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Document 62014CJ0081

Arrêt de la Cour (cinquième chambre) du 10 septembre 2015.
Nannoka Vulcanus Industries BV contre College van gedeputeerde staten van Gelderland.
Demande de décision préjudicielle, introduite par le Raad van State.
Renvoi préjudiciel – Directive 1999/13/CE – Annexe II B – Pollution atmosphérique – Composés organiques volatils – Réduction des émissions – Utilisation des solvants organiques dans certaines activités et installations – Obligations applicables aux installations existantes – Prolongation de délai.
Affaire C-81/14.

Court reports – general

ECLI identifier: ECLI:EU:C:2015:575

ARRÊT DE LA COUR (cinquième chambre)

10 septembre 2015 ( *1 )

«Renvoi préjudiciel — Directive 1999/13/CE — Annexe II B — Pollution atmosphérique — Composés organiques volatils — Réduction des émissions — Utilisation des solvants organiques dans certaines activités et installations — Obligations applicables aux installations existantes — Prolongation de délai»

Dans l’affaire C‑81/14,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Raad van State (Pays-Bas), par décision du 12 février 2014, parvenue à la Cour le 17 février 2014, dans la procédure

Nannoka Vulcanus Industries BV

contre

College van gedeputeerde staten van Gelderland,

LA COUR (cinquième chambre),

composée de M. T. von Danwitz, président de chambre, MM. C. Vajda, A. Rosas (rapporteur), E. Juhász et D. Šváby, juges,

avocat général: Mme J. Kokott,

greffier: Mme M. Ferreira, administrateur principal,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 26 février 2015,

considérant les observations présentées:

pour Nannoka Vulcanus Industries BV, par Me M. Baneke, advocaat,

pour le gouvernement néerlandais, par Mmes M. Bulterman, B. Koopman et C. Schillemans, en qualité d’agents,

pour la Commission européenne, par M. E. Manhaeve et Mme S. Petrova, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 12 mars 2015,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’annexe II B de la directive 1999/13/CE du Conseil, du 11 mars 1999, relative à la réduction des émissions de composés organiques volatils dues à l’utilisation de solvants organiques dans certaines activités et installations (JO L 85, p. 1, et rectificatif JO 1999, L 188, p. 54).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Nannoka Vulcanus Industries BV (ci-après «Nannoka») au College van gedeputeerde staten van Gelderland (Collège provincial de la Gueldre, ci-après le «College») au sujet d’une injonction assortie d’une condamnation à payer une indemnité à titre comminatoire, adressée par ce dernier à Nannoka en raison d’une violation de la réglementation néerlandaise transposant la directive 1999/13.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

3

Les considérants 5 à 9 de la directive 1999/13 disposent:

«(5)

considérant que l’utilisation de solvants organiques dans certaines activités et certaines installations entraîne, en raison de leurs caractéristiques, des émissions dans l’air de composés organiques susceptibles de nuire à la santé publique, et/ou qu’elle contribue à la formation locale et transfrontière, dans la couche limite de la troposphère, d’oxydants photochimiques qui sont préjudiciables à certaines ressources naturelles d’une importance vitale pour l’environnement et l’économie et qui ont, dans certaines conditions d’exposition, des effets nocifs sur la santé humaine;

(6)

considérant que les graves problèmes liés à la concentration de l’ozone dans la haute troposphère, qui ont surgi ces dernières années, ont suscité une préoccupation générale quant à leur incidence sur la santé publique et l’environnement;

(7)

considérant qu’une action préventive est dès lors requise pour protéger la santé publique et l’environnement contre les conséquences d’émissions particulièrement dangereuses dues à l’utilisation de solvants organiques et pour garantir aux citoyens le droit à un environnement propre et sain;

(8)

considérant que les émissions de composés organiques peuvent être évitées ou réduites dans de nombreuses activités et installations, car on dispose – ou on disposera au cours des prochaines années – de substituts moins nocifs; que, dans les cas où les substituts adéquats ne sont pas disponibles, d’autres mesures techniques devraient être prises pour réduire les émissions dans l’environnement, dans toute la mesure où cela est techniquement et économiquement possible et réalisable;

(9)

considérant que l’utilisation de solvants organiques et les émissions de composés organiques responsables des effets les plus graves sur la santé publique devraient être réduites autant que techniquement possible».

4

Les considérants 14 et 15 de ladite directive prévoient:

«(14)

considérant qu’un niveau élevé de protection de l’environnement exige que soient fixées et appliquées des limites d’émission de composés organiques ainsi que, pour certaines installations et activités utilisant des solvants organiques dans la Communauté, des conditions d’exploitation appropriées, conformément au principe de la meilleure technique disponible;

(15)

considérant que, dans certains cas, les États membres peuvent exempter l’exploitant de l’application des valeurs limites d’émission parce que d’autres mesures, telles que l’utilisation de produits ou de techniques sans solvants ou à basse teneur en solvants permettent d’obtenir une réduction équivalente des émissions».

5

Aux termes de l’article 1er de la directive 1999/13, celle-ci a pour objet de prévenir ou de réduire les effets directs et indirects des émissions de composés organiques volatils dans l’environnement, principalement dans l’air, ainsi que les risques potentiels pour la santé publique, par des mesures et des procédures à mettre en œuvre dans les activités industrielles définies à l’annexe I de cette directive dans la mesure où elles se situent au-dessus des seuils indiqués à l’annexe II A de celle-ci.

6

L’article 2, point 1, de ladite directive définit une «installation» aux fins de cette dernière comme étant une unité technique fixe dans laquelle interviennent une ou plusieurs des activités entrant dans le champ d’application défini à l’article 1er de la même directive, ainsi que toute autre activité s’y rapportant directement qui est liée techniquement aux activités exercées sur le site et qui est susceptible d’avoir des incidences sur les émissions.

7

L’article 3 de la directive 1999/13 prévoit:

«Les États membres prennent les mesures nécessaires pour assurer que:

1)

toutes les nouvelles installations sont conformes aux articles 5, 8 et 9;

[...]»

8

L’article 4 de ladite directive dispose:

«Sans préjudice de la directive 96/61/CE [du Conseil, du 24 septembre 1996, relative à la prévention et à la réduction intégrées de la pollution (JO L 257, p. 26)], les États membres prennent les mesures nécessaires pour assurer que:

1)

les installations existantes sont conformes aux articles 5, 8 et 9 au plus tard le 31 octobre 2007;

[...]

3)

les installations soumises à une autorisation ou à un enregistrement qui mettent en œuvre le schéma de réduction prévu à l’annexe II B le notifient aux autorités compétentes au plus tard le 31 octobre 2005;

[...]»

9

Aux termes de l’article 5, paragraphe 2, de la directive 1999/13:

«Toutes les installations sont conformes:

a)

soit aux valeurs limites d’émission dans les gaz résiduaires et aux valeurs d’émission diffuse, ou aux valeurs limites d’émission totale, ainsi qu’aux autres exigences contenues à l’annexe II A;

b)

soit aux exigences découlant du schéma de réduction présenté en détail à l’annexe II B.»

10

L’article 9, paragraphe 1, de la directive 1999/13 est ainsi libellé:

«La conformité avec les dispositions suivantes doit être prouvée à la satisfaction de l’autorité compétente:

[...]

les exigences relevant du schéma de réduction contenu à l’annexe II B,

[...]»

11

L’article 15, paragraphe 1, premier alinéa, de la directive 1999/13 prévoit:

«Les États membres mettent en vigueur les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à la présente directive au plus tard le 1er avril 2001. Ils en informent immédiatement la Commission.»

12

L’annexe II B de la directive 1999/13, intitulée «Schéma de réduction», est ainsi libellée:

«1.

Principes

Le schéma de réduction doit offrir à l’exploitant la possibilité d’obtenir par d’autres moyens une réduction des émissions qui soit équivalente à ce qu’il obtiendrait en appliquant les valeurs limites d’émission. À cet effet, l’exploitant peut mettre en œuvre n’importe quel schéma de réduction conçu spécialement pour son installation, à condition d’obtenir en fin de compte une réduction équivalente des émissions. Les États membres font rapport à la Commission, conformément à l’article 11 de la directive, sur les progrès réalisés dans l’obtention d’une réduction équivalente des émissions, y compris sur l’expérience acquise dans la mise en œuvre du schéma de réduction.

2.

Mise en œuvre

Pour l’application de revêtements, vernis, colles ou encres, le schéma présenté ci-après peut être suivi. Dans les cas où cette méthode ne convient pas, l’autorité compétente peut permettre à l’exploitant d’appliquer toute autre méthode qui, à son avis, répond aux principes exposés ci-dessus. À cet effet, le plan tient compte des points suivants:

i)

lorsque des produits de substitution contenant peu ou pas de solvant sont encore en cours de développement, une prolongation de délai doit être accordée à l’exploitant pour l’application de son schéma de réduction des émissions;

ii)

le point de référence pour la réduction des émissions devrait correspondre autant que possible aux émissions qui seraient obtenues si aucune mesure de réduction n’était prise.

Le schéma de réduction suivant est applicable aux installations pour lesquelles on peut supposer une teneur constante du produit en extraits secs et utiliser cette teneur pour définir le point de référence pour la réduction des émissions.

i)

L’exploitant présente un schéma de réduction des émissions qui comprend en particulier une diminution de la teneur moyenne en solvant de la quantité totale utilisée et/ou une augmentation de l’efficacité d’utilisation des extraits secs, en vue de ramener les émissions totales de l’installation à un niveau dénommé ci-après ‘émission cible’, qui correspond à un pourcentage des émissions annuelles de référence. Il respectera à cet égard le calendrier suivant:

Image

ii)

les émissions annuelles de référence sont calculées comme suit.

a)

On détermine la masse totale d’extraits secs dans la quantité de revêtement et/ou d’encre, de vernis ou de colle consommée en un an. On entend par ‘extraits secs’ toutes les substances présentes dans les revêtements, les encres, les vernis et les colles qui deviennent solides après évaporation de l’eau ou des composés organiques volatils.

[...]»

13

La directive 1999/13 a été abrogée, à compter du 7 janvier 2014, par la directive 2010/75/UE du Parlement européen et du Conseil, du 24 novembre 2010, relative aux émissions industrielles (prévention et réduction intégrées de la pollution) (JO L 334, p. 17).

14

Il ressort du considérant 1 de la directive 2010/75 que celle-ci a procédé à la refonte de sept directives, au nombre desquelles figurait la directive 1999/13.

15

Aux termes de l’article 59, paragraphe 1, premier alinéa, de la directive 2010/75:

«Les États membres prennent les mesures nécessaires pour faire en sorte que chaque installation remplit l’une ou l’autre des conditions suivantes:

a)

les émissions de composés organiques volatils des installations ne dépassent pas les valeurs limites d’émission dans les gaz résiduaires et les valeurs limites d’émission fugitive, ou les valeurs limites d’émission totale, et les autres exigences énoncées dans l’annexe VII, parties 2 et 3 sont respectées;

b)

les installations respectent les exigences du schéma de réduction figurant dans l’annexe VII, partie 5 à condition qu’il en résulte une réduction des émissions équivalente à celle qu’aurait permis d’obtenir l’application des valeurs limites d’émission visées au point a).»

16

L’article 80, paragraphe 1, de la directive 2010/75 dispose:

«Les États membres mettent en vigueur les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à [...] l’annexe VII, [...] partie 5, point 1, [...] au plus tard le 7 janvier 2013.

Ils appliquent ces dispositions à partir de la même date.

[...]»

17

L’article 81, paragraphe 1, de ladite directive prévoit:

«Les directives [...] 1999/13 [...] sont abrogées à compter du 7 janvier 2014, sans préjudice des obligations des États membres concernant les délais de transposition en droit national et d’application des directives, indiqués à l’annexe IX, partie B.»

18

La partie 5, intitulée «Schéma de réduction», de l’annexe VII de la directive 2010/75, elle-même intitulée «Dispositions techniques relatives aux installations et activités utilisant des solvants organiques», est ainsi libellée:

«1.

L’exploitant peut mettre en œuvre n’importe quel schéma de réduction conçu spécialement pour son installation.

2.

Pour l’application de revêtements, vernis, colles ou encres, le schéma présenté ci-après peut être suivi. Dans les cas où cette méthode ne convient pas, l’autorité compétente peut permettre à l’exploitant d’appliquer tout autre schéma permettant d’obtenir des réductions des émissions équivalentes à celles qui seraient obtenues en respectant les valeurs limites d’émission indiquées dans les parties 2 et 3. À cet effet, le schéma tient compte des points suivants:

a)

lorsque des produits de substitution contenant peu ou pas de solvant sont encore en cours de développement, une prolongation de délai est accordée à l’exploitant pour l’application de son schéma de réduction des émissions;

b)

le point de référence pour la réduction des émissions devrait correspondre autant que possible aux émissions qui seraient obtenues si aucune mesure de réduction n’était prise.

3.

Le schéma de réduction suivant est applicable aux installations pour lesquelles on peut supposer une teneur constante du produit en extraits secs.

a)

Les émissions annuelles de référence sont calculées comme suit:

i)

on détermine la masse totale d’extraits secs dans la quantité de revêtement et/ou d’encre, de vernis ou de colle consommée en un an. On entend par ‘extraits secs’ toutes les substances présentes dans les revêtements, les encres, les vernis et les colles qui deviennent solides après évaporation de l’eau ou des composés organiques volatils;

ii)

les émissions annuelles de référence sont calculées en multipliant la masse déterminée au point i) par le facteur approprié du tableau suivant. Les autorités compétentes peuvent ajuster ces facteurs pour des installations dans lesquelles les extraits secs sont utilisés de manière plus efficace.

[...]»

Le droit néerlandais

19

Il ressort de la décision de renvoi que les articles 4, paragraphe 1, et 5, paragraphe 2, de la directive 1999/13 ont été transposés en droit néerlandais par les articles 3, paragraphe 1, et 5, sous a), de l’arrêté relatif aux solvants mettant en œuvre la directive 1999/13 (Oplosmiddelenbesluit omzetting EG-VOS-richtlijn milieubeheer, Stb. 2001, no 161, ci-après l’«arrêté ‘Solvants’»).

20

Ces dispositions de l’arrêté «Solvants» obligeaient les entreprises concernées à prendre les mesures nécessaires pour faire en sorte que leurs installations soient, au plus tard le 31 octobre 2007, conformes aux valeurs limites d’émission contenues à l’annexe II A de cet arrêté ou aux exigences découlant du schéma de réduction des émissions de composés organiques volatils (ci-après le «schéma de réduction») présenté en détail à l’annexe II B dudit arrêté. Le contenu de cette dernière annexe est identique à celui de l’annexe II B de la directive 1999/13.

Le litige au principal et les questions préjudicielles

21

Nannoka exploite une installation d’application de vernis et de revêtement.

22

Par une décision du 7 octobre 2010, le College a adressé à Nannoka une injonction assortie d’une condamnation à payer une indemnité à titre comminatoire en raison d’une infraction aux dispositions combinées des articles 3, paragraphe 1, et 5, sous a), de l’arrêté «Solvants».

23

Par une décision du 13 juillet 2011, le College a rejeté le recours administratif formé par Nannoka contre sa décision du 7 octobre 2010.

24

Par un jugement du 3 mai 2012, le Rechtbank Arnhem (tribunal d’Arnhem) a rejeté le recours introduit par Nannoka contre la décision du College du 13 juillet 2011.

25

Nannoka a interjeté appel de ce jugement devant le Raad van State (Conseil d’État).

26

La juridiction de renvoi indique que la circonstance que la décision du College du 7 octobre 2010 a été retirée le 7 mars 2013 ne prive pas Nannoka de son intérêt à ce que l’affaire en cause au principal soit tranchée sur le fond en appel. En effet, cette société établirait de façon convaincante la réalité du préjudice qu’elle a subi du fait de la décision retirée, celle-ci l’ayant contrainte à sous-traiter une partie de ses activités à une autre société.

27

Selon la juridiction de renvoi, il est constant que, à la date du 31 octobre 2007, Nannoka ne s’était pas conformée aux valeurs limites d’émission prévues à l’annexe II A de l’arrêté «Solvants».

28

Nannoka fait toutefois valoir devant la juridiction de renvoi qu’elle satisfaisait aux exigences découlant du schéma de réduction décrit à l’annexe II B dudit arrêté, car, selon elle, cette annexe lui accordait une prolongation de délai au-delà du 31 octobre 2007 pour l’application de son propre schéma de réduction.

29

En effet, selon Nannoka, l’annexe II B de la directive 1999/13 prévoit qu’une prolongation de délai doit être accordée à l’exploitant pour l’application de son schéma de réduction lorsque des produits de substitution contenant peu ou pas de solvant sont encore en cours de développement. Or, Nannoka estime que tel a été le cas dans l’affaire au principal.

30

Devant la juridiction de renvoi, les parties s’accordent sur le fait que Nannoka a, par une lettre du 27 octobre 2005, notifié aux autorités nationales compétentes son intention de recourir à un schéma de réduction. En outre, il n’est pas contesté que Nannoka a établi un tel schéma de réduction. Selon la juridiction de renvoi, ce schéma de réduction ne permettait toutefois pas à celle-ci d’atteindre, à la date du 31 octobre 2007, l’«émission cible» prévue à l’annexe II B, point 2, second alinéa, de la directive 1999/13.

31

La juridiction de renvoi relève que l’annexe II B de la directive 1999/13 n’impose pas l’adoption d’un schéma de réduction qui devrait être conforme à un modèle unique, mais fixe des principes, des indications et des exigences auxquels, conformément à l’article 5, paragraphe 2, de cette directive, l’exploitant doit se conformer lorsqu’il établit son propre schéma de réduction.

32

L’annexe II B de la directive 1999/13 ne permettrait toutefois de déterminer avec précision ni les situations dans lesquelles la prolongation de délai qu’elle prévoit peut être légalement accordée ni la durée possible d’une telle prolongation de délai.

33

La juridiction de renvoi souligne que cette annexe prévoit, en ce qui concerne les installations pour lesquelles on peut supposer une teneur constante du produit en extraits secs et utiliser cette teneur pour définir le point de référence pour la réduction des émissions, l’application d’un schéma de réduction particulier (ci-après le «schéma standard»). Cette annexe fournirait ensuite un calendrier pour parvenir aux émissions dites «cibles» ainsi qu’une méthode de calcul pour définir ces émissions.

34

Aucun élément ne permettrait de conclure que, dans l’affaire au principal, les installations de Nannoka ne satisfaisaient pas aux conditions auxquelles est subordonnée l’application de ce schéma standard. Il semblerait que, dans les situations auxquelles ledit schéma standard est applicable, on ne puisse pas s’écarter du calendrier figurant à l’annexe II B de la directive 1999/13. Puisque celui-ci prévoyait que l’émission cible devait être atteinte au plus tard le 31 octobre 2007 et que, de toute évidence, le schéma de réduction de Nannoka était insusceptible de parvenir à un tel résultat, un doute existe, selon la juridiction de renvoi, concernant la conformité de ce schéma de réduction aux exigences de l’annexe II B de la directive 1999/13.

35

Toutefois, eu égard au fait que ladite annexe indique qu’il est nécessaire de tenir compte du fait qu’une prolongation de délai doit être accordée à l’exploitant pour l’application de son schéma de réduction, lorsque des produits de substitution contenant peu ou pas de solvant sont encore en cours de développement, la juridiction de renvoi s’interroge sur le point de savoir s’il est possible, même quand le schéma standard est applicable, de s’écarter néanmoins du calendrier qui en fait partie.

36

La juridiction de renvoi envisage ainsi deux interprétations possibles de l’annexe II B de la directive 1999/13. Selon la première interprétation, la prolongation de délai ne pourrait être accordée que lorsque le schéma standard ne convient pas à la situation concernée et qu’un autre type de schéma de réduction est, pour ce motif, établi. Selon la seconde interprétation, même si le schéma standard est applicable, une prolongation de délai pourrait être obtenue en dérogation au calendrier prévu par ce schéma.

37

Au cas où cette seconde interprétation serait retenue par la Cour, la juridiction de renvoi s’interroge également sur les conditions requises pour qu’un exploitant puisse bénéficier d’une prolongation de délai et sur la durée qu’une telle prolongation peut présenter. En effet, l’annexe II B de la directive 1999/13 ne préciserait pas, par exemple, si une prolongation de délai est subordonnée à l’autorisation des autorités compétentes ou si elle peut intervenir de plein droit. Cette annexe n’indiquerait pas non plus dans quelle mesure le développement de produits de substitution contenant peu ou pas de solvant doit être concrétisé ni le stade que ce développement doit avoir atteint pour donner droit à une prolongation de délai. Elle ne préciserait pas davantage les critères sur la base desquels la durée de la prolongation doit être fixée.

38

Dans ces conditions, le Raad van State a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:

«1)

Faut-il interpréter l’annexe II B de la directive [1999/13] en ce sens qu’un exploitant d’installations pour lesquelles on peut supposer une teneur constante du produit en extraits secs et utiliser cette teneur pour définir le point de référence pour la réduction des émissions doit pouvoir, lorsque des produits de substitution contenant peu ou pas de solvant sont encore en cours de développement, bénéficier d’une prolongation de délai pour l’application de son schéma de réduction, en dérogation au calendrier prévu par ladite annexe?

[En cas de réponse affirmative à la première question:]

2)

Une prolongation de délai pour l’application du schéma de réduction des émissions, telle que prévue à l’annexe II B de la directive [1999/13], exige-t‑elle l’accomplissement d’un acte particulier par l’exploitant des installations concernées ou une autorisation des autorités compétentes?

3)

Sur la base de quels critères la durée de la prolongation de délai prévue à l’annexe II B de la directive [1999/13] peut-elle être fixée?»

Sur les questions préjudicielles

Sur la première question

39

Par sa première question, la juridiction de renvoi cherche à savoir, en substance, si l’annexe II B de la directive 1999/13 doit être interprétée en ce sens que la prolongation de délai qu’elle prévoit à son point 2, premier alinéa, sous i), peut être accordée à l’exploitant d’une «installation», au sens de l’article 2, point 1, de ladite directive, pour la mise en œuvre de son schéma de réduction, lorsque des produits de substitution contenant peu ou pas de solvant sont encore en cours de développement, alors même qu’on peut supposer, pour cette installation, une teneur constante du produit en extraits secs et utiliser cette teneur pour définir le point de référence pour la réduction des émissions.

40

En vertu de l’article 5, paragraphe 2, de la directive 1999/13, toutes les installations visées par cette directive doivent être conformes soit aux valeurs limites d’émission de composés organiques volatils figurant à l’annexe II A de ladite directive, soit aux exigences du schéma de réduction présenté à l’annexe II B de celle-ci.

41

Conformément à l’annexe II B, point 1, de cette même directive, un schéma de réduction doit offrir à l’exploitant la possibilité d’obtenir, par d’autres moyens que par l’application de ces valeurs limites d’émission, une réduction des émissions qui soit équivalente à celle qu’il obtiendrait en appliquant ces valeurs. Ainsi que l’a relevé Mme l’avocat général au point 14 de ses conclusions, un schéma de réduction repose sur l’utilisation de produits de substitution et de procédés plus pauvres en émissions.

42

Il ressort de l’annexe II B, point 2, premier alinéa, de la directive 1999/13 que, pour l’application de revêtements, de vernis, de colles ou d’encres, un schéma déterminé, présenté au point 2, second alinéa, de cette annexe, à savoir le schéma standard, peut être suivi. En vertu de cette dernière disposition, ce schéma est applicable aux installations pour lesquelles on peut supposer une teneur constante du produit en extraits secs et utiliser cette teneur pour définir le point de référence pour la réduction des émissions. Le point 2, premier alinéa, de ladite annexe précise que, dans les cas où cette méthode ne convient pas, l’autorité compétente peut permettre à l’exploitant d’appliquer toute autre méthode qui, à son avis, répond aux principes exposés au point 1 de cette même annexe.

43

Dans l’affaire au principal, il ressort de la décision de renvoi qu’aucun élément ne permet de conclure que les installations de Nannoka ne satisfaisaient pas aux conditions requises pour l’application du schéma standard.

44

L’annexe II B, point 2, premier alinéa, sous i), de la directive 1999/13 prévoyant qu’une prolongation de délai doit être accordée à l’exploitant concerné pour l’application de son schéma de réduction lorsque des produits de substitution contenant peu ou pas de solvant sont encore en cours de développement, il convient de déterminer si cette prolongation de délai doit pouvoir être accordée quel que soit le schéma de réduction applicable à l’installation de cet exploitant ou si l’octroi d’une telle prolongation de délai est uniquement possible en cas d’application d’un schéma de réduction autre que le schéma standard.

45

À cet égard, il importe de constater d’emblée que le libellé de ladite annexe ne permet pas d’apporter une réponse claire à cette question.

46

Si le libellé de l’annexe II B, point 2, premier alinéa, sous i), de la directive 1999/13 semble indiquer qu’une prolongation de délai doit être accordée à un exploitant pour l’application de son schéma de réduction dès lors que des produits de substitution contenant peu ou pas de solvant sont encore en cours de développement, l’enchaînement des trois phrases de ce premier alinéa dudit point 2 ne permet pas de déterminer si une prolongation de délai doit être accordée y compris dans le cas particulier où cet exploitant applique le schéma standard.

47

En effet, il convient de constater que si, dans la version française de la directive 1999/13, l’expression «[à] cet effet», introduisant la troisième phrase du point 2 de l’annexe II B de la directive 1999/13, semble, à première vue, se référer uniquement à l’hypothèse, évoquée dans la phrase précédente de ce point, de l’application de «toute autre méthode [que le schéma standard]», cette interprétation ne paraît toutefois pas pouvoir être confirmée sans équivoque au regard d’autres versions linguistiques de la directive 1999/13, telle que les versions allemande, anglaise et néerlandaise, lesquelles ne contiennent pas d’expression équivalente à l’expression «[à] cet effet». Dans ces versions, cette troisième phrase pourrait ainsi être interprétée de façon générale, comme visant n’importe quel schéma de réduction, en ce compris le schéma standard.

48

Dans ce contexte, le gouvernement néerlandais fait valoir que, quel que soit le schéma de réduction mis en œuvre par l’exploitant concerné, une prolongation de délai accordée à ce dernier ne pouvait aller au-delà du 31 octobre 2007, cette date étant celle à laquelle les émissions des installations existantes devaient respecter, conformément à l’article 4, point 1, de la directive 1999/13 et à l’annexe II B, point 2, second alinéa, sous i), de celle-ci, les exigences de l’article 5 de cette directive, à savoir les seuils visés à son annexe II A ou le schéma de réduction décrit à son annexe II B.

49

Cette position ne saurait toutefois être retenue.

50

En effet, la possibilité, expressément prévue à l’annexe II B, point 2, premier alinéa, sous i), de la directive 1999/13, d’accorder à un exploitant une prolongation de délai pour l’application de son schéma de réduction implique nécessairement que l’ensemble des délais visés dans cette directive, notamment celui expirant le 31 octobre 2007 pour ce qui est des installations existantes, puisse être prolongé. Comme l’a relevé Mme l’avocat général au point 22 de ses conclusions, la position du gouvernement néerlandais reviendrait à priver de son caractère normatif l’annexe II B, point 2, premier alinéa, sous i), de ladite directive et à réduire cette disposition à une simple explication de la computation du délai en question.

51

Il y a lieu, au demeurant, de relever que, lors de l’adoption, en 2010, de la directive 2010/75, le législateur de l’Union a repris, à l’annexe VII, partie 5, point 2, sous a), de cette directive, en des termes identiques à ceux qui figuraient à l’annexe II B, point 2, premier alinéa, sous i), de la directive 1999/13, la possibilité d’accorder à un exploitant une prolongation de délai pour l’application d’un schéma de réduction. Or, rien ne laisse apparaître, ainsi que Mme l’avocat général l’a relevé au point 32 de ses conclusions, que la disposition en cause de la directive 1999/13 devait être modifiée lors de son intégration dans la directive 2010/75. Le législateur est donc parti du principe qu’une prolongation de délai était envisageable même après le 31 octobre 2007.

52

La Commission soutient, pour sa part, que l’annexe II B, point 2, second alinéa, de la directive 1999/13 contient une règle spéciale applicable aux installations dans lesquelles est utilisé un produit ayant une teneur constante en extraits secs, qui prime sur la disposition relative à la prolongation de délai. Selon la Commission, une prolongation de délai n’est ainsi possible que pour les installations dans lesquelles est utilisé un produit n’ayant pas une teneur constante en extraits secs.

53

À cet égard, s’il est vrai que, en vertu de l’annexe II B, point 2, second alinéa, de la directive 1999/13, un schéma de réduction déterminé, à savoir le schéma standard, est applicable aux installations pour lesquelles on peut supposer une teneur constante du produit en extraits secs et utiliser cette teneur pour définir le point de référence pour la réduction des émissions, ce schéma ne constitue toutefois pas une règle spéciale excluant l’octroi d’une prolongation de délai aux exploitants de telles installations.

54

En effet, il convient de relever que l’annexe II B, point 2, premier alinéa, de la directive 1999/13 indique que, pour l’application de revêtements, de vernis, de colles ou d’encres, le schéma standard «peut» être suivi et que, dans les cas où ce schéma ne convient pas, l’autorité compétente «peut» permettre à l’exploitant d’appliquer toute autre méthode qui, à son avis, répond aux principes exposés à l’annexe II B, point 1, de cette directive. Il y a lieu de constater qu’aucun élément du libellé de cette disposition ne permet d’exclure, dans le cas où le schéma standard ne convient pas, l’application d’une autre méthode aux installations pour lesquelles on peut supposer une teneur constante du produit en extraits secs. Ainsi, de la même manière que le schéma standard peut ne pas être appliqué à de telles installations, une prolongation de délai peut être accordée à celles-ci lorsque des produits de substitution contenant peu ou pas de solvant sont encore en cours de développement.

55

Par ailleurs, la possibilité d’accorder une prolongation de délai en ce qui concerne tous les types d’installations, quel que soit le schéma de réduction adopté, est confirmée par la ratio legis qui sous-tend les dispositions de la directive 1999/13 relatives à la prolongation de délai et aux installations ayant une teneur constante du produit en extraits secs.

56

D’une part, ainsi que l’a relevé Mme l’avocat général au point 36 de ses conclusions, cette prolongation de délai constitue une expression du principe de proportionnalité. En effet, au regard de ce principe, il paraît excessif d’imposer aux exploitants d’une installation la réalisation d’investissements visant à la réduction des émissions de composés organiques volatils avant une certaine date si ces émissions peuvent être évitées ou très fortement réduites dans un avenir proche, à un coût moindre, dès que des produits de substitution contenant peu ou pas de solvant, et dont le développement est en cours, seront disponibles. D’autre part, ainsi qu’il résulte du considérant 8 de la directive 1999/13, celle-ci repose sur la considération que les émissions de composés organiques peuvent être évitées ou réduites par des substituts moins nocifs existants ou qui seront disponibles au cours des prochaines années. En effet, si une entreprise peut éviter, grâce à des produits de substitution, des mesures lourdes de réduction des émissions, elle sera vraisemblablement disposée à développer de tels produits ou à promouvoir leur développement. En outre, dans la mesure où des produits de substitution contenant peu ou pas de solvant peuvent contribuer, au-delà des installations concernées, à limiter les émissions de composés organiques volatils dans l’environnement, leur développement peut justifier une période transitoire plus longue.

57

En ce qui concerne les installations dans lesquelles est utilisé un produit ayant une teneur constante en extraits secs, il ressort de l’annexe II B, point 2, second alinéa, de la directive 1999/13 que cette teneur peut être utilisée «pour définir le point de référence pour la réduction des émissions». Ainsi que les intéressés l’ont expliqué lors de l’audience, la présence d’une teneur constante du produit en extraits secs permet ainsi d’identifier une méthode de détermination des objectifs d’émissions des installations concernées, méthode à laquelle l’exploitant concerné ne peut avoir recours en l’absence d’utilisation d’un produit ayant une telle teneur constante. Il ne ressort par ailleurs d’aucune disposition de cette annexe que l’objectif poursuivi par l’introduction du critère relatif à la présence d’une teneur constante du produit en extraits secs serait d’exclure l’octroi d’une prolongation de délai à l’exploitant d’une installation dans laquelle est utilisé un produit ayant une telle teneur constante.

58

Ledit critère semble ainsi dépourvu de tout lien avec la ratio legis qui sous-tend les dispositions de la directive 1999/13 relatives à la possibilité d’accorder une prolongation de délai dans le cas où des produits de substitution contenant peu ou pas de solvant sont encore en cours de développement. Il n’est donc pas justifié d’établir une distinction, en ce qui concerne cette possibilité, entre les installations dans lesquelles est utilisé un produit ayant une teneur constante en extraits secs et les autres installations, une telle distinction ne pouvant pas non plus être clairement déduite du libellé de l’annexe II B, point 2, premier alinéa, sous i), de cette directive.

59

Certes, au cours de l’audience, la Commission a fait valoir que, lors de l’adoption de la directive 1999/13, il existait déjà un grand nombre de produits de substitution pour les produits ayant une teneur constante en extraits secs. Selon la Commission, le législateur de l’Union a tenu compte de cette circonstance et doit donc être regardé, lorsqu’il a fixé, à l’annexe II B, point 2, second alinéa, sous i), de cette directive, les délais applicables au schéma standard, comme ayant entendu exclure toute possibilité d’une prolongation de délai en ce qui concerne les installations pour lesquelles on peut supposer une teneur constante du produit en extraits secs.

60

Toutefois, ni les dispositions de la directive 1999/13 ni les documents préparatoires de celle-ci ne permettent de confirmer les affirmations de la Commission.

61

À cet égard, il convient d’ajouter qu’une interprétation de l’annexe II B de la directive 1999/13 en ce sens que cette dernière s’opposerait à ce qu’une prolongation de délai soit accordée, lorsque des produits de substitution contenant peu ou pas de solvant sont encore en cours de développement, à l’exploitant d’une installation pour laquelle on peut supposer une teneur constante du produit en extraits secs irait, en tout état de cause, à l’encontre du principe de sécurité juridique, qui exige que la réglementation de l’Union permette aux intéressés de connaître avec exactitude l’étendue des obligations qu’elle leur impose et que ces derniers puissent connaître sans ambiguïté leurs obligations et prendre leurs dispositions en conséquence (voir, en ce sens, arrêts BGL, C‑78/01, EU:C:2003:490, point 71, ainsi que ArcelorMittal Luxembourg/Commission et Commission/ArcelorMittal Luxembourg e.a., C‑201/09 P et C‑216/09 P, EU:C:2011:190, point 68).

62

En effet, dans la mesure où une telle interprétation ne peut être clairement déduite du libellé de l’annexe II B de la directive 1999/13 et n’apparaît pas non plus pouvoir être confirmée ni au regard de la ratio legis sous-tendant les dispositions du point 2, premier alinéa, sous i), de cette annexe, relatives à la prolongation de délai, ni au regard de l’économie de ladite annexe, le principe de sécurité juridique s’oppose à ce que, sur le fondement de cette dernière, une entreprise, telle que Nannoka, se voie interdire la possibilité de bénéficier d’une telle prolongation de délai.

63

Il y a lieu ainsi de considérer qu’une prolongation de délai doit pouvoir être accordée quel que soit le schéma de réduction applicable à l’installation concernée, lorsque des produits de substitution contenant peu ou pas de solvant sont encore en cours de développement.

64

Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de répondre à la première question que l’annexe II B de la directive 1999/13 doit être interprétée en ce sens que la prolongation de délai qu’elle prévoit à son point 2, premier alinéa, sous i), peut être accordée à l’exploitant d’une «installation», au sens de l’article 2, point 1, de cette directive, pour la mise en œuvre de son schéma de réduction, lorsque des produits de substitution contenant peu ou pas de solvant sont encore en cours de développement, alors même qu’on peut supposer, pour cette installation, une teneur constante du produit en extraits secs et utiliser cette teneur pour définir le point de référence pour la réduction des émissions.

Sur les deuxième et troisième questions

65

Par ses deuxième et troisième questions, qu’il convient d’examiner ensemble, la juridiction de renvoi cherche à savoir, en substance, d’une part, si l’annexe II B, point 2, premier alinéa, sous i), de la directive 1999/13 doit être interprétée en ce sens qu’une prolongation de délai pour la mise en œuvre d’un schéma de réduction exige l’accomplissement d’un acte particulier par l’exploitant de l’installation concernée ou une autorisation des autorités compétentes et, d’autre part, sur la base de quels critères la durée de cette prolongation de délai peut être fixée.

66

À cet égard, il ressort du libellé même de l’annexe II B, point 2, premier alinéa, sous i), de la directive 1999/13 que la prolongation de délai visée à cette disposition doit être «accordée». Il en découle qu’une telle prolongation de délai ne peut intervenir de plein droit et doit nécessairement procéder d’une décision des autorités compétentes. En outre, ainsi que l’a relevé Mme l’avocat général au point 65 de ses conclusions, une telle décision suppose nécessairement une demande préalable de l’exploitant de l’installation concernée, celui-ci souhaitant être autorisé à déroger à des exigences qui, à défaut de prolongation de délai, lui seraient applicables.

67

Dans ce contexte, il importe de relever le rôle central conféré aux autorités compétentes par les dispositions de la directive 1999/13 dans le cadre de l’application par un exploitant d’un schéma de réduction.

68

En effet, en vertu de l’article 4, point 3, de la directive 1999/13, les exploitants souhaitant mettre en œuvre un schéma de réduction étaient tenus de le notifier aux autorités compétentes au plus tard le 31 octobre 2005. En outre, conformément à l’article 9, paragraphe 1, de cette directive, la conformité du schéma de réduction ainsi notifié avec les exigences du schéma de réduction contenu à l’annexe II B de ladite directive doit être prouvée par l’exploitant «à la satisfaction de l’autorité compétente». Enfin, en vertu du point 2 de l’annexe II B de la même directive, dans les cas où le schéma standard ne convient pas, «l’autorité compétente peut permettre à l’exploitant d’appliquer toute autre méthode qui, à son avis, répond aux principes» exposés au point 1 de cette annexe.

69

Il résulte de ces dispositions que l’autorité compétente dispose d’une marge d’appréciation lorsqu’elle doit statuer sur la demande d’un exploitant tendant à être autorisé à appliquer un schéma de réduction.

70

Il en va nécessairement de même s’agissant de l’octroi d’une prolongation de délai pour la mise en œuvre d’un tel schéma de réduction, cet octroi étant étroitement lié à l’autorisation accordée à un exploitant d’appliquer ce schéma.

71

Une prolongation de délai ne peut donc ainsi intervenir qu’en vertu d’une autorisation accordée par les autorités compétentes, sur demande de l’exploitant concerné.

72

À cet égard, l’annexe II B, point 2, premier alinéa, sous i), de la directive 1999/13 se borne à prévoir que, lorsque des produits de substitution contenant peu ou pas de solvant sont encore en cours de développement, une prolongation de délai doit être accordée à l’exploitant pour l’application de son schéma de réduction.

73

En tant qu’exception aux dispositions générales de la directive 1999/13, la prolongation de délai prévue à l’annexe II B, point 2, premier alinéa, sous i), de cette directive doit faire l’objet d’une interprétation stricte (voir, en ce sens, arrêt ACI Adam e.a., C‑435/12, EU:C:2014:254, point 22 et jurisprudence citée).

74

À cet égard, il résulte des termes mêmes de l’annexe II B, point 2, premier alinéa, sous i), de la directive 1999/13, prévoyant seulement une «prolongation» de délai, que l’application d’un schéma de réduction fondé sur cette annexe doit être limitée dans le temps.

75

En vue de déterminer si une prolongation de délai doit être accordée à un exploitant pour la mise en œuvre d’un schéma de réduction et de fixer la durée de la prolongation de délai éventuellement accordée, il convient de tenir compte des objectifs poursuivis par les dispositions de l’annexe II B de la directive 1999/13, relatives à la prolongation de délai, à savoir, ainsi qu’il a été rappelé au point 56 du présent arrêt, d’une part, encourager le développement de produits de substitution et, d’autre part, tenir compte du principe de proportionnalité.

76

Comme l’a relevé Mme l’avocat général aux points 56 et 57 de ses conclusions, il appartient ainsi aux autorités compétentes, dans le cadre de la marge d’appréciation dont elles disposent, de vérifier notamment que des produits de substitution aptes à être utilisés dans les installations concernées et à diminuer les émissions de composés organiques volatils sont effectivement en cours de développement et que les travaux en cours, au regard des éléments fournis, sont en mesure d’aboutir à la mise au point de tels produits.

77

Dans le cadre de l’examen de la proportionnalité de la prolongation de délai demandée par rapport à l’objectif d’encourager le développement de produits de substitution, il convient de tenir compte du rapport entre, d’une part, la réduction des émissions à laquelle il peut être parvenu grâce aux produits de substitution en cours de développement ainsi que le coût de ceux-ci et, d’autre part, les émissions supplémentaires engendrées par la prolongation du délai ainsi que les coûts d’éventuelles mesures alternatives. En outre, il y a lieu de vérifier qu’il n’existe pas de mesure alternative susceptible d’engendrer, à moindre coût, des réductions d’émissions similaires, voire plus importantes, et notamment que d’autres produits de substitution ne sont pas déjà disponibles.

78

Ainsi, le développement d’un produit de substitution qui promet d’importantes réductions des émissions est de nature à permettre qu’une telle prolongation de délai soit accordée à l’exploitant concerné.

79

S’agissant de la durée de la prolongation de délai éventuellement accordée, force est de constater que ni l’annexe II B de la directive 1999/13 ni aucune autre disposition de cette directive ne fournit d’indication à cet égard.

80

Sous peine de priver les autres dispositions de la directive 1999/13 de tout effet utile, l’annexe II B, point 2, premier alinéa, sous i), de cette directive ne saurait toutefois être interprétée en ce sens que les autorités compétentes doivent octroyer à l’exploitant concerné une prolongation de délai jusqu’à ce que des produits de substitution soient disponibles, sans aucune limitation dans le temps.

81

Il ressort à cet égard du considérant 8 de la directive 1999/13 que l’octroi d’une prolongation de délai en vertu de l’annexe II B, point 2, premier alinéa, sous i), de cette directive n’est envisageable que lorsque des produits de substitution contenant peu ou pas de solvant sont effectivement en cours de développement à la date où cette prolongation de délai doit être accordée et que l’on peut supposer qu’ils seront disponibles «au cours des prochaines années».

82

S’il ressort de cette disposition que la prolongation peut porter sur plusieurs années, il convient toutefois de considérer que la durée de celle-ci ne doit pas s’étendre au-delà de ce qui est nécessaire au développement des produits de substitution. Cela doit être apprécié au regard de l’ensemble des éléments pertinents, et notamment en mettant en balance, d’une part, l’importance des réductions d’émissions que permettront les produits de substitution en cours de développement ainsi que le coût de ces produits et, d’autre part, l’importance des émissions supplémentaires qui résultera de la prolongation du délai ainsi que le coût d’éventuelles mesures alternatives.

83

Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de répondre aux deuxième et troisième questions que l’annexe II B, point 2, premier alinéa, sous i), de la directive 1999/13 doit être interprétée en ce sens qu’une prolongation de délai pour la mise en œuvre d’un schéma de réduction exige une autorisation des autorités compétentes, laquelle suppose une demande préalable de la part de l’exploitant concerné. En vue de déterminer si une prolongation de délai doit être accordée à un exploitant pour la mise en œuvre d’un schéma de réduction et de fixer la durée de la prolongation de délai éventuellement accordée, il appartient à ces autorités compétentes, dans le cadre de la marge d’appréciation dont elles disposent, de vérifier notamment que des produits de substitution aptes à être utilisés dans les installations concernées et à diminuer les émissions de composés organiques volatils sont effectivement en cours de développement, que les travaux en cours, au regard des éléments fournis, sont en mesure d’aboutir à la mise au point de tels produits et qu’il n’existe pas de mesure alternative susceptible d’engendrer, à moindre coût, des réductions d’émissions similaires, voire plus importantes, et notamment que d’autres produits de substitution ne sont pas déjà disponibles. Il convient en outre de tenir compte du rapport entre, d’une part, les réductions d’émissions que permettront les produits de substitution ainsi que le coût de ces produits et, d’autre part, les émissions supplémentaires engendrées par la prolongation de délai ainsi que le coût d’éventuelles mesures alternatives. La durée de la prolongation de délai ne doit pas s’étendre au-delà de ce qui est nécessaire au développement des produits de substitution. Cela doit être apprécié au regard de l’ensemble des éléments pertinents, et notamment de l’importance des émissions supplémentaires engendrées par la prolongation de délai et du coût d’éventuelles mesures alternatives par rapport à l’importance des réductions d’émissions que permettront les produits de substitution en cours de développement et au coût de ces produits.

Sur les dépens

84

La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

 

Par ces motifs, la Cour (cinquième chambre) dit pour droit:

 

1)

L’annexe II B de la directive 1999/13/CE du Conseil, du 11 mars 1999, relative à la réduction des émissions de composés organiques volatils dues à l’utilisation de solvants organiques dans certaines activités et installations, doit être interprétée en ce sens que la prolongation de délai qu’elle prévoit à son point 2, premier alinéa, sous i), peut être accordée à l’exploitant d’une «installation», au sens de l’article 2, point 1, de cette directive, pour la mise en œuvre de son schéma de réduction des émissions de composés organiques volatils, lorsque des produits de substitution contenant peu ou pas de solvant sont encore en cours de développement, alors même qu’on peut supposer, pour cette installation, une teneur constante du produit en extraits secs et utiliser cette teneur pour définir le point de référence pour la réduction des émissions.

 

2)

L’annexe II B, point 2, premier alinéa, sous i), de la directive 1999/13 doit être interprétée en ce sens qu’une prolongation de délai pour la mise en œuvre d’un schéma de réduction des émissions de composés organiques volatils exige une autorisation des autorités compétentes, laquelle suppose une demande préalable de la part de l’exploitant concerné. En vue de déterminer si une prolongation de délai doit être accordée à un exploitant pour la mise en œuvre d’un schéma de réduction des émissions de composés organiques volatils et de fixer la durée de la prolongation de délai éventuellement accordée, il appartient à ces autorités compétentes, dans le cadre de la marge d’appréciation dont elles disposent, de vérifier notamment que des produits de substitution aptes à être utilisés dans les installations concernées et à diminuer les émissions de composés organiques volatils sont effectivement en cours de développement, que les travaux en cours, au regard des éléments fournis, sont en mesure d’aboutir à la mise au point de tels produits et qu’il n’existe pas de mesure alternative susceptible d’engendrer, à moindre coût, des réductions d’émissions similaires, voire plus importantes, et notamment que d’autres produits de substitution ne sont pas déjà disponibles. Il convient en outre de tenir compte du rapport entre, d’une part, les réductions d’émissions que permettront les produits de substitution en cours de développement ainsi que le coût de ces produits et, d’autre part, les émissions supplémentaires engendrées par la prolongation de délai ainsi que le coût d’éventuelles mesures alternatives. La durée de la prolongation de délai ne doit pas s’étendre au-delà de ce qui est nécessaire au développement des produits de substitution. Cela doit être apprécié au regard de l’ensemble des éléments pertinents, et notamment de l’importance des émissions supplémentaires engendrées par la prolongation de délai et du coût d’éventuelles mesures alternatives par rapport à l’importance des réductions d’émissions que permettront les produits de substitution en cours de développement et au coût de ces produits.

 

Signatures


( *1 ) Langue de procédure: le néerlandais.

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