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Document 62016CC0046

Conclusions de l'avocat général Mme J. Kokott, présentées le 30 mars 2017.
Valsts ieņēmumu dienests contre « LS Customs Services» SIA.
Demande de décision préjudicielle, introduite par l'Augstākā tiesa.
Renvoi préjudiciel – Union douanière – Règlement (CEE) no 2913/92 – Code des douanes communautaire – Marchandises non communautaires – Régime douanier du transit communautaire externe – Soustraction des marchandises passibles de droits à l’importation à la surveillance douanière – Détermination de la valeur en douane – Article 29, paragraphe 1 – Conditions d’application de la méthode de la valeur transactionnelle – Articles 30 et 31 – Choix de la méthode de détermination de la valeur en douane – Obligation des autorités douanières de motiver la méthode choisie.
Affaire C-46/16.

Court reports – general

ECLI identifier: ECLI:EU:C:2017:247

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

MME JULIANE KOKOTT

présentées le 30 mars 2017 ( 1 )

Affaire C‑46/16

Valsts ieņēmumu dienests

contre

LS Customs Services SIA

[demande de décision préjudicielle formée par l’Augstākā tiesa (Cour suprême, Lettonie)]

« Demande de décision préjudicielle – Union douanière – Marchandises qui, lors du transit externe par le territoire douanier de l’Union, sont soustraites à la surveillance douanière – Détermination de la valeur en douane – Conditions d’application de la méthode de la valeur transactionnelle – Vente pour l’exportation à destination d’un État tiers – Détermination de la valeur en douane à partir des données disponibles dans l’Union européenne – Obligations d’investigation et de motivation des autorités douanières des États membres »

I. Introduction

1.

À une époque où, à de nombreux endroits, on envisage de nouveau la mise en place de mesures protectionnistes et de nouvelles barrières, l’application du droit douanier offre, au-delà de son caractère technique, la possibilité de rappeler les valeurs et objectifs du droit de libre échange de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) et de l’Union européenne. Ces valeurs et objectifs consistent dans la création d’un système douanier juste, uniforme et neutre, qui réponde aussi bien aux besoins du commerce mondial qu’à ceux des acteurs économiques et de l’économie domestique.

2.

Dans ce système, le calcul de la valeur en douane et les garanties procédurales qui y sont liées sont d’une importance décisive. En effet, un système de tarif douanier, aussi équitable qu’il soit, ne remplit pas sa fonction si la détermination de la valeur en douane sur laquelle il est fondé ne se déroule pas de manière correcte et équitable.

3.

À cet égard, la présente procédure soulève différentes questions. Elle concerne une situation où, lors du transit externe par le territoire douanier de l’Union, une marchandise a été soustraite à la surveillance douanière. Le régime du transit externe permet de transporter d’un point à un autre du territoire douanier de l’Union des marchandises provenant d’un État tiers et destinées à être vendues dans un autre État tiers, sans que les marchandises soient soumises à des droits à l’importation. Cependant, si les marchandises n’arrivent pas à destination, on suppose qu’elles ont été soustraites à la surveillance douanière, c’est‑à‑dire au contrôle des autorités douanières ( 2 ), et qu’elles ont donc été importées sur le territoire douanier de l’Union, ce qui fait naître une dette douanière.

4.

Dans ce contexte, la Cour est saisie de la question de savoir comment il convient, dans une telle situation, de déterminer la valeur en douane des marchandises en cause qui, à l’origine, ont été vendues non pas pour l’exportation à destination du territoire douanier de l’Union, mais pour l’exportation à destination d’un État tiers.

5.

De plus, la juridiction de renvoi demande à la Cour de la renseigner sur la portée des obligations d’investigation et de motivation de l’administration douanière d’un État membre au sujet de la méthode applicable en vue de la détermination de la valeur en douane.

II. Le cadre juridique

A. Le droit de l’OMC

1. Le GATT de 1994

6.

L’article VII, paragraphe 2, sous a) et b), de l’accord général sur les tarifs douaniers et le commerce de 1994 ( 3 ) prévoit ce qui suit :

a)

La valeur en douane des marchandises importées devrait être fondée sur la valeur réelle de la marchandise importée à laquelle s’applique le droit ou d’une marchandise similaire et ne devrait pas être fondée sur la valeur de produits d’origine nationale ou sur des valeurs arbitraires ou fictives.

b)

La “valeur réelle” devrait être le prix auquel, en des temps et lieu déterminés par la législation du pays d’importation, les marchandises importées ou des marchandises similaires sont vendues ou offertes à la vente à l’occasion d’opérations commerciales normales effectuées dans des conditions de pleine concurrence. […] »

2. Accord relatif à la mise en œuvre de l’article VII du GATT de 1994

7.

Aux termes du préambule de l’accord relatif à la mise en œuvre de l’article VII du GATT de 1994 (ci-après l’« accord relatif à la mise en œuvre de l’article VII du GATT de 1994 ») ( 4 ), la base première pour la détermination de la valeur en douane est la valeur transactionnelle définie à l’article 1er dudit accord. De plus, le préambule explique que, lorsque la valeur en douane ne peut pas être déterminée par application des dispositions de l’article 1er, elle doit être déterminée sur la base de la valeur transactionnelle de marchandises identiques ou similaires importées. Si cela devait également s’avérer impossible, diverses méthodes supplémentaires sont prévues pour la détermination de la valeur en douane.

8.

L’article 1er, paragraphe 1, de l’accord relatif à la mise en œuvre de l’article VII du GATT de 1994 est libellé comme suit :

« 1.   La valeur en douane des marchandises importées sera la valeur transactionnelle, c’est‑à‑dire le prix effectivement payé ou à payer pour les marchandises lorsqu’elles sont vendues pour l’exportation à destination du pays d’importation […]. »

9.

L’article 2, paragraphe 1, sous a), de l’accord relatif à la mise en œuvre de l’article VII du GATT de 1994 prévoit ce qui suit :

a)

Si la valeur en douane des marchandises importées ne peut pas être déterminée par application des dispositions de l’article premier, la valeur en douane sera la valeur transactionnelle de marchandises identiques, vendues pour l’exportation à destination du même pays d’importation […] »

10.

L’article 3, paragraphe 1, sous a), du même accord prévoit ce qui suit :

a)

Si la valeur en douane des marchandises importées ne peut pas être déterminée par application des dispositions des articles premier et 2, la valeur en douane sera la valeur transactionnelle de marchandises similaires, vendues pour l’exportation à destination du même pays d’importation […]. »

11.

Conformément à l’article 6, paragraphe 1, sous b), de cet accord :

« La valeur en douane des marchandises importées, déterminée par application des dispositions du présent article, se fondera sur une valeur calculée. La valeur calculée sera égale à la somme

[…]

b)

d’un montant pour les bénéfices et frais généraux, égal à celui qui entre généralement dans les ventes de marchandises de la même nature ou de la même espèce que les marchandises à évaluer, qui sont faites par des producteurs du pays d’exportation pour l’exportation à destination du pays d’importation. »

12.

Les dispositions de l’article 7, paragraphes 1 et 2, sous e) et g), de cet accord prévoient ce qui suit :

« 1.   Si la valeur en douane des marchandises importées ne peut pas être déterminée par application des dispositions des articles premier à 6, elle sera déterminée par des moyens raisonnables compatibles avec les principes et les dispositions générales du présent accord et de l’article VII du GATT de 1994 et sur la base des données disponibles dans le pays d’importation.

2.   La valeur en douane déterminée par application des dispositions du présent article ne se fondera pas :

[…]

e)

sur le prix de marchandises vendues pour l’exportation à destination d’un pays autre que le pays d’importation,

[…]

g)

sur des valeurs arbitraires ou fictives. »

B. Le droit de l’Union

1. Le code des douanes

13.

Conformément à l’article 4, point 13, du code des douanes ( 5 ), on entend par « surveillance des autorités douanières », aux fins du code des douanes, « l’action menée au plan général par ces autorités en vue d’assurer le respect de la réglementation douanière et, le cas échéant, des autres dispositions applicables aux marchandises sous surveillance douanière ».

14.

Aux termes de l’article 37, paragraphes 1 et 2, du code des douanes, « les marchandises qui sont introduites dans le territoire douanier de la Communauté sont, dès cette introduction, soumises à la surveillance douanière » et « peuvent faire l’objet de contrôles douaniers ». Les marchandises non communautaires « restent sous cette surveillance […] jusqu’à ce qu’elles […] so[ie]nt réexportées […] ».

15.

L’article 6, paragraphes 1 et 3, du code des douanes prévoit ce qui suit :

« 1.   Lorsqu’une personne sollicite des autorités douanières une décision relative à l’application de la réglementation douanière, elle fournit tous les éléments et documents nécessaires à ces autorités pour statuer.

[…]

3.   Les décisions prises par écrit qui soit ne font pas droit aux demandes, soit ont des conséquences défavorables pour les personnes auxquelles elles s’adressent, sont motivées par les autorités douanières. Elles doivent mentionner la possibilité de recours prévue à l’article 243. »

16.

L’article 12 du code des douanes contient ce qui suit :

« 1.   Les autorités douanières délivrent, sur demande écrite […] des renseignements tarifaires contraignants ou des renseignements contraignants en matière d’origine.

2.   Le renseignement tarifaire contraignant ou le renseignement contraignant en matière d’origine ne lie les autorités douanières vis‑à‑vis du titulaire que, respectivement, pour le classement tarifaire ou pour la détermination de l’origine d’une marchandise.

[…] [durée de validité, conditions, fin de validité]. »

17.

L’article 14 du code des douanes prévoit ce qui suit :

« Aux fins de l’application de la réglementation douanière, toute personne directement ou indirectement intéressée aux opérations concernées effectuées dans le cadre des échanges des marchandises fournit aux autorités douanières à leur demande et dans les délais éventuellement fixés, tous documents et informations quel qu’en soit le support ainsi que toute assistance nécessaires. »

18.

L’article 29, paragraphe 1, du code des douanes est formulé de la manière suivante :

« 1.   La valeur en douane des marchandises importées est leur valeur transactionnelle, c’est-à-dire le prix effectivement payé ou à payer pour les marchandises lorsqu’elles sont vendues pour l’exportation à destination du territoire douanier de la Communauté, le cas échéant, après ajustement effectué conformément aux articles 32 et 33 pour autant :

a)

qu’il n’existe pas de restrictions concernant la cession ou l’utilisation des marchandises par l’acheteur, autres que des restrictions qui :

sont imposées ou exigées par la loi ou par les autorités publiques dans la Communauté,

limitent la zone géographique dans laquelle les marchandises peuvent être revendues

ou n’affectent pas substantiellement la valeur des marchandises ;

b)

que la vente ou le prix ne soit pas subordonné à des conditions ou à des prestations dont la valeur n’est pas déterminable pour ce qui se rapporte aux marchandises à évaluer ;

c)

qu’aucune partie du produit de toute revente, cession ou utilisation ultérieure des marchandises par l’acheteur ne revienne directement ou indirectement au vendeur, sauf si un ajustement approprié peut être opéré en vertu de l’article 32 et

d)

que l’acheteur et le vendeur ne soient pas liés ou, s’ils le sont, que la valeur transactionnelle soit acceptable à des fins douanières, en vertu du paragraphe 2. »

19.

L’article 30 du code des douanes prévoit ce qui suit :

« 1.   Lorsque la valeur en douane ne peut être déterminée par application de l’article 29, il y a lieu de passer successivement aux lettres a), b), c) et d) du paragraphe 2 jusqu’à la première de ces lettres qui permettra de la déterminer, sauf si l’ordre d’application des points c) et d) doit être inversé à la demande du déclarant ; c’est seulement lorsque cette valeur en douane ne peut être déterminée par application d’une lettre donnée qu’il est loisible d’appliquer la lettre qui vient immédiatement après celle-ci dans l’ordre établi en vertu du présent paragraphe.

2.   Les valeurs en douane déterminées par application du présent article sont les suivantes :

a)

valeur transactionnelle de marchandises identiques, vendues pour l’exportation à destination de la Communauté et exportées au même moment ou à peu près au même moment que les marchandises à évaluer ;

b)

valeur transactionnelle de marchandises similaires, vendues pour l’exportation à destination de la Communauté et exportées au même moment ou à peu près au même moment que les marchandises à évaluer ;

c)

valeur fondée sur le prix unitaire correspondant aux ventes dans la Communauté des marchandises importées ou de marchandises identiques ou similaires importées totalisant la quantité la plus élevée, ainsi faites à des personnes non liées aux vendeurs ;

d)

valeur calculée, égale à la somme :

du coût ou de la valeur des matières et des opérations de fabrication ou autres, mises en œuvre pour produire les marchandises importées,

d’un montant représentant les bénéfices et les frais généraux égal à celui qui entre généralement dans les ventes de marchandises de la même nature ou de la même espèce que les marchandises à évaluer, qui sont faites par des producteurs du pays d’exportation pour l’exportation à destination de la Communauté,

du coût ou de la valeur des éléments énoncés à l’article 32 paragraphe 1 point e).

[…] »

20.

L’article 31 du code des douanes est libellé comme suit :

« 1.   Si la valeur en douane des marchandises importées ne peut être déterminée par application des articles 29 et 30, elle est déterminée, sur la base des données disponibles dans la Communauté, par des moyens raisonnables compatibles avec les principes et les dispositions générales :

de l’accord relatif à la mise en œuvre de l’article VII de l’accord général sur les tarifs douaniers et le commerce de 1994,

de l’article VII de l’accord général sur les tarifs douaniers et le commerce de 1994,

et

des dispositions du présent chapitre.

2.   La valeur en douane déterminée par application du paragraphe 1 ne se fonde pas :

a)

sur le prix de vente, dans la Communauté, de marchandises produites dans la Communauté ;

b)

sur un système prévoyant l’acceptation, à des fins douanières, de la plus élevée de deux valeurs possibles ;

c)

sur le prix de marchandises sur le marché intérieur du pays d’exportation ;

d)

sur le coût de production, autre que les valeurs calculées qui ont été déterminées pour des marchandises identiques ou similaires conformément à l’article 30 paragraphe 2 point d) ;

e)

sur des prix pour l’exportation à destination d’un pays non compris dans le territoire douanier de la Communauté ;

f)

sur des valeurs en douane minimales ou

g)

sur des valeurs arbitraires ou fictives. »

21.

En vertu de l’article 91, paragraphe 1, sous a), du code des douanes :

« 1.   Le régime du transit externe permet la circulation d’un point à un autre du territoire douanier de la Communauté :

a)

de marchandises non communautaires sans que ces marchandises soient soumises aux droits à l’importation ou aux autres impositions ni aux mesures de politique commerciale […] »

22.

L’article 92, paragraphe 1, du code des douanes prévoit les dispositions suivantes :

« 1.   Le régime du transit externe prend fin et les obligations du titulaire du régime sont remplies lorsque les marchandises placées sous le régime et les documents requis sont présentés au bureau de douane de destination, conformément aux dispositions du régime concerné. »

23.

L’article 94 du code des douanes indique ce qui suit :

« 1.   Le principal obligé est tenu de fournir une garantie en vue d’assurer le paiement de la dette douanière et des autres impositions susceptibles de naître à l’égard de la marchandise.

2.   La garantie est :

a)

soit une garantie individuelle couvrant une seule opération de transit ;

b)

soit une garantie globale couvrant un certain nombre d’opérations de transit, lorsque le principal obligé a été autorisé par les autorités douanières de l’État membre où il est établi à fournir une garantie de ce type.

[…]

4.   Les personnes qui justifient auprès des autorités qu’elles observent des normes de fiabilité plus exigeantes peuvent être autorisées à fournir une garantie globale d’un montant réduit ou bénéficier d’une dispense de garantie. […] […] »

24.

L’article 95, paragraphe 1, du code des douanes précise ce qui suit :

« 1.   Sauf dans les cas à déterminer en tant que de besoin selon la procédure du comité, aucune garantie ne doit être fournie pour [exceptions]. »

25.

L’article 96, paragraphe 1, du code des douanes prévoit ce qui suit :

« 1.   Le principal obligé est le titulaire du régime de transit communautaire externe. Il est tenu :

a)

de présenter en douane les marchandises intactes au bureau de douane de destination, dans le délai prescrit et en ayant respecté les mesures d’identification prises par les autorités douanières ;

b)

de respecter les dispositions relatives au régime du transit communautaire. »

26.

L’article 192, paragraphe 1, du code des douanes est formulé comme suit :

« 1.   Lorsque la réglementation douanière prévoit la constitution d’une garantie à titre obligatoire, et sous réserve des dispositions particulières pour le régime du transit prévues selon la procédure du comité, les autorités douanières fixent le montant de cette garantie à un niveau égal :

au montant exact de la ou des dettes douanières en cause, si ce montant peut être déterminé de façon certaine au moment où la garantie est exigée,

au montant le plus élevé, estimé par les autorités douanières, de la ou des dettes douanières nées ou susceptibles de naître dans les autres cas.

[…] »

27.

Aux termes de l’article 203 du code des douanes :

« 1.   Fait naître une dette douanière à l’importation :

la soustraction d’une marchandise passible de droits à l’importation à la surveillance douanière.

[…]

3.   Les débiteurs sont :

[…]

le cas échéant, la personne qui doit exécuter les obligations qu’entraîne le séjour en dépôt temporaire de la marchandise ou l’utilisation du régime douanier sous lequel cette marchandise a été placée. »

28.

L’article 220, paragraphe 2, sous b), du code des douanes prévoit les dispositions suivantes :

« 2.   Hormis les cas […], il n’est pas procédé à une prise en compte a posteriori, lorsque :

[…]

b)

le montant des droits légalement dus n’avait pas été pris en compte par suite d’une erreur des autorités douanières elles-mêmes, qui ne pouvait raisonnablement être décelée par le redevable, ce dernier ayant pour sa part agi de bonne foi et observé toutes les dispositions prévues par la réglementation en vigueur en ce qui concerne la déclaration en douane.

[…] »

2. Le règlement (CEE) no 2454/93

29.

L’article 147, paragraphe 1, du règlement (CEE) no 2454/93 ( 6 ) prévoit les dispositions suivantes :

« 1.   Aux fins de l’article 29 du code, le fait que les marchandises faisant l’objet d’une vente sont déclarées pour la mise en libre pratique doit être considéré comme une indication suffisante qu’elles ont été vendues en vue de l’exportation à destination du territoire douanier de la Communauté. Cette indication ne subsiste en cas de ventes successives avant l’évaluation qu’à l’égard de la dernière vente sur la base de laquelle les marchandises ont été introduites dans le territoire douanier de la Communauté, ou à l’égard d’une vente dans le territoire douanier de la Communauté avant la mise en libre pratique des marchandises.

Lors de la déclaration d’un prix relatif à une vente précédant la dernière vente sur la base de laquelle les marchandises ont été introduites dans le territoire douanier de la Communauté, il doit être démontré à la satisfaction des autorités douanières qu’une telle vente des marchandises a été conclue en vue de l’exportation à destination dudit territoire.

[…] »

30.

L’article 151 du règlement no 2454/93 est la disposition d’application de l’article 30, paragraphe 2, point b), du code des douanes, et son paragraphe 3 prévoit ce qui suit :

« 3.   Si, pour l’application du présent article, il est constaté deux ou plusieurs valeurs transactionnelles de marchandises similaires, on doit prendre en considération la valeur transactionnelle la plus basse pour déterminer la valeur en douane des marchandises importées. »

III. Les faits et la procédure au principal

31.

Le 2 juin 2011, la société LS Customs Services SIA (ci‑après « LSCS ») a présenté au point de contrôle douanier letton « Rīgas brīvostas MKP », en sa qualité de principal obligé, une déclaration de transit en douane de marchandises (vélos pour enfants et leurs pièces) en vue de leur transit en provenance de la Chine vers la Russie dans le cadre du régime du transit externe. La déclaration de transit indique le point de contrôle douanier letton « Terehovas MKP » comme autorité destinataire.

32.

Comme les marchandises en question n’ont pas été présentées à cette autorité, LSCS n’a pu apporter aucune preuve de l’achèvement du transit. C’est pourquoi l’administration fiscale lettone a supposé que la procédure de transit n’avait pas été achevée et que les obligations du titulaire de cette procédure n’avaient pas été remplies. Elle en a déduit que les marchandises avaient été soustraites à la surveillance douanière et qu’une dette douanière était née à la charge de LSCS. Par conséquent, l’administration fiscale lettone a, par décision initiale du 12 septembre 2011 et par décision finale du 8 novembre 2011 (ci-après la « décision litigieuse »), imposé à LSCS l’obligation de payer des droits de douane, des droits antidumping et la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) pour les marchandises en question.

33.

Quant à la valeur en douane de ces marchandises, l’administration fiscale lettone a estimé que l’article 29 du code des douanes n’était pas applicable, au motif que les marchandises en question avaient été vendues en vue de leur exportation non pas vers le territoire douanier de la Communauté européenne, mais vers la Russie. C’est pourquoi l’administration fiscale lettone ne s’est pas fondée sur la valeur transactionnelle des marchandises en cause en vue de déterminer la valeur en douane de celles-ci. Par ailleurs, l’administration fiscale a considéré qu’elle ne disposait pas des informations nécessaires pour déterminer la valeur en douane en application des méthodes prévues à l’article 30 du code des douanes. Par conséquent, elle a déterminé la valeur en douane sur le fondement de l’article 31 du code des douanes, à partir des données disponibles dans l’Union.

34.

À la suite d’un recours introduit par LSCS, l’administratīvā rajona tiesa (tribunal administratif de district, Lettonie) a, par son jugement du 23 août 2012, annulé la décision litigieuse pour insuffisance de motifs. L’Administratīvā apgabaltiesa (Cour administrative régionale, Lettonie) a confirmé ce jugement le 10 juin 2014, au motif que ni la décision initiale de l’administration fiscale lettone ni la décision litigieuse n’indiquaient les informations à partir desquelles la valeur en douane des marchandises en cause avait été calculée. Elles n’indiquaient pas non plus la raison pour laquelle il n’avait pas été possible d’obtenir des informations à partir desquelles aurait pu être appliquée une autre méthode de détermination de la valeur en douane que celle prévue à l’article 31 du code des douanes. L’Administratīvā apgabaltiesa (Cour administrative régionale) en a conclu que l’administration fiscale lettone n’avait pas donné la possibilité à LSCS de faire valoir ses droits dans le cadre de la procédure administrative et judiciaire.

35.

L’administration fiscale lettone a formé un pourvoi contre cet arrêt auprès de l’Augstākā tiesa (Cour suprême, Lettonie).

IV. La demande de décision préjudicielle et la procédure devant la Cour

36.

L’Augstākā tiesa (Cour suprême) est d’avis que la solution du litige au principal dépend de l’interprétation du droit de l’Union et elle a par conséquent déféré, par ordonnance du 21 janvier 2016, les questions suivantes à titre préjudiciel :

« 1)

Convient-il d’interpréter l’article 29, paragraphe 1, du règlement (CEE) no 2913/92 du Conseil, du 12 octobre 1992, établissant le code des douanes communautaire, en ce sens que la méthode qui y est prévue est applicable également dans le cas où l’importation de marchandises et leur mise en libre pratique sur le territoire douanier de la Communauté sont la conséquence du fait que, au cours de la procédure de transit, ces marchandises, passibles de droits à l’importation, ont été illégalement soustraites à la surveillance des douanes, et qu’elles n’ont donc pas été vendues pour l’exportation à destination du territoire douanier de la Communauté, mais pour l’exportation en dehors de ce territoire ?

2)

Convient-il d’interpréter l’adverbe “successivement” à l’article 30, paragraphe 1, du règlement (CEE) no 2913/92, en relation avec le droit à une bonne administration, consacré par l’article 41 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, et, notamment, à la lumière du principe de motivation des actes administratifs, en ce sens que l’autorité douanière est tenue d’indiquer dans sa décision la raison pour laquelle elle a considéré que les méthodes de détermination de la valeur douanière des articles 29 et 30 du règlement n’étaient pas applicables dans le cas d’espèce et a jugé en conséquence qu’il convenait d’appliquer la méthode visée à son article 31 ?

3)

Lorsqu’elle refuse l’application de la méthode prévue à l’article 30, paragraphe 2, sous a), du code des douanes, l’autorité douanière est‑elle tenue de demander au producteur les informations nécessaires ou est‑il suffisant d’indiquer que l’autorité ne possède pas de telles informations ?

4)

L’autorité douanière est-elle tenue de motiver la non‑application des méthodes prévues à l’article 30, paragraphe 2, sous c) et d), du code des douanes, si elle détermine le prix de marchandises similaires conformément aux conditions visées à l’article 151, paragraphe 3, du règlement (CEE) no 2454/93 ?

5)

L’autorité douanière est-elle tenue de motiver dans sa décision de manière exhaustive ce qui constitue des données disponibles dans la Communauté, au sens de l’article 31 du code des douanes, ou cette motivation peut-elle être fournie plus tard, en présentant des preuves plus détaillées lors de la procédure juridictionnelle ? »

37.

Dans le cadre de la procédure devant la Cour, des mémoires ont été déposés par LSCS, le gouvernement letton et la Commission européenne.

V. Analyse

38.

Les cinq questions préjudicielles de l’Augstākā tiesa (Cour suprême) concernent deux aspects des obligations de l’administration douanière d’un État membre : d’une part, il s’agit de la détermination de la valeur en douane d’une marchandise, et notamment des conditions pour l’application de la méthode de la valeur transactionnelle (voir ci‑dessous, sous A) ; d’autre part, la question qui se pose est celle des obligations d’investigation et de motivation de l’administration douanière lors de la détermination de la valeur en douane (voir ci‑dessous, sous B).

A. Sur les conditions de l’application de la méthode de la valeur transactionnelle conformément à l’article 29 du code des douanes

39.

Par sa première question, la juridiction de renvoi aimerait savoir s’il convient également d’appliquer la méthode de la valeur transactionnelle conformément à l’article 29 du code des douanes en vue de l’établissement de la valeur en douane, dans l’hypothèse où les marchandises qui, à l’origine, avaient été vendues non pas pour l’exportation à destination de l’Union, mais pour l’exportation à destination d’un État tiers, ont été soustraites à la surveillance douanière sur le territoire douanier de l’Union dans le cadre du régime du transit externe.

40.

En vue de répondre à cette question, tout d’abord, il faut déterminer dans quelle mesure l’application de la méthode de la valeur transactionnelle suppose que le prix de la transaction corresponde à un prix pour l’exportation à destination du territoire douanier de l’Union (voir, sur ce point, sous 1). Ensuite, il convient de déterminer l’incidence du fait que la dette douanière prend naissance en raison de la soustraction des marchandises concernées à la surveillance douanière dans le cadre du régime du transit externe. Dans ce contexte, il faudra examiner l’argumentation de LSCS, selon laquelle la fixation de la garantie qui doit être fournie pour le régime de transit externe préjuge de la détermination ultérieure de la valeur en douane (voir ci-dessous, sous 2).

1. Sur le critère de la « vente pour l’exportation à destination du territoire douanier de l’Union »

41.

Peut-on également utiliser la méthode de la valeur transactionnelle prévue à l’article 29 du code des douanes pour déterminer la valeur en douane lorsque le prix de la transaction correspond non pas à un prix pour l’exportation à destination du territoire douanier de l’Union, mais à un prix pour l’exportation à destination d’un État tiers ?

42.

D’une part, à cela s’oppose le libellé de l’article 29 du code des douanes, aux termes duquel la « valeur transactionnelle […] est […] le prix effectivement payé ou à payer pour les marchandises lorsqu’elles sont vendues pour l’exportation à destination du territoire douanier de [l’Union] ( 7 )» ( 8 ). Selon la Cour, il faut donc qu’il soit établi, au moment de la vente, que les marchandises originaires d’un pays tiers seront acheminées sur le territoire de l’Union ( 9 ). Ce principe est également consacré à l’article 147, paragraphe 1, deuxième alinéa, du règlement no 2454/93, aux termes duquel, lors de la déclaration, en cas de ventes successives, d’un prix relatif à une vente précédant la dernière vente, il doit être démontré que la transaction en question a été conclue en vue de l’exportation à destination du territoire douanier de l’Union.

43.

D’autre part, il résulte également de l’économie ainsi que du sens et de l’objectif des dispositions des articles 29 à 31 du code des douanes relatives à la détermination de la valeur en douane que seul un prix pour l’exportation à destination du territoire douanier de l’Union peut être utilisé pour le calcul de la valeur en douane.

44.

Il est vrai que, en vertu de ces dispositions et des dispositions de l’accord relatif à la mise en œuvre de l’article VII du GATT de 1994 sur lesquelles elles sont fondées, la valeur transactionnelle doit, autant que possible, être utilisée en vue du calcul de la valeur en douane ( 10 ). Cela n’est pas seulement confirmé dans le préambule de l’accord relatif à la mise en œuvre de l’article VII du GATT de 1994, mais également par le fait que les méthodes alternatives de calcul de la valeur en douane ne doivent être appliquées que si la valeur en douane ne peut pas être déterminée à partir de la valeur transactionnelle ( 11 ). Ainsi, la Cour a précisé que, compte tenu de la priorité qui est donnée à la méthode fondée sur la valeur transactionnelle, les conditions pour l’application de cette méthode ne doivent pas être interprétées de manière trop étroite ( 12 ).

45.

Cependant, il résulte également des dispositions précitées et de l’accord relatif à la mise en œuvre de l’article VII du GATT de 1994, sur lequel elles sont fondées, que la valeur en douane doit correspondre à la « valeur réelle » des marchandises importées. C’est pourquoi la valeur transactionnelle ne peut être utilisée en vue du calcul de la valeur en douane que si l’on peut supposer qu’elle reflète la valeur économique réelle d’une marchandise importée et tient compte de l’ensemble des éléments de cette marchandise qui présentent une valeur économique ( 13 ).

46.

Tel n’est pas le cas lorsqu’il s’agit d’un prix qui a été fixé ou négocié non pas pour l’exportation d’une marchandise à destination du territoire douanier de l’Union, mais pour l’exportation d’une marchandise à destination d’un État tiers. En effet, le prix d’une marchandise dans une zone douanière déterminée correspond à la situation du marché dans cette zone ( 14 ) et constitue donc un élément qui est intégré dans la valeur économique de la marchandise : si, comme en l’espèce, un vélo pour enfants coûte 3,90 euros dans le cas d’une exportation à partir de la Chine à destination de la Russie, cela ne signifie cependant en aucun cas que, en cas d’exportation dans l’Union, il serait vendu au même prix.

47.

D’ailleurs, c’est pour cette raison que le « prix normal » théorique de la convention sur la valeur en douane des marchandises, qui, jusqu’à l’introduction de la méthode de la valeur transactionnelle, a servi de base pour le calcul de la « valeur réelle » au sens de l’accord relatif à la mise en œuvre de l’article VII du GATT de 1994 ( 15 ), était un prix pour la marchandise importée au point d’introduction dans le territoire douanier en question. En revanche, il ne s’agissait en aucun cas d’un prix pour des marchandises étrangères, exportées vers d’autres pays que le pays de destination ( 16 ). Le système actuel continue à suivre ce principe de la valeur « normale » ou « véritable » en ce sens que la valeur transactionnelle d’une marchandise importée est certes en principe utilisée en vue du calcul de la valeur en douane, mais seulement sous certaines conditions.

48.

Lorsque ces conditions ne sont pas remplies, la valeur en douane doit être calculée à partir de la valeur transactionnelle de marchandises importées identiques ou similaires ou conformément à diverses autres méthodes. Les dispositions y relatives confirment l’importance, dans le calcul de la valeur en douane, du critère de la vente pour l’exportation à destination du territoire douanier concerné : ainsi, il doit s’agir de marchandises identiques ou similaires qui sont vendues pour l’exportation à destination du même pays d’importation (accord relatif à la mise en œuvre de l’article VII du GATT) ( 17 ) ou à destination de l’Union (code des douanes de l’Union) ( 18 ). De la même manière, une valeur en douane qui, en l’absence de telles valeurs de référence, est calculée conformément à d’autres méthodes envisageables ne se fondera en aucun cas sur le prix de marchandises vendues pour l’exportation à destination d’un pays autre que le pays d’importation (accord relatif à la mise en œuvre de l’article VII du GATT de 1994) ( 19 ) ou à destination d’un pays non compris dans le territoire douanier de l’Union (code des douanes) ( 20 ).

49.

Il serait donc contraire à l’objectif des règles de l’Union en matière de valeur en douane d’accepter un prix de vente pour l’exportation à destination d’un État tiers en tant que valeur transactionnelle au sens de l’article 29 du code des douanes. En effet, cette réglementation vise à établir un système équitable, uniforme et neutre qui exclut l’utilisation de valeurs en douane arbitraires ou fictives ( 21 ). Or, cela ne pourrait pas être garanti si l’on utilisait un prix pour l’exportation à destination d’un État tiers en vue de calculer la valeur en douane d’une marchandise dans le territoire douanier de l’Union. En effet, comme les prix varient en fonction de la zone douanière, le calcul de la valeur en douane ne peut être équitable, uniforme et neutre que si, pour une importation dans une zone donnée, on se fonde sur un prix pour l’exportation à destination de cette même zone.

50.

Si tel n’était pas le cas, il y aurait notamment une inégalité de traitement et une atteinte à la neutralité en matière de concurrence entre celui qui importe une marchandise dans l’Union à partir d’une vente pour l’exportation à destination de l’Union et celui qui, à partir d’une vente pour l’exportation à destination d’un État tiers, importe une marchandise dans l’Union, par exemple, du fait de la soustraction de la marchandise à la surveillance douanière (que ce soit de manière volontaire ou, comme il est affirmé en l’espèce, du fait d’un tiers). Cela pourrait d’ailleurs donner lieu à des abus dans l’hypothèse où – comme dans la présente espèce – la valeur transactionnelle pour l’exportation à destination d’un État tiers est considérablement inférieure à la valeur correspondante pour l’exportation à destination du territoire douanier de l’Union.

2. Sur la manière dont la dette douanière prend naissance et l’importance de la garantie fournie dans le cadre du régime du transit externe

51.

Il résulte de l’exposé qui précède que, pour l’applicabilité de la méthode de la valeur transactionnelle, peu importe la manière dont la dette douanière prend naissance (par une déclaration en vue de la mise en libre pratique ou par la soustraction de la marchandise à la surveillance douanière dans le cadre du transit). La seule question qui est déterminante est celle de savoir si les marchandises importées ont été vendues pour l’exportation à destination du territoire douanier de l’Union.

52.

Afin de déterminer si tel est le cas, on ne saurait, en l’espèce, comme la Commission l’indique à juste titre, faire valoir la présomption figurant à l’article 147, paragraphe 1, du règlement no 2454/93 : aux termes de cette disposition, le fait que les marchandises faisant l’objet d’une vente sont déclarées pour la mise en libre pratique doit être considéré comme une indication suffisante qu’elles ont été vendues en vue de l’exportation à destination du territoire douanier de l’Union. Or, en l’espèce, les marchandises ont été déclarées non pas pour la mise en libre pratique, mais pour le placement sous le régime du transit.

53.

Comme la Commission l’a noté par ailleurs, cela ne veut cependant pas dire que l’absence de déclaration pour la mise en libre pratique signifie automatiquement que les marchandises n’ont pas été vendues pour l’exportation à destination du territoire douanier de l’Union. Au contraire, il appartient à l’administration douanière ou à la juridiction de renvoi d’apprécier, à partir des circonstances et des documents disponibles relatifs au cas d’espèce, si les marchandises ont été vendues pour l’exportation à destination du territoire douanier de l’Union. À cet égard, il est déterminant de savoir si la vente sur laquelle il convient de se fonder pour le calcul de la valeur transactionnelle a été faite à destination du territoire douanier de l’Union. D’après les informations fournies par LSCS et par la juridiction de renvoi, tel ne semble pas être le cas en l’espèce.

54.

LSCS, notamment, ne conteste pas le fait que les marchandises concernées n’ont pas été vendues pour l’exportation à destination du territoire douanier de l’Union. Elle ne conteste pas non plus le fait qu’il y a eu naissance d’une dette douanière et qu’elle-même est devenue la débitrice de celle-ci en tant que principale obligée. Elle estime cependant que la dette douanière ne doit pas dépasser le montant de la garantie qu’elle a fournie lors du placement des marchandises sous le régime du transit externe. Comme le calcul de cette garantie était fondé sur la valeur transactionnelle de la vente des marchandises à partir de la Chine à destination de la Russie, il convient, selon LSCS, également de calculer la valeur douanière finale en se fondant sur la méthode de la valeur transactionnelle.

55.

On ne saurait suivre cette argumentation.

56.

Il est vrai que la garantie que le principal obligé doit fournir lors du placement de marchandises sous le régime du transit externe est destinée à garantir une éventuelle dette douanière. C’est pourquoi cette garantie doit correspondre au montant exact ou au montant le plus élevé, estimé, de la dette douanière devant être garantie ( 22 ). D’après les indications de LSCS, tel n’a manifestement pas été le cas en l’espèce : en se fondant sur la méthode de la valeur transactionnelle pour déterminer la valeur en douane pour le calcul de la garantie à fournir, les autorités douanières lettones ont ignoré l’exigence selon laquelle la garantie à fournir doit correspondre à la dette douanière la plus élevée possible. Or, précisément dans un cas comme celui de l’espèce où la question de l’applicabilité de l’article 29 du code des douanes n’était pas réglée, ces autorités ne pouvaient pas supposer de manière certaine que l’éventuelle dette douanière ne dépasserait pas la valeur calculée sur ce fondement.

57.

Le principal obligé ne peut cependant pas, dans une situation comme celle de l’espèce, invoquer la protection de la confiance légitime en faisant valoir qu’il pouvait légitimement s’attendre à ce que le montant de la dette douanière corresponde au montant de la garantie qui a été fournie lors du placement des marchandises sous le régime du transit externe.

58.

Il est vrai que, comme la Cour l’a déjà souligné à plusieurs reprises, le principe du respect de la confiance légitime s’inscrit parmi les principes fondamentaux de l’Union ( 23 ). Ce principe ne peut cependant être invoqué avec succès que par un opérateur qui a eu des assurances précises, inconditionnelles et concordantes, émanant de sources autorisées et fiables ( 24 ), et à l’égard duquel une autorité nationale a fait naître des attentes fondées ( 25 ).

59.

Tel n’est pas le cas en l’espèce.

60.

Il résulte en effet des dispositions pertinentes du code des douanes que le calcul de la garantie que le principal obligé doit fournir pour le placement des marchandises sous le régime du transit ne doit en aucun cas être assimilé au calcul de la dette douanière effective.

61.

Ainsi, pour ce qui concerne le calcul de la garantie susmentionnée, il n’est a priori prévu nulle part qu’il s’agit là d’un renseignement contraignant des autorités douanières. Aux termes de l’article 12 du code des douanes, le caractère contraignant est cependant prévu de manière explicite pour d’autres renseignements. Compte tenu du caractère détaillé des dispositions du code des douanes, on peut donc supposer que, si le législateur avait eu l’intention de considérer que la fixation de la garantie pour le régime du transit était contraignante pour le calcul ultérieur de la dette douanière, il aurait également prévu cela de manière expresse.

62.

Il en va de même pour les dispositions explicites du code des douanes, en vertu desquelles les autorités douanières sont, en règle générale, autorisées à procéder (sous réserve d’éventuelles considérations liées à la protection de la confiance légitime) à un contrôle a posteriori d’une déclaration en douane et à fixer une nouvelle dette douanière ( 26 ). Là encore, il convient de supposer que, si le législateur avait voulu rendre la détermination de la garantie dans le cadre du régime du transit contraignante pour la fixation de la dette douanière, les conditions d’une modification a posteriori auraient dû être prévues par le code des douanes, ce qui n’a pas été le cas.

63.

Un argument supplémentaire contre le caractère contraignant de la fixation de la garantie pour le calcul ultérieur de la dette douanière est le fait que, dans certaines conditions, il peut y avoir une dispense de garantie ou une réduction ( 27 ), alors qu’il n’y a aucune disposition relative aux effets que cela pourrait avoir sur le calcul ultérieur de la dette douanière. Il en va de même pour la possibilité d’utiliser des montants forfaitaires lors du calcul de la garantie dans l’hypothèse où les données nécessaires au calcul d’une dette douanière potentielle ne seraient pas disponibles ( 28 ). Enfin, dans l’hypothèse où la fixation du montant de la garantie préjugerait du montant de la dette douanière future, il n’y aurait pas de délimitation entre les situations concernées par cette hypothèse et les cas dans lesquels aucune garantie ne doit être fournie ( 29 ).

64.

Par conséquent, LSCS ne pouvait pas partir du principe que les dispositions pertinentes du code des douanes permettaient aux autorités douanières lettones de lui donner, par l’établissement du montant de la garantie, des assurances précises et inconditionnelles concernant une éventuelle dette douanière. Ce constat s’impose d’autant plus que LSCS qui effectue le transit externe est, en l’absence d’indications contraires, censée être expérimentée dans le domaine des opérations douanières et familiarisée avec les dispositions du droit douanier. Elle ne peut donc pas non plus prétendre que les autorités susmentionnées ont fait naître en elle l’attente fondée que la dette douanière n’allait pas dépasser le montant de la garantie qui devait être fournie dans le cadre du régime du transit.

3. Conclusion

65.

En accord avec les considérations figurant ci-dessus, nous proposons de répondre comme suit à la première question préjudicielle :

Il convient d’interpréter l’article 29, paragraphe 1, du code des douanes en ce sens que la méthode qui y est prévue pour la détermination de la valeur en douane doit uniquement être appliquée lorsque la valeur transactionnelle des marchandises concernées correspond à un prix pour l’exportation à destination du territoire douanier de l’Union. Il importe peu à cet égard que la dette douanière naisse du fait de la soustraction des marchandises à la surveillance douanière dans le cadre du régime du transit externe.

B. Sur les obligations d’investigation et de motivation de l’administration douanière lors de la détermination de la valeur en douane

1. Sur les obligations de l’administration douanière en matière d’investigation

66.

Dans le cadre de sa troisième question, la juridiction de renvoi demande à la Cour de la renseigner sur les obligations de l’administration douanière lorsque celle-ci applique la méthode de détermination de la valeur en douane figurant à l’article 30, paragraphe 2, sous a), du code des douanes. Ce texte prévoit que la valeur en douane est déterminée à partir de la valeur transactionnelle de marchandises identiques, vendues pour l’exportation à destination de l’Union et exportées au même moment ou à peu près au même moment que les marchandises à évaluer. Sur ce point, la juridiction de renvoi aimerait savoir si l’autorité douanière peut ne pas appliquer cette méthode lorsqu’elle ne dispose pas des données nécessaires ou si elle est tenue de s’adresser au producteur d’une marchandise pour l’obtention de données.

67.

Il convient de constater tout d’abord que, a priori, ni le code des douanes ni le règlement no 2454/93 n’imposent à l’administration douanière l’obligation de faire des démarches en vue de l’obtention, auprès du producteur des marchandises concernées, des données qui sont nécessaires à l’application de la méthode prévue à l’article 30, paragraphe 2, sous a), du code des douanes (ou d’une autre méthode). Ce n’est que dans le domaine de l’application de l’article 30, paragraphe 2, sous d), du code des douanes (méthode de la « valeur calculée » à partir du coût des matières, des bénéfices, etc.) qu’il est question de la possibilité, pour l’administration douanière, de vérifier les renseignements fournis par le producteur des marchandises concernées avec l’accord de ce producteur et les autorités d’un État tiers concerné, dans ce pays ( 30 ).

68.

L’administration douanière a, néanmoins, nécessairement certaines obligations de contrôle lors de la détermination de la valeur en douane. En effet, il résulte de l’économie des articles 29 à 31 du code des douanes que les différentes méthodes envisageables pour la détermination de la valeur en douane présentent un lien de subsidiarité entre elles ( 31 ). Cela signifie que l’administration douanière doit, dans chaque cas, vérifier avec la diligence requise si les conditions sont remplies pour l’application d’une méthode, avant de passer à la méthode suivante. À cette fin, le code des douanes accorde (avec certaines restrictions) ( 32 ) aux autorités douanières de l’État membre le droit d’obtenir des renseignements de la part de personnes directement ou indirectement intéressées aux opérations concernées, effectuées dans le cadre des échanges des marchandises ( 33 ).

69.

L’obligation des autorités douanières de vérifier avec diligence les conditions d’application des différentes méthodes de détermination de la valeur en douane va également dans le sens du système de subsidiarité qui régit l’application de ces méthodes, voulu par le législateur de l’Union. Comme le législateur n’a pas laissé aux autorités le libre choix des méthodes, lesdites autorités doivent tout d’abord s’efforcer d’utiliser les méthodes devant être appliquées en priorité, avant de pouvoir utiliser les autres méthodes.

70.

À ces obligations de l’administration douanière en matière de vérification et de diligence correspondent cependant, en contrepartie, certaines obligations des personnes participant aux échanges de marchandises en matière de coopération et de renseignement. Ainsi, il est notamment prévu à l’article 6, paragraphe 1, du code des douanes que, lorsqu’une personne sollicite des autorités douanières une décision relative à l’application de la réglementation douanière, elle fournit tous les éléments et documents nécessaires à ces autorités pour statuer. Par conséquent, dans le cas d’un opérateur économique qui, comme dans la présente espèce, aimerait bénéficier d’une méthode de détermination de la valeur en douane qui lui serait plus favorable, il ne semble pas disproportionné d’exiger qu’il fournisse, dans la mesure du possible, les données qui sont nécessaires pour l’application de cette méthode.

71.

Certaines dispositions du code des douanes et les dispositions d’application y relatives confirment d’ailleurs que les obligations de l’administration douanière doivent, en principe, être exercées en coopération avec les opérateurs économiques concernés. Ainsi, elles prévoient que, lorsque les autorités douanières ne sont pas en mesure d’accepter la valeur transactionnelle sans complément d’enquête, elles doivent donner au déclarant la possibilité de fournir tous les autres renseignements détaillés ( 34 ).

72.

Compte tenu de cette relation de coopération, l’argumentation développée par la Commission en l’espèce est convaincante. Selon elle, l’administration douanière doit, avant de pouvoir décider de ne pas appliquer l’article 30, paragraphe 2, sous a), du code des douanes, consulter toutes les informations et toutes les bases de données dont elle dispose et donner aux opérateurs économiques concernés la possibilité d’apporter les données nécessaires ( 35 ). En revanche, il convient de rejeter l’existence d’une obligation d’enquête auprès du producteur des marchandises concernées, étant donné que la mise en œuvre d’une telle obligation exigerait d’importantes démarches et toucherait, en règle générale, également des secrets d’affaires d’entreprises qui sont seulement concernées de manière indirecte.

73.

On ne voit cependant pas pourquoi cette solution devrait – comme le propose la Commission – être limitée à un cas de figure comme celui de l’espèce, où les marchandises ont été soustraites à la surveillance douanière dans le cadre du régime du transit. Rien n’indique en effet pourquoi, dans cette situation, il y aurait un affaiblissement du lien de subsidiarité entre les différentes méthodes de détermination de la valeur en douane et de la nécessité de vérifier, avec diligence, l’applicabilité de chacune des méthodes de manière successive.

74.

Conformément aux considérations précédemment énoncées, nous proposons par conséquent de répondre comme suit à la troisième question préjudicielle :

L’autorité douanière n’est pas tenue de s’adresser au producteur des marchandises concernées pour l’obtention des données qui sont nécessaires à l’application de l’article 30, paragraphe 2, sous a), du code des douanes. Avant de pouvoir décider de ne pas appliquer cette disposition, l’autorité doit cependant consulter toutes les sources d’information et les bases de données dont elle dispose et donner aux opérateurs économiques concernés la possibilité de fournir les données nécessaires à l’application de la disposition susmentionnée.

2. Sur les obligations de l’administration douanière en matière de motivation

75.

La deuxième, la quatrième et la cinquième question préjudicielle, qu’il convient d’examiner de manière conjointe, concernent, quant à elles, les obligations de l’administration douanière en matière de motivation s’agissant de la méthode choisie pour la détermination de la valeur en douane. Ainsi, la juridiction de renvoi aimerait savoir si l’administration douanière est tenue de motiver :

l’application de la méthode prévue à l’article 31 du code des douanes, au lieu de celle prévue aux articles 29 et 30 du code des douanes, pour la détermination de la valeur en douane (deuxième question préjudicielle) ;

la non-application des méthodes prévues à l’article 30, paragraphe 2, sous c) et d), du code des douanes, lorsqu’elle détermine le prix de marchandises similaires sur le fondement de l’article 151, paragraphe 3, du règlement no 2454/93 (quatrième question préjudicielle), et

si la décision doit contenir une motivation exhaustive indiquant en quoi consistent les données disponibles dans la Communauté au sens de l’article 31 du code des douanes, ou si une telle motivation peut être fournie plus tard par la production de preuves plus détaillées au cours de la procédure juridictionnelle (cinquième question préjudicielle).

76.

Il suffit de se reporter à l’article 6, paragraphe 3, du code des douanes pour trouver la réponse à ces questions. Aux termes de ce texte, les décisions prises par écrit qui ont des conséquences défavorables pour les personnes auxquelles elles s’adressent sont motivées par les autorités douanières.

77.

De plus, dans le domaine de l’application du droit de l’Union, les autorités nationales ont une obligation de motivation générale. Il est vrai que, dans le cas de l’application du droit de l’Union par un État membre, l’article 41 de la charte des droits fondamentaux n’est pas directement applicable ( 36 ). Toutefois, le droit à une bonne administration, qui y est garanti, reflète un principe général du droit de l’Union, de sorte que les exigences découlant de ce droit doivent être respectées lorsqu’un État membre met en œuvre le droit de l’Union ( 37 ).

78.

Par ailleurs, une motivation appropriée est également indispensable pour la sauvegarde du droit à une protection juridictionnelle effective, qui découle du principe d’effectivité. En effet, elle seule permet au particulier de décider en pleine connaissance de cause s’il est utile pour lui d’aller en justice. En même temps, il faut une motivation suffisante pour que les juridictions puissent exercer un contrôle sur la décision par laquelle une autorité refuse le bénéfice d’un droit conféré par le droit de l’Union ( 38 ).

79.

Premièrement, en accord avec ces exigences et vu le système de subsidiarité, déjà évoqué, qui régit l’application des méthodes prévues par le code des douanes en matière de détermination de la valeur en douane, il est évident que la décision de l’autorité douanière doit contenir des motifs suffisants quant aux raisons pour lesquelles il convient d’appliquer la méthode en douane choisie plutôt qu’une des méthodes prioritaires. Par conséquent, si l’administration douanière applique la méthode prévue à l’article 31 du code des douanes, elle doit exposer les raisons pour lesquelles les conditions de l’applicabilité des méthodes prévues aux articles 29 et 30 du code des douanes n’étaient pas remplies.

80.

Deuxièmement, il résulte également du lien de subsidiarité entre les méthodes de détermination de la valeur en douane, énumérées de manière successive, qu’il n’est pas nécessaire de motiver la non‑application des méthodes figurant après la méthode choisie. Comme l’article 151, paragraphe 3, du règlement no 2454/93 est la disposition d’exécution de l’article 30, paragraphe 2, sous b), du code des douanes, l’administration douanière n’est, lorsqu’elle détermine la valeur en douane sur le fondement de l’article 151, paragraphe 3, du règlement no 2454/93, pas tenue de motiver la non‑application des méthodes prévues à l’article 30, paragraphe 2, sous c) et d), du code des douanes.

81.

Troisièmement, l’obligation de motivation de l’administration douanière exige que celle-ci expose, dans la décision, le mode de calcul de la valeur en douane finale. Il faut donc, si cette valeur est déterminée en application de l’article 31 du code des douanes, qu’elle indique quelles données étaient disponibles dans l’Union et ont été utilisées en vue du calcul de la valeur en douane.

82.

Quatrièmement, l’exigence d’une motivation suffisante s’impose nécessairement dès la décision relative à la détermination de la valeur en douane. En effet, l’obligation de motivation est également censée documenter la manière dont procède l’administration lorsqu’elle examine l’applicabilité des différentes méthodes en matière de détermination de la valeur en douane. Cela permet de s’assurer que, pour chaque méthode, on a vérifié avec diligence si les conditions de leur application étaient remplies. Sans les renseignements nécessaires, il serait en effet très difficile de déterminer a posteriori si une telle vérification a eu lieu ou s’il s’agit d’une simple confirmation d’une décision prise pour d’autres motifs ( 39 ). Si l’administration douanière a, conformément aux articles 29 à 31 du code des douanes, vérifié avec diligence les conditions de l’applicabilité des différentes méthodes de manière successive, il devrait être facile pour elle d’exposer, dans la décision finale, les raisons pour lesquelles elle a appliqué la méthode de détermination de la valeur en douane choisie et non pas les méthodes figurant au-dessus de celle-ci.

83.

La possibilité d’un tel autocontrôle de l’administration douanière ne se présente que de manière limitée si la fourniture d’une motivation suffisante intervient seulement sur demande de l’intéressé ( 40 ). Cela est d’autant plus vrai dans le cas d’une communication ultérieure de la motivation dans le cadre d’une procédure juridictionnelle. D’ailleurs, dans cette hypothèse, la motivation ne permet pas à l’intéressé de décider en pleine connaissance de cause s’il est utile pour lui d’aller en justice.

84.

Il convient cependant de distinguer la question de l’obligation de motivation des autorités douanières de l’État membre de la question des conséquences juridiques d’une motivation insuffisante en droit national et donc de la question de savoir s’il est possible de régulariser un défaut de motivation dans le cadre d’une procédure juridictionnelle. Cette question n’est pas réglée dans le code des douanes et le droit de l’Union ne prévoit pas non plus de règle générale concernant les conséquences d’un défaut de motivation.

85.

Il appartient donc aux États membres de régler, dans le cadre de l’exercice de leur autonomie procédurale, les conséquences d’une violation de l’obligation de motivation par les autorités douanières et de prévoir si et dans quelle mesure une régularisation est possible dans le cadre d’une procédure juridictionnelle. Ce faisant, les États membres sont cependant tenus de respecter les principes d’équivalence et d’effectivité ( 41 ).

86.

Conformément aux considérations développées ci-dessus, nous proposons de répondre comme suit aux deuxième, quatrième et cinquième questions préjudicielles :

Il résulte de l’article 6, paragraphe 3 du code des douanes, ainsi que de l’obligation de motivation générale de l’administration douanière et du lien de subsidiarité entre les différentes méthodes de calcul de la valeur en douane, que l’administration douanière doit fournir des motifs suffisants dans sa décision quant aux raisons pour lesquelles elle a appliqué une méthode déterminée pour établir la valeur en douane plutôt qu’une des méthodes prioritaires. L’administration douanière est également tenue d’exposer suffisamment d’éléments dans sa décision indiquant comment et sur le fondement de quelles données la valeur en douane finale a été calculée. La question de savoir si et dans quelle mesure un défaut de motivation peut être régularisé par une communication ultérieure des motifs au cours de la procédure juridictionnelle est une question de droit national qui doit être réglée par les États membres dans le respect des principes d’équivalence et d’effectivité.

VI. Conclusion

87.

Au vu de ce qui précède, nous proposons à la Cour de répondre comme suit aux questions préjudicielles de l’Augstākā tiesa (Cour suprême, Lettonie) :

1)

Il convient d’interpréter l’article 29, paragraphe 1, du règlement (CEE) no 2913/92 du Conseil, du 12 octobre 1992, établissant le code des douanes communautaire, tel que modifié par le règlement (CE) no 1186/2009 du Conseil, du 16 novembre 2009, en ce sens que la méthode qui y est prévue pour la détermination de la valeur en douane doit uniquement être appliquée lorsque la valeur transactionnelle des marchandises concernées correspond à un prix pour l’exportation à destination du territoire douanier de l’Union européenne. Il importe peu à cet égard que la dette douanière naisse du fait de la soustraction des marchandises à la surveillance douanière dans le cadre du régime du transit externe.

2)

L’autorité douanière n’est pas tenue de s’adresser au producteur des marchandises concernées pour l’obtention des données qui sont nécessaires à l’application de l’article 30, paragraphe 2, sous a), du règlement no 2913/92. Avant de pouvoir décider de ne pas appliquer cette disposition, l’autorité doit cependant consulter toutes les sources d’information et les bases de données dont elle dispose et donner aux opérateurs économiques concernés la possibilité de fournir les données nécessaires à l’application de la disposition susmentionnée.

3)

Il résulte de l’article 6, paragraphe 3, du règlement no 2913/92, ainsi que de l’obligation de motivation générale de l’administration et du lien de subsidiarité entre les différentes méthodes de calcul de la valeur en douane, que l’administration douanière doit fournir des motifs suffisants dans sa décision quant aux raisons pour lesquelles elle a appliqué une méthode déterminée pour établir la valeur en douane plutôt qu’une des méthodes prioritaires. L’administration douanière est également tenue d’exposer suffisamment d’éléments dans sa décision indiquant comment et sur le fondement de quelles données la valeur en douane finale a été calculée. La question de savoir si et dans quelle mesure un défaut de motivation peut être régularisé par une communication ultérieure des motifs au cours de la procédure juridictionnelle est une question de droit national qui doit être réglée par les États membres dans le respect des principes d’équivalence et d’effectivité.


( 1 ) Langue originale : l’allemand.

( 2 ) Voir, concernant la notion de « soustraction à la surveillance douanière » figurant dans le règlement (CEE) no 2913/92 du Conseil, du 12 octobre 1992, établissant le code des douanes communautaire (JO 1992, L 302, p. 1), tel que modifié par le règlement (CE) no 1186/2009 du Conseil, du 16 novembre 2009 (JO 2009, L 324, p. 23) (ci-après le « code des douanes »), arrêt du 12 juin 2014, SEK Zollagentur (C‑75/13, EU:C:2014:1759, point 28, et jurisprudence citée).

( 3 ) Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce de 1994 (GATT), en annexe 1A de l’accord instituant l’Organisation mondiale du commerce (OMC), qui a été signé le 15 avril 1994 à Marrakech et approuvé par la décision 94/800/CE du Conseil du 22 décembre 1994 relative à la conclusion au nom de la Communauté européenne, pour ce qui concerne les matières relevant de ses compétences, des accords de négociations multilatérales du cycle de l’Uruguay (1986-1994) (JO 1994, L 336, p. 1, ci-après le « GATT de 1994 »). La disposition citée provient de l’accord général sur les tarifs douaniers et le commerce de 1947 (GATT), qui a été repris par le GATT de 1994.

( 4 ) JO 1994, L 336, p. 119.

( 5 ) Le règlement no 2913/92 devait, à l’origine, être remplacé par le règlement (CE) no 450/2008 du Parlement européen et du Conseil, du 23 avril 2008, établissant le code des douanes communautaire (code des douanes modernisé) (JO 2008, L 145, p. 1), mais, vu l’absence de dispositions d’application, ce règlement n’est jamais entièrement entré en vigueur. Le règlement no 450/2008 a été annulé par le règlement (UE) no 952/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 9 octobre 2013, établissant le code des douanes de l’Union (JO 2013, L 269, p. 1). Ce règlement n’est cependant applicable que depuis l’année 2013, voire l’année 2016, de sorte que, dans la présente espèce, il convient en tout cas encore d’appliquer le règlement no 2913/92.

( 6 ) Règlement de la Commission du 2 juillet 1993 fixant certaines dispositions d’application du règlement (CEE) no 2913/92 du Conseil établissant le code des douanes communautaire (JO 1993, L 253, p. 1), tel que modifié par le règlement (UE) no 1063/2010 de la Commission, du 18 novembre 2010 (JO 2010, L 307, p. 1).

( 7 ) Mise en italique par nos soins.

( 8 ) Voir, également, en ce sens, article 1er, paragraphe 1, de l’accord relatif à la mise en œuvre de l’article VII du GATT de 1994, aux termes duquel la valeur transactionnelle est « le prix effectivement payé ou à payer pour les marchandises lorsqu’elles sont vendues pour l’exportation à destination du pays d’importation » (mise en italique par nos soins).

( 9 ) Arrêts du 6 juin 1990, Unifert (C‑11/89, EU:C:1990:237, point 11), et du 28 février 2008, Carboni e derivati (C‑263/06, EU:C:2008:128, point 28).

( 10 ) Voir également, en ce sens, arrêt du 19 octobre 2000, Sommer (C‑15/99, EU:C:2000:574, point 22), aux termes duquel, dans le « système mis en place » par le code des douanes (à l’époque le règlement no 1224/80) la « valeur transactionnelle […] forme la base du calcul de la valeur en douane ». Voir, sur la nécessité d’interpréter le droit douanier de l’Union conformément au GATT de 1994, nos conclusions dans l’affaire Intertanko e.a. (C‑308/06, EU:C:2007:689, point 107 ainsi que jurisprudence citée).

( 11 ) Arrêt du 12 décembre 2013, Christodoulou e.a. (C‑116/12, EU:C:2013:825, points 41 à 43).

( 12 ) Voir, concernant la notion de « vente » figurant à l’article 29, paragraphe 1, du code des douanes, arrêt du 12 décembre 2013, Christodoulou e.a. (C‑116/12, EU:C:2013:825, point 45).

( 13 ) Arrêts du 16 novembre 2006, Compaq Computer International Corporation (C‑306/04, EU:C:2006:716, point 30) ; du 15 juillet 2010, Gaston Schul (C‑354/09, EU:C:2010:439, point 29), ainsi que du 12 décembre 2013, Christodoulou e.a. (C‑116/12, EU:C:2013:825, point 40).

( 14 ) Voir, sur ce point, Krockauer, L., Zollwert, 3e édition, Verlag für Wirtschaft und Verwaltung, Frankfurt am Main, 1974, p. 24.

( 15 ) La Convention, signée à Bruxellesle 15 décembre 1950, et ses principes ont été transposés en droit communautaire par le règlement (CEE) no 803/68 du Conseil, du 27 juin 1968, relatif à la valeur en douane des marchandises (JO 1968, L 148, p. 6). Cette convention a été remplacée en 1979 par l’accord relatif à la mise en œuvre de l’article VII de l’accord général sur les tarifs douaniers et le commerce, négocié dans le cadre du cycle de Tokyo du GATT (JO 1980, L 71, p. 107), qui a introduit la méthode de la valeur transactionnelle comme fondement pour le calcul de la valeur en douane et qui a été transposé en droit communautaire par le règlement (CEE) no 1224/80 du Conseil, du 28 mai 1980, relatif à la valeur en douane des marchandises (JO 1980, L 134, p. 1).

( 16 ) Voir, sur ce point, Krockauer, L., op. cit., p. 24 et 41.

( 17 ) Article 2, paragraphe 1, sous a), et article 3, paragraphe 1, sous a), de l’accord relatif à la mise en œuvre de l’article VII du GATT de 1994.

( 18 ) Article 30, paragraphe 2, sous a) et b), du code des douanes.

( 19 ) Article 7, paragraphe 2, sous e), de l’accord relatif à la mise en œuvre de l’article VII du GATT de 1994. Voir également article 6, paragraphe 1, sous b), du même accord, aux termes duquel, dans l’hypothèse où la valeur en douane serait fondée sur une valeur calculée, égale à la somme de différents éléments, le montant pour les bénéfices et frais généraux doit être égal à celui qui entre généralement dans les ventes qui sont faites par les producteurs du pays d’exportation pour l’exportation à destination du pays d’importation.

( 20 ) Article 31, paragraphe 2, sous e), du code des douanes. Voir également article 30, paragraphe 2, sous d), deuxième tiret, du code des douanes, aux termes duquel, dans l’hypothèse où la valeur en douane serait fondée sur une valeur calculée, égale à la somme de différents éléments, le montant représentant les bénéfices et les frais généraux doit être égal à celui qui entre généralement dans les ventes qui sont faites par des producteurs du pays d’exportation pour l’exportation à destination de l’Union.

( 21 ) Arrêts du 6 juin 1990, Unifert (C‑11/89, EU:C:1990:237, point 35) ; du 19 octobre 2000, Sommer (C‑15/99, EU:C:2000:574, point 25) ; du 16 novembre 2006, Compaq Computer International Corporation (C‑306/04, EU:C:2006:716, point 30) ; et du 19 mars 2009, Mitsui & Co. Deutschland (C‑256/07, EU:C:2009:167, point 20).

( 22 ) Voir article 192, paragraphe 1, du code des douanes et les dispositions relatives à la fourniture d’une garantie globale, figurant à l’article 379 du règlement no 2454/93 : ainsi, le principal obligé doit, le cas échéant, déposer un montant de référence et veiller à ce que les dettes douanières potentielles, relatives aux opérations en cours, ne dépassent pas ce montant de référence. De la même manière, le montant de référence peut être contrôlé par les autorités douanières pour chaque opération.

( 23 ) Arrêts du 5 mai 1981, Dürbeck (112/80, EU:C:1981:94, point 48), ainsi que du 24 mars 2011, ISD Polska e.a. (C‑369/09 P, EU:C:2011:175, point 122).

( 24 ) Arrêts du 14 juin 2016, Marchiani/Parlement (C‑566/14 P, EU:C:2016:437, point 77), ainsi que du 19 juillet 2016, Kotnik e.a. (C‑526/14, EU:C:2016:570, point 62) ; voir également arrêts du 22 juin 2006, Belgique et Forum 187/Commission (C‑182/03 et C‑217/03, EU:C:2006:416, point 147), ainsi que du 16 décembre 2008, Masdar (UK)/Commission (C‑47/07 P, EU:C:2008:726, points 81 et 86).

( 25 ) Arrêt du 10 décembre 2015, Veloserviss (C‑427/14, EU:C:2015:803, point 39).

( 26 ) Voir article 78 et article 220, paragraphe 2, sous b), du code des douanes, ainsi qu’arrêt du 10 décembre 2015, Veloserviss (C‑427/14, EU:C:2015:803, points 17 et suiv., spécialement points 28, 43 et 44).

( 27 ) Voir article 94, paragraphe 4, du code des douanes, ainsi qu’article 372, paragraphe 1, sous a), et article 380, paragraphes 2 et 3, du règlement no 2454/93.

( 28 ) Voir article 379, paragraphe 2, troisième alinéa, du règlement no 2454/93.

( 29 ) Voir article 95 du code des douanes.

( 30 ) Voir article 153, paragraphe 1, du règlement no 2454/93. Le point 1 des notes relatives à l’article 30, paragraphe 2, sous d), du code des douanes à l’annexe 23 (« Notes interprétatives en matière de valeur en douane ») du règlement no 2454/93 ajoute à cela : «1. En règle générale, la valeur en douane est déterminée, en vertu des présentes dispositions, sur la base de renseignements immédiatement disponibles dans la Communauté. Toutefois, afin de déterminer une valeur calculée, il pourra être nécessaire d’examiner les coûts de production des marchandises à évaluer et d’autres renseignements qui devront être obtenus en dehors de la Communauté. En outre, dans la plupart des cas, le producteur des marchandises ne relèvera pas de la juridiction des autorités des États membres. L’utilisation de la méthode de la valeur calculée sera, en général, limitée aux cas où l’acheteur et le vendeur sont liés et où le producteur est disposé à communiquer les données nécessaires concernant l’établissement des coûts aux autorités du pays d’importation et à accorder des facilités pour toutes vérifications ultérieures qui pourraient être nécessaires. » (Mise en italique par nos soins.)

( 31 ) Arrêts du 12 décembre 2013, Christodoulou e.a. (C‑116/12, EU:C:2013:825, points 41 à 43) ; du 16 juin 2016, EURO 2004. Hungary (C‑291/15, EU:C:2016:455, points 27 à 29), et du 9 mars 2017, GE Healthcare (C-173/15, EU:C:2017:195, points 75 à 77).

( 32 ) Voir article 153, paragraphe 1, du règlement no 2454/93.

( 33 ) Voir article 14 du code des douanes.

( 34 ) Voir, notamment, article 29, paragraphe 2, du code des douanes, ainsi que point 3 des notes interprétatives relatives à cette disposition à l’annexe 23 (« Notes interprétatives en matière de valeur en douane ») du règlement no 2454/93.

( 35 ) Voir, sur la nécessité de donner aux opérateurs économiques la possibilité de présenter leur point de vue utilement et dans les délais, arrêts du 18 décembre 2008, Sopropé (C‑349/07, EU:C:2008:746, points 36 et suiv.), ainsi que du 3 juillet 2014, Kamino International Logistics (C‑129/13 et C‑130/13, EU:C:2014:2041, point 38).

( 36 ) Voir, sur ce point, nos conclusions dans l’affaire Mellor (C‑75/08, EU:C:2009:32, point 25).

( 37 ) Arrêt du 8 mai 2014, N. (C‑604/12, EU:C:2014:302, points 49 et 50) ; voir également nos conclusions dans l’affaire Mellor (C‑75/08, EU:C:2009:32, point 33 et jurisprudence citée).

( 38 ) Voir, sur ce point, nos conclusions dans l’affaire Mellor (C‑75/08, EU:C:2009:32, points 28 et 31 ainsi que jurisprudence citée). Voir également arrêt du 23 février 2006, Molenbergnatie (C‑201/04, EU:C:2006:136, point 54).

( 39 ) Voir également, sur ce point, les considérations dans nos conclusions dans l’affaire Mellor (C‑75/08, EU:C:2009:32, points 29 et 30).

( 40 ) Cette possibilité prévue aux points 59 à 61, ainsi qu’au point 1 du dispositif de l’arrêt du 30 avril 2009, Mellor (C‑75/08, EU:C:2009:279), doit être rejetée en l’espèce, notamment en raison du fait que le code des douanes – contrairement à la directive à l’origine de cet arrêt – prévoit expressément une obligation de motivation pour les décisions imposant une charge.

( 41 ) Voir, s’agissant des limites des possibilités de régulariser des infractions au droit de l’Union, arrêt du 3 juillet 2008, Commission/Irlande (C‑215/06, EU:C:2008:380, points 57 et suiv.).

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