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Document 62000CC0094

    Conclusions de l'avocat général Mischo présentées le 20 septembre 2001.
    Roquette Frères SA contre Directeur général de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, en présence de la Commission des Communautés européennes.
    Demande de décision préjudicielle: Cour de cassation - France.
    Droit de la concurrence - Article 14, paragraphes 3 et 6, du règlement nº 17 - Décision de la Commission ordonnant une vérification - Assistance des autorités nationales - Interprétation de l'arrêt du 21 septembre 1989, Hoechst/Commission - Principes généraux - Protection contre les interventions arbitraires ou disproportionnées de la puissance publique dans la sphère d'activité privée d'une personne morale - Portée du contrôle incombant à la juridiction nationale compétente pour autoriser des mesures de contrainte à l'encontre des entreprises - Devoir d'information de la Commission - Coopération loyale.
    Affaire C-94/00.

    Recueil de jurisprudence 2002 I-09011

    ECLI identifier: ECLI:EU:C:2001:472

    62000C0094

    Conclusions de l'avocat général Mischo présentées le 20 septembre 2001. - Roquette Frères SA contre Directeur général de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, en présence de la Commission des Communautés européennes. - Demande de décision préjudicielle: Cour de cassation - France. - Droit de la concurrence - Article 14, paragraphes 3 et 6, du règlement nº 17 - Décision de la Commission ordonnant une vérification - Assistance des autorités nationales - Interprétation de l'arrêt du 21 septembre 1989, Hoechst/Commission - Principes généraux - Protection contre les interventions arbitraires ou disproportionnées de la puissance publique dans la sphère d'activité privée d'une personne morale - Portée du contrôle incombant à la juridiction nationale compétente pour autoriser des mesures de contrainte à l'encontre des entreprises - Devoir d'information de la Commission - Coopération loyale. - Affaire C-94/00.

    Recueil de jurisprudence 2002 page I-09011


    Conclusions de l'avocat général


    1. Dans le cadre d'un pourvoi introduit par Roquette Frères SA (ci-après «Roquette») contre une ordonnance du président du tribunal de grande instance de Lille (France), du 14 septembre 1998, autorisant des vérifications dans les locaux de cette entreprise, la Cour de cassation (France) nous a saisis de deux questions préjudicielles ayant trait à la possibilité pour un juge national de refuser la mise en oeuvre des vérifications ordonnées par la Commission.

    I Le cadre factuel et juridique

    A La décision de la Commission

    2. La Commission a adopté le 10 septembre 1998, en application de l'article 14, paragraphe 3, du règlement n° 17 du Conseil, du 6 février 1962, premier règlement d'application des articles 85 et 86 du traité , une décision ordonnant à Roquette de se soumettre à une vérification.

    3. L'article 1er du dispositif de cette décision est ainsi libellé:

    «L'entreprise Roquettes Frères SA est tenue de se soumettre à une vérification portant sur sa participation éventuelle à des accords et/ou pratiques concertées dans les domaines du gluconate de sodium et du glucono-delta-lactone, susceptibles de constituer une infraction à l'article 85 du traité CE. La vérification peut avoir lieu dans tous les établissements de cette entreprise.

    L'entreprise permettra aux agents mandatés par la Commission pour procéder à la vérification, et aux agents de l'État membre qui les assistent, d'accéder à tous ses locaux, terrains et moyens de transport pendant les heures normales d'ouverture des bureaux. L'entreprise présentera pour contrôle les livres et autres documents professionnels requis par lesdits agents; elle leur permettra de contrôler ses livres et autres documents professionnels aux endroits où ils se trouvent et d'en prendre copie ou extrait. En outre, elle leur fournira immédiatement toutes les explications orales que lesdits agents pourraient demander en relation avec l'objet de la vérification.»

    4. Pour l'essentiel, les motifs de la décision de la Commission laissent, pour leur part, apparaître que:

    «[...]

    La Commission dispose d'informations selon lesquelles des responsables de l'entreprise visée auraient tenu des réunions régulières avec des concurrents, au cours desquelles des parts du marché du gluconate de sodium auraient été allouées et des prix minimum convenus vis-à-vis des utilisateurs des diverses régions du marché. Les niveaux de ventes, totales et relatives aux diverses régions, auraient aussi été fixés. Chaque réunion aurait donné lieu à l'évaluation du degré d'observance des accords. Toute entreprise ayant dépassé les ventes qui lui étaient accordées devait semble-t-il essayer de réduire ses ventes au cours de la période suivante.

    [...]

    La Commission dispose d'informations selon lesquelles les contacts en question avec des concurrents se seraient étendus aussi au glucono-delta-lactone. Il se serait agi en particulier de conversations bi- ou multilatérales, qui se seraient tenues souvent en marge (avant, après ou lors de pauses) des réunions concernant le gluconate de sodium. Les participants auraient à cette occasion échangé des informations sur le marché, sur les prix du marché ainsi que sur la situation de la demande. Ils auraient aussi tenu des conversations sur les capacités de production et les volumes de vente. Les contacts auraient visé le contrôle des prix et étaient semble-t-il de nature à provoquer une coordination du comportement des participants sur le marché.

    Si leur existence était établie, les accords et/ou les pratiques concertées susvisés pourraient constituer une infraction grave à l'article 85 du traité [...]. La nature même de tels accords et/ou pratiques concertées donne à penser qu'ils seraient appliqués selon des modalités secrètes et qu'une vérification est à cet égard le moyen le plus approprié pour recueillir des éléments de preuve de leur existence.

    [...]

    Afin de préserver l'efficacité de la vérification, il est nécessaire que l'entreprise n'en soit pas informée à l'avance.

    Il est donc nécessaire de contraindre l'entreprise, par voie de décision, à se soumettre à une vérification au sens de l'article 14, paragraphe 3, du règlement n° 17.»

    5. La Commission est intervenue auprès du gouvernement français, lui demandant de prendre les mesures nécessaires pour que l'assistance des autorités nationales, prévue par l'article 14, paragraphe 6, du règlement n° 17, en cas d'opposition de l'entreprise à une vérification, soit assurée.

    6. À la suite de cette demande, la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (ci-après la «DGCCRF») a demandé aux services administratifs déconcentrés compétents, d'une part, de se mettre à la disposition des agents mandatés par la Commission, d'autre part, de présenter une requête devant le président du tribunal de grande instance de Lille aux fins d'obtenir l'autorisation de visite et de saisie prévue par la législation française.

    7. Une telle requête a été déposée le 14 septembre 1998. S'y trouvaient notamment annexés la décision de la Commission et le texte de l'arrêt Hoechst/Commission .

    8. Le président du tribunal de grande instance de Lille a fait droit à cette requête par l'ordonnance du 14 septembre 1998, précitée, sur laquelle nous reviendrons.

    B Le droit national applicable

    9. Le Conseil constitutionnel (France) a jugé, le 29 décembre 1983, que des investigations dans des lieux privés ne peuvent être conduites que dans le respect de l'article 66 de la Constitution qui confie à l'autorité judiciaire la sauvegarde de la liberté individuelle et notamment de l'inviolabilité du domicile. Il en a déduit que les dispositions légales applicables doivent, dès lors, assigner de façon explicite à la juridiction compétente la mission de vérifier, de façon concrète, le bien-fondé de la demande qui lui est soumise.

    10. Postérieurement à cette décision a été adoptée l'ordonnance n° 86-1243, du 1er décembre 1986, relative à la liberté des prix et de la concurrence (ci-après l'«ordonnance relative à la concurrence»), qui établit les procédures de vérification permises dans ce domaine.

    11. L'article 47 de cette dernière prévoit:

    «Les enquêteurs peuvent accéder à tous locaux, terrains ou moyens de transport à usage professionnel, demander la communication des livres, factures et tous autres documents professionnels et en prendre copie, recueillir sur convocation ou sur place les renseignements et justifications. Ils peuvent demander à l'autorité dont ils dépendent de désigner un expert pour procéder à toute expertise contradictoire nécessaire.»

    12. L'article 48 de ladite ordonnance dispose:

    «Les enquêteurs ne peuvent procéder aux visites en tous locaux, ainsi qu'à la saisie de documents, que dans le cadre d'enquêtes demandées par le ministre chargé de l'économie ou le Conseil de la concurrence et sur autorisation judiciaire donnée par ordonnance du président du tribunal de grande instance dans le ressort duquel sont situés les lieux à visiter ou d'un juge délégué par lui. [...]

    Le juge doit vérifier que la demande d'autorisation qui lui est soumise est fondée; cette demande doit comporter tous les éléments d'information de nature à justifier la visite . Il désigne un ou plusieurs officiers de police judiciaire chargés d'assister à ces opérations et de le tenir informé de leur déroulement [...].

    Le juge peut se rendre dans les locaux pendant l'intervention. À tout moment, il peut décider la suspension ou l'arrêt de la visite.

    L'ordonnance mentionnée au premier alinéa du présent article n'est susceptible que d'un pourvoi en cassation selon les règles prévues par le code de procédure pénale. Ce pourvoi n'est pas suspensif.

    La visite, qui ne peut commencer avant six heures ou après vingt et une heures, est effectuée en présence de l'occupant des lieux ou de son représentant. Les enquêteurs, l'occupant des lieux ou son représentant ainsi que l'officier de police judiciaire peuvent seuls prendre connaissance des documents avant leur saisie. [...]»

    13. Les prescriptions des articles 47 et 48 de l'ordonnance relative à la concurrence ont été rendues applicables aux vérifications décidées sur la base de l'article 14 du règlement n° 17. L'article 56 bis de ladite ordonnance prévoit ainsi:

    «Pour l'application des articles 85 à 87 du Traité de Rome, le ministre chargé de l'économie et les fonctionnaires qu'il a désignés ou habilités conformément aux dispositions de la présente ordonnance, d'une part, le Conseil de la concurrence, d'autre part, disposent des pouvoirs qui leur sont reconnus par les titres III, VI et VII de la présente ordonnance, pour ce qui concerne le ministre et les fonctionnaires susvisés, et par son titre III pour ce qui concerne le Conseil de la concurrence. Les règles de procédure prévues par ces textes leur sont applicables.»

    14. Aux fins d'éclairer l'interprétation que reçoivent les dispositions nationales susvisées, Roquette cite, pour sa part, des extraits de trois arrêts de la Cour de cassation, qui confirment que le président du tribunal de grande instance doit mettre la Cour de cassation en mesure de contrôler si le bien-fondé de la demande a été vérifié.

    C La décision attaquée devant la Cour de cassation

    15. L'ordonnance du président du tribunal de grande instance de Lille contient notamment les précisions suivantes:

    «[...] Attendu que la décision de la Commission susvisée est fondée sur des motifs de fait et de droit, relatifs à la présomption de pratiques prohibées par l'article 85 du Traité instituant la Communauté économique européenne mettant en cause l'entreprise Roquette Frères SA, qu'il ne nous appartient pas d'apprécier qu'en effet une telle appréciation relève de la compétence du Tribunal de première instance des Communautés européennes à Luxembourg ;

    Attendu qu'en conséquence la décision de la Commission susvisée doit être jointe à la présente ordonnance et en faire partie intégrante;

    Attendu que les éléments contenus dans la décision de la Commission susvisée sont de nature à constituer la motivation définie à l'article 48 de l'ordonnance susvisée [ordonnance relative à la concurrence]; [...]»

    16. Ayant rappelé le descriptif des faits présumés tel qu'il ressort de la décision de la Commission, l'ordonnance du président du tribunal de grande instance de Lille poursuit en considérant notamment:

    «[...] Attendu que ces pratiques sont la conséquence de réunions qui se tiennent périodiquement à l'occasion desquelles s'échangent des informations tenues secrètes;

    Attendu que les documents de nature à apporter la preuve de ces pratiques sont par conséquent de nature confidentielle, qu'ils sont ainsi ignorés des enquêteurs; [...]

    Attendu que l'utilisation des pouvoirs définis à l'article 47 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 nous apparaît insuffisante pour garantir l'obligation à laquelle est tenue l'autorité nationale française dans les circonstances présentes;

    Attendu que le caractère manifestement confidentiel des documents recherchés, les pressions auxquelles peuvent être soumis certains tiers sont de nature à justifier l'utilisation des pouvoirs définis à l'article 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986;

    Attendu que ces pouvoirs nous apparaissent de nature à atteindre les objectifs recherchés tout en garantissant les droits de la défense dès lors que ces pouvoirs sont utilisés sous notre contrôle;

    Attendu dans ces conditions que dès lors que l'entreprise Roquette Frères SA est présumée impliquée dans des pratiques prohibées par l'article 85 du Traité instituant la Communauté économique européenne et que l'usage de l'article 48 de l'ordonnance susvisée n'est pas disproportionné par rapport aux mesures envisagées à condition que les documents originaux soient restitués à l'entreprise dont les locaux auront été visités, la Commission ayant demandé la communication de la seule copie des documents;

    [...]»

    17. L'ordonnance du président du tribunal de grande instance de Lille a été notifiée le 16 septembre 1998 et la vérification a eu lieu les 16 et 17 septembre 1998. Roquette a coopéré aux vérifications tout en émettant des réserves quant à la prise de copies d'une série de documents.

    D Le pourvoi en cassation et l'arrêt de renvoi

    18. Roquette a ensuite introduit un pourvoi contre cette ordonnance devant la Cour de cassation. Elle fait notamment valoir que le président du tribunal de grande instance ne pouvait ordonner qu'il soit procédé à des visites domiciliaires sans exercer la plénitude du contrôle que la Constitution et l'ordonnance relative à la concurrence lui ont confié en propre. Il lui appartenait de vérifier lui-même, au vu du dossier de pièces qu'est tenue de lui fournir l'administration requérante, s'il existait des présomptions sérieuses de pratiques anticoncurrentielles de nature à justifier l'octroi de pouvoirs de contrainte. Il ne pouvait se contenter de prendre sa décision sur le seul fondement de la décision de la Commission, sans s'assurer qu'une telle décision a bien été prise au vu de pièces ou de documents soumis à l'appréciation de la Commission.

    19. Dans l'arrêt de renvoi, la Cour de cassation, après avoir rappelé la décision de la Cour constitutionnelle du 29 décembre 1983, précitée, relève que, «en l'espèce, aucun élément d'information ou indice permettant de présumer l'existence des pratiques anticoncurrentielles invoquées n'a été présenté au président du tribunal de grande instance [...] le mettant ainsi dans l'impossibilité de vérifier, de façon concrète, le bien-fondé de la demande qui lui était soumise» et que, «au surplus, la décision de la Commission [...] se borne à énoncer que la Commission dispose d'informations selon lesquelles la société Roquettes Frères se livrerait à des pratiques anticoncurrentielles sur le marché du gluconate de sodium et du glucono-delta-lactone, qu'elle a décrites, mais sans se référer, en les analysant, même succinctement, aux informations qu'elle affirme détenir et sur lesquelles elle fonde son appréciation; [...]»

    20. La Cour de cassation se réfère par ailleurs aux affirmations contenues aux points 17 et 18 de l'arrêt Hoechst/Commission, précité, selon lesquelles il n'existe pas de principe commun aux droits des États membres consacrant le droit à l'inviolabilité du domicile des entreprises ni de jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme déduisant un tel principe de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (ci-après la «CEDH»). Elle observe, à cet égard, que, dans son arrêt du 16 décembre 1992, Niemietz, la Cour européenne des droits de l'homme a toutefois ultérieurement jugé que cette disposition était bien susceptible de s'appliquer à certaines activités ou locaux commerciaux. La Cour de cassation insiste de même sur les articles 6, paragraphe 2, UE imposant à l'Union le respect des droits fondamentaux tels qu'ils sont garantis par la Cour européenne des droits de l'homme au titre de principes généraux et 46 UE soumettant cette disposition au contrôle de la Cour de justice.

    21. La Cour de cassation souligne encore que l'arrêt Hoechst/Commission, précité, a précisé que la Commission est tenue de respecter les garanties procédurales prévues par le droit national à l'occasion de la mise en oeuvre de ses pouvoirs de vérification.

    22. C'est dans ces conditions que la Cour de cassation a, par arrêt du 7 mars 2000, sursis à statuer et saisi la Cour de questions préjudicielles:

    «aux fins de dire si:

    1) eu égard aux droits fondamentaux reconnus par l'ordre juridique communautaire et à l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, l'arrêt Hoechst rendu le 21 septembre 1989 doit être interprété en ce sens que le juge national, compétent en vertu de son droit national pour ordonner des visites et saisies des agents de l'Administration dans des locaux d'entreprises en matière de concurrence, ne peut refuser d'accorder l'autorisation demandée lorsqu'il estime que les éléments d'information ou indices qui lui sont présentés comme laissant présumer l'existence de pratiques anticoncurrentielles de la part des entreprises visées dans la décision de vérification de la Commission sont insuffisants pour autoriser une telle mesure ou lorsque, comme en l'espèce, aucun élément ou indice ne lui a été présenté;

    2) dans l'hypothèse où la Cour de justice refuserait de reconnaître l'obligation pour la Commission de présenter au juge national compétent les indices et éléments d'information dont elle dispose et laissant présumer l'existence de pratiques anticoncurrentielles, ce juge est néanmoins compétent, eu égard aux droits fondamentaux précités, pour refuser d'accorder les visites et saisies sollicitées lorsqu'il estime que la décision de la Commission, comme en l'espèce, n'est pas suffisamment motivée et ne lui permet pas de vérifier, de façon concrète, le bien-fondé de la demande qui lui est soumise, le mettant ainsi dans l'impossibilité d'exercer le contrôle exigé par son droit constitutionnel national.»

    II Appréciation

    23. Il importe, en premier lieu, de bien préciser la portée du problème qui nous est soumis par la Cour de cassation.

    24. Il résulte, à notre avis, des textes du droit français que nous venons de citer ainsi que de la lecture de l'arrêt de renvoi que les deux questions, prises ensemble, posent le problème de savoir si le juge national a compétence pour refuser l'autorisation de procéder à une vérification (pratiquement équivalente à une perquisition) lorsque ni le texte de la décision de la Commission ni les éléments d'information ou indices qui lui sont présentés en complément de celle-ci ne sont de nature à prouver, à ses yeux, la nécessité de cette vérification. Les termes «vérifier, de façon concrète, le bien-fondé de la demande» qui figurent dans la seconde question ne laissent pas de place à un doute à cet égard.

    25. Or, au point 35 de l'arrêt Hoechst/Commission, précité, vous avez déclaré que l'instance nationale compétente «qu'elle soit judiciaire ou non ne saurait [...] substituer sa propre appréciation du caractère nécessaire des vérifications ordonnées à celle de la Commission, dont les évaluations de fait et de droit ne sont soumises qu'au contrôle de légalité de la Cour de justice».

    26. Dans ces conditions, il est donc permis de conclure que la Cour de cassation se demande, en substance, si la jurisprudence Hoechst/Commission, précitée, ne devrait pas être revue.

    A L'arrêt Hoechst/Commission, précité, et l'article 8 de la CEDH

    27. La Cour de cassation avance, à cet égard, deux raisons.

    28. Tout en notant que les droits fondamentaux font, depuis longtemps, partie intégrante des principes généraux du droit dont notre Cour assure le respect et que la CEDH revêt, à cet égard, une signification particulière, la Cour de cassation se demande si une importance encore plus grande que par le passé ne doit pas être accordée à cette convention à la suite de l'adoption de l'article 6, paragraphe 2, du traité sur l'Union européenne qui dispose que l'Union respecte les droits fondamentaux tels qu'ils sont garantis par la CEDH et tels qu'ils résultent des traditions constitutionnelles communes aux États membres, en tant que principes généraux du droit communautaire. L'article 46, sous d), du même traité prévoit, par ailleurs, que la Cour est compétente pour l'application de l'article 6, paragraphe 2, en ce qui concerne l'action des institutions.

    29. À cet égard, nous nous rallions cependant aux observations de la Commission, selon laquelle ces textes ont eu un rôle purement confirmatif. En effet, ainsi que vous l'avez précisé dans l'arrêt Bosman , à propos du principe de la liberté d'association, ce dernier «fait partie des droits fondamentaux qui, selon une jurisprudence constante de la Cour, par ailleurs réaffirmée par le préambule de l'Acte unique européen et par l'article F, paragraphe 2, du traité sur l'Union européenne, sont protégés dans l'ordre juridique communautaire». Or, l'article 6, paragraphe 2, de la version actuelle du traité sur l'Union européenne est identique à l'ancien article F, paragraphe 2.

    30. En second lieu, la Cour de cassation rappelle que, au point 18 de votre arrêt Hoechst/Commission, précité, vous aviez déclaré que l'article 8 de la CEDH concernait le domaine d'épanouissement de la liberté personnelle de l'homme et qu'il ne saurait donc être étendu aux locaux commerciaux. Par ailleurs, vous aviez constaté qu'il n'existait pas encore de jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme à cet égard.

    31. Or, fait valoir la Cour de cassation, une telle jurisprudence existe depuis l'arrêt Niemietz, précité, et d'autres arrêts subséquents.

    32. Il importe, cependant, de rappeler également que, dans l'arrêt Hoechst/Commission, précité, vous n'aviez pas conclu à l'absence de protection des entreprises contre des interventions arbitraires, mais que vous aviez déclaré, au point 19 dudit arrêt, que, «dans tous les systèmes juridiques des États membres, les interventions de la puissance publique dans la sphère d'activité privée de toute personne, qu'elle soit physique ou morale, doivent avoir un fondement légal et être justifiées par les raisons prévues par la loi et que ces systèmes prévoient, en conséquence, bien qu'avec des modalités différentes, une protection face à des interventions qui seraient arbitraires ou disproportionnées. L'exigence d'une telle protection doit donc être reconnue comme un principe général du droit communautaire».

    33. Mais, comme entre-temps la Cour européenne des droits de l'homme a rendu l'arrêt Niemietz, précité, et comme la Cour de justice attache la plus haute importance à la jurisprudence de la première, il y a lieu d'examiner si une protection plus étendue encore doit être accordée aux locaux des personnes morales.

    34. Rappelons, d'abord, que l'article 8 de la CEDH est rédigé de la manière suivante:

    «1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance.

    2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention de l'infraction pénale, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui.»

    35. La protection du domicile n'est donc pas absolue. Lorsqu'elle a été amenée à examiner, dans le cadre de l'affaire Niemietz, précitée, une «ingérence» au sens du paragraphe 2 susmentionné, la Cour européenne des droits de l'homme a examiné successivement:

    si l'on était en présence d'une ingérence;

    si cette ingérence était prévue par la loi;

    si elle poursuivait des buts légitimes;

    si elle était nécessaire dans une société démocratique.

    1. L'existence d'une ingérence

    36. Il ne saurait y avoir de doute qu'une vérification effectuée au titre de l'article 14, paragraphe 6, du règlement n° 17, constitue bien une ingérence au sens de l'article 8 de la CEDH.

    37. Il faut cependant souligner que, au point 31 de son arrêt Niemietz, précité, la Cour européenne des droits de l'homme a déclaré ce qui suit:

    «[...] interpréter les mots vie privée et domicile comme incluant certains locaux ou activités professionnels ou commerciaux répondrait à l'objet et au but essentiels de l'article 8: prémunir l'individu contre des ingérences arbitraires des pouvoirs publics (voir par exemple l'arrêt Marckx c. Belgique du 13 juin 1979, série A n° 31, p. 15, par. 31). Les États contractants ne s'en trouveraient pas indûment bridés car ils conserveraient, dans la mesure autorisée par le paragraphe 2 de l'article 8 (art. 8-2), leur droit d'ingérence et celui-ci pourrait fort bien aller plus loin pour des locaux ou activités professionnels ou commerciaux que dans d'autres cas» .

    38. Ce passage fait apparaître que, pour la Cour européenne des droits de l'homme, la sphère professionnelle ne mérite pas nécessairement, ou à tous égards, une protection aussi étendue que la sphère privée. Ceci pourrait concerner notamment les exigences auxquelles doit répondre l'acte ordonnant la vérification, par exemple en ce qui concerne les indices laissant présumer l'existence d'une infraction au droit de la concurrence.

    2. L'ingérence doit être prévue par la loi

    39. Une vérification effectuée sur la base de l'article 85 du traité CE (devenu article 81 CE) et du règlement n° 17 constitue bien évidemment une «ingérence prévue par la loi».

    3. L'ingérence doit poursuivre des buts légitimes

    40. Il n'a pas été contesté au cours de la présente procédure, et il ne saurait être contesté, que, lorsque la Commission effectue des vérifications en vue d'établir l'existence d'accords entre entreprises, de décisions d'associations d'entreprises ou de pratiques concertées susceptibles de tomber sous l'interdiction proclamée par l'article 85 du traité, de telles vérifications constituent des ingérences poursuivant un but légitime.

    4. L'ingérence doit être nécessaire dans une société démocratique

    41. En matière d'ententes, les critères à retenir, à cet égard, sont évidemment ceux du «bien-être économique du pays» et de la «défense de l'ordre».

    42. Ainsi que vous l'avez, en effet, souligné dans l'arrêt National Panasonic/Commission , cité au point 25 de l'arrêt Hoechst/Commission, précité, les règles pertinentes du droit communautaire ont pour fonction «d'éviter que la concurrence ne soit faussée au détriment de l'intérêt général, des entreprises individuelles et des consommateurs».

    43. On peut donc dire qu'en principe les vérifications effectuées en vertu du règlement n° 17 sont «nécessaires» au sens de l'article 8 de la CEDH.

    44. Le critère de la nécessité de la vérification doit cependant être rempli dans chaque cas concret. À ce propos, la Cour européenne des droits l'homme s'est exprimée de la manière suivante au point 55 de son arrêt du 25 février 1993, Funke/France :

    «Selon une jurisprudence constante de la Cour, les États contractants jouissent d'une certaine marge d'appréciation pour juger de la nécessité d'une ingérence, mais elle va de pair avec un contrôle européen. Les exceptions que ménage le paragraphe 2 de l'article 8 (art. 8-2) appellent une interprétation étroite (arrêt Klass et autres c. Allemagne du 6 septembre 1978, série A n° 28, p. 21, par. 42) et leur nécessité dans un cas donné doit se trouver établie de manière convaincante.»

    45. À cet égard, il y a lieu de souligner que, au sein de la Communauté, la nécessité d'une vérification, c'est-à-dire le caractère convaincant ou non des arguments présentés par la Commission pour la justifier, est, chaque fois qu'elle est contestée, soumise au contrôle de la Cour (arrêt Hoechst/Commission, précité, point 35).

    46. Il convient d'ajouter qu'il ne résulte nullement des arrêts susmentionnés de la Cour européenne des droits de l'homme que la juridiction compétente pour apprécier ladite nécessité doive s'être prononcée avant que la perquisition n'ait lieu. Nous sommes, certes, de l'avis qu'il serait préférable que tel puisse être le cas. C'est pour cette raison que nous avions déjà proposé dans nos conclusions relatives à l'affaire Hoechst/Commission, précitée (points 146 et 147) qu'un mandat de perquisition puisse être accordé aux agents de la Commission par la Cour (ou maintenant par le Tribunal). Une telle procédure ne pourrait, cependant, être instaurée que par la voie législative.

    47. Toutefois, le fait que, actuellement, la nécessité de la perquisition ne puisse être contrôlée qu'a posteriori ne nous semble pas poser un problème du point de vue de la protection des droits fondamentaux, puisque la Cour admet explicitement que des résultats obtenus sur la base d'un mandat ou d'une décision, qui auraient, par la suite, été déclarés illégaux, ne pourraient pas être utilisés. Notons, d'ailleurs, qu'en France également une perquisition peut avoir lieu avant que l'instance judiciaire suprême ne se soit prononcée sur son bien-fondé, puisqu'un pourvoi en cassation introduit à l'encontre d'une ordonnance autorisant une perquisition en matière de concurrence n'a pas d'effet suspensif.

    48. Compte tenu de toutes les considérations développées ci-dessus, nous parvenons à une conclusion identique à celle à laquelle sont parvenus les gouvernements français et du Royaume-Uni, ainsi que la Commission, à savoir que ni les modifications apportées au traité sur l'Union européenne par le traité d'Amsterdam ni les arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme ayant abordé la question de l'application du principe de l'inviolabilité du domicile aux locaux professionnels ne sont de nature à remettre en cause les principes résultant de l'arrêt Hoechst/Commission, précité. Ces principes accordent aux entreprises une protection équivalente à celle que ladite Cour déduit de l'article 8 de la CEDH.

    49. Ceci dit, il nous reste encore à examiner plus en détail l'enjeu réel des interrogations de la Cour de cassation, à savoir la question de savoir à qui il incombe de procéder au contrôle juridictionnel et, en particulier, quel doit être le rôle du juge national dans ce processus.

    B Le rôle du juge national dans le processus de contrôle

    50. Selon Roquette,

    «les demandes de visites coercitives émanant de la Commission européenne ne sont pas exemptes de l'exercice du pouvoir de contrôle et d'appréciation du juge national français et [...] elles doivent donc se plier aux exigences de production ou d'explication concrète pour justifier la demande.

    Il apparaît également qu'une décision de la Commission fondée sur l'article 14 du règlement n° 17 est un des éléments fournis à l'appréciation du juge, que celui-ci peut considérer comme suffisant si l'acte est suffisamment explicite ou comme nécessitant d'autres explications dans le cas inverse.

    Il apparaît encore que ce contrôle uniquement factuel exercé par le juge n'affecte ni la compétence exclusive des juridictions communautaires ni l'efficacité du travail de la Commission.

    En conséquence, la société Roquette est d'avis que le juge peut refuser d'accorder l'autorisation de visite coercitive, lorsque, comme c'était le cas en l'espèce, ainsi que l'a relevé la Cour de cassation, aucun élément ou indice ne lui a été présenté.»

    51. Que faut-il penser de cette thèse?

    52. Soulignons d'emblée que, à notre avis, il est essentiel, du point de vue de la cohérence de la mise en oeuvre du droit communautaire, que le contrôle de la nécessité (ou du bien-fondé) des vérifications reste de la compétence de la Cour et qu'il ne soit pas transféré aux juridictions des États membres.

    53. Il résulte, tout d'abord, clairement de l'article 173 du traité CE (devenu, après modification, article 230 CE) que la Cour est seule en droit de contrôler la légalité des actes adoptés par les institutions. Or, les décisions de la Commission portant sur une opération de vérification sont incontestablement des décisions au sens de l'article 189 du traité CE (devenu article 249 CE).

    54. Le principe selon lequel les actes des institutions ne peuvent être annulés que par la juridiction communautaire (Cour ou Tribunal) est seul de nature à garantir que ces actes sont jugés selon des critères uniformes. Lui seul peut éviter qu'un acte des institutions soit déclaré illégal dans tel État membre, mais non dans tel autre. Il suffit, à cet égard, de renvoyer à l'arrêt Foto-Frost , rappelé fort à propos par le gouvernement du Royaume-Uni et que nous avions déjà cité dans nos conclusions relatives à l'affaire Hoechst/Commission, précitée.

    55. Certes, au cours de l'audience, Roquette a soutenu qu'il ne s'agissait pas d'annuler un acte de la Commission, mais seulement d'en bloquer momentanément l'exécution en attendant que des informations complémentaires aient été fournies par la Commission. Le fait est, cependant, que la Cour de cassation a très clairement posé le problème en termes de motivation insuffisante de la décision de la Commission et donc en termes d'illégalité de celle-ci. Or, c'est aux questions de la Cour de cassation que vous êtes appelés à répondre.

    56. De toute façon, si l'on examine attentivement les observations de Roquette, il apparaît sans conteste que cette entreprise exige bien que le juge national puisse vérifier la nécessité ou le bien-fondé de la perquisition. Du simple fait qu'il demanderait des informations complémentaires à la Commission, le juge signifierait, en effet, que les éléments d'information qui figurent dans la décision ou qui lui ont été fournis oralement, dans un premier stade, ne l'ont pas convaincu de la nécessité de la perquisition. Lorsque, quelques heures ou quelques semaines plus tard (dans l'hypothèse d'une modification de la décision elle-même), de nouveaux indices lui seraient présentés et que, sur cette base, il accorderait l'autorisation, il signifierait par là, au moins implicitement, «maintenant je suis convaincu que la perquisition est nécessaire». Mais il pourrait aussi déclarer qu'il n'est toujours pas convaincu.

    57. Par ailleurs, le simple fait de retarder l'octroi de l'autorisation, ne fût-ce que de quelques heures, pourrait avoir un effet dévastateur lorsque des perquisitions parallèles doivent avoir lieu dans différentes entreprises du même secteur situées dans plusieurs États membres. Dans ce cas, la nouvelle des perquisitions ayant lieu dans ces autres États membres, à la date prévue initialement, parviendrait, en effet, rapidement à la connaissance de l'entreprise située dans l'État membre où l'autorisation est momentanément bloquée, et permettrait à celle-ci de détruire toutes les traces de l'entente illégale.

    58. Pour toutes ces raisons, nous concluons donc qu'il importe de maintenir fermement le principe selon lequel l'appréciation du bien-fondé, c'est-à-dire de la nécessité de la vérification, ne saurait relever de la compétence du juge national.

    59. Ceci dit, nous tenons à préciser que nous comprenons fort bien les préoccupations de la Cour de cassation qui est confrontée aux textes nationaux précités. Ces textes étendent aux vérifications effectuées par la Commission les dispositions de fond et de procédure applicables lorsqu'est en cause uniquement le droit français de la concurrence. Il est tout à fait normal que le droit français précise que le juge qui autorise une perquisition doit être convaincu du bien-fondé de celle-ci et qu'il doit disposer, à cet égard, d'indices suffisants. C'est, en effet, sur lui que repose essentiellement la décision d'autoriser ou non la perquisition, puisque la Cour de cassation n'effectue qu'un contrôle en droit. Les faits doivent donc être bien établis par le président du tribunal de grande instance, et la Cour de cassation doit pouvoir juger si, en admettant ces faits comme suffisants, le président du tribunal de grande instance n'a pas commis une erreur de droit.

    60. La situation est, toutefois, différente en droit communautaire, puisque, dans ce cas, le contrôle de la nécessité de la perquisition relève et ne peut relever que de la Cour. C'est à celle-ci qu'il appartient, lorsqu'elle est saisie par l'entreprise en cause, de vérifier d'une manière minutieuse si la Commission a disposé d'indications suffisamment sérieuses au sujet de l'existence probable d'une entente, avant de prendre sa décision. La Commission devra soumettre à la juridiction communautaire toutes les informations de nature à prouver le bien-fondé de la perquisition. Répétons que, si tel n'est pas le cas, la Cour annulera la décision et il sera interdit à la Commission d'utiliser les pièces qu'elle aura photocopiées ainsi que les renseignements qu'elle aura pu obtenir oralement auprès des employés de l'entreprise.

    61. Faut-il conclure de tout ceci que le juge national aura pour seule mission de vérifier si la décision qu'on lui présente émane bien de la Commission, et si les personnes qui souhaitent procéder à la vérification disposent de documents prouvant qu'ils ont bien été mandatés par la Commission à cet effet?

    62. Comme les gouvernements français et du Royaume-Uni ainsi que la Commission, nous sommes d'avis que le rôle du juge national va un peu au-delà, mais qu'il ne va pas aussi loin que semblent le penser Roquette et les autres gouvernements qui ont présenté des observations.

    63. Une distinction doit être opérée, à notre avis, entre le contrôle que ce juge peut exercer afin de constater si la vérification n'est pas arbitraire ou disproportionnée et le contrôle du déroulement de la vérification/perquisition elle-même.

    64. En ce qui concerne le premier point, la Commission est d'avis qu'il pourrait, tout d'abord, être soutenu que, dans la mesure où le contrôle de la motivation fait partie du contrôle de légalité, un tel contrôle relèverait du seul ressort de la juridiction communautaire.

    65. La Commission concède, néanmoins, qu'une impossibilité absolue pour l'instance nationale d'effectuer un contrôle de la motivation de la décision de vérification paraît difficilement conciliable avec la possibilité, qui lui est reconnue par l'arrêt Hoechst/Commission, précité, d'apprécier le caractère éventuellement arbitraire ou excessif des mesures envisagées. Une telle appréciation supposerait, en effet, nécessairement que l'instance nationale analyse l'objet et le but de la vérification, dont la Commission souligne, par ailleurs, qu'il s'agit effectivement de l'un des éléments essentiels devant figurer dans la motivation de sa décision .

    66. La Commission estime, toutefois, que l'analyse de la motivation à laquelle se livre l'instance nationale doit être limitée à ce qui est strictement nécessaire pour lui permettre d'exercer la marge d'appréciation restreinte qui lui est ainsi réservée par l'arrêt Hoechst/Commission, précité.

    67. Elle considère, à cet égard, que le caractère arbitraire ou excessif des mesures de contrainte envisagées devrait être apprécié uniquement au regard de l'objet de la vérification , si bien qu'il suffirait que l'instance nationale soit informée de l'infraction supposée ainsi que du contexte propre à celle-ci (position de l'entreprise concernée sur le marché, risque de dissimulation de documents, possibilité de pressions, etc.).

    68. Ainsi, selon la Commission, l'instance nationale pourrait légitimement refuser l'autorisation sollicitée si la décision de la Commission ne comportait aucun des éléments mentionnés ci-dessus, ou si la description des comportements incriminés était à ce point imprécise, ou absente, qu'elle rende impossible toute appréciation du caractère éventuellement excessif ou arbitraire des mesures envisagées, ou encore si l'objet de la vérification était libellé en termes manifestement trop vagues (par exemple «vérifier si une entreprise s'est livrée á des pratiques anticoncurrentielles») pour lui permettre d'exercer le contrôle qui lui est imparti.

    69. Le gouvernement français considère que le juge national compétent peut refuser d'accorder les visites et saisies sollicitées lorsqu'il estime que les éléments qui lui sont présentés ne lui permettent pas d'exercer son contrôle propre, tel qu'il a été défini dans l'arrêt Hoechst/Commission, précité. Toutefois, le juge national compétent ne saurait refuser d'accorder les visites et saisies sollicitées sans porter une atteinte injustifiée à l'efficacité de l'action de la Commission dès lors que les éléments essentiels de motivation prévus à l'article 14, paragraphe 3, du règlement n° 17 lui ont été transmis.

    70. Se référant aux points 40 et 41 de l'arrêt Hoechst/Commission, précité, ledit gouvernement considère, en effet, que la Cour a précédemment aligné la portée de l'obligation de motivation au titre de l'article 190 du traité CE (devenu article 253 CE) sur celle prévue par l'article 14, paragraphe 3, du règlement n° 17 en précisant que la Commission doit indiquer l'objet et le but de la vérification, tout en ajoutant que «la Commission n'est pas tenue de communiquer au destinataire de la décision de vérification toutes les informations dont elle dispose à propos d'infractions présumées ni de procéder à une qualification juridique rigoureuse de ces infractions, mais qu'elle doit indiquer clairement les présomptions qu'elle entend vérifier».

    71. Le gouvernement français rappelle, à cet égard, que, dans l'affaire Hoechst/Commission, précitée, la Cour avait considéré à ce propos que la motivation de la décision de vérification pouvait être rédigée en «termes très généraux» sans que cela affecte sa légalité.

    72. Dans la pratique, les éléments qui viendraient à l'appui de la demande d'autorisation présentée au juge seraient ceux qui figurent dans la décision de la Commission, de sorte que la distinction entre ces deux actes paraît quelque peu artificielle au regard du contrôle de motivation opéré par le juge national.

    73. La jurisprudence Hoechst/Commission, précitée, ne permettrait cependant pas toujours au juge national de savoir sur la base de quels éléments il lui appartient de vérifier la proportionnalité des mesures de contrainte envisagées par rapport à l'objet de la vérification, comme en témoignerait, notamment, l'arrêt de renvoi. Selon le gouvernement français, les difficultés d'ordre pratique auxquelles sont ainsi confrontées les juridictions nationales rendent nécessaire une définition aussi précise que possible, si ce n'est exhaustive, de la portée de l'exigence de motivation relative à une décision de vérification.

    74. Cette motivation pourrait ainsi se décomposer en trois séries d'éléments. Tout d'abord, les éléments relatifs aux entreprises en cause (raison sociale et adresse de l'entreprise, adresse des locaux qui seront visités). Ensuite, ceux relatifs à la nature précise des pratiques suspectées (entente sur les prix, répartition de marchés, etc.), devant permettre au juge d'apprécier le champ de la vérification. L'information relative à l'éventuel caractère secret de ces pratiques devrait également être communiquée afin que le juge puisse tenir compte de cet élément dans l'appréciation de la proportionnalité des moyens de contrainte envisagés par rapport à l'objet de la vérification. De ce caractère secret, le juge pourrait, en effet, déduire que l'entreprise est suffisamment organisée pour laisser présumer une stratégie de dissimulation qui peut donner lieu à une opposition à la vérification. Enfin, une dernière série d'éléments ceux relatifs aux produits ou services pour lesquels l'existence de pratiques anticoncurrentielles est suspectée doit, ainsi qu'il ressort déjà de la jurisprudence de la Cour, figurer dans une décision de vérification.

    75. Le gouvernement du Royaume-Uni fait valoir que le juge national ne peut refuser d'accorder l'autorisation demandée au motif qu'il estime que la décision de vérification prise par la Commission n'est pas suffisamment motivée pour lui permettre de vérifier si elle est justifiée.

    76. En premier lieu, ledit gouvernement rappelle, à cet égard, qu'il est bien établi que les règles du droit national même celles du droit constitutionnel ne peuvent restreindre ou supprimer une obligation découlant du droit communautaire et qu'elles doivent être écartées dans la mesure où elles sont contraires à cette obligation .

    77. En second lieu, le même gouvernement souligne, comme le gouvernement français, que l'article 14, paragraphe 3, du règlement n° 17 fixe lui-même les éléments constitutifs de la motivation d'une décision ordonnant une vérification, parmi lesquels l'objet et le but de la vérification, et que la Commission est, en outre, tenue, selon les termes du point 41 de l'arrêt Hoechst/Commission, précité, d'indiquer clairement les présomptions qu'elle entend vérifier.

    78. Le contrôle de la base factuelle ou légale d'une décision de la Commission ordonnant une vérification relèverait, toutefois, de la compétence de la Cour.

    79. Le gouvernement allemand estime que le juge national peut refuser l'autorisation si la Commission, dans l'exposé des motifs de sa décision ou par la production de documents, ne mentionne pas de façon circonstanciée, en en indiquant la nature et le contenu, les informations dont elle dispose au sujet de l'entreprise concernée et qui fondent son soupçon d'une violation de l'article 85, paragraphe 1, du traité. La Commission n'est cependant pas tenue de produire des documents à titre de preuve, sous forme d'originaux ou de copies, ni de révéler l'identité d'éventuels informateurs. Mais le contrôle du juge national ne devrait pas se transformer en une coquille vide du fait, par exemple, d'un manque d'informations concrètes quant au fondement des soupçons de la Commission.

    80. Pour sa part, le gouvernement hellénique expose que, si une décision ordonnant une vérification ne mentionne pas l'objet, le but et des éléments de référence suffisants pour justifier la vérification dans les locaux d'une entreprise, et qu'elle ne permet pas à la juridiction nationale de constater la réunion des garanties prévues par le droit national, cette dernière a la faculté de refuser l'autorisation sollicitée.

    81. Le gouvernement italien considère que l'autorité nationale est tenue d'apprécier si les actes coercitifs ne sont pas arbitraires ou disproportionnés par rapport au but de la vérification et si l'opportunité de l'inspection transparaît du raisonnement suivi par la Commission dans sa décision, raisonnement nécessairement basé sur l'indication d'informations ou d'indices destinés à mettre en évidence l'objet et le but de la vérification (arrêt Hoechst/Commission, précité, point 29).

    82. Le gouvernement norvégien qui, comme le gouvernement allemand, se limite à répondre à la première question préjudicielle et qui vise donc l'ensemble des informations à fournir par la Commission à travers la décision et en complément de celle-ci estime qu'il incombe à la Commission de fournir une justification à première vue, c'est-à-dire qu'il est possible à l'instance nationale compétente d'exiger un minimum d'informations ou d'indices en vue de lui permettre d'examiner si les mesures de contrainte envisagées ne sont pas arbitraires ou excessives par rapport à l'objet de la vérification.

    83. Ledit gouvernement reconnaît cependant que les restrictions illégales à la concurrence sont souvent engagées en suivant des méthodes qui ne laissent pas beaucoup de traces. Les demandes d'information adressées à la Commission en ce qui concerne le fondement des soupçons qu'elle nourrit ne doivent donc pas être trop rigoureuses. Les informations disponibles ne constitueront normalement que des indications de la violation des règles de concurrence et cela devrait être suffisant pour déclencher une vérification. Il faut garder à l'esprit que la finalité même des vérifications effectuées dans les locaux d'entreprises est de rassembler des preuves qui normalement ne seront pas trouvées. Il serait illogique d'exiger que des preuves matérielles soient présentées à l'autorité nationale de contrôle avant qu'une véritable vérification n'ait lieu.

    84. Pour notre part, nous partageons entièrement ces dernières observations. Nous trouvons également que l'expression «justification à première vue» utilisée par le gouvernement norvégien est judicieuse mais, contrairement à ce gouvernement, nous considérons que cette justification doit résulter de la décision de la Commission et d'elle seule.

    85. Si l'on ne veut pas glisser vers un contrôle de la nécessité de la vérification par le juge national, ce dernier ne doit pas pouvoir exiger des explications complémentaires. Son rôle doit se limiter, comme l'exprime la Commission, «au seul contrôle des atteintes véritablement patentes aux droits des entreprises concernées. Il s'agit, en quelque sorte, d'un contrôle de l'erreur manifeste». À un autre endroit de ses observations, la Commission précise qu'il s'agit de ce qu'on appelle en droit français un «contrôle minimum».

    86. Nous voudrions cependant encore ajouter la précision suivante, qui devrait rencontrer, en partie au moins, les préoccupations des gouvernements allemand, italien et norvégien. Nous considérons, en effet, que, dans la mesure où la Commission est à même, sans dévoiler ses sources et sans causer des dommages à des tiers, de fournir des indications au sujet des indices sur lesquels elle se fonde, elle doit le faire.

    87. Nous illustrerons ce point de vue à l'aide de la décision en cause dans le litige au principal.

    88. Celle-ci contient les «éléments essentiels de motivation» définis à l'article 14, paragraphe 3, du règlement n° 17. En effet, elle décrit, de manière suffisamment précise, l'objet et le but de la vérification et elle indique «clairement les présomptions que la Commission entend vérifier» .

    89. Mais elle comporte également un élément additionnel qui n'avait pas son pendant dans la décision en cause dans l'arrêt Hoechst/Commission, précité , à savoir que «[l]a Commission dispose d'informations selon lesquelles les responsables de l'entreprise visée auraient tenu des réunions régulières avec des concurrents , au cours desquelles des parts du marché [...] auraient été allouées et des prix minimum convenus [...]».

    90. Plus loin, la décision de la Commission poursuit de la manière suivante: «La Commission dispose d'informations selon lesquelles les contacts en question avec des concurrents se seraient étendus aussi au glucono-delta-lactone. Il se serait agi, en particulier, de conversations bi- ou multilatérales, qui se seraient tenues souvent en marge (avant, après, ou lors des pauses) des réunions concernant le gluconate de sodium. Les participants auraient à cette occasion échangé des informations sur le marché, sur les prix du marché ainsi que sur la situation de la demande. [...]».

    91. La juridiction de renvoi déclarant, dans sa deuxième question, que la décision de la Commission «n'est pas suffisamment motivée et ne [...] permet pas au [juge national] de vérifier, de façon concrète, le bien-fondé de la demande qui lui est soumise [...]», nous sommes en droit de supposer que la Cour de cassation estime que la Commission aurait dû insérer dans sa décision des indications supplémentaires au sujet de la date ou de la fréquence de ces réunions, et sur les raisons qui ont l'amenée à penser que les mesures anticoncurrentielles visées dans ladite décision ont effectivement été discutées et vraisemblablement adoptées au cours de ces réunions.

    92. Or, ceci serait de nature à obliger la Commission à dévoiler, dans une certaine mesure au moins, l'identité de ses informateurs, lesquels seront le plus souvent des employés ou d'anciens employés de l'une des entreprises faisant partie de l'entente ou bien même les responsables de l'une des ces entreprises désirant bénéficier de «mesures de clémence» de la part de la Commission.

    93. En revanche, si la Commission avait, comme l'indique le gouvernement norvégien, constaté sur le marché des changements de prix quasiment parallèles opérés par tous les fabricants du secteur, ou si les industries utilisatrices des produits en question avaient, comme ce fut le cas à propos de l'entente dans le secteur du carton, déposé auprès de la Commission une plainte à laquelle elles avaient elles-mêmes assuré une publicité dans la presse, il n'y aurait, évidemment, aucune raison pour que celle-ci n'en fasse pas état dans sa décision. Mais tel n'est le cas que dans des situations exceptionnelles.

    94. Nous défendons donc fermement le point de vue selon lequel, dans le texte de sa décision, la Commission doit, certes, indiquer clairement les présomptions qu'elle entend vérifier, mais ne doit les étayer par des indices que dans la mesure où la mention de ceux-ci n'est pas de nature à dévoiler ses sources d'information ou à causer du tort à des tiers.

    95. Dès lors, il sera inévitable que dans beaucoup de cas la Commission soit obligée de se borner à dire «qu'il résulte des informations dont elle dispose» que l'entreprise en cause a vraisemblablement participé à l'adoption de mesures anticoncurrentielles de tel ou tel type pour tels ou tels produits.

    96. Ceci dit, la Commission pourrait, par mesure de courtoisie, répondre à d'éventuelles questions complémentaires du juge national à condition que cela puisse se faire sous le sceau du secret le plus absolu. Mais, comme l'a rappelé la Commission à l'audience, en France en tout cas, la communication des documents qui ont été montrés au juge ne peut pas être refusée aux parties au cours du procès en cassation. De plus, nous croyons pouvoir déduire des arrêts de la Cour de cassation que, dans son ordonnance, le président du tribunal de grande instance doit résumer toutes les déclarations orales faites devant lui, qui ont contribué à justifier, à ses yeux, l'octroi de l'autorisation de perquisitionner.

    97. Venons-en maintenant au second volet du rôle du juge national, à savoir le contrôle du déroulement de la procédure de vérification elle-même.

    98. Pour étayer sa thèse, Roquette a beaucoup insisté sur deux passages de l'arrêt Hoechst/Commission, précité, figurant au point 35 de celui-ci, rédigés comme suit:

    «La Commission doit veiller à ce que l'instance compétente en vertu du droit national dispose de tous les éléments nécessaires pour lui permettre d'exercer le contrôle qui lui est propre».

    «il entre dans les pouvoirs de l'instance nationale d'examiner, après avoir constaté l'authenticité de la décision de vérification, si les mesures de contrainte envisagées ne sont pas arbitraires ou excessives par rapport à l'objet de la vérification et de veiller au respect des règles de son droit national dans le déroulement de ces mesures».

    99. Quant au premier passage, celui relatif aux «éléments» dont l'instance nationale doit disposer, il est suivi immédiatement par la phrase «[i]l importe de souligner que cette instance qu'elle soit judiciaire ou non ne saurait, à cette occasion, substituer sa propre appréciation du caractère nécessaire des vérifications ordonnées à celle de la Commission, dont les évaluations de fait et de droit ne sont soumises qu'au contrôle de légalité de la Cour de justice». Il résulte de la succession de ces deux phrases que les «éléments» à fournir à l'instance nationale ne sauraient être constitués par l'ensemble des indices et des informations confidentielles qui sont en possession de la Commission, ce qui est de toute façon exclu par le point 41 de l'arrêt Hoechst/Commission, précité. Ces éléments ne peuvent donc être que ceux nécessaires à la juridiction nationale pour exercer sa mission propre, définie au point 34 dudit arrêt et qui est celle de veiller au respect «des garanties procédurales prévues [...] par le droit national».

    100. Or, par «garanties procédurales», la Cour a manifestement visé les règles nationales désignant le juge compétent et la forme sous laquelle celui-ci doit adopter sa décision. Il peut aussi s'agir de préciser l'adresse des différents locaux de l'entreprise où la vérification doit s'effectuer, la date et les heures auxquelles elle aura lieu, l'identité des agents de la Commission et des agents nationaux qui y procéderont ainsi que d'autres détails pratiques de ce type qui pourraient être exigés par le droit national.

    101. Quant au second passage cité par Roquette, il concerne, comme le gouvernement du Royaume-Uni et la Commission l'ont signalé à juste titre à l'audience, uniquement la manière dont les mesures de contrainte pourront être exercées. Le juge national pourra, à cet effet, si son droit le permet ou l'exige, assister lui-même à la vérification. Il pourra enjoindre aux agents de la police judiciaire qui accompagneront les agents de la Commission de ne forcer les serrures de portes, d'armoires ou de véhicules que si les employés de l'entreprise refusent de les ouvrir, car sinon il s'agirait de mesures de contrainte arbitraires ou excessives. Comme l'a indiqué le gouvernement du Royaume-Uni, le juge national pourra rappeler que l'entreprise a le droit de faire venir son conseiller juridique (sans qu'il puisse en résulter un délai pouvant servir à détruire des preuves) et que les employés ont le droit de ne pas faire des déclarations ou de fournir des réponses de nature à incriminer l'entreprise.

    102. En résumé, il incombe au juge national de veiller à ce que des mesures de contrainte physique ne soient pas utilisées quand l'attitude des responsables de l'entreprise ne le justifie pas et, d'une façon générale, à ce que la vérification se déroule selon les règles en vigueur dans l'État en question.

    Conclusions

    103. Sur la base de toutes les considérations qui précèdent, nous vous proposons de donner aux deux questions préjudicielles posées par la Cour de cassation la réponse unique suggérée par la Commission en déclarant que:

    «Compte tenu du contrôle juridictionnel exercé sur les décisions de vérification, adoptées par la Commission des Communautés européennes sur la base de l'article 14 du règlement n° 17 du Conseil, du 6 février 1962, premier règlement d'application des articles 85 et 86 du traité, par la Cour de justice des Communautés européennes, laquelle reconnaît le principe général de protection de toute personne, physique ou morale, contre les interventions arbitraires ou disproportionnées de la puissance publique, l'article 14, paragraphe 6, du règlement n° 17 doit être interprété en ce sens que l'instance nationale compétente pour statuer sur la demande d'assistance formulée par la Commission au titre dudit article 14, paragraphe 6:

    ne peut exiger la communication des éléments ou indices sur lesquels la Commission s'est basée pour adopter la décision de vérification, ni vérifier la réalité et la pertinence de ces éléments;

    ne peut refuser d'accorder l'autorisation sollicitée que dans l'hypothèse où l'objet et le but de la vérification ne sont pas indiqués dans la décision de la Commission, ou sont décrits de manière manifestement trop imprécise pour lui permettre d'exercer le contrôle de proportionnalité qui lui est imparti.»

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