efficacité énergétique réduit les besoins globaux en matière d’investissements et les coûts associés à la production, à l’infrastructure et à l’utilisation de l’énergie. Elle réduit également l’utilisation des ressources (sols et matières), ainsi que la pollution et les pertes de biodiversité qui y sont liées. Dans le même temps, l’intégration du système énergétique peut aider l’UE à améliorer son efficacité énergétique grâce à une utilisation plus circulaire des ressources disponibles et au passage à des technologies moins énergivores. Par exemple, les véhicules électriques sont nettement plus efficaces sur le plan de l’efficacité énergétique que les moteurs à combustion; et le remplacement d’une chaudière à combustibles fossiles par une pompe à chaleur utilisant de l’électricité produite à partir de sources d’énergie renouvelables permet d’économiser les deux tiers de l’énergie primaire
.
Le premier défi consiste à appliquer le principe de primauté de l’efficacité énergétique dans l’ensemble du système énergétique. Il s’agit notamment de donner la priorité à des solutions axées sur la demande chaque fois qu’elles sont plus rentables que les investissements dans les infrastructures d’approvisionnement énergétique pour atteindre les objectifs des politiques, mais aussi de tenir dûment compte de l’efficacité énergétique dans les évaluations de l’adéquation des capacités de production. La directive relative à l’efficacité énergétique et la directive sur la performance énergétique des bâtiments prévoient déjà des mesures d’incitation pour les clients, mais pas suffisamment pour l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement. D’autres mesures sont nécessaires pour garantir que les décisions des clients d’économiser ou de partager l’énergie, ou encore d’en changer, reflètent correctement la consommation d’énergie sur le cycle de vie et l’empreinte écologique des différents vecteurs énergétiques, y compris l’extraction, la production et la réutilisation ou le recyclage des matières premières, la conversion, la transformation, le transport et le stockage de l’énergie, ainsi que la part croissante des énergies renouvelables dans l’approvisionnement en électricité. Dans certains secteurs pour lesquels le passage des combustibles fossiles à l’électricité entraînera une consommation accrue, il conviendra d’examiner attentivement les arbitrages à opérer.
Dans ce contexte, le facteur d'énergie primaire (FEP)
est un outil important pour faciliter les comparaisons entre les différents vecteurs énergétiques. La plupart des sources d’énergie renouvelables sont efficaces à 100 % et présentent un faible FEP. Le FEP devrait refléter les économies réelles générées par l’électricité et la chaleur produites à partir de sources renouvelables. La Commission réexaminera le niveau du FEP et évaluera si les dispositions actuelles de la législation de l’UE garantissent une application adéquate du FEP par les États membres.
L’initiative dite «Vague de rénovations» qui sera présentée prochainement et qui avait été annoncée dans le Pacte vert pour l'Europe proposera également des actions concrètes pour accélérer l’adoption de mesures en matière d'efficacité énergétique et d’utilisation efficace des ressources ainsi que le recours aux énergies renouvelables dans les bâtiments dans l’ensemble de l’UE au cours des années à venir.
Le deuxième défi à relever résulte du fait que les sources d’énergie locales ne sont pas suffisamment utilisées ou ne le sont pas de manière efficace dans nos bâtiments et nos communautés. En appliquant le principe de la circularité, conformément au nouveau plan d’action pour une économie circulaire
, l’on pourrait tirer partir d’un potentiel important, mais largement inutilisé, à savoir celui de la réutilisation de la chaleur fatale provenant de sites industriels, de centres de données ou d’autres sources. La réutilisation énergétique peut avoir lieu sur place (par exemple grâce à la réintégration de la chaleur dégagée par les procédés industriels dans les usines) ou au moyen d’un réseau de chauffage et de refroidissement urbain. La directive relative à l’efficacité énergétique et la directive sur les énergies renouvelables contiennent déjà des dispositions ciblant ce potentiel, mais il est nécessaire de renforcer encore le cadre réglementaire afin de lever les obstacles qui entravent l’application plus large de ces solutions. Parmi ces obstacles, citons la sensibilisation insuffisante ou le manque de connaissances au sujet de ces solutions, la réticence des entreprises à s’engager dans une nouvelle activité qui n’est pas leur activité principale, l’absence de cadres réglementaires et contractuels pour partager les coûts et les avantages des nouveaux investissements, et les entraves liées à la planification, aux coûts des transactions et aux signaux en matière de prix. En ce qui concerne plus spécifiquement les centres de données, la Commission a fait part, dans sa stratégie numérique, de son ambition de veiller à ce que ces centres deviennent neutres sur le plan climatique et très efficaces du point de vue énergétique au plus tard en 2030; une réutilisation à plus grande échelle de la chaleur fatale que ces centres génèrent contribuera de manière significative à la réalisation de cet objectif.
Un troisième défi est lié au potentiel inexploité des eaux usées et des résidus et déchets biologiques alors que ceux-ci pourraient être utilisés à des fins de production de bioénergie, y compris de biogaz. Le biogaz peut être exploité sur place pour réduire la consommation de combustibles fossiles ou être valorisé en biométhane afin de permettre son injection dans le réseau de gaz naturel ou son utilisation dans les transports. En outre, certaines infrastructures agricoles sont adaptées à une production intégrée d’électricité et de chaleur d’origine solaire, créant ainsi un potentiel d’autoconsommation et d’injection dans le réseau d’énergie renouvelable. La mise en œuvre du nouveau plan d’action pour une économie circulaire ainsi que de la législation en matière de déchets et les systèmes de gestion durable de l’agriculture et de la sylviculture pourraient permettre d’accroître la production durable de bioénergie à partir des eaux usées, des déchets et des résidus
. Des efforts supplémentaires sont nécessaires pour tirer pleinement parti du potentiel de l’intégration du système énergétique, en exploitant les synergies et en évitant les compromis. Dans le domaine de l’agriculture, par l’intermédiaire de la politique agricole commune, les agriculteurs pourraient être encouragés à contribuer à une plus grande mobilisation de la biomasse durable à des fins énergétiques. Les communautés d’énergie renouvelable peuvent fournir un cadre solide pour l’utilisation de cette énergie dans un contexte local.
Actions clés
Afin de mieux appliquer le principe de primauté de l’efficacité énergétique:
·Publier des orientations à l’intention des États membres sur la manière de rendre opérationnel le principe de primauté de l’efficacité énergétique dans l’ensemble du système énergétique lors de la mise en œuvre de la législation nationale et de l’UE (d’ici à 2021).
·Promouvoir davantage le principe de primauté de l’efficacité énergétique dans le cadre de toutes les méthodologies qui seront envisagées à l’avenir en la matière (par exemple, aux fins de l’évaluation de l'adéquation des ressources à l'échelle européenne) et à l’occasion des révisions de la législation (par exemple, le règlement RTE-E).
·Réexaminer le facteur d’énergie primaire, afin de prendre la pleine mesure des gains d'efficacité énergétique que permettent l’électricité et la chaleur produites à partir de sources renouvelables, dans le cadre de la révision de la directive relative à l’efficacité énergétique (juin 2021).
Afin de mettre en place un système énergétique plus circulaire:
·Faciliter la réutilisation de la chaleur fatale provenant des sites industriels et des centres de données, grâce à des exigences renforcées en matière de raccordement aux réseaux de chauffage urbain, à la comptabilisation de la performance énergétique et à des cadres contractuels, dans le contexte de la révision de la directive sur les énergies renouvelables et de la directive relative à l’efficacité énergétique (juin 2021).
·Encourager la mobilisation des résidus et déchets biologiques provenant des secteurs de l’agriculture, de l’alimentation et de la sylviculture et soutenir le renforcement des capacités des communautés rurales d’énergie circulaire grâce à la nouvelle politique agricole commune, aux fonds structurels et à au nouveau programme LIFE (à compter de 2021).
|
3.2.Accélérer l’électrification de la demande énergétique, en s’appuyant sur un système électrique largement fondé sur les énergies renouvelables
Selon les projections, la demande d’électricité devrait augmenter de manière significative afin d’atteindre la neutralité climatique, la part de l’électricité dans la consommation finale d’énergie étant supposée passer de 23 % aujourd’hui à environ 30 % en 2030, et avoisiner 50 % d’ici à 2050
. À titre de comparaison, cette part n’a augmenté que de 5 points de pourcentage au cours des trente dernières années.
Cette demande croissante d’électricité devra reposer en grande partie sur l’énergie produite à partir de sources renouvelables. D’ici à 2030, la part de l’énergie produite à partir de sources renouvelables dans le mix électrique devrait doubler pour atteindre 55 à 60 %, et les projections indiquent une part d’environ 84 % d’ici 2050. Le reste de l'écart devrait être couvert par d’autres options à faible émission de carbone
.
Au cours des dernières décennies, l’on a assisté à une réduction considérable des coûts des technologies de production d’électricité à partir de sources d’énergie renouvelables, et cette baisse devrait se poursuivre, ce qui laisse augurer que les forces du marché effectueront de plus en plus d’investissements. Toutefois, compte tenu de l’ampleur des investissements nécessaires, il est urgent de s’attaquer aux obstacles qui empêchent encore un déploiement massif de l’électricité produite à partir de sources d’énergie renouvelables dans toutes les technologies. Il s’agit notamment des chaînes d’approvisionnement sous-développées, de la nécessité de disposer d’infrastructures de réseau plus nombreuses et plus intelligentes au niveau national et transfrontalier, du manque d’adhésion du public, des entraves administratives et de la longueur des procédures d’autorisation (y compris pour le rééquipement) et de financement, de la nécessité d’options de couverture à long terme publiques ou privées, ou de l’importance des coûts de certaines technologies moins matures.
Il serait possible de répondre partiellement à la nécessité d’augmenter l’offre d’électricité grâce à la production d’énergie renouvelable en mer, parallèlement au recours à d’autres technologies de production d’électricité renouvelable à terre, comme l’énergie solaire ou l’énergie éolienne. Le potentiel offert par l’énergie éolienne en mer dans l’UE se situe entre 300 et 450 GW d’ici à 2050
, alors que la capacité actuelle est d’environ 12 GW, ce qui constitue une occasion unique pour l’industrie de l’UE de devenir le chef de file en matière de technologie en mer; des efforts considérables seront toutefois nécessaires pour accroître la capacité industrielle européenne et construire de nouvelles chaînes de valeur. La production d’électricité en mer ouvre également la voie à la localisation à proximité d’électrolyseurs pour la production d’hydrogène, y compris la réutilisation éventuelle de l’infrastructure existante de gisements de gaz naturel épuisés. En outre, le développement de l’énergie solaire s’en trouvera encore facilité.
À court terme, la Commission utilisera le nouvel instrument pour la relance, «Une UE pour la prochaine génération (Next Generation EU)», pour soutenir la poursuite du déploiement des énergies renouvelables. Elle évaluera les possibilités d’orienter les fonds de l’UE au moyen du nouveau mécanisme de financement de l’Union en matière d’énergies renouvelables ou en combinaison avec celui-ci.
Du côté de la demande, certaines mesures d’incitation à l’électrification sont prévues, par exemple, au moyen d’objectifs sectoriels définis dans la directive sur les énergies renouvelables, ainsi que dans le secteur des transports au moyen de normes en matière de CO2 applicables aux véhicules, dans la directive sur l’infrastructure pour carburants alternatifs et dans la directive relative aux véhicules propres. Toutefois, les difficultés liées à l’électrification accrue subsistent et varient selon les secteurs et les États membres, et il reste encore beaucoup à faire.
Dans les bâtiments, l’électrification devrait jouer un rôle central, notamment par le déploiement de pompes à chaleur pour le chauffage et le refroidissement des locaux. Dans le secteur résidentiel, la part de l’électricité dans la demande de chauffage devrait passer à 40 % d’ici à 2030 et se situer entre 50 et 70 % d’ici à 2050; dans le secteur des services, ces parts devraient être d’environ 65 % d’ici à 2030 et de 80 % d’ici à 2050
. Les pompes à chaleur à grande échelle joueront un rôle important dans le chauffage et le refroidissement urbains. L’obstacle le plus important est le niveau relativement plus élevé des taxes et prélèvements appliqués à l’électricité, et les niveaux inférieurs de taxation pour les combustibles fossiles (pétrole, gaz et charbon) utilisés dans le secteur du chauffage, ce qui entraîne une absence de conditions de concurrence équitables. Les avancées sont également entravées par un certain nombre d’autres obstacles, notamment les insuffisances dans la planification des infrastructures, les codes de la construction et les normes en matière de produits, le manque de main-d’œuvre qualifiée pour l’installation et l’entretien, l’absence d’instruments de financement public et privé et l’absence d’internalisation des coûts du CO2 dans les combustibles de chauffage. Cette situation se traduit par de faibles taux de remplacement des stocks de chauffage fossiles de l’UE, par un faible niveau de développement et de modernisation des réseaux de chauffage et/ou de refroidissement urbains et par de faibles taux de rénovation des bâtiments. Grâce à l’initiative dite «Vague de rénovations», la Commission garantira une plus grande pénétration des énergies renouvelables dans les bâtiments. Elle soutiendra également des programmes de formation dans le cadre de la stratégie actualisée en matière de compétences.
Dans l’industrie, la chaleur représente plus de 60 % de la consommation d’énergie. Les pompes à chaleur industrielles peuvent contribuer à la décarbonation de l’approvisionnement en chaleur à basse température dans les industries et peuvent être associées à la récupération de la chaleur fatale. D’autres technologies sont actuellement mises au point pour l’approvisionnement en chaleur de plus haute température (par exemple, par micro-ondes ou ultrasons) et pour l’électrification des procédés par électrochimie. Parmi les entraves au déploiement figurent notamment le manque d’informations et la longueur des délais d’amortissement, due au prix élevé de l’électricité par rapport au gaz et au coût élevé d’atténuation des émissions associé à ces technologies, par rapport aux prix actuels du CO2. Des changements dans les procédés de production entraînant des coûts plus élevés pourraient également affecter la compétitivité des secteurs exposés à la concurrence internationale. Le soutien de l’UE pourrait contribuer à l’élaboration d’un certain nombre de projets phares et à la démonstration de procédés innovants en matière d’électricité. En outre, la chaîne d’approvisionnement industrielle pour ces technologies n’est pas suffisamment mature, et l’intégration de ces technologies d’électrification dans les procédés industriels exige que le personnel suive des formations et acquière de nouvelles compétences. La Commission étudiera, en collaboration avec l’industrie, les moyens de résoudre ces problèmes.
Dans le domaine des transports, la stratégie en faveur d’une mobilité intelligente et durable est prévue pour la fin de l’année et définira la manière dont notre système de transport doit se décarboner et se moderniser afin de réduire ses émissions de 90 % en 2050. La mobilité électrique est essentielle et permettra d’accélérer la décarbonation et de réduire la pollution, en particulier dans nos villes, et les nouveaux services de mobilité augmenteront l’efficacité du système de transport et réduiront la congestion. La baisse rapide du coût des véhicules électriques signifie qu’ils pourraient être compétitifs par rapport aux véhicules à moteur à combustion aux alentours de 2025, sur la base du coût total de propriété. Le Pacte vert pour l’Europe souligne la nécessité de renforcer le déploiement des infrastructures de recharge, en commençant par l’objectif ambitieux consistant à disposer d’au moins un million de points de recharge et de ravitaillement ouverts au public d’ici à 2025, et en prévoyant de contraindre les navires à utiliser l’alimentation électrique à quai dans les ports. À cette fin, la Commission mobilisera le programme InvestEU, qui sera renforcé et inclura une nouvelle facilité d’investissement stratégique, ainsi que les financements du mécanisme pour l’interconnexion en Europe afin d’élargir la couverture du réseau d’infrastructures de recharge. Le soutien apporté par l’intermédiaire de la facilité pour la reprise et la résilience ainsi que de la politique de cohésion en faveur des véhicules propres et de l’infrastructure pour carburants alternatifs sera une priorité, alors que, dans un cadre plus large, l’accent sera mis davantage sur la mise en œuvre du Pacte vert pour l'Europe dans nos villes et régions, y compris dans les bâtiments publics, les bureaux, les entrepôts et les logements privés. L’initiative dite «Vague de rénovations» offre également des possibilités de promouvoir les chargeurs électriques et les bornes de recharge pour véhicules électriques. La Commission proposera également de réviser la directive sur l’infrastructure pour carburants alternatifs et le règlement RTE-T, et évaluera également les moyens de renforcer davantage les synergies entre les politiques relevant des RTE-T et des RTE-E. La Commission accompagnera la poursuite du soutien au titre du mécanisme pour l’interconnexion en Europe avec une nouvelle cartographie des possibilités de financement et des initiatives réglementaires pour la mise en place d’infrastructures de recharge. Elle s’attaquera également aux difficultés qui se posent pour rendre l’électromobilité plus attrayante pour l’utilisateur, telles que la tarification non transparente des bornes publiques de recharge et l’absence persistante d’interopérabilité transfrontière des services de recharge. Des mesures sont également nécessaires pour stimuler l’utilisation d’électricité produite à partir de sources d’énergie renouvelables dans les ports, afin de faciliter l’électrification du transport routier de marchandises. La poursuite de l’électrification des chemins de fer pourrait être étudiée en tenant compte de sa viabilité économique.
Dans l’ensemble, l’utilisation croissante de l’électricité dans les secteurs d’utilisation finale impliquera de surveiller l’adéquation de l’approvisionnement en électricité produite à partir de sources renouvelables, afin de garantir que cet approvisionnement peut atteindre l’échelle requise pour soutenir la décarbonation des secteurs susmentionnés.
L’électrification peut présenter des défis pour la gestion du réseau électrique. La coordination régionale et transfrontalière entre les États membres deviendra de plus en plus importante. Le développement de centres de coordination régionaux
en 2022 permettra de répondre à cette nécessité, en permettant une analyse plus solide de la sécurité, une coordination concernant les situations d’urgence et d’interruption du service et une planification commune des infrastructures, ainsi que le déploiement d’options de stockage et d’autres options de flexibilité. La Commission soutiendra le recours au stockage de l’énergie grâce à la mise en œuvre intégrale du paquet «Une énergie propre pour tous les Européens» et lors des prochains réexamens d’actes législatifs, y compris le réexamen du règlement RTE-E.
Des défis sont également attendus à un niveau plus local. Par exemple, l’électrification complète du transport routier de voyageurs nécessitera, dans certaines parties de l’Union, une mise à niveau de l’infrastructure de réseau à l’échelon local. Dans le même temps, des possibilités de stockage et de flexibilité dans le système peuvent en résulter. En particulier, les services de recharge intelligente et ceux permettant de réinjecter de l’électricité dans le réseau au départ des véhicules (services dits «de véhicule à réseau ou V2G») joueront un rôle essentiel pour gérer la congestion du réseau et réduire les coûteux investissements dans la capacité du réseau. La directive sur l’électricité contient un certain nombre de dispositions qui jettent les bases d’une recharge intelligente et du développement de services permettant de réinjecter de l’électricité dans le réseau au départ des véhicules (services dits «de véhicule à réseau ou V2G»), mais des défis subsistent, par exemple en ce qui concerne le déploiement de points de recharge intelligents, les normes communes et les protocoles de communication, les redevances de réseau, la fiscalité et l’accès aux données embarquées. L’élaboration d’un nouveau code de réseau sur la flexibilité de la demande, ainsi que le réexamen de la directive sur l’infrastructure pour carburants alternatifs, offrent tous deux des possibilités de créer un cadre solide pour une intégration réussie de la flexibilité de la demande en général, et des véhicules électriques en particulier.
Les efforts d’électrification des zones non reliées au réseau continental, comme les régions ultrapériphériques, certaines îles, ou les régions éloignées ou faiblement peuplées, présentent des difficultés spécifiques. Le soutien technique et financier en faveur de l’intégration du système énergétique est particulièrement important pour une transition efficace sur le plan des coûts dans ces régions.
Actions clés
Afin d’assurer la poursuite de la croissance de l’approvisionnement en électricité produite à partir de sources d’énergie renouvelables:
·Par l’intermédiaire de la stratégie relative aux énergies renouvelables en mer et aux mesures de suivi réglementaires et de financement, veiller à la planification et au déploiement rentables de l’électricité produite à partir de sources d’énergie renouvelables en mer, en tenant compte du potentiel de production d’hydrogène sur site ou à proximité, et renforcer le rôle de moteur de l’UE sur le plan industriel en matière de technologies offshore (2020).
·Étudier la possibilité d’établir des critères et objectifs minimaux contraignants en matière de marchés publics écologiques en ce qui concerne l’électricité d’origine renouvelable, éventuellement dans le cadre de la révision de la directive sur les énergies renouvelables (juin 2021), grâce à un financement à des fins de renforcement des capacités dans le cadre du programme LIFE.
·S’attaquer aux obstacles qui empêchent encore un niveau élevé d’approvisionnement en électricité produite à partir de sources renouvelables qui corresponde à la croissance attendue de la demande dans les secteurs d’utilisation finale, y compris au moyen de la révision de la directive sur les énergies renouvelables (juin 2021).
Afin d’accélérer davantage l’électrification de la consommation d’énergie:
·Dans le cadre de l’initiative dite «Vague de rénovations», promouvoir la poursuite de l’électrification du chauffage des bâtiments (notamment au moyen de pompes à chaleur), le déploiement d’énergie produite à partir de sources renouvelable dans/sur les bâtiments et la mise en place de points de recharge pour véhicules électriques (à partir de 2020), en recourant à tous les financements de l’UE disponibles, y compris le Fonds de cohésion et InvestEU.
·Élaborer des mesures plus spécifiques pour l’utilisation d’électricité produite à partir de sources d’énergie renouvelables dans les transports, ainsi que pour le chauffage et le refroidissement dans les bâtiments et l’industrie, notamment au moyen de la révision de la directive sur les énergies renouvelables, et en prenant comme point de départ ses objectifs sectoriels (juin 2021).
·Financer des projets pilotes pour l’électrification des systèmes de chauffage à basse température dans les secteurs industriels par l’intermédiaire du programme Horizon Europe et du Fonds pour l’innovation (d’ici à 2021).
·Évaluer les options permettant de soutenir la poursuite de la décarbonation des procédés industriels, notamment grâce à l’électrification et à l’efficacité énergétique, dans le cadre de la révision de la directive relative aux émissions industrielles (2021).
·Proposer la révision des normes d’émission de CO2 pour les voitures et les camionnettes afin de garantir une trajectoire claire à partir de 2025 vers une mobilité à émissions nulles (juin 2021).
Afin d’accélérer la mise en place d’infrastructures destinées aux véhicules électriques et de veiller à l’intégration de nouvelles charges:
·Soutenir la mise en place d’un million de points de recharge d’ici à 2025, en utilisant les fonds disponibles de l’UE, y compris des financements au titre du Fonds de cohésion, d’InvestEU et du mécanisme pour l’interconnexion en Europe, et communiquer régulièrement sur les possibilités de financement et l’environnement réglementaire afin de mettre en place un réseau d’infrastructures de recharge (à partir de 2020).
·Utiliser la prochaine révision de la directive sur l’infrastructure pour carburants alternatifs pour accélérer la mise en place d’une infrastructure pour carburants alternatifs, y compris pour les véhicules électriques, pour renforcer les exigences en matière d’interopérabilité et pour garantir l’information adéquate des clients, l’utilisation transfrontière des infrastructures de recharge ainsi que l’intégration efficace des véhicules électriques dans le système électrique (d’ici à 2021).
·Prendre en compte les exigences correspondantes en matière d’infrastructures de recharge et de ravitaillement dans le cadre de la révision du règlement relatif au réseau transeuropéen de transport (RTE-T) (d’ici à 2021) et examiner de meilleures synergies grâce à la révision du règlement RTE-E en vue d’un éventuel soutien lié au réseau énergétique pour les opérations transfrontières de recharge à haute capacité ainsi que, éventuellement, pour les infrastructures de ravitaillement en hydrogène (d’ici à 2020).
·Élaborer un code de réseau sur la flexibilité de la demande afin de libérer le potentiel des véhicules électriques, des pompes à chaleur et d’autres modes de consommation d’électricité, l’objectif étant de contribuer à la flexibilité du système énergétique (à partir de fin 2021).
|
3.3.Promouvoir les combustibles renouvelables et à faible intensité de carbone, y compris l’hydrogène, pour les secteurs difficiles à décarboner
Si, dans de nombreux cas, l’électrification directe et la chaleur produite à partir de sources renouvelables offrent les options de décarbonation les plus efficaces sur le plan des coûts et les plus économes en énergie, pour un certain nombre d’applications finales, elles pourraient ne pas être réalisables ou entraîner des coûts plus élevés. Dans le cas de ces applications, certains combustibles renouvelables ou à faible intensité de carbone pourraient être utilisés, tels que le biogaz, le biométhane et les biocarburants durables, ainsi que l’hydrogène renouvelable et bas carbone ou les combustibles de synthèse. Parmi ces applications figurent un certain nombre de procédés industriels, mais aussi des modes de transport, comme les transports aérien et maritime, pour lesquels des carburants de substitution durables tels que les biocarburants liquides avancés et les carburants de synthèse auront un rôle essentiel à jouer. Une action rapide est nécessaire: par exemple, dans le secteur de l’aviation, les biocarburants liquides ne constituent que 0,05 % environ de la consommation totale de kérosène.
Libérer le potentiel des combustibles renouvelables produits à partir de biomasse durable
Actuellement, les biocarburants, le biogaz et le biométhane ne représentent que 3,5% de l’ensemble de la consommation de gaz et de combustibles
et sont en grande partie produits à partir de cultures destinées à l’alimentation humaine ou animale. Il conviendrait d’exploiter pleinement leur potentiel de manière durable, ce qui permettrait d’atténuer les risques en matière de climat, de pollution et de biodiversité.
Les biocarburants auront un rôle important à jouer, notamment dans les modes de transport difficiles à décarboner, tels que les transports aérien et maritime, y compris au moyen de projets d’hybridation associant les productions de biocarburants et d’hydrogène renouvelable. La Commission étudiera en particulier les moyens de soutenir le développement rapide de combustibles bas carbone innovants, tels que les biocarburants avancés, et de carburants de synthèse, tout au long de la chaîne de valeur de l’industrie en Europe, ce qui entraînera une meilleure coordination des acteurs des marchés et une augmentation rapide des capacités de production. Le biométhane peut contribuer à la décarbonation de l'approvisionnement en gaz. Cependant, l’incertitude réglementaire a, jusqu’à présent, entravé le déploiement de biocarburants et de biogaz. La directive révisée sur les énergies renouvelables a franchi une première étape en vue de résoudre ces problèmes, en introduisant un objectif de 3,5 % pour la consommation de biocarburants et de biogaz avancés dans les transports. L’objectif de 6 % d’émissions de gaz à effet de serre fixé par la directive sur la qualité des carburants soutient également le déploiement des biocarburants. En outre, la communication intitulée «Le rôle de la valorisation énergétique des déchets dans l’économie circulaire» précise quelles approches en matière de valorisation énergétique sont plus durables, y compris pour la production de biométhane, tandis que la stratégie en faveur de la biodiversité souligne que l’utilisation, pour la production d’énergie, d’arbres entiers et de cultures qui pourraient être destinées à l’alimentation humaine ou animale devrait être réduite au minimum.
La révision de la directive sur les énergies renouvelables, ainsi que les initiatives de la Commission visant à stimuler l’offre et l’utilisation de carburants durables dans les transports aérien et maritime, annoncées dans le Pacte vert pour l’Europe, offriront des possibilités de soutien ciblé supplémentaire pour accélérer l’essor du marché des biocarburants et des biogaz.
Promouvoir l’utilisation d’hydrogène renouvelable dans les secteurs difficiles à décarboner
Aujourd’hui, l’hydrogène représente une part inférieure à 2 % dans la consommation énergétique de l’Europe
et est presque exclusivement produit à partir de combustibles fossiles sans dispositif d’atténuation. L’hydrogène a un rôle important à jouer dans la réduction des émissions dans des secteurs difficiles à décarboner, en particulier comme carburant dans certaines applications de transport (transport routier lourd, flottes de bus à usage captif, transport ferroviaire non électrifié, transport maritime et sur les voies navigables intérieures) et comme combustible ou matière première dans certains procédés industriels (sidérurgie, secteur du raffinage ou industrie chimique – y compris pour la production d’«engrais verts» pour l’agriculture). Le dioxyde de carbone peut également, par réaction avec l’hydrogène, être transformé en carburants de synthèse, tels que le kérosène synthétique pour l’aviation. En outre, l’hydrogène comporte d’autres avantages environnementaux corrélés, tels que l’absence d’émissions de polluants atmosphériques.
L’hydrogène produit par électrolyse en utilisant de l’électricité d’origine renouvelable peut jouer un rôle «nodal» particulièrement important dans un système énergétique intégré, où il peut contribuer à intégrer de grandes parts de la production provenant de sources variables d’énergies renouvelables, en délestant les réseaux lorsque l’offre est abondante, et en fournissant un stockage à long terme au système énergétique. Il permet également d’utiliser la production locale d’électricité d’origine renouvelable pour une série d’autres applications finales.
La stratégie de l’hydrogène, adoptée aujourd’hui, présente des mesures visant à créer les conditions qui permettraient à l’hydrogène de contribuer à la décarbonation de l’économie à un coût avantageux, en englobant l’ensemble de la chaîne de valeur de l’hydrogène pour soutenir la croissance et la relance économiques. La priorité pour l’UE est de développer la production d’hydrogène à partir d’électricité d’origine renouvelable, qui est la solution la plus propre. Toutefois, dans une phase de transition, d’autres formes d’hydrogène à faible intensité de carbone sont nécessaires pour remplacer l’hydrogène existant et faire émerger une économie d’échelle. En plus d’apporter un soutien financier à certaines applications finales, la Commission envisagera la fixation de parts minimales ou de quotas d’hydrogène renouvelable dans certains secteurs d’utilisation finale. La promotion des combustibles renouvelables et à faible intensité de carbone (y compris l’hydrogène) sera plus efficace si ceux-ci peuvent être facilement distingués des sources d’énergie plus polluantes. C’est pourquoi la Commission s’efforcera d’établir une terminologie exhaustive et un système européen de certification incluant tous les combustibles renouvelables et bas carbone. Ce système, qui reposera notamment sur des réductions des émissions de gaz à effet de serre sur la totalité du cycle de vie, permettra de faire des choix plus éclairés lorsqu’il s’agira d’opter pour des politiques au niveau de l’UE ou au niveau national.
Permettre le captage, le stockage et l’utilisation du carbone pour soutenir une décarbonation en profondeur, notamment les combustibles de synthèse
Même un système énergétique totalement intégré ne permet pas d’éliminer complètement les émissions de CO2 de tous les secteurs de l’économie. Combinés à d’autres technologies des procédés, le captage et stockage du carbone (CSC) joueront probablement un rôle dans un système énergétique neutre pour le climat. En particulier, le CSC pourra contribuer à résoudre le problème des émissions difficiles à réduire dans certains procédés industriels, ce qui permettra aux secteurs concernés d’avoir une place dans une économie climatiquement neutre et préservera les emplois dans l’industrie en Europe. En outre, si le CO2 était piégé à partir de sources d’énergie biogène ou directement dans l’atmosphère, le CSC pourrait même compenser les émissions résiduelles dans d’autres secteurs.
Une alternative au stockage permanent du CO2 consiste à combiner celui-ci avec de l’hydrogène renouvelable pour produire des gaz, des combustibles et des matières premières synthétiques (captage et utilisation du carbone, ou CUC). Les niveaux d’émissions de gaz à effet de serre associés aux combustibles de synthèse peuvent varier considérablement en fonction de l’origine du CO2 (fossile, biogène ou piégé dans l’air) et du procédé utilisé. Les combustibles de synthèse totalement neutres en carbone nécessitent que le CO2 provienne de la biomasse ou de l’atmosphère. Les combustibles de synthèse sont actuellement peu efficaces si l’on considère l’énergie requise pour les produire, et leurs coûts de production sont élevés. Le soutien au développement de cette technologie de conversion, y compris à la démonstration du processus intégral de production et à son déploiement à grande échelle, est important si l’on entend disposer de substituts aux combustibles fossiles, en particulier dans les secteurs les plus difficiles à décarboner, qui risquent de rester dépendants de combustibles liquides à haute densité énergétique, tels que l’aviation. Étant donné que ces combustibles de synthèse nécessitent, pour leur production, de grandes quantités d’énergie renouvelable, leur adoption devrait aller de pair avec une augmentation correspondante de l’offre d’énergies renouvelables.
Il est essentiel d’assurer une surveillance, une déclaration et une comptabilisation adéquates des émissions et absorptions de CO2 liées à la production de combustibles de synthèse, afin de refléter correctement leur empreinte carbone réelle. En complément de l’actuel système de surveillance et de déclaration des émissions de gaz à effet de serre, un mécanisme solide de certification des absorptions de carbone permettra de garantir la traçabilité du CO2 lors de son émission, de son captage, de son utilisation et de sa réémission potentielle dans l’ensemble du système économique. La mise au point d’un système de certification des absorptions de carbone, annoncée dans le plan d’action pour une économie circulaire, pourra s’accompagner de mesures incitatives réglementaires encourageant le marché à adopter les carburants de synthèse.
La technologie de captage et d’utilisation du CO2 est encore peu adoptée en Europe et les coûts d’investissement et d’exploitation restent élevés. Il existe également des obstacles qui empêchent le transport du CO2 vers les lieux où il doit être stocké ou utilisé. Dans certaines régions de l’UE, les citoyens et les décideurs politiques nourrissent également des craintes à l’égard du stockage du CO2. Un forum européen annuel consacré au captage, à l’utilisation et au stockage du carbone pourrait être organisé dans le cadre du Forum industriel sur l’énergie propre, afin d’étudier plus avant les possibilités de promotion des projets dans ce domaine.
Actions clés
·Proposer une terminologie exhaustive pour désigner tous les combustibles renouvelables et à faible intensité de carbone et un système européen de certification de ces combustibles, fondé notamment sur des critères de durabilité et de réduction des émissions de gaz à effet de serre sur la totalité du cycle de vie, en s’appuyant sur les dispositions existantes, notamment celles figurant dans la directive sur les énergies renouvelables (juin 2021).
·Envisager des mesures supplémentaires pour soutenir les combustibles renouvelables et à faible intensité de carbone, éventuellement au moyen de parts minimales ou de quotas dans certains secteurs d’utilisation finale (dont les transports aérien et maritime), au moyen de la révision de la directive sur les énergies renouvelables et sur la base de ses objectifs sectoriels (juin 2021); ces mesures seraient complétées, au besoin, par d’autres mesures examinées dans le cadre des initiatives REFUEL dans le secteur de l’aviation et FUEL dans le secteur du transport maritime (2020). Le régime de soutien à l’hydrogène sera plus ciblé, des parts ou des quotas étant prévus uniquement pour l’hydrogène renouvelable.
·Promouvoir le financement de projets phares de pôles industriels intégrés neutres en carbone produisant et consommant des combustibles renouvelables et à faible intensité de carbone, par l’intermédiaire des programmes Horizon Europe, InvestEU et LIFE, ainsi que du Fonds européen de développement régional (à partir de 2021).
·Stimuler une production inédite d’engrais à partir d’hydrogène renouvelable par l’intermédiaire du programme Horizon Europe (à partir de 2021).
·Démontrer le captage du carbone et le porter à une plus grande échelle en vue de son utilisation dans la production de combustibles de synthèse, éventuellement par l’intermédiaire du Fonds pour l’innovation (à partir de 2021).
·Élaborer un cadre réglementaire pour la certification des absorptions de carbone sur la base d’une comptabilité carbone solide et transparente, afin de surveiller l’évolution des absorptions de carbone et d’en vérifier l’authenticité (d’ici à 2023).
|
3.4.Rendre les marchés de l’énergie aptes à assumer la décarbonation et les ressources distribuées
Dans un système énergétique intégré, des marchés fiables et efficaces devraient orienter les clients vers l’option de décarbonation la plus efficace sur le plan énergétique et la moins chère, en se fondant sur des prix qui reflètent correctement l’ensemble des coûts du vecteur énergétique utilisé.
Veiller à ce que les composantes des prix non liées à l’énergie contribuent à la décarbonation de l’ensemble des vecteurs énergétiques
Dans de nombreux États membres de l’UE, les taxes et prélèvements sur l’électricité sont plus élevés que pour le charbon, le gaz ou le mazout de chauffage, tant en valeur absolue qu’en part du prix total
. Ces dernières années, les redevances et prélèvements sur l’électricité, tels que ceux qui financent des dispositifs de soutien aux énergies renouvelables, ont continué à augmenter. Dans le même temps, la composante énergétique du prix final (de détail) de l’électricité a diminué tant en termes absolus qu’en termes relatifs. Cette situation a creusé l’asymétrie des coûts non énergétiques entre l’électricité et le gaz: en ce qui concerne les prix de détail de l’électricité domestique, par exemple, les taxes et prélèvements représentent désormais jusqu’à 40 % du prix final, contre 26 % pour le gaz ou 32 % pour le mazout de chauffage. D’autres secteurs à forte intensité d’énergie ou à forte intensité de carbone, tels que les transports aérien et maritime internationaux, ainsi que l’agriculture, peuvent être soumis à une TVA faible ou nulle, et, en vertu de la directive actuelle sur la taxation de l’énergie, à des droits d’accise peu élevés sur l’énergie.
De plus, les coûts du carbone ne sont que partiellement internalisés, voire aucunement internalisés, dans certains secteurs (par exemple, les transports routier et maritime ou le chauffage domestique) ou dans certains États membres, et ils pourraient ne pas suffire pour inciter certains secteurs relevant du SEQE à se décarboner (par exemple, l’aviation). Enfin, les combustibles fossiles continuent également d’être subventionnés dans l’UE.
Globalement, les taxes et prélèvements applicables, y compris la tarification du carbone, ne sont pas appliqués de manière homogène à l’ensemble des vecteurs et secteurs énergétiques, et créent des distorsions favorables à l’utilisation de vecteurs spécifiques.
Enfin, il conviendrait également de prendre en considération les spécificités de l’électricité utilisée pour le stockage d’énergie ou pour la production d’hydrogène, en évitant une double imposition (de sorte que l’énergie ne soit taxée qu’une seule fois lors de sa livraison pour consommation finale) et en évitant les doubles redevances injustifiées d’accès au réseau.
Placer les consommateurs au centre
Des informations claires et facilement accessibles sont essentielles pour permettre aux citoyens de modifier leurs modes de consommation d’énergie et de passer à des solutions qui soutiennent un système énergétique intégré. Les clients, qu’il s’agisse de particuliers ou d’entreprises, devraient être informés de leurs droits, des options technologiques dont ils disposent et de l’empreinte carbone et environnementale correspondante, de sorte qu’ils puissent faire des choix en connaissance de cause et véritablement stimuler la décarbonation. Il importe de faire en sorte que les ménages vulnérables ne soient pas laissés pour compte et que la précarité énergétique soit combattue. Dans le contexte du pacte pour le climat, la Commission lancera une campagne d’information à destination des consommateurs sur les droits dont ils bénéficient dans le cadre du marché de l’énergie.
Le paquet «énergie propre» a renforcé les droits en matière d’information des consommateurs d’électricité, mais du travail reste à accomplir pour que les droits des consommateurs de gaz et de chauffage urbain soient alignés sur ceux qui sont en vigueur dans le secteur de l’électricité.
En outre, certains marchés de produits et services durables font toujours défaut, par exemple pour des produits tels que l’acier, le ciment et les produits chimiques obtenus à partir de combustibles renouvelables ou à faible intensité de carbone. Dans le cadre des efforts plus larges annoncés dans le plan d’action pour une économie circulaire afin d’améliorer la durabilité de ces produits intermédiaires, les consommateurs devraient recevoir des informations pertinentes susceptibles de les encourager à payer un prix majoré.
Rendre les marchés de l’électricité et du gaz aptes à assumer la décarbonation
Le paquet «énergie propre» a déjà jeté les bases pour faire en sorte que les marchés de l’électricité soient aptes à intégrer de grandes quantités d’électricité provenant de sources variables et à intégrer la flexibilité provenant de la participation active de la demande et du stockage, tout en améliorant les signaux du marché afin de stimuler les investissements et d'autonomiser les consommateurs d’électricité. Le défi consiste désormais à mettre les mesures correctement en œuvre, en particulier l’achèvement du couplage des marchés au moyen des échanges journaliers et infrajournaliers.
À mesure que nous nous rapprocherons de la neutralité climatique, le volume de gaz naturel consommé en Europe diminuera progressivement. Si les combustibles gazeux devraient continuer à jouer un rôle important dans notre bouquet énergétique
, le mix de combustibles gazeux dépendra fortement de la trajectoire de décarbonation choisie. D’ici à 2050, la part du gaz naturel dans les combustibles gazeux devrait être ramenée à 20 %, et la majeure partie des 80 % restants devrait être d’origine renouvelable
. Cependant, le futur bouquet de ces vecteurs énergétiques gazeux – biogaz, biométhane, hydrogène ou gaz de synthèse – est difficile à prévoir.
Il convient de réexaminer le cadre réglementaire du marché du gaz afin de faciliter le recours aux gaz d’origine renouvelable et l’autonomisation des consommateurs, tout en garantissant l’émergence dans l’UE d’un marché intérieur du gaz caractérisé par son intégration, sa liquidité et son interopérabilité.
Dans ce contexte, parmi les questions à envisager figurent la connexion à l’infrastructure et l’accès au marché pour la production distribuée de gaz d’origine renouvelable, y compris au niveau de la distribution, qui compléteraient l’utilisation des gaz renouvelables dans un contexte plus local et circulaire (comme le biogaz utilisé dans les exploitations agricoles). En outre, grâce aux gaz d’origine renouvelable injectés dans le réseau gazier et à une diversification accrue des sources d’approvisionnement, les paramètres de qualité des gaz consommés et transportés dans l’UE seraient modifiés. Pour éviter que cela n’entraîne une segmentation du marché et des restrictions des échanges, il y a lieu de déterminer comment garantir l’interopérabilité des systèmes gaziers ainsi que la circulation sans entrave des gaz par-delà les frontières des États membres.
Actualiser le cadre régissant les aides d’État
Le réexamen en cours du cadre relatif aux aides d’État, et notamment de ses lignes directrices concernant les aides d’État à la protection de l’environnement et à l’énergie, contribuera à l’intégration du système énergétique en fournissant un cadre pleinement actualisé et adapté aux objectifs poursuivis, permettant un déploiement économiquement rentable de l’énergie propre et le bon fonctionnement des marchés de l’énergie.
Actions clés
Afin de promouvoir des conditions de concurrence équitables entre tous les vecteurs énergétiques:
·Publier des orientations à l’intention des États membres pour remédier au problème des redevances et prélèvements élevés appliqués à l’électricité et pour assurer la cohérence des composantes non énergétiques des prix entre les différents vecteurs énergétiques ( d’ici à 2021).
·Aligner la taxation des produits énergétiques et de l’électricité sur les politiques environnementale et climatique de l’UE, et garantir une taxation harmonisée du stockage comme de la production d’hydrogène, en évitant une double imposition, au moyen de la révision de la directive sur la taxation de l’énergie.
·Fournir des signaux plus cohérents en matière de prix du carbone dans l’ensemble des secteurs de l’énergie et des États membres, notamment au moyen d’une possible proposition visant à étendre le SEQE à de nouveaux secteurs (d’ici juin 2021).
·Poursuivre les travaux en vue de la suppression progressive des subventions directes aux combustibles fossiles, y compris dans le contexte du réexamen du cadre régissant les aides d’État et de la révision de la directive sur la taxation de l’énergie (à partir de 2021).
·Veiller à ce que la révision du cadre relatif aux aides d’État favorise une décarbonation qui soit efficace sur le plan des coûts dans les secteurs de l’économie où un soutien public reste nécessaire (d’ici à 2021).
Afin d’adapter le cadre réglementaire du marché du gaz:
·Revoir le cadre législatif afin de concevoir un marché du gaz décarboné qui soit concurrentiel, adapté aux gaz d’origine renouvelable, y compris pour autonomiser les consommateurs de gaz grâce à l’amélioration de leur information et de leurs droits (d’ici à 2021).
Améliorer l’information des consommateurs:
·Dans le cadre du pacte pour le climat, lancer une campagne d’information à destination des consommateurs d’énergie pour les informer de leurs droits (d’ici à 2021).
·Améliorer l’information des consommateurs sur la durabilité des produits industriels (en particulier l’acier, le ciment et les produits chimiques) dans le cadre de l’initiative en faveur d’une politique des produits durables et, au besoin, par des propositions législatives complémentaires (d’ici à 2022).
|
3.5.Une infrastructure énergétique plus intégrée
L’intégration du système énergétique se traduira par davantage de liens physiques entre les vecteurs énergétiques. Cela nécessite une approche nouvelle et globale, tant pour la planification des infrastructures à grande échelle que pour celle des infrastructures locales, y compris pour ce qui est de la protection et de la résilience des infrastructures critiques. L’objectif devrait être de tirer le meilleur parti des infrastructures existantes tout en évitant à la fois les effets de verrouillage et les actifs délaissés. La planification des infrastructures devrait faciliter l’intégration de différents vecteurs énergétiques et permettre un arbitrage entre le développement de nouvelles infrastructures et la réaffectation d’infrastructures existantes. Des solutions autres que les options fondées sur le réseau devraient être envisagées, en particulier des solutions axées sur la demande, ainsi que le stockage.
Les différents éléments du réseau énergétique devront tous évoluer. Il convient de promouvoir des systèmes de chauffage urbain à basse température et modernes, car ceux-ci peuvent assurer le lien entre la demande locale et les sources d’énergie renouvelable et d’énergie fatale, ainsi que les réseaux électrique et gazier en général, contribuant ainsi à l’optimisation de l’offre et de la demande entre vecteurs énergétiques. Toutefois, les réseaux de chauffage urbain ne représentent que 12 % du total de la consommation d’énergie finale des systèmes de chaleur et de froid, sont fortement concentrés dans quelques États membres, et seul un nombre limité d’entre eux est très efficace et repose sur des sources d’énergie renouvelables.
La mise en œuvre du paquet «énergie propre» contribuera à une utilisation plus efficace des réseaux électriques. Cependant, l’électrification accélérée de nouvelles utilisations finales nécessitera le renforcement du réseau, principalement au niveau de la distribution mais aussi au niveau du transport, et de rendre le réseau plus intelligent. Les électrolyseurs seront connectés aux réseaux électriques, et éventuellement aux réseaux gaziers existants. Dans le contexte de l’évaluation des plans nationaux en matière d’énergie et de climat des États membres, la Commission analysera également les progrès accomplis dans la réalisation de l’objectif de 15 % d’interconnexion électrique et envisagera des mesures appropriées, y compris dans le cadre de la révision du règlement RTE-E.
Le réseau gazier existant offre de vastes capacités dans l’ensemble de l’UE pour intégrer les gaz renouvelables et à faible intensité de carbone, et sa réaffectation pour des applications fondées sur l’hydrogène pourrait apporter, dans certains cas, une solution économiquement rentable, y compris pour transporter de l’hydrogène renouvelable provenant de parcs de production d’électricité renouvelable en mer. Les ports pourraient se transformer en centres de réception de l’électricité produite en mer, ainsi que de l’hydrogène liquide, et contribuer ainsi au commerce mondial d’hydrogène renouvelable ou de combustibles de synthèse.
Si les réseaux gaziers pourraient être utilisés
pour permettre le mélange d’hydrogène de manière limitée pendant une phase de transition, des infrastructures spécialement affectées au stockage et au transport à grande échelle d’hydrogène pur, allant au-delà des gazoducs point à point présents dans les pôles industriels, pourraient se révéler nécessaires. L’expansion des stations de ravitaillement en hydrogène sera également évaluée dans le cadre de la révision de la directive sur le déploiement d’une infrastructure pour carburants alternatifs et du règlement sur les orientations RTE-T.
De même, il est nécessaire de poursuivre la réflexion sur le rôle des infrastructures spéciales pour le CO2, qui transportent le CO2 sur les sites industriels en vue d’une utilisation ultérieure, ou vers des installations de stockage à grande échelle.
Le règlement relatif aux réseaux transeuropéens d’énergie (RTE-E) fournit un cadre pour la sélection des projets d’infrastructure présentant un intérêt commun en ce qui concerne les réseaux d’électricité, de gaz et de CO2. Dans ce contexte, actuellement, des plans décennaux de développement du réseau (TYNDP) au niveau national et au niveau de l’UE sont élaborés parallèlement pour les gestionnaires de réseaux de transport de gaz et d’électricité. La planification future des réseaux nécessitera une approche plus intégrée et intersectorielle, notamment des secteurs de l’électricité et du gaz. Elle exigera aussi une cohérence totale avec les objectifs en matière de climat et d’énergie, y compris un alignement sur les plans nationaux en matière d’énergie et de climat, et une prise en compte appropriée de tous les acteurs concernés, eu égard également aux conditions locales.
La Commission veillera à ce que la révision en cours du règlement RTE-E le rende pleinement compatible avec la neutralité climatique et permette une intégration économiquement rentable du système énergétique, ainsi que son intégration avec les systèmes numériques et de transport. De même, la révision en cours du règlement relatif au réseau transeuropéen de transport (RTE-T) recherchera des synergies avec le règlement RTE-E, en vue de créer des possibilités supplémentaires de décarbonation des transports sur la base de la nouvelle vision de la planification des infrastructures énergétiques.
Enfin, les interdépendances de plus en plus grandes entre les secteurs signifient que des perturbations dans l’un peuvent avoir un impact immédiat sur le fonctionnement des autres, de sorte qu’une nouvelle approche cohérente de la sécurité est indispensable pour les infrastructures tant physiques que numériques. La nouvelle stratégie de l’UE sur l’union de la sécurité portera à la fois sur les infrastructures critiques et sur la cybersécurité et devrait s’accompagner d’initiatives sectorielles visant à faire face aux risques spécifiques pesant sur les infrastructures critiques, notamment dans le contexte d’un système et d’infrastructures énergétiques intégrés.
Actions clés
·Faire en sorte que les révisions des règlements RTE-E et RTE-T (en 2020 et 2021, respectivement) soutiennent pleinement un système énergétique plus intégré, notamment en renforçant les synergies entre les infrastructures énergétiques et de transport, ainsi que la nécessité d’atteindre l’objectif de 15 % d’interconnexion électrique pour 2030.
·Revoir la portée et la gouvernance des plans décennaux de développement du réseau afin de garantir une cohérence totale avec les objectifs de décarbonation de l’UE et la planification transsectorielle des infrastructures dans le cadre de la révision du règlement RTE-E (2020) et d’autres actes législatifs pertinents (2021).
·Accélérer les investissements dans des réseaux de chauffage et de refroidissement urbains intelligents, hautement efficaces et fondés sur les énergies renouvelables, en proposant, s’il y a lieu, des obligations plus strictes dans le cadre de la révision de la directive sur les énergies renouvelables et de la directive relative à l’efficacité énergétique (juin 2021), ainsi que le financement de projets phares.
|
3.6.Un système énergétique numérisé et un cadre d’innovation propice
La numérisation soutient l’intégration du système énergétique: elle peut faciliter des flux dynamiques et interconnectés entre vecteurs énergétiques, permettre l’interconnexion de marchés plus diversifiés et fournir les données nécessaires pour faire coïncider l’offre et la demande, à un degré de détail plus élevé et presque en temps réel. Une combinaison de nouveaux capteurs, d’infrastructures avancées d’échange de données et de capacités de traitement des données qui utilisent les mégadonnées, ainsi que l’intelligence artificielle, la 5G et les technologies des registres distribués, peuvent améliorer les prévisions, permettre la surveillance et la gestion à distance de la production distribuée et améliorer l’optimisation des actifs, y compris l’utilisation sur site de l’autoproduction. La numérisation est également essentielle pour libérer tout le potentiel des consommateurs ayant une consommation d’énergie flexible dans différents secteurs, afin de contribuer à l’intégration efficace d’un plus grand nombre d’énergies renouvelables. De manière plus générale, la numérisation offre des possibilités de croissance économique et l’occasion d'acquérir une primauté dans le domaine technologique au niveau mondial.
La numérisation représente un défi en termes d’augmentation de la demande d’énergie pour les équipements, réseaux et services TIC, qui doit être gérée de manière adéquate dans le cadre d’un système énergétique intégré. La numérisation confronte également le secteur de l’énergie à d’autres défis, en particulier en matière d’éthique, de respect de la vie privée et de cybersécurité, compte tenu de la spécificité de ce secteur.
Un plan d’action pour la numérisation du secteur de l’énergie, applicable à l’ensemble du système, pourrait accélérer la mise en œuvre de solutions numériques, en s’appuyant sur l’espace européen commun des données relatives à l’énergie
, annoncé dans la stratégie européenne pour les données. Dans le cadre de la mise en œuvre du paquet «énergie propre», ce plan prévoira le déploiement de compteurs intelligents, encouragera la participation active de la demande et garantira l’interopérabilité des données relatives à l’énergie. Il prévoira également un recours aux possibilités de financement de l’UE, telles que le mécanisme pour l’interconnexion en Europe, InvestEU, le programme pour une Europe numérique et les fonds structurels, afin que les solutions élaborées dans le cadre d’Horizon Europe puissent être appliquées plus largement.
Enfin, la recherche et l’innovation joueront un rôle essentiel dans la création et l’exploitation de nouvelles synergies au sein du système énergétique, par exemple en ce qui concerne la mobilité électrique, le chauffage ou la décarbonation des industries à forte intensité énergétique. La recherche devrait se concentrer sur la mise sur le marché de technologies moins matures, tandis que les technologies plus matures et innovantes devraient être portées à une échelle supérieure par des démonstrations à grande échelle, par l’intermédiaire du programme Horizon Europe proposé et de ses partenariats et par l’utilisation des complémentarités entre les différents programmes de financement de l’UE. Le développement technologique doit aller de pair avec l’innovation sociétale.
Actions clés
·Adopter un plan d’action sur la numérisation du secteur de l’énergie afin de créer un marché concurrentiel des services énergétiques numériques qui garantisse la protection et la souveraineté des données et soutienne les investissements dans les infrastructures énergétiques numériques (2021).
·Élaborer un code de réseau sur la cybersécurité dans le secteur de l’électricité, établissant des règles sectorielles afin d’accroître la résilience et la cybersécurité des flux transfrontières d’électricité, y compris des règles sur les exigences minimales communes, la planification, la surveillance, les rapports et la gestion de crise (d’ici à la fin 2021).
·Adopter les actes d’exécution établissant les exigences en matière d’interopérabilité et des procédures transparentes pour l’accès aux données au sein de l’UE (le premier en 2021).
·Publier de nouvelles perspectives de recherche et d’innovation en matière d’énergie propre axées sur les impacts pour que l’UE veille à ce que la recherche et l’innovation soutiennent l’intégration du système énergétique (d’ici à la fin de 2020).
|
4.Conclusions
La présente communication expose une stratégie et un ensemble de mesures pour faire en sorte que l’intégration du système énergétique puisse contribuer au système énergétique du futur, c’est-à-dire un système qui soit efficace, résilient, sûr et mû par le double objectif d’une planète plus propre et d’une économie plus forte pour tous.
La transition vers un système énergétique plus intégré est d’une importance capitale pour l’Europe, aujourd’hui plus que jamais. Premièrement, pour la relance. L’épidémie de COVID‑19 a affaibli l’économie européenne et hypothèque la prospérité future des citoyens et des entreprises européens. La présente stratégie fait partie intégrante du plan de relance. Elle propose une voie à suivre qui est efficace sur le plan des coûts, promouvant des investissements bien ciblés dans les infrastructures, évitant les actifs délaissés et entraînant une baisse de la facture des entreprises et des clients. En résumé, il est primordial d’accélérer la sortie de crise de l’UE et de mobiliser les financements européens nécessaires, y compris par le biais du Fonds de cohésion, ainsi que les investissements privés. Deuxièmement, pour la neutralité climatique. L’intégration du système énergétique est essentielle pour atteindre les objectifs climatiques revus à la hausse pour 2030 et la neutralité climatique à l’horizon 2050. Cette intégration exploite le potentiel d’efficacité énergétique, permet une plus vaste intégration des énergies renouvelables, le déploiement de combustibles nouveaux et décarbonés, ainsi qu’approche plus circulaire de la production et du transport de l’énergie.
Enfin, un système énergétique véritablement intégré est vital pour établir la primauté mondiale de l’Europe dans le domaine des technologies énergétiques propres, en s’appuyant sur les atouts actuels de l’Union: un rôle moteur reconnu dans le secteur des énergies renouvelables; une approche régionale de la gestion des systèmes et de la planification des infrastructures; des marchés de l’énergie libéralisés; et une excellence dans les domaines de l’innovation et de la numérisation en matière énergétique.
Nous sommes encore loin de nos objectifs pour 2050. Pour les atteindre, il est urgent de prendre des mesures à la fois fondamentales et de grande ampleur. Adopté en 2018-2019, le paquet «énergie propre» jette les bases de l’intégration du système et devrait être pleinement mis en œuvre. Dans le contexte du Pacte vert, les nouvelles mesures décrites dans la présente communication apporteront le nécessaire surcroît d’envergure et de rapidité pour évoluer vers le système énergétique de demain, contribuant ainsi à la réalisation des ambitions climatiques accrues de l’UE et à l’élaboration des modifications législatives devant être proposées en juin 2021. C’est maintenant qu’il faut agir.
De toute évidence, l’intégration du système ne consistera pas en un processus unique convenant à toutes les situations: en dépit d’un objectif commun de neutralité climatique de l’UE à l’horizon 2050, les États membres de l’UE partent de points de départ différents. En conséquence, les États membres suivront des voies différentes, en fonction des circonstances qui leur sont propres, de leurs moyens et des politiques qu’ils choisissent, autant d’éléments déjà pris en compte dans leurs plans nationaux respectifs en matière d’énergie et de climat. La présente stratégie fixe un cap afin d’orienter leur action dans la même direction.
Les citoyens ont un rôle central à jouer dans l’intégration du système. En d’autres termes, ils devraient contribuer à façonner la mise en œuvre de la stratégie, en recourant au pacte pour le climat et à d’autres forums citoyens pour faire avancer l’intégration du système.
Par le présent document, la Commission invite le Conseil, le Parlement, les autres institutions de l’UE ainsi que toutes les parties prenantes à porter leur attention sur les moyens de faire progresser l’intégration du système énergétique en Europe. Elle entend convier les parties intéressées à débattre à l’occasion d’un grand événement public à la fin de cette année et à contribuer aux consultations publiques et analyses d’impact qui guideront la préparation des propositions de suivi envisagées pour 2021 et après.