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Document 62015CC0147

Conclusions de l'avocat général Mme J. Kokott, présentées le 21 avril 2016.
Città Metropolitana di Bari contre Edilizia Mastrodonato Srl.
Demande de décision préjudicielle, introduite par le Consiglio di Stato.
Renvoi préjudiciel – Protection de l’environnement – Gestion des déchets – Directive 2006/21/CE – Article 10, paragraphe 2 – Remblayage des trous d’excavation avec des déchets autres que les déchets d’extraction – Mise en décharge ou valorisation desdits déchets.
Affaire C-147/15.

Court reports – general

ECLI identifier: ECLI:EU:C:2016:292

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

MME JULIANE KOKOTT

présentées le 21 avril 2016 ( 1 )

Affaire C‑147/15

Provincia di Bari

contre

Edilizia Mastrodonato srl

[demande de décision préjudicielle

formée par le Consiglio di Stato (Conseil d’État, Italie)]

«Directive 2006/21/CE — Déchets de l’industrie extractive — Directive 1999/31/CE — Mise en décharge — Comblement d’une carrière désaffectée au moyen de déchets — Valorisation de déchets»

I – Introduction

1.

La région des Pouilles (Italie) met de manière récurrente la Cour face à des questions de droit de l’environnement : comment certaines décisions d’une administration municipale doivent-elles être appréciées au regard de la directive 92/43/CEE ( 2 ) ( 3 ) ? Cette directive interdit-elle l’implantation d’éoliennes dans des zones de protection des oiseaux ( 4 ) ? En outre y avait-il à cet endroit une décharge clandestine, ou pas ( 5 ) ? Ces questions ne sont que quelques exemples des procédures de droit environnemental dont cette région est à l’origine.

2.

Ces affaires ont peut-être contribué à renforcer la prise de conscience du problème par les organismes compétents, de telle sorte que ceux-ci suivent d’un œil critique le projet de comblement d’une ancienne carrière au moyen de déchets. Ils s’opposent à l’auteur de ce projet sur la question de savoir s’il s’agit d’appliquer les exigences strictes de la directive 1999/31/CE ( 6 ) ou seulement le régime général des déchets.

3.

Le litige a pour origine le fait que la directive 2006/21/CE ( 7 ) fait référence, concernant le comblement de trous d’excavation au moyen de déchets, à la directive sur les décharges. La Cour devra déterminer ici s’il s’agit d’une référence à un fondement juridique ou à une conséquence juridique, c’est-à-dire si les conditions d’application de la directive sur les décharges doivent être remplies ou si ses conséquences juridiques sont applicables sans autre examen au comblement. Cette question est influencée par la différence entre les versions linguistiques de la référence.

4.

En outre, la Cour devra en particulier examiner si et à quelles conditions le comblement d’une carrière au moyen de déchets est une opération de valorisation ou une opération d’élimination des déchets.

II – Cadre juridique

A – La directive sur les déchets de l’industrie extractive

5.

L’article 1er de la directive sur les déchets de l’industrie extractive définit son objet :

« La présente directive prévoit des mesures, des procédures et des orientations destinées à prévenir ou à réduire autant que possible les effets néfastes sur l’environnement, en particulier sur l’eau, l’air, le sol, la faune et la flore et les paysages, ainsi que les risques pour la santé humaine résultant de la gestion des déchets des industries extractives. »

6.

Le champ d’application de la directive sur les déchets de l’industrie extractive ressort de l’article 2 :

« 1.   Sous réserve des paragraphes 2 et 3, la présente directive s’applique à la gestion des déchets résultant de la prospection, de l’extraction, du traitement et du stockage de ressources minérales, ainsi que de l’exploitation de carrières, ci-après dénommés “déchets d’extraction”.

[…]

4.   Sans préjudice d’une autre législation communautaire, les déchets entrant dans le champ d’application de la présente directive ne relèvent pas de la [directive sur les décharges]. »

7.

L’article 10 de la directive sur les déchets de l’industrie extractive régit le comblement des trous d’excavation et fait référence à cet égard à la directive sur les décharges :

« 1.   Les États membres s’assurent que l’exploitant, lorsqu’il replace les déchets d’extraction dans les trous d’excavation à des fins de remise en état et de construction, qu’ils soient créés par une extraction en surface ou par une extraction souterraine, prend les mesures appropriées pour […]

2.   La [directive sur les décharges] continue de s’appliquer aux déchets autres que les déchets d’extraction utilisés pour combler les trous d’excavation. »

8.

Le considérant 20 de la directive sur les déchets de l’industrie extractive explique cette disposition comme suit :

« Les déchets replacés dans les trous d’excavation à des fins de remise en état ou à des fins de construction liées au processus d’extraction des minéraux, telles que la création ou le maintien, dans les trous d’excavation, de voies d’accès pour des machines, de rampes de roulage, de cloisons, de merlons ou de bermes, doivent également être soumis à un certain nombre d’exigences afin de protéger les eaux superficielles et souterraines, d’assurer la stabilité des déchets et de garantir une surveillance appropriée après la cessation de ces opérations. En conséquence, ces déchets ne devraient pas être soumis aux exigences prévues par la présente directive, qui concernent exclusivement les “installations de gestion de déchets”, sauf en ce qui concerne les exigences qui sont mentionnées dans la disposition particulière sur les trous d’excavation. »

B – La directive sur les décharges

9.

Le considérant 15 de la directive sur les décharges concerne l’utilisation de déchets pour le comblement.

« considérant que la valorisation, conformément à la directive 75/442/CEE [JO 1975, L 194, p. 39], des déchets inertes ou des déchets non dangereux appropriés, par leur utilisation pour des travaux d’aménagement ou de réhabilitation et de remblai ou à des fins de construction, peut ne pas constituer une mise en décharge ».

10.

L’article 2 de la directive sur les décharges définit notamment les notions de « décharge » et de « traitement » :

« Aux fins de la présente directive, on entend par :

[…]

e)

déchets inertes, les déchets qui ne subissent aucune modification physique, chimique ou biologique importante. Les déchets inertes ne se décomposent pas, ne brûlent pas et ne produisent aucune autre réaction physique ou chimique, ne sont pas biodégradables et ne détériorent pas d’autres matières avec lesquelles ils entrent en contact, d’une manière susceptible d’entraîner une pollution de l’environnement ou de nuire à la santé humaine. La production totale de lixiviats et la teneur des déchets en polluants ainsi que l’écotoxicité des lixiviats doivent être négligeables et, en particulier, ne doivent pas porter atteinte à la qualité des eaux de surface et/ou des eaux souterraines ;

[…]

g)

décharge, un site d’élimination des déchets par dépôt des déchets sur ou dans la terre (c’est-à-dire en sous-sol), y compris :

les décharges internes (c’est-à-dire les décharges où un producteur de déchets procède lui-même à l’élimination des déchets sur le lieu de production),

et

un site permanent (c’est-à-dire pour une durée supérieure à un an) utilisé pour stocker temporairement les déchets

à l’exclusion

des installations où les déchets sont déchargés afin de permettre leur préparation à un transport ultérieur en vue d’une valorisation, d’un traitement ou d’une élimination en un endroit différent,

et

du stockage des déchets avant valorisation ou traitement pour une durée inférieure à trois ans en règle générale

ou

du stockage des déchets avant élimination pour une durée inférieure à un an ;

h)

traitement, les processus physiques, thermiques, chimiques ou biologiques, y compris le tri, qui modifient les caractéristiques des déchets de manière à en réduire le volume ou le caractère dangereux, à en faciliter la manipulation ou à en favoriser la valorisation ;

[…] »

11.

Le champ d’application de la directive sur les décharges est régi par l’article 3 :

« 1.   Les États membres appliquent la présente directive à toute décharge au sens de l’article 2, point g).

2.   Sans préjudice de la législation communautaire existante, sont exclus du champ d’application de la présente directive :

[…]

l’utilisation dans les décharges de déchets inertes appropriés pour des travaux d’aménagement ou de réhabilitation et de remblai ou à des fins de construction,

[…] »

12.

Conformément à l’article 6, sous a), les États membres sont tenus d’assurer que :

« seuls les déchets déjà traités soient mis en décharge. Cette disposition ne peut s’appliquer […] ».

C – La directive 2008/98/CE

13.

Les principes fondamentaux du droit de l’Union en matière de déchets sont consacrés par la directive 2008/98/CE ( 8 ). Celle-ci a remplacé la version consolidée ( 9 ) de l’ancienne directive 75/442/CEE ( 10 ) sur laquelle repose la majeure partie de la jurisprudence actuelle, avec effet au 12 décembre 2010 (article 41).

14.

L’article 3 de la directive relative aux déchets définit plusieurs notions :

« Aux fins de la présente directive, on entend par :

[…]

15)

“valorisation” : toute opération dont le résultat principal est que des déchets servent à des fins utiles en remplaçant d’autres matières qui auraient été utilisées à une fin particulière, ou que des déchets soient préparés pour être utilisés à cette fin, dans l’usine ou dans l’ensemble de l’économie. L’annexe II énumère une liste non exhaustive d’opérations de valorisation ;

[…]

19)

“élimination” : toute opération qui n’est pas de la valorisation même lorsque ladite opération a comme conséquence secondaire la récupération de substances ou d’énergie. L’annexe I énumère une liste non exhaustive d’opérations d’élimination ;

[…] »

D – La décision 2011/753/UE

15.

La décision 2011/753/UE ( 11 ) a pour objectif de contribuer à la mise en œuvre de l’article 11, paragraphe 2, de la directive relative aux déchets, aux termes duquel les États membres doivent atteindre d’ici 2020 certains pourcentages minimaux dans la préparation en vue du réemploi, le recyclage et les autres formules de valorisation de matière, y compris les opérations de remblayage qui utilisent des déchets au lieu d’autres matières. À cette fin, l’article 1er, point 6, de la décision définit la notion de « remblayage » :

« Outre les définitions énoncées à l’article 3 de la [directive relative aux déchets], aux fins de la présente décision, on entend par :

[…]

6)

“remblayage” : une opération de valorisation par laquelle des déchets appropriés sont utilisés, en remplacement de matières qui ne sont pas des déchets, à des fins de remise en état pour combler des trous d’excavation ou pour des travaux d’aménagement paysager. »

III – Les faits et la demande de décision préjudicielle

16.

La société Edilizia Mastrodonato srl a présenté le 16 mars 2010 une demande en vue de l’« agrandissement » d’une carrière, accompagnée notamment d’un projet pour la réhabilitation environnementale des zones concernées par l’activité d’extraction en question.

17.

En particulier, ce projet prévoyait que la mise à nu des zones non encore exploitées aurait lieu parallèlement aux opérations de réhabilitation environnementale des zones déjà exploitées. Les opérations de réhabilitation devaient se dérouler sur une période de 20 ans par l’utilisation progressive de certains déchets autres que les déchets d’extraction, d’un volume total de 1200000 mètres cubes. Il devrait s’agir de déchets non dangereux au sens d’un décret ministériel du 5 février 1998. La période durant laquelle se dérouleraient les opérations de réhabilitation devait se superposer à la durée de l’autorisation demandée pour l’exploitation de la superficie restante.

18.

Après la clôture de la phase écrite de la procédure, le Consiglio di Stato (Conseil d’État, Italie) a fait savoir, à la demande de la Cour, qu’un avis technique d’Edilizia Mastrodonato prévoyait l’utilisation de différents types de déchets, soit notamment du laitier résultant de l’élaboration de l’acier, des déchets de béton, briques et gypse, du plâtre provenant de l’industrie chimique et d’autres déchets de pierre ou de chaux.

19.

L’autorité environnementale compétente a accordé par une décision du 19 janvier 2011 la prorogation de l’avis favorable d’évaluation des incidences sur l’environnement qu’elle avait adopté en faveur d’Edilizia Mastrodonato en 2007.

20.

Le 21 septembre 2011, l’autorité minière a autorisé l’agrandissement de la carrière, à la condition expresse de la réalisation des « travaux de réhabilitation des zones de carrière en objet, selon les modalités prévues par le projet ».

21.

À la suite de cela, Edilizia Mastrodonato a engagé une procédure simplifiée pour démarrer les activités de réhabilitation environnementale. Un organisme de la Provincia di Bari (province de Bari) a cependant ordonné, par la note du 15 novembre 2012 contestée dans l’instance au principal, le classement de cette procédure.

22.

Les parties s’opposent depuis lors sur la question de savoir s’il y a lieu de considérer le comblement comme une mise en décharge de déchets au sens de la directive sur les décharges et, par conséquent, de le soumettre aux conditions d’autorisation.

23.

Dans le cadre de cette procédure, le Consiglio di Stato (Conseil d’État) a posé à la Cour la question suivante à titre préjudiciel :

« Convient-il d’interpréter l’article 10, paragraphe 2, de la directive communautaire 2006/21/CE en ce sens que l’activité de comblement de la décharge – en cas d’utilisation de déchets autres que d’extraction – est toujours soumise à la réglementation en matière de déchets de la directive 1999/31/CE, même dans le cas où il ne s’agit pas d’opérations d’élimination de déchets, mais de valorisation ? »

24.

Outre Edilizia Mastrodonato, la République d’Autriche, la République italienne, la République de Pologne, le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord ainsi que la Commission européenne ont présenté des observations écrites. La province de Bari, la République italienne, la République de Pologne, le Royaume-Uni et la Commission ont participé à l’audience du 10 mars 2016.

IV – Analyse juridique

25.

Bien que le Consiglio di Stato (Conseil d’État) pose une question relative au comblement d’une décharge, il ressort du contexte de l’affaire au principal qu’il s’agit en réalité du comblement d’une carrière. Sa question vise à savoir si ce comblement relève de la directive sur les décharges, car, dans ce cas, ce n’est pas la procédure simplifiée engagée par Edilizia Mastrodonato qui est applicable.

26.

Pour clarifier ce point, il convient de répondre à trois sous-questions, à savoir :

Premièrement, la directive sur les décharges est-elle toujours applicable au comblement d’une carrière au moyen de déchets au sens de l’article 10, paragraphe 2, de la directive sur les déchets de l’industrie extractive ?

Deuxièmement, la directive sur les décharges n’est-elle applicable qu’aux opérations d’élimination des déchets ou l’est-elle également à celles de valorisation des déchets ?

Troisièmement, le comblement d’une carrière au moyen de déchets doit-il être considéré, au regard de la réglementation en matière de déchets, comme une opération d’élimination ou comme une opération de valorisation ?

A – L’article 10, paragraphe 2, de la directive sur les déchets de l’industrie extractive

27.

La question de savoir si le comblement d’une carrière au moyen de déchets autres que les déchets d’extraction au sens de l’article 10, paragraphe 2, de la directive sur les déchets de l’industrie extractive relève toujours de la directive sur les décharges paraît étonnante si l’on se réfère à la version en allemand de l’article 10, paragraphe 2, mais elle s’explique au regard de la version en italien de cette disposition.

28.

Conformément à la version en allemand, la directive sur les décharges continue le cas échéant [gegebenenfalls] de s’appliquer aux déchets autres que les déchets d’extraction utilisés pour combler les trous d’excavation. L’utilisation du terme « gegebenenfalls» exclut que la directive sur les décharges soit toujours applicable. Au contraire, les conditions d’application devraient être réunies. La version en anglais de l’article 10, paragraphe 2, de la directive sur les déchets de l’industrie extractive, par exemple, aux termes duquel la directive sur les décharges n’est applicable que le cas échéant (« as appropriate »), est formulée de manière similaire ( 12 ).

29.

À l’opposé, ni la version en italien ni, notamment, celle en français de l’article 10, paragraphe 2, de la directive sur les déchets de l’industrie extractive ne mentionnent cette qualification ( 13 ). Cela pourrait être compris en ce sens que la directive sur les décharges s’applique toujours aux déchets autres que les déchets d’extraction utilisés pour combler les trous d’excavation.

30.

Étant donné que, par conséquent, les versions linguistiques de l’article 10, paragraphe 2, de la directive sur les déchets de l’industrie extractive diffèrent, la nécessité d’une interprétation uniforme de cette disposition exige qu’elle soit interprétée en fonction du contexte et de la finalité de la réglementation dont elle constitue un élément ( 14 ). Il convient aussi de prendre en considération la genèse d’une disposition, dans la mesure où elle fait apparaître la volonté réelle de son auteur ( 15 ).

31.

À cet égard il convient d’abord de souligner que toutes les versions linguistiques de l’article 10, paragraphe 2, de la directive sur les déchets de l’industrie extractive contiennent une mention qui s’oppose à l’application automatique de la directive sur les décharges. En effet, toutes les versions linguistiques indiquent que la directive sur les décharges « continue » de s’appliquer. Cela montre qu’une application antérieure de cette directive est nécessaire, c’est-à-dire que les conditions d’application devaient être remplies à un stade antérieur.

32.

La proposition de directive présentée par la Commission ( 16 ) comprenait certes déjà les exigences de l’article 10, paragraphe 1, de la directive sur les déchets de l’industrie extractive pour le comblement de trous d’excavation, mais elle ne contenait pas la référence de l’article 10, paragraphe 2, à la directive sur les décharges. Celle-ci a été proposée par le Parlement européen ( 17 ) et adoptée par le Conseil de l’Union européenne dans sa position commune ( 18 ). L’ajout de la qualification « gegebenenfalls» n’existait pas encore dans la proposition d’amendement du Parlement, mais se trouvait dans les versions linguistiques de la position commune dans lesquelles ladite qualification se retrouve également dans la version finale.

33.

Rien dans la genèse de l’article 10, paragraphe 2, de la directive sur les déchets de l’industrie extractive ne permet donc de conclure que la référence à la directive sur les décharges devrait élargir son champ d’application. Il est au contraire plus naturel de la comprendre comme une précision selon laquelle les règles de la directive sur les déchets de l’industrie extractive concernant le comblement des trous d’excavation n’excluent pas que la directive sur les décharges continue de s’appliquer aux déchets autres que les déchets d’extraction.

34.

Cela correspond également à la systématique et à l’objectif de la directive sur les déchets de l’industrie extractive. Aux termes de ses articles 1er et 2, celle-ci régit la gestion des déchets des industries extractives, qui sont dénommés dans la directive « déchets d’extraction ». En revanche, l’article 10, paragraphe 2, concerne seulement les déchets autres que les déchets d’extraction. Il serait donc contradictoire que la directive sur les déchets de l’industrie extractive élargisse en quelque sorte accessoirement le champ d’application d’autres réglementations sur les déchets.

35.

Il y a donc lieu d’interpréter l’article 10, paragraphe 2, de la directive sur les déchets de l’industrie extractive en ce sens que le comblement d’une carrière au moyen de déchets autres que les déchets d’extraction ne relève des dispositions relatives aux déchets de la directive sur les décharges que si les conditions d’application de celle-ci sont remplies.

B – Les conditions d’une application de la directive sur les décharges

36.

La deuxième sous-question du Consiglio di Stato (Conseil d’État) concerne le champ d’application de la directive sur les décharges, c’est-à-dire la question de savoir si elle n’est applicable qu’à l’élimination des déchets ou si elle comprend également certaines opérations de valorisation.

37.

La distinction entre l’élimination et la valorisation de déchets est d’une importance centrale dans le droit de l’Union en matière de déchets. Dans la hiérarchie des déchets établie à l’article 4, paragraphe 1, de la directive relative aux déchets, l’élimination occupe la dernière position, il s’agit donc de la pire des solutions ; la valorisation en revanche se trouve à l’avant-dernière position : elle doit donc en principe être préférée à l’élimination. En effet, une valorisation a pour résultat, aux termes de l’article 3, point 15, que les déchets servent à des fins utiles, en remplaçant d’autres matières qui auraient été utilisées à une fin particulière ( 19 ).

38.

Conformément à son article 3, paragraphe 1, la directive sur les décharges s’applique à toute décharge. Une décharge est définie à l’article 2, sous g), comme un site d’élimination des déchets par dépôt des déchets sur ou dans la terre.

39.

La directive sur les décharges ne couvre donc pas un site de valorisation des déchets par dépôt des déchets sur ou dans la terre et c’est en ce sens que les parties se sont exprimées également.

40.

Cependant, la directive sur les décharges comprend également certains passages ambigus, susceptibles de mettre en doute le fait qu’elle soit exclusivement applicable à l’élimination des déchets, comme le considérant 15, l’article 3, paragraphe 2, deuxième tiret ou l’article 6, sous a).

41.

Le considérant 15 de la directive sur les décharges énonce que la valorisation, conformément à la directive relative aux déchets, des déchets inertes ( 20 ) ou des déchets non dangereux appropriés, par leur utilisation pour des travaux d’aménagement ou de réhabilitation et de remblai ou à des fins de construction, peut ne pas constituer une mise en décharge. Au sens littéral de ce considérant, cette forme de valorisation – du moins dans les versions en allemand, en anglais, en néerlandais et en français – peut également, dans certaines circonstances, être considérée comme une mise en décharge. À l’opposé, la version en italien de ce considérant exclut catégoriquement ladite valorisation de déchets de la mise en décharge [« non può costituire un’attività riguardante le discariche » (elle ne peut constituer une opération concernant les décharges)].

42.

L’article 3, paragraphe 2, deuxième tiret, de la directive sur les décharges reprend cette idée et exclut du champ d’application de la directive l’utilisation dans les décharges de déchets inertes appropriés pour des travaux d’aménagement ou de réhabilitation et de remblai ou à des fins de construction. Cette exception n’est nécessaire que si une telle utilisation de déchets pourrait en l’absence de celle-ci relever de la directive sur les décharges.

43.

Par ailleurs, il convient à cet égard de mentionner l’article 6, sous a), de la directive sur les décharges. Conformément à la première phrase de cette disposition, seuls les déchets déjà traités doivent être mis en décharge. Le traitement des déchets comprend, aux termes de la définition à l’article 2, sous h), plusieurs opérations, qui comprennent, entre autres, celles « favorisant » la valorisation. Cela également indique que la mise en décharge de déchets peut constituer une valorisation.

44.

Toutefois, force est de constater qu’aucune de ces dispositions ne prévoit l’application de la directive sur les décharges à la valorisation des déchets. En outre il n’y a aucune autre règle en ce sens. Il convient donc d’admettre qu’il s’agit seulement de dispositions ambigues, qui peuvent s’expliquer par le fait que la Cour n’a jugé qu’après l’adoption de la directive sur les décharges dans quelle mesure la mise en décharge de déchets pouvait être une valorisation ( 21 ).

45.

Néanmoins, cela ne signifie pas que l’environnement ne serait pas suffisamment protégé si le comblement d’une carrière devait être considéré comme une valorisation. Certes, dans ce cas les dispositions strictes et détaillées de la directive sur les décharges ne seraient pas applicables, mais les conditions générales du droit en matière de déchets, en particulier les obligations de protection de la santé humaine et de l’environnement au titre des articles 1er et 13 de la directive relative aux déchets, continueraient en principe de s’appliquer à la valorisation des déchets. Si cette disposition ne précise pas le contenu concret des mesures qui doivent être prises, il n’en reste pas moins qu’elle lie les États membres quant à l’objectif à atteindre, tout en leur laissant une marge d’appréciation dans l’évaluation de la nécessité de telles mesures ( 22 ).

46.

Il s’agira notamment de mesures en vue d’empêcher la mise en décharge de déchets non appropriés, par exemple, un contrôle des déchets utilisés, comme le prévoit l’article 11 de la directive sur les décharges. Cependant, comme l’observe la République d’Autriche, au‑delà de cela, les États membres peuvent, lorsqu’ils prennent des mesures de protection concernant la valorisation de déchets par dépôt, suivre la réglementation de la directive sur les décharges.

47.

Ce n’est qu’après avoir été complètement valorisés par un dépôt ou une autre opération que des déchets appropriés ont donc acquis les mêmes propriétés et caractéristiques qu’une matière première utilisée pour le comblement et qu’ils pourraient échapper au champ d’application du droit en matière de déchets ( 23 ).

48.

En résumé, il y a lieu par conséquent de répondre à la deuxième sous-question que la directive sur les décharges est applicable non pas à la valorisation, mais à l’élimination par dépôt des déchets sur ou dans la terre.

C – La distinction entre l’élimination et la valorisation des déchets s’agissant du comblement de carrières au moyen de déchets

49.

Afin de déterminer si le comblement de carrières au moyen de déchets est soumis aux dispositions spécifiques de la directive sur les décharges ou seulement aux conditions générales de la directive relative aux déchets, il convient enfin d’éclaircir si ou dans quelles circonstances cette utilisation doit être considérée comme une élimination ou comme une valorisation de déchets.

50.

Il convient de répondre à cette question sur la base de la directive relative aux déchets actuellement en vigueur, car aucun déchet n’a encore été déposé dans la carrière. Tous les déchets concernés doivent donc être traités conformément aux dispositions actuellement applicables. Le fait que la procédure d’autorisation pour le comblement de la carrière a encore été engagée sous l’empire de l’ancienne directive relative aux déchets consolidée n’est pas de nature à modifier cette conclusion.

51.

Aux termes de la définition figurant à l’article 3, point 19, de la directive relative aux déchets, l’« élimination » comprend toute opération qui n’est pas de la valorisation même lorsque ladite opération a comme conséquence secondaire la récupération de substances ou d’énergie.

52.

L’article 3, point 15, de la directive relative aux déchets définit en revanche comme « valorisation » toute opération dont le résultat principal est que des déchets servent à des fins utiles en remplaçant d’autres matières qui auraient été utilisées à une fin particulière, ou que des déchets soient préparés pour être utilisés à cette fin. Cette définition correspond largement – de manière particulièrement claire dans la version en anglais – à la jurisprudence de la Cour portant sur l’ancienne directive relative aux déchets ( 24 ).

53.

La valorisation doit ainsi répondre à deux conditions, premièrement, que les déchets servent à des fins utiles et, deuxièmement, qu’ils remplacent d’autres matières qui auraient été utilisées à une fin particulière.

54.

La première condition est certes fondamentale, car seul un emploi des déchets à des fins utiles peut être considéré comme une valorisation. Si les déchets servent à combler des carrières, cela paraît en principe répondre à des fins utiles. Cependant, il ressort déjà de la définition du terme « élimination », aux termes de laquelle la récupération de substances ou d’énergie n’empêche pas qu’il s’agisse d’une élimination ( 25 ), que le fait que les déchets servent à des fins utiles n’est pas un critère suffisant en soi.

55.

Il est au contraire déterminant pour parler de valorisation que les déchets remplacent des matières qui auraient été utilisées à une fin particulière ( 26 ).

56.

Le Royaume-Uni souligne à bon droit cette caractéristique. Cet État membre doute que, en raison des coûts élevés, des carrières seraient habituellement comblées si des déchets n’étaient pas disponibles. Le fait que le comblement soit éventuellement une condition de l’autorisation pour la carrière n’y changerait rien, car l’autorisation refléterait souvent les plans de l’exploitant et pourrait normalement encore être modifiée s’il s’avérait que le comblement occasionne des coûts disproportionnés.

57.

Cette approche semble à première vue étonnante, étant donné que la Cour a déjà reconnu en principe le comblement comme valorisation. Il s’agissait cependant du comblement de galeries qui, à défaut, présenteraient à la longue un risque d’affaissement, susceptible d’endommager la surface du sol ( 27 ). Des risques semblables sont nettement moins marqués en ce qui concerne des carrières désaffectées. S’ils existent, il n’est probablement pas nécessaire pour les éviter de combler entièrement la carrière. En outre, contrairement à ce que fait valoir la République de Pologne, il n’est pas toujours indispensable de combler une carrière pour pouvoir utiliser de nouveau le terrain à une autre fin.

58.

Il y a donc lieu de considérer avec le Royaume-Uni que les autorités nationales compétentes doivent examiner avec soin si le comblement d’une carrière au moyen de déchets permet effectivement de remplacer d’autres matières. Un indice important dans ce contexte serait de savoir si l’exploitant de la carrière doit payer les déchets utilisés ou s’il est payé pour les utiliser. Dans ce dernier cas, il semble très probable que la carrière ne serait pas comblée en l’absence de ces déchets : il s’agit dès lors d’une opération d’élimination de déchets ( 28 ).

59.

L’avocat général Jacobs a du reste déjà indiqué dans les conclusions qu’il a présentées dans l’affaire ASA que la caractéristique consistant à remplacer d’autres matières comprend un critère que la Commission en particulier a souligné, c’est-à-dire la pertinence des déchets pour l’opération en question ( 29 ). En effet, des déchets inappropriés ne peuvent pas remplacer d’autres matières appropriées. Il serait également difficile de considérer l’emploi de déchets inappropriés comme servant à des fins utiles au sens du premier critère d’une valorisation de déchets.

60.

La définition de la notion de « remblayage » à l’article 1er, point 6, de la décision 2011/753, en tant qu’elle porte sur le caractère approprié des déchets, ne limite pas la notion de « valorisation », mais ne fait que préciser une caractéristique de la notion de « valorisation » que celle‑ci contient déjà implicitement. La prise en considération du caractère « approprié » des déchets au considérant 15 et à l’article 3, paragraphe 2, deuxième tiret, de la directive sur les décharges va dans le même sens.

61.

Comme l’observent à juste titre la province de Bari et la Commission, les informations fournies par le Consiglio di Stato (Conseil d’État) à propos des déchets prévus pour le comblement font douter que toutes les sortes de déchets envisagées soient réellement appropriées pour un comblement. Il ressort du considérant 15 de la directive sur les décharges qu’en principe seuls des déchets inertes ou des déchets non dangereux appropriés sont éligibles. Il n’apparaît pas clairement si toutes les sortes de déchets envisagées relèvent de ces catégories. Ces questions doivent être examinées par les autorités et les juridictions nationales.

62.

Il convient donc de répondre à la troisième sous-question que le comblement d’une carrière au moyen de déchets autres que les déchets d’extraction constitue une valorisation de déchets lorsque les autorités compétentes constatent que les déchets servent à des fins utiles en remplaçant effectivement d’autres matières, ce qui nécessite en particulier le caractère approprié des déchets pour remplacer ces matières.

V – Conclusion

63.

Je propose, par conséquent, de répondre comme suit à la demande de décision préjudicielle :

1)

Il y a lieu d’interpréter l’article 10, paragraphe 2, de la directive 2006/21/CE du Parlement européen et du Conseil, du 15 mars 2006, concernant la gestion des déchets de l’industrie extractive et modifiant la directive 2004/35/CE, telle que modifiée par le règlement (CE) no 596/2009 du Parlement européen et du Conseil, du 18 juin 2009, en ce sens que le comblement d’une carrière au moyen de déchets autres que les déchets d’extraction ne relève des dispositions relatives aux déchets de la directive 1999/31/CE du Conseil, du 26 avril 1999, concernant la mise en décharge des déchets, telle que modifiée par la directive 2011/97/UE du Conseil, du 5 décembre 2011, que si les conditions d’application de celle-ci sont remplies.

2)

La directive 1999/31 est applicable non pas à la valorisation, mais à l’élimination par dépôt des déchets sur ou dans la terre.

3)

Le comblement d’une carrière au moyen de déchets autres que les déchets d’extraction constitue une valorisation de déchets lorsque les autorités compétentes constatent que les déchets servent à des fins utiles en remplaçant effectivement d’autres matières, ce qui nécessite en particulier le caractère approprié des déchets pour remplacer ces matières.


( 1 ) Langue originale : l’allemand.

( 2 ) Directive du Conseil du 21 mai 1992 concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages (JO 1992, L 206, p. 7, ci-après la « directive “habitats” »).

( 3 ) Arrêt du 4 octobre 2007, Commission/Italie (C‑179/06, EU:C:2007:578).

( 4 ) Arrêt du 21 juillet 2011, Azienda Agro-Zootecnica Franchini et Eolica di Altamura (C‑2/10, EU:C:2011:502).

( 5 ) Points 113 à 134 des conclusions que j’ai présentées le 4 septembre 2014 dans l’affaire Commission/Italie (C‑196/13, EU:C:2014:2162).

( 6 ) Directive du Conseil du 26 avril 1999 concernant la mise en décharge des déchets (JO 1999, L 182, p. 1), telle que modifiée par la directive 2011/97/UE du Conseil, du 5 décembre 2011 (JO 2011, L 328, p. 49, ci-après la « directive sur les décharges »).

( 7 ) Directive du Parlement européen et du Conseil du 15 mars 2006 concernant la gestion des déchets de l’industrie extractive et modifiant la directive 2004/35/CE (JO 2006, L 102, p. 15), telle que modifiée par le règlement (CE) no 596/2009 du Parlement européen et du Conseil, du 18 juin 2009 (JO 2009, L 188, p. 14, ci-après la « directive sur les déchets de l’industrie extractive »).

( 8 ) Directive du Parlement européen et du Conseil du 19 novembre 2008 relative aux déchets et abrogeant certaines directives (JO 2008, L 312, p. 3, ci-après la « directive relative aux déchets »).

( 9 ) Directive 2006/12/CE du Parlement européen et du Conseil, du 5 avril 2006, relative aux déchets (JO 2006, L 114, p. 9).

( 10 ) Directive du Conseil du 15 juillet 1975 relative aux déchets (JO 1975, L 194, p. 39), telle que modifiée par la directive 91/156/CEE du Conseil, du 18 mars 1991 (JO 1991, L 78, p. 32).

( 11 ) Décision de la Commission du 18 novembre 2011 établissant des règles et méthodes de calcul permettant de vérifier le respect des objectifs fixés à l’article 11, paragraphe 2, de la directive 2008/98/CE du Parlement européen et du Conseil (JO 2011, L 310, p. 11).

( 12 ) De même, les versions en danois, en polonais et en portugais semblent suivre ce modèle.

( 13 ) Les versions en espagnol, en néerlandais, en roumain et en suédois semblent également suivre ce modèle.

( 14 ) Voir notamment arrêts du 15 octobre 2015, Nike European Operations Netherlands (C‑310/14, EU:C:2015:690, point 17), et du 29 avril 2015, Léger (C‑528/13, EU:C:2015:288, point 35).

( 15 ) Arrêt du 22 octobre 2009, Zurita García et Choque Cabrera (C‑261/08 et C‑348/08, EU:C:2009:648, point 54 ainsi que jurisprudence citée).

( 16 ) COM(2003) 319 final.

( 17 ) Position du Parlement européen arrêtée en première lecture le 31 mars 2004 en vue de l’adoption de la directive 2004/…/CE du Parlement européen et du Conseil concernant la gestion des déchets de l’industrie extractive.

( 18 ) Position commune (CE) no 23/2005 du 12 avril 2005 arrêtée par le Conseil, en vue de l’adoption de la directive 2005/…/CE du Parlement européen et du Conseil du … concernant la gestion des déchets de l’industrie extractive et modifiant la directive 2004/35/CE (JO 2005, CE 172, p. 1). Voir également document 8933/04 du Conseil, du 28 avril 2004.

( 19 ) Voir également arrêt du 27 février 2002, ASA (C‑6/00, EU:C:2002:121, point 69).

( 20 ) Voir définition à l’article 2, sous e), de la directive sur les décharges ci‑dessus, point 10.

( 21 ) Arrêt du 27 février 2002, ASA (C‑6/00, EU:C:2002:121, points 58 à 71).

( 22 ) Arrêt du 16 décembre 2004, EU-Wood-Trading (C‑277/02, EU:C:2004:810, point 45).

( 23 ) Arrêt du 7 mars 2013, Lapin luonnonsuojelupiiri (C‑358/11, EU:C:2013:142, points 56 et 57).

( 24 ) Arrêt du 27 février 2002, ASA (C‑6/00, EU:C:2002:121, point 69).

( 25 ) Voir à cet égard également arrêt du 13 février 2003, Commission/Luxembourg (C‑458/00, EU:C:2003:94, point 43).

( 26 ) Voir points 86 et 87 des conclusions que l’avocat général Jacobs a présentées le 15 novembre 2001 dans l’affaire ASA (C‑6/00, EU:C:2001:610) ainsi que point 37 de celles qu’il a présentées le 17 janvier 2002 dans l’affaire Palin Granit et Vehmassalon kansanterveystyön kuntayhtymän hallitus (C‑9/00, EU:C:2002:24), et arrêt du 13 février 2003, Commission/Luxembourg (C‑458/00, EU:C:2003:94, point 44).

( 27 ) Voir points 85 et 87 des conclusions que l’avocat général Jacobs a présentées le 15 novembre 2001 dans l’affaire ASA (C‑6/00, EU:C:2001:610) ainsi qu’arrêt du 11 septembre 2003, AvestaPolarit Chrome (C‑114/01, EU:C:2003:448, points 36 à 38).

( 28 ) Voir point 88 des conclusions que l’avocat général Jacobs a présentées le 15 novembre 2001 dans l’affaire ASA (C‑6/00, EU:C:2001:610).

( 29 ) Point 87 des conclusions que l’avocat général Jacobs a présentées le 15 novembre 2001 dans l’affaire ASA (C‑6/00, EU:C:2001:610).

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