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Document 62004CJ0206

Arrêt de la Cour (première chambre) du 23 mars 2006.
Mülhens GmbH & Co. KG contre Office de l'harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI).
Pourvoi - Marque communautaire - Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) nº 40/94 - Risque de confusion - Marque verbale ZIRH - Opposition du titulaire de la marque communautaire SIR.
Affaire C-206/04 P.

Recueil de jurisprudence 2006 I-02717

ECLI identifier: ECLI:EU:C:2006:194

Affaire C-206/04 P

Mülhens GmbH & Co. KG

contre

Office de l'harmonisation dans le marché intérieur

(marques, dessins et modèles) (OHMI)

«Pourvoi — Marque communautaire — Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) nº 40/94 — Risque de confusion — Marque verbale ZIRH — Opposition du titulaire de la marque communautaire SIR»

Conclusions de l'avocat général M. D. Ruiz-Jarabo Colomer, présentées le 10 novembre 2005 

Arrêt de la Cour (première chambre) du 23 mars 2006 

Sommaire de l'arrêt

1.     Marque communautaire — Définition et acquisition de la marque communautaire — Motifs relatifs de refus — Opposition par le titulaire d'une marque antérieure identique ou similaire enregistrée pour des produits ou services identiques ou similaires

(Règlement du Conseil nº 40/94, art. 8, § 1, b))

2.     Pourvoi — Moyens — Appréciation erronée des faits — Irrecevabilité — Contrôle par la Cour de l'appréciation des éléments de fait soumis au Tribunal — Exclusion sauf cas de dénaturation

(Art. 225 CE;statut de la Cour de justice, art. 58, al. 1)

1.     Lors de l'appréciation du risque de confusion au sens de l'article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement nº 40/94 sur la marque communautaire, entre deux signes qui ne sont pas similaires sur les plans visuel et conceptuel mais qui présentent une similitude sur le plan auditif dans certains pays, il ne saurait être exclu que la seule similitude auditive des marques puisse créer un risque de confusion au sens de ladite disposition. Toutefois, l'existence d'un tel risque doit être constatée dans le cadre d'une appréciation globale en ce qui concerne les similitudes conceptuelle, visuelle et auditive des signes en cause. À cet égard, l'appréciation d'une éventuelle similitude auditive n'est qu'un des facteurs pertinents dans le cadre de ladite appréciation globale, de sorte qu'il y a pas nécessairement un risque de confusion chaque fois qu'une seule similitude auditive entre deux signes est établie.

En outre, ladite appréciation globale implique que les différences conceptuelles et visuelles entre deux signes peuvent neutraliser des similitudes auditives entre eux, pour autant qu'au moins l'un de ces signes ait, dans la perspective du public pertinent, une signification claire et déterminée, de sorte que ce public est susceptible de la saisir directement.

(cf. points 19-22, 35)

2.     Il ressort de l'article 225, paragraphe 1, second alinéa, CE et de l'article 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice que le pourvoi est limité aux questions de droit. Le Tribunal est dès lors seul compétent pour constater et apprécier les faits pertinents ainsi que pour apprécier les éléments de preuve. L'appréciation de ces faits et éléments de preuve ne constitue donc pas, sous réserve du cas de leur dénaturation, une question de droit soumise, comme telle, au contrôle de la Cour dans le cadre d'un pourvoi.

(cf. points 28, 41)




ARRÊT DE LA COUR (première chambre)

23 mars 2006 (*)

«Pourvoi – Marque communautaire – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) nº 40/94 – Risque de confusion – Marque verbale ZIRH – Opposition du titulaire de la marque communautaire SIR»

Dans l’affaire C-206/04 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice, introduit le 6 mai 2004,

Mülhens GmbH & Co. KG, établie à Cologne (Allemagne), représentée par Mes T. Schulte-Beckhausen et C. Musiol, Rechtsanwälte,

partie requérante,

les autres parties à la procédure étant:

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles)(OHMI), représenté par Mme S. Laitinen et M. A. von Mühlendahl, en qualité d’agents,

partie défenderesse en première instance,

Zirh International Corp., établie à NewYork (États-Unis), représentée par Me L. Kouker, Rechtsanwalt,

partie intervenante en première instance,

LA COUR (première chambre),

composée de M. P. Jann, président de chambre, Mme N. Colneric, MM. J. N. Cunha Rodrigues, M. Ilešič (rapporteur) et E. Levits, juges,

avocat général: M. D. Ruiz-Jarabo Colomer,

greffier: Mme M. Ferreira, administrateur principal,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 6 octobre 2005,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 10 novembre 2005,

rend le présent

Arrêt

1       Par son pourvoi, Mülhens GmbH & Co. KG demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de première instance des Communautés européennes du 3 mars 2004, Mülhens/OHMI – Zirh International (ZIRH) (T‑355/02, Rec., p. II-791, ci-après l’«arrêt attaqué»), par lequel celui-ci a rejeté son recours tendant à l’annulation de la décision de la deuxième chambre de recours de l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI) du 1er octobre 2002 (affaire R 247/2001‑3), rejetant l’opposition formée par la requérante contre la demande d’enregistrement du signe verbal «ZIRH» (ci-après la «décision litigieuse»).

 Le cadre juridique

2       L’article 8, paragraphe 1, du règlement (CE) nº 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), prévoit:

«Sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement:

[…]

b)       lorsqu’en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire dans lequel la marque antérieure est protégée; le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.»

3       L’article 8, paragraphe 2, de ce règlement est rédigé dans les termes suivants:

«Aux fins du paragraphe 1, on entend par ’marques antérieures’:

a)      les marques dont la date de dépôt est antérieure à celle de la demande de marque communautaire, compte tenu, le cas échéant, du droit de priorité invoqué à l’appui de ces marques, et qui appartient aux catégories suivantes:

[…]

i)      les marques communautaires […]

[…]»

4       L’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 est rédigé en des termes en substance identiques à ceux de l’article 4, paragraphe 1, sous b), de la première directive 89/104/CEE du Conseil, du 21 décembre 1988, rapprochant les législations des États membres sur les marques (JO 1989, L 40, p. 1).

 Les antécédents du litige

5       Le 21 septembre 1999, Zirh International Corp. (ci-après «Zirh Corp.») a demandé à l’OHMI l’enregistrement en tant que marque communautaire du signe verbal «ZIRH» pour les produits et services qui relèvent des classes 3, 5 et 42, au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié (ci-après l’«arrangement de Nice»).

6       Le 24 mai 2000, la requérante a formé une opposition, au titre de l’article 42 du règlement nº 40/94, à l’enregistrement de la marque pour tous les produits et services visés par la demande. Cette opposition était fondée sur l’existence d’une marque communautaire antérieure, à savoir une marque mixte, verbale et figurative, constituée de l’élément verbal «SIR» accompagné d’une figure héraldique, ayant été enregistrée pour des produits relevant de la classe 3 au sens de l’arrangement de Nice et correspondant à la description suivante: «Parfumerie, huiles essentielles, cosmétiques, lotions pour les cheveux, dentifrices, savons» (ci‑après la «marque antérieure»).

7       Cette opposition a été rejetée par une décision du 29 juin 2001 de la division d’opposition de l’OHMI, laquelle a notamment estimé que, bien que les produits et services concernés soient commercialisés par les mêmes canaux de distribution ou dans les mêmes points de vente, les différences entre les deux marques l’emportent manifestement sur la similitude auditive pouvant exister entre ces marques dans certaines langues officielles de l’Union européenne, de sorte qu’il n’existe pas de risque de confusion entre lesdites marques.

8       Le 10 juillet 2001, la requérante a formé un recours contre cette décision devant la deuxième chambre de recours de l’OHMI, laquelle a, par la décision litigieuse, rejeté ce recours en confirmant la décision de la division de l’opposition dont elle a adopté les motifs.

 La procédure devant le Tribunal et l’arrêt attaqué

9       Par requête déposée au greffe du Tribunal le 4 décembre 2002, la requérante a introduit un recours contre la décision litigieuse tendant à obtenir l’annulation de celle-ci sur le fondement d’un moyen unique tiré de la violation de la notion de risque de confusion, au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94.

10     Le Tribunal a d’abord rappelé, aux points 33 à 43 de l’arrêt attaqué, les dispositions applicables et la jurisprudence appropriée en matière de risque de confusion avec une marque antérieure.

11     Ensuite, le Tribunal a procédé à l’appréciation globale de l’ensemble des facteurs pertinents en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants, à la suite de laquelle il a considéré que la similitude auditive existant entre les marques en cause est neutralisée dans une large mesure. Le Tribunal s’est exprimé dans les termes suivants:

«44   En ce qui concerne la comparaison visuelle des marques en conflit, il y a lieu de constater, premièrement, que, bien que les éléments verbaux de ces deux marques aient en commun les deuxième et troisième lettres utilisées, à savoir les lettres ’ir’, elles présentent des différences visuelles non négligeables. En effet, les premières lettres qui sont respectivement ’s’ et ’z’ sont différentes. En outre, lesdits éléments verbaux sont composés d’un nombre différent de lettres, les lettres ’ir’ étant suivies par la lettre ’h’ dans la marque demandée. Par ailleurs, le signe verbal de la marque antérieure est accompagné d’une figure héraldique, tandis que la marque demandée est constituée exclusivement d’un signe verbal rédigé dans des caractères ordinaires. Dès lors, dans l’appréciation visuelle d’ensemble des signes en cause, l’existence d’éléments particuliers à chaque signe fait que l’impression globale de chaque signe est différente.

45     Quant à la similitude phonétique, il n’est pas contesté par l’OHMI que les éléments verbaux contenus dans les deux marques présentent des similitudes dans certaines langues officielles de l’Union européenne. En effet, comme l’a fait valoir l’OHMI à juste titre au point 26 de son mémoire en réponse, dans de nombreux États membres, la marque antérieure sera très probablement prononcée à l’anglaise, parce que ’sir’ est un terme anglais renommé, susceptible d’être connu, même du public non anglophone. Même si la marque communautaire demandée peut se prononcer de différentes façons dans certaines langues, il y a lieu de considérer que, comme l’admet l’OHMI, les marques en cause sont phonétiquement similaires, du moins dans les pays anglophones et en Espagne, étant donné que les différences respectives entre les prononciations en anglais et en espagnol ne sont pas particulièrement marquées. Sur le plan phonétique, les marques doivent dès lors être considérées comme similaires dans ces pays.

46     En ce qui concerne la comparaison conceptuelle des marques en conflit, la requérante ne conteste pas les appréciations de l’OHMI sur ce point. En effet, comme l’OHMI le fait valoir à juste titre, il n’existe pas de similitude conceptuelle, étant donné qu’il semble probable que le consommateur moyen des États membres pensera au mot anglais ’sir’ en raison de la connaissance répandue de ce terme en Europe. Le terme ’zirh’ ne présentant de signification apparente dans aucune des onze langues officielles de l’Union européenne, le grand public percevra dès lors le mot ’zirh’ comme un néologisme. Dès lors, il y a lieu de constater que, sur le plan conceptuel, il n’existe pas de similitude entre les deux marques.

47     En conséquence, il y a lieu de constater qu’il n’existe pas de similitude entre les marques SIR et ZIRH, ni sur le plan visuel ni sur le plan conceptuel. Sur le plan phonétique, les marques en cause sont similaires dans certains pays. À cet égard, il importe de noter que, selon la jurisprudence, il ne saurait être exclu que la seule similitude phonétique des marques puisse créer un risque de confusion [arrêt [de la Cour du 22 juin 1999,] Lloyd Schuhfabrik Meyer, [C-342/97, Rec. p. I-3819], point 28, et arrêt du Tribunal du 15 janvier 2003, Mystery Drinks/OHMI‑Karlsberg Brauerei (MYSTERY), T-99/01, Rec. p. II-43, point 42].

48     Or, comme il a déjà été rappelé ci-dessus aux points 39 et 42, il convient de porter une appréciation globale de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce fondée sur l’impression d’ensemble produite par les marques en cause, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants.

49     En effet, selon la jurisprudence du Tribunal, les similitudes phonétiques peuvent être neutralisées par les différences conceptuelles séparant les marques en question. Une telle neutralisation requiert qu’au moins une des marques en cause ait, dans la perspective du public pertinent, une signification claire et déterminée, de sorte que ce public est susceptible de la saisir immédiatement (arrêt [du Tribunal du 14 octobre 2003, Phillips‑Van Heusen/OHMI – Pash Textilvertrieb und Einzelhandel (BASS), T-292/01, Rec. p. II-4335], point 54).

50     En l’espèce, tel est le cas à propos de l’élément verbal de la marque antérieure SIR, ainsi qu’il vient d’être relevé au point 46. Cette analyse n’est pas infirmée par le fait que ce signe verbal ne désigne aucune caractéristique des produits pour lesquels l’enregistrement de cette marque a été effectué. En effet, cette circonstance n’empêche pas le public pertinent de saisir immédiatement la signification de cet élément verbal de la marque antérieure. Il suffit qu’une des marques en cause soit dotée d’une telle signification pour que, lorsque l’autre marque n’a pas une telle signification ou a seulement une signification entièrement différente, des similitudes phonétiques existant entre ces marques soient neutralisées dans une large mesure (voir, en ce sens, arrêt BASS, [précité], point 54).

51     En l’espèce, cette neutralisation est corroborée par le fait que les marques SIR et ZIRH présentent également des différences visuelles. Dans ce contexte, il convient de relever, ainsi que l’OHMI l’a exposé avec pertinence, que le degré de similitude phonétique entre deux marques est d’une importance réduite dans le cas de produits qui sont commercialisés d’une telle manière que, habituellement, le public pertinent, lors de l’achat, perçoit la marque les désignant également de façon visuelle (voir, en ce sens, arrêt BASS, [précité], point 55).

52     Tel est le cas des produits en cause en l’espèce, contrairement à ce que soutient la requérante. En effet, les arguments de la requérante, selon lesquels la vente des produits visés par la marque antérieure ne se fait pas exclusivement sur la base de leur aspect visuel et selon lesquels un canal important de commercialisation des produits de la requérante est constitué de parfumeries, de salons de coiffure et de salons de beauté, n’infirment pas cette conclusion.

53     À cet égard, il importe de noter que la requérante n’a nullement démontré que ses produits sont habituellement commercialisés d’une telle manière que le public n’a aucune perception visuelle de la marque. En effet, la requérante se contente de soutenir qu’il existe un canal traditionnel de commercialisation par le biais des parfumeries, des salons de coiffure et des salons de beauté, de sorte que le produit ne peut pas être pris directement par le consommateur, mais seulement par l’intermédiaire d’un vendeur.

54     Même à supposer que les parfumeries, les salons de coiffure et les salons de beauté puissent constituer des canaux importants de commercialisation des produits de la requérante, il est constant que, même dans ces lieux, les produits sont généralement présentés sur des rayons de façon à en permettre un examen visuel par les consommateurs. Partant, même s’il n’est pas exclu que les produits en cause puissent également être vendus sur commande verbale, on ne saurait considérer cette modalité comme le mode de commercialisation habituel de ces produits.»

12     Dès lors, le Tribunal a conclu, au point 55 de l’arrêt attaqué, que le degré de similitude entre les marques en cause n’est pas suffisamment élevé pour considérer que le public pertinent puisse croire que les produits concernés proviennent de la même entreprise ou, le cas échéant, d’entreprises liées économiquement et a, par conséquent, rejeté le recours de la requérante.

 Le pourvoi

13     La requérante demande à la Cour d’annuler l’arrêt attaqué ainsi que la décision litigieuse et de condamner l’OHMI aux dépens. Au soutien de son pourvoi, elle invoque un moyen unique, comportant deux branches, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement nº 40/94. Chacune des deux branches énonce elle-même deux griefs distincts.

14     L’OHMI et Zirh Corp. concluent au rejet du pourvoi et à la condamnation de la requérante aux dépens.

 Sur la première branche du moyen unique (le risque de confusion)

 Le premier grief

–       Argumentation des parties

15     La requérante soutient que la similitude partielle et l’identité partielle entre les produits et les services concernés, d’une part, et la similitude auditive entre les marques en cause, d’autre part, conduisent à conclure à l’existence d’un risque de confusion entre ces marques. Selon la requérante, qui invoque à cet égard le point 28 de l’arrêt Lloyd Schuhfabrik Meyer, précité, l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement nº 40/94 implique que la similitude manifeste dans l’un des critères sensoriels établit l’existence d’un risque de confusion. En l’espèce, ce risque résulterait de la similitude auditive.

16     L’OHMI ne conteste pas l’analyse de la requérante en ce qui concerne la similitude des marques. Toutefois, il considère que la portée de l’arrêt Lloyd Schuhfabrik Meyer, précité, consiste seulement à admettre la possibilité que la similitude auditive suffise à établir le risque de confusion.

–       Appréciation de la Cour

17     À titre liminaire, il convient de rappeler que, selon le septième considérant du règlement nº 40/94, l’appréciation du risque de confusion dépend de nombreux facteurs dont, notamment, la connaissance de la marque sur le marché, l’association qui peut en être faite avec le signe utilisé ou enregistré, le degré de similitude entre la marque et le signe et entre les produits ou services désignés.

18     L’existence d’un risque de confusion dans l’esprit du public doit donc être appréciée globalement, en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce (voir, en ce sens, à propos de la directive 89/104, arrêts du 11 novembre 1997, SABEL, C-251/95, Rec. p. I-6191, point 22, et du 22 juin 2000, Marca Mode, C-425/98, Rec. p. I-4861, point 40).

19     Cette appréciation globale doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, auditive ou conceptuelle des marques en cause, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ces marques, en tenant compte, notamment, des éléments distinctifs et dominants de celles-ci (voir, notamment, à propos de la directive 89/104, arrêts SABEL, précité, point 23, et Lloyd Schuhfabrik Meyer, précité, point 25).

20     À cet égard, après avoir apprécié l’impression d’ensemble produite par les deux signes en cause, le Tribunal a constaté, au point 47 de l’arrêt attaqué, que ces signes ne sont pas similaires sur les plans visuel et conceptuel mais que, en revanche, lesdits signes présentent une similitude sur le plan auditif dans certains pays, n’excluant pas que cette seule similitude puisse créer un risque de confusion.

21     Il ne saurait être exclu que la seule similitude auditive des marques puisse créer un risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement nº 40/94 (voir, à propos de la directive 89/104, arrêt Lloyd Schuhfabrik Meyer, précité, point 28). Toutefois, il convient de rappeler que l’existence d’un tel risque doit être constatée dans le cadre d’une appréciation globale en ce qui concerne les similitudes conceptuelle, visuelle et auditive entre les signes en cause. À cet égard, l’appréciation d’une éventuelle similitude auditive n’est qu’un des facteurs pertinents dans le cadre de ladite appréciation globale.

22     Dès lors, on ne peut pas déduire du point 28 de l’arrêt Lloyd Schuhfabrik Meyer, précité, qu’il y a nécessairement un risque de confusion chaque fois qu’une seule similitude auditive entre deux signes est établie.

23     C’est donc à juste titre que le Tribunal a examiné l’impression d’ensemble produite par les deux signes en cause, en ce qui concerne leurs éventuelles similitudes conceptuelle, visuelle et auditive, dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion.

24     Il s’ensuit que le premier grief de la première branche du moyen unique doit être rejeté comme étant non fondé.

 Le second grief

–       Argumentation des parties

25     Selon la requérante, la similitude auditive suffit à établir l’existence d’un risque de confusion si les produits désignés par les marques en cause ne sont pas exclusivement achetés à vue. Or, s’agissant des produits concernés, les consommateurs n’auraient pas la possibilité de se servir eux-mêmes dans nombre de magasins où ils devraient donc les demander explicitement. De plus, ces produits seraient très couramment achetés par téléphone. Selon la requérante, le consommateur, qui n’a, dans toutes ces hypothèses, qu’une perception phonétique de la marque «SIR», ne connaît pas les caractéristiques visuelles des produits désignés par cette marque.

26     Selon l’OHMI, la similitude auditive n’est pas décisive en l’espèce parce que les produits concernés sont normalement achetés à vue. En effet, selon lui, ces produits sont commercialisés de telle manière que, lors de l’achat, le public pertinent perçoit la marque comme désignant de façon visuelle lesdits produits. Dès lors, bien qu’il soit possible de se référer verbalement aux produits concernés, l’OHMI considère que le canal de distribution requérant une demande verbale ne représente pas la situation typique ou moyenne d’achat de ces produits. En conséquence, il conclut qu’il n’existe, en l’espèce, aucun risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement nº 40/94.

–       Appréciation de la Cour

27     En ce qui concerne le second grief formulé par la requérante, relatif à l'incidence des modes de commercialisation des produits en cause, il y a lieu de constater que le pourvoi tend, en réalité, à obtenir que la Cour substitue sa propre appréciation des faits à celle du Tribunal.

28     Or, la décision du Tribunal, contenue aux points 52 à 54 de l’arrêt attaqué, selon laquelle les produits concernés sont généralement commercialisés de façon à en permettre l’examen visuel par le public pertinent, constitue une appréciation factuelle dont le contrôle échappe à la Cour dans le cadre d’un pourvoi. En effet, il ressort de l’article 225, paragraphe 1, second alinéa, CE et de l’article 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice que le pourvoi est limité aux questions de droit. Le Tribunal est dès lors seul compétent pour constater et apprécier les faits pertinents ainsi que pour apprécier les éléments de preuve. L’appréciation de ces faits et éléments de preuve ne constitue donc pas, sous réserve du cas de leur dénaturation, une question de droit soumise, comme telle, au contrôle de la Cour dans le cadre d’un pourvoi (voir arrêt du 15 septembre 2005, BioID/OHMI, C‑37/03 P, non encore publié au Recueil, point 43 et jurisprudence citée).

29     La requérante n’ayant invoqué aucune dénaturation des faits et éléments de preuve soumis au Tribunal, il convient de rejeter le second grief de la première branche du moyen unique comme étant irrecevable.

30     Dès lors, il convient de constater, en ce qui concerne la première branche du moyen unique, que le Tribunal n’a pas méconnu la portée de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94.

31     Il résulte des considérations qui précèdent que la première branche du moyen unique doit être rejetée comme étant en partie non fondée et en partie irrecevable.

 Sur la seconde branche du moyen unique (la neutralisation de la similitude auditive)

 Le premier grief

–       Argumentation des parties

32     La requérante soutient que le point de départ du raisonnement du Tribunal, tel qu’il est exprimé aux points 48 et 49 de l’arrêt attaqué, est erroné. En effet, selon la requérante la similitude auditive ne peut pas être neutralisée par les différences visuelles et conceptuelles.

33     L’OHMI soutient que, si la Cour approuve le raisonnement développé par le Tribunal dans l’arrêt Phillips-Van Heusen/OHMI – Pash Textilvertrieb und Einzelhandel (BASS) (précité, point 54), selon lequel les différences conceptuelles et visuelles séparant deux marques sont de nature à neutraliser des similitudes auditives pour autant qu’au moins l’une de ces marques ait, dans la perspective du public pertinent, une signification claire et déterminée, de sorte que ce public est susceptible de la saisir immédiatement, elle doit l’appliquer dans la présente affaire.

–       Appréciation de la Cour

34     Comme il a été rappelé au point 19 du présent arrêt, l’appréciation globale doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, auditive ou conceptuelle des marques en cause, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ces marques, en tenant compte, notamment, des éléments distinctifs et dominants de celles-ci.

35     Ladite appréciation globale implique que les différences conceptuelles et visuelles entre deux signes peuvent neutraliser des similitudes auditives entre eux, pour autant qu’au moins l’un de ces signes ait, dans la perspective du public pertinent, une signification claire et déterminée, de sorte que ce public est susceptible de la saisir directement (voir, en ce sens, arrêt du 12 janvier 2006, Ruiz‑Picasso e.a./OHMI, C-361/04 P, non encore publié au Recueil, point 20).

36     Dès lors, après avoir énoncé à juste titre, aux points 48 et 49 de l’arrêt attaqué, que l’appréciation globale inclut également l’appréciation des éléments distinctifs et dominants des signes en cause et que les similitudes auditives peuvent être neutralisées par les différences conceptuelles entre lesdits signes, le Tribunal a pu, sans méconnaître la portée de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94, juger que le degré de similitude entre les signes en cause n’est pas suffisamment élevé pour considérer que le public pertinent puisse croire que les produits concernés proviennent de la même entreprise ou, le cas échéant, d’entreprises liées économiquement.

37     Il s’ensuit que le premier grief de la seconde branche du moyen unique doit être rejeté comme étant non fondé.

 Le second grief

–       Argumentation des parties

38     La requérante soutient que la signification essentielle de la marque «SIR» n’apparaît clairement que si cette marque est prononcée à l’anglaise. Sa prononciation dans toute autre langue officielle de l’Union européenne n’aurait aucun sens et constituerait un pur signe de fantaisie. Dès lors, selon la requérante, le Tribunal ne pouvait pas considérer que, en l’espèce, l’une des marques en cause a une signification claire et déterminée pour décider que la similitude auditive est neutralisée par les différences conceptuelles et visuelles séparant ces marques. Le Tribunal aurait dès lors commis une erreur de droit dans l’interprétation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement nº 40/94.

39     L’OHMI considère que la marque figurative «SIR» comporte une signification claire et déterminée, au sens de l’arrêt du Tribunal, Phillips-Van Heusen/OHMI‑Pash Textilvertrieb und Einzelhandel (BASS) (précité, point 54). Dès lors, le Tribunal n’aurait pas commis une erreur de droit dans l’interprétation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement nº 40/94.

–       Appréciation de la Cour

40     En ce qui concerne le second grief formulé par la requérante, relatif à l’appréciation des différences conceptuelles et visuelles des signes en cause, il y a lieu de constater que le pourvoi tend, en réalité, à obtenir que la Cour substitue sa propre appréciation des faits à celle du Tribunal.

41     Il suffit de relever, à cet égard, que la décision du Tribunal, contenue aux points 50 et 51 de l’arrêt attaqué, selon laquelle les différences conceptuelles et visuelles entre les signes en cause neutralisent leur similitude auditive, constitue une appréciation factuelle dont le contrôle échappe à la Cour dans le cadre d’un pourvoi. En effet, il ressort de l’article 225, paragraphe 1, second alinéa, CE et de l’article 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice que le pourvoi est limité aux questions de droit. Le Tribunal est dès lors seul compétent pour constater et apprécier les faits pertinents ainsi que pour apprécier les éléments de preuve. L’appréciation de ces faits et éléments de preuve ne constitue donc pas, sous réserve du cas de leur dénaturation, une question de droit soumise, comme telle, au contrôle de la Cour dans le cadre d’un pourvoi (voir arrêt BioID/OHMI, précité, point 43 et jurisprudence citée).

42     La requérante n’ayant invoqué aucune dénaturation des faits et éléments de preuve soumis au Tribunal, il convient de rejeter le second grief de la seconde branche du moyen unique comme étant irrecevable.

43     Dès lors, il convient de constater que, en ce qui concerne la seconde branche du moyen unique, le Tribunal n’a pas méconnu la portée de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94.

44     Il résulte des considérations qui précèdent que la seconde branche du moyen unique doit être rejetée comme étant en partie non fondée et en partie irrecevable.

45     Aucune des branches du moyen unique invoqué par la requérante au soutien de son pourvoi n’étant fondée, il y a lieu de rejeter celui-ci.

 Sur les dépens

46     Aux termes de l’article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 118 du même règlement, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en se sens. L’OHMI et Zirh Corp. ayant conclu à la condamnation de la requérante et cette dernière ayant succombé en son moyen, il y a lieu de la condamner aux dépens.

Par ces motifs, la Cour (première chambre) déclare et arrête:

1)      Le pourvoi est rejeté.

2)      Mülhens GmbH & Co. KG est condamnée aux dépens.

Signatures


* Langue de procédure: l’anglais.

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