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Document 62005CJ0252

Arrêt de la Cour (deuxième chambre) du 10 mai 2007.
Regina, à la demande de Thames Water Utilities Ltd contre South East London Division, Bromley Magistrates' Court (District Judge Carr).
Demande de décision préjudicielle: High Court of Justice (England & Wales), Queen's Bench Division (Administrative Court) - Royaume-Uni.
Déchets - Directives 75/442/CEE, 91/156/CEE et 91/271/CEE - Eaux usées s'échappant d’un réseau de canalisations - Qualification - Champ d'application des directives 75/442/CEE et 91/271/CEE.
Affaire C-252/05.

Recueil de jurisprudence 2007 I-03883

ECLI identifier: ECLI:EU:C:2007:276

Parties
Motifs de l'arrêt
Dispositif

Parties

Dans l’affaire C-252/05,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 234 CE, introduite par la High Court of Justice (England & Wales), Queen’s Bench Division (Administrative Court) (Royaume‑Uni), par décision du 20 mai 2005, parvenue à la Cour le 15 juin 2005, dans la procédure

Regina, à la demande de:

Thames Water Utilities Ltd,

contre

South East London Division, Bromley Magistrates’ Court (District Judge Carr),

en présence de:

Environment Agency,

LA COUR (deuxième chambre),

composée de M. C. W. A. Timmermans, président de chambre, MM. P. Kūris, J. Makarczyk, L. Bay Larsen et J.‑C. Bonichot (rapporteur), juges,

avocat général: M me J. Kokott,

greffier: M me C. Strömholm, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 11 janvier 2007,

considérant les observations présentées:

– pour Thames Water Utilities Ltd, par M. R. McCracken, QC, et M. G. Jones,

– pour l’Environment Agency, par M. D. Hart, QC, et M. M. Harris, barrister,

– pour le gouvernement du Royaume-Uni, par M me E. O’Neill, en qualité d’agent, assistée de M. J. Maurici, barrister,

– pour le gouvernement belge, par M. M. Wimmer, en qualité d’agent,

– pour le gouvernement néerlandais, par M me H. Sevenster, en qualité d’agent,

– pour la Commission des Communautés européennes, par M. M. Konstantinidis et M me D. Lawunmi, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 8 février 2007,

rend le présent

Arrêt

Motifs de l'arrêt

1. La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de la directive 75/442/CEE du Conseil, du 15 juillet 1975, relative aux déchets (JO L 194, p. 39), telle que modifiée par la directive 91/156/CEE du Conseil, du 18 mars 1991 (JO L 78, p. 32, ci-après la «directive 75/442»), et de la directive 91/271/CEE du Conseil, du 21 mai 1991, relative au traitement des eaux urbaines résiduaires (JO L 135, p. 40). La juridiction de renvoi cherche en substance à déterminer si les eaux usées qui s’échappent d’un réseau de traitement constituent des déchets au sens de la directive 75/442 et, en cas de réponse positive, si elles sont exclues du champ d’application de cette dernière en vertu de son article 2, paragraphe 1, sous b), iv), ou de son article 2, paragraphe 2.

Le cadre juridique

Le droit communautaire

En ce qui concerne les déchets

2. L’article 1 er de la directive 75/442 dispose:

«Aux fins de la présente directive, on entend par:

a) déchet: toute substance ou tout objet qui relève des catégories figurant à l’annexe I, dont le détenteur se défait ou dont il a l’intention ou l’obligation de se défaire.

[…]

b) producteur: toute personne dont l’activité a produit des déchets (‘producteur initial’) et/ou toute personne qui a effectué des opérations de prétraitement, de mélange ou autres conduisant à un changement de nature ou de composition de ces déchets;

c) détenteur: le producteur des déchets ou la personne physique ou morale qui a les déchets en sa possession;

[…]»

3. L’article 2 de cette même directive dispose:

«1. Sont exclus du champ d’application de la présente directive:

[…]

b) lorsqu’ils sont déjà couverts par une autre législation:

[…]

iv) les eaux usées, à l’exception des déchets à l’état liquide;

[…]

2. Des dispositions spécifiques particulières ou complémentaires de celles de la présente directive, destinées à réglementer la gestion de certaines catégories de déchets peuvent être fixées par des directives particulières.»

En ce qui concerne les eaux usées

4. L’article 1 er de la directive 91/271 dispose:

«La présente directive concerne la collecte, le traitement et le rejet des eaux urbaines résiduaires ainsi que le traitement et le rejet des eaux usées provenant de certains secteurs industriels.

La présente directive a pour objet de protéger l’environnement contre une détérioration due aux rejets des eaux résiduaires précitées.»

5. L’article 3 de cette même directive prévoit, en son paragraphe 1, premier alinéa, que «[l]es États membres veillent à ce que toutes les agglomérations soient équipées de systèmes de collecte des eaux urbaines résiduaires» et, en son paragraphe 2, que «les systèmes de collecte décrits au paragraphe 1 doivent répondre aux prescriptions de l’annexe I point A».

6. L’annexe I, point A, de la directive 91/271 impose les obligations suivantes:

«[...]

La conception, la construction et l’entretien des systèmes de collecte sont entrepris sur la base des connaissances techniques les plus avancées, sans entraîner de coûts excessifs, notamment en ce qui concerne:

[…]

– la prévention des fuites,

[…]».

Le droit national

En ce qui concerne les déchets

7. L’article 33 (1) de l’Environmental Protection Act 1990 dispose:

«[…] il est interdit à toute personne – a) d’éliminer des déchets contrôlés […] dans le sol ou sur le sol, quel que soit l’endroit, à moins qu’une licence de gestion des déchets s’applique et que l’élimination s’effectue conformément à cette licence.»

8. À l’article 75 (4) de l’Environmental Protection Act 1990, les «déchets contrôlés» sont définis comme les «ordures ménagères, déchets industriels et commerciaux ou autres déchets de ce type».

9. L’article 75 (8) de l’Environmental Protection Act 1990 dispose que «les déchets auxquels il est fait référence au (7) et dans le présent point ne comprennent pas les eaux usées (incluant le contenu des toilettes ou provenant des toilettes), sauf si les règlements en disposent différemment».

10. Les Controlled Waste Regulations 1992 ont été édictés en application de l’Environmental Protection Act 1990.

11. En vertu de la règle 5 (1) des Controlled Waste Regulations 1992, «[…] les déchets décrits à l’annexe 3 doivent être traités comme des déchets industriels aux fins de la partie II de la loi».

12. Le paragraphe 7 (a) de l’annexe 3 fait référence aux «eaux usées ne relevant pas d’une description figurant à la règle 7 […] qui sont éliminées par le sol ou sur le sol». Cependant, la règle 7 (1) (a) exclut «les eaux usées, les boues ou les boues de fosses septiques qui sont traitées, conservées ou éliminées (autrement qu’en recourant à une installation mobile) dans la zone d’implantation («curtilage») de stations de traitement des eaux usées» du champ des déchets contrôlés, sauf à ce que les opérations de traitement, de conservation et d’élimination ne fassent pas partie intégrante de l’activité des stations.

13. En vertu de la règle 7 A des Controlled Waste Regulations 1992, «aux fins de la partie II de l’Environmental Protection Act 1990, les déchets qui ne sont pas des déchets visés par la directive ne doivent pas être traités comme déchets ménagers, industriels ou commerciaux».

14. Enfin, les Controlled Waste Regulations 1992 définissent les «déchets visés par la directive» comme «toute substance ou objet des catégories énumérées à la partie II de l’annexe 4 dont le producteur ou la personne qui les détient se défait, a l’intention de se défaire ou est tenu de se défaire, à l’exception toutefois de tout ce qui est exclu du champ d’application de la directive en vertu de son article 2»; les termes «se défaire» ont une signification identique à celle qu’ils ont dans la directive et le terme «producteur» signifie toute personne dont l’activité a produit des déchets visés par la directive ou qui a effectué des opérations de prétraitement, de mélange ou autres conduisant à un changement de nature ou de composition de ces déchets».

En ce qui concerne les eaux usées

15. Au moment où les infractions alléguées ont été commises, l’article 94 (1) du Water Industry Act 1991 disposait:

«L’entreprise de traitement des eaux usées est tenue: a) de fournir, de contrôler et d’étendre un système d’égouts publics (dans sa zone ou ailleurs) qui assure leur épuration et leur entretien de telle sorte que cette zone soit effectivement égouttée et continue de l’être; b) de prendre les dispositions pour vider ces égouts et toutes autres dispositions […] nécessaires, itérativement, pour traiter effectivement, dans des stations d’évacuation ou d’une autre façon, le contenu de ces égouts.»

16. En outre, en cas d’infraction à une obligation commise par un opérateur de traitement des eaux usées visé par l’article 94 (1), du Water Industry Act 1991, le secrétaire d’État ou le directeur général des services des eaux est tenu, en vertu de l’article 18 de cette loi d’édicter un ordre exécutoire définitif (applicable après une procédure contradictoire) ou provisoire (immédiatement applicable) requérant qu’une action soit entreprise pour assurer le respect de ladite obligation.

17. Les Urban Waste Water Treatment (England and Wales) Regulations 1994 ont été édictés aux fins de la mise en œuvre de la directive 91/271 et complètent les dispositions de l’article 94 du Water Industry Act 1991.

18. La règle 4 (1) des Urban Waste Water Treatment (England and Wales) Regulations 1994 dispose:

«Les présentes dispositions complètent celles relatives à l’obligation imposée par l’article 94 du Water Industry Act 1991 […] et toute infraction aux prescriptions des présentes dispositions doit être considérée, aux fins de cette loi, comme une infraction à ladite disposition.»

19. La règle 4 (4) prévoit que les obligations au titre de l’article 94 (1) (b) incluent une obligation «de faire en sorte que les eaux résiduaires urbaines entrant dans les systèmes de collecte soient, avant d’être rejetées, soumises à un traitement conformément à la règle 5».

Le litige au principal et les questions préjudicielles

20. Thames Water Utilities Ltd est une entreprise publique de traitement des eaux usées. Elle fait l’objet de poursuites pénales intentées par l’Environment Agency, personne morale autonome dont les attributions incluent certains aspects du contrôle de la pollution en Angleterre et au pays de Galles. Il est reproché à Thames Water Utilities Ltd d’avoir rejeté des eaux usées non traitées constituant des «déchets contrôlés» sur le territoire du comté du Kent ainsi que dans des eaux contrôlées de ce même comté. La juridiction compétente est la South East London Division, Bromley Magistrates’ Court (District Judge Carr). Cette dernière a refusé de statuer sur une question préliminaire tendant à déterminer si les eaux usées s’échappant de canalisations entretenues par une entreprise telle que Thames Water Utilities Ltd constituent un «déchet contrôlé au sens de la législation anglaise».

21. Thames Water Utilities Ltd a introduit devant la juridiction de renvoi un recours en contrôle juridictionnel («judicial review») à l’encontre de ce refus de statuer.

22. Après avoir relevé qu’un déchet contrôlé au sens du droit national devait constituer un déchet au sens de la directive 75/442, la High Court of Justice (England and Wales), Queen’s Bench Division (Administrative Court), a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:

«1) Les eaux usées s’échappant d’un réseau de traitement des eaux usées exploité par une entreprise publique de traitement des eaux usées conformément à la directive [91/271] et/ou au Water Industry Act 1991 […] relèvent-elles des ‘déchets’ qualifiés [comme] tels aux fins de la directive [75/442]?

2) En cas de réponse affirmative à la première question, les eaux usées susmentionnées:

a) sont-elles exclues du champ d’application de la notion de ‘déchets’ qualifiés [comme] tels aux fins de la [directive 75/442] en vertu de l’article 2, paragraphe 1, sous b), iv), de la [directive 75/442], plus particulièrement par l’effet de la [directive 91/271] et/ou du [Water Industry Act 1991], ou

b) relèvent-elles du champ d’application de l’article 2, paragraphe 2, de la [directive 75/442] et sont-elles exclues du champ d’application de la notion de ‘déchets’ qualifiés [comme] tels aux fins de la [directive 75/442], plus particulièrement par l’effet de la [directive 91/271]?»

Sur les questions préjudicielles

Sur la première question

23. Par sa première question, la juridiction de renvoi cherche à savoir si des eaux usées constituent des déchets au sens de la directive 75/442 lorsqu’elles s’échappent d’un réseau de traitement exploité par une entreprise publique en application de la législation édictée pour la transposition de la directive 91/271.

24. L’article 1 er , sous a), de la directive 75/442 définit le déchet comme «toute substance ou tout objet qui relève des catégories figurant à l’annexe I, dont le détenteur se défait ou dont il a l’intention […] de se défaire». Cette annexe précise et illustre cette définition en proposant une liste de substances et d’objets pouvant être qualifiés de déchets. Cette liste n’a cependant qu’un caractère indicatif, la qualification de déchet résultant avant tout du comportement du détenteur et de la signification des termes «se défaire» (voir arrêt du 7 septembre 2004, Van de Walle e.a., C-1/03, Rec. p. I-7613, point 42 et jurisprudence citée).

25. L’article 2, paragraphe 1, de la directive 75/442 indique en outre les types de déchets susceptibles d’être, sous certaines conditions, exclus du champ d’application de cette directive, alors même qu’il s’agit de déchets correspondant à la définition donnée à l’article 1 er , sous a), de celle‑ci.

26. Il en va ainsi, aux termes de l’article 2, paragraphe 1, sous b), iv), de la directive 75/442, des «eaux usées, à l’exception des déchets à l’état liquide». Il ressort de cette disposition que le législateur communautaire a entendu expressément qualifier les eaux usées de «déchets», au sens de la directive 75/442, tout en prévoyant que ces déchets puissent, sous certaines conditions, échapper au champ d’application de cette directive et, par conséquent, au régime juridique général des déchets qu’elle institue.

27. À cet égard, les termes «se défaire» doivent être interprétés à la lumière non seulement des objectifs de la directive 75/442, c’est-à-dire la protection de la santé de l’homme et de l’environnement contre les effets préjudiciables causés par le ramassage, le transport, le traitement, le stockage et le dépôt des déchets, mais également de l’article 174, paragraphe 2, CE. Ce dernier dispose que «[l]a politique de la Communauté dans le domaine de l’environnement vise un niveau de protection élevé, en tenant compte de la diversité des situations dans les différentes régions de la Communauté. Elle est fondée sur les principes de précaution et d’action préventive […]». Les termes «se défaire» ne sauraient donc être interprétés de manière restrictive (voir en ce sens, notamment, arrêt du 15 juin 2000, ARCO Chemie Nederland e.a., C‑418/97 et C‑419/97, Rec. p. I‑4475, points 36 à 40).

28. La circonstance que les eaux usées s’échappent d’un réseau de traitement est sans influence sur leur nature de «déchets» au sens de la directive 75/442. En effet, une fuite d’eaux usées hors d’un réseau de traitement constitue un fait par lequel l’entreprise de traitement, détentrice de ces eaux, «se défait» de celles-ci. Le caractère accidentel de ce déversement ne permet pas d’aboutir à une conclusion différente. La Cour a en effet jugé qu’un déversement accidentel d’hydrocarbures sur le sol peut être analysé comme une action par laquelle le détenteur de ces hydrocarbures «se défait» de ceux-ci (voir, en ce sens, arrêt Van de Walle e.a., précité, point 47). La Cour a également jugé que la directive 75/442 serait pour partie privée d’effet si des hydrocarbures à l’origine d’une pollution n’étaient pas considérés comme des déchets, au seul motif qu’ils ont été accidentellement déversés (voir arrêt Van de Walle e.a., précité, point 48). Le même raisonnement doit être tenu à l’égard d’eaux usées se déversant accidentellement.

29. Dès lors, il y a lieu de répondre à la première question que des eaux usées s’échappant d’un réseau de traitement des eaux usées exploité par une entreprise publique de traitement des eaux usées en application de la directive 91/271 et de la législation édictée pour sa transposition constituent des déchets au sens de la directive 75/442.

Sur la seconde question, sous a)

30. Par sa seconde question, sous a), la juridiction de renvoi cherche en substance à savoir si les eaux usées s’échappant d’un réseau de traitement des eaux usées sont des déchets exclus du champ d’application de la directive 75/442 en vertu de son article 2, paragraphe 1, sous b), iv), et plus particulièrement par l’effet de la directive 91/271 ou du Water Industry Act 1991, ou de ces deux instruments juridiques pris ensemble.

31. L’article 2, paragraphe 1, sous b), iv), de la directive 75/442 exclut de son champ d’application les eaux usées, à l’exception des déchets liquides, à la condition toutefois que ces eaux usées soient couvertes par une «autre législation».

32. Ainsi que l’a jugé la Cour au point 49 de l’arrêt du 11 septembre 2003, AvestaPolarit Chrome (C-114/01, Rec. p. I-8725), les termes «autre législation» utilisés par la directive 75/442 à son article 2, paragraphe 1, sous b), peuvent viser également une législation nationale.

33. Toutefois, pour pouvoir être considérées comme une «autre législation» au sens dudit article 2, paragraphe 1, sous b), les règles en cause ne doivent pas se limiter à porter sur une substance particulière, mais doivent contenir des dispositions précises organisant leur gestion en tant que déchets au sens de l’article 1 er , sous d), de ladite directive. À défaut, la gestion des déchets en cause ne serait organisée ni dans le cadre de cette dernière directive, ni dans celui d’une autre directive, ni dans celui d’une législation nationale, ce qui serait contraire tant au libellé de l’article 2, paragraphe 1, sous b), de la directive 75/442 qu’au but même de la législation communautaire en matière de déchets (voir, en ce sens, arrêt AvestaPolarit Chrome, précité, point 52).

34. Il en résulte que, pour pouvoir être regardées comme une «autre législation», les règles communautaires ou nationales en cause doivent comporter des dispositions précises organisant la gestion des déchets et assurer un niveau de protection au moins équivalent à celui qui découle de la directive 75/442, et plus particulièrement de ses articles 4, 8 et 15.

35. La directive 91/271 n’assure pas un tel niveau de protection. Si elle régit la collecte, le traitement et le rejet des eaux usées, elle se borne à prévoir, s’agissant des fuites d’eaux usées, une obligation de prévention du risque de telles fuites lors de la conception, de la construction et de l’entretien des systèmes de collecte. La directive 91/271 ne fixe aucun objectif en matière d’élimination des déchets ou de dépollution des sols contaminés. Elle ne peut dès lors être considérée comme portant sur la gestion des eaux usées s’échappant des réseaux de traitement et assurant un niveau de protection au moins équivalent à celui qui découle de la directive 75/442.

36. S’agissant de la législation nationale applicable au litige au principal, ni les écritures soumises à la Cour ni les observations émises à l’audience n’ont permis de déterminer l’étendue exacte des pouvoirs dont dispose l’administration compétente du Royaume-Uni. Il appartiendra à la juridiction de renvoi de déterminer, au regard des critères définis aux points 34 et 35 du présent arrêt, si le Water Industry Act 1991 ou les Urban Waste Water (England and Wales) Regulations 1994 comportent des dispositions précises organisant la gestion des déchets en cause et s’ils sont de nature à assurer une protection de l’environnement équivalente à celle garantie par la directive 75/442, et plus particulièrement par ses articles 4, 8 et 15.

37. Si tel n’était pas le cas, il appartiendrait à la juridiction de renvoi d’écarter les dispositions nationales et d’appliquer au litige au principal celles de la directive 75/442 ainsi que des mesures nationales qui en ont assuré la transposition.

38. Il convient donc de répondre à la seconde question, sous a), d’une part, que la directive 91/271 ne constitue pas une «autre législation» au sens de l’article 2, paragraphe 1, sous b), de la directive 75/442 et, d’autre part, qu’il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier, conformément aux critères définis par le présent arrêt, si la législation nationale peut être regardée comme constituant une «autre législation» au sens de cette disposition. Tel est le cas si cette législation nationale comporte des dispositions précises organisant la gestion des déchets en cause et si elle est de nature à assurer une protection de l’environnement équivalente à celle garantie par la directive 75/442, et plus particulièrement par ses articles 4, 8 et 15.

Sur la seconde question, sous b)

39. La Cour a jugé que la directive 75/442, dans sa rédaction issue de la directive 91/156, est une législation-cadre, son article 2, paragraphe 2, prévoyant que des dispositions spécifiques particulières ou complémentaires peuvent être fixées par des directives particulières pour réglementer la gestion de certaines catégories de déchets. Une telle directive particulière peut être considérée comme une lex specialis par rapport à la directive 75/442, de sorte que ses dispositions priment celles de cette dernière dans les situations qu’elle vise à régir spécifiquement (voir, en ce sens, arrêt du 19 juin 2003, Mayer Parry Recycling, C-444/00, Rec. p. I-6163, points 51 et 57).

40. Toutefois, ainsi qu’il a été dit au point 35 du présent arrêt, la directive 91/271 ne comporte aucune disposition concernant, en tant que telles, les eaux usées s’échappant d’un réseau de traitement. Elle ne saurait, par conséquent, être regardée comme comportant des dispositions spécifiques particulières ou complémentaires de celles de la directive 75/442 destinées à réglementer la gestion des eaux usées s’échappant d’un réseau de traitement.

41. Il convient, dès lors de répondre à la seconde question, sous b), que la directive 91/271 ne peut être considérée, s’agissant de la gestion des eaux usées s’échappant d’un réseau de traitement, comme une lex specialis par rapport à la directive 75/442 et ne saurait donc trouver à s’appliquer en vertu de l’article 2, paragraphe 2, de cette dernière.

Sur les dépens

42. La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

Dispositif

Par ces motifs, la Cour (deuxième chambre) dit pour droit:

1) Les eaux usées s’échappant d’un réseau de traitement des eaux usées exploité par une entreprise publique de traitement des eaux usées en application de la directive 91/271/CEE du Conseil, du 21 mai 1991, relative au traitement des eaux urbaines résiduaires, et de la législation édictée pour sa transposition constituent des déchets au sens de la directive 75/442/CEE du Conseil, du 15 juillet 1975, relative aux déchets, telle que modifiée par la directive 91/156/CEE du Conseil, du 18 mars 1991.

2) La directive 91/271 ne constitue pas une «autre législation» au sens de l’article 2, paragraphe 1, sous b), de la directive 75/442, telle que modifiée par la directive 91/156. Il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier, conformément aux critères définis par le présent arrêt, si la législation nationale peut être regardée comme constituant une «autre législation» au sens de cette disposition. Tel est le cas si cette législation nationale comporte des dispositions précises organisant la gestion des déchets en cause et si elle est de nature à assurer une protection de l’environnement équivalente à celle garantie par la directive 75/442, telle qua modifiée par la directive 91/156, et plus particulièrement par ses articles 4, 8 et 15.

3) La directive 91/271 ne peut être considérée, s’agissant de la gestion des eaux usées s’échappant d’un réseau de traitement, comme une lex specialis par rapport à la directive 75/442, telle que modifiée par la directive 91/156, et ne saurait donc trouver à s’appliquer en vertu de l’article 2, paragraphe 2, de cette même directive.

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