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Document 62020CJ0563

Arrêt de la Cour (quatrième chambre) du 24 février 2022.
ORLEN KolTrans sp. z o.o. contre Prezes Urzędu Transportu Kolejowego.
Demande de décision préjudicielle, introduite par le Sąd Okręgowy w Warszawie.
Renvoi préjudiciel – Transports ferroviaires – Directive 2001/14/CE – Article 4 – Fixation des redevances d’infrastructure par décision du gestionnaire – Article 30, paragraphe 2 – Droit de recours administratif des entreprises ferroviaires – Article 30, paragraphe 6 – Contrôle juridictionnel des décisions de l’organisme de contrôle.
Affaire C-563/20.

Court reports – general – 'Information on unpublished decisions' section

ECLI identifier: ECLI:EU:C:2022:113

 ARRÊT DE LA COUR (quatrième chambre)

24 février 2022 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Transports ferroviaires – Directive 2001/14/CE – Article 4 – Fixation des redevances d’infrastructure par décision du gestionnaire – Article 30, paragraphe 2 – Droit de recours administratif des entreprises ferroviaires – Article 30, paragraphe 6 – Contrôle juridictionnel des décisions de l’organisme de contrôle »

Dans l’affaire C‑563/20,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Sąd Okręgowy w Warszawie (tribunal régional de Varsovie, Pologne), par décision du 6 octobre 2020, parvenue à la Cour le 28 octobre 2020, dans la procédure

ORLEN KolTrans sp. z o.o.

contre

Prezes Urzędu Transportu Kolejowego,

LA COUR (quatrième chambre),

composée de M. C. Lycourgos, président de chambre, MM. S. Rodin, J.‑C. Bonichot (rapporteur), Mmes L. S. Rossi et O. Spineanu‑Matei, juges,

avocat général : M. M. Campos Sánchez-Bordona,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

considérant les observations présentées :

pour ORLEN KolTrans sp. z o.o., par Me A. Salbert, radca prawny,

pour Prezes Urzędu Transportu Kolejowego, par Me M. Trela, radca prawny,

pour le gouvernement polonais, par M. B. Majczyna, en qualité d’agent,

pour la Commission européenne, par Mmes B. Sasinowska et C. Vrignon ainsi que par M. S. L. Kalėda, en qualité d’agents,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 30, paragraphes 2, 5 et 6 de la directive 2001/14/CE du Parlement européen et du Conseil, du 26 février 2001, concernant la répartition des capacités d’infrastructure ferroviaire et la tarification de l’infrastructure ferroviaire (JO 2001, L 75, p. 29), telle que modifiée par la directive 2007/58/CE du Parlement européen et du Conseil, du 23 octobre 2007 (JO 2007, L 315, p. 44) (ci-après la « directive 2001/14 »).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant ORLEN KolTrans sp. z o.o., entreprise ferroviaire dont le siège est situé à Płock (Pologne), au Prezes Urzędu Transportu Kolejowego (président de l’Office des transports ferroviaires, ci-après le « président de l’OTF ») au sujet de la détermination du niveau des redevances pour l’utilisation de l’infrastructure ferroviaire détenue par PKP Polskie Linie Kolejowe S.A. en Pologne (ci-après « PKP PLK »).

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

3

Les considérants 5, 11, 12, 16 et 20 de la directive 2001/14 énoncent :

« (5)

Afin d’assurer la transparence et un accès non discriminatoire aux infrastructures ferroviaires pour toutes les entreprises ferroviaires, toutes les informations requises pour exercer les droits d’accès sont à publier dans un document de référence du réseau.

[...]

(11)

Il y a lieu que les systèmes de tarification et de répartition des capacités assurent à toutes les entreprises un accès égal et non discriminatoire et s’efforcent, dans la mesure du possible, de répondre aux besoins de tous les utilisateurs et de tous les types de trafic et ce, de manière équitable et non discriminatoire.

(12)

Dans le cadre défini par les États membres, il est opportun que les systèmes de tarification et de répartition des capacités incitent les gestionnaires d’infrastructure ferroviaire à optimiser l’utilisation de leur infrastructure.

[...]

(16)

Il y a lieu que les systèmes de tarification et de répartition des capacités permettent une concurrence équitable dans la fourniture de services ferroviaires.

[...]

(20)

Il est souhaitable de laisser une certaine marge de manœuvre aux gestionnaire[s] d’infrastructure afin de permettre une utilisation plus efficace du réseau de l’infrastructure. »

4

Aux termes de l’article 1er, paragraphe 1, de cette directive :

« La présente directive a pour objet les principes et les procédures à suivre pour la fixation et la perception de redevances d’utilisation de l’infrastructure ferroviaire et pour la répartition des capacités de cette infrastructure.

Les États membres veillent à ce que les systèmes de tarification et de répartition des capacités de l’infrastructure ferroviaire respectent les principes énoncés dans la présente directive et permettent ainsi au gestionnaire de l’infrastructure de commercialiser les capacités de l’infrastructure disponibles et d’en faire une utilisation effective et optimale. »

5

L’article 2 de ladite directive contient des définitions. Il est ainsi libellé :

« Aux fins de la présente directive, on entend par :

[...]

b)

“candidat”, toute entreprise ferroviaire agréée [...] ayant des raisons commerciales ou de service public d’acquérir des capacités de l’infrastructure pour l’exploitation d’un service ferroviaire sur leurs territoires respectifs [...] ;

[...]

h)

“gestionnaire de l’infrastructure”, tout organisme ou toute entreprise chargés notamment de l’établissement et de l’entretien de l’infrastructure ferroviaire. Ceci peut également inclure la gestion des systèmes de contrôle et de sécurité de l’infrastructure. Les fonctions de gestionnaire de l’infrastructure sur tout ou partie d’un réseau peuvent être attribuées à plusieurs organismes ou entreprises ;

[...]

k)

“entreprise ferroviaire”, toute entreprise à statut privé ou public, qui a obtenu une licence conformément à la législation communautaire applicable, dont l’activité principale est la fourniture de prestations de transport de marchandises et/ou de voyageurs par chemin de fer, la traction devant obligatoirement être assurée par cette entreprise ; ce terme recouvre aussi les entreprises qui assurent uniquement la traction ;

[...] »

6

Figurant au chapitre II de la même directive, relatif aux redevances d’infrastructure, l’article 4 de celle-ci, intitulé « Établissement et recouvrement des redevances », prévoit :

« 1.   Les États membres mettent en place un cadre pour la tarification, mais en respectant l’indépendance de gestion prévue à l’article 4 de la directive 91/440/CEE.

Sous réserve de ladite condition d’indépendance de gestion, les États membres établissent également des règles de tarification spécifiques ou délèguent ce pouvoir au gestionnaire de l’infrastructure. La détermination de la redevance pour l’utilisation de l’infrastructure et son recouvrement incombent au gestionnaire de l’infrastructure.

[...]

4.   Sauf lorsque des dispositions particulières sont prises en application de l’article 8, paragraphe 2, le gestionnaire de l’infrastructure veille à ce que le système de tarification en vigueur soit fondé sur les mêmes principes sur l’ensemble de son réseau.

5.   Le gestionnaire de l’infrastructure s’assure que le système de tarification est appliqué de telle manière que les différentes entreprises ferroviaires effectuant des prestations de services de nature équivalente sur une partie similaire du marché soient soumises à des redevances équivalentes et non discriminatoires et que les redevances effectivement appliquées sont conformes aux règles définies dans le document de référence du réseau.

[...] »

7

L’article 5, paragraphe 1, de la directive 2001/14 dispose :

« Les entreprises ferroviaires peuvent prétendre, sur une base non discriminatoire, à l’ensemble des prestations minimales ainsi qu’à l’accès par le réseau aux infrastructures de services décrits à l’annexe II. Les services de l’annexe II, point 2, sont fournis de manière non discriminatoire et les demandes des entreprises ferroviaires ne peuvent être rejetées que s’il existe d’autres options viables aux conditions du marché. Si les services ne sont pas fournis par un gestionnaire d’infrastructure unique, le fournisseur de l’“infrastructure principale” fait tout effort raisonnable pour faciliter la fourniture de ces services. »

8

L’article 6 de cette directive, relatif au coût de l’infrastructure et à la comptabilité, énonce :

1.   Les États membres définissent les conditions appropriées, comprenant, le cas échéant, des paiements ex ante, pour que les comptes du gestionnaire de l’infrastructure, dans des conditions normales d’activité et par rapport à une période raisonnable, présentent au moins un équilibre entre, d’une part, les recettes tirées des redevances d’utilisation de l’infrastructure, les excédents dégagés d’autres activités commerciales et le financement par l’État et, d’autre part, les dépenses d’infrastructure.

[...]

2.   Le gestionnaire de l’infrastructure est [...] encouragé par des mesures d’incitation à réduire les coûts de fourniture de l’infrastructure et le niveau des redevances d’accès.

3.   Les États membres veillent à ce que la disposition prévue au paragraphe 2 soit mise en œuvre soit dans le cadre d’un contrat conclu, pour une durée minimale de trois ans, entre l’autorité compétente et le gestionnaire de l’infrastructure et prévoyant le financement par l’État, soit par l’établissement de mesures réglementaires appropriées, prévoyant les pouvoirs nécessaires.

[...]

5.   Une méthode d’imputation des coûts est élaborée. Les États membres peuvent la soumettre à approbation préalable. Il convient de mettre à jour cette méthode de temps à autre en fonction des meilleures pratiques internationales. »

9

Aux termes de l’article 7 de ladite directive, relatif aux principes de tarification :

« 1.   Les redevances d’utilisation de l’infrastructure sont versées au gestionnaire de l’infrastructure, qui les affecte au financement de ses activités.

[...]

3.   Sans préjudice des dispositions des paragraphes 4 ou 5 ou de l’article 8, les redevances perçues pour l’ensemble des prestations minimales et l’accès par le réseau aux infrastructures de services, sont égales au coût directement imputable à l’exploitation du service ferroviaire.

[...]

7.   Le présent article ne couvre pas la fourniture des services visés à l’annexe II, point 2. Sans préjudice de ce qui précède, il est tenu compte, lors de la fixation des prix des services visés à l’annexe II, point 2, de la situation de la concurrence dans les chemins de fer.

[...] »

10

Les articles 8 à 12 de la même directive prévoient, respectivement, des exceptions aux principes de tarification, la possibilité d’accorder des réductions sur les redevances d’infrastructure, un système de compensation de certains coûts, un système d’amélioration des performances et la possibilité de percevoir des droits de réservation de capacités.

11

Au chapitre III de la directive 2001/14, relatif à la répartition des capacités de l’infrastructure, figure l’article 17, dont le paragraphe 1 est ainsi libellé :

« Sans préjudice des dispositions des articles 81, 82 et 86 du traité, un accord-cadre peut être conclu avec un candidat. Cet accord-cadre précise les caractéristiques des capacités d’infrastructure ferroviaire requises par un candidat [...] L’accord-cadre ne définit pas un sillon de façon détaillée mais est établi de manière à répondre aux besoins commerciaux légitimes du candidat. Un État membre peut soumettre un tel accord à l’approbation préalable de l’organisme de contrôle mentionné à l’article 30 de la présente directive. »

12

L’article 26 de cette directive, intitulé « Plan de renforcement des capacités », dispose :

« 1.   Dans un délai de six mois suivant l’achèvement de l’analyse des capacités, le gestionnaire de l’infrastructure présente un plan de renforcement des capacités.

2.   Le plan de renforcement des capacités est établi après consultation des utilisateurs de l’infrastructure saturée concernée.

Il indique :

[...]

d)

les solutions envisageables concernant le renforcement des capacités et leur coût, notamment pour ce qui est des modifications probables des redevances d’accès.

Sur la base d’une analyse coût-avantage des éventuelles mesures envisagées, il définit également les actions à mener pour renforcer les capacités de l’infrastructure et comporte un calendrier pour leur mise en œuvre.

Ce plan peut être soumis à l’approbation préalable de l’État membre.

[...] »

13

L’article 30 de la directive 2001/14, intitulé « Organisme de contrôle », prévoit :

« 1.   Sans préjudice des dispositions de l’article 21, paragraphe 6, les États membres instituent un organisme de contrôle. Cet organisme, qui peut être le ministère chargé des questions de transports ou tout autre organisme, est indépendant des gestionnaires d’infrastructure, des organismes de tarification, des organismes de répartition et des candidats, sur le plan organisationnel, juridique, décisionnel et pour ce qui est des décisions en matière financière. Il est en outre fonctionnellement indépendant de toute autorité compétente intervenant dans l’attribution d’un contrat de service public. Cet organisme fonctionne conformément aux principes énoncés au présent article, les fonctions de recours et de contrôle pouvant être attribuées à des organismes séparés.

2.   Un candidat peut saisir cet organisme dès lors qu’il estime être victime d’un traitement inéquitable, d’une discrimination ou de tout autre préjudice, notamment pour introduire un recours contre les décisions prises par le gestionnaire de l’infrastructure ou, le cas échéant, par l’entreprise ferroviaire en ce qui concerne :

[...]

d)

le système de tarification ;

e)

le niveau ou la structure des redevances d’utilisation de l’infrastructure qu’il est ou pourrait être tenu d’acquitter ;

[...]

3.   L’organisme de contrôle veille à ce que les redevances fixées par le gestionnaire de l’infrastructure soient conformes aux dispositions du chapitre II et non discriminatoires. Les négociations entre les candidats et un gestionnaire de l’infrastructure concernant le niveau des redevances d’utilisation de l’infrastructure ne sont autorisées que si elles ont lieu sous l’égide de l’organisme de contrôle. L’organisme de contrôle intervient immédiatement si les négociations sont susceptibles de contrevenir aux dispositions de la présente directive.

4.   L’organisme de contrôle est habilité à demander les informations utiles au gestionnaire de l’infrastructure, aux candidats et à toute autre partie intéressée dans l’État membre concerné ; ces informations sont fournies sans tarder.

5.   L’organisme de contrôle est obligé de se prononcer sur toute plainte et adopte les mesures nécessaires afin de remédier à la situation dans un délai maximum de deux mois suivant la réception de toutes les informations.

Nonobstant le paragraphe 6, les décisions prises par l’organisme de contrôle sont contraignantes pour toutes les parties concernées.

Au cas où un recours est introduit contre un refus d’octroyer des capacités de l’infrastructure ou contre les modalités d’une proposition de capacités, l’organisme de contrôle soit confirme qu’il n’y a pas lieu de modifier la décision prise par le gestionnaire de l’infrastructure, soit exige la modification de la décision incriminée conformément aux lignes directrices fixées par l’organisme de contrôle.

6.   Les États membres adoptent les mesures nécessaires pour que les décisions prises par l’organisme de contrôle soient soumises à un contrôle juridictionnel. »

14

L’annexe II de cette directive, intitulée « Services à fournir aux entreprises ferroviaires », énonce, à ses points 1 et 2 :

« 1. L’ensemble des prestations minimales comprend :

a) le traitement des demandes de capacités de l’infrastructure ;

[...]

2. L’accès par le réseau aux infrastructures de services et les services fournis portent sur :

a)

l’utilisation du système d’alimentation électrique pour le courant de traction, le cas échéant ;

[...] »

Le droit polonais

Le code de procédure administrative

15

L’ustawa kodeks postępowania administracyjnego (loi instaurant un code de procédure administrative), du 14 juin 1960 (Dz. U. de 2013, position 267) (ci-après le « code de procédure administrative »), dispose, à son article 28 :

« Est partie tout personne dont l’intérêt à agir ou une obligation fait l’objet d’une procédure ou qui, en raison de son intérêt à agir ou de son obligation, demande à une autorité d’intervenir. »

16

Aux termes de l’article 61 de cette loi :

« La procédure administrative est engagée à la demande d’une partie ou d’office. »

17

L’article 61a, paragraphe 1, de ladite loi est ainsi libellé :

« Lorsque la demande visée à l’article 61 est présentée par une personne qui n’est pas une partie ou lorsque, pour d’autres raisons légitimes, une procédure ne peut être engagée, l’autorité publique administrative prend une décision de refus d’engager la procédure. [...] »

18

L’article 157, paragraphe 2, de la même loi prévoit :

« La procédure d’annulation de la décision est engagée à la demande d’une partie ou d’office. »

La loi sur le transport ferroviaire

19

L’ustawa o transporcie kolejowym (loi sur le transport ferroviaire), du 28 mars 2003 (Dz. U. de 2013, position 1594), dispose, à son article 13, paragraphes 1 et 6 :

« 1.   Il appartient au président de [l’Office des transports ferroviaires (OTF)], [...] dans le domaine de la réglementation des transports ferroviaires :

1)

d’approuver et de coordonner les redevances d’utilisation des sillons de l’infrastructure ferroviaire octroyés, en vérifiant leur conformité aux règles de fixation de celles-ci ;

[...]

4)

de contrôler si le gestionnaire a correctement fixé les redevances de base d’utilisation de l’infrastructure ferroviaire et les redevances supplémentaires de prestations de services supplémentaires ;

5)

d’examiner les recours des transporteurs ferroviaires relatifs :

[...]

b)

à l’octroi des sillons et aux redevances d’utilisation de l’infrastructure ferroviaire ;

[...]

6.   S’il est constaté qu’il y a eu une violation des dispositions, décisions ou ordonnances en matière ferroviaire, le président de l’OTF rend une décision précisant l’étendue de la violation et le délai de rectification de l’irrégularité. »

20

Aux termes de l’article 29, paragraphes 3 et 4, de cette loi :

« 3.   Le transporteur ferroviaire acquiert le droit d’utiliser les sillons attribués et fixés dans l’horaire de service après la conclusion d’un accord à cet effet avec le gestionnaire.

4.   Pour la mise à disposition de l’infrastructure ferroviaire, le gestionnaire de celle-ci perçoit les redevances visées à l’article 33. »

21

Aux termes de l’article 33 de ladite loi :

« 1.   Le gestionnaire fixe le montant des redevances dues pour l’utilisation de l’infrastructure par les transporteurs ferroviaires.

[...]

6.   Le gestionnaire est tenu de rendre publics [...] le montant et les types de taux de la redevance de base ainsi que de redevances supplémentaires.

7.   Les taux unitaires de la redevance de base et des redevances supplémentaires, hors les redevances d’utilisation du courant de traction, sont transmis accompagnés des calculs de leur montant, au président de l’OTF.

8.   Le président de l’OTF approuve les taux prévus au paragraphe 7, dans le délai de 30 jours à compter de leur réception, ou refuse de les approuver s’il constate des infractions aux règles visées aux paragraphes 2 à 6, à l’article 34 ou aux dispositions adoptées en vertu de l’article 35. »

Le règlement relatif aux conditions d’accès et de l’utilisation de l’infrastructure ferroviaire

22

Le rozporządzenie Ministra Infrastruktury w sprawie warunków dostępu i korzystania z infrastruktury kolejowej (règlement du ministre de l’Infrastructure relatif aux conditions d’accès et de l’utilisation de l’infrastructure ferroviaire), du 27 février 2009 (Dz. U. de 2009, no 35, position 274), prévoit, à son article 16 :

« 1.   Le gestionnaire, au plus tard 9 mois avant la date d’entrée en vigueur de l’horaire de service des trains, soumet au président de l’OTF un projet pour approbation :

1)

des taux unitaires de la redevance de base ;

2)

des taux des redevances pour les services mentionnés dans la partie II de l’annexe de la loi.

[...]

3.   À la demande du transporteur, le gestionnaire doit permettre à celui-ci de prendre connaissance du projet visé au paragraphe 1, ainsi que de la liste visée au paragraphe 2.

[...] »

23

L’article 17, paragraphe 1, de ce règlement est ainsi libellé :

« Le président de l’OTF ne refuse d’approuver le projet soumis, visé à l’article 16, paragraphe 1, que s’il a été élaboré en violation des dispositions visées à l’article 33, paragraphe 8, de la loi [sur le transport ferroviaire]. »

Le litige au principal et les questions préjudicielles

24

ORLEN KolTrans est une entreprise dont le siège se situe en Pologne et qui effectue, notamment, des transports de marchandises par voie ferrée. Elle utilise, à cette fin, l’infrastructure ferroviaire qui appartient au gestionnaire de celle-ci, à savoir PKP PLK.

25

PKP PLK a transmis à l’organisme de contrôle polonais, à savoir l’OTF, institué en vertu de l’article 30 de la directive 2001/14, un projet de modification des taux unitaires de la redevance de base pour l’accès minimal à son infrastructure. Ces taux constituent l’une des variables qui permettent au gestionnaire de l’infrastructure de déterminer le montant des redevances dues par une entreprise ferroviaire pour l’utilisation de l’infrastructure ferroviaire. Par décision du 29 septembre 2010 (ci-après la « décision d’approbation de 2010 »), le président de l’OTF a approuvé ce projet.

26

Se fondant sur cette décision, PKP PLK a appliqué les nouveaux taux unitaires afin de déterminer le montant des redevances d’infrastructure devant être payées par ORLEN KolTrans, conformément au contrat conclu par ces deux entreprises.

27

Dans son arrêt du 30 mai 2013, Commission/Pologne (C‑512/10, EU:C:2013:338), la Cour a, notamment, jugé que, en permettant que soient inclus dans le calcul des redevances perçues pour l’ensemble des prestations minimales et pour l’accès par le réseau aux infrastructures des coûts qui ne peuvent être considérés comme étant directement imputables à l’exploitation du service ferroviaire, la République de Pologne avait manqué aux obligations qui lui incombaient en vertu, respectivement, de l’article 6, paragraphe 2, et de l’article 7, paragraphe 3, de la directive 2001/14.

28

Après le prononcé de cet arrêt, ORLEN KolTrans a réexaminé les redevances qu’elle versait à PKP PLK. Estimant que leur mode de calcul était contraire à la directive 2001/14, elle a, par lettre du 7 avril 2014, demandé au président de l’OTF d’engager une procédure administrative, au sens du code de procédure administrative, aux fins de l’annulation de la décision d’approbation de 2010.

29

Par son ordonnance du 11 juin 2014, le président de l’OTF a rejeté cette demande au motif que, en application du code de procédure administrative, ORLEN KolTrans n’avait pas la qualité de « partie » dans la procédure d’approbation des taux unitaires de la redevance de base et, par conséquent, ne saurait demander l’annulation de la décision d’approbation de 2010, cela même dans le cas où cette décision serait contraire au droit de l’Union.

30

ORLEN KolTrans a formé un recours contre ladite ordonnance du 11 juin 2014 devant la juridiction de renvoi, à savoir le Sąd Okręgowy w Warszawie (tribunal régional de Varsovie, Pologne). Dans le cadre de ce recours, elle cherche à obtenir un contrôle de la validité de la décision d’approbation de 2010, qui, eu égard à l’arrêt du 30 mai 2013, Commission/Pologne (C‑512/10, EU:C:2013:338), aurait été adoptée en violation de la directive 2001/14.

31

Cette entreprise a, en même temps, introduit une demande d’indemnisation contre l’État polonais au motif que la transposition incorrecte de la directive 2001/14 a entraîné un préjudice résultant du paiement de redevances d’infrastructure excessives. Des demandes similaires ont également été introduites par d’autres entreprises ferroviaires. Le Sąd Najwyższy (Cour suprême, Pologne), saisi d’une de ces affaires a décidé de surseoir à statuer et de soumettre, le 3 mars 2020, des questions préjudicielles à la Cour, notamment afin de déterminer si une entreprise ferroviaire peut, sans contrôle de la décision de l’organisme de contrôle par le tribunal compétent, poursuivre en dommages et intérêts un État membre pour mise en œuvre incorrecte de la directive 2001/14. La Cour a répondu à ces questions par son arrêt du 8 juillet 2021, Koleje Mazowieckie (C‑120/20, EU:C:2021:553).

32

La juridiction de renvoi rappelle, en outre, que, par son arrêt du 9 novembre 2017, CTL Logistics (C‑489/15, EU:C:2017:834), la Cour a jugé que la directive 2001/14 s’oppose au contrôle du caractère équitable des redevances pour l’utilisation de l’infrastructure ferroviaire, au cas par cas, par les juridictions ordinaires et à la possibilité de modifier le montant de ces redevances, indépendamment de la surveillance exercée par l’organisme de contrôle prévu à l’article 30 de cette directive.

33

Elle souligne, dans ce contexte, que, en vertu du droit polonais, il lui incombe de connaître des recours contre les décisions de l’organisme de contrôle.

34

En ce qui concerne la mise en œuvre de la directive 2001/14, la juridiction de renvoi relève que, en Pologne, le gestionnaire de l’infrastructure ferroviaire soumet les taux unitaires de la redevance de base pour approbation à l’organisme de contrôle. Les entreprises ferroviaires ne sont pas parties à cette procédure et ne peuvent pas contester les décisions d’approbation adoptées par le président de l’OTF.

35

Certes, l’article 13, paragraphe 1, point 5, sous b), de la loi sur le transport ferroviaire permet d’introduire une réclamation auprès de l’autorité de contrôle en ce qui concerne les redevances d’infrastructure exigées par le gestionnaire de l’infrastructure. En outre, en vertu du paragraphe 6 de cet article, en cas de violation des dispositions, des décisions ou des ordonnances en matière ferroviaire, le président de l’OTF rend une décision précisant l’étendue de la violation et le délai de rectification. Toutefois, l’application de ces dispositions du droit polonais ne saurait avoir pour effet de revenir sur les taux unitaires de la redevance de base que l’organisme de contrôle a approuvés.

36

Par ailleurs, la juridiction de renvoi affirme que, en vertu du code de procédure administrative, seules les personnes ayant la qualité de partie peuvent demander l’annulation d’une décision. Dès lors que les entreprises ferroviaires ne sont pas parties à la procédure d’approbation des taux unitaires de la redevance de base, elles ne disposent pas, selon elle, d’une voie de recours efficace pour contester le niveau de ces taux.

37

Eu égard à ces considérations, la juridiction de renvoi cherche à savoir si l’article 30 de la directive 2001/14 confère aux entreprises ferroviaires le droit de contester les décisions d’approbation des taux unitaires de la redevance de base prises par le président de l’OTF. Elle estime qu’un tel droit pourrait être déduit, d’une part, du paragraphe 2, sous e), de cet article, dans l’hypothèse où cette disposition devrait être interprétée en ce sens qu’elle exige l’admission des entreprises ferroviaires en tant que parties à la procédure d’approbation des taux unitaires de la redevance de base. D’autre part, s’il s’avérait que la décision d’approbation était susceptible de violer les droits des entreprises ferroviaires, un droit de recours pourrait résulter des paragraphes 5 et 6 du même article.

38

C’est dans ces conditions que le Sąd Okręgowy w Warszawie (tribunal régional de Varsovie) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1)

L’article 30, paragraphe 2, sous e), de la directive [2001/14] doit-il être interprété en ce sens qu’il accorde à une entreprise ferroviaire, qui utilise ou entend utiliser l’infrastructure ferroviaire, le droit de participer à la procédure menée par l’organisme de contrôle visant à la détermination par le gestionnaire de l’infrastructure ferroviaire du niveau des redevances d’accès à celle-ci ?

2)

En cas de réponse négative à la première question, l’article 30, paragraphes 5 et 6, de la directive 2001/14/CE doit-il être interprété en ce sens qu’il accorde à une entreprise ferroviaire, qui utilise ou entend utiliser l’infrastructure ferroviaire, le droit de contester la décision de l’organisme de contrôle approuvant le niveau des redevances d’accès à l’infrastructure ferroviaire établies par le gestionnaire de cette infrastructure ? »

Sur les questions préjudicielles

Observations préliminaires

39

Il convient de relever qu’il ressort de la décision de renvoi que la loi sur le transport ferroviaire prévoit, notamment, que l’une des variables qui permettent au gestionnaire de l’infrastructure de déterminer le montant des redevances d’infrastructure dues par une entreprise ferroviaire, à savoir les taux unitaires de la redevance de base pour l’accès minimal à l’infrastructure ferroviaire, doit être approuvée par le président de l’OTF.

40

Il ressort également de cette décision que, selon le droit polonais, le droit de demander l’annulation d’une décision d’approbation de ces taux est réservé aux seules personnes qui, en vertu du code de procédure administrative, se voient reconnaître le statut de partie dans la procédure d’approbation.

41

Il en résulte que les entreprises ferroviaires qui, telle la requérante au principal, utilisent ou entendent utiliser les infrastructures ferroviaires ne peuvent pas contester les taux unitaires de la redevance de base fixés par l’organisme de contrôle dès lors qu’elles n’ont pas la qualité de « partie », exigée par le droit polonais pour pouvoir former à cette fin un recours juridictionnel. La juridiction de renvoi cherche donc à savoir si l’article 30 de la directive 2001/14 doit être interprété en ce sens que la qualité de « partie » doit leur être reconnue ou si la possibilité de former un tel recours doit leur être reconnue sans même leur reconnaître cette qualité.

Sur la première question

42

Par sa première question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 30, paragraphe 2, sous e), de la directive 2001/14 doit être interprété en ce sens qu’une entreprise ferroviaire, qui utilise ou entend utiliser l’infrastructure ferroviaire, doit pouvoir participer à une procédure menée par l’organisme de contrôle aux fins de l’adoption d’une décision approuvant ou rejetant un projet de taux unitaires de la redevance de base pour l’accès minimal à l’infrastructure soumis par un gestionnaire de l’infrastructure, ce qui lui conférerait la qualité de partie à une telle procédure.

43

À cet égard, il y a lieu de relever que ni l’article 30 de la directive 2001/14 ni aucune autre disposition de celle-ci ne prévoient une procédure d’approbation des redevances d’infrastructure ou des variables qui permettent de déterminer ces dernières.

44

En particulier, aucune disposition du chapitre II de la directive 2001/14, relatif aux redevances d’infrastructures, n’établit une telle procédure d’approbation.

45

Certes, l’article 6, paragraphe 5, de cette directive prévoit que les États membres peuvent soumettre la « méthode d’imputation des coûts » à une approbation préalable. Toutefois, ainsi qu’il ressort des autres paragraphes de cet article, la méthode en question est établie à des fins de comptabilité dans le cadre du soutien financier que les États membres peuvent accorder aux gestionnaires de l’infrastructure. Elle ne concerne pas les redevances d’infrastructure.

46

De même, la procédure d’approbation pouvant être instaurée au titre de l’article 17 de la directive 2001/14, qui figure au chapitre III de celle-ci relatif à la répartition des capacités de l’infrastructure, concerne non pas la détermination des redevances d’infrastructure, mais les accords-cadres conclus par les gestionnaires de l’infrastructure afin de préciser, pour un candidat, les caractéristiques des capacités d’infrastructure ferroviaire requises.

47

Il en va également ainsi de l’approbation préalable des plans de renforcement des capacités, évoquée à l’article 26 de cette directive, qui figure au même chapitre III. Si ce plan contient des prévisions en ce qui concerne le coût du renforcement des capacités d’infrastructure et son impact probable sur les redevances d’infrastructure, il n’en saurait être déduit qu’il prédétermine la fixation de ces redevances.

48

En ce qui concerne l’article 30 de la directive 2001/14, celui-ci, d’une part, régit les compétences dont doit être investi l’organisme de contrôle, institué en vertu du paragraphe 1 de cet article, et, d’autre part, prévoit, ainsi qu’il ressort du paragraphe 6 dudit article, que les décisions adoptées par cet organisme doivent pouvoir faire l’objet d’un contrôle juridictionnel.

49

Quant aux compétences de l’organisme de contrôle, conformément à l’article 30, paragraphe 2, de la directive 2001/14, les décisions des gestionnaires de l’infrastructure, notamment celles relatives au système de tarification ou au niveau et à la structure des redevances d’infrastructure, peuvent être contestées devant cet organisme. Le paragraphe 5 de cet article précise que l’organisme de contrôle est tenu de se prononcer sur toute plainte dont il est saisi. En outre, il ressort du paragraphe 3 dudit article que cet organisme est chargé de veiller à la conformité avec les dispositions de cette directive des redevances fixées par les gestionnaires de l’infrastructure et de surveiller les négociations entre ces gestionnaires et les entreprises ferroviaires. Afin d’accomplir ces missions, l’organisme de contrôle est habilité, en vertu de l’article 30, paragraphe 4, de la directive 2001/14, à demander des informations, notamment aux gestionnaires de l’infrastructure.

50

Il ressort de ce qui précède que l’article 30 de la directive 2001/14 ne prévoit pas de procédure d’approbation des redevances d’infrastructure. En particulier, les paragraphes 2 à 5 de cet article n’exigent pas que les gestionnaires d’infrastructure soumettent les redevances d’infrastructure qu’ils comptent percevoir ou des variables qui permettent de les calculer à l’organisme de contrôle pour approbation. Au contraire, ces dispositions se bornent à prévoir un contrôle des redevances déjà fixées, ce qui ressort, notamment, du paragraphe 2 et du paragraphe 3, première phrase, dudit article. Ce contrôle incombe à l’organisme de contrôle qui statue soit dans le cadre d’un recours, soit d’office.

51

Par ailleurs, le système établi par la directive 2001/14 cherche à assurer l’indépendance de gestion du gestionnaire de l’infrastructure. Ce dernier doit faire usage du système de tarification comme d’un instrument de gestion. Il ressort ainsi du considérant 12 de cette directive que les systèmes de tarification et de répartition des capacités doivent inciter les gestionnaires d’infrastructure ferroviaire à optimiser l’utilisation de leur infrastructure dans le cadre défini par les États membres. Afin de rendre possible une telle optimisation, lesdits gestionnaires doivent disposer d’une certaine marge de manœuvre, ainsi que le mentionne le considérant 20 de ladite directive (arrêt du 28 février 2013, Commission/Allemagne, C‑556/10, EU:C:2013:116, point 82).

52

À cet égard, l’article 4, paragraphe 1, de la directive 2001/14 établit une répartition des compétences entre les États membres et le gestionnaire de l’infrastructure en ce qui concerne les systèmes de tarification. En effet, il revient aux États membres d’établir un cadre pour la tarification tandis que la détermination de la redevance et son recouvrement incombent au gestionnaire de l’infrastructure, qui est tenu de veiller à l’application de principes uniformes, comme le prévoit notamment l’article 4, paragraphes 4 et 5, de cette directive (arrêts du 9 novembre 2017, CTL Logistics, C‑489/15, EU:C:2017:834, point 49, et du 28 février 2013, Commission/Allemagne, C‑556/10, EU:C:2013:116, point 84).

53

Il appartient donc aux gestionnaires de l’infrastructure, qui sont tenus de déterminer et de percevoir les redevances de manière non discriminatoire, non seulement d’appliquer les conditions d’utilisation du réseau ferré de manière égale à tous les utilisateurs du réseau, mais également de veiller à ce que les redevances effectivement perçues correspondent à ces conditions (arrêts du 9 novembre 2017, CTL Logistics, C‑489/15, EU:C:2017:834, point 50, et du 8 juillet 2021, Koleje Mazowieckie, C‑120/20, EU:C:2021:553, point 43).

54

Dès lors que, ainsi qu’il ressort des considérations qui précèdent, la directive 2001/14 ne prévoit pas de procédure d’approbation des redevances d’infrastructure ou des variables qui permettent de déterminer ces dernières, elle ne saurait non plus déterminer si l’une ou l’autre personne morale ou physique dispose du statut de « partie » dans une telle procédure.

55

Par ailleurs, la notion de « partie », utilisée par le code de procédure administrative, est étrangère à cette directive. En particulier, le recours contre les décisions adoptées par les gestionnaires de l’infrastructure, prévu à son article 30, paragraphe 2, est ouvert aux « candidats ». Cette dernière notion, définie à l’article 2, sous b), de la directive 2001/14, englobe, notamment, toute entreprise ferroviaire agréée.

56

Il importe, par ailleurs, de relever que, pour les besoins de la réponse à la première question, il n’y a pas lieu d’examiner si l’article 30 de la directive 2001/14, notamment ses paragraphes 2 et 3, s’oppose à une procédure d’approbation telle que celle prévue par le droit polonais. En particulier, il n’apparaît pas nécessaire de déterminer si, notamment au regard des objectifs poursuivis par cette directive ainsi que du principe d’effectivité, ces dispositions sont contraires à l’approbation, par le président de l’OTF, de l’une des variables qui permettent au gestionnaire de l’infrastructure de déterminer le montant des redevances d’infrastructure dues par une entreprise ferroviaire, à savoir les taux unitaires de la redevance de base pour l’accès minimal à l’infrastructure ferroviaire.

57

Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de répondre à la première question que l’article 30, paragraphe 2, sous e), de la directive 2001/14 doit être interprété en ce sens qu’il ne régit pas le droit d’une entreprise ferroviaire, qui utilise ou entend utiliser l’infrastructure ferroviaire, de participer à une éventuelle procédure menée par l’organisme de contrôle aux fins de l’adoption d’une décision approuvant ou rejetant un projet de taux unitaires de la redevance de base pour l’accès minimal à l’infrastructure soumis par un gestionnaire de l’infrastructure.

Sur la seconde question

58

Par sa seconde question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 30, paragraphes 5 et 6, de la directive 2001/14 doit être interprété en ce sens qu’une entreprise ferroviaire, qui utilise ou entend utiliser l’infrastructure ferroviaire, doit pouvoir contester, devant la juridiction compétente, la décision de l’organisme de contrôle approuvant les taux unitaires de la redevance de base pour l’accès minimal à l’infrastructure, établis par le gestionnaire de cette infrastructure.

59

Ainsi qu’il ressort des points 48 et 49 du présent arrêt, le paragraphe 5 de l’article 30 de la directive 2001/14, explicitement visé par la juridiction de renvoi, n’est pas pertinent pour répondre à la seconde question, dès lors qu’il ne concerne que les compétences de l’organisme de contrôle. Seul le paragraphe 6 de cet article porte sur le contrôle juridictionnel des décisions adoptées par cet organisme.

60

À cet égard, il y a lieu de relever que l’article 30, paragraphe 6, de la directive 2001/14 impose aux États membres de prévoir un recours juridictionnel contre les décisions de l’organisme de contrôle en général et ne détermine pas qui doit se voir reconnaître la qualité pour agir.

61

S’il appartient, en principe, au droit national de déterminer la qualité d’un justiciable pour agir en justice, le droit de l’Union exige néanmoins que la législation nationale ne porte pas atteinte au droit à une protection juridictionnelle effective, conformément à l’article 19, paragraphe 1, second alinéa, TUE (arrêt du 21 novembre 2019, Deutsche Lufthansa, C‑379/18, EU:C:2019:1000, point 60 et jurisprudence citée).

62

Ainsi, il incombe aux juridictions des États membres d’assurer la protection juridictionnelle des droits que les justiciables tirent du droit de l’Union, en l’occurrence de la directive 2001/14 (voir, en ce sens, arrêts du 13 mars 2007, Unibet, C‑432/05, EU:C:2007:163, point 38, et du 21 novembre 2019, Deutsche Lufthansa, C‑379/18, EU:C:2019:1000, point 59).

63

En l’absence de réglementation du droit de l’Union, il appartient aux États membres de désigner les juridictions compétentes et de régler les modalités procédurales des recours en justice destinés à assurer la sauvegarde des droits que les justiciables tirent du droit de l’Union (arrêts du 13 mars 2007, Unibet, C‑432/05, EU:C:2007:163, point 39, et du 14 septembre 2017, Petrea, C‑184/16, EU:C:2017:684, point 58).

64

Or, il importe de constater que la directive 2001/14 confère des droits aux entreprises ferroviaires.

65

En effet, parmi les objectifs poursuivis par la directive 2001/14 figure, notamment, celui consistant à assurer un accès non discriminatoire à l’infrastructure, ainsi qu’il est exposé, notamment, aux considérants 5 et 11 de cette directive. En outre, elle poursuit l’objectif de garantir une concurrence équitable. Son considérant 16 énonce, à cet effet, que les systèmes de tarification et de répartition des capacités devraient permettre une concurrence équitable dans la fourniture de services ferroviaires (voir, en ce sens, arrêt du 9 novembre 2017, CTL Logistics, C‑489/15, EU:C:2017:834, points 36 et 37).

66

Il en résulte que le gestionnaire de l’infrastructure doit s’assurer, en vertu de l’article 4, paragraphe 5, de la directive 2001/14, que le système de tarification est appliqué de telle manière que les différentes entreprises ferroviaires effectuant des prestations de services de nature semblable sur une partie similaire du marché soient soumises à des redevances équivalentes et non discriminatoires et que les redevances effectivement appliquées soient conformes aux règles définies dans le document de référence du réseau ferré (arrêt du 9 novembre 2017, CTL Logistics, C‑489/15, EU:C:2017:834, point 45).

67

Inversement, conformément à l’article 5, paragraphe 1, de la directive 2001/14, les entreprises ferroviaires peuvent prétendre, sur une base non discriminatoire, à l’ensemble des prestations minimales ainsi qu’à l’accès par le réseau aux infrastructures de services décrits à l’annexe II de cette directive. L’accès aux services visés au point 2 de la même annexe doit également être non discriminatoire, mais peut être refusé s’il existe d’autres options viables aux conditions du marché.

68

Il convient de relever que ce droit d’accès aux infrastructures ferroviaires est complété par des règles de tarification figurant au chapitre II de la directive 2001/14, relatif aux redevances d’infrastructure, et notamment à son article 7. Le paragraphe 3 de ce dernier prévoit que les redevances perçues pour l’ensemble des prestations minimales, énumérées à l’annexe II, point 1, de ladite directive, et pour l’accès par le réseau aux infrastructures de services, doivent être égales au coût directement imputable à l’exploitation du service ferroviaire, sans préjudice des dispositions des paragraphes 4 ou 5 du même article 7 ou de l’article 8 de cette même directive. En outre, en ce qui concerne l’accès aux services visés au point 2 de cette annexe, l’article 7, paragraphe 7, de la directive 2001/14 exige de tenir compte de la situation de concurrence dans les chemins de fer.

69

Il découle des considérations qui précèdent que la directive 2001/14, particulièrement, son article 5, paragraphe 1, lu en combinaison avec son article 7, paragraphes 3 et 7, confère aux entreprises ferroviaires qui utilisent ou entendent utiliser l’infrastructure ferroviaire, telle que la requérante au principal, des droits qui doivent pouvoir faire l’objet d’une protection juridictionnelle.

70

Une réglementation nationale qui ne prévoit pas de voie de recours juridictionnel permettant à ces entreprises de contester une décision de l’organisme de contrôle susceptible de léser les droits qui leur sont conférés par le droit de l’Union est de nature à rendre impossible l’exercice de ces droits.

71

À toutes fins utiles, il convient encore de rappeler que la Cour a déjà jugé que les dispositions de l’article 30, paragraphes 2 et 6, de la directive 2001/14 sont inconditionnelles et suffisamment précises et qu’elles sont, partant, dotées d’un effet direct. Dès lors, ces dispositions s’imposent à toutes les autorités des États membres, à savoir non seulement les juridictions nationales, mais également tous les organes de l’administration, y compris les autorités décentralisées, et ces autorités sont tenues d’en faire application (arrêt du 8 juillet 2021, Koleje Mazowieckie, C‑120/20, EU:C:2021:553, point 58).

72

Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de répondre à la seconde question que l’article 30, paragraphe 6, de la directive 2001/14 doit être interprété en ce sens qu’une entreprise ferroviaire, qui utilise ou entend utiliser l’infrastructure ferroviaire, doit pouvoir contester, devant la juridiction compétente, la décision de l’organisme de contrôle approuvant les taux unitaires de la redevance de base pour l’accès minimal à l’infrastructure, établis par le gestionnaire de cette infrastructure.

Sur les dépens

73

La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

 

Par ces motifs, la Cour (quatrième chambre) dit pour droit :

 

1)

L’article 30, paragraphe 2, sous e), de la directive 2001/14/CE du Parlement européen et du Conseil, du 26 février 2001, concernant la répartition des capacités d’infrastructure ferroviaire et la tarification de l’infrastructure ferroviaire, telle que modifiée par la directive 2007/58/CE du Parlement européen et du Conseil, du 23 octobre 2007, doit être interprété en ce sens qu’il ne régit pas le droit d’une entreprise ferroviaire, qui utilise ou entend utiliser l’infrastructure ferroviaire, de participer à une éventuelle procédure menée par l’organisme de contrôle aux fins de l’adoption d’une décision approuvant ou rejetant un projet de taux unitaires de la redevance de base pour l’accès minimal à l’infrastructure soumis par un gestionnaire de l’infrastructure.

 

2)

L’article 30, paragraphe 6, de la directive 2001/14, telle que modifiée par la directive 2007/58, doit être interprété en ce sens qu’une entreprise ferroviaire, qui utilise ou entend utiliser l’infrastructure ferroviaire, doit pouvoir contester, devant la juridiction compétente, la décision de l’organisme de contrôle approuvant les taux unitaires de la redevance de base pour l’accès minimal à l’infrastructure, établis par le gestionnaire de cette infrastructure.

 

Signatures


( *1 ) Langue de procédure : le polonais.

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