Choose the experimental features you want to try

This document is an excerpt from the EUR-Lex website

Document 62005CJ0383

Arrêt de la Cour (première chambre) du 22 mars 2007.
Raffaele Talotta contre État belge.
Demande de décision préjudicielle: Cour de cassation - Belgique.
Liberté d'établissement - Article 52 du traité CE (devenu, après modification, article 43 CE) - Contribuable non-résident qui exerce une activité non salariée - Fixation de bases minimales d'imposition à l'égard des seuls contribuables non-résidents - Justification par des raisons d'intérêt général - Efficacité des contrôles fiscaux - Absence.
Affaire C-383/05.

Recueil de jurisprudence 2007 I-02555

ECLI identifier: ECLI:EU:C:2007:181

Affaire C-383/05

Raffaele Talotta

contre

État belge

(demande de décision préjudicielle, introduite par la Cour de cassation (Belgique))

«Liberté d'établissement — Article 52 du traité CE (devenu, après modification, article 43 CE) — Contribuable non-résident qui exerce une activité non salariée — Fixation de bases minimales d'imposition à l'égard des seuls contribuables non-résidents — Justification par des raisons d'intérêt général — Efficacité des contrôles fiscaux — Absence»

Conclusions de l'avocat général M. P. Mengozzi, présentées le 16 novembre 2006 

Arrêt de la Cour (première chambre) du 22 mars 2007 

Sommaire de l'arrêt

Libre circulation des personnes — Liberté d'établissement — Législation fiscale

(Traité CE, art. 52 (devenu, après modification, art. 43 CE))

L'article 52 du traité (devenu, après modification, article 43 CE) s'oppose à la réglementation d'un État membre en matière d'impôt sur le revenu qui prévoit, dans le cadre de l'évaluation de la base imposable à défaut d'éléments probants fournis par le contribuable ou l'administration, des bases minimales d'imposition à l'égard des seuls contribuables non-résidents.

En effet, le revenu perçu dans le cadre d'une activité non salariée sur le territoire de l'État membre concerné, que ce soit par un contribuable résident ou un contribuable non-résident, relève de la même catégorie de revenus. En outre, la situation d'un contribuable résident et celle d'un contribuable non-résident présentent pour l'administration fiscale concernée, dans l'hypothèse où une partie des opérations de ces contribuables serait effectuée sur le territoire d'un autre État membre, les mêmes difficultés, de sorte que ces deux catégories de contribuables se trouvent dans une situation objectivement comparable. Dans ces conditions, la distinction fondée sur le critère de la résidence constitue une discrimination indirecte puisqu'elle risque de jouer principalement au détriment des ressortissants d'autres États membres, les non-résidents étant le plus souvent des non-nationaux.

(cf. points 26, 28, 32, 38 et disp.)




ARRÊT DE LA COUR (première chambre)

22 mars 2007 (*)

«Liberté d’établissement – Article 52 du traité CE (devenu, après modification, article 43 CE) − Contribuable non-résident qui exerce une activité non salariée − Fixation de bases minimales d’imposition à l’égard des seuls contribuables non‑résidents − Justification par des raisons d’intérêt général − Efficacité des contrôles fiscaux − Absence»

Dans l’affaire C-383/05,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 234 CE, introduite par la Cour de cassation (Belgique), par décision du 7 octobre 2005, parvenue à la Cour le 24 octobre 2005, dans la procédure

Raffaele Talotta

contre

État belge,

LA COUR (première chambre),

composée de M. P. Jann, président de chambre, MM. R. Schintgen, A. Borg Barthet, M. Ilešič (rapporteur) et E. Levits, juges,

avocat général: M. P. Mengozzi,

greffier: M. R. Grass,

considérant les observations présentées:

–       pour M. Talotta, par Mes X. Thiebaut et X. Pace, avocats,

–       pour le gouvernement belge, par M. M. Wimmer, en qualité d’agent, assisté de Me B. van de Walle de Ghelcke, avocat,

–       pour la Commission des Communautés européennes, par MM. R. Lyal et D. Martin, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 16 novembre 2006,

rend le présent

Arrêt

1       La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 52 du traité CE (devenu, après modification, article 43 CE).

2       Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant M. Talotta à l’État belge au sujet de l’application à son égard, en sa qualité de contribuable non-résident, d’une base minimale d’imposition au titre de l’exercice d’imposition 1992.

 Le cadre juridique

3       L’impôt sur le revenu des personnes physiques et morales est régi en Belgique par le code des impôts sur les revenus 1992 (Moniteur belge du 30 juillet 1992) lequel, dans sa version applicable à l’époque des faits au principal, prévoit à son article 341, premier alinéa:

«Sauf preuve contraire, l’évaluation de la base imposable peut être faite, pour les personnes morales comme pour les personnes physiques, d’après des signes ou indices d’où résulte une aisance supérieure à celle qu’attestent les revenus déclarés.»

4       L’article 342 du même code énonce:

«§ 1er. À défaut d’éléments probants fournis soit par les intéressés, soit par l’administration, les bénéfices ou profits visés à l’article 23, §1er, 1° et 2°, sont déterminés, pour chaque contribuable, eu égard aux bénéfices ou profits normaux d’au moins trois contribuables similaires et en tenant compte, suivant le cas, du capital investi, du chiffre d’affaires, du nombre d’ouvriers, de la force motrice utilisée, de la valeur locative des terres exploitées, ainsi que de tous autres renseignements utiles.[…]

§ 2. Le Roi détermine, eu égard aux éléments indiqués au § 1er, alinéa 1er, le minimum des bénéfices imposables dans le chef des firmes étrangères opérant en Belgique.»

5       L’article 182 de l’arrêté royal du 27 août 1993 d’exécution du code des impôts sur les revenus 1992 (Moniteur belge du 13 septembre 1993, ci-après l’«arrêté royal du 27 août 1993») dispose:

«§ 1er. Le minimum des bénéfices imposables dans le chef des firmes étrangères opérant en Belgique qui sont taxables selon la procédure de comparaison prévue à l’article 342, §1er, alinéa 1er, du code des impôts sur les revenus 1992, est fixé comme suit: […]

3° entreprises des secteurs du commerce et de la fourniture de services :

a)      […] horeca [(hôtels, restaurants, cafés)] […]: 100 [BEF] par 1000 [BEF] de chiffre d’affaires avec un minimum de 300 000 [BEF] par membre du personnel (nombre moyen pour l’année envisagée);

[…]

§ 2. En aucun cas, le montant des bénéfices imposables déterminé conformément au § 1er ne peut être inférieur à 400 000 [BEF].

[…]»

6       Aux termes de l’article 24, § 5, de la convention entre la Belgique et le Luxembourg en vue d’éviter les doubles impositions et de régler certaines autres questions en matière d’impôts sur le revenu et sur la fortune, signée à Luxembourg le 17 septembre 1970 (ci-après la «convention»):

«L’imposition d’un établissement stable qu’une entreprise d’un État contractant a dans l’autre État contractant n’est pas établie dans cet autre État d’une façon moins favorable que l’imposition des entreprises de cet autre État qui exercent la même activité.»

 Le litige au principal et la question préjudicielle

7       M. Talotta, qui réside au Grand-Duché de Luxembourg, exploite, en qualité de personne physique, un restaurant en Belgique.

8       N’ayant pas établi sur le territoire belge son domicile fiscal, M. Talotta est assujetti en Belgique à l’impôt des non‑résidents personnes physiques uniquement pour les revenus perçus dans cet État membre.

9       M. Talotta ayant souscrit tardivement sa déclaration à l’impôt des non‑résidents personnes physiques au titre de l’exercice d’imposition 1992, l’administration fiscale belge lui a fait part de son intention de l’imposer d’office en application de l’article 342, § 2, du code des impôts sur les revenus 1992. Cette disposition permet à ladite administration, à défaut d’éléments probants fournis soit par le contribuable, soit par l’administration, de taxer, en fonction du chiffre d’affaires et du nombre de membres du personnel, les firmes étrangères opérant en Belgique, par référence à un minimum de bénéfices imposables déterminé par l’arrêté royal du 27 août 1993, qui ne pouvait être, pour celles opérant dans le secteur horeca, inférieur à 400 000 BEF pour l’exercice d’imposition en cause au principal.

10     Sur le fondement de cette législation, l’administration fiscale belge a, pour l’exercice d’imposition 1992, mis à la charge de M. Talotta une cotisation à l’impôt des non-résidents personnes physiques, établie sur la base de six membres du personnel.

11     Cette même administration a, par une décision du 23 juin 1998, rejeté la réclamation présentée par M. Talotta contre ladite cotisation.

12     Le requérant au principal a contesté cette décision devant la cour d’appel de Liège qui, par un arrêt du 16 juin 2004, a rejeté le recours présenté par l’intéressé.

13     Dans son pourvoi introduit devant la Cour de cassation, M. Talotta a fait valoir, par la première branche du premier grief invoqué, que la cour d’appel de Liège n’avait pas régulièrement motivé l’arrêt attaqué, en méconnaissance de l’article 149 de la Constitution belge, dès lors qu’elle n’avait pas répondu à son moyen tiré de ce que l’imposition mise à sa charge avait été établie selon des modalités moins favorables que celles qui sont appliquées à l’égard des entreprises belges exerçant la même activité. M. Talotta a soutenu, par la seconde branche de son premier grief, que ladite cour d’appel, en décidant que l’imposition en cause au principal avait été légalement établie par application des articles 342, § 2, du code des impôts sur les revenus 1992 et 182 de l’arrêté royal du 27 août 1993, avait violé l’article 24, § 5, de la convention et l’article 52 du traité.

14     Après avoir rejeté la première branche du premier grief invoqué comme manquant en fait, la Cour de cassation a décidé, en ce qui concerne la seconde branche du premier grief, de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante:

«[L’article 52 du traité] doit-il être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une disposition de droit national qui, tel l’article 182 de l’arrêté royal du 27 août 1993, pris en application de l’article 342, § 2, du code des impôts sur les revenus 1992, applique aux seuls non-résidents des bases minimales d’imposition?»

Sur la question préjudicielle

15     Par sa question, la juridiction de renvoi cherche à savoir si l’article 52 du traité s’oppose à la réglementation d’un État membre, telle que celle qui résulte de l’article 342, § 2, du code des impôts sur les revenus 1992 et de l’article 182 de l’arrêté royal du 27 août 1993, qui prévoit des bases minimales d’imposition à l’égard des seuls contribuables non‑résidents.

16     Il convient d’emblée de rappeler que si la fiscalité directe relève de la compétence des États membres, il n’en reste pas moins que ces derniers doivent exercer celle-ci dans le respect du droit communautaire (arrêt du 7 septembre 2004, Manninen, C-319/02, Rec. p. I-7477, point 19 et jurisprudence citée).

17     Les règles d’égalité de traitement prohibent non seulement les discriminations ostensibles fondées sur la nationalité, mais encore toutes formes dissimulées de discrimination qui, par application d’autres critères de distinction, aboutissent en fait au même résultat (arrêt du 14 février 1995, Schumacker, C-279/93, Rec. p. I-225, point 26 et jurisprudence citée).

18     Une discrimination ne peut consister que dans l’application de règles différentes à des situations comparables ou bien dans l’application de la même règle à des situations différentes (arrêts Schumacker, précité, point 30, et du 14 septembre 1999, Gschwind, C-391/97, Rec. p. I-5451, point 21).

19     En ce qui concerne la fiscalité directe, la Cour a admis, dans des affaires relatives à la taxation des revenus de personnes physiques, que la situation des résidents et celle des non-résidents dans un État donné ne sont, en règle générale, pas comparables, car elles présentent des différences objectives tant du point de vue de la source du revenu que du point de vue de la capacité contributive personnelle ou de la prise en compte de la situation personnelle et familiale (arrêts Schumacker, précité, points 31 à 34; du 11 août 1995, Wielockx, C-80/94, Rec. p. I‑2493, point 18, et du 27 juin 1996, Asscher, C-107/94, Rec. p. I-3089, point 41). Elle a toutefois précisé que, en présence d’un avantage fiscal dont le bénéfice serait refusé aux non-résidents, une différence de traitement entre ces deux catégories de contribuables pouvait être qualifiée de discrimination au sens du traité dès lors qu’il n’existait aucune différence de situation objective de nature à fonder une différence de traitement sur ce point entre les deux catégories de contribuables (arrêts Schumacker, précité, points 36 à 38, et Asscher, précité, point 42).

20     À cet égard, il y a lieu de relever qu’il ressort du dossier soumis à la Cour que l’article 342, § 1er, du code des impôts sur les revenus 1992, vise à régler les situations dans lesquelles le contribuable, résident ou non‑résident, n’a pas fourni à l’administration fiscale des éléments probants concernant ses bénéfices ou profits.

21     En ce qui concerne les contribuables résidents, il ressort encore du dossier soumis à la Cour que l’administration fiscale belge peut, conformément aux critères fixés par l’article 342, § 1er du code des impôts sur les revenus 1992, déterminer le bénéfice à prendre en considération par comparaison avec les bénéfices normaux d’au moins trois contribuables résidents similaires.

22     En cas d’impossibilité de recourir à cette méthode de détermination du bénéfice, il ressort également du dossier soumis à la Cour que ladite administration peut, conformément à l’article 341, premier alinéa, dudit code, appliquer à l’égard des seuls contribuables résidents la méthode forfaitaire de taxation fondée sur les «signes ou indices d’où résulte une aisance supérieure à celle qu’attestent les revenus déclarés».

23     En revanche, le chiffre d’affaires des contribuables non-résidents est, à défaut d’éléments probants, déterminé par application de bases minimales d’imposition.

24     Dès lors, force est de constater que la réglementation nationale en cause au principal traite différemment les contribuables selon qu’ils sont ou non résidents en Belgique.

25     Or, on ne peut admettre que l’État membre d’établissement puisse appliquer des bases minimales d’imposition uniquement à l’égard des contribuables non-résidents du seul fait de leur résidence dans un autre État membre, sous peine de vider l’article 52 du traité de son contenu (voir, par analogie, arrêt du 28 janvier 1986, Commission/France, C‑270/83, Rec. p. 273, point 18).

26     En effet, le revenu perçu par un contribuable résident, dans le cadre d’une activité non salariée sur le territoire de l’État membre concerné, et celui qui est acquis par un contribuable non‑résident, dans le cadre d’une activité également non salariée exercée sur le territoire de cet État membre, sont rangés dans la même catégorie de revenus, provenant d’activités non salariées exercées sur le territoire du même État membre.

27     Le gouvernement belge fait valoir, au soutien de ses affirmations qu’il existe des différences objectives entre les situations des résidents et des non-résidents en ce qui concerne les moyens de preuves dont dispose l’administration fiscale pour établir la base des revenus imposables, que, dans l’hypothèse où une partie des opérations d’un contribuable non‑résident serait effectuée sur le territoire d’un État membre autre que celui où il exerce son activité non salariée, un éventuel échange d’informations avec l’État de résidence par le mécanisme prévu par la directive 77/799/CEE du Conseil, du 19 décembre 1977, concernant l’assistance mutuelle des autorités compétentes des États membres dans le domaine des impôts directs (JO L 336, p. 15), ne paraît ni réaliste ni efficace pour remédier aux difficultés pratiques soulevées par l’application de la taxation par comparaison, car l’administration fiscale belge ne dispose pas dans un tel cas, d’une part, de renseignements communiqués par l’État de résidence dans le cadre d’échanges de renseignements spontanés ou automatiques et, d’autre part, d’éléments précis, de sorte que la demande d’échange de renseignements ne serait pas recevable.

28     Or, ainsi que l’a relevé M. l’avocat général au point 70 de ses conclusions, un contribuable résident et un contribuable non‑résident présentent pour l’administration fiscale concernée, dans l’hypothèse où une partie des opérations de ces contribuables serait effectuée sur le territoire d’un État membre autre que celui où ils exercent leur activité non salariée, les mêmes difficultés, de sorte que ces deux catégories de contribuables se trouvent dans une situation objectivement comparable.

29     En outre, il y a lieu de rappeler que la directive 77/799 peut, dans l’hypothèse où une partie des opérations d’un contribuable serait effectuée sur le territoire d’un État membre autre que celui où il exerce son activité non salariée, être invoquée par un État membre afin d’obtenir, de la part des autorités compétentes d’un autre État membre, toutes les informations susceptibles de lui permettre l’établissement correct des impôts sur le revenu ou toutes les informations qu’il juge nécessaires pour apprécier le montant exact de l’impôt sur le revenu dû par un redevable en fonction de la législation qu’il applique (arrêt du 26 juin 2003, Skandia et Ramstedt, C-422/01, Rec. p. I-6817, point 42 et jurisprudence citée).

30     Partant, force est de constater que, au sens de la réglementation nationale en cause au principal, les contribuables résidents et les contribuables non‑résidents se trouvent dans une situation objectivement comparable.

31     Cette interprétation n’est aucunement infirmée par l’observation du gouvernement belge selon laquelle les bases minimales d’imposition au sens de la réglementation nationale en cause au principal sont souvent plus favorables aux contribuables non‑résidents que la taxation par comparaison appliquée aux contribuables résidents. En effet, à supposer même que le régime fiscal belge soit le plus souvent favorable aux contribuables non-résidents, il n’empêche que, lorsque ce régime s’avère désavantageux pour lesdits contribuables, il aboutit à une inégalité de traitement par rapport aux contribuables résidents et crée ainsi une entrave à la liberté d’établissement garantie par l’article 52 du traité (voir, par analogie, arrêt du 14 décembre 2000, AMID, C‑141/99, Rec. p. I-11619, point 27 et jurisprudence citée).

32     Dans ces conditions, une réglementation d’un État membre telle que celle qui résulte de l’article 342, § 2, du code des impôts sur les revenus 1992 et de l’article 182 de l’arrêté royal du 27 août 1993, qui prévoit des bases minimales d’imposition à l’égard des seuls contribuables non‑résidents, constitue une discrimination indirecte en raison de la nationalité au sens de l’article 52 du traité. En effet, même si ladite réglementation prévoit une distinction fondée sur le critère de la résidence en ce sens qu’elle refuse aux non-résidents certains avantages en matière d’imposition accordés, en revanche, aux résidents sur le territoire national, elle risque de jouer principalement au détriment des ressortissants d’autres États membres, car les non-résidents sont le plus souvent des non-nationaux (voir, par analogie, arrêt Schumacker, précité, point 28).

33     Il convient toutefois de s’interroger sur une éventuelle justification de cette discrimination.

34     Le gouvernement belge fait valoir que l’application des bases minimales d’imposition à l’égard des seuls contribuables non‑résidents serait justifiée par la nécessité d’assurer l’efficacité des contrôles fiscaux et qu’elle serait conforme au principe de proportionnalité. Il précise que la méthode de taxation par comparaison prévue pour les contribuables résidents n’est pas applicable aux contribuables non‑résidents en raison de difficultés d’ordre pratique, notamment de l’impossibilité de recourir à la directive 77/799.

35     À cet égard, il convient de relever que l’efficacité des contrôles fiscaux constitue une raison impérieuse d’intérêt général susceptible de justifier une restriction à l’exercice des libertés fondamentales garanties par le traité (voir, en ce sens, arrêt du 8 juillet 1999, Baxter e.a., C-254/97, Rec. p. I‑4809, point 18 et jurisprudence citée).

36     Or, il convient de constater que, d’une part, les difficultés d’ordre pratique invoquées par le gouvernement belge existent, ainsi qu’il ressort du point 28 du présent arrêt, de la même manière au regard des contribuables résidents et que, d’autre part, il ressort du point 29 du même arrêt que l’État membre concerné a, sur le fondement de la directive 77/799, la possibilité de recourir à des échanges d’informations avec les autres États membres.

37     Dans ces circonstances, la nécessité de garantir l’efficacité des contrôles fiscaux ne justifie pas l’existence d’une différence de traitement de sorte qu’il y a lieu d’appliquer aux contribuables non-résidents un traitement identique à celui prévu pour les contribuables résidents.

38     Eu égard à tout ce qui précède, il convient de répondre à la question posée que l’article 52 du traité s’oppose à la réglementation d’un État membre, telle que celle qui résulte de l’article 342, § 2, du code des impôts sur les revenus 1992 et de l’article 182 de l’arrêté royal du 27 août 1993, qui prévoit des bases minimales d’imposition à l’égard des seuls contribuables non-résidents.

 Sur les dépens

39     La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

Par ces motifs, la Cour (première chambre) dit pour droit:

L’article 52 du traité CE (devenu, après modification, article 43 CE) s’oppose à la réglementation d’un État membre, telle que celle qui résulte de l’article 342, § 2, du code des impôts sur les revenus 1992 et de l’article 182 de l’arrêté royal du 27 août 1993 d’exécution du code des impôts sur les revenus 1992, qui prévoit des bases minimales d’imposition à l’égard des seuls contribuables non‑résidents.

Signatures


* Langue de procédure: le français.

Top