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Document 62008CJ0476

    Arrêt de la Cour (huitième chambre) du 3 décembre 2009.
    Evropaïki Dynamiki - Proigmena Systimata Tilepikoinonion Pliroforikis kai Tilematikis AE contre Commission européenne.
    Pourvoi - Règlements (CE, Euratom) nos 1605/2002 et 2342/2002 - Marchés publics passés par les institutions communautaires pour leur propre compte - Erreur dans le rapport du comité d’évaluation - Obligation de motiver le rejet de l’offre du soumissionnaire.
    Affaire C-476/08 P.

    Recueil de jurisprudence 2009 I-00207*

    ECLI identifier: ECLI:EU:C:2009:752

    ARRÊT DE LA COUR (huitième chambre)

    3 décembre 2009 (*)

    «Pourvoi – Règlements (CE, Euratom) nos 1605/2002 et 2342/2002 – Marchés publics passés par les institutions communautaires pour leur propre compte – Erreur dans le rapport du comité d’évaluation – Obligation de motiver le rejet de l’offre du soumissionnaire»

    Dans l’affaire C‑476/08 P,

    ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice, introduit le 28 octobre 2008,

    Evropaïki Dynamiki – Proigmena Systimata Tilepikoinonion Pliroforikis kai Tilematikis AE, établie à Athènes (Grèce), représentée par Me N. Korogiannakis, dikigoros,

    partie requérante,

    l’autre partie à la procédure étant:

    Commission européenne, représentée par MM. M. Wilderspin et E. Manhaeve, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

    partie défenderesse en première instance,

    LA COUR (huitième chambre),

    composée de Mme R. Silva de Lapuerta, président de la septième chambre, faisant fonction de président de la huitième chambre, MM. E. Juhász (rapporteur) et T. von Danwitz, juges,

    avocat général: M. P. Mengozzi,

    greffier: Mme C. Strömholm, administrateur,

    vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 10 septembre 2009,

    vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

    rend le présent

    Arrêt

    1        Par son pourvoi, Evropaïki Dynamiki – Proigmena Systimata Tilepikoinonion Pliroforikis kai Tilematikis AE (ci-après «Evropaïki Dynamiki») demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de première instance des Communautés européennes du 10 septembre 2008, Evropaïki Dynamiki/Commission (T-59/05, ci‑après l’«arrêt attaqué»), par lequel celui-ci a:

    –        rejeté le recours introduit par Evropaïki Dynamiki visant à l’annulation de la décision de la Commission européenne du 23 novembre 2004 de ne pas retenir l’offre soumise par la requérante dans le cadre de l’appel d’offres relatif à la prestation de services de développement et de maintenance des systèmes d’information ainsi que de services d’assistance connexes, destinés aux systèmes d’information financière de la direction générale (DG) «Agriculture», et d’attribuer le marché au soumissionnaire retenu (ci‑après la «décision litigieuse»);

    –        condamné la Commission à supporter ses dépens ainsi qu’un cinquième de ceux exposés par Evropaïki Dynamiki, et

    –        condamné Evropaïki Dynamiki à supporter les quatre cinquièmes de ses dépens.

     Le cadre juridique

    2        La passation des marchés publics de services de la Commission est régie par les dispositions du titre V de la première partie du règlement (CE, Euratom) nº 1605/2002 du Conseil, du 25 juin 2002, portant règlement financier applicable au budget général des Communautés européennes (JO L 248, p. 1, ci‑après le «règlement financier»), ainsi que par les dispositions du titre V de la première partie du règlement (CE, Euratom) nº 2342/2002 de la Commission, du 23 décembre 2002, établissant les modalités d’exécution du règlement n° 1605/2002 (JO L 357, p. 1, ci‑après les «modalités d’exécution»). L’ensemble de ces dispositions s’inspire des directives communautaires en la matière, notamment, pour les marchés de services, de la directive 92/50/CEE du Conseil, du 18 juin 1992, portant coordination des procédures de passation des marchés publics de services (JO L 209, p. 1), telle que modifiée.

    3        L’article 100 du règlement financier prévoit:

    «1.      L’ordonnateur compétent désigne l’attributaire du marché, dans le respect des critères de sélection et d’attribution préalablement définis dans les documents d’appel à concurrence et des règles de passation des marchés.

    2.      Le pouvoir adjudicateur communique à tout candidat ou soumissionnaire écarté les motifs du rejet de sa candidature ou de son offre et, à tout soumissionnaire ayant fait une offre recevable et qui en fait la demande par écrit, les caractéristiques et les avantages relatifs de l’offre retenue ainsi que le nom de l’attributaire.

    Toutefois la communication de certains éléments peut être omise dans les cas où elle ferait obstacle à l’application des lois, serait contraire à l’intérêt public, porterait préjudice aux intérêts commerciaux légitimes d’entreprises publiques ou privées ou pourrait nuire à une concurrence loyale entre celles‑ci.»

    4        L’article 149, paragraphe 2, des modalités d’exécution dispose:

    «Le pouvoir adjudicateur communique, dans un délai maximal de quinze jours [de] calendrier à compter de la réception d’une demande écrite, les informations mentionnées à l’article 100, paragraphe 2, du règlement financier.»

     Les faits à l’origine du litige

    5        Les faits à l’origine du litige sont exposés aux points 10 à 33 de l’arrêt attaqué comme suit:

    «10      La requérante [Evropaïki Dynamiki] est une société de droit grec, active dans le domaine de la technologie de l’information et des communications.

    11      Par un avis de marché du 24 mars 2004, publié au Supplément au Journal officiel de l’Union européenne (JO 2004, S 59), sous la référence 2004/S 59‑050031, la Commission a lancé un appel d’offres portant sur les services de développement, de maintenance et d’assistance des systèmes d’information financière de la [DG] “Agriculture”. La procédure ainsi engagée devait aboutir à la conclusion d’un contrat-cadre d’une durée de trente‑six mois, reconductible pour une période de douze mois.

    […]

    14      Le point 9 du cahier des charges, relatif à l’examen des offres et à l’attribution du contrat, est rédigé dans les termes suivants:

    “9.       Évaluation des offres et attribution du contrat

    […]

    9.3.      Évaluation des offres – Critères d’attribution

    La Commission attribuera le contrat après avoir comparé les offres à la lumière des critères suivants:

    9.3.1.          Critères d’attribution

    –        Qualité de la proposition du soumissionnaire en termes d’exhaustivité, de clarté et de concision, de pertinence de l’information et de la documentation fournies, d’absence d’ambiguïté (20 %);

    –        La méthodologie proposée et l’organisation des prestations en vue de répondre aux besoins de la Commission/DG [‘Agriculture’]; en particulier, les mesures envisagées pour garantir la disponibilité en temps voulu de ressources suffisantes possédant les compétences proposées, ainsi qu’une gestion effective et efficace du projet et une communication avec la DG ‘Agriculture’ (40 %);

    –        Le contrôle de la qualité des prestations fournies et les garanties données sur le respect de la proposition (40 %).

    Le résultat de l’évaluation de chaque critère de qualité individuellement considéré doit, à tout le moins, atteindre 50 % de la pondération maximale attribuée à chaque critère. Les offres n’atteignant pas cette pondération minimale seront rejetées.

    Le résultat de l’évaluation globale (addition de la pondération reçue pour chaque critère) doit être, à tout le moins, de 65 points sur un total de 100. Les offres n’atteignant pas cette pondération totale minimale seront rejetées, même dans le cas où elles ont atteint la pondération minimale pour chaque critère de qualité.

    […]

    9.3.2.          Critère du prix

    […]

    9.4.      Attribution du contrat

    Le contrat sera attribué au soumissionnaire dont l’offre présente le meilleur rapport qualité-prix (l’offre économiquement la plus avantageuse) […]”

    […]

    16      Le 25 mars 2004, la requérante a manifesté son intérêt à participer à l’appel d’offres en cause et a demandé que lui soient envoyés les documents d’appel à la concurrence. Lesdits documents lui ont été envoyés le 30 mars 2004.

    17      Par lettre recommandée du 14 avril 2004, la requérante a présenté auprès de la Commission une première demande d’éclaircissements de certaines spécifications figurant au cahier des charges.

    18      Le 16 avril 2004, la requérante a adressé à la Commission une deuxième et une troisième demande d’éclaircissements supplémentaires visant les critères de sélection et d’attribution définis dans le cahier des charges.

    19      Par lettre du 20 avril 2004, la Commission a répondu auxdites demandes.

    20      Le même jour, à la lumière des réponses de la Commission, la requérante a demandé des éclaircissements supplémentaires.

    21      La Commission a répondu à cette demande par lettre du 21 avril 2004.

    22      Ce même jour, la requérante lui a adressé une nouvelle demande d’éclaircissements.

    23      La Commission a répondu à cette dernière demande de la requérante par courrier électronique du 22 avril 2004 en précisant qu’elle n’était pas à même de fournir une réponse aux questions qui lui avaient été posées dans la mesure où celles‑ci étaient parvenues au‑delà de la date fixée à cet effet au point 7.6 du cahier des charges, à savoir six jours avant la date de clôture de la soumission des offres.

    24      Le 26 avril 2004, date limite fixée pour la réception des offres, la requérante, en consortium avec Software AG Belgium SA […], a soumissionné à l’appel d’offres en cause.

    25      Les douze offres reçues par la DG “Agriculture” ont été évaluées par un comité d’évaluation constitué à cet effet et composé de six fonctionnaires de quatre DG de la Commission. Le marché a été attribué selon le critère de l’offre économiquement la plus avantageuse. Le comité d’évaluation, après avoir vérifié que les offres présentées remplissaient les critères d’exclusion et de sélection, a déclaré ces douze offres valables pour la phase d’attribution. Sur ces douze offres, seules deux, n’ayant pas obtenu la note totale minimale exigée par le cahier des charges de 65 points, ont été éliminées. Les résultats de l’évaluation concernant l’offre de la requérante et celle du soumissionnaire retenu, montrant les points attribués pour chaque critère de qualité, ainsi que les prix pondérés de chacune desdites offres, se lisent comme suit:



    Soumissionnaires

    Prix pondéré (€)

    Points sur un total de 100

    Points/prix (arrondi aux 4 décimales)

    Classement

    [Evropaïki Dynamiki]

    381,40

    74,33

    0,1949

    4

    IBM [Belgium SA]

    393,03

    90,70

    0,2308

    1


    26      Par lettre du 23 novembre [2004], envoyée le 30 novembre 2004, la Commission a informé la requérante du résultat de l’évaluation de son offre et du fait que celle‑ci n’avait pas été retenue dans la mesure où elle “n’atteignait pas le rapport qualité‑prix le plus élevé sur la base duquel le marché a[vait] été attribué”.

    27      Par télécopie et lettre recommandée du 2 décembre 2004, la requérante a demandé à la Commission de lui communiquer, dans les quinze jours de calendrier à compter de la réception de sa demande, les éléments suivants:

    –        l’identité du soumissionnaire dont l’offre avait été retenue, ainsi que celle de son ou de ses éventuels associés ou sous‑traitants et, le cas échéant, le pourcentage de marché à lui ou à leur attribuer;

    –        la note attribuée à chaque critère d’attribution en ce qui concerne tant son offre technique que celle du soumissionnaire retenu;

    –        le contenu du rapport du comité d’évaluation;

    –        des informations relatives aux aspects sur lesquels son offre et celle du soumissionnaire retenu sont comparables et, en particulier, les notes attribuées à son offre financière ainsi qu’à celle du soumissionnaire retenu.

    28      La Commission a répondu par lettre du 10 décembre [2004], envoyée le 13 décembre 2004. Elle a ainsi informé la requérante que le soumissionnaire retenu était IBM Belgium SA […], dont le sous‑traitant était ARHS Developments SA. La Commission a reproduit un passage du rapport du comité d’évaluation concernant l’offre de la requérante, ainsi que celle du soumissionnaire, tout en précisant que, pour des raisons de protection des intérêts commerciaux légitimes des autres soumissionnaires, il ne lui était pas possible de transmettre une copie complète dudit rapport contenant les informations relatives aux offres restantes soumises et non retenues. Le passage du rapport du comité d’évaluation repris indiquait les points obtenus par la requérante et le soumissionnaire retenu pour chacun des critères de qualité à la lumière desquels les offres avaient été évaluées. Y figuraient en outre les commentaires généraux du comité d’évaluation résultant de la comparaison de l’offre de la requérante avec celle du soumissionnaire retenu, rédigés dans les termes suivants:

    “[L’offre de la requérante est une] bonne offre, mais plutôt générale, constituant davantage une collection de bonnes pratiques qu’une proposition adaptée aux aspects spécifiques de la DG [‘Agriculture’] sur lesquels portaient les spécifications du cahier des charges (en particulier, les garanties offertes pour traiter les aspects économiques des systèmes financiers).”

    29      S’agissant de l’offre retenue, le comité d’évaluation a considéré qu’elle était une “très bonne offre, concise et claire” et qu’elle couvrait bien “tant les aspects techniques que financiers”. Il a ajouté:

    “L’offre garantit que le soumissionnaire sera en mesure de relever de manière satisfaisante les défis propres au domaine des [systèmes informatiques] financiers de la DG [‘Agriculture’].”

    30      Le 29 décembre 2004, la requérante a, par télécopie et lettre recommandée, sollicité la Commission pour obtenir des informations plus précises quant au rejet de son offre et à l’attribution du marché à un autre soumissionnaire. Elle y formulait en outre certains commentaires et objections au sujet du processus d’évaluation de son offre, ainsi que de celle du soumissionnaire retenu, à la lumière des critères de qualité, et compte tenu des informations données par la Commission dans sa lettre du 10 décembre 2004.

    31      Par télécopie et lettre recommandée du 30 décembre 2004, la requérante a communiqué à la Commission certaines données relatives à la situation financière de ARHS Developments SA ressortant d’une étude de marché effectuée entre-temps par elle. Elle demandait à la Commission d’ouvrir une enquête afin de vérifier et de confirmer les données en question et, le cas échéant, de les prendre en considération dans la procédure d’appel d’offres en cause.

    32      Par lettre du 13 janvier 2005, la Commission a informé la requérante qu’elle avait accusé réception de ses lettres des 29 et 30 décembre 2004, en précisant que les questions soulevées requéraient un examen soigneux et qu’une réponse à celles‑ci lui serait fournie dans les six semaines suivantes.

    33      Par lettre datée du 26 janvier [2005], envoyée le 7 février 2005, la Commission a répondu auxdites lettres. La requérante en a accusé réception le 9 février 2005.»

     La procédure devant le Tribunal et l’arrêt attaqué

    6        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 2 février 2005, Evropaïki Dynamiki a demandé l’annulation de la décision litigieuse et la condamnation de la Commission aux dépens.

    7        Le Tribunal a rejeté ce recours comme non fondé et a condamné la requérante à supporter les quatre cinquièmes de ses dépens.

     Les conclusions des parties devant la Cour

    8        Par son pourvoi, la requérante demande à la Cour:

    –        d’annuler l’arrêt attaqué;

    –        d’annuler la décision litigieuse, et

    –        de condamner la Commission aux dépens du pourvoi et, même en cas de rejet de celui-ci, aux dépens de première instance.

    9        La Commission demande à la Cour:

    –        de rejeter le pourvoi, et

    –        de condamner la requérante aux dépens afférents au pourvoi et de confirmer l’arrêt attaqué concernant les dépens relatifs à la procédure devant le Tribunal.

     Sur le pourvoi

    10      Au soutien de son pourvoi, Evropaïki Dynamiki invoque deux moyens, tirés, le premier, d’un défaut de motivation et, le second, qui est décomposé en deux branches, d’une erreur de droit.

     Sur le premier moyen

     Position des parties

    11      Le Tribunal a, selon la requérante, refusé d’admettre la discordance flagrante entre les critères d’attribution énoncés au point 5.2 du rapport du comité d’évaluation et ceux mentionnés au point 5.4 du même rapport. En qualifiant cette différence d’erreur typographique reconnue par la Commission et en considérant qu’elle n’avait eu aucune incidence sur la décision prise par le comité d’évaluation, le Tribunal se serait fondé uniquement sur une simple déclaration faite oralement à l’audience par l’agent de la Commission, qui aurait obtenu cette information d’un fonctionnaire de la DG «Agriculture» présent à cette audience, lequel n’était pas membre du comité d’évaluation. Or, cette affirmation ne serait aucunement étayée et le rapport du comité d’évaluation ne permettrait nullement de la déduire, mais établirait même le contraire. Par conséquent, le Tribunal aurait manqué à son obligation de motivation en n’explicitant pas le fondement sur lequel il s’est appuyé pour considérer que le comité d’évaluation avait appliqué les trois critères d’attribution de nature qualitative préalablement déterminés et précisés dans le cahier des charges conformément aux prescriptions réglementaires.

    12      La Commission souligne que les critères utilisés par le comité d’évaluation, malgré l’erreur typographique affectant à cet égard le point 5.4 du rapport du comité d’évaluation, ont été ceux mentionnés au point 5.2 de celui-ci. Ces critères sont identiques à ceux figurant dans le document communiqué aux membres du comité d’évaluation expliquant la méthode à suivre pour la sélection des offres et repris par la suite sous forme de tableau audit point 5.4. Le Tribunal se serait ainsi correctement fondé sur les explications fournies à cet égard par la Commission et aurait donc dûment motivé sa décision au point 112 de l’arrêt attaqué.

     Appréciation de la Cour

    13      Il ressort du dossier soumis à la Cour qu’il existe une erreur évidente dans le rapport du comité d’évaluation en cause. En effet, les critères d’attribution énoncés au point 5.2 de la version non confidentielle de ce rapport et ceux mentionnés au point 5.4 de ce même rapport sont discordants.

    14      À cet égard, la Commission a soutenu devant le Tribunal de même qu’aux points 4 à 7 de son mémoire en réponse devant la Cour que cette discordance n’était qu’une simple erreur de rédaction et que les trois alinéas du point 5.4 dudit rapport, mentionnant des critères d’évaluation erronés, n’étaient pas ceux qui ont été déterminants dans l’évaluation des offres. Le tableau figurant audit point 5.4 à la suite des alinéas erronés, contenant les notes attribuées à chaque offre pour chacun des critères de qualité ainsi que leur pondération, montre clairement que ces critères, de même que leur pondération, correspondent à ceux qui sont indiqués au point 5.2 du rapport du comité d’évaluation en cause et au point 9.3.1 du cahier des charges.

    15      Le Tribunal a retenu l’argument de la Commission, aux points 112 et 113 de l’arrêt attaqué, en estimant que cette erreur, de nature typographique, était sans pertinence, puisque le comité d’évaluation avait appliqué les trois critères d’attribution de nature qualitative préalablement déterminés et précisés dans le cahier des charges conformément aux prescriptions réglementaires.

    16      Il convient de rappeler que, conformément à la jurisprudence de la Cour, il appartient au seul Tribunal d’apprécier la valeur qu’il convient d’attribuer aux éléments de preuve produits devant lui (voir arrêts du 1er juin 1994, Commission/Brazzelli Lualdi e.a., C‑136/92 P, Rec. p. I‑1981, point 66, ainsi que du 16 septembre 1997, Blackspur DIY e.a./Conseil et Commission, C-362/95 P, Rec. p. I-4775, point 29).

    17      Or, le Tribunal ne saurait, sous réserve de l’obligation de respecter les principes généraux et les règles de procédure en matière de charge ainsi que d’administration de la preuve et de ne pas dénaturer les éléments de preuve, être tenu de motiver de manière expresse ses appréciations quant à la valeur de chaque élément de preuve qui lui a été soumis, notamment lorsqu’il considère que ceux-ci sont sans intérêt ou dépourvus de pertinence pour la solution du litige (voir arrêt du 15 juin 2000, Dorsch Consult/Conseil et Commission, C-237/98 P, Rec. p. I‑4549, point 51).

    18      Il n’apparaît pas que le Tribunal, en considérant que l’erreur contenue au point 5.4 du rapport du comité d’évaluation était sans pertinence sur le déroulement de la procédure de passation du marché public de services en cause, ait méconnu ladite obligation.

    19      Les critères d’attribution ont été déterminés au point 9.3.1 du cahier des charges, puis au point 3.3 de la méthode d’évaluation destinée au comité d’évaluation et, enfin, au point 5.2 du rapport du comité d’évaluation. En application de ces critères, un tableau récapitulatif des offres et le classement des soumissionnaires, dans lequel la requérante arrive en quatrième position, ont été établis par le comité d’évaluation au point 5.4 du rapport d’évaluation, où figure précisément la mention de critères d’évaluation erronés. Il en résulte que c’est à juste titre que le Tribunal a jugé que l’erreur typographique contenue audit point 5.4 s’est ainsi révélée sans pertinence pour le déroulement de la procédure.

    20      Par conséquent, le grief de la requérante, selon lequel le Tribunal se serait fondé uniquement sur une déclaration faite oralement à l’audience par l’agent de la Commission sur la base d’une information provenant d’un fonctionnaire de la DG «Agriculture» de la Commission présent à l’audience, qui n’était pas membre du comité d’évaluation, n’a aucune incidence.

    21      En tout état de cause, un agent de la Commission nommé conformément à l’article 19, première phrase, du statut de la Cour de justice représente la Commission à l’audience devant le Tribunal et, à ce titre, peut, lors de cette audience, faire des déclarations au nom de cette institution. Pour apprécier la valeur d’une telle déclaration, il est inutile de rechercher de quelle source, au sein de cette institution, cet agent aurait tiré l’information.

    22      Au vu de ce qui précède, il convient de conclure que, en ayant jugé que la requérante n’avait pas réussi à démontrer à suffisance de droit que la Commission aurait commis une erreur manifeste d’appréciation et, ainsi, que l’erreur typographique contenue au point 5.4 du rapport du comité d’évaluation n’avait pas affecté la procédure de passation du marché en cause, le Tribunal a correctement motivé sa décision.

    23      Par conséquent, le présent moyen doit être rejeté comme non fondé.

     Sur le second moyen

     Sur la seconde branche

    –       Position des parties

    24      Par la seconde branche de son second moyen, qu’il convient d’examiner en premier lieu, la requérante reproche au Tribunal d’avoir considéré que la motivation de la décision du comité d’évaluation rejetant son offre, qui lui a été communiquée par la Commission par lettre du 10 décembre 2004, était suffisante. En effet, le manque de précision des notes et des quelques observations générales du rapport du comité d’évaluation n’aurait pas permis à la requérante de préparer sa défense de manière satisfaisante.

    25      La Commission estime que le Tribunal n’a pas commis d’erreur de droit en considérant que les extraits de la version non confidentielle du rapport du comité d’évaluation indiquant le nom du soumissionnaire retenu, les avantages relatifs de son offre au regard des trois critères de qualité, la précision du calcul qui a permis de déterminer le rapport qualité-prix des offres, le classement de celles-ci et les commentaires généraux concernant la comparaison de l’offre de la requérante avec celle du soumissionnaire retenu constituent une motivation suffisante du rejet de l’offre de la requérante. Par ailleurs, le fait que cette motivation est succincte et la circonstance que, dans un premier temps, le rapport complet n’a pas été communiqué, mais que des explications additionnelles ont été fournies par la suite, ne remettent pas en cause le caractère adéquat de ladite motivation.

    –       Appréciation de la Cour

    26      Il convient de souligner que la lettre de la Commission du 10 décembre 2004, comme le précise le Tribunal aux points 126 à 129 de l’arrêt attaqué, contient plusieurs informations en réponse aux demandes de précisions formulées par la requérante, à savoir le nom du soumissionnaire retenu et celui de son sous-traitant, les avantages de l’offre retenue par rapport à celle de la requérante au regard des trois critères d’attribution qualitatifs déterminés dans le cahier des charges ainsi que la comparaison des offres en ce qui concerne le prix. Les informations communiquées ont été présentées sous la forme de trois tableaux. Le premier tableau permet de comparer l’offre de la requérante avec celle du soumissionnaire retenu en fonction des critères de qualité ainsi que de leur pondération. Le deuxième tableau explicite, au travers d’un résumé écrit, l’offre de la requérante et celle du soumissionnaire retenu. Le troisième tableau analyse le rapport qualité‑prix de l’offre de la requérante, en la comparant avec l’offre du soumissionnaire retenu.

    27      Ainsi, il ressort de ladite lettre du 10 décembre 2004 que l’offre de la requérante n’avait été classée, pour aucun des trois critères de qualité précisés dans le cahier des charges, en meilleure position que l’offre retenue. De plus, il résulte du troisième tableau que, dans le classement final, l’offre de la requérante était placée en quatrième position.

    28      Par conséquent, force est de constater que les informations communiquées par la Commission à la requérante répondent aux exigences prescrites aux articles 100, paragraphe 2, du règlement financier et 149, paragraphe 2, des modalités d’exécution.

    29      Le Tribunal a ainsi correctement appliqué les dispositions pertinentes.

    30      La seconde branche du second moyen doit dès lors être rejetée comme non fondée.

     Sur la première branche

    –       Position des parties

    31      Par la première branche de son second moyen, la requérante reproche au Tribunal d’avoir, tout en ayant constaté que la Commission avait répondu tardivement à ses demandes supplémentaires des 29 et 30 septembre 2004, par lettre datée du 26 janvier 2005, effectivement envoyée le 7 février 2005, conclu que ce retard n’avait pas affecté ses droits de la défense à l’égard de la décision litigieuse. Ainsi, en considérant ce motif comme insuffisant pour annuler cette décision malgré une violation caractérisée du devoir de diligence et du principe de bonne administration, le Tribunal aurait méconnu le droit communautaire applicable ainsi que le principe de transparence et d’égalité de traitement.

    32      La Commission estime que la réponse tardive qu’elle a fournie à la requérante, bien que constitutive d’un manquement au devoir de diligence et de bonne administration, n’a pas pour autant affecté les droits de la défense de cette dernière à l’égard de la décision litigieuse. Toutes les informations nécessaires lui auraient en effet été communiquées avant l’expiration du délai pendant lequel la requérante était en mesure de contester cette décision. Dès lors, selon la Commission, le Tribunal n’a pas commis l’erreur de droit qui lui est reprochée.

    –       Appréciation de la Cour

    33      Le Tribunal a constaté aux points 151 à 158 de l’arrêt attaqué que la Commission, en ne répondant pas aux demandes de la requérante des 29 et 30 décembre 2004 dans un délai raisonnable, avait manqué à son devoir de diligence et de bonne administration. Toutefois, la constatation d’une telle violation, pour le Tribunal, ne suffit pas à rendre illégale la décision litigieuse ni pour conclure à son annulation, dans la mesure où le retard avec lequel la Commission a répondu aux demandes de la requérante n’a pas affecté les droits de la défense de celle-ci à l’égard de ladite décision.

    34      Dans la mesure où, ainsi qu’il a été constaté aux points 26 et 28 du présent arrêt, la lettre de la Commission du 10 décembre 2004 contenait les informations requises, les demandes postérieures de la requérante des 29 et 30 décembre 2004 ainsi que la réponse de la Commission du 26 janvier 2005, envoyée à la requérante le 7 février 2005, ne jouent aucun rôle dans l’appréciation du fond de l’affaire.

    35      Dès lors, bien que la Commission ait manqué à son devoir de diligence et de bonne administration en ayant répondu tardivement à ces demandes, il n’en demeure pas moins que la requérante disposait déjà des informations nécessaires afin de sauvegarder ses droits de la défense à l’égard de la décision litigieuse.

    36      La première branche du second moyen doit ainsi être rejetée comme non fondée.

    37      Dans ces conditions, il y a lieu de rejeter le pourvoi dans son ensemble comme non fondé.

     Sur les dépens

    38      Aux termes de l’article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 118 du même règlement, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La Commission ayant conclu à la condamnation d’Evropaïki Dynamiki et celle-ci ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de la condamner aux dépens.

    Par ces motifs, la Cour (huitième chambre) déclare et arrête:

    1)      Le pourvoi est rejeté.

    2)      Evropaïki Dynamiki – Proigmena Systimata Tilepikoinonion Pliroforikis kai Tilematikis AE est condamnée aux dépens.

    Signatures


    * Langue de procédure: l’anglais.

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