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Document 62000CC0333

    Conclusions de l'avocat général Jacobs présentées le 7 mars 2002.
    Eila Päivikki Maaheimo.
    Demande de décision préjudicielle: Tarkastuslautakunta - Finlande.
    Règlement (CEE) nº 1408/71 - 'Prestations familiales' - Allocation de garde d'enfant à domicile - Condition de résidence de l'enfant.
    Affaire C-333/00.

    Recueil de jurisprudence 2002 I-10087

    ECLI identifier: ECLI:EU:C:2002:151

    62000C0333

    Conclusions de l'avocat général Jacobs présentées le 7 mars 2002. - Eila Päivikki Maaheimo. - Demande de décision préjudicielle: Tarkastuslautakunta - Finlande. - Règlement (CEE) nº 1408/71 - 'Prestations familiales' - Allocation de garde d'enfant à domicile - Condition de résidence de l'enfant. - Affaire C-333/00.

    Recueil de jurisprudence 2002 page I-10087


    Conclusions de l'avocat général


    1. Dans la présente espèce, le tarkastuslautakunta (commission de révision) (Finlande) pose des questions concernant, notamment, les articles 4, paragraphe 1, sous h), et 73 du règlement (CEE) nº 1408/71 .

    2. Le problème essentiel porte sur la question de savoir si l'allocation de garde d'enfants à domicile («lasten kotihoidon tuki»), que les parents peuvent, conformément aux dispositions de la loi nationale, réclamer lorsqu'ils décident de ne pas bénéficier d'une place garantie dans une crèche publique, doit être considérée comme une prestation familiale au sens du règlement.

    Les dispositions légales pertinentes

    Dispositions communautaires

    3. Le champ d'application matériel du règlement nº 1408/71 est défini à l'article 4. Aux termes de l'article 4, paragraphe 1, sous h), le règlement s'applique à «toutes les législations relatives aux [...] prestations familiales». L'article 4, paragraphe 4, prévoit que le règlement ne s'applique pas à «l'assistance sociale et médicale».

    4. Selon la définition figurant à l'article 1er, sous u), i):

    «le terme prestations familiales désigne toutes les prestations en nature ou en espèces destinées à compenser les charges de famille dans le cadre d'une législation prévue à l'article 4, paragraphe 1, point h), à l'exclusion des allocations spéciales de naissance ou d'adoption mentionnées à l'annexe II;»

    5. L'article 14, paragraphe 1, sous a), stipule que:

    «la personne qui exerce une activité salariée sur le territoire d'un État membre au service d'une entreprise dont elle relève normalement et qui est détachée par cette entreprise sur le territoire d'un autre État membre afin d'y effectuer un travail pour le compte de celle-ci, demeure soumise à la législation du premier État membre, à condition que la durée prévisible de ce travail n'excède pas douze mois et qu'elle ne soit pas envoyée en remplacement d'une autre personne parvenue au terme de la période de son détachement.»

    6. L'article 73 stipule que:

    «Le travailleur salarié ou non salarié soumis à la législation d'un État membre a droit, pour les membres de sa famille qui résident sur le territoire d'un autre État membre, aux prestations familiales prévues par la législation du premier État, comme s'ils résidaient sur le territoire de celui-ci, sous réserve des dispositions de l'annexe VI.»

    7. Aux termes de l'article 75, paragraphe 1, les prestations familiales doivent être servies, dans les cas visés à l'article 73, par l'institution compétente de l'État à la législation duquel le travailleur salarié ou non salarié est soumis, conformément aux dispositions que cette institution applique, que la personne physique ou morale à laquelle ces prestations doivent être servies réside, séjourne ou ait son siège sur le territoire de l'État compétent ou sur celui d'un autre État membre.

    8. Selon l'article 4, paragraphe 2 bis, le règlement s'applique «aux prestations spéciales à caractère non contributif relevant d'une législation ou d'un régime autres que ceux qui sont visés au paragraphe 1 ou qui sont exclus au titre du paragraphe 4, lorsque ces prestations sont destinées [...] à couvrir, à titre supplétif, complémentaire ou accessoire, les éventualités correspondant aux branches visées au paragraphe 1 points a) à h).»

    9. Cependant, l'article 10 bis, paragraphe 1, stipule, pour ce qui nous concerne en l'espèce, que «les personnes auxquelles le présent règlement est applicable bénéficient des prestations spéciales en espèces à caractère non contributif visées à l'article 4 paragraphe 2 bis exclusivement sur le territoire de l'État membre dans lequel elles résident et au titre de la législation de cet État, pour autant que ces prestations soient mentionnées à l'annexe II bis.»

    Dispositions nationales

    10. Aux termes de la «laki lasten päivähoidosta» (loi nº 36/1973 relative à la garde des enfants pendant la journée), les parents de l'enfant ou l'autre personne ayant la charge de celui-ci ont droit, pour chacun de leurs enfants, à une place en crèche à compter de l'achèvement de la période pendant laquelle peut être versée l'allocation parentale (allocation(s) maternelle et/ou paternelle) jusqu'à ce que l'enfant atteigne l'âge de la scolarisation obligatoire. C'est aux communes qu'il appartient de veiller à ce qu'il y ait suffisamment de places en crèche pour couvrir les besoins de chaque commune . En vertu de l'article 11a, deuxième alinéa, de la loi, tel que modifié, les parents qui n'optent pas pour une place dans une crèche au sens de l'article 11a, premier alinéa, tel que modifié, ont droit à une allocation en vertu de la «laki lasten kotihoidon ja yksityisen hoidon tuesta» (loi nº 1128/1996 relative aux allocations de garde d'enfants à domicile et de garde privée, ci-après «la loi relative aux allocations de garde d'enfants à domicile» ou «la loi») .

    11. Selon l'article 1er, la loi relative aux allocations de garde d'enfants à domicile règle le droit à une aide financière destinée à permettre aux parents d'organiser la garde de leurs enfants d'une manière alternative au placement en crèche proposé par les communes. La loi prévoit le versement de deux types d'allocations: l'allocation de garde d'enfants à domicile («lasten kotihoidon tuki») et l'allocation de garde d'enfants privée («lasten yksityisen hoidon tuki»). La présente espèce a trait à l'allocation de garde d'enfants à domicile.

    12. L'article 2 de la loi définit l'allocation de garde d'enfants à domicile comme une allocation accordée aux parents de l'enfant ou à l'autre personne ayant la charge de celui-ci pour qu'ils organisent la garde de l'enfant pendant la journée, allocation qui comprend une indemnité de garde («hoitoraha») et une allocation complémentaire de garde («hoitolisä») qui est fonction du revenu. L'indemnité de garde est versée pour chaque enfant et varie en fonction de l'âge de celui-ci. L'allocation complémentaire de garde est versée pour un seul enfant par famille. L'allocation complémentaire est versée dans son intégralité lorsque le revenu de la famille - corrigé en fonction du nombre total d'enfants de celle-ci - est en dessous du seuil fixé à l'article 5 de la loi relative aux allocations de garde d'enfants à domicile. Lorsque le revenu de la famille dépasse ce seuil, le montant de l'allocation complémentaire de garde est réduit en conséquence.

    13. L'article 20 de la loi autorise, par ailleurs, les communes à accorder un montant supplémentaire («kunnallinen lisä») outre l'indemnité et l'allocation complémentaire de garde.

    14. Aux termes de l'article 3, premier alinéa, de la loi, applicable à l'allocation de garde d'enfants à domicile et à l'allocation de garde d'enfants privée, «[l]'allocation prévue par la présente loi est versée pour autant que les parents ou toute personne ayant la charge de l'enfant ne choisissent pas de le placer dans un service de garde visé à l'article 11a, premier alinéa, de la laki lasten päivähoidosta [loi relative à la garde des enfants pendant la journée] et que l'enfant réside effectivement en Finlande».

    15. Pour pouvoir bénéficier de l'allocation, il n'est cependant pas nécessaire que l'enfant soit gardé par les parents ni qu'il soit gardé à son domicile. L'allocation peut donc être versée lorsque, par exemple, l'enfant est placé dans une crèche privée ou lorsqu'il est gardé à la maison par une personne autre que les parents. L'allocation est généralement versée au parent ou à toute autre personne ayant la charge de l'enfant et qui s'en occupe.

    16. L'allocation de garde d'enfants à domicile est, conformément à l'article 8 de la loi, versée par la Kansaneläkelaitos (institution d'assurances sociales). Les frais occasionnés à l'institution d'assurances sociales sont, conformément à l'article 9, remboursés par les communes.

    Les faits et les questions déférées à la Cour

    17. Les faits, tels qu'exposés dans l'ordonnance de renvoi, peuvent être résumés comme suit.

    18. Mme Päivikki Maaheimo, demanderesse au principal, est une ressortissante finlandaise. Elle est mariée à un ressortissant finlandais. Ayant obtenu un congé parental, Mme Maaheimo s'est occupée de son enfant à la maison. Elle a reçu, avec effet à compter du 8 janvier 1998, une allocation de garde d'enfants à domicile conformément à la loi relative aux allocations de garde d'enfants à domicile. Son mari, Hannu Maaheimo, a travaillé en Allemagne comme travailleur détaché du 1er mai 1998 au 30 avril 1999. À partir du 10 juillet 1998 et jusqu'au 31 mars 1999, Päivikki Maaheimo est restée en Allemagne avec son enfant et son mari. Pendant cette période, toute la famille est restée soumise à la législation finlandaise en matière de sécurité sociale.

    19. Par décision du 27 août 1998, l'institution d'assurances sociales a cessé de verser l'allocation de garde d'enfants à domicile avec effet à compter du 10 août 1998, au motif que l'enfant de la demanderesse ne vivait plus en Finlande comme l'exige l'article 3, premier alinéa, de la loi relative aux allocations de garde d'enfants à domicile.

    20. La demanderesse a contesté cette décision devant l'Etelä-Suomen Sosiaalivakuutuslautakunta (commission d'assurance maladie du sud de la Finlande), qui a rejeté la réclamation par décision du 1er mars 1999. Le 31 mars 1999, la demanderesse a introduit un recours contre cette décision devant le tarkastuslautakunta, lui demandant d'annuler la décision de la commission d'assurance maladie et d'ordonner à l'institution d'assurances sociales de continuer à verser l'allocation.

    21. Devant le tarkastuslautakunta, elle a fait valoir que la décision mettant fin au versement de l'allocation était contraire au règlement nº 1408/71. Elle a indiqué, pour l'essentiel, que la cessation du versement de l'allocation de garde d'enfants à domicile au motif que la personne assurée en Finlande séjournait temporairement en Allemagne constitue une entrave économique importante à la libre circulation et au libre séjour à l'intérieur de la Communauté européenne et qu'elle est, en tant que telle, contraire à l'esprit du règlement nº 1408/71, et elle a estimé, par ailleurs, que l'allocation de garde d'enfants à domicile doit être considérée comme une prestation familiale au sens de l'article 4 du règlement.

    22. L'institution d'assurances sociales a, en réponse à ces arguments, maintenu que l'allocation de garde d'enfants à domicile (et l'allocation de garde d'enfants privée) doit être considérée comme une prestation sociale extérieure au champ d'application du règlement nº 1408/71, et que l'allocation ne peut donc être versée au titre de la loi relative aux allocations de garde d'enfants à domicile que pour un enfant vivant effectivement en Finlande.

    23. Estimant que l'affaire pendante devant lui soulevait des questions relevant du droit communautaire, le tarkastuslautakunta a sursis à statuer et il a déféré, à titre préjudiciel, les questions suivantes à la Cour:

    «1) L'allocation de garde d'enfants à domicile, octroyée en application de la laki lasten kotihoidon tuesta ja yksityisen hoidon tuesta (loi relative aux allocations de garde d'enfants à domicile et de garde privée, ci-après la loi finlandaise) relève-t-elle du domaine d'application du droit communautaire en tant que prestation familiale au sens de l'article 4, paragraphe 1, sous h), du règlement (CEE) nº 1408/71 du Conseil, du 14 juin 1971, relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté, dans sa version modifiée et mise à jour par le règlement (CEE) nº 2001/83 du Conseil, du 2 juin 1983, tel que modifié par le règlement (CEE) nº 3427/89 du Conseil, du 30 octobre 1989?

    2) Si tel est le cas, les articles 73 et 75 du règlement nº 1408/71, compte tenu de l'article 10 bis du même règlement et du fait que la loi finlandaise n'est pas mentionnée dans l'annexe II bis du règlement, imposent-ils le versement de l'allocation de garde d'enfants à domicile pour un enfant de la famille du travailleur salarié qui est détaché temporairement dans un autre État membre, également dans le cas où la condition de résidence réelle prévue par la législation nationale n'est pas remplie, avec pour résultat qu'il n'est pas possible d'effectuer le choix légalement prévu entre une place en crèche communale et l'allocation de garde d'enfants à domicile ou que ce choix n'a pas été réellement effectué?

    3) Si l'allocation de garde d'enfants à domicile ne relève pas du droit communautaire au titre des dispositions précitées, existe-t-il d'autres règles de ce droit qui en imposent le versement dans un autre État membre dans le cas mentionné sous 2)?»

    24. Le gouvernement finlandais et la Commission ont soumis des observations écrites et orales.

    La première question

    25. Par sa première question, qui concerne le champ d'application matériel du règlement nº 1408/71, la juridiction nationale cherche essentiellement à savoir si l'allocation de garde d'enfants à domicile, telle que prévue par la loi relative aux allocations de garde d'enfants à domicile, doit être considérée comme une prestation familiale au sens de l'article 4, paragraphe 1, point h), du règlement.

    26. La Cour a itérativement jugé que la distinction entre prestations relevant du champ d'application du règlement nº 1408/71 et prestations qui en sont exclues repose essentiellement sur les éléments constitutifs de chaque prestation, notamment ses finalités et ses conditions d'octroi, et non pas sur la question de savoir si une prestation est considérée comme une prestation de sécurité sociale par la législation nationale . À cet égard, il est de jurisprudence constante qu'une prestation ne peut être considérée comme une prestation de sécurité sociale que si, d'une part, elle est octroyée, en dehors de toute appréciation individuelle et discrétionnaire des besoins personnels, aux bénéficiaires sur la base d'une situation légalement définie, et, d'autre part, elle se rapporte à l'un des risques énumérés expressément à l'article 4, paragraphe 1, du règlement nº 1408/71 .

    27. De manière plus spécifique, la Cour a, dans l'arrêt Hoever et Zachow , jugé que l'allocation d'éducation («Erziehungsgeld») prévue par le Bundeserziehungsgeldgesetz allemand (loi relative à l'octroi de l'allocation et du congé d'éducation) doit être considérée comme une prestation familiale au sens du règlement nº 1408/71. La Cour a souligné que l'allocation allemande, qui est octroyée de manière automatique aux personnes qui répondent à certains critères objectifs, en dehors de toute appréciation individuelle et discrétionnaire de leurs besoins personnels, n'est versée que si la famille de la personne concernée comprend un ou plusieurs enfants; que son montant varie partiellement en fonction de l'âge et du nombre des enfants, et également en fonction du revenu des parents; et qu'elle a pour objectif de rétribuer l'éducation dispensée à l'enfant, à compenser les autres frais de garde et d'éducation et, le cas échéant, à atténuer les désavantages financiers qu'implique la renonciation à un revenu provenant d'un emploi à plein temps .

    28. Dans la présente espèce, il n'est pas contesté que les dispositions relatives à l'octroi de l'allocation de garde d'enfants à domicile confèrent un droit légalement défini et que l'allocation est octroyée de manière automatique aux personnes qui répondent à certains critères objectifs, en dehors de toute appréciation individuelle et discrétionnaire de leurs besoins personnels. Cela s'applique, notamment, à l'indemnité de garde («hoitoraha») et à l'allocation complémentaire de garde («hoitolisä») accordées conformément à l'article 2 de la loi relative aux allocations de garde d'enfants à domicile. Dans ce contexte, il est intéressant de noter que, si l'allocation complémentaire de garde est fonction du revenu, elle est accordée à tous les parents qui en font la demande et qui remplissent les critères objectifs s'agissant du revenu de la famille, tels que prévus par la loi.

    29. Il y a, cependant, un désaccord s'agissant de la question de savoir si l'allocation en cause a trait à l'un des risques énumérés à l'article 4, paragraphe 1, du règlement nº 1408/71. Selon la Commission, l'allocation est, pour l'essentiel, analogue à l'allocation dont il s'agissait dans l'affaire Hoever et Zachow, précitée, et doit être considérée comme une prestation destinée à compenser les charges de famille au sens de l'article 1er, sous u), i). Le gouvernement finlandais s'oppose à cette conclusion. Pour lui, l'allocation en cause doit être considérée comme une assistance sociale au sens de l'article 4, paragraphe 4, du règlement nº 1408/71.

    30. À cet égard, il souligne, tout d'abord, que l'allocation fait partie d'un système général prévu par la loi finlandaise qui propose aux parents le choix entre une place dans une crèche publique - qui est un service social - et le versement de l'allocation de garde d'enfants à domicile. Il précise que ce système a pour but d'organiser la garde des enfants en Finlande pendant la journée et d'offrir aux parents un vrai choix quant à la manière dont ils souhaitent que leurs enfants soient gardés. Pour le gouvernement finlandais, ce système ne vise pas, comme pour l'allocation allemande en cause dans l'arrêt Hoever et Zachow, précité, à couvrir les dépenses familiales en rétribuant les parents pour l'éducation dispensée à leurs enfants ou en leur offrant une compensation pour la perte de revenu. Ainsi, l'octroi de l'allocation n'exige pas des parents qu'ils s'occupent eux-mêmes des enfants, qu'ils cessent de travailler ou qu'ils renoncent d'une autre manière à leur revenu.

    31. Le gouvernement finlandais souligne également que c'est la commune sur le territoire de laquelle la famille réside qui doit prévoir des places dans une crèche publique et qui supporte le coût de l'allocation de garde d'enfants à domicile versée aux parents. Compte tenu du lien étroit existant, dans la législation finlandaise, entre la mise à disposition des places dans une crèche publique et l'allocation de garde d'enfants à domicile, ces deux éléments doivent être considérés comme un tout pour les besoins de classification au vu du règlement nº 1408/71 et les conditions dans lesquelles on bénéficie de l'un ou de l'autre doivent être identiques. Ainsi, étant donné que le droit à une place dans une crèche publique est soumis à une condition de résidence, l'octroi de l'allocation doit lui aussi être soumis à cette condition.

    32. Nous ne sommes pas convaincu par ces arguments.

    33. Il convient de rappeler que, dans l'arrêt Offermans , la Cour a jugé que «l'expression compenser les charges de famille, figurant à l'article 1er, sous u), i), du règlement nº 1408/71, doit être interprétée en ce sens qu'elle vise, notamment, une contribution publique au budget familial, destinée à alléger les charges découlant de l'entretien (Unterhalt) des enfants» . La compensation de telles charges de famille est, comme la Cour l'a souligné, «compatible avec les finalités visées au premier considérant du règlement nº 1408/71, à savoir l'amélioration du niveau de vie et des conditions d'emploi des personnes qui ont exercé leur droit à la libre circulation» .

    34. L'article 1er de la loi relative à l'allocation de garde d'enfants à domicile stipule que la loi règle le droit à une aide financière destinée à permettre aux parents d'organiser la garde de leurs enfants pendant la journée. Au vu de cette formulation, il apparaît que la loi a pour but - et certainement pour effet - de compenser le coût de la garde d'un enfant assurée par un tiers (dans une crèche privée ou par une assistante maternelle) et, le cas échéant, d'atténuer les désavantages financiers que subit le parent qui renonce au revenu d'un emploi à plein temps en vue de s'occuper d'un enfant, afin de donner aux parents la liberté économique de choisir le type de garde pendant la journée qu'ils considèrent comme étant le plus adapté à leurs enfants.

    35. L'existence d'un lien entre les charges de famille et l'allocation en cause est confirmée par les dispositions de la loi relative à l'allocation de garde d'enfants à domicile régissant les conditions d'octroi de celle-ci. Ainsi, l'allocation n'est versée que si la famille de la personne concernée comprend un ou plusieurs enfants et son montant varie en fonction de l'âge et du nombre des enfants et du revenu des parents.

    36. De plus, les prestations familiales au sens de l'article 4, paragraphe 1, sous h), du règlement peuvent avoir plus d'un seul objectif. Pour relever de l'article 4, paragraphe 1, sous h), il suffit que l'un des objectifs de la prestation prévue par une loi nationale soit la compensation des charges de famille. Ainsi, la Cour a, dans l'arrêt Hughes , constaté que le «family credit» en Irlande du Nord remplit une double fonction:

    «consistant, d'une part, [...] à maintenir des travailleurs mal rémunérés au travail et, d'autre part, à compenser les charges de la famille, comme il résulte notamment du fait qu'il n'est versé que lorsque l'unité familiale de l'intéressé comporte un ou plusieurs enfants et que son montant varie en fonction de l'âge des enfants. C'est dans cette seconde fonction qu'une prestation telle que le family credit relève de la catégorie des prestations familiales [...]» .

    37. Le fait que l'allocation en cause dans la présente espèce contribue, comme le souligne le gouvernement finlandais, à l'organisation de la garde des enfants pendant la journée en Finlande n'est, par conséquent, pas suffisant pour l'exclure du champ d'application matériel du règlement.

    38. Quant au second argument invoqué par le gouvernement finlandais, il convient de reconnaître qu'il existe un lien entre l'organisation d'une crèche publique, qui - ainsi qu'il semble avoir été admis de manière générale - est un service social, et les conditions dans lesquelles l'allocation de garde d'enfants à domicile est octroyée en vertu de la loi finlandaise. Au vu de cette législation, il apparaît cependant clairement que les parents peuvent choisir librement entre une place dans une crèche publique et l'allocation en cause. En effet, il ressort des explications fournies à l'audience que les parents sont libres d'alterner entre la crèche publique et l'allocation de garde d'enfants à domicile au cours de la période pendant laquelle ils y ont droit. Le droit à cette allocation n'est donc - comme le souligne la Commission - en aucune manière subsidiaire à une place dans une crèche publique ni dépendant d'une demande antérieure en vue d'une telle place. En droit finlandais, c'est un droit ouvert à tous les parents, indépendamment du droit à une place dans une crèche publique. Dans ces circonstances, nous ne pouvons pas admettre l'affirmation du gouvernement finlandais selon laquelle l'allocation en cause constituerait une part intégrale et totalement inséparable d'un système d'assistance sociale. Selon nous, l'allocation doit être analysée comme une prestation distincte et elle doit, par conséquent, en accord avec son objectif et son effet, être considérée comme une prestation destinée à compenser les charges de famille au sens de l'article 1er, sous u), i), du règlement nº 1408/71.

    39. Pour ces raisons, nous concluons que l'allocation finlandaise de garde d'enfants à domicile constitue une prestation familiale au sens de l'article 4, paragraphe 1, sous h), du règlement nº 1408/71.

    La deuxième question

    40. Par sa deuxième question, la juridiction nationale cherche essentiellement à savoir si les dispositions du règlement nº 1408/71 excluent l'application d'une condition de résidence à titre de condition pour le versement de l'allocation de garde d'enfants à domicile s'agissant des enfants de travailleurs détachés temporairement dans un autre État membre.

    41. La réponse à cette question découle de l'article 73 du règlement, tel qu'interprété par la jurisprudence de la Cour.

    42. L'article 73 crée, comme la Cour l'a constaté de manière répétée , en faveur du travailleur qui est soumis à la législation d'un État membre autre que celui sur le territoire duquel les membres de sa famille résident, un véritable droit à l'octroi des prestations familiales prévues par la législation applicable, droit qui ne saurait être mis en échec par l'application d'une clause figurant dans cette législation, qui exclut du bénéfice des prestations familiales les personnes ne résidant pas sur le territoire de l'État membre en question . De plus, il est de jurisprudence constante que l'article 73 est applicable à un travailleur qui vit avec sa famille dans un État membre autre que celui dont la législation lui est applicable .

    43. À notre avis, il ne fait aucun doute que cette jurisprudence doit être appliquée au cas d'un travailleur détaché qui vit avec sa famille, pour une période limitée, dans un État membre autre que celui dans lequel lui et sa famille résident normalement et qui, conformément à l'article 14, paragraphe 1, sous a), du règlement - demeure soumis à la législation de ce dernier État en matière de sécurité sociale.

    44. Cette interprétation est, comme le souligne la Commission, compatible avec le libellé de l'article 73 et l'objectif de celui-ci qui, comme la Cour l'a constaté, consiste «à empêcher qu'un État membre puisse faire dépendre l'octroi ou le montant de prestations familiales de la résidence des membres de la famille du travailleur dans l'État membre prestataire, afin de ne pas dissuader le travailleur communautaire d'exercer son droit à la libre circulation» .

    45. Par ailleurs, elle est compatible avec l'article 75, paragraphe 1, qui prévoit que les prestations familiales sont servies, dans les cas visés à l'article 73, par l'institution compétente de l'État à la législation duquel le travailleur salarié ou non salarié est soumis, conformément aux dispositions que cette institution applique, que la personne physique ou morale à laquelle ces prestations doivent être servies réside, séjourne ou ait son siège sur le territoire de l'État compétent ou sur celui d'un autre État membre.

    46. Il convient d'ajouter à cela que la loi relative aux allocations de garde d'enfants à domicile ne figure pas à l'annexe II bis du règlement. Les règles fixées aux articles 4, paragraphe 2 bis, et 10 bis, paragraphe 1 , du règlement sont, par conséquent, en tout état de cause dépourvues de pertinence pour la présente espèce.

    La troisième question

    47. À la lumière de la réponse à la première question, il n'est pas nécessaire que la Cour réponde à la troisième question.

    Conclusion

    48. Par conséquent, nous sommes d'avis qu'il convient de répondre comme suit aux questions déférées par le tarkastuslautakunta:

    «1) Une allocation, comme l'allocation de garde d'enfants à domicile prévue par la laki lasten kotihoidon ja yksityisen hoidon tuesta finlandaise (loi relative aux allocations de garde d'enfants à domicile et de garde privée), qui est automatiquement octroyée aux personnes qui répondent à certains critères objectifs, en dehors de toute appréciation individuelle et discrétionnaire de leurs besoins personnels, et qui est destinée à compenser les charges de famille, doit être traitée comme une prestation familiale au sens de l'article 4, paragraphe 1, sous h), du règlement (CEE) nº 1408/71 du Conseil, du 14 juin 1971, relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté.

    2) Lorsqu'un travailleur salarié est soumis à la législation d'un État membre en vertu de l'article 14, paragraphe 1, sous a), du règlement nº 1408/71 en qualité de travailleur détaché et qu'il réside avec sa famille dans un autre État membre en raison de son détachement, son conjoint est, conformément à l'article 73, en droit de bénéficier d'une prestation familiale telle que l'allocation de garde d'enfants à domicile prévue par la législation du premier État membre.»

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