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Document 62021CC0746

    Conclusions de l'avocat général M. A. M. Collins, présentées le 27 avril 2023.
    Altice Group Lux Sàrl contre Commission européenne.
    Pourvoi – Concurrence – Contrôle des opérations de concentration entre entreprises – Règlement (CE) no 139/2004 – Exception d’illégalité – Article 4, paragraphe 1 – Obligation de notification préalable des concentrations – Article 7, paragraphe 1 – Obligation de suspension des concentrations – Champ d’application – Notion de “réalisation” d’une concentration – Article 14, paragraphe 2 – Décision infligeant des amendes pour la réalisation d’une opération de concentration avant sa notification et son autorisation – Obligation de motivation – Principe de proportionnalité – Compétence de pleine juridiction.
    Affaire C-746/21 P.

    Court reports – general

    ECLI identifier: ECLI:EU:C:2023:361

     CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

    M. ANTHONY M. COLLINS

    présentées le 27 avril 2023 ( 1 )

    Affaire C‑746/21 P

    Altice Group Lux Sàrl, anciennement New Altice Europe BV, en liquidation

    contre

    Commission européenne

    « Pourvoi – Concurrence – Contrôle des opérations de concentration entre entreprises – Règlement (CE) no 139/2004 – Article 4, paragraphe 1 – Obligation de notification préalable – Article 7, paragraphe 1 – Obligation de suspension – Article 14, paragraphe 2 – Décision infligeant des amendes pour défaut de notification et pour réalisation d’une opération de concentration avant qu’elle ait été déclarée compatible avec le marché intérieur – Principe de proportionnalité – Dénaturation des faits »

    I. Introduction

    1.

    Le présent pourvoi concerne un cas de « gun jumping », c’est‑à‑dire un cas de manquement aux obligations de notification et de suspension prévues par le règlement (CE) no 139/2004 du Conseil, du 20 janvier 2004, relatif au contrôle des concentrations entre entreprises (« le règlement CE sur les concentrations ») ( 2 ). Ce règlement exige des parties à la concentration qu’elles notifient à la Commission européenne toute concentration qui relève du régime obligatoire de notification. En outre, il leur interdit de réaliser une concentration avant que la Commission l’ait autorisée. Le règlement no 139/2004 confère à la Commission le pouvoir d’infliger des amendes aux parties qui enfreignent ces deux obligations. C’est l’exercice de ce pouvoir qui a donné lieu au présent pourvoi.

    II. Les faits, la procédure au principal et les conclusions des parties au pourvoi

    2.

    Le 9 décembre 2014, New Altice Europe BV (ci-après « Altice ») a conclu avec Oi SA (ci-après le « vendeur ») un contrat d’acquisition d’actions ( 3 ) (Share Purchase Agreement, ci-après le « SPA ») prévoyant qu’Altice prendrait le contrôle exclusif de PT Portugal (ci-après l’« entreprise cible ») au sens de l’article 3, paragraphe 1, sous b), du règlement no 139/2004. Cet accord comportait des arrangements restrictifs, notamment l’article 6, paragraphe 1, sous b), destiné à régir la gestion de l’entreprise cible pendant la période séparant la date de signature de la date de clôture de l’opération, et aux termes duquel le vendeur consentait à s’abstenir d’accomplir et d’adopter certains actes et décisions de nature commerciale sans l’autorisation préalable d’Altice (ci-après les « arrangements antérieurs à la clôture ») ( 4 ).

    3.

    À la suite de contacts de prénotification avec la Commission, Altice a formellement notifié l’opération de concentration le 25 février 2015. Le 20 avril 2015, la Commission l’a déclarée compatible avec le marché intérieur, sous réserve du respect de certains engagements.

    4.

    Le 24 avril 2018, la Commission a adopté la décision C(2018) 2418 final dans l’affaire M.7993 – Altice/PT Portugal (ci-après la « décision litigieuse »). Elle a infligé à Altice une amende de 62250000 euros pour avoir réalisé une concentration avant qu’elle ait été autorisée, violant ainsi l’article 7, paragraphe 1, du règlement no 139/2004, ainsi qu’une amende de 62250000 euros pour avoir réalisé une concentration avant qu’elle ait été notifiée, ce qui constituait une infraction à l’article 4, paragraphe 1, de ce règlement ( 5 ). La Commission a constaté que les arrangements antérieurs à la clôture conféraient à Altice la capacité d’exercer une influence déterminante sur l’entreprise cible, qu’Altice avait effectivement exercé une telle influence et que, dans ce contexte, elle avait procédé à une série d’échanges d’informations avec l’entreprise cible ( 6 ).

    5.

    Altice a conclu à l’annulation de la décision litigieuse. Par un arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 22 septembre 2021 ( 7 ), ce dernier a, dans l’exercice de sa compétence de pleine juridiction, réduit à 56025000 euros le montant de l’amende infligée pour la violation de l’article 4, paragraphe 1, du règlement no 139/2004. Il a rejeté le recours pour le surplus. Les points 1 à 29 de l’arrêt attaqué fournissent des précisions sur les antécédents du litige.

    6.

    Par son pourvoi, Altice conclut à ce qu’il plaise à la Cour :

    annuler l’arrêt attaqué ainsi que les articles 1er, 2, 3 et 4 de la décision litigieuse ou, à titre subsidiaire, exercer sa compétence de pleine juridiction pour réduire de manière substantielle le montant des amendes infligées aux articles 3 et 4 de la décision litigieuse, telle que modifiée par le Tribunal ou, à titre encore plus subsidiaire, renvoyer l’affaire devant le Tribunal ;

    condamner la Commission aux dépens exposés par la requérante tant dans la présente procédure que dans la procédure devant le Tribunal.

    7.

    La Commission conclut à ce qu’il plaise à la Cour :

    rejeter le pourvoi ;

    condamner Altice aux dépens.

    8.

    Le Conseil, qui n’a examiné que le premier moyen du pourvoi, conclut à ce qu’il plaise à la Cour :

    rejeter le premier moyen du pourvoi ;

    condamner Altice aux dépens exposés par lui dans le cadre de la présente procédure.

    III. Les moyens invoqués à l’appui du pourvoi

    9.

    Les six moyens invoqués à l’appui du pourvoi se répartissent en trois catégories. Par les deux premiers moyens, Altice conteste la légalité de l’article 4, paragraphe 1, et de l’article 14, paragraphe 2, sous a), du règlement no 139/2004 ainsi que l’application de ces dispositions aux faits de l’espèce. Les troisième, quatrième et cinquième moyens ont trait à la question de savoir si Altice a réalisé la concentration. Par le sixième moyen, Altice conteste le montant des amendes infligées par la Commission.

    A.   Sur les deux premiers moyens : la légalité et l’application de l’article 4, paragraphe 1, et de l’article 14, paragraphe 2, sous a), du règlement no 139/2004

    1. Résumé de l’argumentation des parties

    10.

    Par son premier moyen, Altice soutient que, compte tenu de l’illégalité de l’article 4, paragraphe 1, et de l’article 14, paragraphe 2, sous a), du règlement no 139/2004, c’est à tort que le Tribunal a rejeté le moyen par lequel Altice conteste, sur le fondement de l’article 277 TFUE, l’applicabilité de ces dispositions.

    11.

    Altice soutient que l’article 4, paragraphe 1, et l’article 14, paragraphe 2, sous a), du règlement no 139/2004 ne permettent pas à la Commission d’infliger une seconde amende à la même personne pour un comportement déjà sanctionné au titre de l’article 7, paragraphe 1, et de l’article 14, paragraphe 2, sous b), de ce règlement. L’article 4, paragraphe 1, et l’article 14, paragraphe 2, sous a), du règlement no 139/2004 auraient un caractère disproportionné, feraient double emploi et seraient, dès lors, illégaux, l’article 7, paragraphe 1, de ce règlement interdisant toute réalisation anticipée d’une concentration et poursuivant le même objectif que l’article 4, paragraphe 1. Cette anomalie trouverait son origine dans la réforme du règlement no 139/2004. Dans sa version précédente, la disposition qui figure désormais à l’article 4, paragraphe 1, du règlement no 139/2004 prévoyait une obligation de notification, tandis que, dans sa version actuelle, elle comprendrait une obligation de suspension.

    12.

    Par son deuxième moyen, Altice soutient que, même si le moyen qu’elle invoque au titre de l’article 277 TFUE devait être rejeté, le Tribunal a commis une erreur en estimant que la Commission pouvait, dans les circonstances de l’espèce, infliger des amendes distinctes en cas d’infractions à l’article 4, paragraphe 1, et à l’article 7, paragraphe 1, du règlement no 139/2004. Elle invoque les mêmes arguments que dans le cadre de son premier moyen, à savoir que ces dispositions poursuivent les mêmes objectifs et enfreignent, par conséquent, l’interdiction de la double sanction et du concours de lois. À titre subsidiaire, pour le cas où la Cour devrait considérer que l’article 4, paragraphe 1, et l’article 7, paragraphe 1, du règlement no 139/2004 poursuivent des objectifs autonomes, Altice estime que le principe du concours d’infractions fait obstacle à la possibilité d’infliger deux amendes distinctes au titre de ces dispositions. Dans ces circonstances, le Tribunal aurait également dû examiner le caractère proportionné des amendes infligées.

    13.

    La Commission et le Conseil contestent cette argumentation.

    2. Appréciation

    14.

    L’article 4, paragraphe 1, du règlement (CEE) no 4064/89 du Conseil, du 21 décembre 1989, relatif au contrôle des opérations de concentration entre entreprises ( 8 ), soit l’acte qui a précédé le règlement no 139/2004, exigeait que les opérations de concentration soient notifiées au plus tard une semaine après la conclusion de l’accord, après l’annonce de l’offre publique d’acquisition ou d’échange, ou après l’acquisition d’une participation de contrôle. Ce délai commençait à courir à partir du moment où le premier de ces événements était intervenu. L’article 7, paragraphes 1 et 2, du règlement no 4064/89 prévoyait qu’une concentration ne pouvait être réalisée ni avant d’être notifiée ni pendant un délai de trois semaines suivant sa notification, sous réserve de prorogation de ce délai. L’article 14, paragraphe 1, sous a), du règlement no 4064/89 conférait à la Commission le pouvoir d’infliger des amendes allant de 1000 à 50000 écus lorsque les parties avaient omis de notifier une opération de concentration conformément à l’article 4 de ce règlement. L’article 14, paragraphe 2, sous b), du règlement no 4064/89 prévoyait que la Commission pouvait infliger des amendes jusqu’à concurrence de 10 % du chiffre d’affaires total réalisé par les entreprises concernées en cas d’infractions à l’article 7, paragraphe 1 ou paragraphe 2, dudit règlement.

    15.

    Le règlement no 139/2004 comprend une obligation de notification et une obligation de suspension (ou de non‑réalisation) de la concentration, qui diffèrent de celles que prévoyait le règlement qui l’a précédé sur les points pertinents suivants. L’article 4, paragraphe 1, du règlement no 139/2004, intitulé « Notification préalable des concentrations et renvoi en prénotification à la demande des parties notifiantes », prévoit que l’obligation de notification prend naissance lorsque l’accord en question a été conclu (ou que l’offre publique d’achat ou d’échange a été annoncée), mais que la réalisation n’a pas débuté. Selon le paragraphe 1 de l’article 7 de ce règlement, intitulé « Suspension de la concentration », une concentration ne peut être réalisée ni avant d’être notifiée ni avant d’avoir été déclarée compatible avec le marché intérieur. En vertu de l’article 14, paragraphe 2, du règlement no 139/2004, la Commission peut infliger des amendes jusqu’à concurrence de 10 % du chiffre d’affaires total en cas de défaut de notification et en cas de réalisation anticipée d’une concentration ( 9 ).

    16.

    Contrairement à ce que soutient Altice, les dispositions pertinentes du règlement no 139/2004 sont, en substance, semblables à celles figurant dans la version précédente de ce règlement : elles distinguent l’obligation de notification de celle de ne pas réaliser la concentration et permettent d’infliger des amendes en cas de violation de chacune de ces obligations. Les différences entre les deux versions ne permettent pas, à mon sens, de tirer de l’interprétation du règlement no 139/2004 des conclusions susceptibles d’étayer la position défendue par Altice.

    17.

    En vertu de l’article 4, paragraphe 1, du règlement no 139/2004, l’obligation de notification s’impose i) après la conclusion de l’accord et ii) avant la réalisation de la concentration. Cette disposition n’impose pas, en elle-même, une obligation de suspension. Son titre et son libellé se concentrent sur l’obligation de notification, une exigence procédurale qui se matérialise une fois que les deux conditions mentionnées sont remplies. Sous réserve d’un délai de prescription de trois ans ( 10 ), l’article 14, paragraphe 2, sous a), du règlement no 139/2004 permet à la Commission d’infliger des amendes si elle constate que cette disposition a été violée. La Commission doit apprécier les faits afin d’établir, notamment, si, quand et de quelle manière une concentration a été réalisée puisque cette réalisation est l’une des conditions qui permettent de constater l’existence d’une infraction à l’article 4, paragraphe 1, du règlement no 139/2004, l’autre condition étant la conclusion de l’accord en question.

    18.

    L’article 7, paragraphe 1, du règlement no 139/2004 se concentre sur l’obligation de suspension des concentrations. Il prévoit que les parties ne peuvent réaliser une concentration ni avant de l’avoir notifiée ni avant qu’elle ait été déclarée compatible avec le marché intérieur. Sous réserve d’un délai de prescription de cinq ans ( 11 ), l’article 14, paragraphe 2, sous b), du règlement no 139/2004 permet à la Commission d’infliger des amendes en cas d’infractions à cette interdiction. La Commission doit apprécier les faits afin de déterminer si et quand la concentration a été réalisée. Le degré et la durée de la réalisation constituent des éléments pertinents afin de déterminer le montant de toute amende à infliger en cas de non‑respect de cette obligation ( 12 ). Dans le cadre d’une violation de l’article 7, paragraphe 1, du règlement no 139/2004, la conclusion d’un accord n’est pas nécessairement déterminante puisque cette disposition ne l’exige pas formellement ( 13 ).

    19.

    La Cour a relevé que, en cas d’infractions concomitantes à l’article 4, paragraphe 1, et à l’article 7, paragraphe 1, du règlement no 139/2004 par la réalisation d’une concentration avant sa notification, l’article 14, paragraphe 2, sous a) et b), de ce règlement prévoit la possibilité d’infliger des amendes distinctes ( 14 ). Lorsque la Commission soupçonne les parties i) de ne pas avoir notifié une concentration dans le temps imparti et ii) d’avoir réalisé cette concentration avant d’avoir obtenu l’autorisation de la Commission, il est probable qu’il y ait un chevauchement entre les éléments de fait qu’elle doit examiner au titre des points i) et ii), à savoir la nature et le calendrier des mesures prises par les parties qui sont susceptibles de constituer une réalisation ( 15 ).

    20.

    Comme l’a relevé, à mon sens à juste titre, le Tribunal aux points 56, 57, 60, 63 et 64 de l’arrêt attaqué en faisant référence à la jurisprudence de la Cour, l’article 4, paragraphe 1, et l’article 7, paragraphe 1, du règlement no 139/2004 imposent des obligations différentes : la première exige que la notification soit faite dans le temps imparti tandis que la seconde interdit la réalisation anticipée d’une concentration. Elles poursuivent donc des objectifs autonomes ( 16 ). Elles visent des comportements distincts, bien que l’existence de ces comportements puisse, dans certains cas, être établie en considérant les mêmes faits.

    21.

    Étant donné que l’article 4, paragraphe 1, et l’article 7, paragraphe 1, du règlement no 139/2004 poursuivent des objectifs autonomes, la première de ces dispositions ne saurait être considérée comme étant redondante par rapport à la seconde. Comme le souligne le Tribunal aux points 54 et 55 de l’arrêt attaqué, en s’appuyant sur la jurisprudence de la Cour ( 17 ), une violation de l’article 7, paragraphe 1, du règlement no 139/2004 n’entraîne pas toujours une violation de l’article 4, paragraphe 1. Lorsqu’une notification a été faite dans le temps imparti, les parties à une concentration pourraient prendre des mesures pour réaliser celle‑ci après la notification mais avant l’autorisation, auquel cas seul l’article 7, paragraphe 1, du règlement no 139/2004 est susceptible d’être pertinent.

    22.

    L’objectif de la réglementation sur les concentrations est de veiller à ce que celles-ci n’entraînent pas de modifications durables de la structure du marché qui soient susceptibles de réduire la concurrence. Le règlement no 139/2004 met en place un système de contrôle exclusif des concentrations de dimension communautaire et interdit celles qui entravent de manière significative une concurrence effective. Le fait d’inciter au respect tant de l’obligation de notification que de l’obligation de suspension en permettant d’infliger des amendes en cas de violation de l’une ou l’autre de ces obligations, ou des deux, permet de garantir que les concentrations ne passeront pas inaperçues et d’éviter les difficultés qui découlent de l’annulation des concentrations qui créent des problèmes. Par conséquent, le respect de chacune de ces obligations, dans le cadre du régime obligatoire de notification et d’autorisation préalable prévu par le règlement no 139/2004, présente une importance évidente ( 18 ). Altice n’a avancé aucun argument convaincant de nature à remettre en cause une telle approche. Cette conclusion reflète la motivation de l’arrêt attaqué et est conforme à la jurisprudence de la Cour à laquelle le Tribunal fait référence dans l’arrêt attaqué lorsqu’il rejette l’exception d’illégalité soulevée par Altice à l’encontre de l’article 4, paragraphe 1, et de l’article 14, paragraphe 2, sous a), du règlement no 139/2004.

    23.

    Enfin, je ne partage pas le point de vue d’Altice lorsqu’elle soutient que le Tribunal a omis de répondre à ses arguments et d’examiner les éléments de preuve qu’elle a produits en ce qui concerne l’interdiction de la double sanction et du concours de lois ou d’infractions. Devant le Tribunal, Altice a présenté ces arguments en se fondant manifestement sur la prémisse selon laquelle l’article 4, paragraphe 1, et l’article 7, paragraphe 1, du règlement no 139/2004 « prot[ègent] le même intérêt juridique » ( 19 ). Aux points 56 et 57 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a examiné cette prémisse avant de rejeter ces arguments ( 20 ).

    24.

    J’ajouterais que, dans la mesure où ils font référence à des notions telles que le « concours de lois », le « conflit apparent (ou faux conflit) de lois », et le « principe de consommation », les arguments présentés par Altice sont imprécis ( 21 ). Selon Altice, ces notions voisines et l’interdiction de la « double sanction » qu’elles impliqueraient font partie des traditions juridiques communes des États membres et constituent dès lors des principes généraux du droit de l’Union. À titre de preuve, Altice a présenté, devant le Tribunal, cinq avis juridiques afin de démontrer de quelle manière ces notions sont interprétées et appliquées dans l’ordre juridique pénal en Belgique, en Espagne, en France, en Italie et au Portugal. Ces avis font ressortir deux thématiques. Premièrement, l’ordre juridique pénal de chacun de ces États membres prévoit une variété de règles applicables, par exemple, dans des situations où le « même comportement » ou les « mêmes faits » entraînent des violations de plusieurs dispositions légales, où les comportements sont liés par un « lien logique » ou une « intention similaire », où une infraction recouvre un comportement visé dans le cadre d’une autre infraction, où les « infractions générales » sont subsumées à la catégorie des « infractions spéciales » ou sont considérées comme étant subsidiaires par rapport à ces dernières, et où les « infractions graves » absorbent les « infractions moins graves ». Deuxièmement, les législations nationales applicables à ces situations reposent sur les principes d’équité procédurale, de légalité et de caractère proportionné des sanctions ainsi que sur le principe ne bis in idem ( 22 ), lesquels sont tous bien établis en droit de l’Union ( 23 ), ou sont l’expression de ces principes.

    25.

    En l’état actuel des choses, presque toutes les références aux notions invoquées par Altice figurent dans des arrêts relatifs à la réalisation de concentrations. Seuls quelques arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme les mentionnent incidemment dans le cadre de références au droit national. En l’absence de définitions précises et communes de ces notions, de consensus sur le fait que ces notions et les conséquences qui en découlent font partie des traditions juridiques des États membres et d’indication selon laquelle elles comblent une lacune identifiable en droit de l’Union, je ne suis pas convaincu qu’il soit utile ou judicieux de les appliquer ou d’y souscrire dans le contexte de la présente affaire.

    26.

    À la lumière de ce qui précède, je propose à la Cour de rejeter le premier moyen du pourvoi.

    27.

    Dans la mesure où Altice invoque les mêmes arguments dans le cadre du deuxième moyen, il convient de rejeter celui-ci pour les mêmes raisons.

    28.

    J’aborderai les arguments d’Altice relatifs au caractère proportionné des amendes sous la section relative au sixième moyen.

    B.   Sur les troisième, quatrième et cinquième moyens : la réalisation de la concentration

    1. Sur le troisième moyen : la notion de réalisation

    a) Résumé de l’argumentation des parties

    29.

    Ce moyen a trait aux arrangements antérieurs à la clôture. Il est divisé en trois branches. Premièrement, Altice soutient que, dans l’arrêt attaqué, le Tribunal confond la notion de concentration figurant à l’article 3, paragraphe 2, du règlement no 139/2004 et celle de réalisation figurant à l’article 4, paragraphe 1, et à l’article 7, paragraphe 1, de ce règlement. Elle fait valoir que la réalisation n’aurait pu avoir lieu qu’au moment du transfert des actions de l’entreprise cible à Altice, ce qui s’est produit après que la Commission a déclaré la concentration compatible avec le marché intérieur. C’est ce que démontrerait également le fait que, si la Commission avait interdit la concentration ou si les parties avaient décidé d’abandonner l’opération, il n’aurait pas été nécessaire de prendre des mesures au titre de l’article 8, paragraphe 4, du règlement no 139/2004 pour rétablir la situation concurrentielle qui prévalait avant la signature du SPA ( 24 ). L’arrêt attaqué dénaturerait les arguments d’Altice à cet égard ( 25 ).

    30.

    Deuxièmement, le Tribunal aurait, dans l’arrêt attaqué, commis une erreur en considérant les arrangements antérieurs à la clôture comme constituant une réalisation partielle, dans la mesure où il n’a pas réfuté l’argument selon lequel ces arrangements ne constituaient pas un changement durable du contrôle. Ils ont duré moins de cinq mois et le SPA prévoyait qu’ils expireraient à une date précise. Le Tribunal aurait également commis une erreur de droit en concluant que les considérations exposées au point 49 de l’arrêt Ernst & Young étaient dénuées de pertinence.

    31.

    Troisièmement, Altice soutient que l’arrêt attaqué considère à tort que, pour être accessoires au sens de la communication de la Commission relative aux restrictions directement liées et nécessaires à la réalisation des opérations de concentration ( 26 ), les arrangements antérieurs à la clôture doivent préserver la valeur de l’entreprise cible. Les arrangements antérieurs à la clôture en cause ici relèveraient du champ d’application de cette communication dès lors qu’ils auraient joué un rôle légitime en veillant à la préservation de l’intégrité de l’entreprise acquise entre la signature et la clôture et posé les bases de l’intégration de cette entreprise dans Altice ( 27 ).

    32.

    La Commission fait observer qu’Altice n’a pas contesté les conclusions formulées par le Tribunal dans l’arrêt attaqué, selon lesquelles elle avait réalisé la concentration en exerçant effectivement une influence déterminante – par opposition au fait d’avoir la possibilité d’exercer une telle influence – sur l’entreprise cible avant que la Commission ait déclaré cette concentration compatible avec le marché intérieur. Dès lors que les constatations relatives à l’exercice effectif d’une influence déterminante sont suffisantes pour justifier le dispositif de l’arrêt attaqué, c’est-à-dire pour « rejeter le recours pour le surplus », le moyen du pourvoi tiré de la possibilité pour Altice d’exercer une influence déterminante serait inopérant et devrait être rejeté à ce titre. En tout état de cause, la Commission conteste l’ensemble des arguments invoqués par Altice à l’appui du troisième moyen.

    b) Appréciation

    33.

    Je ne partage pas le point de vue de la Commission selon lequel le troisième moyen est inopérant en tout ou en partie. Altice a contesté la conclusion formulée dans la décision litigieuse, selon laquelle les arrangements antérieurs à la clôture lui donnaient la possibilité d’exercer une influence déterminante. La motivation ainsi que les conclusions du Tribunal à cet égard n’ont pas été formulées par souci d’exhaustivité et elles font partie du raisonnement ayant conduit à rejeter le recours ( 28 ).

    34.

    Dans sa jurisprudence, la Cour énonce deux points qui sont essentiels en ce qui concerne la première branche du troisième moyen. L’article 7, paragraphe 1, du règlement no 139/2004 limite l’interdiction de réalisation aux seules concentrations, telles que définies à l’article 3 de ce règlement ( 29 ). En vertu de cette dernière disposition, une concentration est réputée réalisée lorsqu’un changement durable du contrôle résulte d’une fusion ou d’une acquisition, ce contrôle consistant dans la possibilité, découlant de droits, contrats ou autres moyens, d’exercer une influence déterminante sur l’activité d’une entreprise. Une concentration au sens de l’article 7 du règlement no 139/2004 est réalisée dès que les parties à celle-ci mettent en œuvre des opérations ou des transactions contribuant à changer durablement le contrôle sur l’entreprise cible ( 30 ). Ces considérations s’appliquent également à l’article 4, paragraphe 1, du règlement no 139/2004.

    35.

    Contrairement à ce que soutient Altice, rien, que ce soit dans les dispositions pertinentes du règlement no 139/2004 ou dans l’interprétation qu’en fait la Cour, n’indique que la possibilité d’exercer une influence déterminante n’est conférée que par un transfert d’actions de l’entreprise cible à l’acquéreur. C’est d’ailleurs ce qui ressort clairement de l’article 3, paragraphe 2, sous b), du règlement no 139/2004 ainsi que de la communication juridictionnelle codifiée de la Commission concernant le règlement no 139/2004 ( 31 ). Par conséquent, c’est à juste titre que le Tribunal a jugé qu’un changement de contrôle a pu avoir lieu par le fait que le SPA a conféré à Altice la possibilité d’exercer une influence déterminante sur l’entreprise cible dès le jour de sa signature ( 32 ).

    36.

    L’article 8, paragraphe 4, du règlement no 139/2004 prévoit que la Commission peut ordonner aux entreprises de dissoudre la concentration par la cession d’actions ou d’autres mesures visant à rétablir la situation antérieure à la réalisation de la concentration. Ainsi que le Tribunal l’a relevé à bon droit ( 33 ), cette disposition ne définit pas la notion de concentration. Contrairement à ce qu’affirme Altice, elle ne définit pas non plus la notion de réalisation. C’est donc à tort qu’Altice soutient, sur ce fondement, qu’une réalisation ne peut intervenir que dans des circonstances dans lesquelles la Commission peut ordonner des mesures de dissolution au sens de l’article 8, paragraphe 4, du règlement no 139/2004.

    37.

    L’allégation formulée par Altice, selon laquelle le Tribunal, au point 87 de l’arrêt attaqué, a dénaturé son argument, est également infondée. Altice explique que, au point 47 de la requête qu’elle a introduite devant le Tribunal, elle avait fait référence à la réalisation, tandis que le Tribunal, au point 87 de l’arrêt attaqué, indique qu’Altice a soutenu que seules les opérations qui exigeraient des mesures de dissolution au sens de l’article 8, paragraphe 4, du règlement no 139/2004 caractériseraient l’existence d’une concentration ( 34 ). Ainsi que je le relève au point 36 des présentes conclusions, l’article 8, paragraphe 4, du règlement no 139/2004 ne définit pas la notion de concentration ni celle de réalisation. La conclusion du Tribunal est, en tout état de cause, correcte même si l’on substitue le terme « réalisation » au terme « concentration » ( 35 ).

    38.

    Quant à la deuxième branche du présent moyen, la question de la durée des arrangements antérieurs à la clôture est abordée aux points 85 et 94 à 97 de l’arrêt attaqué. Le Tribunal a distingué entre les mesures contribuant à un changement de contrôle, qui n’ont pas à être durables, et le changement de contrôle lui-même qui, pour constituer une concentration, doit être durable. Cette analyse est correcte au vu de la jurisprudence de la Cour ( 36 ). Il importe donc peu qu’Altice se soit fondée sur les arrangements antérieurs à la clôture afin d’exercer un contrôle sur l’entreprise cible pendant une période de quatre mois et onze jours.

    39.

    En outre, dans les circonstances particulières du cas d’espèce, les doutes, quels qu’ils puissent être, quant au caractère durable du changement de contrôle sont levés lorsque l’on constate que le transfert d’actions conformément au SPA a achevé de manière fluide le changement de contrôle sur l’entreprise cible qui a eu lieu à la signature du SPA et qu’Altice a effectivement exercé une influence déterminante sur certains aspects de l’activité de cette entreprise en vertu des arrangements antérieurs à la clôture. Une fois les actions de l’entreprise cible transférées à Altice, celle-ci n’avait plus besoin de s’appuyer sur les arrangements contractuels afin de contrôler l’activité de l’entreprise cible. Par conséquent, l’affirmation d’Altice selon laquelle le changement de contrôle était temporaire n’est pas étayée par les faits.

    40.

    S’agissant de l’argument d’Altice fondé sur l’application des critères énoncés au point 49 de l’arrêt Ernst & Young, ce point indique que les opérations qui ne présentent pas de lien fonctionnel direct avec la réalisation d’une concentration, et qui ne sont donc pas nécessaires pour parvenir à un changement de contrôle, ne relèvent pas du champ d’application de l’article 7 du règlement no 139/2004. Altice soutient que les arrangements antérieurs à la clôture n’étaient pas nécessaires, ne présentaient pas de lien fonctionnel avec le transfert d’actions et ne relevaient donc pas du champ d’application de cette disposition.

    41.

    La Commission souligne à juste titre que l’hypothèse envisagée au point 49 de l’arrêt Ernst & Young, et détaillée aux points 47 et 48 de cet arrêt, est celle dans laquelle une concentration est réalisée « par des opérations partielles successives » et par « des opérations étroitement liées en ce qu’elles font l’objet d’un lien conditionnel ou prennent la forme d’une série de transactions sur titres effectuées dans un délai raisonnablement bref ». Ainsi que le relève le Tribunal aux points 98 à 100 de l’arrêt attaqué, ce n’est pas sur cette situation factuelle que portait l’affaire en l’espèce. Par conséquent, les critères établis au point 49 de l’arrêt Ernst & Young, qui permettent d’apprécier si des opérations accessoires ou préparatoires constituent une réalisation d’une concentration au moyen d’une série de transactions, sont dénués de pertinence.

    42.

    S’agissant de la troisième branche, je ne partage pas le point de vue d’Altice selon lequel c’est à tort que le Tribunal, dans l’arrêt attaqué, a considéré que, pour être accessoires au sens de la communication de la Commission relative aux restrictions directement liées et nécessaires à la réalisation des opérations de concentration, les arrangements antérieurs à la clôture doivent préserver la valeur de l’entreprise cible. Les points 102 et 103 de l’arrêt attaqué laissent ouverte la possibilité d’utiliser des critères autres que la préservation de la valeur de l’entreprise. Au point 104 de l’arrêt attaqué, le Tribunal relève qu’Altice n’a pas présenté d’éléments visant à démontrer qu’il y avait un risque d’atteinte à l’intégrité commerciale de l’entreprise cible plutôt qu’à la valeur de celle-ci. L’argument d’Altice repose donc sur une lecture erronée de l’arrêt attaqué.

    43.

    Eu égard aux considérations qui précèdent, je propose à la Cour de rejeter le troisième moyen du pourvoi.

    2. Sur le quatrième moyen : la notion de droits de veto

    a) Résumé de l’argumentation des parties

    44.

    Altice soutient que, aux points 91 à 169 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a commis une erreur dans son examen des arrangements antérieurs à la clôture, qui sont décrits, dans la décision litigieuse, comme conférant à Altice des « droits de veto » sur des décisions stratégiques affectant l’entreprise cible. Altice s’appuie sur les paragraphes 18 et 54 de la communication juridictionnelle, aux termes desquels la prise de contrôle ne peut être réalisée sur une base contractuelle que lorsque l’entreprise concernée bénéficie de « droits de veto permettant de bloquer les décisions commerciales stratégiques », c’est-à-dire du « pouvoir de bloquer l’adoption de décisions stratégiques ». Selon Altice, le SPA ne lui conférait pas ce pouvoir puisque seuls les arrangements antérieurs à la clôture exigeaient son consentement. Le refus de donner ce consentement ne pouvait pas « créer une situation de blocage », l’unique sanction du non‑respect des arrangements antérieurs à la clôture étant le paiement d’une indemnité. Partant, le Tribunal aurait commis une erreur de droit en rejetant l’argument par lequel Altice conteste la décision litigieuse.

    45.

    Pour les mêmes raisons, Altice soutient, à titre subsidiaire, que le Tribunal a dénaturé les éléments de preuve en concluant que les arrangements antérieurs à la clôture lui conféraient des droits de veto. Cela, à son tour, impliquerait que l’appréciation, figurant aux points 170 à 215 de l’arrêt attaqué, concernant la section 4.2.1 de la décision litigieuse – qui repose sur l’idée qu’Altice disposait d’un droit de veto sur ces décisions stratégiques – est erronée. Le Tribunal aurait donc conclu à tort que les arrangements antérieurs à la clôture équivalaient à une réalisation au sens de l’article 4, paragraphe 1, et de l’article 7, paragraphe 1, du règlement no 139/2004.

    46.

    La Commission conteste cette argumentation.

    b) Appréciation

    47.

    Par le présent moyen, Altice se plaint d’erreurs qui figureraient aux points 91 à 215 de l’arrêt attaqué. Une référence aussi vague, et contraire aux exigences procédurales de la Cour ( 37 ), ne permet pas à celle-ci de déterminer les points de l’arrêt attaqué que critique Altice ( 38 ). Lors de l’audience, Altice a indiqué que les principaux points contestés étaient les points 111, 114, 123 à 125, et 131 de l’arrêt attaqué.

    48.

    Altice s’appuie sur les paragraphes 18 et 54 de la communication juridictionnelle pour soutenir que le Tribunal a commis une erreur de droit en approuvant la conclusion de la Commission selon laquelle les arrangements antérieurs à la clôture conféraient à Altice des droits de veto dans certains domaines. En particulier, le Tribunal aurait mal interprété la notion de droit de veto telle qu’elle figure dans ladite communication.

    49.

    La communication juridictionnelle fournit des indications afin de permettre aux entreprises de déterminer, préalablement à tout contact avec la Commission, si et dans quelle mesure le régime de contrôle des opérations de concentration prévu en droit de l’Union est susceptible de s’appliquer à leurs opérations. Elle le fait sans préjudice des interprétations qui pourraient être retenues par la Cour ou le Tribunal ( 39 ).

    50.

    J’examinerai tout d’abord le paragraphe 54 de la communication juridictionnelle, qui introduit le chapitre consacré à la prise de contrôle exclusif. Une lecture attentive de ce chapitre indique qu’il analyse deux situations distinctes. Les paragraphes 54 à 60 traitent de l’acquisition d’un contrôle exclusif de droit au moyen de droits de vote, généralement par l’acquisition d’une participation majoritaire ou minoritaire dans l’entreprise cible. Le paragraphe 61 traite de l’acquisition d’un contrôle exclusif de fait par l’achat d’actifs ou par des moyens contractuels. Les références faites, au paragraphe 54, au pouvoir d’un actionnaire de « bloquer les décisions stratégiques » ou de « bloquer l’adoption de décisions stratégiques » ainsi qu’au pouvoir de certains actionnaires de « créer une situation de blocage » s’inscrivent dans le contexte des droits de vote associés aux actions. Par conséquent, elles ne prétendent pas fournir une définition ou une description des droits de veto qui soit déterminante aux fins de l’appréciation des droits d’origine contractuelle en cause. Partant, c’est à juste titre que le Tribunal a jugé que le paragraphe 54 de la communication juridictionnelle est dénué de pertinence dans le cadre de l’appréciation des arrangements antérieurs à la clôture ( 40 ).

    51.

    Au paragraphe 18 de la communication juridictionnelle, il est précisé que, pour conférer un contrôle sur une base contractuelle, « le contrat doit conduire à un contrôle de la direction et des ressources de l’autre entreprise analogue à celui obtenu par acquisition d’actions ou d’éléments d’actifs ». Plusieurs exemples sont mentionnés, le dernier d’entre eux faisant référence aux « droits de veto » dans le cadre de contrats pouvant déboucher sur « un contrôle en commun dès lors que tant le propriétaire des éléments d’actifs que l’entreprise contrôlant la direction bénéficient de droits de veto permettant de bloquer les décisions commerciales stratégiques ». Cette déclaration est illustrée par deux décisions de concentration, citées à la note en bas de page 22 de la communication juridictionnelle. La première de ces décisions concerne l’acquisition d’un groupe d’hôtels. L’une des deux entreprises, une entreprise commune, devait être propriétaire des hôtels. L’autre entreprise devait les gérer en vertu d’un contrat de gestion. Les entreprises étaient tenues d’approuver les plans opérationnels des hôtels établis par la société de gestion. Au cas où les parties ne parvenaient pas à un accord, elles devaient soumettre le litige à un arbitre externe, évitant ainsi une éventuelle situation de blocage ( 41 ).

    52.

    Il ressort clairement de cet aperçu que, dans cette partie de la communication juridictionnelle, le terme « droit de veto » est employé afin de décrire une situation dans laquelle les parties à une opération conviennent que le consentement de l’acquéreur est requis pour certaines décisions commerciales affectant l’entreprise cible. Dans la mesure où l’arrêt attaqué a expressément ou implicitement approuvé l’emploi par la décision litigieuse du terme « droit de veto » afin de décrire les mesures relevant des arrangements antérieurs à la clôture, il ne contient aucune erreur.

    53.

    Le moyen, fondé sur des arguments similaires, que fait valoir Altice à titre subsidiaire, selon lequel le Tribunal a dénaturé les éléments de preuve, met en cause, en réalité, l’appréciation des faits réalisée par le Tribunal, ce qui n’est pas autorisé dans le cadre d’un pourvoi ( 42 ). Par ailleurs, il repose sur la prémisse selon laquelle les arrangements antérieurs à la clôture n’ont pas conféré de « droits de veto », prémisse que je propose à la Cour de rejeter pour les raisons exposées aux points 50 à 52 des présentes conclusions.

    54.

    Eu égard à ce qui précède, je propose à la Cour de rejeter le quatrième moyen du pourvoi.

    3. Sur le cinquième moyen : les échanges d’informations

    a) Résumé de l’argumentation des parties

    55.

    Altice avance trois séries d’arguments afin de contester les conclusions formulées par le Tribunal en ce qui concerne les échanges d’informations.

    56.

    Dans le cadre de la première branche du cinquième moyen, Altice soutient que, aux points 226, 235 et 236 de l’arrêt attaqué, le Tribunal dénature le sens des considérants 470, 479 et 482 de la décision litigieuse lorsqu’il estime que ces considérants n’ont pas indiqué que les échanges d’informations entre Altice et l’entreprise cible enfreignaient l’article 4, paragraphe 1, et l’article 7, paragraphe 1, du règlement no 139/2004. L’interprétation que fait le Tribunal de ces considérants serait déraisonnable dans la mesure où le libellé de la décision litigieuse confirme clairement que la Commission a conclu que les échanges d’informations constituaient, en tant que tels, l’exercice d’une influence déterminante.

    57.

    Dans le cadre de la deuxième branche du cinquième moyen, Altice soutient que le Tribunal n’a pas tenu compte du fait que les échanges d’informations étaient susceptibles d’être contraires à l’article 101 TFUE, qui prévoit un mécanisme de contrôle ex post. La conclusion selon laquelle les échanges d’informations tombent sous le coup du mécanisme de contrôle ex ante prévu par le règlement no 139/2004 lorsqu’ils interviennent dans des situations aboutissant finalement à une concentration, mais se muent en infractions à l’article 101 TFUE lorsqu’il n’y a aucun changement de contrôle, serait irrationnelle et incompatible avec la jurisprudence de la Cour selon laquelle le champ d’application de l’article 7 du règlement no 139/2004 ne devrait pas limiter celui du règlement (CE) no 1/2003 du Conseil, du 16 décembre 2002, relatif à la mise en œuvre des règles de concurrence prévues aux articles [101] et [102 TFUE] ( 43 ).

    58.

    Par la troisième branche du cinquième moyen, Altice soutient que, dans l’arrêt attaqué, le Tribunal n’explique pas en quoi les échanges d’informations auraient été nécessaires pour parvenir à un changement durable de contrôle ou pour présenter un lien direct avec la réalisation de la concentration lorsque Altice a acquis les actions de l’entreprise cible. Par conséquent, le Tribunal aurait méconnu les exigences établies au point 49 de l’arrêt Ernst & Young.

    59.

    La Commission conteste cette argumentation.

    b) Appréciation

    60.

    S’agissant de la prétendue dénaturation des éléments de preuve, c’est au Tribunal qu’il appartient d’établir les faits. À moins que ses constatations comportent une inexactitude matérielle, il n’y a pas d’erreur de droit susceptible d’être examinée par la Cour ( 44 ).

    61.

    Au considérant 470 de la décision litigieuse, la Commission relève que la « réception d’informations aussi sensibles et détaillées [...] sans qu’existe une quelconque convention de “salle blanche” a placé Altice dans la même situation que si elle contrôlait déjà [l’entreprise cible] et était, par conséquent, en droit de demander et de recevoir ces informations ». Au considérant 473 de la décision litigieuse, qui conclut la section incluant le considérant 470, la Commission déclare qu’elle « estime que le fait qu’Altice demande et reçoive des informations stratégiques concernant les [indicateurs clés de performance] de l’entreprise cible ainsi que les stratégies futures en matière de prix contribue à démontrer qu’Altice a exercé une influence déterminante » ( 45 ).

    62.

    Le considérant 479 de la décision litigieuse est le premier paragraphe de la section intitulée « Conclusion relative à la violation de l’article 7, paragraphe 1, du règlement [no 139/2004] ». Il précise que les dispositions du SPA et le comportement d’Altice à partir de la date de la signature, tel que décrit à la section 4.2 de la décision litigieuse, équivalaient à une réalisation anticipée de l’opération. La section 4.2, intitulée « Influence exercée par Altice sur l’entreprise cible », s’étend du considérant 178 au considérant 478 de la décision litigieuse. Sous cette section, la Commission examine tout d’abord le rôle joué par Altice dans les décisions commerciales de l’entreprise cible (section 4.2.1, considérants 178 à 377), puis les échanges d’informations sensibles sur le plan commercial entre Altice et l’entreprise cible (section 4.2.2, considérants 378 à 478). Au considérant 482, la Commission conclut que l’ensemble des comportements décrits sous la section 4.2 constituaient l’exercice effectif d’une influence déterminante.

    63.

    Par conséquent, il ressort clairement du libellé des considérants 470, 479 et 482 de la décision litigieuse que la Commission n’a pas conclu que les échanges d’informations entre Altice et l’entreprise cible enfreignaient, en eux-mêmes, l’article 4, paragraphe 1, et l’article 7, paragraphe 1, du règlement no 139/2004. Le contexte dans lequel s’inscrivent ces considérants confirme ce point de vue. C’est donc sans dénaturer les faits que le Tribunal a jugé que la Commission n’a pas conclu que les échanges d’informations suffisaient, en eux‑mêmes, pour établir une infraction à l’article 4, paragraphe 1, et à l’article 7, paragraphe 1, du règlement no 139/2004 ( 46 ) et que c’est à juste titre que la Commission a conclu, au considérant 478 de la décision litigieuse, que les échanges d’informations avaient contribué à démontrer qu’Altice avait exercé une influence déterminante sur certains aspects de l’activité de l’entreprise cible ( 47 ).

    64.

    Les arguments qu’Altice soulève dans le cadre de la deuxième branche du présent moyen, qui ont trait à l’application de l’article 101 TFUE, sont fondamentalement erronés. Mis à part la contestation fondée sur la prétendue dénaturation des éléments de preuve dans le cadre de la première branche du présent moyen, que je propose à la Cour de rejeter, Altice n’a pas contesté la conclusion du Tribunal selon laquelle les échanges d’informations contribuaient à démontrer qu’Altice avait exercé une influence déterminante sur certains aspects de l’activité de l’entreprise cible. Les échanges d’informations étaient inhérents au fonctionnement des dispositions relatives au consentement prévues dans les arrangements antérieurs à la clôture et faisaient partie intégrante de l’exercice par Altice d’une influence déterminante sur l’entreprise cible ( 48 ). Il serait illogique, voire illégal ( 49 ), pour la Commission, d’écarter les échanges d’informations dans le cadre de son appréciation des autres comportements au titre de l’article 4, paragraphe 1, et de l’article 7, paragraphe 1, du règlement no 139/2004 et, au lieu de cela, de les apprécier séparément au regard de l’article 101 TFUE.

    65.

    Il convient donc, pour les raisons exposées au point 41 des présentes conclusions, de rejeter l’argument relatif à l’application des considérations énoncées au point 49 de l’arrêt Ernst & Young.

    66.

    Eu égard aux considérations qui précèdent, je propose à la Cour de rejeter le cinquième moyen du pourvoi.

    C.   Sur le sixième moyen : l’appréciation des amendes

    67.

    Altice divise ce sixième moyen en quatre branches. Ces branches peuvent être regroupées sous quatre grandes rubriques : i) le point de savoir si les infractions ont été commises par négligence ; ii) la motivation du Tribunal ; iii) l’argument selon lequel le montant des amendes ne devrait pas être identique puisque les infractions sont différentes, notamment en termes de durée, et iv) le caractère proportionné des amendes, considérées séparément et considérées ensemble.

    1. Sur la première branche : infractions commises par négligence

    a) Résumé de l’argumentation des parties

    68.

    Altice soutient que, contrairement à ce que le Tribunal a jugé aux points 279 à 296 de l’arrêt attaqué, les violations de l’article 4, paragraphe 1, et de l’article 7, paragraphe 1, du règlement no 139/2004 n’ont pas été commises par négligence. La jurisprudence reconnaîtrait que la portée de l’obligation prévue à l’article 7, paragraphe 1, du règlement no 139/2004 n’est pas claire. Prévoir des arrangements antérieurs à la clôture dans les contrats d’acquisition d’actions serait une pratique courante dans le domaine des fusions et acquisitions. Ce serait aussi la première fois que la Commission a déclaré que ce type d’arrangements, ainsi que les échanges d’informations au cours de la période séparant la signature du SPA du transfert d’actions de l’entreprise cible, constituent une réalisation. Altice soutient, en outre, qu’elle n’a pas entravé la capacité de la Commission à détecter la concentration puisqu’elle a soumis le projet de SPA à la Commission avec le projet de formulaire CO.

    69.

    La Commission conteste cette argumentation.

    b) Appréciation

    70.

    Aux points 279 à 296 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a examiné les arguments d’Altice selon lesquels les amendes étaient illégales, compte tenu de l’absence de négligence ou de propos délibéré de sa part. Après avoir, au point 279 de cet arrêt, brièvement résumé les arguments, le Tribunal a rappelé que, aux termes de l’article 14, paragraphe 2, du règlement no 139/2004, des amendes peuvent être infligées pour des infractions commises de propos délibéré ou par négligence. Il a ensuite expliqué comment la jurisprudence avait interprété cette disposition. Aux points 284 à 290 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a apprécié les facteurs et les éléments de preuve sur la base desquels la Commission a conclu qu’Altice avait agi par négligence. Le Tribunal a rejeté les arguments d’Altice contestant cette appréciation. Les constatations figurant aux points 284 à 290 de l’arrêt attaqué ne font pas l’objet du présent pourvoi. Altice conteste uniquement les conclusions que le Tribunal formule aux points 292 et 293, lesquelles concernent ses arguments tirés du manque de clarté de la disposition en cause ainsi que du fait qu’il n’existe pas de précédent.

    71.

    Ainsi que le relève à juste titre le Tribunal aux points 282, 292 et 293 de l’arrêt attaqué, il est de jurisprudence constante que la condition de négligence est remplie dès lors que l’entreprise en cause ne peut ignorer le caractère anticoncurrentiel de son comportement, qu’elle ait eu ou non conscience d’enfreindre les règles du droit de l’Union ( 50 ). Le fait qu’un comportement présentant les mêmes caractéristiques n’ait pas été examiné dans le passé n’exclut pas qu’une entreprise puisse se voir reprocher d’avoir adopté un tel comportement ( 51 ).

    72.

    Altice ne nie pas avoir une expérience significative des opérations de concentration. Plus important encore, des preuves documentaires datant de cette époque montrent qu’elle avait été avertie du risque que son comportement soit constitutif d’un « gun jumping » ou, en d’autres termes, qu’elle risquait d’« anticiper une décision de l’Autorité de la concurrence et d’agir comme si l’autorisation avait été donnée » ( 52 ). De nombreux éléments permettent d’étayer la conclusion selon laquelle les parties à la concentration avaient l’intention de mettre en œuvre et ont, dans les faits, mis en œuvre l’accord avant la notification et l’autorisation de la concentration, en ignorant les conseils exprès selon lesquels ce comportement enfreindrait les règles applicables. Les mesures prises allaient au-delà du cadre préparatoire ainsi que de la préservation de la valeur de l’entreprise cible. Elles n’étaient pas subordonnées à des garanties telles que des accords de non‑divulgation ou l’utilisation de « salles blanches ». La suggestion d’Altice que cette manière de procéder constitue une pratique normale en matière de concentrations est inquiétante et mérite l’attention de la Commission.

    73.

    L’argument selon lequel Altice n’aurait pas entravé la capacité de la Commission de détecter la concentration au motif qu’elle a soumis le projet de SPA avec le projet de formulaire CO n’est pas, à mon avis, pertinent aux fins d’apprécier si l’infraction a été commise par négligence. Il pourrait, tout au plus, être pertinent lorsqu’il s’agit d’apprécier la gravité du manquement à l’obligation de notification prévue à l’article 4, paragraphe 1, du règlement no 139/2004 ( 53 ).

    2. Sur la deuxième branche : motifs justifiant l’imposition d’amendes

    a) Résumé de l’argumentation des parties

    74.

    Altice soutient que le Tribunal a enfreint l’article 296 TFUE et l’article 41, paragraphe 2, de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne lorsqu’il a conclu que la décision litigieuse était suffisamment motivée en ce qui concerne le montant des amendes infligées au titre de l’article 7, paragraphe 1, et de l’article 4, paragraphe 1, du règlement no 139/2004. La motivation figurant aux points 297 à 362 de l’arrêt attaqué, et en particulier – comme cela a été clarifié lors de l’audience – aux points 314 à 324 de cet arrêt, serait insuffisante et contradictoire. Le Tribunal aurait dû expliquer pourquoi la Commission, si elle pouvait infliger deux amendes distinctes pour la violation de ces dispositions, n’était pas tenue d’apprécier séparément le montant de chacune de ces amendes.

    75.

    La Commission estime que la Cour devrait déclarer que cet argument est irrecevable dès lors qu’il ne satisfait pas à l’exigence selon laquelle le pourvoi doit indiquer de façon précise les éléments critiqués de l’arrêt dont Altice demande l’annulation, ainsi que les arguments juridiques qui soutiennent de manière spécifique cette demande ( 54 ).

    b) Appréciation

    76.

    La Commission souligne à juste titre que l’argument présenté par Altice est succinct. Cependant, il est suffisamment détaillé pour permettre à la Commission d’assurer sa défense et à la Cour de procéder à l’appréciation de cet argument.

    77.

    Selon une jurisprudence constante, la motivation exigée à l’article 296, deuxième alinéa, TFUE doit être adaptée à la nature de l’acte en cause et doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement suivi. Il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation satisfait à ces exigences est appréciée au regard non seulement du libellé de l’acte, mais aussi du contexte dans lequel il a été adopté ( 55 ).

    78.

    Aux points 315 à 324 de l’arrêt attaqué figure la motivation adoptée par le Tribunal afin de rejeter l’argument d’Altice selon lequel les amendes sont illégales compte tenu de l’insuffisance de motivation de la décision litigieuse. Le Tribunal rappelle tout d’abord que, en vertu de l’article 14, paragraphe 2, du règlement no 139/2004, la Commission peut infliger des amendes jusqu’à concurrence de 10 % du chiffre d’affaires total réalisé par l’entreprise concernée et que, en vertu de l’article 14, paragraphe 3, de ce règlement, la Commission doit, pour fixer le montant de l’amende, prendre en considération la nature, la gravité et la durée de l’infraction. Au point 319 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a constaté que, aux considérants 568 à 599 de la décision litigieuse, la Commission a expliqué quelles étaient la nature, la gravité et la durée des infractions. Aux points 320 à 322 de l’arrêt attaqué, le Tribunal résume la motivation de la décision litigieuse. Au point 323, il constate que cette motivation était suffisante en ce qu’elle permettait à Altice de se défendre et au Tribunal d’exercer son contrôle.

    79.

    Il ressort clairement du libellé des points 320 à 323 de l’arrêt attaqué que le Tribunal a estimé que la Commission avait apprécié séparément la nature, la gravité et la durée de chacune des infractions. La Commission a considéré que les deux infractions portaient atteinte à l’efficacité du règlement no 139/2004, et qu’elles étaient toutes deux graves et avaient été commises à tout le moins par négligence, quoique leur durée fût différente.

    80.

    Le Tribunal a ainsi examiné ensemble les éléments communs aux infractions et a évalué séparément leurs éléments divergents. C’est à bon droit que le Tribunal a adopté cette approche. Celle-ci ne contredit pas sa conclusion selon laquelle il était loisible à la Commission d’infliger deux amendes. En l’absence de lignes directrices détaillées en ce qui concerne le calcul du montant des amendes – indiquant, par exemple, la pondération attribuée à chacun des trois critères, et les points de départ ou les facteurs multiplicateurs concernant un ou plusieurs d’entre eux –, c’est à juste titre que le Tribunal a considéré que la motivation figurant à cet égard dans la décision litigieuse était suffisante ( 56 ).

    81.

    Je formulerais les observations suivantes en réponse à l’argument tiré du manque de transparence de la décision litigieuse dans le calcul des amendes qu’elle a infligées en vertu de l’article 14 du règlement no 139/2004. À ce jour, la Commission n’a infligé de telles amendes que dans le cadre de quelques litiges, ce qui signifie qu’elle ne l’a fait que dans un nombre limité de cas dans lesquels des entreprises ont enfreint l’article 4, paragraphe 1, et l’article 7, paragraphe 1, du règlement no 139/2004 ( 57 ). Le préjudice qui résulte de telles infractions est difficilement quantifiable en termes purement pécuniaires ( 58 ). Si la Commission adoptait une approche fondée sur le préjudice, la réalisation illégale d’une concentration qui pose des problèmes serait, selon toute probabilité, sanctionnée plus sévèrement que celle d’une concentration qui n’en pose pas. Cette approche pourrait se heurter au principe selon lequel, étant donné que toute concentration de dimension communautaire doit être notifiée à la Commission et déclarée compatible avec le marché intérieur avant d’être réalisée, toute violation de cette règle devrait être sanctionnée de la même manière. Les concentrations constituent des événements exceptionnels au cours de la vie d’une entreprise. Elles comportent des risques considérables sur le plan financier et pour la réputation de l’entreprise, et elles sont très coûteuses en termes de coût d’acquisition, de financement et de frais, ainsi que sur le plan du temps qui y est consacré par les cadres de l’entreprise ( 59 ). S’il était possible d’évaluer avec précision le montant des amendes, les entreprises pourraient inclure le risque lié à l’absence de conformité dans leur analyse coûts-avantages d’une concentration. En outre, il n’est pas simple de détecter directement les infractions à l’article 4, paragraphe 1, et à l’article 7, paragraphe 1, du règlement no 139/2004. Si la Commission peut prendre connaissance de certains aspects, tels que la publicité et le marketing, grâce à l’information accessible au public, d’autres stratégies de réalisation anticipée impliquent des changements que les tiers ne détecteront probablement pas ( 60 ). L’ensemble de ces considérations souligne l’importance de l’effet dissuasif lorsque la Commission fixe le montant des amendes pour les comportements prohibés dans ce domaine. L’effet dissuasif est indubitablement plus important lorsqu’il y a un certain degré d’imprévisibilité en ce qui concerne le montant des amendes que la Commission est susceptible d’infliger dans un cas individuel. En l’état actuel des choses, et pour autant que le processus décisionnel de la Commission respecte les principes généraux du droit de l’Union – notamment l’égalité de traitement, le principe de proportionnalité et l’exigence de motivation – et que l’issue de ce processus soit soumise à un contrôle juridictionnel effectif, je ne considère pas que le maintien de structures de marché concurrentielles et le plein respect du régime de contrôle des opérations de concentration de l’Union seraient servis par une plus grande transparence dans le calcul des amendes infligées en cas de violation du règlement no 139/2004 ( 61 ).

    3. Sur la troisième branche : différences entre les infractions reflétées dans le montant des amendes

    a) Résumé de l’argumentation des parties

    82.

    Altice soutient que l’arrêt attaqué est entaché d’une erreur de droit en ce que le Tribunal considère, aux points 320 à 324, que l’article 14, paragraphe 3, du règlement no 139/2004 peut conduire à infliger deux amendes distinctes d’un montant identique pour deux infractions prétendument autonomes, malgré leur nature, leur gravité et leur durée différentes. Altice considère qu’une violation de l’article 4, paragraphe 1, du règlement no 139/2004 est moins grave qu’une violation de l’article 7, paragraphe 1, de ce règlement en ce que la première est instantanée tandis que la seconde est continue. Le point 343 de l’arrêt attaqué négligerait d’expliquer pourquoi la durée des deux infractions n’est pas comparable. En outre, cette conclusion serait erronée en droit puisque rien dans le règlement no 139/2004 ne permet de l’étayer. À supposer qu’une amende de 62250000 euros soit proportionnée lorsqu’il est question d’une infraction qui a duré 137 jours, l’amende infligée pour une infraction à l’article 4, paragraphe 1, du règlement no 139/2004, qui n’a duré qu’un jour, ne devrait pas s’élever à plus de 450000 euros.

    83.

    La Commission conteste cette argumentation.

    b) Appréciation

    84.

    Les arguments présentés par Altice reposent sur une interprétation erronée de l’arrêt attaqué. Aux points 320 à 324 de cet arrêt, le Tribunal a apprécié le caractère approprié de la motivation de la décision litigieuse. C’est ce qui ressort clairement du titre précédant le point 312 ainsi que du libellé de ce point, lequel résume les arguments d’Altice. C’est également ce qui ressort du point 314 de l’arrêt attaqué, qui renvoie à l’article 296, deuxième alinéa, TFUE, ainsi que de la jurisprudence relative à l’interprétation de cet article et des points 319 et 323 de l’arrêt, qui concluent cette section et aux termes desquels la motivation de la décision litigieuse était suffisante.

    85.

    Les points de l’arrêt attaqué que conteste Altice ne portent pas sur la validité au fond de la motivation de la décision litigieuse. Dès lors, ils ne sauraient être mis en cause au motif qu’ils contiendraient une erreur de droit de cette nature.

    86.

    S’agissant de la prétendue insuffisance de motivation au point 343 de l’arrêt attaqué, ce point, qui figure sous la section consacrée à la question de savoir si les amendes présentaient un caractère illégal au regard du principe de proportionnalité, précise qu’il n’est pas possible de procéder à une comparaison dès lors qu’« une infraction instantanée n’a pas de durée ». Cette motivation, bien que succincte, explique la décision du Tribunal à cet égard et permet de contester celle-ci dans le cadre d’un pourvoi, comme l’a fait Altice.

    87.

    Pour contester cette conclusion sur le fond, Altice fait valoir que rien dans le règlement no 139/2004, en particulier l’article 4, paragraphe 1, l’article 7, paragraphe 1, ou l’article 14, paragraphe 2, de celui-ci, n’étaye la conclusion du Tribunal. Je ne partage pas ce point de vue. Ainsi que je l’explique au point 17 des présentes conclusions, l’exigence de notification prévue à l’article 4, paragraphe 1, du règlement no 139/2004 est une obligation procédurale qui se matérialise lorsque les deux conditions prévues par cette disposition sont remplies. Par conséquent, il est exact que la violation de cette disposition est instantanée et n’a pas de durée, ce qui rend impossible une comparaison avec une violation de l’article 7, paragraphe 1, du règlement no 139/2004, puisque, comme l’admet Altice, cette dernière infraction a une durée. Eu égard à cette conclusion, l’argument selon lequel le montant de l’amende infligée pour la violation de l’article 4, paragraphe 1, de ce règlement devrait être réduit à 450000 euros ne saurait prospérer ( 62 ).

    4. Sur la quatrième branche : caractère proportionné des amendes, considérées séparément et considérées ensemble

    a) Résumé de l’argumentation des parties

    88.

    Altice soutient qu’il est disproportionné d’infliger une amende de 62250000 euros pour une infraction à l’article 4, paragraphe 1, du règlement no 139/2004, qui constitue la même infraction que celle qui est punie en vertu du premier volet de l’article 7, paragraphe 1, de ce règlement. Elle ajoute que chacune des amendes est disproportionnée dans la mesure où la Commission a, auparavant, infligé des amendes nettement moins élevées pour des infractions à l’article 4, paragraphe 1, et à l’article 7, paragraphe 1, du règlement no 139/2004. Enfin, Altice soutient que c’est à tort que le Tribunal constate, au point 308 de l’arrêt attaqué, que la circonstance qu’Altice ait notifié l’opération et proposé des engagements avant même la signature du SPA « ne saurait atténuer le caractère infractionnel de son comportement ». Altice estime que cette constatation dénature l’argument qu’elle présente, selon lequel la Commission aurait dû prendre ces circonstances en considération pour apprécier la nature et la gravité de chacune des violations.

    89.

    La Commission conteste cette argumentation.

    b) Appréciation

    90.

    La jurisprudence ne corrobore pas l’allégation d’Altice selon laquelle, lorsque deux amendes sont infligées dans une seule et même décision, il est nécessaire d’apprécier le caractère proportionné de chacune d’entre elles ( 63 ). Dès lors, à la lumière de la motivation que je propose à la Cour d’adopter afin de rejeter les deux premiers moyens du pourvoi, l’argument selon lequel deux sanctions ont été imposées à Altice pour le même comportement est inopérant ( 64 ).

    91.

    En vertu de l’article 14, paragraphe 2, du règlement no 139/2004, le montant maximal des amendes ne peut pas excéder 10 % du chiffre d’affaires total réalisé par une entreprise. La Commission souligne que les amendes qu’elle a infligées à Altice représentaient 0,5 % du chiffre d’affaires total réalisé par celle‑ci au cours de l’année précédant l’adoption de la décision litigieuse. Altice n’a pas remis en cause l’exactitude ou la pertinence de la prise en compte, par la Commission, de cette considération dans son appréciation du caractère proportionné de l’amende au regard de l’exigence de l’effet dissuasif. Il est clair que les amendes infligées auparavant pour des infractions similaires n’ont pas eu un effet dissuasif suffisant à l’égard d’Altice, de sorte que son argument selon lequel il est disproportionné d’infliger des amendes nettement plus élevées ne saurait prospérer. La pratique décisionnelle de la Commission ne saurait davantage servir de cadre juridique aux amendes en matière de concurrence ( 65 ).

    92.

    L’argument d’Altice selon lequel le Tribunal n’a pas « veillé à ce que les amendes infligées soient proportionnées » est manifestement infondé pour deux raisons. Premièrement, aux points 332 à 349 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a examiné l’argument d’Altice selon lequel les amendes avaient un caractère illégal au regard du principe de proportionnalité. À l’exception du point 343 de cet arrêt, Altice ne remet en cause aucun élément de cette appréciation ( 66 ). Deuxièmement, le Tribunal a, dans l’exercice de sa compétence de pleine juridiction, apprécié la demande de réduction du montant de l’amende dans le cadre du grief d’Altice tiré d’une violation du principe de proportionnalité. Dans l’exercice de sa compétence de pleine juridiction, le Tribunal a relevé qu’il était tenu « d’examiner tout grief, de droit ou de fait, visant à démontrer que le montant de l’amende n’est pas en adéquation avec la gravité et la durée de l’infraction », « en tenant compte de l’ensemble des circonstances de l’espèce », pour « déterminer un montant de l’amende qui soit proportionné, au regard des critères qu’il estime adéquats, à la gravité de l’infraction commise par la requérante et qui soit également suffisamment dissuasif » ( 67 ). Il ressort clairement de ce qui précède que le Tribunal a tenu compte du principe de proportionnalité en exerçant son contrôle sur les amendes dans le cadre de l’exercice de sa compétence de pleine juridiction. Altice ne conteste aucun élément spécifique de cette analyse. Son allégation selon laquelle le Tribunal n’aurait pas examiné chacune des infractions séparément est entachée d’une erreur de fait, étant donné que le Tribunal a constaté que la circonstance atténuante ne s’appliquait qu’à l’amende infligée pour la violation de l’article 4, paragraphe 1, du règlement no 139/2004.

    93.

    Altice soutient que, au point 308 de l’arrêt attaqué, le Tribunal dénature son affirmation selon laquelle la Commission aurait dû, afin d’apprécier la nature et la gravité de chacune des infractions, prendre en considération le fait qu’Altice avait notifié l’opération et proposé des engagements avant même la signature du SPA. Dès lors qu’Altice n’a fourni aucun autre élément ou argument juridique à l’appui de cette erreur qu’elle allègue, ce grief ne respecte pas les exigences de la Cour et, pour cette raison, il convient de le rejeter ( 68 ).

    94.

    Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, je propose à la Cour de rejeter le sixième moyen et, partant, le pourvoi dans son intégralité.

    IV. Sur les dépens

    95.

    Aux termes des dispositions combinées de l’article 138, paragraphes 1 et 2, et de l’article 184, paragraphes 1 et 2, du règlement de procédure de la Cour, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

    96.

    Altice ayant succombé en ses moyens et la Commission ayant demandé qu’elle supporte les dépens, il y a lieu de condamner Altice à supporter ses propres dépens, ainsi que ceux exposés par la Commission dans le cadre de la présente instance.

    97.

    Conformément aux dispositions combinées de l’article 140, paragraphe 1, et de l’article 184, paragraphes 1 et 2, du règlement de procédure de la Cour, les États membres et les institutions qui sont intervenus au litige supportent leurs propres dépens.

    98.

    En conséquence, le Conseil supportera ses propres dépens afférents à la procédure devant la Cour.

    V. Conclusion

    99.

    Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, je suggère à la Cour de statuer comme suit :

    Le pourvoi est rejeté.

    Altice Group Lux Sàrl, anciennement New Altice Europe BV, en liquidation, supporte ses propres dépens ainsi que ceux exposés par la Commission européenne.

    Le Conseil de l’Union européenne supporte ses propres dépens.


    ( 1 ) Langue originale : l’anglais.

    ( 2 ) JO 2004, L 24, p. 1.

    ( 3 ) Dans la décision litigieuse (telle que définie au point 4 des présentes conclusions), ce contrat est dénommé l’« accord relatif à l’opération ».

    ( 4 ) Pour plus de détails, voir considérants 58 à 66 de la décision litigieuse.

    ( 5 ) Voir articles 1er à 4 de la décision litigieuse.

    ( 6 ) Considérants 479 à 491 de la décision litigieuse.

    ( 7 ) Altice Europe/Commission (T‑425/18, ci-après l’« arrêt attaqué », EU:T:2021:607).

    ( 8 ) JO 1989, L 395, p. 1.

    ( 9 ) Le règlement no 139/2004 prévoit diverses dérogations et exceptions aux obligations de notification et de suspension, qui sont dénuées de pertinence dans le cadre du présent pourvoi.

    ( 10 ) Article 1er du règlement (CEE) no 2988/74 du Conseil, du 26 novembre 1974, relatif à la prescription en matière de poursuites et d’exécution dans les domaines du droit des transports et de la concurrence de la Communauté économique européenne (JO 1974, L 319, p. 1).

    ( 11 ) Ibidem.

    ( 12 ) Considérant 595 de la décision litigieuse.

    ( 13 ) Ce qui ne signifie pas qu’il peut ne pas être tenu compte des termes de l’accord lorsqu’ils sont pertinents afin de déterminer si la concentration a été réalisée.

    ( 14 ) Arrêt du 4 mars 2020, Marine Harvest/Commission (C‑10/18 P, EU:C:2020:149, point 106).

    ( 15 ) Voir, par exemple, considérant 490 de la décision litigieuse, où, afin de déterminer si l’obligation prévue à l’article 4, paragraphe 1, du règlement no 139/2004 a été enfreinte, la Commission s’appuie sur des éléments de preuve présentés dans le contexte de l’application de l’article 7, paragraphe 1, dudit règlement.

    ( 16 ) Arrêt du 4 mars 2020, Marine Harvest/Commission (C‑10/18 P, EU:C:2020:149, points 103 et 104). Altice soutient que les obligations prévues à l’article 4, paragraphe 1, et à l’article 7, paragraphe 1, du règlement no 139/2004 ont pour objectif d’assurer le contrôle effectif des concentrations. Comme le souligne le Conseil, il est plus précis de décrire cet objectif comme étant l’objectif global du règlement no 139/2004. L’approche d’Altice ne fournit aucune aide dans l’examen détaillé du point de savoir si les obligations prévues à l’article 4, paragraphe 1, et à l’article 7, paragraphe 1, du règlement no 139/2004 poursuivent des objectifs autonomes.

    ( 17 ) Arrêt du 4 mars 2020, Marine Harvest/Commission (C‑10/18 P, EU:C:2020:149, points 101, 102 et 109).

    ( 18 ) Voir considérants 21 et 26 du règlement no 4064/89. Voir, également, arrêts du 31 mai 2018, Ernst & Young (C‑633/16, ci-après l’« arrêt Ernst & Young , EU:C:2018:371, points 41 et 42, et jurisprudence citée), et du 4 mars 2020, Marine Harvest/Commission (C‑10/18 P, EU:C:2020:149, point 109).

    ( 19 ) Point 51 de l’arrêt attaqué.

    ( 20 ) Points 51 à 67 de l’arrêt attaqué, où le Tribunal a examiné l’exception d’illégalité.

    ( 21 ) À mon sens, Altice ne conteste pas les points 326 à 330 de l’arrêt attaqué, dans lesquels le Tribunal examine l’application du principe de droit allemand de « prise en compte » (Anrechnungsprinzip).

    ( 22 ) La Cour a jugé que le principe ne bis in idem ne s’applique pas lorsque les sanctions pour la violation de l’article 4, paragraphe 1, et de l’article 7, paragraphe 1, du règlement no 139/2004 ont été infligées par la même autorité dans une seule et même décision, comme c’est le cas ici (arrêt du 4 mars 2020, Marine Harvest/Commission, C‑10/18 P, EU:C:2020:149, point 78). Lorsqu’il lui a été demandé de présenter des observations sur cet arrêt, Altice a informé le Tribunal qu’elle ne maintenait pas le moyen tiré du principe ne bis in idem.

    ( 23 ) Voir, dans le même ordre d’idées, le Livre Vert de la Commission sur le rapprochement, la reconnaissance mutuelle et l’exécution des sanctions pénales dans l’Union européenne [COM(2004) 334 final], section 3.1.1.7.

    ( 24 ) Points 69 à 89, 96, 132 et 144 de l’arrêt attaqué.

    ( 25 ) Point 87 de l’arrêt attaqué.

    ( 26 ) JO 2005, C 56, p. 24.

    ( 27 ) Points 102 à 105, 117, 120, 121, 130 et 131 de l’arrêt attaqué.

    ( 28 ) Arrêt du 18 juin 2020, Commission/RQ (C‑831/18 P, EU:C:2020:481, points 52 et 53, et jurisprudence citée). Le fait que la Commission aurait pu parvenir à la même conclusion en ce qui concerne l’infraction au règlement no 139/2004 sans se fonder sur la capacité d’Altice d’exercer une influence déterminante constitue une question distincte.

    ( 29 ) Arrêt Ernst & Young, points 43 et 44.

    ( 30 ) Arrêt Ernst & Young, points 45 à 47 et 52.

    ( 31 ) JO 2008, C 95, p. 1 (ci-après la « communication juridictionnelle »), paragraphes 18 à 21 et 61.

    ( 32 ) Points 77 et 84, dernière phrase, de l’arrêt attaqué.

    ( 33 ) Point 87 de l’arrêt attaqué.

    ( 34 ) Italique ajouté par mes soins.

    ( 35 ) Arrêt du 11 mai 2017, Dyson/Commission (C‑44/16 P, EU:C:2017:357, points 30 et 31, et jurisprudence citée).

    ( 36 ) Arrêt Ernst & Young, point 52.

    ( 37 ) Voir, par exemple, arrêt du 23 novembre 2021, Conseil/Hamas (C‑833/19 P, EU:C:2021:950, point 50 et jurisprudence citée).

    ( 38 ) Cette considération s’applique également à la deuxième branche du sixième moyen.

    ( 39 ) Arrêt du 18 janvier 2017, Toshiba/Commission (C‑623/15 P, non publié, EU:C:2017:21, points 67 et 71, et jurisprudence citée).

    ( 40 ) Points 123 à 125 de l’arrêt attaqué.

    ( 41 ) Affaire COMP/M.3858 – Lehman Brothers/SCG/Starwood/Le Meridien du 20 juillet 2005, paragraphes 7 à 10. La seconde décision de concentration à laquelle la note en bas de page 22 de la communication juridictionnelle fait référence (affaire IV/M.126 – Accor/Wagon-Lits du 28 avril 1992) n’est pas suffisamment détaillée pour permettre d’en tirer des conclusions utiles dans le cadre du présent pourvoi.

    ( 42 ) Arrêt du 11 mai 2017, Dyson/Commission (C‑44/16 P, EU:C:2017:357, points 30 et 31, et jurisprudence citée).

    ( 43 ) JO 2003, L 1, p. 1.

    ( 44 ) Arrêt du 11 mai 2017, Dyson/Commission (C‑44/16 P, EU:C:2017:357, points 30 et 31, et jurisprudence citée).

    ( 45 ) Italique ajouté par mes soins. Voir, également, considérants 477 et 478 de la décision litigieuse.

    ( 46 ) Point 226 de l’arrêt attaqué.

    ( 47 ) Point 235 de l’arrêt attaqué.

    ( 48 ) Voir considérants 49 et 50 de la décision litigieuse.

    ( 49 ) Voir article 21, paragraphe 1, du règlement no 139/2004.

    ( 50 ) Voir, en ce sens, arrêts du 18 juin 2013, Schenker & Co. e.a. (C‑681/11, EU:C:2013:404, point 37 et jurisprudence citée), et du 10 juillet 2014, Telefónica et Telefónica de España/Commission (C‑295/12 P, EU:C:2014:2062, point 156 et jurisprudence citée).

    ( 51 ) Voir, en ce sens, arrêts du 6 décembre 2012, AstraZeneca/Commission (C‑457/10 P, EU:C:2012:770, point 164), et du 22 octobre 2015, AC‑Treuhand/Commission (C‑194/14 P, EU:C:2015:717, point 43).

    ( 52 ) Points 286 à 289 de l’arrêt attaqué et considérant 582 de la décision litigieuse.

    ( 53 ) Cette approche est conforme à celle adoptée par le Tribunal aux points 364 à 368 de l’arrêt attaqué.

    ( 54 ) Arrêt du 9 novembre 2017, TV2/Danmark/Commission (C‑649/15 P, EU:C:2017:835, point 34 et jurisprudence citée).

    ( 55 ) Arrêt du 10 mars 2016, HeidelbergCement/Commission (C‑247/14 P, EU:C:2016:149, point 16 et jurisprudence citée).

    ( 56 ) Voir, par analogie, arrêts du 10 juillet 2014, Telefónica et Telefónica de España/Commission (C‑295/12 P, EU:C:2014:2062, point 181 et jurisprudence citée), et du 22 octobre 2015, AC‑Treuhand/Commission (C‑194/14 P, EU:C:2015:717, points 68 et 69, et jurisprudence citée).

    ( 57 ) Voir, en ce sens, conclusions de l’avocat général Wahl dans l’affaire Ernst & Young (C‑633/16, EU:C:2018:23, points 44 et 45). La Commission a infligé des amendes symboliques dans l’affaire IV/M.920 – Samsung/AST (décision du 18 février 1998) et dans l’affaire IV/M.969 – A.P. Møller (décision du 10 février 1999). Dans l’affaire COMP/M.4994 – Electrabel/Compagnie Nationale du Rhône (décision du 10 juin 2009) et dans l’affaire COMP/M.6850 – Marine Harvest/Morpol (décision du 30 septembre 2013), la Commission a infligé des amendes s’élevant, au total, à 20 millions d’euros.

    ( 58 ) Ces deux circonstances diffèrent de la situation dans laquelle il est enfreint à l’article 101 TFUE.

    ( 59 ) Selon les informations figurant sur le site Internet d’Altice, l’entreprise cible avait, en tant qu’entreprise, une valeur de 7,4 milliards d’euros sur la base de sa trésorerie et sans facteur d’endettement. La contrepartie en espèces s’élevait à 5,6 milliards d’euros. Les frais de transaction s’élevaient à 122 millions d’euros.

    ( 60 ) Le régime consistant, sur le fondement de l’article 101 TFUE, à accorder une immunité ou une réduction d’amende aux lanceurs d’alerte et aux entreprises qui coopèrent avec la Commission, sur lequel la Commission s’appuie pour être informée d’une éventuelle violation dudit article, ne fonctionnerait pas dans le contexte des concentrations.

    ( 61 ) Pour une opinion contraire, voir, par exemple, Memeti, N., « Monetary Fines in EU Mergers : In Need for More Regulation », Market and Competition Law Review, volume 3, no 1, avril 2019, p. 209 à 233.

    ( 62 ) Arrêt du 4 mars 2020, Marine Harvest/Commission (C‑10/18 P, EU:C:2020:149, point 115).

    ( 63 ) Arrêt du 3 avril 2019, Powszechny Zakład Ubezpieczeń na Życie (C‑617/17, EU:C:2019:283, points 38 et 39).

    ( 64 ) Voir points 14 à 27 des présentes conclusions, en particulier le point 20, et arrêt du 4 mars 2020, Marine Harvest/Commission (C‑10/18 P, EU:C:2020:149, point 116).

    ( 65 ) Voir, par analogie, arrêt du 7 juin 2007, Britannia Alloys & Chemicals/Commission (C‑76/06 P, EU:C:2007:326, point 60 et jurisprudence citée).

    ( 66 ) Voir point 86 des présentes conclusions.

    ( 67 ) Points 350, 354, 355 et 363 de l’arrêt attaqué.

    ( 68 ) Voir point 47 des présentes conclusions.

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