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Document 62006CJ0514

    Arrêt de la Cour (première chambre) du 18 septembre 2008.
    Armacell Enterprise GmbH contre Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI).
    Pourvoi - Marque communautaire - Demande de marque communautaire verbale ARMAFOAM - Marque communautaire antérieure NOMAFOAM - Motif relatif de refus - Similitude des signes - Existence d’un motif relatif de refus dans une partie du territoire de la Communauté européenne.
    Affaire C-514/06 P.

    Recueil de jurisprudence 2008 I-00128*

    ECLI identifier: ECLI:EU:C:2008:511

    ARRÊT DE LA COUR (première chambre)

    18 septembre 2008 (*)

    «Pourvoi – Marque communautaire – Demande de marque communautaire verbale ARMAFOAM – Marque communautaire antérieure NOMAFOAM – Motif relatif de refus – Similitude des signes – Existence d’un motif relatif de refus dans une partie du territoire de la Communauté européenne»

    Dans l’affaire C‑514/06 P,

    ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice, introduit le 15 décembre 2006,

    Armacell Enterprise GmbH, établie à Münster (Allemagne), représentée par Me O. Spuhler, Rechtsanwalt,

    partie requérante,

    les autres parties à la procédure étant:

    Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. A. Folliard-Monguiral, en qualité d’agent,

    partie défenderesse en première instance,

    nmc SA, établie à Raeren-Eynatten (Belgique), représentée par Mes P. Péters et T. de Haan, avocats,

    partie intervenante en première instance,

    LA COUR (première chambre),

    composée de M. P. Jann, président de chambre, MM. A. Tizzano, A. Borg Barthet, M. Ilešič et E. Levits (rapporteur), juges,

    avocat général: Mme V. Trstenjak,

    greffier: Mme C. Strömholm, administrateur,

    vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 10 janvier 2008,

    vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

    rend le présent

    Arrêt

    1        Par son pourvoi, Armacell Enterprise GmbH (ci-après la «requérante») demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de première instance des Communautés européennes du 10 octobre 2006, Armacell/OHMI – nmc (ARMAFOAM) (T‑172/05, Rec. p. II-4061, ci-après l’«arrêt attaqué»), par lequel celui-ci a rejeté son recours contre la décision de la première chambre de recours de l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI) du 23 février 2005 (affaire R 552/2004-1, ci-après la «décision litigieuse»), relative à une procédure d’opposition entre nmc SA (ci-après «nmc») et la requérante.

     Le cadre juridique

    2        L’article 1er, paragraphe 2, du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), prévoit:

    «La marque communautaire a un caractère unitaire. Elle produit les mêmes effets dans l’ensemble de la Communauté: elle ne peut être enregistrée, transférée, faire l’objet d’une renonciation, d’une décision de déchéance des droits du titulaire ou de nullité, et son usage ne peut être interdit que pour l’ensemble de la Communauté. Ce principe s’applique sauf disposition contraire du présent règlement.»

    3        L’article 8 du règlement n° 40/94, intitulé «Motifs relatifs de refus», est libellé de la manière suivante:

    «1.      Sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement:

    […]

    b)      lorsqu’en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire dans lequel la marque antérieure est protégée; le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.

    2.      Aux fins du paragraphe 1, on entend par «marques antérieures»:

    a)      les marques dont la date de dépôt est antérieure à celle de la demande de marque communautaire, compte tenu, le cas échéant, du droit de priorité invoqué à l’appui de ces marques, et qui appartiennent aux catégories suivantes:

    i)      les marques communautaires;

    […]»

    4        L’article 43, paragraphe 5, du règlement n° 40/94 dispose:

    «S’il résulte de l’examen de l’opposition que la marque est exclue de l’enregistrement pour tout ou partie des produits ou des services pour lesquels la marque communautaire est demandée, la demande est rejetée pour les produits ou les services concernés. Dans le cas contraire, l’opposition est rejetée.»

    5        L’article 63 du règlement n° 40/94, intitulé «Recours devant la Cour de justice», prévoit les dispositions suivantes:

    «1.      Les décisions des chambres de recours statuant sur un recours sont susceptibles d’un recours devant la Cour de justice.

    2.      Le recours est ouvert pour incompétence, violation des formes substantielles, violation du traité, du présent règlement ou de toute règle de droit relative à leur application, ou détournement de pouvoir.

    […]

    4.      Le recours est ouvert à toute partie à la procédure devant la chambre de recours pour autant que la décision de celle-ci n’a pas fait droit à ses prétentions.

    […]»

    6        L’article 108 du règlement n° 40/94 énonce:

    «1.      Le demandeur ou le titulaire d’une marque communautaire peut requérir la transformation de sa demande ou de sa marque communautaire en demande de marque nationale:

    a)      dans la mesure où la demande de marque communautaire est rejetée, retirée ou réputée retirée;

    […]

    2.      La transformation n’a pas lieu:

    […]

    b)      en vue d’une protection dans un État membre où, selon la décision de l’[OHMI] ou de la juridiction nationale, la demande ou la marque communautaire est frappée d’un motif de refus d’enregistrement, de révocation ou de nullité.

    […]»

     Les antécédents du litige

    7        Le 3 décembre 2001, la requérante a présenté à l’OHMI, en vertu du règlement n° 40/94, une demande d’enregistrement en tant que marque communautaire du signe verbal «ARMAFOAM».

    8        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent de la classe 20 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante: «produits fabriqués en mousses élastomères, thermoplastiques ou duroplastiques se présentant comme des composants de système ou des produits finis».

    9        La demande d’enregistrement de marque communautaire a fait l’objet d’une opposition formée par nmc, laquelle a invoqué un risque de confusion, au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94, entre le signe verbal «ARMAFOAM» et sa marque communautaire verbale antérieure NOMAFOAM, enregistrée le 31 octobre 1997 pour les produits suivants:

    –        classe 17: «Produits en matières plastiques mi-ouvrées, matières à calfeutrer, à étouper et à isoler, mousse de polyéthylène (matière mi-ouvrée), matières servant à l’isolation thermique et acoustique, matières de rembourrage en matières plastiques, matières d’emballage (rembourrage) en matières plastiques, compositions isolantes contre l’humidité et le froid compris dans cette classe, matières pour l’insonorisation, tuyaux flexibles non métalliques»;

    –        classe 19: «Matériaux de construction (non métalliques); tuyaux rigides non métalliques pour la construction; revêtements de murs et de parois compris dans cette classe»;

    –        classe 20: «Produits en matières plastiques non compris dans d’autres classes, récipients d’emballage en matières plastiques, matelas, coussins, coussinets en matières plastiques servant de supports, notamment pour s’asseoir et/ou s’agenouiller lors de travaux de jardinage et/ou de bricolage, d’activités sportives, de gymnastique, de récréation et de loisirs»;

    –        classe 27: «Tapis, tapis antiglissants, tapis pour automobiles, paillassons, nattes; tapis, nattes et paillassons en matières plastiques servant de supports, notamment pour s’asseoir et/ou s’agenouiller lors de travaux de jardinage et/ou de bricolage, d’activités sportives, de gymnastique, de récréation et de loisirs; revêtements de sols, revêtements de murs et de parois, revêtements isolants non compris dans d’autres classes, tentures murales non en matières textiles», et

    –        classe 28: «Articles de gymnastique et de sport non compris dans d’autres classes».

    10      Par décision du 24 mai 2004, la division d’opposition a rejeté l’opposition au motif que le signe verbal «ARMAFOAM» et la marque antérieure étaient suffisamment différents pour que tout risque de confusion chez le consommateur communautaire moyen soit écarté sur le territoire de la Communauté européenne.

    11      Saisie du recours formé contre ladite décision par nmc, la première chambre de recours de l’OHMI a, par la décision litigieuse, annulé la décision de la division d’opposition. Elle a constaté que, du fait de la similitude visuelle et phonétique des deux marques en conflit et du fait de la très grande similitude des produits qui pourrait être suffisante pour compenser le niveau plus faible de la similitude visuelle et phonétique de ces marques, il existait un risque de confusion de celles-ci, en particulier du point de vue du public pertinent non anglophone.

     Le recours devant le Tribunal et l’arrêt attaqué

    12      Par l’arrêt attaqué, le Tribunal a rejeté le recours en annulation contre la décision litigieuse, fondé par la requérante sur un moyen unique tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94, au motif que la chambre de recours aurait constaté, à tort, l’existence d’un risque de confusion.

    13      Le Tribunal a, au point 33 de l’arrêt attaqué, tout d’abord rappelé sa jurisprudence, selon laquelle:

    «il résulte du caractère unitaire de la marque communautaire, consacré à l’article 1er, paragraphe 2, du règlement nº 40/94, qu’une marque communautaire antérieure est protégée de façon identique dans tous les États membres. Les marques communautaires antérieures sont, dès lors, opposables à toute demande de marque ultérieure qui porterait atteinte à leur protection, ne fût-ce que par rapport à la perception des consommateurs d’une partie du territoire communautaire. Il s’ensuit que le principe consacré à l’article 7, paragraphe 2, du règlement nº 40/94, selon lequel il suffit, pour refuser l’enregistrement d’une marque, qu’un motif absolu de refus n’existe que dans une partie de la Communauté, s’applique, par analogie, également au cas d’un motif de refus relatif au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement nº 40/94 […]»

    14      Ensuite, au point 34 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a défini, à l’instar de la chambre de recours et des parties, le public pertinent comme étant composé de l’ensemble des consommateurs de la Communauté.

    15      Ayant rejeté aux points 40 à 43 de l’arrêt attaqué, l’exception d’irrecevabilité soulevée par nmc à l’égard des contestations de la requérante relatives à la comparaison des produits, le Tribunal a procédé, aux points 44 à 55 de l’arrêt attaqué, à l’examen de ceux-ci et a constaté que la chambre de recours avait retenu à juste titre l’existence d’une similitude, voire d’une identité, des produits visés par les marques en conflit, au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94.

    16      S’agissant de la comparaison des marques en conflit, le Tribunal a indiqué de manière liminaire, au point 56 de l’arrêt attaqué, que la chambre de recours avait constaté l’existence d’une similitude entre elles, en particulier du point de vue du public pertinent non anglophone.

    17      En ce qui concerne la comparaison conceptuelle de ces marques, le Tribunal a d’abord rappelé, au point 57 de l’arrêt attaqué, que la chambre de recours avait, d’une part, relevé que lesdites marques, prises dans leur ensemble, étaient des constructions inventées qui n’étaient porteuses d’aucun sens cohérent et ne se prêtaient donc pas à une comparaison conceptuelle, tout en considérant, d’autre part, que, parmi les consommateurs des produits concernés, seuls les consommateurs anglophones étaient susceptibles d’isoler spontanément, au sein des marques en conflit, le suffixe «foam» correspondant au mot anglais signifiant «mousse».

    18      Ensuite, le Tribunal a formulé sa position de la manière suivante au point 60 de l’arrêt attaqué:

    «Le Tribunal considère que l’appréciation de la chambre de recours est bien fondée s’agissant, tout au moins, des consommateurs non anglophones, au sujet desquels il n’y a pas lieu de procéder à une comparaison conceptuelle des marques en conflit. À cet égard, la position de la requérante, consistant à soutenir que les consommateurs non anglophones, tout comme leurs homologues anglophones, identifieront spontanément le suffixe ‘foam’ comme le terme anglais signifiant ‘mousse’ et donc comme un terme descriptif des produits visés par les marques en conflit, est manifestement erronée, cette position n’étant, au demeurant, nullement étayée par des éléments du dossier.»

    19      S’agissant de la comparaison visuelle et phonétique des marques en conflit, le Tribunal a relevé, au point 64 de l’arrêt attaqué, que les seules différences objectivement décelables par le public non anglophone résultent des préfixes «ar» et «no» de ces marques.

    20      Ainsi que le Tribunal l’a indiqué au point 65 de l’arrêt attaqué, le fait que la partie initiale des marques verbales peut être susceptible de retenir l’attention du consommateur davantage que les parties suivantes ne saurait remettre en cause le principe, selon lequel l’examen de la similitude des marques doit prendre en compte l’impression d’ensemble produite par ces marques, dès lors que le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à l’examen de ses différents détails.

    21      Le Tribunal a, par conséquent, considéré au point 66 de l’arrêt attaqué que, s’agissant du public non anglophone, la différence des préfixes «ar» et «no» des marques en conflit n’est pas de nature, en dépit de leur position en début de marque, à supprimer l’impression de grande similitude visuelle et phonétique produite par lesdites marques.

    22      Le Tribunal a dès lors conclu aux points 67 et 68 de l’arrêt attaqué:

    «67      Il s’ensuit que, sur les plans visuel et phonétique, les marques en conflit sont similaires, tout au moins s’agissant du public non anglophone. Dès lors, et compte tenu du fait qu’une comparaison conceptuelle de ces marques est dénuée de pertinence s’agissant de ce public, il y a lieu de conclure que ces marques sont similaires à l’égard de celui-ci.

    68      Eu égard à cette conclusion et à la jurisprudence, rappelée au point 33 ci-dessus, selon laquelle les marques communautaires antérieures sont opposables à toute demande de marque ultérieure qui porterait atteinte à leur protection, ne fût-ce que par rapport à la perception des consommateurs d’une partie du territoire communautaire, il convient de constater que c’est à bon droit que la chambre de recours a considéré, au point 19 de la décision [litigieuse], que les marques en conflit étaient similaires au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94, sans qu’il soit besoin de trancher la question de savoir si ces marques sont ou non également similaires à l’égard du public anglophone.»

     La procédure devant la Cour

    23      Dans son pourvoi, la requérante conclut à ce qu’il plaise à la Cour:

    –      annuler l’arrêt attaqué;

    –        condamner l’OHMI aux dépens afférents à la procédure devant la Cour;

    –        annuler la décision litigieuse, et

    –        condamner l’OHMI aux dépens afférents aux procédures devant le Tribunal et devant l’OHMI.

    24      L’OHMI conclut à ce qu’il plaise à la Cour:

    –        rejeter le pourvoi comme en partie irrecevable et en partie non fondé, et

    –        condamner la requérante aux dépens.

    25      nmc conclut à ce qu’il plaise à la Cour:

    –        rejeter le pourvoi, et

    –        condamner la partie requérante aux dépens.

     Sur le pourvoi

    26      Au soutien de son pourvoi, la requérante invoque deux moyens, tirés respectivement d’une violation de l’article 43, paragraphe 5, seconde phrase, du règlement n° 40/94, lu en combinaison avec l’article 8, paragraphe 1, sous b), de ce règlement, et d’une violation de l’article 63, paragraphe 2, dudit règlement.

     Sur la première branche du premier moyen et sur le second moyen

     Argumentation des parties

    27      Par la première branche du premier moyen, ainsi que par le second moyen, qu’il convient d’examiner ensemble, la requérante reproche au Tribunal d’avoir omis de statuer sur la question de la similitude des marques telle qu’elle peut être perçue par le public anglophone.

    28      D’une part, selon la requérante, en déclarant, au point 68 de l’arrêt attaqué, que la similitude des marques en conflit perçue par la population non anglophone de la Communauté suffisait à créer une similitude entre ces marques et en ne se prononçant pas sur la question, jugée dépourvue de pertinence, de leur similitude en ce qui concerne le public anglophone, le Tribunal aurait méconnu l’article 43, paragraphe 5, seconde phrase, du règlement n° 40/94, lu en combinaison avec l’article 8, paragraphe 1, sous b), de ce règlement.

    29      Elle estime que, dans la mesure où une partie importante de l’ensemble de la population de la Communauté est capable de parler anglais et dans la mesure où le Tribunal a constaté au point 34 de l’arrêt attaqué que le public pertinent était composé de l’ensemble des consommateurs de la Communauté, celui-ci ne pouvait pas valablement se contenter de déclarer que la similitude alléguée des marques en conflit n’existe que pour une partie de l’ensemble du public définie de manière vague, à savoir le public non anglophone. Le Tribunal aurait dû également se prononcer sur la question de la similitude de ces marques s’agissant de l’autre partie du public pertinent, à savoir le public anglophone.

    30      D’autre part, en omettant de prendre en compte ce public anglophone lors de l’examen de la similitude des marques en conflit, le Tribunal n’aurait pas suffisamment motivé sa décision et aurait commis ainsi une violation des «formes substantielles» au sens de l’article 63, paragraphe 2, du règlement n° 40/94.

    31      En effet, puisque la requérante avait soumis l’intégralité de la décision litigieuse au contrôle juridictionnel du Tribunal, elle pouvait valablement prétendre à ce que le Tribunal traite de manière étayée la totalité des questions et des aspects, y compris la question de la similitude des marques du point de vue du public anglophone. En outre, notamment, en vue des décisions ultérieures à prendre s’agissant du signe «ARMAFOAM», il lui serait important de savoir dans quel territoire ou dans quelle zone linguistique de la Communauté le risque de confusion existe.

    32      L’obligation de suffisamment motiver une décision juridictionnelle devant être considérée comme une caractéristique de principe de la confiance légitime applicable dans l’ensemble du droit communautaire, le Tribunal aurait également violé ce principe.

    33      L’OHMI allègue à titre principal que la première branche du premier moyen ainsi que le second moyen sont irrecevables.

    34      Premièrement, en reprochant au Tribunal d’avoir omis de statuer sur la question de la similitude des marques du point de vue du public anglophone, la requérante soulèverait pour la première fois devant la Cour un moyen qui n’a pas été soulevé devant les services de l’OHMI ni devant le Tribunal et modifierait ainsi l’objet du litige, en violation de l’article 113, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour.

    35      Si la requérante souhaitait que le Tribunal tranche la question du risque de confusion dans chacune des parties du territoire communautaire où la marque antérieure est protégée, elle aurait dû le saisir d’une demande formulée en ce sens. Le Tribunal n’ayant pas été saisi d’une telle demande, la requérante n’est pas fondée à contester, à ce stade de la procédure, la portée territoriale de l’appréciation du risque de confusion opérée par le Tribunal.

    36      Deuxièmement, la requérante n’aurait pas démontré son intérêt à obtenir l’annulation de l’arrêt attaqué pour le motif relatif à la non-prise en compte du public anglophone, ledit arrêt ne la privant pas de la possibilité de demander la transformation de sa demande de marque communautaire en demande de marque nationale en vertu de l’article 108, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 40/94, ce à quoi la requérante n’aurait pas encore procédé.

    37      À titre subsidiaire, l’OHMI fait valoir que la première branche du premier moyen et le second moyen sont non fondés.

    38      L’OHMI rappelle que, dans l’arrêt du 16 septembre 2004, Metro-Goldwyn-Mayer Lion/OHMI – Moser Grupo Media (Moser Grupo Media) (T-342/02, Rec. p. II-319l), ainsi que dans l’ordonnance du 11 mai 2006, TeleTech Holdings/OHMI – Teletech International (TELETECH INTERNATIONAL) (T-194/05, Rec. p. II‑1367, points 25 à 28), le Tribunal a indiqué qu’il ne résulte pas de l’article 43, paragraphe 5, première phrase, du règlement n° 40/94 que l’OHMI soit obligé de fonder le rejet de la demande de marque sur tous les motifs de refus d’enregistrement invoqués à l’appui d’une opposition et susceptibles de fonder ce rejet. Le Tribunal ayant dispensé l’OHMI de l’obligation d’examiner d’office s’il existe un risque de confusion par rapport à chacun des droits antérieurs, pour autant que la demande de marque communautaire puisse être rejetée dans sa totalité sur la base d’une partie des droits antérieurs invoqués à l’appui de l’opposition, celui-ci devrait, par analogie, être dispensé de l’obligation d’examiner d’office s’il existe un risque de confusion dans toutes les parties du territoire où la marque antérieure est enregistrée, pour autant que la demande de marque communautaire puisse être rejetée dans sa totalité au motif qu’il existe un risque de confusion dans une partie de ce territoire.

    39      L’article 63 du règlement n° 40/94 ne conférant pas au Tribunal un pouvoir d’appréciation plus étendu que celui qui est reconnu à l’OHMI, le raisonnement sus indiqué s’appliquerait au Tribunal mutatis mutandis. De même, l’article 63 du règlement n° 40/94 ne saurait avoir pour effet d’imposer au Tribunal des obligations plus lourdes que celles qui pèsent sur l’OHMI.

    40      L’analogie, établie au point 33 de l’arrêt attaqué entre le principe consacré par l’article 7, paragraphe 2, du règlement n° 40/94 et le principe applicable à un motif relatif de refus, consacré par l’article 8, paragraphe 1, sous b), de ce règlement, serait dès lors fondée.

    41      S’agissant de la première branche du premier moyen, nmc fait valoir que le Tribunal, dont le raisonnement est étayé par des références à sa jurisprudence constante à ce sujet, n’a pas commis d’erreur de droit en jugeant, au point 33 de l’arrêt attaqué, que le caractère unitaire de la marque communautaire implique une protection identique dans tous les États membres et que le principe consacré à l’article 7, paragraphe 2, du règlement n° 40/94 s’applique par analogie au cas d’un motif relatif de refus au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), de ce règlement.

    42      Lorsque la marque antérieure est une marque communautaire, la marque dont l’enregistrement est demandé ne peut être enregistrée en tant que marque communautaire que s’il n’existe de motif relatif de refus dans aucun État membre ni dans aucune région linguistique. Il serait inacceptable d’enregistrer des marques communautaires qui, par leur similitude, présentent un risque de confusion avec des marques antérieures couvrant la totalité ou une partie du territoire communautaire, en violation des droits qui leur sont attachés. Le constat du Tribunal, au point 34 de l’arrêt attaqué, que le public pertinent est composé de l’ensemble des consommateurs de la Communauté ne signifierait pas qu’un risque de confusion doive exister dans tout le territoire de la Communauté.

    43      S’agissant du second moyen, nmc fait valoir que, dès lors qu’un risque de confusion a été constaté dans une partie de la Communauté, il n’est pas nécessaire d’examiner si le risque de confusion existe dans toutes les autres parties ou zones linguistiques de celle-ci.

     Appréciation de la Cour

    –        Sur la recevabilité

    44      Il convient, d’emblée, d’examiner la première exception d’irrecevabilité, soulevée à l’égard de la première branche du premier moyen et du second moyen par l’OHMI.

    45      Ainsi que le Tribunal l’a relevé aux points 57, 61 et 62 de l’arrêt attaqué, lors de la comparaison des marques en conflit, la chambre de recours a procédé à l’analyse de ces marques du point de vue du public anglophone et non anglophone pour conclure, ainsi qu’il a également été rappelé au point 56 de l’arrêt attaqué, à l’existence d’une similitude entre ces marques, en particulier du point de vue du public pertinent non anglophone.

    46      En contestant la décision litigieuse, la requérante a fait valoir que, selon elle, la seconde partie des marques en conflit, à savoir, le mot anglais «foam», sera perçue par le public pertinent comme purement descriptive des produits visés par ces marques, l’anglais étant la langue décisive, du point de vue du public pertinent, pour l’appréciation de la similitude conceptuelle des marques en cause.

    47      Or le Tribunal a estimé, au point 68 de l’arrêt attaqué, que c’est à bon droit que la chambre de recours a considéré que les marques en conflit étaient «similaires» au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94, sans qu’il soit besoin de trancher la question de savoir si ces marques sont ou non également similaires à l’égard du public anglophone.

    48      Il résulte de ce qui précède que la question de la similitude des marques en cause, du point de vue du public anglophone, faisait partie de l’objet du litige devant le Tribunal, la requérante estimant qu’il doit s’agir du principal angle d’analyse et le Tribunal jugeant, au contraire, cette question dépourvue de pertinence au vue de la constatation de la similitude des marques du point de vue du public non anglophone.

    49      Par conséquent, en reprochant au Tribunal d’avoir omis de statuer sur la question de la similitude des marques du point de vue du public anglophone, la requérante ne modifie pas l’objet du litige et ne viole pas l’article 113, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour.

    50      S’agissant de la seconde exception d’irrecevabilité, soulevée par l’OHMI, il convient de relever que, en vertu de l’article 56, deuxième alinéa, du statut de la Cour de justice, un pourvoi peut être formé par toute partie ayant partiellement ou totalement succombé en ses conclusions.

    51      Le Tribunal ayant rejeté, par l’arrêt attaqué, les conclusions de la requérante visant à l’annulation de la décision litigieuse, celle-ci justifie d’un intérêt à se pourvoir contre cet arrêt, indépendamment de la question de savoir si celui-ci la prive de la possibilité de demander la transformation de sa demande de marque communautaire en marque nationale.

    52      À cet égard, la question de savoir si le moyen tiré de l’omission par le Tribunal de statuer sur la question de similitude des marques du point de vue du public anglophone peut entraîner l’annulation de l’arrêt attaqué dépend de l’appréciation du fond dudit moyen et ne saurait influencer la recevabilité de celui-ci.

    53      Il y a lieu, dès lors, de constater que la première branche du premier moyen et le second moyen sont recevables.

    –        Sur le fond

    54      Il convient, tout d’abord, de rappeler que l’article 1er, paragraphe 2, du règlement n° 40/94 précise que la marque communautaire a un caractère unitaire. En effet, sauf exceptions (voir, à cet égard, l’article 106 sur l’interdiction de l’usage des marques communautaires et l’article 107 sur les droits antérieurs de portée locale du règlement n° 40/94), la marque communautaire «produit les mêmes effets dans l’ensemble de la Communauté; elle ne peut être enregistrée, transférée, faire l’objet d’une renonciation, d’une décision de déchéance des droits du titulaire ou de nullité, et son usage ne peut être interdit, que pour l’ensemble de la Communauté» (voir arrêt du 22 juin 1994, IHT Internationale Heiztechnik et Danzinger, C‑9/93, Rec. p. I‑2789, point 55).

    55      Conformément à l’article 8, paragraphes 1, sous b), et 2, du règlement n° 40/94, dans le cas où la marque antérieure invoquée à l’appui d’une opposition est une marque communautaire, la marque dont l’enregistrement est demandé est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire communautaire.

    56      Contrairement à ce que la requérante tend à soutenir, il ne découle pas de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 que, pour que l’enregistrement d’une marque communautaire soit refusé sur le fondement de cette disposition, le risque de confusion doive exister dans tous les États membres et dans toutes les zones linguistiques de la Communauté.

    57      En effet, le caractère unitaire de la marque communautaire implique qu’une marque communautaire antérieure est opposable à toute demande d’enregistrement de marque communautaire qui porterait atteinte à la protection de la première marque, ne fût-ce que par rapport à la perception des consommateurs d’une partie du territoire communautaire.

    58      Par conséquent, ayant établi que l’analyse de la chambre de recours n’est pas entachée d’erreur s’agissant de la comparaison des marques en cause du point de vue du public pertinent non anglophone, le Tribunal pouvait, à bon droit, rejeter le recours de la requérante sans procéder à la comparaison de ces marques du point de vue du public anglophone.

    59      Ensuite, il y a lieu de rejeter l’argument de la requérante selon lequel le Tribunal aurait dû statuer également sur la question de la similitude desdites marques du point de vue du public pertinent anglophone, en tenant compte de l’éventualité de la transformation de la demande de marque communautaire de la requérante en demande de marque nationale.

    60      Il est vrai, ainsi qu’il résulte de l’article 108, paragraphe 2, sous b), du règlement n° 40/94, que les motifs de rejet de la demande d’enregistrement de marque communautaire déterminent si cette demande peut être enregistrée au niveau national.

    61      Toutefois, la finalité de la procédure d’opposition est de donner aux entreprises la possibilité de s’opposer, selon une procédure unique, aux demandes de marques communautaires qui pourraient créer un risque de confusion avec leurs marques ou leurs droits antérieurs, et non de régler de manière préalable des conflits possibles au niveau national.

    62      Ainsi qu’il résulte des motifs, et notamment du point 68 de l’arrêt attaqué, le Tribunal n’a confirmé les appréciations de la chambre de recours qu’en ce qui concerne la similitude des marques en conflit perçue par le public non anglophone. Il s’ensuit, ainsi que l’a également indiqué l’OHMI, que l’arrêt attaqué ne prive pas la requérante de la possibilité de demander la transformation de la demande d’enregistrement de marque communautaire en marque nationale pour autant que cette demande concerne les pays anglophones.

    63      Enfin, il y a lieu de constater que, contrairement à ce qu’affirme la requérante, en se limitant à statuer sur le risque de confusion du point de vue du public pertinent non anglophone, le Tribunal n’a pas violé l’obligation de motiver ses arrêts.

    64      En effet, les points 33 et 68 de l’arrêt attaqué indiquent à suffisance de droit les raisons pour lesquelles le Tribunal s’est abstenu de statuer sur la question de la similitude des marques du point de vue du public anglophone.

    65      Compte tenu de ce qui précède, il y a lieu de rejeter la première branche du premier moyen et le second moyen en tant que non fondés.

     Sur la seconde branche du premier moyen

     Argumentation des parties

    66      Par la seconde branche du premier moyen, la requérante reproche au Tribunal d’avoir conclu à tort à la similitude entre les marques en conflit même en ce qui concerne la perception que peut en avoir le public communautaire non anglophone et fait valoir que, par conséquent, les conditions d’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 n’étaient pas réunies.

    67      Selon l’OHMI et nmc, la seconde branche du premier moyen serait irrecevable. La requérante n’avancerait aucun élément de droit à l’appui de son affirmation selon laquelle l’article 8, paragraphe l, sous b), du règlement n° 40/94 aurait été méconnu et se bornerait à critiquer l’appréciation des faits par le Tribunal, notamment, en ce qui concerne la similitude des signes en cause, le Tribunal s’appuyant sur une analyse de la compréhension du mot anglais «foam» dans les parties non anglophones du territoire de la Communauté. Or, n’ayant pas établi que le Tribunal aurait négligé un quelconque élément pertinent dans la comparaison des signes ou aurait dénaturé les faits ou des éléments de preuve, la requérante ne pourrait demander que la Cour substitue sa propre appréciation des faits à celle du Tribunal.

     Appréciation de la Cour

    68      S’agissant de la seconde branche du premier moyen, force est de constater que, par son argumentation, la requérante se borne, en réalité, à contester l’appréciation des faits à laquelle le Tribunal s’est livré.

    69      Or, conformément aux articles 225, paragraphe 1, CE et 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice, le pourvoi est limité aux questions de droit. En effet, le Tribunal est seul compétent pour constater et apprécier les faits pertinents ainsi que pour apprécier les éléments de preuve. L’appréciation des faits et des éléments de preuve ne constitue donc pas, sous réserve du cas de leur dénaturation, une question de droit soumise, comme telle, au contrôle de la Cour dans le cadre d’un pourvoi (voir notamment, en ce sens, arrêts du 19 septembre 2002, DKV/OHMI, C-104/00 P, Rec. p. I-7561, point 22; du 12 janvier 2006, Deutsche SiSi-Werke/OHMI, C-173/04 P, Rec. p. I-551, point 35, et du 22 juin 2006, Storck/OHMI, C-25/05 P, Rec. p. I-5719, point 40).

    70      Aucune dénaturation des faits et des éléments de preuve soumis au Tribunal n’étant alléguée en l’espèce, il y a lieu d’écarter la seconde branche du premier moyen comme irrecevable et, partant, de rejeter le pourvoi dans son ensemble.

     Sur les dépens

    71      Aux termes de l’article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 118 du même règlement, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. L’OHMI et nmc ayant conclu à la condamnation de la requérante et celle-ci ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de la condamner aux dépens.

    Par ces motifs, la Cour (première chambre) déclare et arrête:

    1)      Le pourvoi est rejeté.

    2)      Armacell Enterprise GmbH est condamnée aux dépens.

    Signatures


    * Langue de procédure: l’anglais.

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