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Document 62002CC0444

Conclusions de l'avocat général Stix-Hackl présentées le 8 juin 2004.
Fixtures Marketing Ltd contre Organismos prognostikon agonon podosfairou AE (OPAP).
Demande de décision préjudicielle: Monomeles Protodikeio Athinon - Grèce.
Directive 96/9/CE - Protection juridique des bases de données - Notion de base de données - Champ d'application du droit sui generis - Calendriers de championnats de football - Jeux de paris.
Affaire C-444/02.

Recueil de jurisprudence 2004 I-10549

ECLI identifier: ECLI:EU:C:2004:339

Conclusions

CONCLUSIONS DE L'AVOCAT GÉNÉRAL
MME CHRISTINE STIX-HACKL
présentées le 8 juin 2004(1)



Affaire C-444/02



Fixtures Marketing Ltd
contre
Organismos prognostikon agonon podosfairou (OPAP)


[demande de décision préjudicielle formée par le Monomeles Protodikeio Athinon (Grèce)]

«Directive 96/9/CE – Bases de données – Protection juridique – Protection sui generis – Utilisateur légitime – Obtention, vérification et présentation du contenu d'une base de données – Partie (non) substantielle du contenu d'une base de données – Extraction et réutilisation – Utilisation normale – Préjudice injustifié porté aux intérêts légitimes du fabricant – Modification substantielle du contenu d'une base de données – Sport – Prise de paris»






I –   Observations liminaires

1.        La présente demande de décision préjudicielle est l’une des quatre procédures parallèles  (2) relatives à l’interprétation de la directive 96/9/CE du Parlement européen et du Conseil, du 11 mars 1996, concernant la protection juridique des bases de données  (3) (ci‑après la «directive»). Au même titre que les autres, la présente procédure concerne la protection accordée par le droit sui generis et sa portée dans le domaine des paris sportifs.

II –  Le cadre juridique

A –   Le droit communautaire

2.        L’article 1er de la directive comporte des dispositions relatives au champ d’application de celle-ci. Il est libellé comme suit (extrait):

«1.        La présente directive concerne la protection juridique des bases de données, quelles que soient leurs formes.

2.        Aux fins de la présente directive, on entend par ‘base de données’: un recueil d’œuvres, de données ou d’autres éléments indépendants, disposés de manière systématique ou méthodique et individuellement accessibles par des moyens électroniques ou d’une autre manière.»

3.        Le chapitre III, qui couvre les articles 7 à 11, régit le droit sui generis. L’article 7, qui porte sur l’objet de la protection, dispose (extrait):

«1.        Les États membres prévoient pour le fabricant d’une base de données le droit d’interdire l’extraction et/ou la réutilisation de la totalité ou d’une partie substantielle, évaluée de façon qualitative ou quantitative, du contenu de celle-ci, lorsque l’obtention, la vérification ou la présentation de ce contenu attestent un investissement substantiel du point de vue qualitatif ou quantitatif.

2.        Aux fins du présent chapitre, on entend par:

a)       ‘extraction’: le transfert permanent ou temporaire de la totalité ou d’une partie substantielle du contenu d’une base de données sur un autre support par quelque moyen ou sous quelque forme que ce soit;

b)       ‘réutilisation’: toute forme de mise à la disposition du public de la totalité ou d’une partie substantielle du contenu de la base par distribution de copies, par location, par transmission en ligne ou sous d’autres formes. La première vente d’une copie d’une base de données dans la Communauté par le titulaire du droit, ou avec son consentement, épuise le droit de contrôler la revente de cette copie dans la Communauté.

Le prêt public n’est pas un acte d’extraction ou de réutilisation.

3.        Le droit visé au paragraphe 1 peut être transféré, cédé ou donné en licence contractuelle.

[…]

5.        L’extraction et/ou la réutilisation répétées et systématiques de parties non substantielles du contenu de la base de données qui supposeraient des actes contraires à une exploitation normale de cette base, ou qui causeraient un préjudice injustifié aux intérêts légitimes du fabricant de la base, ne sont pas autorisées.»

4.        L’article 8, qui concerne les droits et obligations de l’utilisateur légitime, prévoit en son paragraphe 1:

«Le fabricant d’une base de données qui est mise à la disposition du public de quelque manière que ce soit ne peut empêcher l’utilisateur légitime de cette base d’extraire et/ou de réutiliser des parties non substantielles de son contenu, évaluées de façon qualitative ou quantitative, à quelque fin que ce soit. Dans la mesure où l’utilisateur légitime est autorisé à extraire et/ou à réutiliser une partie seulement de la base de données, le présent paragraphe s’applique à cette partie.»

5.        L’article 9 précise que les États membres peuvent prévoir des exceptions au droit sui generis.

6.        L’article 10, relatif à la durée de la protection, dispose en son paragraphe 3:

«Toute modification substantielle, évaluée de façon qualitative ou quantitative, du contenu d’une base de données, notamment toute modification substantielle résultant de l’accumulation d’ajouts, de suppressions ou de changements successifs qui ferait considérer qu’il s’agit d’un nouvel investissement substantiel, évalué de façon qualitative ou quantitative, permet d’attribuer à la base qui résulte de cet investissement une durée de protection propre.»

B –   Le droit national

7.        La directive a été transposée en droit grec par le biais de la loi nº 2819/00. Selon l’article 7, partie B, de l’exposé des motifs de cette loi, «la nécessité de protéger les bases de données découle du fait que la fabrication de bases de données exige la mise en œuvre de ressources humaines, techniques et financières considérables, alors qu’il est possible de les copier ou d’y accéder à un coût très inférieur à celui qu’entraîne une conception autonome». La partie E de l’exposé des motifs reconnaît au fabricant, à côté du droit de propriété intellectuelle, un droit sui generis sur les bases de données, afin d’empêcher l’extraction et/ou la réutilisation non autorisées du contenu essentiel d’une base de données.

III –  Les faits et la procédure au principal

A –   Partie générale

8.        Les championnats de football professionnel des divisions supérieures sont organisés en Angleterre par la Football Association Premier League Limited ainsi que par la Football League Limited et, en Écosse, par la Scottish Football League. Ensemble, la Premier League et la Football League (qui regroupe les première, deuxième et troisième divisions) constituent les quatre divisions. Avant le début de chaque saison sportive, les calendriers des matchs à disputer sont établis pour la saison et pour chaque division. Ces informations sont stockées sous forme électronique et diffusées. La planification des matchs est notamment annoncée dans des brochures imprimées, par ordre chronologique, d’une part, et pour chaque équipe au sein de chaque division, d’autre part. Les paires d’équipes qui doivent se rencontrer y figurent sous la forme X contre Y (par exemple Southampton contre Arsenal). Chaque saison implique environ 2 000 rencontres, qui s’étalent sur plus de 41 semaines.

9.        Les organisateurs des championnats de football anglais et écossais ont choisi la société de droit écossais Football Fixtures Limited pour gérer, notamment par le biais de contrats de licence, l’utilisation des calendriers des matchs. De son côté, Football Fixtures Limited a concédé ses droits d’exploitation et d’utilisation hors de Grande-Bretagne à la société Fixtures Marketing Limited (ci‑après «Fixtures»).

B –   Partie spécifique

10.      Fixtures a introduit plusieurs actions en justice contre la société Organismos prognostiton agonon podosfairou AE (ci‑après «OPAP»). Elle lui reproche d’avoir, illégalement et sans autorisation des sociétés anglaise et écossaise qui ont créé, établi et exploitent les calendriers des matchs des championnats de football en Angleterre et en Écosse, extrait de façon répétée un grand nombre de paires d’équipes devant se rencontrer pour les mettre sur ses pages Internet «Pame Stoichima», «Podosfairo Kathe Mera», «Chryso podosfairo» et «Propo», diffusées et mises à la disposition du public grec, et ce en violation du droit sui generis des sociétés représentées par Fixtures. Invoquant l’urgence, elle demande par conséquent l’adoption de mesures de référé et concrètement qu’il soit fait interdiction à OPAP, sous menace d’astreinte pour toute infraction future, de porter atteinte au droit de Fixtures sur ces tableaux des championnats de football programmés en Angleterre et en Écosse, et que soit ordonnée en outre la publication du jugement dans la presse quotidienne athénienne aux frais de la défenderesse.

IV –  Les questions préjudicielles

11.      Le Monomeles Protodikeio Athinon a posé à la Cour de justice les questions suivantes à titre préjudiciel:

«1)
Que faut‑il entendre par ‘base de données’ et quelle est l’étendue du champ d’application de la directive 96/9/CE, en particulier de son article 7, relatif au droit ‘sui generis’?

2)
Eu égard à l’étendue du champ d’application de la directive, les calendriers des championnats de football sont‑ils protégés en tant que bases de données sur lesquelles il existe un droit sui generis en faveur du fabricant, et dans quelles conditions?

3)
Sous quelle forme exactement est‑il porté atteinte au droit sur la base de données, et ce droit est‑il protégé en cas de modification du contenu de la base de données?»

V –  Sur la recevabilité

12.      Selon le gouvernement finlandais, ces questions préjudicielles ne remplissent pas les conditions de recevabilité exigées par la jurisprudence de la Cour de justice. Ainsi, elles ne contiendraient pas suffisamment d’éléments sur l’état du droit national. En outre, l’article de la directive qui y est visé serait l’article 3 et non l’article 7 qui constitue la disposition pertinente. Ensuite, les circonstances de fait résulteraient exclusivement d’un résumé des arguments de Fixtures. Il manquerait la version des faits de OPAP. De plus, le rapport entre les dispositions juridiques et les faits ne serait pas précisé. Les éléments fournis seraient si ténus qu’ils ne permettraient pas au gouvernement finlandais de proposer une analyse approfondie.

13.      La Commission se contente d’observer que les informations données par le juge de renvoi ne permettent pas d’appliquer les dispositions de la directive aux circonstances concrètes du cas d’espèce. Cependant, la Commission ne remet pas en cause la recevabilité.

14.      Il est de jurisprudence constante qu’il appartient aux seules juridictions nationales qui sont saisies du litige et doivent assumer la responsabilité de la décision judiciaire à intervenir d’apprécier, au regard des particularités de chaque affaire, tant la nécessité d’une décision préjudicielle pour être en mesure de rendre leur jugement que la pertinence des questions qu’elles posent à la Cour. En conséquence, dès lors que les questions posées portent sur l’interprétation du droit communautaire, la Cour est, en principe, tenue de statuer  (4) .

15.      La Cour de justice ne peut refuser de statuer sur une question préjudicielle posée par une juridiction nationale que lorsqu’il apparaît de manière manifeste que l’interprétation du droit communautaire sollicitée n’a aucun rapport avec la réalité ou l’objet du litige au principal, lorsque le problème est de nature hypothétique ou encore lorsque la Cour ne dispose pas des éléments de fait et de droit nécessaires pour répondre de façon utile aux questions qui lui sont posées  (5) .

16.      En l’espèce, il n’est pas manifeste que les questions de la juridiction nationale correspondent à ce cas de figure. D’une part, on ne peut pas considérer que l’interprétation demandée n’a aucun rapport avec la réalité ou l’objet du litige au principal, car l’issue de celui-ci dépend notamment du sens de l’expression «base de données» employée à l’article 1er de la directive. D’autre part, la juridiction nationale a fourni à la Cour – même si c’est sous une forme très concise – tous les éléments lui permettant de répondre de façon utile aux questions qui lui sont posées.

17.      Selon une jurisprudence constante, la nécessité de parvenir à une interprétation du droit communautaire qui soit utile pour le juge national exige que celui-ci définisse le cadre factuel et réglementaire dans lequel s’insèrent les questions qu’il pose ou que, à tout le moins, il explique les hypothèses factuelles sur lesquelles ces questions sont fondées  (6) . Étant donné que l’application aux faits du cas d’espèce incombe à la juridiction nationale, les éléments fournis relatifs au cadre factuel et juridique suffisent pour permettre à la Cour de répondre de façon utile aux questions posées. La demande préjudicielle contient même des informations que ne contient pas l’affaire parallèle C‑46/02, non critiquée par le gouvernement finlandais, sur les rapports entre Fixtures et Football Fixtures Limited. Pour ce qui est de OPAP, les indications fournies quant à son activité sont suffisantes.

18.      Les indications fournies dans les demandes de décision préjudicielle ne doivent cependant pas seulement permettre à la Cour de donner des réponses utiles, mais doivent aussi mettre les gouvernements des États membres et les autres parties à la procédure en mesure de présenter des observations, ainsi que le prévoit l’article 23 du statut de la Cour de justice. Il incombe à la Cour de veiller à ce que cette possibilité soit sauvegardée, compte tenu du fait que, en vertu de la disposition précitée, seules les décisions de renvoi sont notifiées aux parties intéressées  (7) .

19.      Les nombreuses observations déposées en vertu de l’article 23 du statut de la Cour de justice – y compris celles du gouvernement finlandais – montrent que les indications fournies par l’ordonnance de renvoi ont suffi à leurs auteurs pour prendre utilement position sur les questions posées à la Cour.

20.      La Cour a en outre jugé qu’il est indispensable que le juge national donne un minimum d’explications sur les raisons du choix des dispositions communautaires dont il demande l’interprétation et sur le lien qu’il établit entre ces dispositions et la législation nationale applicable au litige  (8) .

21.      Selon une jurisprudence constante de la Cour, il suffit cependant qu’il paraisse vraisemblable, au vu des faits décrits par la juridiction nationale, que les faits de l’affaire au principal relèvent des dispositions dont l’interprétation est demandée. En effet, la Cour peut donner à la juridiction nationale des indications sur l’interprétation du droit communautaire présentant une utilité pour l’issue du litige au principal. À cette occasion, la Cour peut être amenée à prendre en considération des normes de droit communautaire auxquelles le juge national n’a pas fait référence dans l’énoncé de sa question  (9) .

22.      Au vu des considérations qui précèdent, les questions posées à titre préjudiciel par le Monomeles Protodikeio Athinon sont recevables.

23.      Sur certains points, les questions préjudicielles ne portent pas sur l’interprétation du droit communautaire, c’est‑à‑dire de la directive, mais sur l’application de la directive à un cas concret. S’agissant de cet aspect, il y a lieu de suivre la thèse de la Commission lorsqu’elle déclare que ces questions ne relèvent pas de la mission de la Cour de justice dans le cadre d’un renvoi préjudiciel en application de l’article 234 CE, mais qu’elles sont de la compétence du juge national et que, en l’espèce, la Cour de justice doit se limiter à interpréter le droit communautaire.

24.      En effet, d’après une jurisprudence constante de la Cour, dans le cadre d’une procédure visée à l’article 234 CE, fondée sur une nette séparation des fonctions entre les juridictions nationales et la Cour, toute appréciation des faits relève de la compétence du juge national  (10) .

25.      La Cour n’est donc pas compétente pour statuer sur les circonstances de fait du litige au principal ni pour appliquer les dispositions de droit communautaire qu’elle a interprétées à des mesures ou faits nationaux, puisque le juge national est seul compétent pour ce faire. L’examen de certains éléments de fait relatifs à la base de données en question exige donc une appréciation de nature factuelle qui incombe au juge national  (11) . Pour le reste, la Cour est compétente pour statuer sur les questions préjudicielles.

VI –  Sur le bien-fondé: appréciation

26.      Les questions préjudicielles posées par le juge de renvoi concernent l’interprétation d’une série de dispositions de la directive, essentiellement l’interprétation de certaines notions. Les aspects qui y sont évoqués relèvent de domaines différents et doivent être classés en conséquence. Alors que certaines questions juridiques portent sur le champ d’application matériel de la directive, d’autres concernent les conditions d’attribution du droit sui generis et son contenu.

A –   Sur le champ d’application matériel: la notion de «base de données» (première et deuxième questions préjudicielles)

27.      Certaines parties à la procédure se sont référées dans leurs observations écrites, en ce qui concerne la notion de «base de données» au sens de l’article 1er, paragraphe 2, de la directive, à des critères qui ne jouent un rôle qu’au stade de la définition de l’objet de la protection conférée par le droit sui generis.

28.      L’interprétation de la notion de «base de données» au sens de l’article 1er, paragraphe 2, concerne l’une des conditions fondamentales d’application de la directive, et donc de son champ d’application matériel général. Il convient de distinguer celui‑ci du champ d’application matériel du droit sui generis, c’est‑à‑dire de l’«objet de la protection» évoqué à l’article 7 de la directive. Cette disposition se rattache certes à la définition juridique de la «base de données» mais, s’agissant de l’objet du droit sui generis, elle prévoit cependant toute une série de conditions supplémentaires. Cela signifie que les bases de données au sens de l’article 1er, paragraphe 2, de la directive ne sont pas toutes des objets dignes de protection au sens de l’article 7 de la directive.

29.      Cette distinction se retrouve aussi dans les considérants de la directive. Ainsi, le dix-septième considérant concerne la notion de base de données et le dix-neuvième considérant l’objet du droit sui generis. Il est vrai que les exemples qui y sont évoqués n’ont pas fait l’objet d’un choix heureux pour illustrer la différence d’importance: ainsi, la fixation de certaines exécutions artistiques, par exemple d’œuvres musicales, ne constitue même pas une base de données, alors que la compilation d’exécutions musicales ne relève pas, quant à elle, des objets protégés. Cela résulte cependant du seul fait que, dans un tel cas, il n’y a pas de base de données.

30.      Pour bénéficier du droit sui generis institué par l’article 7, il est donc nécessaire qu’un objet présente les caractéristiques d’une «base de données», même si cette condition n’est pas suffisante.

31.      L’interprétation de la notion de «base de données» peut en premier lieu s’inspirer de règles de droit international, qui ont un rôle d’orientation. C’est le cas tout d’abord de l’article 10, paragraphe 2, de l’accord sur les aspects des droits de propriété industrielle qui touchent au commerce  (12) , connu sous le nom d’«accord ADPIC» (ou TRIPS dans la version anglaise), bien que cette disposition ne contienne pas tous les critères de l’article 1er, paragraphe 2, de la directive. Il faut y ajouter l’article 2, paragraphe 5, de la version révisée de la convention de Berne elle-même. En revanche, les règles de droit international postérieures à la directive à interpréter ne sauraient fournir de critère adéquat. C’est par exemple le cas de l’article 5 du traité de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI) sur le droit d’auteur, qui n’a été adopté qu’en 1996. Comme le révèle sa genèse, en particulier les documents de la Commission, la directive devrait surtout s’inspirer de la version révisée de la convention de Berne.

32.      Procéder à une interprétation à la lumière des règles de droit international précitées ne débouche cependant sur aucun résultat dans le cas de la notion de base de données parce que l’article 1er, paragraphe 2, de la directive comporte une définition qui – même si elle n’est pas très précise – énonce plusieurs conditions, dont le sens devra être examiné plus en détail ci‑après. Il faut cependant considérer dans ce contexte que la Cour doit fournir au juge national des indications utiles lui permettant de statuer sur le litige au principal, mais qu’il appartient toujours au juge national d’appliquer au cas d’espèce les dispositions de droit communautaire interprétées ou les dispositions nationales de transposition.

33.     À elle seule, la construction de l’article 1er de la directive, qui comporte différentes règles relatives aux bases de données, plaide en faveur d’une interprétation large. Ainsi, comme le révèle son article 1er, paragraphe 1, la directive s’applique aux «bases de données, quelles que soient leurs formes». En outre, le fait que l’article 1er, paragraphe 3, prévoie une exception, et ce pour les programmes d’ordinateur, va aussi dans le sens d’une interprétation large de la notion de «base de données».

34.      L’intention du législateur communautaire peut aussi être invoquée à l’appui d’une interprétation large, ce dont témoigne le parcours législatif de la directive  (13) .

35.      Toutefois, c’est le respect des conditions visées à l’article 1er, paragraphe 2, qui est essentiel pour déterminer le sens de la notion de «base de données».

36.      Tout d’abord, on doit être en présence d’un «recueil d’œuvres, de données ou d’autres éléments indépendants» (c’est nous qui soulignons). Il n’y a pas lieu de nous attarder ici sur la question de savoir si l’affaire au principal concerne des données ou éléments car, en pratique, il s’agit soit de données, comprises comme suites de signes servant à représenter des faits, c’est‑à‑dire de communications élémentaires ayant un contenu potentiellement informatif  (14) , soit d’éléments constituant des unités identifiables.

37.      En l’absence de précision dans la directive, il n’est toutefois pas nécessaire qu’un nombre considérable de données ou d’éléments soient concernés. Une telle exigence avait été formulée par le Parlement, mais n’a été reprise ni par le Conseil ni par la Commission. Les exigences d’ordre quantitatif ne sont prévues que dans les dispositions relatives au droit sui generis, c’est‑à‑dire à l’article 7, paragraphe 1, de la directive, qui exige un «investissement substantiel».

38.      Il convient plutôt de rechercher, dans la présente affaire, si la condition tenant au caractère indépendant des données ou éléments est remplie.

39.      Ce critère se comprend comme signifiant que les données ou éléments ne doivent pas être liés les uns aux autres, ou doivent tout au moins pouvoir être séparés sans perdre leur contenu informatif  (15) , raison pour laquelle la bande son ou les images d’un film ne peuvent pas être concernées par la directive. Une interprétation possible est que l’indépendance ne doit pas seulement exister de façon réciproque entre les éléments les uns par rapport aux autres, mais aussi à l’intérieur du recueil de données ou d’éléments (16) .

40.      Ensuite, la directive ne porte que sur les recueils de données ou d’éléments disposés de manière systématique ou méthodique. Le vingt et unième considérant précise qu’il n’est pas nécessaire que les matières aient été stockées physiquement de manière organisée. Cette condition a pour objectif d’exclure les masses de données non organisées  (17) et de ne couvrir que les recueils de données organisées, c’est‑à‑dire les données disposées en fonction de critères précis  (18) . Il suffit à cet effet qu’une structure des données soit adoptée et que leur disposition n’apparaisse qu’avec l’utilisation d’un programme de recherche correspondant  (19) , et donc essentiellement grâce au tri et éventuellement au moyen d’une indexation. Sont comprises aussi bien les bases de données statiques que les bases de données dynamiques  (20) .

41.      Enfin, l’article 1er, paragraphe 2, de la directive exige que les données soient «individuellement accessibles par des moyens électroniques ou d’une autre manière». Ainsi le simple stockage de données n’est pas couvert par la notion de «base de données» au sens de l’article 1er, paragraphe 2, de la directive.

42.      En conclusion, la notion de «base de données» au sens de l’article 1er, paragraphe 2, doit par conséquent être entendue dans un sens large. Les conditions auxquelles l’article 7, paragraphe 1, de la directive subordonne l’objet de la protection y apportent toutefois des restrictions.

43.      Certains gouvernements ont estimé que le choix et la disposition du contenu de la base de données relative à des compétitions sportives ne constituent pas une prestation intellectuelle en soi. Il convient de rappeler à ce propos que la créativité n’est pas une caractéristique requise pour les bases de données au sens de l’article 1er de la directive. On peut même douter que la créativité soit une caractéristique si l’on examine l’objet du droit sui generis. En revanche, il faut que la base de données constitue une création intellectuelle propre pour pouvoir bénéficier de la protection du droit d’auteur régie par le chapitre II de la directive (articles 3 et suivants): dans ce cas il s’agit d’une condition essentielle. Mais l’article 7, paragraphe 4, de la directive énonce que le droit sui generis s’applique indépendamment du point de savoir si la base de données ou son contenu peuvent bénéficier d’une protection au titre des droits d’auteur.

44.      Le droit sui generis ne protège pas la même chose que le droit d’auteur. L’objet de ce droit nouvellement créé est de protéger l’opération d’investissement, contrairement au droit d’auteur qui vise à protéger l’opération de création  (21) . Il y a donc une différence également quant au titulaire du droit: tandis, en effet, que le droit sui generis protège le fabricant de la base de données, le droit d’auteur s’applique, comme son nom l’indique, à l’auteur.

45.      Certains gouvernements ont fait valoir dans leurs observations écrites que la base de données litigieuse ne serait pas disposée de façon systématique ou méthodique, parce que les paires d’équipes se forment par le jeu de l’élimination. Il convient d’observer à ce sujet que le contenu de la base de données ne se rapporte pas uniquement à des données résultant d’une élimination, mais que des enregistrements supplémentaires doivent être effectués, tels que le lieu et la date de la rencontre.

B –   Sur l’objet de la protection: les conditions (première et deuxième questions préjudicielles)

46.      Pour qu’une base de données puisse bénéficier du droit sui generis institué par l’article 7 de la directive, elle doit remplir les conditions définies par cette disposition. La présente procédure concerne l’interprétation de certains de ces critères.

47.      Il y a lieu de signaler, dans ce contexte, le débat juridique portant sur la question de savoir si ce droit sui generis doit servir à protéger la prestation, c’est‑à‑dire en substance l’activité de constitution d’une base de données, ou le résultat produit par cette opération. Il convient de constater à ce sujet que la directive protège les bases de données et leur contenu, mais ne protège pas en tant que telle l’information qu’elles renferment. Ce qui importe, en fin de compte, c’est donc la protection du produit obtenu, les moyens mis en œuvre pour y parvenir, à savoir l’investissement, étant eux aussi indirectement protégés  (22) .

48.      Les conditions prévues à l’article 7 de la directive s’ajoutent à celles visées à l’article 1er, paragraphe 2. L’objet de la protection est, de ce fait, défini de façon plus étroite que la notion de «base de données» visée à l’article 1er.

49.      Le nouveau droit sui generis institué par la directive s’inspire des «Katalogrechte» nordiques et de la «geschriftenbescherming» néerlandaise. Ce contexte ne doit cependant pas inciter à transposer dans la directive la conception développée à propos de ces régimes précurseurs dans la doctrine et la jurisprudence. C’est au contraire la directive qui doit constituer la référence en vertu de laquelle s’interprète le droit national, cette règle valant également pour les États membres dans lesquels des dispositions comparables s’appliquaient déjà antérieurement à la directive. En effet, il s’est aussi avéré nécessaire dans ces États membres d’adapter les législations nationales aux dispositions de la directive.

1. La notion d’«investissement substantiel»

50.      L’une des notions clés pour déterminer la portée de la protection conférée par le droit sui generis est l’expression «investissement substantiel», employée à l’article 7, paragraphe 1, de la directive. Cette condition matérielle est plus précisément définie ainsi: le caractère substantiel doit exister «de façon qualitative ou quantitative». La directive ne contient toutefois pas de définition légale de cette alternative. La doctrine réclame des éclaircissements à cet égard à la Cour de justice. Cette demande n’est que trop justifiée, car il s’agit là du seul moyen de garantir une interprétation communautaire autonome et uniforme. Il ne faut bien entendu pas oublier que l’application des critères d’interprétation reste en dernière analyse l’affaire des juridictions nationales, ce qui implique un risque d’application divergente.

51.      Il résulte tout d’abord de la structure de l’article 7, paragraphe 1, de la directive que la notion d’«investissement substantiel» doit s’entendre de façon relative. Selon le préambule de la position commune dans le cadre de laquelle cette disposition a reçu sa forme définitive, les investissements devant être protégés sont ceux qui ont été effectués pour rechercher et rassembler le contenu de la base de données  (23) .

52.      Les investissements doivent par conséquent porter sur des activités déterminées, liées à la constitution de la base de données. L’article 7 mentionne à cet égard, à titre d’exemples, les activités suivantes: l’obtention, la vérification ou la présentation du contenu de la base de données. Ces éléments faisant l’objet d’une question préjudicielle distincte, il n’est pas nécessaire d’examiner à ce stade leur signification.

53.      Le quarantième considérant de la directive nous renseigne sur la nature des investissements susceptibles d’être pris en compte. Sa dernière phrase est en effet ainsi rédigée: «cet investissement peut consister dans la mise en œuvre de moyens financiers et/ou d’emploi du temps, d’efforts et d’énergie». Selon le septième considérant, il doit s’agir d’investissements en ressources humaines, techniques et financières considérables.

54.      En outre, le terme «substantiel» doit lui aussi s’entendre de façon relative, c’est‑à‑dire, d’une part, en tenant compte des coûts et amortissements  (24) et, d’autre part, eu égard à l’importance, à la nature et au contenu de la base de données, ainsi qu’au domaine dont celle-ci relève  (25) .

55.      Les investissements protégés ne sont donc pas uniquement ceux qui ont dans l’absolu une valeur importante  (26) . Le critère tiré du caractère «substantiel» ne peut néanmoins pas être compris de façon purement relative. La directive exige, comme le ferait une sorte de règle de minimis, que les investissements susceptibles d’être protégés respectent un seuil minimal absolu  (27) . Cela se déduit du dix-neuvième considérant dont il résulte que l’investissement doit être «assez substantiel»  (28) . Ce seuil doit cependant être assez bas. Cela est, tout d’abord, suggéré par le cinquante‑cinquième considérant  (29) qui ne contient pas d’autre précision sur le montant. Ensuite, le fait que la directive doive contribuer à harmoniser des systèmes différents plaide également en faveur de cette idée. Enfin, un seuil trop élevé affaiblirait le rôle qu’entend jouer la directive, à savoir inciter à investir.

56.      Plusieurs parties intervenantes se sont fondées, dans leurs observations écrites, sur ce que l’on appelle la «Spin-off-Theorie», qui veut que les sous-produits ne soient pas inclus dans la protection conférée par le droit. Seules devraient être comptabilisées les recettes qui ont servi à amortir les investissements. Ces parties ont souligné que la base de données litigieuse est nécessaire à l’organisation des compétitions sportives, ce qui signifie qu’elle a été élaborée dans ce but. L’investissement aurait pour finalité l’organisation des championnats et non pas exclusivement la constitution de la base de données. Cet investissement devait, en tout état de cause, être réalisé, ne serait-ce que parce qu’il existe une obligation d’organiser les compétitions. La base de données ne serait donc qu’un sous-produit sur un autre marché.

57.      En l’espèce, il convient donc d’examiner si, et de quelle manière, la théorie dite «Spin-off-Theorie» peut jouer un rôle pour l’interprétation de la directive et en particulier du droit sui generis. Au vu des doutes exprimés dans cette affaire sur la protection des bases de données qui ne constituent que des sous-produits, une démythification de la «Spin-off-Theorie» semble s’imposer. Le recours à cette théorie, abstraction faite de ses origines nationales, semble s’expliquer par la finalité de la directive telle qu’elle résulte des dixième à vingtième considérants, qui est d’encourager les investissements en améliorant leur protection. La théorie se fonde cependant sur l’idée que les investissements doivent être amortis grâce aux recettes tirées de l’activité principale. La «Spin-off-Theorie» a donc aussi pour conséquence que la directive ne protège que les investissements nécessaires à l’obtention du contenu de la base de données  (30) . Tous ces arguments ont leur valeur et doivent être pris en considération pour l’interprétation de la directive. Cela ne doit toutefois pas conduire à exclure en soi, au nom d’une théorie, tout effet dérivé. Ce qui est – et reste – déterminant, pour l’interprétation de la directive, ce sont les dispositions de celle-ci.

58.      Pour résoudre le problème de droit qui se pose dans cette affaire, il faut partir de la question suivante: l’octroi de la protection à une base de données doit-il dépendre de l’intention du créateur de la base, ou bien de la finalité de la base de données, dans le cas où ces deux éléments ne coïncident pas? Sur ce point, on pourrait se contenter d’observer que la directive ne fait pas référence à la finalité de la base de données, ni à l’article 1er ni à l’article 7. Or, si le législateur avait voulu imposer une telle condition, il l’aurait certainement exprimé. En effet, tant l’article 1er que l’article 7 montrent que le législateur a clairement entendu fixer un ensemble de conditions. Il en découle que la finalité de la base de données ne constitue pas un critère à prendre en compte pour déterminer si celle-ci bénéficie de la protection. Ce qui est déterminant, ce sont les conditions énumérées à l’article 7. Le quarante‑deuxième considérant, invoqué par certaines des parties, n’y change rien. D’une part, parce que ce considérant concerne l’étendue de la protection sui generis et, d’autre part, parce qu’il vise à assurer qu’il ne soit pas porté atteinte à l’investissement.

59.      Les autres considérants de la directive qui font référence aux investissements, et dont l’importance a été soulignée, tels que les dix‑neuvième et quarantième considérants, ne contiennent pas, eux non plus, d’élément indiquant que la protection d’une base de données dépend de sa finalité.

60.      En pratique, il peut en outre exister des créateurs de bases qui poursuivent plusieurs finalités avec une même base de données. Il peut donc arriver que les investissements réalisés à cette occasion ne puissent pas être rattachés à une finalité bien précise ou ne puissent pas être distingués du reste. En pareille hypothèse, le critère de la finalité de la base de données ne fournirait pas une solution claire. En effet, soit l’investissement serait protégé indépendamment de l’existence d’une autre finalité, soit il se trouverait totalement privé de protection en raison de cette autre finalité. Le critère de la finalité s’avère par conséquent soit impraticable, soit incompatible avec le but poursuivi par la directive. En effet, l’exclusion de la protection des bases de données à finalités multiples irait à l’encontre du but de la directive, qui est de créer des conditions favorables à l’investissement. Cela constituerait un obstacle de taille aux investissements dans les bases de données à fonctions multiples.

61.      La base de données en cause dans l’affaire au principal constitue un exemple de cas dans lequel la constitution de la base de données s’effectue également en vue de l’organisation de championnats. La constitution d’une base de données propre – le cas échéant presque identique – pour chaque finalité serait fondamentalement contraire aux intérêts économiques, et ne peut pas être imposée au nom de la directive.

62.      Pour déterminer si, dans l’affaire au principal, on se trouve en présence d’un investissement substantiel, il y a lieu d’appliquer les critères précités à une situation de fait concrète. Selon la répartition des compétences prévue à l’article 234 CE en matière préjudicielle, c’est à la juridiction nationale qu’il incombe de le faire. Pour apprécier les investissements réalisés dans la base de données, il faut en tout cas inclure les paramètres devant être pris en compte lors de la planification des matchs, tels que l’attrait du match aux yeux des spectateurs, les intérêts des sociétés de paris, l’exploitation commerciale par les clubs, les autres événements locaux à la date prévue, la répartition équilibrée des rencontres sur le plan géographique ainsi que la prévention des troubles à l’ordre public. Enfin, il doit également être tenu compte, dans cette appréciation, du nombre des matchs. La charge de la preuve quant aux investissements réalisés pèse sur la partie qui invoque la protection du droit sui generis.

2. La notion d’«obtention» au sens de l’article 7, paragraphe 1, de la directive

63.      La controverse porte, dans la présente affaire, sur la question de savoir s’il y a obtention au sens de l’article 7, paragraphe 1, de la directive. Cette disposition protège en effet uniquement les investissements consentis pour l’«obtention», la «vérification» ou la «présentation» du contenu d’une base de données.

64.      Il faut partir de l’objectif du droit sui generis, à savoir la protection du fabricant de la base de données. On pourra donc considérer la fabrication comme étant le terme générique  (31) regroupant l’obtention, la vérification et la présentation.

65.      La procédure au principal concerne un problème juridique très discuté, puisqu’il porte sur la question de savoir si – le cas échéant à quelles conditions – et dans quelle mesure la directive protège non seulement les données existantes, mais aussi les données nouvellement créées par le fabricant. Si l’obtention ne devait concerner que les données existantes, la protection des investissements ne comprendrait aussi que cette obtention. Ainsi, si l’on part de cette conception de l’obtention, la protection de la base de données dans le litige au principal dépend du point de savoir si ce sont des données existantes qui ont été obtenues.

66.      Si l’on part en revanche du terme générique de fabrication, c’est-à-dire de l’apport d’un contenu dans la base de données  (32) , tant les données existantes que les données nouvellement créées pourraient être concernées  (33) .

67.      Une comparaison de la notion d’«obtention» utilisée à l’article 7, paragraphe 1, avec les activités visées au trente‑neuvième considérant pourrait apporter une clarification. Il y a cependant lieu de souligner dès l’abord que les différentes versions linguistiques divergent.

68.      Si l’on se reporte à la notion de «Beschaffung» (obtention) utilisée à l’article 7, paragraphe 1, de la version allemande, elle ne peut concerner que des données existantes parce que l’on ne peut obtenir que ce qui existe déjà. Considérée de la sorte, l’obtention («Beschaffung») est précisément le contraire de la création («Erschaffung»). On parvient au même résultat en interprétant le texte des versions portugaise, française, espagnole et anglaise qui renvoient toutes au latin «obtenere», c’est-à-dire obtenir. Les versions finnoise et danoise incitent également à une interprétation stricte. L’interprétation extensive des versions allemande et anglaise choisie par certaines parties à la procédure est donc fondée sur une erreur.

69.      Le trente-neuvième considérant de la directive, qui évoque en introduction l’objet du droit sui generis, pourrait fournir des indications supplémentaires dans la perspective d’une interprétation correcte de la notion d’«obtention» («Beschaffung») au sens de l’article 7, paragraphe 1, de la directive. Ce considérant évoque seulement deux types d’activités en ce qui concerne les investissements protégés: la «recherche» et le «rassemblement» du contenu. Des problèmes résultent toutefois aussi en l’occurrence des différences existant entre les versions linguistiques. La plupart des versions linguistiques utilisent pour désigner la première activité le même terme que celui employé à l’article 7, paragraphe 1 (obtention). De plus, les termes utilisés ne décrivent certes pas toujours la même activité, mais portent néanmoins pour l’essentiel sur la recherche et le rassemblement du contenu de la base de données.

70.      Les versions linguistiques qui, au trente‑neuvième considérant, utilisent deux termes différents de ceux de l’article 7, paragraphe 1, de la directive doivent être interprétées en ce sens que les deux activités évoquées doivent être considérées comme une sous‑catégorie de l’obtention au sens de l’article 7, paragraphe 1, de la directive. On peut évidemment se demander pourquoi le trente‑neuvième considérant ne décrit plus précisément que l’obtention, et non la vérification ou la présentation. Ces deux dernières activités sont évoquées pour la première fois au quarantième considérant.

71.      Les versions linguistiques qui, au trente‑neuvième considérant, utilisent les mêmes termes que ceux figurant à l’article 7, paragraphe 1, de la directive devront en revanche être interprétées en ce sens que la notion d’obtention («Beschaffung») employée au trente‑neuvième considérant doit être comprise dans un sens plus restrictif, alors que le terme utilisé à l’article 7, paragraphe 1, de la directive doit être compris dans un sens large, à savoir qu’il recouvre aussi les autres activités évoquées au trente‑neuvième considérant.

72.      Toutes les versions linguistiques autorisent dès lors une interprétation d’après laquelle l’obtention au sens de l’article 7, paragraphe 1, de la directive ne couvre certainement pas la pure saisie de données  (34) , c’est-à-dire la génération de données, et exclut par conséquent la phase préparatoire  (35) . Si cependant la création des données coïncide avec leur rassemblement et leur tri, elle est couverte par la protection de la directive.

73.      Il faut rappeler dans ce contexte que la théorie du sous-produit («Spin‑off‑Theorie») ne saurait être suivie. L’objectif poursuivi lors de l’obtention du contenu d’une base de données ne peut ainsi jouer aucun rôle  (36) . Cela signifie que la protection est envisageable aussi dans le cas où l’obtention a tout d’abord été réalisée en vue d’une activité autre que la fabrication de la base de données en cause. La directive protège en effet aussi l’obtention de données lorsqu’elle n’a pas été réalisée dans la perspective d’une base de données  (37) , ce qui plaide également en faveur de l’inclusion, dans le champ d’application de la protection, d’une base de données externe fondée sur une base de données interne.

74.      Il appartiendra au juge national, en se fondant sur l’interprétation de la notion d’«obtention» développée ci-dessus, d’apprécier les activités de Fixtures. Dans ce cadre, il doit en premier lieu qualifier les données et ce qui en est fait, de leur acquisition jusqu’à leur enregistrement dans la base de données. Il conviendra de rechercher comment la fixation des calendriers des matchs, c’est-à-dire en substance la collecte des noms des équipes et leurs appariements, avec les lieux et dates des différentes rencontres, doit être qualifiée. En l’espèce, le fait que la programmation des matchs soit le résultat de discussions entre plusieurs parties, notamment la police, les clubs et les associations de supporters, semble indiquer qu’il s’agit de données existantes. De même, le fait que les données aient été rassemblées dans un but autre que la constitution de la base de données, ainsi que l’ont affirmé plusieurs parties, pourrait permettre de conclure qu’il s’agit de données existantes.

75.      Toutefois, même si l’on qualifie ces activités de création de données nouvelles, on pourrait néanmoins être en présence d’une «obtention» au sens de l’article 7, paragraphe 1, de la directive. Tel serait le cas si la création des données était concomitante à leur traitement et ne pouvait en être dissociée.

3.        La notion de «vérification» au sens de l’article 7, paragraphe 1, de la directive

76.      L’utilisation de la base de données pour le bon déroulement des compétitions et leur exploitation économique suppose que le contenu de la base de données litigieuse fasse l’objet d’un contrôle constant. Il résulte du dossier que la base de données est vérifiée en permanence quant à son exactitude. Si un tel contrôle fait apparaître la nécessité de modifications, les adaptations requises sont effectuées.

77.      Peu importe que certaines de ces mises à jour ne constituent pas une vérification du contenu de la base de données. Pour qu’existe un objet sur lequel porte la protection du droit sui generis, il suffit qu’un certain nombre de ces opérations puissent être qualifiées de vérification au sens de l’article 7, paragraphe 1, de la directive et que les investissements substantiels concernent au moins aussi en partie des opérations visées à l’article 7.

4.        La notion de «présentation» au sens de l’article 7, paragraphe 1, de la directive

78.      La protection conférée par le droit sui generis porte, outre sur l’obtention et la vérification du contenu d’une base de données, également sur sa présentation. Cela comprend non seulement la présentation proprement dite pour l’utilisateur de la base de données, c’est-à-dire le schéma externe, mais aussi le schéma conceptuel, ainsi que l’organisation du contenu. En général, un système d’indexation et un thésaurus contribuent à une meilleure mise en forme des données. Ainsi qu’il résulte du vingtième considérant, la protection prévue par la directive peut s’appliquer également à des éléments nécessaires à la consultation de la base de données  (38) .

C –   Sur le contenu de la protection

79.      Il convient d’abord de rappeler que l’objectif recherché lors de l’introduction du droit sui generis en tant que tel n’était pas d’harmoniser le droit, mais de créer délibérément un nouveau droit  (39) . Ce droit va plus loin que les droits de diffusion et de reproduction que nous connaissions auparavant. Il faut également tenir compte de ce droit pour la définition des actes prohibés. C’est pourquoi les définitions légales incluses dans l’article 7, paragraphe 2, revêtent une importance particulière.

80.      L’article 7 de la directive se compose, à première vue, de deux groupes de règles d’interdiction, ou, si l’on se place du point de vue du titulaire, c’est-à-dire celui qui a créé la base de données, de deux catégories différentes de droits. Tandis que le paragraphe 1 édicte une interdiction qui concerne la partie substantielle de la base de données, le paragraphe 5 prohibe certains actes portant sur des parties non substantielles de la base de données. Cependant, si l’on se fonde sur la mise en parallèle entre substantiel et non substantiel, on peut comprendre le paragraphe 5 comme une exception à la règle du paragraphe 1  (40) . Le paragraphe 5 doit empêcher que l’on ne contourne l’interdiction édictée dans le paragraphe 1  (41) , et peut par conséquent également être qualifié de clause de sauvegarde  (42) .

81.      L’article 7, paragraphe 1, de la directive réglemente le droit pour le fabricant de la base de données de faire interdire certains actes. Ainsi, il implique en même temps que ces actes sont prohibés. Les actes susceptibles d’interdits, et par conséquent prohibés, sont, d’une part, l’extraction et, d’autre part, la réutilisation. L’article 7, paragraphe 2, de la directive contient des définitions légales des notions d’«extraction» et de «réutilisation».

82.      L’interdiction prévue à l’article 7, paragraphe 1, n’est cependant pas inconditionnelle: elle suppose en effet que l’acte prohibé concerne la totalité ou une partie substantielle de la base de données.

83.      En nous fondant sur la distinction déterminante pour l’application de l’article 7, paragraphes 1 et 5, entre parties «substantielle» et «non substantielle» de la base de données, nous allons par conséquent analyser ces deux situations. Puis nous examinerons les actes qui sont interdits au regard du paragraphe 1 et du paragraphe 5.

1.        Partie substantielle ou non d’une base de données (première et deuxième questions préjudicielles)

a)
Remarques générales

84.      Il a été prétendu, au cours de la procédure, que l’article 7, paragraphe 1, de la directive interdit uniquement les actes qui aboutissent à ce que les données se trouvent systématiquement et méthodiquement disposées, et individuellement accessibles, de la même manière que dans la base d’origine.

85.      Il faut comprendre cet argument comme subordonnant l’application du droit sui generis à une condition. Le point de savoir si cette condition existe réellement doit être résolu au regard des dispositions relatives à l’objet de la protection, notamment au regard des définitions légales, arrêtées à l’article 7, paragraphe 2, des actes qui sont interdits en vertu de l’article 7, paragraphe 1.

86.      Ni l’article 7, paragraphe 1, ni l’article 7, paragraphe 5, de la directive ne formulent expressément la condition précitée: ils n’y font même pas une simple allusion. Le fait que l’article 1er, paragraphe 2, parle explicitement de disposition «systématique ou méthodique» des données, mais que cette mention soit totalement absente de l’article 7 incite plutôt à retenir la conclusion contraire, à savoir que le législateur n’a justement pas voulu faire de ce critère une condition d’application de l’article 7.

87.      La finalité de la directive plaide elle aussi contre ce critère supplémentaire.

88.      La protection prévue à l’article 7 serait en effet sérieusement amoindrie par l’effet d’un tel critère, parce que l’interdiction énoncée dans cet article pourrait être contournée grâce à une simple modification de parties de base de données.

89.      Le fait que la directive entende également interdire, en tant qu’infraction éventuelle, un nouvel agencement du contenu de la base de données résulte de son trente‑huitième considérant, qui fait allusion à ce risque et à l’insuffisance du droit d’auteur.

90.      La directive sert précisément à créer un nouveau droit, auquel on ne peut pas opposer le quarante‑sixième considérant qui concerne un autre aspect.

91.      Même le quarante‑cinquième considérant, qui énonce qu’il n’y a pas extension de la protection du droit d’auteur aux simples faits ou aux données, ne plaide pas en faveur d’un critère supplémentaire. Cela ne signifie pas, bien entendu, que la protection couvre aussi les données elles-mêmes ou même certaines données prises individuellement. Ce que le droit sui generis protège, c’est – et cela demeure – la base de données.

92.      Il convient donc, pour conclure sur ce point, de constater que l’identité de la disposition systématique ou méthodique des données par rapport à la base de données initiale ne constitue pas un critère pour apprécier la licéité des actes commis sur une base de données. Il n’est donc pas exact d’affirmer que la directive ne protège pas des données modifiées ou agencées selon une autre structure.

b)       La notion de «partie substantielle d’une base de données» au sens de l’article 7, paragraphe 1, de la directive

93.      En posant cette question, le juge de renvoi souhaite savoir comment il faut comprendre l’expression «partie substantielle d’une base de données» au sens de l’article 7, paragraphe 1, de la directive. Contrairement à d’autres notions clés, cette expression n’est pas définie dans la directive. La définition a été abandonnée au cours de la procédure législative, plus précisément au stade de la position commune du Conseil.

94.      L’article 7, paragraphe 1, de la directive envisage deux cas. Il résulte du texte que le caractère substantiel peut avoir deux origines: soit quantitative, soit qualitative. Cette construction, choisie par le législateur, doit donc se comprendre comme signifiant qu’une partie de base de données peut être substantielle même si elle l’est seulement d’un point de vue qualitatif et non quantitatif. Il convient ainsi de rejeter la thèse selon laquelle les actes prohibés devraient systématiquement porter sur une partie minimale quantitative de la base de données.

95.      L’alternative quantitative doit se comprendre comme impliquant de quantifier la partie de la base de données concernée par un acte prohibé. Se pose alors la question de savoir s’il convient d’adopter ici une conception relative ou absolue. Cela signifie qu’il faut soit comparer la partie concernée avec l’ensemble du contenu de la base de données  (43) , soit apprécier la partie concernée en elle-même.

96.      Notons à cet égard qu’un point de vue relatif aura tendance à être défavorable aux fabricants de grandes bases de données  (44) , parce que la partie concernée sera de moins en moins substantielle au fur et à mesure que la dimension de l’ensemble augmente. En pareil cas, une appréciation qualitative complémentaire pourrait offrir une comparaison, car on peut néanmoins tenir pour substantielle d’un point de vue qualitatif une partie aux dimensions relativement modestes. On pourrait tout aussi bien associer les deux approches quantitatives. Cela permettrait de qualifier de substantielle une partie relativement limitée, en raison de sa dimension absolue.

97.      Se pose également la question de savoir si l’appréciation quantitative peut être combinée avec l’appréciation qualitative. Cela ne peut, bien entendu, être envisagé que dans les hypothèses où une appréciation sur le plan qualitatif est possible. Si tel est le cas, alors rien ne s’oppose à ce que les parties concernées soient mesurées selon les deux approches.

98.      Dans le cadre de l’appréciation qualitative, la valeur technique ou économique joue en tout cas un rôle  (45) . Ainsi, une partie qui a une ampleur limitée, mais qui est substantielle par sa valeur peut être prise en compte. Par exemple, s’agissant de la valeur de listes dans le domaine du sport, on a cité leur caractère complet et leur exactitude.

99.      La valeur économique d’une partie de base de données se mesure en règle générale au regard de l’absence de demande sur le marché  (46) , due au fait que la partie en question n’est pas extraite ou réutilisée aux conditions du marché, mais d’une autre manière. L’appréciation portée sur la partie concernée, et sur sa valeur économique, peut aussi se faire du point de vue de l’auteur de l’acte, en recherchant ce que celui-ci a réalisé comme économies grâce à l’extraction ou à la réutilisation.

100.    Si l’on part de la finalité que poursuit l’article 7 de la directive, à savoir protéger les investissements, il convient également de prendre en compte les investissements réalisés par le fabricant de la base de données  (47) . Il résulte en effet du quarante‑deuxième considérant que l’interdiction des extractions et réutilisations vise à éviter qu’il ne soit porté atteinte aux investissements  (48) .

101.    Les investissements réalisés peuvent par conséquent constituer des éléments pour apprécier la valeur de la partie concernée de la base de données, et en particulier les coûts de l’obtention  (49) .

102.    Le seuil à partir duquel on peut parler de caractère substantiel n’est pas davantage défini dans la directive. La doctrine estime très clairement que le législateur a volontairement laissé à la jurisprudence le soin de fixer cette limite  (50) .

103.    Le caractère substantiel ne peut toutefois pas dépendre de l’importance du préjudice causé  (51) . L’allusion en ce sens dans le préambule, au quarante‑deuxième considérant in fine, ne peut pas suffire à fixer aussi haut le seuil conditionnant la protection. D’ailleurs, on peut se demander si l’«atteinte substantielle» peut vraiment constituer un critère pour déterminer ce qui est substantiel, le quarante‑deuxième considérant pouvant aussi être compris en ce sens qu’une «atteinte substantielle» constitue une condition supplémentaire exigée dans le cas où il est déjà établi que l’on est en présence d’une partie substantielle de base de données. Même l’effet des actes prohibés, mentionné dans le huitième considérant, à savoir les conséquences économiques et techniques graves, ne semble pas justifier une appréciation trop stricte du point de vue du dommage. Les deux considérants servent plutôt à souligner le caractère nécessaire, du point de vue économique, de la protection des bases de données.

104.    En ce qui concerne l’évaluation de la partie de base de données ici en cause, il est incontestable que les opérations ont lieu chaque semaine. Il faut donc se demander si, en cas d’appréciation selon l’approche relative, les parties concernées doivent être rapportées à l’ensemble de la base de données ou à l’ensemble de la semaine en question. Enfin, on pourrait imaginer que toutes les parties concernées chaque semaine se cumulent sur l’ensemble de la saison sportive, et que c’est la somme ainsi obtenue que l’on doit comparer avec l’ensemble de la base de données.

105.    Par conséquent, seule une comparaison sur la même base temporelle, pour la partie concernée comme pour l’ensemble, correspond à une interprétation fidèle à la finalité du droit sui generis. Une telle comparaison peut se faire soit semaine par semaine, soit pour la saison. Si plus de la moitié des matchs sont concernés, on peut certainement qualifier la partie concernée de substantielle. Cependant, une partie représentant moins de la moitié des matchs, rapportée à l’ensemble, peut suffire si la proportion est plus élevée dans certaines catégories de matchs, comme par exemple dans la Premier League.

106.    Dans le cas où l’on mesure en valeur absolue, les parties respectivement concernées doivent être additionnées jusqu’à ce que l’on atteigne le seuil à partir duquel les parties concernées deviennent substantielles. On peut donc apprécier à partir de quel moment il pourra être dit que les parties concernées sont substantielles.

2.        Les interdictions concernant la partie substantielle du contenu d’une base de données (deuxième question préjudicielle et première partie de la troisième question préjudicielle)

107.    Le droit pour le fabricant d’interdire certains actes, institué par l’article 7, paragraphe 1, de la directive, permet de déduire que ces actes, à savoir l’extraction et la réutilisation, sont prohibés. Ces actes sont ainsi qualifiés de «non autorisés» dans une série de considérants  (52) .

108.    Il nous faut ci-après interpréter les notions d’«extraction» et de «réutilisation». Il convient, pour ce faire, d’interpréter les définitions juridiques correspondantes figurant à l’article 7, paragraphe 2, de la directive. Rappelons dans ce contexte l’objectif de la directive, qui est d’introduire un droit d’un nouveau type, circonstance dont il faudra tenir compte en tant que critère dans l’interprétation de ces deux notions.

109.    Le but ou l’intention de l’utilisateur du contenu de la base de données n’a aucune incidence en ce qui concerne ces deux actes interdits. Peu importe donc que l’utilisation soit purement commerciale ou non. Seules les caractéristiques visées dans les deux définitions juridiques demeurent déterminantes.

110.   À la différence de ce que prévoit l’article 7, paragraphe 5, les deux mesures d’interdiction ne se limitent pas ici aux actes répétés et systématiques. Les actes interdits devant, d’après le paragraphe 1, concerner des parties substantielles du contenu d’une base de données, le législateur communautaire les soumet à des conditions moins strictes que les actes portant sur des parties non substantielles, visés au paragraphe 5.

111.    Il faut, à ce propos, attirer l’attention sur une erreur de construction de la directive  (53) . Dans la mesure où la définition juridique de l’article 7, paragraphe 2, concerne soit la totalité, soit une partie substantielle, elle répète inutilement cette condition déjà prévue au paragraphe 1. La définition juridique figurant à l’article 7, paragraphe 2, combinée à l’article 7, paragraphe 5, débouche même sur une contradiction. En effet, le paragraphe 5 interdit l’extraction et la réutilisation de parties non substantielles. Si l’on interprétait les notions d’extraction et de réutilisation au regard de la définition juridique de l’article 7, paragraphe 2, on en arriverait – étrangement – à ce que l’article 7, paragraphe 5, n’interdise certains actes relatifs à des parties non substantielles que s’ils concernent la totalité ou des parties substantielles.

112.    Plusieurs parties à la procédure ont également souligné l’aspect concurrentiel. Il faut considérer cet aspect en tenant compte du fait que la version définitive de la directive ne comporte pas la réglementation initialement prévue par la Commission sur la délivrance de licences obligatoires.

113.    Les adversaires d’une protection large des fabricants de bases de données craignent que cette protection ne recèle un risque de constitution de monopoles, en particulier dans le cas de données jusqu’alors librement accessibles; ainsi, un fabricant disposant d’une position dominante pourrait en abuser. Il faut rappeler à ce propos que la directive n’exclut pas l’application des règles de concurrence du droit primaire et du droit dérivé. Les comportements anticoncurrentiels des fabricants de base de données demeurent soumis à ces règles. Cette conclusion résulte à la fois du quarante‑septième considérant et de l’article 16, paragraphe 3, de la directive, d’après lequel la Commission vérifie si l’application du droit sui generis a entraîné des abus de position dominante ou d’autres atteintes à la libre concurrence.

114.    La question du régime juridique des données librement accessibles a aussi été évoquée dans la présente procédure. Les gouvernements qui sont intervenus dans la procédure estiment précisément à ce sujet que les données publiques ne seraient pas protégées par la directive.

115.    Il faut d’abord souligner sur ce point que la protection s’applique uniquement au contenu des bases de données et non aux données. Le risque que la protection s’étende aussi aux informations contenues dans une base de données peut, d’une part, être contrecarré par une interprétation restrictive de la directive en la matière, comme nous le préconisons en l’occurrence. Il existe, d’autre part, une obligation de faire jouer les règles nationales et communautaires de concurrence dans les cas particuliers.

116.    S’agissant de la protection des données qui forment le contenu d’une base inconnue de l’utilisateur des données, il faut souligner que la directive n’interdit que certains actes: l’extraction et la réutilisation.

117.    Alors que l’interdiction de l’extraction suppose que l’existence de la base de données soit connue, il n’en va pas de même dans le cas de la réutilisation. Il y aura donc lieu de revenir sur cette problématique lorsque nous aborderons la question de la réutilisation.

a)
La notion d’«extraction» au sens de l’article 7 de la directive

118.    Il y a lieu d’interpréter la notion d’«extraction» de l’article 7, paragraphe 1, de la directive en se fondant sur la définition juridique de l’article 7, paragraphe 2, sous a).

119.    Le premier élément est celui du transfert du contenu d’une base de données sur un autre support, qu’il soit permanent ou temporaire. L’expression «par quelque moyen ou sous quelque forme que ce soit» permet de déduire que le législateur communautaire a donné un sens large à la notion d’«extraction».

120.    Ce n’est donc pas seulement le transfert sur un autre support du même type qui est visé  (54) , mais aussi le transfert sur un support d’un autre type  (55) . La simple impression du contenu relève donc aussi de la notion d’«extraction».

121.    De plus, l’«extraction» ne peut évidemment pas être comprise en ce sens que les parties extraites ne peuvent plus se retrouver dans la base de données pour que l’interdiction s’applique. L’«extraction» ne saurait cependant être interprétée de façon à ce point large qu’elle viserait aussi le transfert indirect. La directive exige au contraire le transfert direct sur un autre support. Contrairement à ce qui se passe dans le cas de la «réutilisation», aucun aspect public n’intervient toutefois en l’espèce. Le transfert privé suffit.

122.    En ce qui concerne le deuxième élément, à savoir l’objet en cause de la base de données («totalité ou partie substantielle»), nous pouvons renvoyer aux considérations développées à propos du caractère substantiel.

123.    Il appartiendra au juge national d’appliquer les critères évoqués ci‑dessus aux circonstances de fait de la procédure au principal.

b)
La notion de «réutilisation» au sens de l’article 7 de la directive

124.    Il ressort de la définition juridique de l’article 7, paragraphe 2, sous b), de la directive que la réutilisation concerne une mise à la disposition du public.

125.    En utilisant intentionnellement la notion de «réutilisation» («Weiterverwendung») et non celle de «ré-exploitation» («Weiterverwertung»), le législateur communautaire a voulu indiquer clairement que la protection devait aussi concerner les actes relevant d’une utilisation non commerciale.

126.    Les moyens de réutilisation énumérés dans la définition juridique, comme la «distribution de copies», la «location» et la «transmission en ligne», doivent être compris comme n’étant qu’une énumération non exhaustive, ainsi que le montre l’adjonction de l’expression «sous d’autres formes».

127.    Dans le doute, la notion de «mise à disposition» doit recevoir une interprétation large  (56) , ce que laisse entendre l’ajout de «toute forme» à l’article 7, paragraphe 2, sous b). De simples idées  (57) ou la recherche d’informations en elle‑même fondée sur une base de données  (58) ne sont en revanche pas visées.

128.    Certaines parties ont soutenu que les données sont connues dans le public. Le point de savoir si tel est le cas dans des circonstances concrètes relève du juge national.

129.    Quoi qu’il en soit, même si le juge national conclut qu’il est en présence de données connues dans le public, cela n’exclut pas que les parties de la base de données qui contiennent des données connues publiquement jouissent néanmoins de la protection.

130.    L’article 7, paragraphe 2, sous b), de la directive comporte en effet aussi une règle concernant l’épuisement du droit. Cet épuisement ne se produit que dans certaines conditions. L’une de ces conditions réside dans la «première vente d’une copie». On peut en déduire que le droit ne peut s’épuiser que dans le cadre de telles circonstances matérielles. En cas de réutilisation d’une façon autre que par la copie, il n’y a pas épuisement. Le quarante‑troisième considérant le précise aussi expressément en ce qui concerne la transmission en ligne. La protection sui generis ne s’applique donc pas seulement à la première «mise à disposition du public».

131.    Dans la mesure où la directive n’évoque pas le nombre d’opérations réalisées après la première «mise à disposition du public», ce nombre ne peut jouer aucun rôle. Ainsi, si l’opération porte sur une partie substantielle du contenu d’une base de données, elle bénéficie aussi de la protection si elle est obtenue à partir d’une source autonome, comme un média imprimé ou Internet, et non à partir de la base de données elle-même. Contrairement à l’extraction, la réutilisation vise notamment aussi les moyens indirects d’obtenir le contenu d’une base de données. La notion de «transmission» doit donc être interprétée de façon large  (59) .

132.    C’est au juge national qu’il appartiendra d’appliquer les critères évoqués au cas d’espèce concret de la procédure au principal.

3.        Les interdictions relatives à des parties non substantielles du contenu d’une base de données (cinquième question préjudicielle)

133.    Comme nous l’avons déjà indiqué, l’article 7, paragraphe 5, de la directive interdit l’extraction et/ou la réutilisation de parties non substantielles du contenu d’une base de données. Cette disposition se distingue ainsi en premier lieu de l’article 7, paragraphe 1, en ce qu’elle n’interdit pas toute extraction et/ou réutilisation, mais uniquement les actes qualifiés. Ils doivent être «répétés et systématiques». En deuxième lieu, l’interdiction visée au paragraphe 5 se distingue de celle du paragraphe 1 de par son objet. Elle concerne même les parties non substantielles. Le paragraphe 5 prévoit, à titre de compensation de cette exigence moins stricte par rapport à celle visée au paragraphe 1, que les actes interdits doivent avoir certaines conséquences. Il comporte dans ce cadre une alternative: ou les actes interdits sont contraires à une exploitation normale de la base de données ou ils causent un préjudice injustifié aux intérêts du fabricant de la base.

134.    S’agissant du rapport entre acte et conséquence, il faut comprendre cette disposition en ce sens qu’il n’est pas nécessaire que chaque acte pris séparément ait l’une des deux conséquences, mais que le résultat global des actes ait l’une des deux conséquences prohibées  (60) . Au même titre que le paragraphe 1, le but du paragraphe 5 de l’article 7 est de protéger l’intérêt que représente l’amortissement.

135.    L’interprétation de l’article 7 soulève cependant un problème général en ce sens que, contrairement à la position commune, la version allemande du texte définitif de la directive a été formulée de façon un peu atténuée. Il suffit ainsi que l’acte «débouche» («hinausläuft») sur l’une des conséquences visées et non plus qu’il «ait» («gleichkommt») l’une de ces conséquences. Les autres versions linguistiques sont formulées de façon plus directe et indiquent en substance que l’extraction et/ou la réutilisation doivent être contraires à une exploitation normale ou causer un préjudice injustifié aux intérêts, ou bien évoquent des actes contraires ou dommageables.

136.    Il faut se pencher, à ce propos, sur les dispositions voisines existant en droit international. Les deux conséquences visées à l’article 7, paragraphe 5, de la directive s’inspirent de l’article 9, paragraphe 2, de la version révisée de la convention de Berne pour la protection des œuvres littéraires et artistiques, plus particulièrement des deux premiers éléments de la triple condition qui y est prévue. Cela ne signifie cependant pas que les deux dispositions doivent être interprétées de la même façon.

137.    En premier lieu, l’article 9 de la version révisée de la convention de Berne poursuit un autre objectif. Cette disposition permet ainsi aux parties contractantes de déroger aux règles strictes de protection, sous réserve que soient respectées les prescriptions de la triple condition. La directive comporte une construction de ce type, c’est-à-dire des possibilités de dérogation pour les États membres, dans son article 9, par exemple.

138.    En deuxième lieu, l’article 9 de la version révisée de la convention de Berne diffère en ce sens qu’il ne prévoit pas l’«atteinte à l’exploitation normale» et le «préjudice injustifié» comme des alternatives, mais comme deux des trois conditions exigées de façon cumulative  (61) .

139.    On retrouve d’autres règles de droit international comparables à l’article 7, paragraphe 5, de la directive dans l’article 13 de l’accord ADPIC et dans certains accords de l’OMPI. Ces dernières dispositions n’ayant été adoptées qu’après la directive, il n’y a pas lieu d’en tenir compte.

140.    Les mêmes réserves s’appliquent à l’interprétation de l’article 13 de l’accord ADPIC qu’à la version révisée de la convention de Berne. En effet, tout comme l’article 9 de la version révisée de la convention de Berne, l’article 13 de l’accord ADPIC permet aux États membres de prévoir des limitations et dérogations aux droits exclusifs. À la différence de l’article 9 de la version révisée de la convention de Berne, cette disposition conçoit cependant les deux conséquences, à savoir l’«atteinte à l’exploitation normale» et le «préjudice injustifié», comme alternatives, à l’instar de la directive.

141.    Ces considérations montrent que l’interprétation des dispositions de droit international précitées ne peut pas être transposée à l’article 7, paragraphe 5, de la directive.

142.    Les actes d’extraction et de réutilisation interdits par la directive ainsi que les conséquences de ces actes qui y sont visées ont ceci en commun que le but poursuivi par ces actes est dépourvu de pertinence. L’article 7, paragraphe 5, de la directive ne peut pas être interprété de la sorte, en l’absence de règles portant sur le but poursuivi. Si le législateur communautaire avait voulu tenir compte du but, il aurait pu adopter pour l’article 7 de la directive une formulation semblable, par exemple, à celle de l’article 9, sous b).

a)
«L’extraction et/ou la réutilisation répétées et systématiques»

143.    La condition imposant que les actes soient «répétés et systématiques» devrait empêcher que la protection ne soit privée de substance par des actes successifs ne concernant chacun qu’une partie non substantielle  (62) .

144.    On ne sait cependant pas si l’article 7, paragraphe 5, de la directive prévoit là deux conditions alternatives ou cumulatives. L’interprétation doit d’abord se référer au libellé de la disposition. Cette façon de procéder ne permet cependant pas d’aboutir à un résultat univoque. Ainsi, certaines versions linguistiques relient les deux conditions par un «et»  (63) , d’autres, en revanche, par un «ou»  (64) . La majorité des versions linguistiques et l’objectif poursuivi par la directive indiquent toutefois que les deux conditions doivent être comprises comme étant cumulatives  (65) . Une extraction répétée mais non systématique d’une partie non substantielle du contenu d’une base de données n’est donc pas visée.

145.    Il y a actes répétés et systématiques lorsqu’ils se produisent à intervalles réguliers, par exemple toutes les semaines ou tous les mois. Plus la durée est faible et plus la partie concernée à chaque fois est réduite, plus l’acte devra être effectué souvent afin que la partie concernée de façon globale remplisse l’une des deux conditions visées à l’article 7, paragraphe 1, de la directive.

b)        La notion d’«exploitation normale» au sens de l’article 7, paragraphe 5, de la directive

146.    La notion d’«exploitation normale» au sens de l’article 7, paragraphe 5, de la directive doit être interprétée à la lumière de la finalité protectrice de cette disposition. C’est ce qui ressort en particulier du préambule de la directive. Le quarante‑deuxième considérant précise que l’interdiction de certains actes est fondée sur le souci d’éviter de porter préjudice à l’investissement. Le but de la protection instituée par la directive est évoqué explicitement au quarante‑huitième considérant comme étant celui de «garantir la rémunération du fabricant».

147.    Il est donc indiqué de donner à la notion d’«exploitation normale» une interprétation extensive. Ainsi, l’expression «contraires à une exploitation» ne doit pas uniquement être comprise d’un point de vue technique en ce sens que seules les conséquences quant aux possibilités techniques d’exploiter la base de données en cause sont prises en compte. Au contraire, l’article 7, paragraphe 5, vise aussi les conséquences purement économiques à l’égard du fabricant de la base de données. Il s’agit de protéger l’exploitation économique faite dans une situation normale  (66) .

148.    L’article 7, paragraphe 5, de la directive ne s’applique donc pas seulement aux actes conduisant à l’élaboration d’un produit concurrent qui va à l’encontre de l’exploitation de la base de données par le fabricant  (67) .

149.    Dans certains cas, l’article 7, paragraphe 5, peut donc aussi concerner des marchés potentiels, c’est-à-dire des marchés qui ne sont pas encore exploités par le fabricant de la base de données. Il suffit par exemple en ce sens que la personne procédant à l’extraction ou à la réutilisation fasse l’économie du paiement de la redevance d’exploitation de la licence aux fabricants de la base de données. Permettre de tels actes inciterait en effet aussi d’autres personnes à extraire ou à réutiliser le contenu de la base de données sans payer les redevances d’exploitation  (68) . S’il était ainsi possible d’exploiter gratuitement la base de données, cela aurait des répercussions importantes sur la valeur des licences. Il en résulterait une baisse des recettes.

150.    Cette règle ne se limite pas non plus au cas dans lequel le fabricant de la base de données souhaite exploiter son contenu de la même façon que la personne procédant à l’extraction ou à la réutilisation. Le fait que le fabricant de la base de données ne puisse pas utiliser son contenu de la même façon que la personne procédant à l’extraction ou à la réutilisation en raison d’une interdiction légale est lui aussi sans incidence.

151.    En fin de compte, l’expression «contraires à une exploitation» ne doit pas être interprétée d’une façon à ce point stricte que seul un obstacle absolu à l’exploitation serait interdit. Comme le montre le libellé de toutes les versions linguistiques autres que la version allemande, l’interdiction s’applique dès le stade du conflit avec l’exploitation, c’est-à-dire même en cas de conséquences néfastes de faible ampleur. C’est aussi à ce niveau que se situe le seuil à partir duquel on peut considérer qu’il est interdit de causer un préjudice au fabricant de la base de données.

152.    Comme plusieurs parties l’ont souligné, il appartiendra au juge national d’apprécier les actes concrets et leurs conséquences sur l’exploitation de la base de données en cause en l’espèce, en faisant application des critères précités.

c)        La notion de «préjudice injustifié» au sens de l’article 7, paragraphe 5, de la directive

153.    S’agissant de l’interprétation de la notion de «préjudice injustifié» au sens de l’article 7, paragraphe 5, de la directive, il faut tout d’abord rappeler que, dans le cadre de la révision de la convention de Berne déjà, la question de savoir si une notion juridique aussi vague peut être appliquée a fait l’objet de discussions. De plus, pour interpréter la notion de «préjudice injustifié», il est impératif de souligner les différences par rapport à une «exploitation normale».

154.    La disposition litigieuse assortit la branche de l’alternative que constitue le «préjudice injustifié» de conditions moins strictes que celle constituée par l’«exploitation normale» en ce qui concerne la portée du droit, en ce sens que, dans le premier cas, ce sont les «intérêts légitimes» qui sont protégés. La protection va donc au-delà des situations juridiques et inclut également les intérêts, puisque les intérêts «légitimes», et non pas seulement juridiques, sont pris en compte.

155.   À titre de compensation, l’article 7, paragraphe 5, fixe des conditions plus strictes dans le cas de cette branche de l’alternative quant aux conséquences des actes interdits. Le préjudice exigé n’est pas n’importe quel type de préjudice: il doit s’agir d’un «préjudice injustifié». Cette qualification d’«injustifié» ne peut cependant pas être interprétée de façon trop sévère parce que, dans le cas contraire, le législateur communautaire se serait aussi référé dans ce passage à un préjudice pour le fabricant, voire à un préjudice considérable pour le fabricant.

156.   À la lumière des versions linguistiques autres que la version allemande, il faut interpréter cela en ce sens que les actes doivent porter préjudice aux intérêts du fabricant dans une certaine mesure. Comme elle le fait aussi dans d’autres passages, la directive renvoie dans ce contexte au préjudice du fabricant. La procédure au principal ne montre que trop clairement que les droits qu’elle protège affectent les intérêts économiques d’autres opérateurs. Cela ne signifie toutefois pas qu’une influence déterminante puisse être attribuée, lors de l’interprétation de l’article 7, paragraphe 5, de la directive, aux conséquences du droit sui generis sur les intérêts d’autres personnes ou à un «préjudice» éventuel pour l’État membre concerné en raison de répercussions possibles sur ses recettes fiscales. Ce que doit empêcher la directive, ce sont les préjudices causés aux fabricants de bases de données. À la différence d’autres conséquences, cet objectif se retrouve aussi explicitement dans la directive.

157.    Les investissements du fabricant et leur amortissement sont au cœur des intérêts visés à l’article 7, paragraphe 5, de la directive. Ainsi, la valeur économique du contenu de la base de données sert ici aussi de point de départ de l’appréciation qui doit être portée. Les conséquences pour les recettes effectives ou attendues du fabricant de la base de données occupent une position centrale  (69) .

158.    La portée de la protection peut être analysée en partant de la branche de l’alternative relative à l’«exploitation normale». Si cette branche est interprétée strictement en ce sens qu’elle n’inclut pas aussi la protection de marchés potentiels, par exemple un nouveau type d’exploitation pour le contenu d’une base de données  (70) , il faudra néanmoins qualifier l’empiètement sur des marchés potentiels comme constituant tout au moins un préjudice porté aux intérêts légitimes du fabricant. Les circonstances du cas d’espèce permettront de déterminer si ce préjudice est injustifié. Que la personne procédant à l’extraction ou à la réutilisation soit un concurrent du fabricant de la base de données ne saurait cependant être déterminant en la matière.

159.    Il faut aussi rappeler, dans ce contexte, qu’il appartiendra au juge national d’analyser les actes concrets et de déterminer s’ils doivent être considérés comme un «préjudice injustifié» causé aux intérêts du fabricant de la base de données en cause.

D –   Modification du contenu d’une base de données et durée de la protection (deuxième partie de la troisième question préjudicielle)

160.    La présente procédure porte sur la question de savoir si toute «modification substantielle» du contenu de la base de données, qui donne naissance à une durée de protection propre pour la base de données qui en résulte, a pour conséquence que cette base de données doit être considérée comme une base de données nouvelle et distincte pour les besoins de l’article 7, paragraphe 5.

161.    En vertu de l’article 10, paragraphe 3, de la directive, les modifications apportées à une base de données justifient – dans certaines circonstances – de lui attribuer une durée de protection propre. Nous devons ci-après nous pencher sur l’une des conditions, à savoir celle de la «modification substantielle du contenu d’une base de données» et des conséquences qui en résultent. Dans la présente procédure, il convient d’examiner la problématique à propos de l’«extraction et/ou la réutilisation répétées et systématiques» au sens de l’article 7, paragraphe 5, de la directive.

162.    Cette question préjudicielle concerne en substance l’objet de la protection prolongée. Il faut déterminer à cet égard si des modifications substantielles donnent naissance à une autre base de données. Si l’on en conclut que, à côté de l’ancienne base de données qui continue d’exister, une nouvelle base de données est constituée, la question de savoir à laquelle d’entre elles se rapportent les actes interdits est décisive.

163.    Au regard de divers arguments qui ont été avancés, il convient aussi de déterminer si l’article 10, paragraphe 3, de la directive doit être interprété en ce sens qu’il régit uniquement la durée de la protection et non son objet.

164.    On peut déduire du libellé de l’article 10, paragraphe 3, de la directive, d’après lequel, dans certaines circonstances, toute modification substantielle «permet d’attribuer à la base qui résulte de cet investissement une durée de protection propre», que le législateur communautaire est parti de l’idée qu’une telle modification débouche sur une base de données propre. Cette conclusion est confirmée par les autres versions linguistiques.

165.    On ne peut pas non plus y opposer l’interprétation systématique. Ainsi, l’article 10 est certes intitulé «Durée de la protection», mais cela ne signifie pas que cet article porte uniquement sur la durée et ne régit pas aussi l’objet sur lequel elle porte.

166.    Enfin, la thèse défendue par la Communauté dans le cadre de l’OMPI  (71) accrédite, dans certaines circonstances, l’existence d’une nouvelle base de données en cas de modification substantielle.

167.    Il ne fait aucun doute que le nouveau début de la période de protection visée à l’article 10, paragraphe 3, ne peut se rapporter qu’à un objet déterminé. La genèse de cette disposition révèle que le résultat obtenu des nouveaux investissements doit être protégé  (72) . La limitation de l’objet de la protection au nouveau résultat correspond aussi à l’objectif de la fixation d’une nouvelle durée de protection  (73) .

168.    Il convient de rappeler à ce stade que la base de données en cause en l’espèce est ce que l’on qualifie de base de données dynamique, c’est-à-dire une base de données qui est adaptée constamment. Dans ce cadre, il y a lieu de tenir compte du fait que les suppressions et les ajouts, mais aussi, d’après le cinquante‑cinquième considérant, les vérifications doivent être considérés comme des modifications au sens de l’article 10, paragraphe 3, de la directive.

169.    L’aspect typique des bases de données dynamiques est qu’il n’existe toujours qu’une base de données, à savoir celle qui, à chaque fois, est la plus actuelle. Les versions initiales «disparaissent». Il faut toutefois déterminer dans ce cas à quoi se rapporte la nouvelle durée de protection, c’est-à-dire l’objet qui est protégé, précisément la nouveauté.

170.    Il faut partir pour ce faire de l’objectif poursuivi par les modifications, à savoir l’actualisation de la base de données. Cela signifie que l’ensemble de la base de données est l’objet du nouvel investissement. C’est ainsi que chaque nouvelle version, c’est-à-dire l’ensemble de la base de données, devient l’objet bénéficiant de la protection  (74) .

171.    Le parcours législatif de la directive plaide aussi en faveur de cette interprétation. Ainsi, l’article 9 de la proposition initiale  (75) prévoyait certes encore une prolongation de la durée de la protection de la base de données, mais la Commission avait précisément évoqué dans la motivation de cette proposition le cas d’une nouvelle «édition» de la base de données  (76) . Une précision correspondante a alors justement été apportée dans une proposition modifiée pour les bases de données actualisées constamment  (77) . La définition juridique de l’article 12, paragraphe 2, sous b), a réglementé le cas de l’accumulation de petites modifications successives, phénomène typique des bases de données dynamiques.

172.    Considéré de la sorte, l’article 10, paragraphe 3, de la directive prévoit ainsi un droit sui generis «rolling» (ou roulant).

173.    En fin de compte, la solution que nous proposons pour les bases de données dynamiques est aussi conforme au principe en vertu duquel seul le résultat est protégé, c’est-à-dire la nouvelle base de données et non plus l’ancienne. La différence par rapport aux bases de données statiques réside simplement dans le fait que, dans le cas des bases de données dynamiques, l’ancienne base de données cesse d’exister parce qu’elle est constamment transformée en une nouvelle base.

174.    Le fait que, dans le cas des bases de données dynamiques, l’ensemble de la base de données et non pas seulement les modifications prises en elles-mêmes bénéficient de la nouvelle durée de protection peut par ailleurs être justifié, indépendamment du but et de l’objet du nouvel investissement que nous avons déjà évoqués, au motif que seule une appréciation uniforme de la base de données en tant que telle est envisageable.

175.    De plus, l’objectif consistant à protéger les investissements et à les promouvoir plaide pour une appréciation uniforme. Ces objectifs ne peuvent être atteints dans le cas des bases de données dynamiques que si les actualisations bénéficient aussi de la protection  (78) . Dans le cas contraire, les investissements consentis dans des bases de données dynamiques seraient défavorisés.

176.    Il appartient toujours au juge national d’apprécier les modifications concrètes apportées à la base de données en cause dans la procédure au principal. Il doit tenir compte dans ce contexte du fait que même des modifications non substantielles doivent être qualifiées de modifications substantielles à partir d’une certaine accumulation. Comme le révèle le cinquante‑quatrième considérant de la directive, c’est au fabricant de la nouvelle base de données qu’il incombe de prouver que les conditions fixées par l’article 10, paragraphe 3, sont remplies.

177.    Le juge national doit aussi déterminer le moment à partir duquel le seuil du caractère substantiel est dépassé. Il doit à ce propos vérifier si le nouvel investissement est substantiel. Il faut s’inspirer des conditions visées à l’article 7 de la directive pour apprécier le caractère substantiel. Il faut donc aussi tenir compte des conditions correspondantes relatives à l’investissement. Cette règle s’applique indépendamment de la circonstance que l’article 10, paragraphe 3, de la directive parle explicitement de «nouvel investissement», alors que l’article 7 concerne le premier investissement  (79) .

VII – Conclusion

178.    Nous suggérons à la Cour de justice de répondre ainsi aux questions préjudicielles:

«1)
La notion de ‘base de données’ au sens de l’article 1er de la directive 96/9/CE du Parlement européen et du Conseil, du 11 mars 1996, concernant la protection juridique des bases de données, doit se comprendre comme pouvant inclure les tableaux des championnats de football.

2)
L’article 7, paragraphe 1, de la directive doit se comprendre comme signifiant qu’une base de données qui comporte les tableaux de championnats de football peut être protégée, si un investissement substantiel du point de vue quantitatif ou qualitatif est nécessaire pour obtenir, vérifier ou présenter son contenu. Le fabricant d’une telle base de données se voit reconnaître le droit de faire interdire l’extraction et/ou la réutilisation de l’ensemble ou d’une partie substantielle, d’un point de vue quantitatif ou qualitatif, du contenu de cette base de données.

3)
L’article 7, paragraphe 5, de la directive interdit l’extraction et/ou la réutilisation systématiques et répétées de parties non substantielles du contenu d’une base de données, lorsque cela constitue des actes contraires à une exploitation normale de la base de données ou portant un préjudice injustifié aux intérêts légitimes du fabricant de la base de données. L’article 7, lu en corrélation avec l’article 10, paragraphe 3, de la directive, doit se comprendre comme signifiant que l’extraction et/ou la réutilisation sont interdites y compris à l’égard d’une base de données dont le contenu, de façon qualitative ou quantitative, a fait l’objet de modifications substantielles et est par conséquent le fruit d’un nouvel investissement substantiel, d’un point de vue qualitatif ou quantitatif.»


1
Langue originale: l'allemand.


2
Il s’agit des procédures dans les affaires C‑46/02, C‑203/02 et C‑338/02, elles aussi pendantes devant la Cour, dans lesquelles nous présentons nos conclusions également aujourd'hui.


3
JO L 77, p. 20.


4
Arrêts du 22 janvier 2002, Canal Satélite Digital (C‑390/99, Rec. p. I‑607, point 18); du 13 mars 2001, PreussenElektra (C‑379/98, Rec. p. I‑2099, point 38), et du 22 mai 2003, Korhonen e.a. (C‑18/01, Rec. p. I‑5321, point 19).


5
Arrêts du 8 mai 2003, Agrargenossenschaft Alkersleben (C‑268/01, Rec. p. I‑4353, point 46), et PreussenElektra, précité à la note 4, point 39.


6
Arrêts du 11 septembre 2003, Altair Chimica (C‑207/01, Rec. p. I‑8875, point 24), et du 21 septembre 1999, Brentjens' (C‑115/97 à C‑117/97, Rec. p. I‑6025, point 38).


7
Arrêt Altair Chimica, précité à la note 6, point 25, ainsi que ordonnances du 30 avril 1998, Testa et Modesti (C‑128/97 et C‑137/97, Rec. p. I‑2181, point 6), et du 11 mai 1999, Anssens (C‑325/98, Rec. p. I‑2969, point 8).


8
Ordonnance du 28 juin 2000, Laguillaumie (C‑116/00, Rec. p. I‑4979, point 16), et arrêt du 21 janvier 2003, Bacardi-Martini et Cellier des Dauphins (C‑318/00, Rec. p. I‑905, point 44).


9
Arrêts du 19 novembre 2002, Strawson et Gagg & Sons (C‑304/00, Rec. p. I‑10737, points 57 et 58), et du 16 janvier 2003, Cipra et Kvasnicka (C‑439/01, Rec. p. I‑745, point 22).


10
Arrêts du 15 novembre 1979, Denkavit Futtermittel (36/79, Rec. p. 3439, point 12); du 5 octobre 1999, Lirussi et Bizzaro (C‑175/98 et C‑177/98, Rec. p. I‑6881, point 37); du 22 juin 2000, Fornasar e.a. (C‑318/98, Rec. p. I‑4785, point 31), et du 16 octobre 2003, Traunfellner (C‑421/01, Rec. p. I‑11941, points 21 et suiv.).


11
Arrêt du 4 décembre 2003, EVN et Wienstrom (C‑448/01, non encore publié au Recueil, point 59).


12
JO 1994, L 336, p. 214.


13
Gaster, J.-L., Der Rechtsschutz von Datenbanken, 1999, paragraphes 58 et suiv.


14
Krähn, J., Der Rechtsschutz von elektronischen Datenbanken, unter besonderer Berücksichtigung des sui-generis-Rechts, 2001, p. 7.


15
Leistner, M., «The Legal Protection of Telephone Directories Relating to the New Database Maker's Right», International Review of Industrial Property and Copyright Law 2000, p. 950 (956).


16
Chalton, S., «The Copyright and Rights in Databases Regulations 1997: Some Outstanding Issues on Implementation of the Database Directive», EIPR 1998, p.  178 (179).


17
Leistner, M., Der Rechtsschutz von Datenbanken im deutschen und europäischen Recht, 2000, p. 53 et suiv.


18
Von Lewinski, S., dans: Walter, M. M., (Éd.), Europäisches Urheberrecht, 2001, paragraphe 20 relatif à l'article 1er de la directive.


19
Speyart, H. M. M., «De databank-richtlijn en haar gevolgen voor Nederland», Informatierecht –AMI 1996, p. 151 (155).


20
Von Lewinski, précitée à la note 18, paragraphe 6 relatif à l'article 1er.


21
Von Lewinski, précitée à la note 18, paragraphe 6 relatif à l'article 1er.


22
  Grützmacher, M., Urheber-, Leistungs- und Sui-generis-Schutz von Datenbanken, 1999, p. 329; Koumantos, G., «Les bases de données dans la directive communautaire», Revue internationale du droit d’auteur 1997, p. 79 (117). Certains auteurs considèrent en revanche que la protection porte sur les investissements (voir, par exemple, Von Lewinski, précitée à la note 18, paragraphe 3 relatif à l'article 7, et la doctrine citée par Grützmacher p. 329, note 14).


23
Position commune (CE) nº 20/95, arrêtée par le Conseil le 10 juillet 1995 (JO C 288, p. 14).


24
Von Lewinski, précitée à la note 18, paragraphe 9 relatif à l'article 7.


25
Koumantos, précité à la note 22, p. 119.


26
Von Lewinski, précitée à la note 18, paragraphe 11 relatif à l'article 7.


27
Krähn, précité à la note 14, p. 138 et suiv., et Leistner, précité à la note 15, p. 958.


28
Karnell, G. W. G., «The European Sui Generis Protection of Data Bases», Journal of the Copyright Society of the USA, 2002, p. 994.


29
Van Manen, J., «Substantial investments», dans Allied and in friendship: for Teartse Schaper, 2002, p. 123 (125).


30
Voir à ce propos Hugenholtz, P. B., «De spin-off theorie uitgesponnen», Tijdschrift voor auteurs-, media- & informatierecht 2002, p. 161 et suiv.


31
Guglielmetti, G., «La tutela delle banche dati con diritto sui generis nella direttiva 96/9/CE», Contratto e impresa. Europa, 1997, p. 177 (184).


32
Calame, A. E., Der rechtliche Schutz von Datenbanken unter besonderer Berücksichtigung des Rechts der Europäischen Gemeinschaften, 2002, p. 115, note 554.


33
Grützmacher, précité à la note 22, p. 330 et suiv., et Leistner, précité à la note 17, p. 152.


34
Leistner, précité à la note 17, p. 152.


35
Guglielmetti, précité à la note 31, p. 184, et Karnell, précité à la note 28, p. 993.


36
Voir, pour les thèses défendues, Hugenholtz, précité à la note 30, p. 161 (164, note 19).


37
Von Lewinski, précitée à la note 18, paragraphe 5 relatif à l’article 7.


38
Calame, précité à la note 32, p. 116.


39
Position commune nº 20/95, point 14 de l’exposé des motifs.


40
Gaster, précité à la note 13, paragraphe 492.


41
Hornung, O., Die EU-Datenbank-Richtlinie und ihre Umsetzung in das deutsche Recht, 1998, p. 116 et suiv.; Leistner, précité à la note 17, p. 180, et Von Lewinski, précitée à la note 18, paragraphe 16 relatif à l’article 7.


42
Position commune nº 20/95, point 14.


43
Voir, notamment, Von Lewinski, précitée à la note 18, paragraphe 15 relatif à l’article 7.


44
Grützmacher, précité à la note 22, p. 340.


45
Gaster, précité à la note 13, paragraphe 495; Grützmacher, précité à la note 22, p. 340, et Von Lewinski, précitée à la note 18, paragraphe 15 relatif à l’article 7.


46
Krähn, précité à la note 14, p. 162.


47
Voir Guglielmetti, précité à la note 31, p. 186; Krähn, précité à la note 14, p. 161, et Leistner, précité à la note 17, p. 172.


48
Selon un point de vue, l’appropriation abstraite suffirait à constituer le dommage: voir Leistner, précité à la note 17, p. 173; comparer avec Speyart, précité à la note 19, p. 171 (174).


49
Doutrelepont, C., «Le nouveau droit exclusif du producteur de bases de données consacré par la directive européenne 96/6/CE du 11 mars 1996: un droit sur l’information?», dans Mélanges en hommage à Michel Waelbroeck, 1999, p. 903 (913).


50
Doutrelepont, précitée à la note 49, p. 913; Gaster, précité à la note 13, paragraphe 496; Leistner, précité à la note 17, p. 171, et Von Lewinski, précitée à la note 18, paragraphe 15 relatif à l’article 7.


51
Voir, cependant, en sens inverse Karnell, précité à la note 28, p. 1000, et Krähn, précité à la note 14, p. 163.


52
Voir, par exemple, les quarante et unième, quarante‑deuxième, quarante‑cinquième et quarante‑sixième considérants.


53
Voir Koumantos, précité à la note 22, p. 121.


54
Von Lewinski, précitée à la note 18, paragraphe 19 relatif à l’article 7.


55
Gaster, précité à la note 13, paragraphe 512.


56
Von Lewinski, précitée à la note 18, paragraphe 27 relatif à l’article 7.


57
Ibidem, paragraphe 31 relatif à l’article 7.


58
Grützmacher, précité à la note 22, p. 336.


59
Von Lewinski, précitée à la note 18, paragraphe 38 relatif à l’article 7.


60
Leistner, précité à la note 17, p. 181, et Von Lewinski, précitée à la note 18, paragraphe 18 relatif à l’article 7, note 225.


61
Ricketson, S., The Berne Convention for the Protection of Literary and Artistic Works: 1886-1986, 1987, p. 482.


62
Gaster, précité à la note 13, paragraphe 558.


63
La plupart des versions des langues latines, ainsi que les versions allemande, anglaise et grecque.


64
Les versions espagnole, suédoise et finnoise.


65
Leistner, précité à la note 17, p. 181, et Von Lewinski, précitée à la note 18, paragraphe 17 relatif à l’article 7.


66
Cette thèse est aussi conforme à l’interprétation de l’article 13 de l’accord ADPIC par un panel de l’Organisation mondiale du commerce (WT/DS160/R du 27 juillet 2000, 6.183).


67
Leistner, précité à la note 17, p. 181.


68
Voir WT/DS160/R du 27 juillet 2000, 6.186.


69
Voir WT/DS160/R du 27 juillet 2000, 6.229.


70
Leistner, précité à la note 17, p. 182.


71
Standing Committee on Copyright and Related Rights (19 mai 1998), SCCR/1/INF/2.


72
Position commune nº 20/95, nº 14.


73
Von Lewinski, précitée à la note 18, paragraphe 5 relatif à l’article 10.


74
Chalton, S., «The Effect of the EC Database Directive on United Kingdom Copyright Law in Relation to Databases: A Comparison of Features», EIPR 1997, p. 278 (284); Hornung, précité à la note 41, p. 173 et suiv.; Leistner, précité à la note 17, p. 209; comparer avec Beutler, S., «The Protection of multimedia products under international law», UFITA 1997, p. 5 (24); Guglielmetti, précité à la note 31, p. 192, et Speyart, précité à la note 19, p. 171 (173).


75
COM (92) 24 final (JO 1992, C 156, p. 4).


76
Exposé des motifs de la proposition COM (92) 24.


77
COM (93) 464 final (JO 1993, C 308, p. 1).


78
Grützmacher, précité à la note 22, p. 390 et suiv.


79
Voir, à ce propos, en détail Leistner, précité à la note 17, p. 207 et suiv.

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