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Document 62015CC0678

Conclusions de l'avocat général M. M. Campos Sánchez-Bordona, présentées le 8 février 2017.
Mohammad Zadeh Khorassani contre Kathrin Pflanz.
Demande de décision préjudicielle, introduite par le Bundesgerichtshof.
Renvoi préjudiciel – Directive 2004/39/CE – Marchés d’instruments financiers – Article 4, paragraphe 1, point 2 – Notion de “services d’investissement” – Annexe I, section A, point 1 – Réception et transmission d’ordres portant sur un ou plusieurs instruments financiers – Inclusion éventuelle de l’intermédiation en vue de la conclusion d’un contrat de gestion de portefeuille.
Affaire C-678/15.

Court reports – general

ECLI identifier: ECLI:EU:C:2017:100

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. MANUEL CAMPOS SÁNCHEZ-BORDONA

présentées le 8 février 2017 ( 1 )

Affaire C‑678/15

Mohammad Zadeh Khorassani

contre

Kathrin Pflanz

[demande de décision préjudicielle formée par le Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice, Allemagne)]

«Protection des consommateurs — Marchés d’instruments financiers — Notion de “services et activités d’investissement” — Service de réception et de transmission d’ordres portant sur un ou plusieurs instruments financiers — Inclusion éventuelle de la fonction d’intermédiaire dans la conclusion d’un contrat visant à la gestion de portefeuille»

1. 

Le Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice, Allemagne) demande à la Cour de se prononcer sur l’une des modalités de prestation de services financiers régis par la directive 2004/39/CE ( 2 ). Il souhaite notamment savoir si l’activité d’une personne physique qui a servi d’intermédiaire dans la conclusion d’un contrat de gestion de portefeuille (souscrit entre un tiers et des sociétés d’investissement établies au Liechtenstein) peut relever des services entrant dans le champ d’application de cette directive.

2. 

D’une part, l’affaire est importante du point de vue général de la protection de l’investisseur. Du fait de l’asymétrie d’information entre les usagers de ces services et les entreprises les fournissant, de la complexité croissante des produits offerts et de l’absence de culture financière de grands pans de la population, conjuguées à d’autres facteurs, les particuliers peuvent être incités à prendre des décisions erronées (et portant gravement préjudice à leurs intérêts) en matière d’épargne, d’investissements ou d’endettement. Pour lutter contre ces phénomènes, auxquels certaines des crises récentes n’ont pas été étrangères, les législateurs ont adopté, malgré la libéralisation des marchés et leur haut degré de concurrence mondiale, des règles qui défendent la position du consommateur, en tentant de parvenir à un équilibre ( 3 ) entre leurs intérêts et ceux des opérateurs du marché. La directive 2004/39 répond précisément à ce modèle d’intervention.

3. 

D’autre part, d’une perspective plus axée sur le régime juridique particulier de cette directive, des questions se posent quant au rattachement normatif de certaines fonctions d’intermédiaire telles que celles à l’origine du litige au principal. Relèvent-elles de la directive 2004/39, ce qui renforcerait la protection des investisseurs, ou, au contraire, se trouvent-elles hors de son champ d’application ? La controverse porte notamment sur le point de savoir si la notion de « services financiers » se limite aux services fournis par les entreprises d’investissement qui reçoivent et exécutent des ordres d’investisseurs portant sur des instruments financiers particuliers. Une grande partie du débat a tourné autour de ce dernier adjectif.

I – Le cadre juridique

A – Le droit de l’Union

1. La directive 2004/39

4.

Le considérant 2 dispose ce qui suit :

« […] il convient d’atteindre le degré d’harmonisation nécessaire pour offrir aux investisseurs un niveau élevé de protection et pour permettre aux entreprises d’investissement de fournir leurs services dans toute la Communauté, qui constitue un marché unique, sur la base de la surveillance exercée dans l’État membre d’origine […] ».

5.

Aux termes du considérant 20 :

« Aux fins de la présente directive, l’activité de réception et de transmission d’ordres devrait également comprendre la mise en relation de deux ou plusieurs investisseurs permettant ainsi la réalisation d’une transaction entre ces investisseurs. »

6.

Conformément à l’article 1er, paragraphe 1 :

« La présente directive s’applique aux entreprises d’investissement et aux marchés réglementés. »

7.

L’article 3, paragraphe 1, prévoit ce qui suit :

« 1.   Les États membres peuvent choisir de ne pas appliquer la présente directive aux personnes dont ils sont l’État membre d’origine et qui :

ne sont pas autorisées à détenir des fonds ou des titres de clients et qui, pour cette raison, ne risquent à aucun moment d’être débitrices vis-à-vis de ceux-ci, et

ne sont pas autorisées à fournir des services d’investissement à l’exception de la réception et de la transmission des ordres concernant des valeurs mobilières et des parts d’organismes de placement collectif ainsi que la fourniture de conseil en investissement en liaison avec ces instruments financiers, et

dans le cadre de la fourniture de ce service, sont autorisées à transmettre les ordres uniquement aux :

i)

entreprises d’investissement agréées conformément à la présente directive ;

[…]. »

8.

L’article 4, paragraphe 1, contient les définitions suivantes :

« 1)

“entreprise d’investissement” : toute personne morale dont l’occupation ou l’activité habituelle consiste à fournir un ou plusieurs services d’investissement à des tiers et/ou à exercer une ou plusieurs activités d’investissement à titre professionnel ;

[…]

2)

“services et activités d’investissement” : tout service et toute activité répertoriés à la section A de l’annexe I et portant sur tout instrument visé à la section C de la même annexe ;

[…]

4)

“conseil en investissement” : la fourniture de recommandations personnalisées à un client, soit à sa demande soit à l’initiative de l’entreprise d’investissement, en ce qui concerne une ou plusieurs transactions portant sur des instruments financiers ;

5)

“exécution d’ordres pour le compte de clients” : le fait de conclure des accords d’achat ou de vente d’un ou de plusieurs instruments financiers pour le compte de clients ;

[…]

9)

“gestion de portefeuilles” : la gestion discrétionnaire et individualisée de portefeuilles incluant un ou plusieurs instruments financiers, dans le cadre d’un mandat donné par le client ;

[…]. »

9.

À l’annexe I, section A, sont mentionnés comme services et activités d’investissement :

« 1.

Réception et transmission d’ordres portant sur un ou plusieurs instruments financiers.

2.

Exécution d’ordres au nom de clients.

3.

Négociation pour compte propre.

4.

Gestion de portefeuille.

5.

Conseil en investissement.

[…]. »

2. La directive 2006/73/CE ( 4 )

10.

Conformément au considérant 81 :

« Les conseils d’ordre général concernant un type d’instrument financier ne constituent pas des conseils en investissement au sens de la directive 2004/39/CE, la présente directive précisant en effet qu’aux fins de la directive 2004/39/CE, le conseil en investissement doit être restreint aux conseils portant sur des instruments financiers particuliers. Toutefois, si une entreprise d’investissement donne à un client des conseils sur un type d’instrument financier en général, qu’elle présente comme adaptés à sa personne ou fondés sur un examen de sa situation personnelle, et qu’il s’avère en fait que ces conseils ne sont ni adaptés à ce client ni fondés sur un examen de sa situation personnelle, il est probable qu’en l’espèce – sous réserve des circonstances propres à chaque cas particulier – l’entreprise agit en contrevenant aux dispositions de l’article 19, paragraphes 1 ou 2, de la directive 2004/39/CE. Plus précisément, une entreprise qui donnerait de tels conseils serait susceptible de manquer à l’obligation d’agir d’une manière honnête, équitable et professionnelle servant au mieux les intérêts de ses clients qui lui incombe conformément à l’article 19, paragraphe 1. De tels conseils seraient également susceptibles de contrevenir à l’exigence de l’article 19, paragraphe 2, selon laquelle l’information qu’adresse l’entreprise à ses clients doit être correcte, claire et non trompeuse. »

11.

L’article 52 prévoit ce qui suit :

« Aux fins de la définition du “conseil en investissement” énoncée à l’article 4, paragraphe 1, point 4), de la directive 2004/39/CE, une recommandation est réputée “personnalisée” lorsqu’elle est adressée à une personne en raison de sa qualité d’investisseur ou d’investisseur potentiel, ou de sa qualité d’agent d’un investisseur ou d’investisseur potentiel.

Cette recommandation doit être présentée comme adaptée à cette personne, ou fondée sur l’examen de la situation propre à cette personne, et doit recommander la réalisation d’une opération relevant des catégories suivantes :

a)

l’achat, la vente, la souscription, l’échange, le remboursement, la détention ou la prise ferme d’un instrument financier particulier ;

b)

l’exercice ou le non-exercice du droit conféré par un instrument financier particulier d’acheter, de vendre, de souscrire, d’échanger ou de rembourser un instrument financier.

Une recommandation n’est pas réputée personnalisée si elle est exclusivement diffusée par des canaux de distribution ou destinée au public. »

B – Le droit allemand

12.

Les dispositions nationales applicables au litige se trouvent dans le Kreditwesengesetz (loi sur le secteur du crédit, ci-après le « KWG ») ( 5 ).

13.

L’article 1er du KWG dispose ce qui suit :

« 1a.   […] On entend par “services financiers” :

1)

la négociation d’opérations relatives à l’achat et à la vente d’instruments financiers (négociation d’investissements),

1a)

la fourniture de recommandations personnalisées à des clients ou à leurs représentants, en ce qui concerne des transactions portant sur des instruments financiers particuliers lorsque la recommandation est fondée sur un examen de la situation personnelle de l’investisseur ou est présentée comme adaptée à cette personne et n’est pas exclusivement diffusée par des canaux de distribution ou destinée au public (conseil en investissement),

[…]. »

14.

Conformément à l’article 32, paragraphe 1 du KWG :

« 1.   Toute personne qui souhaite […] fournir des services financiers sur le territoire national à titre professionnel ou pour un volume qui nécessite l’existence d’une entreprise organisée de façon commerciale doit obtenir l’agrément écrit du Bundesanstalt [für Finanzdienstleistungsaufsicht (office fédéral de contrôle des services financiers, Allemagne, ci-après le « BaFin »)] […]. »

15.

Aux termes de l’article 823, paragraphe 2, du Bürgerliches Gesetzbuch (code civil) :

« [L’]obligation [en réparation du dommage causé] incombe à celui qui contrevient à une loi protectrice des intérêts d’autrui. »

II – Le litige au principal et la question préjudicielle

16.

Au mois de novembre 2007, M. Mohammad Zadeh Khorassani est entré en contact avec Mme Kathrin Pflanz, qui lui a apparemment recommandé l’investissement « Grand-Slam ». Mme Pflanz ne disposait pas de l’agrément du BaFin en vue de la fourniture de services financiers au titre de l’article 32, paragraphe 1, du KWG.

17.

Le 19 novembre 2007, Mme Pflanz a conseillé à M. Khorassani de signer un contrat de services avec la société G.S.S. AG ainsi qu’un contrat de gestion de portefeuille avec la société D. AG, toutes deux établies au Liechtenstein.

18.

M. Khorassani a signé ces contrats, s’engageant à effectuer un versement initial, d’un montant de 20000 euros, puis des versements mensuels de 1000 euros majorés à chaque fois de 5 % d’agios. Au mois de décembre 2007, il avait payé au total 27000 euros, sur lesquels 19731,60 euros avaient été retenus à titre d’avance sur honoraires de gestion et 1285,71 euros à titre d’agios.

19.

M. Khorassani s’est rétracté des contrats et a demandé aux deux entreprises du Liechtenstein et à Mme Pflanz le remboursement des montants versés ainsi que des dommages-intérêts. Le Landgericht Berlin (tribunal régional de Berlin, Allemagne) a déclaré irrecevable le recours contre les deux sociétés pour défaut de compétence internationale et a considéré que le recours intenté contre Mme Pflanz n’était pas fondé.

20.

Après avoir obtenu un remboursement de 6803,03 euros, M. Khorassani a considéré sa demande satisfaite à concurrence de cette somme, mais a interjeté appel devant le Kammergericht (tribunal régional supérieur de Berlin, Allemagne), maintenant sa demande (visant au paiement d’une somme de 20196,97 euros, majorée des intérêts, et à la déclaration de non-lieu à statuer au surplus) à l’égard de Mme Pflanz.

21.

Le Kammergericht (tribunal régional supérieur de Berlin) a rejeté l’appel. Selon lui, M. Khorassani n’avait pas droit à des dommages-intérêts au titre des dispositions combinées de l’article 823, paragraphe 2, du code civil et de l’article 32, paragraphe 1, du KWG, étant donné que Mme Pflanz ne lui avait pas fourni de services soumis à agrément au sens de l’article 1er, paragraphe 1a, du KWG.

22.

Cette juridiction a reconnu qu’il y avait eu non seulement conseil en investissement, mais également négociation d’investissements (au sens des dispositions nationales précitées), car, après l’avoir conseillé, Mme Pflanz a fait signer ( 6 ) à M. Khorassani les documents correspondants. Toutefois, ni l’une ni l’autre activité ne portaient sur une opération (particulière) relative à l’achat et à la vente d’instruments financiers. Selon la juridiction d’appel, le point important était que ce soit un contrat de gestion de portefeuille qui ait été fourni à M. Khorassani, contrat qui devait servir par la suite à l’acquisition et à la vente ainsi qu’à la gestion d’instruments financiers particuliers, mais qui ne constituait pas lui-même un instrument financier.

23.

M. Khorassani a formé un pourvoi contre cet arrêt devant le Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice). Dans sa décision de renvoi, ce dernier considère que c’est à juste titre que la juridiction d’appel a considéré que Mme Pflanz n’avait pas fourni à M. Khorassani de conseils en investissement au sens de l’article 1er, paragraphe 1a, du KWG. Partant, il n’y a, selon lui, pas eu de violation de l’article 32, paragraphe 1, du KWG.

24.

Pour le Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice), des conseils en investissement ne sont pas fournis lorsqu’une activité de gestion de portefeuille financier ( 7 ) est recommandée sans qu’il soit fait référence, dans ce contexte, à des instruments financiers particuliers. Mme Pflanz n’a pas exercé d’activité de conseil, car les contrats qu’elle a recommandés avaient pour objet des services de gestion de portefeuille financier et qu’il n’a pas été constaté qu’elle aurait fourni en outre des recommandations visant à un investissement concret.

25.

En revanche, la conduite de Mme Pflanz consistant à inciter M. Khorassani à conclure un contrat de gestion de portefeuille suscite les doutes de la juridiction de renvoi. Selon le Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice), la solution du litige dépend du point de savoir si la fonction d’intermédiaire dans la conclusion de contrats de gestion de portefeuille relève des dispositions combinées de l’article 4, paragraphe 1, point 2, première phrase, et de l’annexe I, section A, point 1, de la directive 2004/39, dont le contenu est repris par les dispositions allemandes.

26.

Conformément à la loi allemande ( 8 ), on entend par « négociation d’investissements » la négociation d’opérations relatives à l’achat et à la vente d’instruments financiers, ce qui requiert une activité visant, in fine, à ce que le client conclue une affaire.

27.

Le Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice) reprend les constatations de la juridiction d’appel, selon lesquelles Mme Pflanz a négocié le contrat de gestion de portefeuille conclu par le requérant avec la société D. Il convient donc de déterminer si ce contrat constitue en soi une « opération relative à l’achat et à la vente d’instruments financiers » au sens de l’article 1er, paragraphe 1a, deuxième phrase, point 1, du KWG.

28.

La juridiction de renvoi affirme ne pas avoir encore tranché cette question et indique que, en Allemagne, le BaFin considère qu’un contrat de gestion de portefeuille constitue une opération relative à l’achat et à la vente d’instruments financiers, car il implique la réalisation de ces opérations au nom de l’investisseur ( 9 ). En revanche, dans la doctrine relative à l’article 1er, paragraphe 1a, deuxième phrase, point 1, du KWG et à l’article 2, paragraphe 3, première phrase, point 4, du Wertpapierhandelsgesetz (loi sur le commerce des valeurs mobilières), dont le libellé est identique à la première disposition, l’opinion majoritaire est que la négociation d’investissements ne saurait être limitée à des étapes intermédiaires, mais doit s’étendre à une transaction ayant pour objet des instruments financiers particuliers ; partant, la fonction d’intermédiaire dans la conclusion de contrats avec des gestionnaires de portefeuilles ne serait pas visée par cette notion.

29.

Ayant des doutes sur le point de savoir s’il convient d’interpréter strictement ou plus largement les dispositions combinées de l’article 4, paragraphe 1, point 2, première phrase, et de l’annexe I, section A, point 1, de la directive 2004/39, le Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice) a jugé nécessaire de poser à la Cour la question préjudicielle suivante :

« La réception et la transmission d’un ordre ayant pour objet une activité de gestion de portefeuille (article 4, paragraphe 1, point 9, de la directive 2004/39) sont-elles des services d’investissement au sens des dispositions combinées de l’article 4, paragraphe 1, point 2, première phrase, et de l’annexe I, section A, point 1, de la directive ? »

30.

Aucune des deux parties au litige au principal n’a déposé d’observations écrites au cours de la procédure préjudicielle ni assisté à l’audience qui s’est tenue le 16 novembre 2016, lors de laquelle les gouvernements allemand et britannique ainsi que la Commission européenne ont présenté leurs observations oralement.

III – L’analyse de la question préjudicielle

31.

Le Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice) a clairement délimité sa question préjudicielle, après avoir écarté la possibilité de qualifier l’intervention de Mme Pflanz ( 10 ), consistant à avoir suggéré à M. Khorassani de conclure un contrat de gestion de portefeuille avec les sociétés d’investissement du Liechtenstein, de « conseil en investissement » au sens de l’annexe I, section A, point 5, de la directive 2004/39. Selon lui, cette intervention ne pouvait pas être qualifiée de « service de ce type », puisqu’il ne s’agissait pas de recommandations personnalisées portant sur des instruments financiers particuliers.

32.

La Cour doit donc limiter sa réponse à la juridiction de renvoi et se contenter d’interpréter la directive 2004/39 quant au point de savoir si la réception et la transmission d’un ordre ayant pour objet une activité de gestion de portefeuille est un service d’investissement, son avis ne lui étant pas demandé s’agissant de la notion de « conseil en investissement ».

33.

Fixer le débat en ces termes est, selon moi, assez pertinent. Si, par la suite, le choix des sociétés gestionnaires de portefeuille suggérées ( 11 ) par Mme Pflanz s’avérait inapproprié, le comportement de celle-ci consistant à donner cette recommandation est, selon moi, plus important que la signature ultérieure, et presque dérivée, du contrat « induit » souscrit par M. Khorassani. Il serait paradoxal d’écarter l’obligation de disposer d’un agrément administratif (et, selon la thèse de la juridiction de renvoi, la responsabilité en découlant) pour le comportement le plus grave, à savoir avoir conseillé de confier une partie du patrimoine à deux entreprises données afin qu’elles le gèrent et, simultanément, exiger l’agrément (et engager la responsabilité en découlant en cas d’absence de ce dernier) pour le fait, presque instrumental, d’avoir envoyé ce contrat aux sociétés gestionnaires de portefeuille.

34.

Il convient, en définitive, de déterminer si un comportement tel que celui de Mme Pflanz constitue un service d’investissement soumis aux règles de la directive 2004/39, notamment un service de « réception et la transmission d’ordres portant sur un ou plusieurs instruments financiers ».

35.

Les argumentations dans la décision de renvoi et les observations écrites et orales montrent qu’il existe deux interprétations possibles de cette notion. Les gouvernements allemand, portugais et britannique défendent l’interprétation la plus large ou extensive, tandis que la Commission et le gouvernement polonais prônent l’interprétation la plus stricte ou restrictive. J’annonce déjà que je tends vers cette dernière, à savoir vers une réponse négative à la question posée par le Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice).

36.

Selon une jurisprudence constante de la Cour, il y a lieu, pour l’interprétation d’une disposition du droit de l’Union, de tenir compte des termes de celle-ci, de son contexte et des objectifs poursuivis par la réglementation dont elle fait partie ( 12 ). J’appliquerai donc ces mêmes critères d’interprétation (le critère littéral, le critère systématique et le critère téléologique) à la disposition en cause.

37.

Je commencerai par l’interprétation littérale. Aux termes de l’article 4, paragraphe 1, point 2, première phrase, de la directive 2004/39, on entend par « services et activités d’investissement »« tout service et toute activité répertoriés à la section A de l’annexe I et portant sur tout instrument visé à la section C de la même annexe ». Parmi ces services figurent la « réception et la transmission d’ordres portant sur un ou plusieurs instruments financiers» ( 13 ).

38.

La version en langue allemande ( 14 ) de cet article semble avoir un contenu plus restrictif que d’autres versions, comme les versions en langues espagnole, française, italienne, portugaise et anglaise ( 15 ). C’est pourquoi le gouvernement allemand souligne que l’expression « portant sur un ou plusieurs instruments financiers » (ou ses équivalents dans la plupart des versions linguistiques) pourrait ne pas exiger un rapport direct entre le contrat de gestion de portefeuille et les instruments financiers concrets. De ce point de vue, une négociation financière indirecte suffirait pour que l’activité relève de la disposition : ce serait le cas s’agissant de l’incitation à conclure un contrat de gestion de portefeuille, attitude qui serait, partant, qualifiée de « service financier » relevant du champ d’application de la directive 2004/39 dont la fourniture requiert l’agrément administratif pertinent.

39.

Bien que l’argumentation soit suggestive, elle ne me convainc pas complètement. Tout comme la Commission, je considère plutôt que l’élément clé pour interpréter l’annexe I, section A, point 1, de la directive 2004/39 est le terme « ordres », répété sans variation dans les différentes versions linguistiques (« Auftrag », « ordres », « ordini », « ordens »« orders »). La disposition parle de services financiers consistant dans la « réception et la transmission d’ordres » et ces derniers doivent, selon moi, concerner des transactions sur des instruments financiers particuliers ou spécifiques.

40.

Il est difficile, à mon sens, de recevoir et de transmettre un « ordre » s’il ne porte pas sur l’exécution d’opérations financières particulières, car, dans la terminologie habituelle utilisée sur ces marchés, ce terme contient l’idée de caractère concret. Bien que la directive 2004/39 n’utilise pas dans ce point de l’annexe la formule choisie par le législateur allemand à l’article 1er du KWG (« opérations relatives à l’achat et à la vente »), j’estime que la notion d’« ordres » est indissociable des instruments financiers particuliers relativement auxquels une acquisition, une cession ou une autre opération analogue est « ordonnée ». L’incitation générale à investir dans certains types d’actifs financiers serait plutôt une recommandation ou un conseil, mais non un « ordre » susceptible de « réception et de transmission ».

41.

Le fait que l’« exécution d’ordres au nom de clients », modalité de service financier visée à l’annexe I, section A, point 2, de la directive 2004/39, soit définie à l’article 4, paragraphe 1, point 5, de cette directive comme « le fait de conclure des accords d’achat ou de vente d’un ou de plusieurs instruments financiers pour le compte de clients » renforce cette interprétation ( 16 ).

42.

Il existe un lien étroit entre le service de « réception et de transmission d’ordres » et celui d’« exécution d’ordres au nom de clients ». Si l’entreprise fournissant ces deux services dispose de l’infrastructure et des possibilités appropriées, la réception et la transmission de l’ordre portant sur un produit particulier (un ou plusieurs) sont forcément liées à son exécution. Dans de telles circonstances, il n’aurait pas été nécessaire de distinguer les deux types de services, mais la directive 2004/39 a procédé à cette distinction, car il existe des entreprises de services financiers qui, n’ayant pas la capacité d’exécuter les ordres qu’elles reçoivent, doivent les transmettre à d’autres entreprises en mesure de le faire. Dans un tel cas, la « réception et la transmission » se distinguent de l’« exécution », mais les ordres restent les mêmes.

43.

Cela étant dit, tant la réception et la transmission d’ordres que leur exécution doivent porter sur des instruments financiers particuliers : sur ce type de marchés, il n’est pas possible d’exécuter des ordres généraux ni de les recevoir ni les transmettre si leur exécution ultérieure est irréalisable. Dans la directive 2004/39, les ordres ne peuvent être assimilés aux mandats généraux ni inclure l’activité consistant à conclure un contrat de gestion de portefeuille, qui ne suppose aucun ordre exécutable relatif à un instrument financier particulier.

44.

Contrairement à ce que le Royaume-Uni avance, je ne crois pas que cette interprétation soit compromise par le considérant 20 de la directive 2004/39 ( 17 ). Selon moi, l’activité consistant à mettre deux ou plusieurs investisseurs en relation, en tant qu’exemple hypothétique de réception et de transmission d’ordres, doit avoir pour objet, afin de relever des services financiers correspondants, une transaction concrète entre eux portant sur « un ou plusieurs » instruments de cette nature.

45.

On parvient, selon moi, à cette même conclusion en reliant de manière systématique la disposition concernée à d’autres dispositions plus ou moins proches.

46.

Afin de défendre l’interprétation large de l’annexe I, section A, point 1, de la directive 2004/39, les gouvernements allemand et britannique invoquent la réglementation distincte, d’une part, des services de conseils en investissement et, d’autre part, des services de réception et de transmission d’ordres de clients portant sur des instruments financiers :

Conformément au considérant 81 et à l’article 52 de la directive 2006/73, les conseils d’ordre général concernant un type d’instrument financier ne constituent pas des conseils en investissement au sens de la directive 2004/39, cette notion étant restreinte aux conseils portant sur des instruments financiers particuliers.

En revanche, la directive 2004/39 et la directive 2006/73 ne contiennent pas de limitation similaire s’agissant des services de réception et de transmission d’ordres.

47.

Il y aurait donc lieu de considérer, selon les gouvernements allemand et britannique, que les ordres ne doivent pas nécessairement porter sur des instruments financiers particuliers. Partant, l’annexe I, section A, point 1, de la directive 2004/39 ne pourrait, selon eux, être interprétée de manière restrictive, car, si le législateur avait souhaité introduire une telle limitation, il l’aurait fait.

48.

Cet argument a contrario ne parvient pas non plus à me convaincre. La restriction de la notion de « conseil en investissement » à des instruments financiers particuliers mentionnée au considérant 81 et à l’article 52 de la directive 2006/73 s’explique en vue d’éviter que ce dernier inclue les conseils d’ordre général sur un type d’instrument financier ( 18 ). L’intention de ne pas soumettre (à ce stade de la réglementation) ( 19 ) les conseils d’ordre général aux exigences de la directive 2004/39 explique l’introduction expresse de la mention aux « instruments financiers particuliers » afin de définir les contours, positifs et négatifs, de cette notion.

49.

Cette même spécification n’était toutefois pas nécessaire pour les services financiers de réception et de transmission d’ordres, car ils étaient (et sont) déjà liés en soi aux « ordres » d’exécution qui, par définition, contiennent un mandat relatif à des instruments financiers particuliers. Il aurait été superflu de le rappeler à nouveau dans la directive 2006/73 relativement à ces services.

50.

En outre, comme la Commission l’indique à juste titre, une spécification relative aux services de conseil en investissement insérée dans une directive d’exécution (ici la directive 2006/73) ne saurait servir de fondement à l’interprétation a contrario d’une disposition de la directive de base (la directive 2004/39) relative aux services financiers de réception et de transmission d’ordres.

51.

En réalité, on pourrait dire que tous les services et activités d’investissement prévus à l’annexe I, section A, de la directive 2004/39 portent sur des transactions sur des instruments financiers particuliers. Le conseil en investissement est le seul qui pouvait susciter des doutes et, afin de les dissiper, la directive d’exécution (la directive 2006/73) a expressément ajouté que le conseil n’entrerait dans son champ d’application que s’agissant d’« instruments financiers particuliers ».

52.

En résumé, lorsqu’une personne intervient en tant qu’intermédiaire entre le client et la société d’investissement, en suggérant au premier de confier la gestion de ses actifs à la seconde, elle n’agit ni n’opère, en principe, avec aucun instrument financier particulier. Ce sont les sociétés gestionnaires du portefeuille du client qui, ultérieurement, avec son accord ou sur son mandat, préciseront les instruments financiers au moyen desquels l’investissement se matérialisera.

53.

L’application des critères d’interprétation téléologique ou finaliste me conduit également à répondre à la question de la juridiction de renvoi par la négative.

54.

Ainsi que la Cour l’a indiqué ( 20 ), comme il ressort en particulier des considérants 2, 5 et 44 de la directive 2004/39, les objectifs de celle-ci consistent, notamment, en la protection des investisseurs, en la préservation de l’intégrité et de l’efficacité globale du système financier ainsi qu’en la transparence des transactions.

55.

Les gouvernements allemand, portugais et britannique ont invoqué la protection des investisseurs, abondamment reprise dans la directive 2004/39, pour justifier l’interprétation large de l’annexe I, section A, point 1, de cette directive. La fonction d’intermédiaire dans la conclusion d’un contrat de gestion de portefeuille serait, de ce point de vue, équivalente à la « réception et la transmission d’ordres portant sur un ou plusieurs instruments financiers ».

56.

Ces mêmes gouvernements affirment que l’interprétation qu’ils proposent est la plus cohérente avec l’objectif visant à atteindre un niveau élevé de protection des investisseurs, car elle permettrait de soumettre ces cas de négociation financière indirecte au champ d’application de la directive 2004/39. Les opérateurs tels que Mme Pflanz seraient par conséquent tenus, en Allemagne, de disposer de l’agrément administratif du BaFin et seraient soumis à son contrôle.

57.

La protection des investisseurs est certes un objectif fondamental de la directive 2004/39 ( 21 ), qui se reflète dans les exigences imposées aux entreprises d’investissement dans leurs relations avec les utilisateurs de leurs services : elles doivent agir, conformément à l’article 19, paragraphes 1 et 2, d’une manière honnête, équitable et professionnelle qui serve au mieux les intérêts desdits clients, à qui elles doivent donner des informations correctes, claires et non trompeuses.

58.

Toutefois, l’application des règles de protection des investisseurs ne peut conduire à des résultats disproportionnés, comme le serait l’extension des contrôles de la directive 2004/39 à tout opérateur ou à tout type de services financiers ( 22 ). Une bonne intention, comme l’est sans nul doute celle inspirant la thèse des gouvernements tentant d’étendre le plus possible le champ d’application de cette directive afin de protéger les investisseurs de comportements tels que ceux en cause dans le litige au principal, ne saurait aboutir à une interprétation du droit en vigueur allant à l’encontre de son sens propre.

59.

La directive 2004/39 prévoit certaines limites, à l’intérieur desquelles l’objectif de protection de l’investisseur doit s’appliquer, sans les outrepasser. D’une part, son article 4, paragraphe 1, point 1, n’inclut dans la définition de la notion d’« entreprise d’investissement » que les personnes morales fournissant de manière habituelle et professionnelle des services financiers à des tiers, bien qu’il autorise les États membres à inclure des personnes physiques dans cette définition sous certaines conditions.

60.

D’autre part, l’article 3, paragraphe 1, de la directive 2004/39 permet également aux États membres de réglementer par des dispositions nationales et d’exclure du champ d’application de cette directive l’activité des personnes n’étant pas autorisées à détenir des fonds ou des titres de clients et pouvant uniquement, lorsqu’elles sont autorisées à transmettre des ordres en vue de leur exécution par des entreprises d’investissement, recevoir et transmettre des ordres concernant des valeurs mobilières et des parts d’organismes de placement collectif.

61.

Je cite ces deux dispositions afin de souligner que la protection de l’utilisateur du service financier, en tant que partie la plus « faible » de l’équation, ne justifie pas de renoncer aux exigences inhérentes à l’interprétation correcte des dispositions, a fortiori si ces dernières laissent la voie à d’autres modalités de sauvegarde des droits et des intérêts de l’investisseur, comme en l’espèce.

62.

À cet égard, pour parvenir à l’équilibre patrimonial auquel M. Khorassani aspire lorsqu’il demande la restitution de son investissement, il n’est pas indispensable de « distordre » la notion de « réception et de transmission d’ordres portant sur un ou plusieurs instruments financiers » afin d’y inclure des comportements antérieurs (en l’espèce, la fonction d’intermédiaire dans la conclusion d’un contrat de gestion de portefeuille) étrangers en soi aux termes dans lesquels la gestion effective du portefeuille sera faite ultérieurement.

63.

La protection de l’investisseur est suffisamment garantie par la directive 2004/39, étant donné que l’entreprise gestionnaire de portefeuilles qui propose à l’investisseur l’exécution d’ordres (c’est bien le cas cette fois-ci) portant sur des instruments financiers particuliers assume les responsabilités inhérentes à sa position juridique.

64.

M. Khorassani (qui, par ailleurs, ne pouvait ignorer qu’il investissait par le truchement d’entités financières ne résidant pas en Allemagne) peut agir contre les sociétés établies au Liechtenstein conformément aux clauses de son contrat de gestion de portefeuille relatives au for compétent. S’il s’agissait du Liechtenstein, sa protection juridique en tant que client serait garantie, étant donné que la directive 2004/39 est applicable dans l’Espace économique européen (EEE), dont le Liechtenstein fait partie, ce dernier n’étant par conséquent pas un pays tiers aux fins de cette directive ( 23 ).

65.

Puisque le client a la possibilité d’agir contre l’entreprise gestionnaire du portefeuille, je ne vois pas la nécessité d’étendre le régime de la directive 2004/39 à la personne ayant uniquement servi d’intermédiaire dans la signature du contrat de gestion de portefeuille. L’objectif consistant à garantir la protection des intérêts de l’investisseur, lorsqu’ils sont dûment sauvegardés par d’autres dispositions de cette directive, ne requiert pas – j’insiste sur ce point – de procéder à une interprétation juridiquement très exagérée des dispositions litigieuses.

66.

Enfin, je dois ajouter une précision, dans le droit-fil des observations du gouvernement polonais. Les informations données dans la décision de renvoi ne permettent pas de déterminer si Mme Pflanz était ou non un agent lié aux deux entreprises d’investissement du Liechtenstein, ce qu’il appartient aux juridictions nationales de clarifier ( 24 ).

67.

S’il s’agissait d’un agent lié, il serait nécessaire de tenir compte de l’article 23 de la directive 2004/39, qui impose une série d’obligations et de contrôles à l’entreprise financière faisant appel à des agents liés « aux fins de promouvoir ses services, de démarcher des clients ou des clients potentiels, de recevoir les ordres de ceux-ci et de les transmettre, de placer des instruments financiers ainsi que de fournir des conseils sur de tels instruments financiers et les services qu’elle propose ».

68.

Dans un tel cas, puisque la fonction d’intermédiaire dans la conclusion d’un contrat de gestion de portefeuille serait l’une des activités qu’un agent lié pourrait mener en faveur de l’entreprise ayant fait appel à lui, cet agent devrait également respecter les règles de conduite pour la fourniture de services fixées à l’article 19 de la directive 2004/39. Cette disposition prévoit notamment, à son paragraphe 1, l’obligation que l’agent lié agisse « d’une manière honnête, équitable et professionnelle qui serve au mieux les intérêts desdits clients et se conforme […], en particulier, aux principes énoncés aux paragraphes 2 à 8 ». Il incombe, je le répète, au juge de renvoi (ou, le cas échéant, aux juridictions inférieures) de déterminer si ces dispositions peuvent s’appliquer dans le litige au principal et d’en tirer les conséquences juridiques pertinentes.

IV – Conclusion

69.

Eu égard aux considérations qui précèdent, je propose à la Cour de répondre à la question préjudicielle posée par le Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice, Allemagne) comme suit :

Dans des circonstances telles que celles en cause au principal, la fonction d’intermédiaire dans la conclusion d’un contrat de gestion de portefeuille ne constitue pas un service d’investissement au sens des dispositions combinées de l’article 4, paragraphe 1, point 2, première phrase, et de l’annexe I, section A, point 1, de la directive 2004/39/CE du Parlement européen et du Conseil, du 21 avril 2004, concernant les marchés d’instruments financiers, modifiant les directives 85/611/CEE et 93/6/CEE du Conseil et la directive 2000/12/CE du Parlement européen et du Conseil et abrogeant la directive 93/22/CEE du Conseil.


( 1 ) Langue originale : l’espagnol.

( 2 ) Directive du Parlement européen et du Conseil du 21 avril 2004 concernant les marchés d’instruments financiers, modifiant les directives 85/611/CEE et 93/6/CEE du Conseil et la directive 2000/12/CE du Parlement européen et du Conseil et abrogeant la directive 93/22/CEE du Conseil (JO 2004, L 145, p. 1). Elle est généralement connue sous le nom de « directive MiFID I ».

( 3 ) Le fond du problème est l’affrontement entre des conceptions distinctes de la position juridique des utilisateurs de services financiers. Pour les uns, l’excès de protection équivaudrait presque à assimiler ces derniers, en pratique, aux personnes inaptes à donner leur consentement. Pour les autres, au contraire, s’agissant d’opérations complexes impliquant la prise de risques (comme c’est le propre des décisions financières), les obligations d’information préalable ne semblent pas suffisantes et il a été décidé de les compléter par des conditions strictes et des garanties ex ante.

( 4 ) Directive de la Commission du 10 août 2006 portant mesures d’exécution de la directive 2004/39 du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne les exigences organisationnelles et les conditions d’exercice applicables aux entreprises d’investissement et la définition de certains termes aux fins de ladite directive (JO 2006, L 241, p. 26).

( 5 ) Loi du 9 septembre 1998 (BGB1. 1998 I, p. 2776), modifiée par la loi du 16 juillet 2007 (BGB1. 2007 I, p. 1330).

( 6 ) La décision de renvoi n’est pas très explicite dans sa description de cette partie des faits.

( 7 ) Il invoque à cet effet l’article 1er, paragraphe 1a, deuxième phrase, point 3, du KWG et l’article 4, paragraphe 1, point 9, de la directive 2004/39.

( 8 ) Article 1er, paragraphe 1a, deuxième phrase, point 1a, du KWG.

( 9 ) Elle ajoute que cette interprétation a été confirmée par deux juridictions administratives dans des décisions de première instance rendues en référé, qui se sont appuyées à cet égard sur le libellé de la loi (« Geschäfte über », « opérations relatives à »), dont il ne résulte pas, selon elles, qu’il vise uniquement la négociation de l’acte juridique qui a directement pour effet l’acquisition juridique de l’instrument financier.

( 10 ) La décision de renvoi ne précise pas si Mme Pflanz intervenait à titre professionnel ou purement personnel ni si elle le faisait de manière occasionnelle ou habituelle. Comme le gouvernement allemand l’a reconnu lors de l’audience, la directive 2004/39 telle que transposée en droit national ne s’applique dans ce pays qu’aux personnes physiques qui fournissent leurs services à titre professionnel.

( 11 ) Comme le gouvernement allemand l’a indiqué lors de l’audience, Mme Pflanz exerçait en tant qu’« ambassadrice », en proposant à M. Khorassani le contrat de gestion de portefeuille auquel celui-ci souscrivait et que Mme Pflanz remettait par la suite à la société gestionnaire. Le gouvernement allemand considérait donc que le problème posé dans la présente affaire avait plus trait à la recommandation de conclure un contrat (comportement qu’il qualifiait de « fautif ») qu’à la transmission du contrat déjà signé.

( 12 ) Arrêts du 16 juillet 2015, Lanigan (C‑237/15 PPU, EU:C:2015:474, point 35), et du 8 novembre 2016, Ognyanov (C‑554/14, EU:C:2016:835, point 31).

( 13 ) Annexe I, section A, point 1.

( 14 )

( 15 ) « [R]ecepción y transmisión de órdenes de clientes en relación con uno o más instrumentos financieros » dans la version en langue espagnole ; « réception et transmission d’ordres portant sur un ou plusieurs instruments financiers » dans la version en langue française ; « ricezione e trasmissione di ordini riguardanti uno o più strumenti finanziari » dans la version en langue italienne ; « recepção e transmissão de ordens relativas a um ou mais instrumentos financeiros » dans la version en langue portugaise et « reception and transmission of orders in relation to one or more financial instruments » dans la version en langue anglaise.

( 16 ) Mise en italique par mes soins.

( 17 ) Rappelons que, aux termes de ce considérant, « [a]ux fins de la présente directive, l’activité de réception et de transmission d’ordres devrait également comprendre la mise en relation de deux ou plusieurs investisseurs permettant ainsi la réalisation d’une transaction entre ces investisseurs ».

( 18 ) Arrêt du 30 mai 2013, Genil 48 et Comercial Hostelera de Grandes Vinos (C‑604/11, EU:C:2013:344, points 51 et 52).

( 19 ) Il convient de rappeler que le conseil en investissement a été qualifié de « type de service financier » pour la première fois dans la directive 2004/39, la directive 93/22/CEE du Conseil, du 10 mai 1993, concernant les services d’investissement dans le domaine des valeurs mobilières (JO 1993, L 141, p. 27) ne l’incluant pas. Il serait illogique que la directive 93/22 ait inclus la fonction d’intermédiaire dans la conclusion d’un contrat de gestion de portefeuille en tant que service financier de réception et de transmission d’ordres et que cela ne s’applique pas aux services de conseil en investissement.

( 20 ) Arrêt du 22 mars 2012, Nilaş e.a. (C‑248/11, EU:C:2012:166, point 48).

( 21 ) Il convient de faire observer que cette directive n’harmonise pas complètement la fourniture de services financiers et se contente de procéder à une harmonisation partielle, comme il ressort de son considérant 2, aux termes duquel « il convient d’atteindre le degré d’harmonisation nécessaire pour offrir aux investisseurs un niveau élevé de protection et pour permettre aux entreprises d’investissement de fournir leurs services dans toute la Communauté, qui constitue un marché unique, sur la base de la surveillance exercée dans l’État membre d’origine ».

( 22 ) En ce sens, la Cour a conclu, dans son arrêt du 3 décembre 2015, Banif Plus Bank (C‑312/14, EU:C:2015:794), que certaines opérations de change effectuées par un établissement de crédit en vertu de clauses d’un contrat de prêt libellé en devise, consistant à fixer le montant du prêt sur la base du cours d’achat de la devise applicable lors du déblocage des fonds et à déterminer les montants des mensualités sur la base du cours de vente de cette devise applicable lors du calcul de chaque mensualité, ne constituent pas un service ou une activité d’investissement au sens de l’article 4, paragraphe 1, point 2, de la directive 2004/39.

( 23 ) La directive 2014/65/UE du Parlement européen et du Conseil, du 15 mai 2004, concernant les marchés d’instruments financiers et modifiant la directive 2002/92/CE et la directive 2011/61/UE (JO 2014, L 173, p. 349) et le règlement (UE) no 600/2014 du Parlement européen et du Conseil, du 15 mai 2014, concernant les marchés d’instruments financiers et modifiant le règlement (UE) no 648/2012 (JO 2014, L 173, p. 84), qui remplaceront la directive 2004/39 à partir du 3 janvier 2018, prévoient, respectivement à leurs articles 39 à 42 et 46 à 49, un système d’enregistrement d’entreprises de pays tiers qui souhaitent proposer leurs services financiers dans l’Union européenne sans nécessité d’établir une succursale, à condition que le régime de surveillance de leur État d’origine soit considéré par la Commission comme équivalent à celui de l’Union.

( 24 ) Interrogé sur ce point lors de l’audience, le gouvernement allemand a affirmé ne pas avoir d’informations supplémentaires sur les faits.

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