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Document 61994TO0134
Order of the Court of First Instance (Second Chamber, extended composition) of 19 June 1996. # NMH Stahlwerke GmbH, Eurofer ASBL, Arbed SA, Cockerill-Sambre SA, Thyssen Stahl AG, Unimétal - Société française des aciers longs SA, Krupp Hoesch Stahl AG, Preussag Stahl AG, British Steel plc, Siderurgica Aristrain Madrid SL and Empresa Nacional Siderurgica SA v Commission of the European Communities. # Procedure - Article 23 of the Protocol on the Statute of the Court of Justice of the ECSC - Defendant institution - Documents relating to the case - Production - Confidentiality. # Joined cases T-134/94, T-136/94, T-137/94, T-138/94, T-141/94, T-145/94, T-147/94, T-148/94, T-151/94, T-156/94 and T-157/94.
Ordonnance du Tribunal de première instance (deuxième chambre élargie) du 19 juin 1996.
NMH Stahlwerke GmbH, Eurofer ASBL, Arbed SA, Cockerill-Sambre SA, Thyssen Stahl AG, Unimétal - Société française des aciers longs SA, Krupp Hoesch Stahl AG, Preussag Stahl AG, British Steel plc, Siderurgica Aristrain Madrid SL et Empresa Nacional Siderurgica SA contre Commission des Communautés européennes.
Procédure - Article 23 du protocole sur le statut (CECA) de la Cour - Institution défenderesse - Pièces relatives à l'affaire - Production - Confidentialité.
Affaires T-134/94, T-136/94, T-137/94, T-138/94, T-141/94, T-145/94, T-147/94, T-148/94, T-151/94, T-156/94 et T-157/94.
Ordonnance du Tribunal de première instance (deuxième chambre élargie) du 19 juin 1996.
NMH Stahlwerke GmbH, Eurofer ASBL, Arbed SA, Cockerill-Sambre SA, Thyssen Stahl AG, Unimétal - Société française des aciers longs SA, Krupp Hoesch Stahl AG, Preussag Stahl AG, British Steel plc, Siderurgica Aristrain Madrid SL et Empresa Nacional Siderurgica SA contre Commission des Communautés européennes.
Procédure - Article 23 du protocole sur le statut (CECA) de la Cour - Institution défenderesse - Pièces relatives à l'affaire - Production - Confidentialité.
Affaires T-134/94, T-136/94, T-137/94, T-138/94, T-141/94, T-145/94, T-147/94, T-148/94, T-151/94, T-156/94 et T-157/94.
Recueil de jurisprudence 1996 II-00537
ECLI identifier: ECLI:EU:T:1996:85
Ordonnance du Tribunal de première instance (deuxième chambre élargie) du 19 juin 1996. - NMH Stahlwerke GmbH, Eurofer ASBL, Arbed SA, Cockerill-Sambre SA, Thyssen Stahl AG, Unimétal - Société française des aciers longs SA, Krupp Hoesch Stahl AG, Preussag Stahl AG, British Steel plc, Siderurgica Aristrain Madrid SL et Empresa Nacional Siderurgica SA contre Commission des Communautés européennes. - Procédure - Article 23 du protocole sur le statut (CECA) de la Cour - Institution défenderesse - Pièces relatives à l'affaire - Production - Confidentialité. - Affaires T-134/94, T-136/94, T-137/94, T-138/94, T-141/94, T-145/94, T-147/94, T-148/94, T-151/94, T-156/94 et T-157/94.
Recueil de jurisprudence 1996 page II-00537
Sommaire
Parties
Motifs de l'arrêt
Dispositif
Procédure - CECA - Dossier transmis par une institution à la juridiction communautaire en vertu de l'article 23 du statut de la Cour de justice - Droit d'accès - Accès aux documents internes
[Statut (CECA) de la Cour de justice, art. 23]
L'article 23 du statut (CECA) de la Cour de justice, concernant la transmission par une des institutions de la Communauté à la juridiction communautaire des pièces relatives à l'affaire portée devant celle-ci, a pour objet de permettre au juge communautaire d'exercer son contrôle de légalité de la décision attaquée, dans le respect des droits de la défense, et non d'assurer un accès inconditionnel et illimité de toutes les parties au dossier administratif.
Les pièces relatives à l'affaire, transmises au titre de l'article 23 du statut de la Cour, qui restent totalement étrangères à la procédure et ne sont pas prises en considération par le Tribunal pour le jugement de l'affaire doivent être distinguées du dossier de l'affaire, établi conformément à l'article 5, paragraphe 1, des instructions au greffier du Tribunal, accessible aux parties aux conditions prévues à l'article 5, paragraphe 3, desdites instructions.
En particulier, s'agissant des documents internes relatifs au déroulement de la procédure administrative et à l'élaboration d'une décision de la Commission en matière d'application des règles de concurrence du traité, ceux-ci ne sont exceptionnellement versés au dossier de l'affaire, et donc portés à la connaissance de la partie requérante, que dans la mesure où ils apparaissent à première vue contenir des éléments de preuve pertinents de nature à étayer les indices déjà avancés par elle, de façon sérieuse, ou s'ils sont nécessaires pour permettre au Tribunal, s'il y a lieu, de vérifier d'office que la Commission n'a pas méconnu les devoirs que lui impose le traité. Cette restriction d'accès aux documents internes est justifiée par la nécessité d'assurer le bon fonctionnement de la Commission dans le domaine de la répression des infractions aux règles de concurrence du traité.
Le contrôle de légalité du Tribunal s'exerce sur le seul acte administratif final et non sur ses projets ou documents préparatoires.
Dans l' affaire T-134/94,
NMH Stahlwerke GmbH, ayant son siège social à Sulzbach-Rosenberg (Allemagne), représentée par Mes Paul B. Schaeuble, Siegfried Jackermeier et Reinhard E. Ingerl, avocats, Munich, ayant élu domicile à Luxembourg en l' étude de Me Ernest Arendt, 8-10, rue Mathias Hardt,
partie requérante,
contre
Commission des Communautés européennes, représentée initialement par MM. Julian Currall, Norbert Lorenz, membres du service juridique, et Géraud de Bergues, fonctionnaire national détaché auprès de la Commission, en qualité d' agents, puis par M. Currall, assisté de Me Heinz-Joachim Freund, avocat, Francfort-sur-le-Main, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M. Carlos Gómez de la Cruz, membre du service juridique, Centre Wagner, Kirchberg,
partie défenderesse,
dans l' affaire T-136/94,
Eurofer ASBL, ayant son siège social à Bruxelles, représentée par Me Norbert Koch, avocat, Bruxelles, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de Eurofer ASBL, GISL, 17 à 25, avenue de la Liberté,
partie requérante,
contre
Commission des Communautés européennes, représentée initialement par MM. Julian Currall, Norbert Lorenz, membres du service juridique, et Géraud de Bergues, fonctionnaire national détaché auprès de la Commission, en qualité d' agents, puis par M. Currall, assisté de Me Heinz-Joachim Freund, avocat, Francfort-sur-le-Main, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M. Carlos Gómez de la Cruz, membre du service juridique, Centre Wagner, Kirchberg,
partie défenderesse,
dans l' affaire T-137/94,
ARBED SA, ayant son siège social à Luxembourg, représentée par Me Alexandre Vandencasteele, avocat au barreau de Bruxelles, ayant élu domicile à Luxembourg en l' étude de Me Paul Ehmann, 19, avenue de la Liberté,
partie requérante,
contre
Commission des Communautés européennes, représentée par M. Julian Currall, membre du service juridique, et, initialement, par M. Géraud de Bergues puis par M. Guy Charrier, fonctionnaires nationaux détachés auprès de la Commission, en qualité d' agents, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M. Carlos Gómez de la Cruz, membre du service juridique, Centre Wagner, Kirchberg,
partie défenderesse,
dans l' affaire T-138/94,
Cockerill-Sambre SA, ayant son siège social à Bruxelles, représentée par Me Alexandre Vandencasteele, avocat au barreau de Bruxelles, ayant élu domicile à Luxembourg en l' étude de Me Ernest Arendt, 8-10, rue Mathias Hardt,
partie requérante,
contre
Commission des Communautés européennes, représentée par M. Julian Currall, membre du service juridique, et, initialement, par M. Géraud de Bergues puis par M. Guy Charrier, fonctionnaires nationaux détachés auprès de la Commission, en qualité d' agents, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M. Carlos Gómez de la Cruz, membre du service juridique, Centre Wagner, Kirchberg,
partie défenderesse,
dans l' affaire T-141/94,
Thyssen Stahl AG, ayant son siège social à Duisburg (Allemagne), représentée par Mes Joachim Sedemund et Frank Montag, avocats, Cologne, ayant élu domicile à Luxembourg en l' étude de Me Aloyse May, 31, Grand-rue,
partie requérante,
contre
Commission des Communautés européennes, représentée initialement par MM. Julian Currall, Norbert Lorenz, membres du service juridique, et Géraud de Bergues, fonctionnaire national détaché auprès de la Commission, en qualité d' agents, puis par M. Currall, assisté de Me Heinz-Joachim Freund, avocat, Francfort-sur-le-Main, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M. Carlos Gómez de la Cruz, membre du service juridique, Centre Wagner, Kirchberg,
partie défenderesse,
dans l' affaire T-145/94,
Unimétal ° Société française des aciers longs SA, ayant son siège social à Rombas (France), représentée par Mes Antoine Winckler et Caroline Levi, avocats au barreau respectivement de Paris et de Bruxelles, ayant élu domicile à Luxembourg en l' étude de Mes Elvinger et Hoss, 15, Côte d' Eich,
partie requérante,
contre
Commission des Communautés européennes, représentée par M. Julian Currall, membre du service juridique, et, initialement, par M. Géraud de Bergues puis par M. Guy Charrier, fonctionnaires nationaux détachés auprès de la Commission, en qualité d' agents, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M. Carlos Gómez de la Cruz, membre du service juridique, Centre Wagner, Kirchberg,
partie défenderesse,
dans l' affaire T-147/94,
Krupp Hoesch Stahl AG, ayant son siège social à Dortmund (Allemagne), représentée par Mes Otfried Lieberknecht, Karlheinz Moosecker, Gerhard Wiedemann et Martin Klusmann, avocats, Duesseldorf, ayant élu domicile à Luxembourg en l' étude de Me Axel Bonn, 62, avenue Guillaume,
partie requérante,
contre
Commission des Communautés européennes, représentée initialement par MM. Julian Currall, Norbert Lorenz, membres du service juridique, et Géraud de Bergues, fonctionnaire national détaché auprès de la Commission, en qualité d' agents, puis par M. Currall, assisté de Me Heinz-Joachim Freund, avocat, Francfort-sur-le-Main, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M. Carlos Gómez de la Cruz, membre du service juridique, Centre Wagner, Kirchberg,
partie défenderesse,
dans l' affaire T-148/94,
Preussag Stahl AG, ayant son siège social à Salzgitter (Allemagne), représentée par Mes Horst Satzky, Bernhard M. Maassen, Martin Heidenhain, avocats, Bruxelles, et Constantin Frick, avocat, Brême, ayant élu domicile à Luxembourg en l' étude de Me René Faltz, 6, rue Heine,
partie requérante,
contre
Commission des Communautés européennes, représentée initialement par MM. Julian Currall, Norbert Lorenz, membres du service juridique, et Géraud de Bergues, fonctionnaire national détaché auprès de la Commission, en qualité d' agents, puis par M. Currall, assisté de Me Heinz-Joachim Freund, avocat, Francfort-sur-le-Main, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M. Carlos Gómez de la Cruz, membre du service juridique, Centre Wagner, Kirchberg,
partie défenderesse,
dans l' affaire T-151/94,
British Steel plc, ayant son siège social à Londres, représentée par MM. Philip G. H. Collins et John E. Pheasant, solicitors, Bruxelles, ayant élu domicile à Luxembourg en l' étude de Me Marc Loesch, 11, rue Goethe,
partie requérante,
contre
Commission des Communautés européennes, représentée par M. Julian Currall, membre du service juridique, et, initialement, par M. Géraud de Bergues, fonctionnaire national détaché auprès de la Commission, en qualité d' agents, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M. Carlos Gómez de la Cruz, membre du service juridique, Centre Wagner, Kirchberg,
partie défenderesse,
dans l' affaire T-156/94,
Siderurgica Aristrain Madrid, SL, ayant son siège social à Madrid, représentée par Mes Antonio Creus et Xavier Ruiz Calzado, avocats au barreau de Barcelone,
partie requérante,
contre
Commission des Communautés européennes, représentée initialement par MM. Julian Currall, Francisco Enrique González Díaz, membres du service juridique, et Géraud de Bergues, fonctionnaire national détaché auprès de la Commission, en qualité d' agents, puis par MM. Currall et González Díaz, assistés de Me Ricardo Garcia Vicente, avocat au barreau de Madrid, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M. Carlos Gómez de la Cruz, membre du service juridique, Centre Wagner, Kirchberg,
partie défenderesse,
et dans l' affaire T-157/94,
Empresa Nacional Siderurgica, SA (Ensidesa), ayant son siège social à Avilés (Espagne), représentée par Mes Santiago Martinez Lage et Jaime Perez-Bustamante Koester, avocats au barreau de Madrid, ayant élu domicile à Luxembourg en l' étude de Me Aloyse May, 31, Grand-rue,
partie requérante,
contre
Commission des Communautés européennes, représentée initialement par MM. Julian Currall, Francisco Enrique González Díaz, membres du service juridique, et Géraud de Bergues, fonctionnaire national détaché auprès de la Commission, en qualité d' agents, puis par MM. Currall et González Díaz, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M. Carlos Gómez de la Cruz, membre du service juridique, Centre Wagner, Kirchberg,
partie défenderesse,
ayant pour objet principal l' annulation de la décision 94/215/CECA de la Commission, du 16 février 1994, relative à une procédure d' application de l' article 65 du traité CECA concernant des accords et pratiques concertées impliquant des producteurs européens de poutrelles (JO L 116, p. 1),
LE TRIBUNAL DE PREMI RE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (deuxième chambre élargie),
composé de MM. H. Kirschner, président, B. Vesterdorf, C. W. Bellamy, A. Kalogeropoulos et A. Potocki, juges,
greffier: M. H. Jung,
rend la présente
Ordonnance
1 Par décision 94/215/CECA, du 16 février 1994, relative à une procédure d' application de l' article 65 du traité CECA concernant des accords et pratiques concertées impliquant des producteurs européens de poutrelles (JO L 116, p. 1, ci-après "Décision"), la Commission a constaté plusieurs infractions à l' article 65 du traité CECA, consistant notamment en la fixation de prix, en la répartition de marchés et en l' échange d' informations confidentielles, et a infligé des amendes à quatorze entreprises sidérurgiques actives dans ce secteur.
2 Entre le 31 mars et le 18 avril 1994, les onze entreprises requérantes dans les affaires T-134/94 (ci-après "NMH"), T-136/94 (ci-après "Eurofer"), T-137/94 (ci-après "ARBED"), T-138/94 (ci-après "Cockerill-Sambre"), T-141/94 (ci-après "Thyssen"), T-145/94 (ci-après "Unimétal"), T-147/94 (ci-après "Krupp Hoesch"), T-148/94 (ci-après "Preussag"), T-151/94 (ci-après "British Steel"), T-156/94 (ci-après "Aristrain") et T-157/94 (ci-après "Ensidesa") ont introduit, chacune pour ce qui la concerne, un recours tendant, en ordre principal, à l' annulation de cette Décision.
3 Suite à certaines demandes formulées, notamment, par lettres de la requérante Aristrain des 7 septembre et 18 octobre 1994 dans l' affaire T-156/94, la partie défenderesse a été invitée par le Tribunal, par lettre du greffier du 25 octobre 1994, à satisfaire aux obligations qui lui incombent en vertu de l' article 23 du protocole sur le statut (CECA) de la Cour de justice [ci-après "article 23 du statut (CECA) de la Cour"]. La défenderesse a déposé au greffe, sous couvert d' une lettre du 24 novembre 1994, un dossier composé de 65 classeurs et comprenant 10 563 pièces numérotées, outre le texte de la Décision et de la communication des griefs dans les différentes versions linguistiques faisant foi (ci-après "dossier transmis au Tribunal").
4 Dans sa lettre de transmission des pièces au Tribunal du 24 novembre 1994, la partie défenderesse a fait valoir que:
"Certaines de ces pièces peuvent contenir des secrets d' affaires. D' autres sont des documents internes au sens de la jurisprudence du Tribunal. Il s' agit, en tout état de cause, pour ce qui est des documents obtenus par la Commission auprès des entreprises concernées, de pièces couvertes par l' obligation de confidentialité prévue à l' article 47 CECA. En conséquence, elles ne sont pas accessibles, dans leur totalité, à toutes les parties à la procédure. La Commission a établi, aux fins de la procédure administrative, une soi-disant 'liste d' accès' qui indiquait quelles pièces étaient accessibles, en tout ou en partie, et à quelles parties. Cette liste, dont copie est jointe en annexe, concerne toute la procédure devant la Commission jusqu' au 11 janvier 1993, date de l' audition administrative."
5 Au titre des mesures d' organisation de la procédure prévues par l' article 64, paragraphe 2, de son règlement de procédure, le Tribunal (troisième chambre élargie) a tenu avec les parties, le 14 mars 1995, une réunion informelle au cours de laquelle ont notamment été évoqués les problèmes que pose, en l' espèce, l' accès demandé par la plupart des requérantes au dossier transmis au Tribunal, compte tenu du caractère éventuellement confidentiel de certaines pièces qu' il contient.
6 A l' issue de cette réunion informelle du 14 mars 1995, le Tribunal (troisième chambre élargie), par lettre du greffier du 30 mars 1995, s' est adressé aux parties dans les termes suivants:
"1. En ce qui concerne les problèmes que posent, au vu de la confidentialité éventuelle de certaines pièces, l' accès au dossier administratif produit par la Commission, en vertu de l' article 23 du statut CECA, et l' utilisation de ce dossier par le Tribunal dans le souci de respecter pleinement les principes du contradictoire d' économie de procédure et de bonne administration de la justice, les parties sont invitées à préciser par écrit, pour le 31 mai 1995, délai de distance inclus, leurs positions sur les points suivants:
a) S' agissant des pièces du dossier administratif classées par la Commission comme confidentielles dans l' intérêt de l' une des parties requérantes, les parties requérantes sont priées de confirmer si elles acceptent, pour tout ou partie des documents, de lever réciproquement la confidentialité, de sorte que ces documents pourront être communiqués à toutes les parties requérantes.
Dans l' hypothèse où l' une des parties requérantes souhaiterait maintenir, à l' égard des autres parties requérantes, la confidentialité de certaines pièces, elle est priée d' indiquer spécifiquement la pièce en question, ou l' information qui doit rester confidentielle, et de motiver cette demande de confidentialité.
Dans l' hypothèse où la Commission estimerait devoir s' opposer, pour certaines de ces pièces, à une levée réciproque de la confidentialité par les parties requérantes, elle est invitée à indiquer spécifiquement les pièces ou les informations contenues dans ces pièces auxquelles se réfère son opposition.
b) S' agissant des pièces du dossier administratif classées par la Commission comme confidentielles dans l' intérêt de tierces personnes qui ne sont pas parties aux procédures en cause devant le Tribunal, la Commission est priée de réexaminer le bien-fondé de ce classement et, le cas échéant, de contacter ces tierces personnes, en vue d' une éventuelle levée de la confidentialité à l' égard des parties requérantes.
La Commission est priée d' informer les parties requérantes quelles sont, parmi ces pièces, celles qui, selon elle, peuvent leur être communiquées et celles qui continuent, le cas échéant, à être classées comme confidentielles, en précisant les motifs de cette confidentialité et en fournissant une description de la nature et du contenu de chacun des documents concernés.
Au vu de ce qui précède, les parties requérantes sont priées de préciser si elles confirment leurs demandes tendant à avoir accès à certaines de ces pièces qui, selon la Commission, continuent à être classées comme confidentielles.
La Commission et les parties requérantes sont invitées à indiquer au Tribunal, dans le même délai, soit si elles sont d' accord sur l' étendue de l' accès des parties requérantes aux pièces classées comme confidentielles dans l' intérêt de tierces personnes, soit les points concrets d' un éventuel désaccord qui subsisterait afin de mettre le Tribunal en mesure de statuer sur le caractère pertinent et confidentiel de chacune des pièces concernées.
c) S' agissant des pièces classées par la Commission comme confidentielles en tant que documents internes, la Commission est invitée à fournir au Tribunal, dans le même délai, une liste des documents internes, avec l' indication de la nature de chaque document, une brève description de son contenu, qui doit être suffisamment détaillée pour permettre aux parties requérantes d' apprécier la pertinence d' une demande d' accès à ces documents pour assurer leur défense. La Commission est également priée d' indiquer si elle se voit en mesure de lever la confidentialité pour certains de ses documents internes.
Dans le même délai, les parties requérantes et la Commission peuvent, si elles le souhaitent, présenter par écrit leurs observations en droit sur les principes qui régissent la confidentialité de documents internes, dans le contexte de l' application de l' article 23 du statut CECA et de l' accès au dossier de procédure de la juridiction communautaire.
La liste des documents internes fournie par la Commission conformément à ce qui précède sera ensuite communiquée aux parties requérantes, pour que celles-ci puissent indiquer et motiver, dans un délai qui sera fixé ultérieurement, quels sont les documents internes auxquels elles persistent à demander accès.
Les prises de position susmentionnées des parties devraient mettre le Tribunal en mesure de prendre une décision sur le traitement à accorder à toutes les pièces du dossier administratif dont le caractère confidentiel ou la pertinence pour la défense des parties requérantes resterait contestée. Les pièces dont le Tribunal reconnaîtrait le caractère confidentiel seraient retirées du dossier du Tribunal.
La Commission sera invitée, en fonction des résultats des différentes étapes de la procédure ci-dessus indiquée, à réorganiser son dossier administratif, de manière à permettre au Tribunal de donner aux parties requérantes accès au dossier qu' utilisera le Tribunal."
7 Dans leurs réponses à la lettre du Tribunal du 30 mars 1995, les parties requérantes et la partie défenderesse ont été en mesure de s' accorder sur le principe d' une levée réciproque de la confidentialité des documents émanant des requérantes elles-mêmes, sous réserve de quelques exceptions, dont il sera question ci-après, soulevées soit par la Commission, soit par certaines requérantes. De même, en ce qui concerne les documents émanant d' entreprises tierces, la Commission et les tiers auxquels elle s' est adressée ont généralement marqué leur accord sur une levée de la confidentialité à l' égard des requérantes, ici aussi sous réserve de quelques exceptions dont il sera question ci-après. La partie défenderesse a par ailleurs fourni une liste plus détaillée de ses documents internes, laquelle a été transmise aux requérantes par les soins du greffe, tout en réitérant son opposition de principe à la divulgation de ces documents auxdites requérantes. Enfin, les parties requérantes ont soumis des observations détaillées, en droit, sur la portée de l' article 23 du statut (CECA) de la Cour et sur leur droit d' accès au dossier transmis au Tribunal, notamment en ce qui concerne les documents internes de la Commission.
8 Compte tenu de l' ensemble de ces réponses, le Tribunal a, par une nouvelle lettre du greffier du 21 juillet 1995 (25 juillet 1995 dans l' affaire T-151/94), invité plus particulièrement les parties requérantes à se prononcer, de façon motivée, sur le maintien éventuel de leur demande d' accès, d' une part, aux pièces du dossier à l' égard desquelles une demande de traitement confidentiel a été présentée soit par l' une des requérantes elles-mêmes, soit par la Commission, soit encore par une tierce partie, et, d' autre part, aux pièces du dossier interne de la Commission, en spécifiant les documents visés par cette demande et en la motivant brièvement. Les requérantes ont répondu à cette demande par lettres des 6 septembre 1995 (affaire T-157/94), 11 septembre 1995 (affaire T-156/94), 13 septembre 1995 (affaires T-137/94, T-138/94 et T-151/94), 14 septembre 1995 (affaire T-147/94) et 15 septembre 1995 (affaires T-134/94, T-141/94, T-145/94 et T-148/94).
9 Entre-temps, la requérante British Steel s' est plainte, dans une lettre au greffe datée du 14 juillet 1995, de ce que la Commission n' aurait pas pris contact avec tous les tiers dont le nom apparaît dans l' inventaire des pièces du dossier, contrairement à ce à quoi elle s' était engagée à l' issue de la réunion informelle des parties du 14 mars 1995. Les tiers non contactés seraient, d' une part, les entreprises ou organismes privés Centre professionnel des statistiques de l' acier (ci-après "CPS"), Darlington & Simpson, DSRM, Inter Trade, LME, Steelinter, UES et Valor, et, d' autre part, certaines administrations ou autorités des États membres ou de pays tiers en charge des affaires de concurrence, et plus particulièrement le Bundeskartellamt, l' Office of Fair Trading, le Prisdirektoratet, l' US Department of Commerce, la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, ainsi que le représentant permanent du grand-duché de Luxembourg auprès des Communautés européennes.
10 Après avoir invité la partie défenderesse à commenter ladite lettre de British Steel du 14 juillet 1995, ce qu' elle a fait par lettre du 7 septembre 1995, le Tribunal a, par lettre du greffier datée du 1er avril 1996, prié la Commission de prendre contact avec les parties tierces CPS, Darlington & Simpson, DSRM, Inter Trade, LME, Steelinter, UES et Valor, afin de vérifier si ces parties acceptent la levée de la confidentialité des documents les concernant. Par lettre du 15 mai 1996, la défenderesse a signalé que les tiers concernés ne maintenaient pas leur demande de traitement confidentiel vis-à-vis des requérantes, en joignant copie de leurs réponses respectives.
Sur le droit d' accès des requérantes au dossier transmis au Tribunal au titre de l' article 23 du statut (CECA) de la Cour
11 Il importe de rappeler que, aux termes mêmes de l' article 23 du statut (CECA) de la Cour, applicable à la procédure devant le Tribunal en vertu de l' article 5 de la décision 88/591/CECA, CEE, Euratom du Conseil, du 24 octobre 1988, instituant un tribunal de première instance des Communautés européennes (JO L 319, p. 1), telle que modifiée par la décision 93/350/Euratom, CECA, CEE du Conseil, du 8 juin 1993 (JO L 144, p. 21), et par la décision 94/149/CECA/CE du Conseil, du 7 mars 1994 (JO L 66, p. 29), lorsqu' un recours est formé contre une décision prise par une des institutions de la Communauté, cette institution est tenue de transmettre à la Cour toutes les pièces relatives à l' affaire qui est portée devant elle.
12 Il y a toutefois lieu de rejeter d' emblée l' argument de certaines requérantes, selon lequel l' article 23 du statut (CECA) de la Cour, avec le principe du caractère contradictoire des débats judiciaires, impliquerait un droit d' accès inconditionnel et illimité de toutes les parties au dossier ainsi transmis par l' institution concernée à la juridiction communautaire.
13 En effet, le traité CECA prend soin d' assurer, en son article 47, le respect du caractère confidentiel des informations qui, par leur nature, sont couvertes par le secret professionnel, et notamment du secret d' affaires, qui constitue la protection des intérêts légitimes des entreprises et la contrepartie de l' obligation de livrer des informations à la Commission (arrêt de la Cour du 10 juillet 1985, Wirtschaftsvereinigung Eisen- und Stahlindustrie/Commission, 27/84, Rec. p. 2385, point 15).
14 Par conséquent, il est nécessaire, afin de résoudre le problème soulevé par les présents recours, de mettre en balance les exigences de l' article 23 du statut (CECA) de la Cour, et du caractère contradictoire du débat judiciaire, avec celles de la protection du secret d' affaires des entreprises individuelles. La recherche d' un tel équilibre ne peut être assurée que par un examen concret de la situation individuelle des entreprises concernées (voir l' arrêt Wirtschaftsvereinigung Eisen- und Stahlindustrie/Commission, précité, point 16; voir également, dans le cadre du traité CE, l' ordonnance du Tribunal du 15 novembre 1990, Rhône-Poulenc e.a./Commission, T-1/89, T-2/89, T-3/89, T-4/89 et T-6/89 à T-15/89, Rec. p. II-637).
15 Il convient en outre de relever dès ce stade que, saisie d' une demande de production de documents au titre de l' article 23 du statut (CECA), la Cour a reconnu à l' institution en cause le droit de demander elle aussi, fût-ce à titre exceptionnel, le respect du caractère confidentiel de certaines informations la concernant (voir l' arrêt de la Cour du 21 décembre 1954, Italie/Haute Autorité, 2/54, Rec. p. 73, 103 et 104).
16 Compte tenu de ce qui précède, Le Tribunal estime qu' il convient en l' espèce de statuer sur la demande d' accès des requérantes au dossier qui lui a été transmis en distinguant entre les trois catégories de documents mentionnées dans les lettres du greffier des 30 mars 1995 et 21/25 juillet 1995, à savoir: (i) les pièces classées par la Commission comme confidentielles dans l' intérêt de l' une des parties requérantes; (ii) les pièces classées par la Commission comme confidentielles dans l' intérêt de tierces personnes qui ne sont pas parties aux présentes procédures, et (iii) les pièces classées par la Commission comme confidentielles en tant que documents internes. Chacune de ces trois catégories soulève en effet des problèmes de confidentialité spécifiques, qui sont de nature à justifier, le cas échéant, certaines restrictions du droit d' accès des requérantes au dossier transmis au Tribunal.
Sur le droit d' accès des requérantes aux pièces du dossier émanant des requérantes elles-mêmes, et classées comme confidentielles dans leur propre intérêt
Position des parties
17 Les parties requérantes et la partie défenderesse s' accordent sur le principe du libre accès des premières aux pièces du dossier transmis au Tribunal provenant de l' une ou l' autre d' entre elles, sous réserve de quelques exceptions soulevées soit par la Commission, soit par certaines requérantes.
18 La partie défenderesse s' oppose à la divulgation entre les requérantes des pièces numérotées 5775, 6717 et 6718 (affaire T-148/94), 6789, 6854 et 6855 (affaire T-141/94), 6923 (affaire T-147/94), 6947 et 7022 (affaire T-134/94), 7307 à 7309, 7322, 7323 et 7337 à 7339 (affaire T-138/94), 8204, 8345, 8347, 8348 et 8349 (affaire T-137/94), 8777, 8778, 8787 et 8796 (affaire T-151/94), 8860, 9019, 9020, 9021 et 9022 (affaire T-156/94), 9150, 9277 et 9278 (affaire T-157/94) au motif qu' elles contiennent des secrets d' affaires, à savoir certains chiffres d' affaires des requérantes pour les années 1986 à 1990 et 1993. Elle fait valoir que, à la différence des autres pièces du dossier qui datent de la période au cours de laquelle les infractions ont été commises, ces documents ont été produits à un stade avancé des procédures administratives et portent sur les chiffres d' affaires afférents au produit pertinent des entreprises requérantes. En outre, le chiffre d' affaires afférent au produit pertinent sur une ou plusieurs années antérieures, en particulier si un certain nombre d' années sont mentionnées, permettrait de donner une idée du chiffre d' affaires pertinent actuel, ce qui ne serait pas nécessairement le cas en ce qui concerne d' autres types d' informations à caractère historique.
19 La requérante Unimétal, dans l' affaire T-145/94, s' oppose à la divulgation aux autres requérantes des documents qui portent les numéros 2519 à 2522 et 2656 à 2670 du dossier administratif de la Commission, au motif que ces documents ont un caractère purement interne à l' entreprise (notes de fonctionnement interne ou analyse interne des marchés).
20 La requérante British Steel, dans l' affaire T-151/94, s' oppose à la divulgation aux autres requérantes de certaines données contenues dans les documents qui portent les numéros 1894 à 1900, 1922 à 1936, 1940 à 1960, 1990 à 1992, 2179 à 2180 et 8787 du dossier administratif de la Commission, au motif qu' elles se rapportent à des secrets d' affaires (noms de clients actuels ou potentiels dont la clientèle ferait l' objet d' une concurrence active entre elle et d' autres requérantes; stratégies commerciales envisagées; données chiffrées relatives aux chiffres d' affaires sortie usine réalisés sur les poutrelles, d' avril 1986 à décembre 1993, au Royaume-Uni, dans les autres États membres et dans l' Union européenne dans son ensemble). British Steel a joint, en annexe à ses lettres des 31 mai et 15 septembre 1995 au Tribunal, à la fois des copies complètes des documents en question et des copies excluant les passages qui constituent pour elle des secrets d' affaires, les documents se présentant ainsi sous la forme sous laquelle elle souhaiterait qu' ils soient divulgués aux autres parties.
21 La requérante Aristrain, dans l' affaire T-156/94, s' oppose à la divulgation aux autres requérantes du document portant le numéro 8871, au motif qu' il contient des précisions très concrètes sur certains de ses secrets d' affaires, permettant de savoir qu' elle a pénétré sur certains marchés communautaires et de déterminer la part de marché qu' elle y détient.
22 La partie défenderesse n' a soulevé aucune objection quant aux demandes des requérantes Unimétal et Aristrain. En revanche, elle s' est opposée aux demandes de traitement confidentiel introduites par la requérante British Steel, sauf en ce qui concerne les documents numérotés 1922 à 1936 dans le dossier transmis au Tribunal.
Appréciation du Tribunal
23 S' agissant, en premier lieu, des pièces dont le traitement confidentiel est revendiqué par la partie défenderesse (voir point 18 ci-dessus), il convient de relever que, à la seule exception de la pièce numérotée 8787 (voir point 20 ci-dessus), les parties dont elles émanent ne s' opposent pas à leur divulgation entre les requérantes, indiquant par là qu' elles ne les considèrent plus, désormais, comme contenant des secrets d' affaires.
24 En conséquence, le Tribunal estime que, ainsi que l' ont fait valoir à bon droit certaines requérantes, la Commission ne peut s' opposer à la divulgation des ces documents entre les requérantes que dans le cas où celle-ci constituerait par elle-même une infraction aux règles de concurrence du traité CECA. Or la Commission n' a ni établi, ni même soutenu, que tel soit le cas en l' espèce. En toute hypothèse, une telle éventualité peut raisonnablement être écartée compte tenu de l' ancienneté des informations en cause (voir l' ordonnance Rhône-Poulenc e.a./Commission, précitée, point 23) et de leur caractère agrégé. Celles-ci concernent en effet, pour l' essentiel, des données relatives aux chiffres d' affaires "poutrelles" (toutes catégories confondues) et "produits CECA" des requérantes, dans l' ensemble de la Communauté, de 1986 à 1990. Quant aux données relatives à ces mêmes chiffres d' affaires agrégés pour l' année 1993, bien que plus récentes elles ne constituent que des prévisions, et non des résultats définitifs. Dans ces conditions, le Tribunal estime qu' il n' y a pas lieu de faire droit à la demande de la partie défenderesse, sous réserve de ce qui sera dit aux points 30 et 31 ci-dessous en ce qui concerne le document numéro 8787.
25 S' agissant, en deuxième lieu, des documents numéros 2519 à 2522 et 2656 à 2670 visés par la demande de la requérante Unimétal dans l' affaire T-145/94 (voir point 19 ci-dessus), le Tribunal constate qu' ils émanent de parties tierces à la présente procédure, à savoir Usinor Sacilor/Valor et le CPS, qui n' en ont pas demandé le traitement confidentiel bien qu' ils aient été dûment contactés à cette fin par la Commission (voir point ci-dessus). Dans la mesure où ils concernent Unimétal, ces documents ne paraissent pas contenir d' autres informations que celles disponibles sur la base des statistiques professionnelles et douanières. S' agissant plus particulièrement des documents numéros 2656 à 2668, les livraisons d' Unimétal sur le marché français en 1989 et 1990, auxquelles il se réfère, ont actuellement acquis un caractère historique qui ne permet plus de les considérer comme des secrets d' affaires. Dans ces conditions, le Tribunal estime qu' il n' y a pas lieu de faire droit à la demande de la requérante Unimétal.
26 S' agissant, en troisième lieu, de la demande de la requérante British Steel dans l' affaire T-151/94 (voir point 20 ci-dessus), celle-ci vise tout d' abord le traitement confidentiel de deux phrases, contenues dans une lettre à Ferdofin du 4 janvier 1991 (numéros 1894 et 1895 du dossier transmis au Tribunal), décrivant les rapports entretenus entre ces deux entreprises en 1990-1991. La défenderesse fait valoir que la lettre en question est invoquée, au point 176 de la Décision attaquée, comme preuve d' un accord de répartition des marchés entre British Steel et Ferdofin et dit ne pas voir pourquoi ces éléments, qui selon elle forment le contexte d' une constatation d' infraction, devraient être dissimulés aux autres requérantes, compliquant ainsi la suite de la procédure.
27 Il y a lieu de constater que la première des deux phrases faisant l' objet de la demande de British Steel, à savoir celle qui apparaît à la première page de sa lettre à Ferdofin du 4 janvier 1991, précitée, se trouve déjà supprimée dans la version de ce document qui constitue la pièce numéro 1894 du dossier transmis au Tribunal. A cet égard, la demande de British Steel est donc sans objet. Quant à la deuxième phrase, mentionnée à la page 2 de la lettre précitée (pièce 1895 du dossier de la Commission), le Tribunal relève qu' elle se rapporte à des faits vieux de plus de cinq ans, dont il n' est pas exclu qu' ils soient pertinents pour l' appréciation de l' infraction évoquée au point 176 de la Décision. En outre, la phrase en question se trouve répétée textuellement dans le document numéro 1899 du dossier transmis au Tribunal, dont British Steel n' a pas demandé le traitement confidentiel. Dans ces conditions, le Tribunal estime qu' il n' y a pas lieu de faire droit à la demande de British Steel.
28 Quant au document portant les numéros 1940 à 1960 du dossier, British Steel fait valoir qu' il mentionne le nom de certains prétendus clients d' un autre producteur. Il ne peut être exclu que ces noms aient encore une importance commerciale, en dépit du fait que les données en cause remontent aux années 1987 et 1988. Il en va de même en ce qui concerne les documents numérotés 1990 à 1992 et 2179 et 2180, qui sont respectivement datés du 5 décembre 1988 et du 8 septembre 1989. Il y a donc lieu de faire droit à la demande de British Steel, relativement à ces documents.
29 De même, le Tribunal considère que le document portant les numéros 1922 à 1936, qui concerne, pour l' essentiel, les relations d' affaires de British Steel et l' analyse de sa stratégie commerciale sur le marché allemand, bien que remontant lui aussi à plusieurs années, se réfère à certaines données qui pourraient encore être considérées comme couvertes par le secret professionnel au sens de l' article 47, paragraphe 2, du traité CECA. La défenderesse étant d' accord, en substance, avec la demande de traitement confidentiel dont certaines données contenues dans ce document font l' objet, le Tribunal estime qu' il y a lieu d' y faire droit.
30 Il en va encore ainsi en ce qui concerne le document portant le numéro 8787, dont British Steel approuve le traitement confidentiel demandé par la Commission (voir sa lettre du 15 septembre 1995, p. 8), dans la mesure où il contient notamment des données sur son chiffre d' affaires sortie usine réalisé sur les poutrelles, de 1990 à 1993, au Royaume-Uni, dans les autres États membres et dans l' Union européenne dans son ensemble.
31 British Steel ayant adressé au greffe un jeu des documents numérotés 1922 à 1936, 1940 à 1960, 1990 à 1992, 2179 à 2180 et 8787, expurgés des quelques données qui constituent, selon elle, des secrets d' affaires sans pertinence pour la présente affaire, le Tribunal estime qu' il convient de rendre lesdits documents accessibles sous cette forme aux autres requérantes, étant entendu que, comme elle l' a elle-même relevé, la partie défenderesse demeure évidemment en droit d' invoquer à l' encontre de British Steel, dans l' affaire T-151/94, le texte intégral de chacune des pièces qui constituent son dossier.
32 S' agissant, en quatrième lieu, du document numéro 8871 visé par la demande de la requérante Aristrain dans l' affaire T-156/94 (voir ci-dessus point ), le Tribunal relève qu' il s' agit d' un tableau relatif aux prix attendus ou obtenus par elle, au cours des deux premiers trimestres de 1989, pour diverses catégories de produits sidérurgiques, sur les marchés allemand et français. Compte tenu de l' ancienneté des données en question, le Tribunal estime qu' il n' y a pas lieu d' en interdire la consultation par les autres requérantes.
Sur le droit d' accès des requérantes aux pièces du dossier émanant de parties tierces aux présentes procédures, et classées comme confidentielles dans l' intérêt de ces tiers
Position des parties
33 La partie défenderesse et les tiers auxquels elle s' est adressée, à l' invitation du Tribunal, ont marqué leur accord sur le principe du libre accès de toutes les requérantes aux pièces du dossier transmis au Tribunal provenant de l' un ou l' autre de ces tiers, sous réserve de quelques exceptions soulevées soit par la Commission, soit par certains tiers.
34 La Commission s' oppose à la divulgation aux requérantes des pièces numérotées 6883 et 6917 (Saarstahl), 7777 à 7778 et 7782 (Usinor-Sacilor), 7864 à 7873 et 8001 (Ferdofin), 8013, 8017 et 8028 (Stefana), 9313 (Norsk Jernwerk), 9387 et 9388 (Ovako Profiler AB) et 9461 (Fundia), qui mentionnent certains chiffres d' affaires "poutrelles" pour les années 1986 à 1990 et 1993, pour des motifs identiques à ceux exposés au point 18 ci-dessus. Sous réserve de la pièce numérotée 8028 (voir point 37 ci-dessous), les tiers concernés ne s' opposent toutefois pas à une telle divulgation.
35 L' entreprise Allied Steel and Wire Ltd s' oppose à la divulgation aux requérantes de la pièce numérotée 5261, au motif qu' elle contient des secrets d' affaires concernant ses activités.
36 L' entreprise SSAB Svenskt Staal AB s' oppose à la divulgation aux requérantes des pièces numérotées 9435, 9440 à 9455, 9456, 9608 à 9610 et 9612 à 9621, au motif qu' il s' agit d' une correspondance échangée entre ses avocats et la Commission, révélant sa stratégie procédurale et/ou contenant des informations détaillées quant aux principes et aux méthodes de sa stratégie commerciale sur le marché.
37 L' entreprise Stefana s' oppose à la divulgation aux requérantes des pièces numérotées 8027 et 8028, au motif qu' elles contiennent des secrets d' affaires (chiffres d' affaires détaillés relatifs à certains produits).
38 La partie défenderesse ne soulève aucune objection à l' encontre de ces trois demandes. Pour ce qui est des requérantes, certaines maintiennent leur demande d' accès aux documents en cause, tandis que d' autres y renoncent.
Appréciation du Tribunal
39 Pour des motifs identiques, en substance, à ceux exposés aux points 23 et 24 ci-dessus, le Tribunal considère, en premier lieu, que la Commission n' est pas fondée à s' opposer à la divulgation aux requérantes des documents dont les tiers, dûment contactés par elle à cette fin, ne revendiquent plus le caractère confidentiel.
40 S' agissant, en deuxième lieu, du document 5261, émanant de l' entreprise Allied Steel and Wire Ltd, le Tribunal constate qu' il se borne à faire état de la participation de représentants de ladite entreprise, non autrement identifiés, à certaines réunions de la commission poutrelles, constituée au sein de la requérante Eurofer, ou du groupe Eurofer/Scandinavie, entre 1987 et 1989. Compte tenu de la participation habituelle de la plupart des requérantes à ces réunions, du caractère relativement public de celles-ci, du moins au sein du secteur concerné, du fait que Allied Steel and Wire Ltd formait avec British Steel, à l' époque des faits, une entité économique unique et de l' ancienneté des données concernées, le Tribunal estime que ce document peut être communiqué aux requérantes sans violation du secret professionnel.
41 S' agissant, en troisième lieu, des documents numéros 9435, 9440 à 9455, 9456, 9608 à 9610 et 9612 à 9621, visés par la demande de l' entreprise SSAB Svenskt Staal AB, le Tribunal relève qu' ils concernent, d' une part, la demande d' audition séparée sollicitée par l' avocat de cette entreprise au nom de sa mandante, et, d' autre part, le procès-verbal de ladite audition menée par le conseiller-auditeur, ainsi que les pièces produites à cette occasion.
42 Le Tribunal relève, tout d' abord, que ces documents ne contiennent pas de données pouvant être considérées comme des secrets d' affaires. En revanche, au point 296, in fine, de la Décision attaquée, la défenderesse s' est notamment appuyée sur les déclarations faites lors de cette audition par le représentant des sociétés SSAB Svenskt Staal AB et Ovako Profiler AB pour déclarer établie, dans le chef de toutes les requérantes concernées et non pas de ces deux seules entreprises, l' infraction de fixation de prix dans le cadre des accords Eurofer/Scandinavie.
43 Le Tribunal relève, en outre, qu' au cours de l' audition en question le représentant des sociétés SSAB Svenskt Staal AB et Ovako Profiler AB a fait certaines déclarations, et a produit un document, qui n' apparaissent pas manifestement dénuées de toute pertinence pour l' appréciation du bien-fondé de certains moyens d' annulation soulevés par l' une ou l' autre requérante, notamment en soutenant que ces sociétés avaient été encouragées par leur gouvernement, suite à des contacts que celui-ci aurait entretenus avec les directions générales I et III de la Commission, à participer aux accords ou pratiques ayant eu cours dans le cadre des réunions du groupe Eurofer/Scandinavie.
44 Le Tribunal relève, enfin, que les informations communiquées à l' occasion de cette audition ne font que répéter, en substance, celles déjà contenues dans la lettre de l' avocat de SSAB Svenskt Staal AB à la Commission du 28 juillet 1992 en réponse à la communication des griefs, laquelle n' est pas visée par l' actuelle demande de traitement confidentiel de cette société.
45 Compte tenu de ce qui précède, le Tribunal estime qu' il y a lieu, dans les circonstances spécifiques de l' espèce, d' autoriser les requérantes à prendre connaissance des documents visés par la demande de traitement confidentiel de l' entreprise SSAB Svenskt Staal AB.
46 S' agissant, en quatrième lieu, des documents numéros 8027 et 8028 visés par la demande de l' entreprise Stefana, le Tribunal relève que le document numéro 8027 est un questionnaire standard de la Commission, qui ne contient aucune donnée chiffrée relative à l' entreprise destinataire. En revanche, le document numéro 8028, bien que moins détaillé que le document numéro 8787 émanant de la requérante British Steel, visé aux points 20 et ci-dessus, contient lui aussi certaines données relatives au chiffre d' affaires réalisé par l' entreprise concernée en 1993. S' agissant d' un document aussi récent, émanant d' une entreprise tierce à la présente procédure qui en a expressément revendiqué le caractère confidentiel, le Tribunal estime qu' il n' y a pas lieu d' autoriser sa communication aux requérantes, d' autant qu' il ne paraît pas pertinent, à première vue, pour l' examen du bien-fondé de leurs recours.
Sur le droit d' accès des requérantes aux pièces du dossier classées par la Commission comme documents internes
Position des parties
47 Dans sa lettre au Tribunal du 27/29 juin 1995, répondant à la lettre du greffier du 30 mars 1995, la partie défenderesse a réitéré son opposition de principe à la communication de ses documents internes aux requérantes. La Commission considère, sur la base de la jurisprudence existante et de sa pratique administrative, qu' elle doit continuer à se prévaloir de la confidentialité desdits documents.
48 La défenderesse s' est également opposée à la communication aux requérantes des documents, classés comme confidentiels dans le dossier administratif, émanant de, ou destinés à, certaines administrations ou autorités nationales en charge des affaires de concurrence, et plus particulièrement du Bundeskartellamt, de l' Office of Fair Trading, du Prisdirektoratet, de l' US Department of Commerce, de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, ainsi que du représentant permanent du grand-duché de Luxembourg auprès des Communautés européennes. A la différence des entreprises tierces à la présente procédure ces autorités n' ont pas été contactées par la Commission, qui considère que la correspondance échangée avec elles doit être considérée comme confidentielle, pour des raisons analogues à celles qui justifient, selon elle, le traitement confidentiel des documents internes des institutions.
49 La plupart des requérantes critiquent la manière, jugée trop succincte et insuffisante, dont la Commission a décrit le contenu des diverses pièces de son dossier interne. Elles considèrent que cette description ne satisfait ni à la demande du Tribunal exprimée dans la lettre du greffe du 30 mars 1995, ni aux exigences de précision retenues par le Tribunal dans ses arrêts du 29 juin 1995, Solvay/Commission (T-30/91, Rec. p. II-1775, point 94) et ICI/Commission (T-36/91, Rec. p. II-1847), et ne leur permet pas d' apprécier au cas par cas la pertinence d' une demande d' accès à ces documents pour assurer leur défense.
50 La plupart des requérantes maintiennent dès lors, à titre principal, leur demande d' accès à l' intégralité du dossier interne de la Commission, qu' elles estiment fondée sur le prescrit de l' article 23 du statut (CECA) de la Cour, combiné avec le principe du caractère contradictoire des débats judiciaires. Les requérantes, ou certaines d' entre elles, font valoir, à cet égard, six arguments principaux.
51 Premièrement, les requérantes s' appuient sur le texte même de l' article 23 du statut (CECA) de la Cour, en faisant observer qu' il n' a d' équivalent ni dans le protocole sur le statut (CEE) de la Cour, ni dans le protocole sur le statut (CEEA) de la Cour. Ses termes seraient sans équivoque et ne prévoiraient aucune exception pour les documents internes de l' institution concernée, à la différence de ce que l' article 47 du traité CECA prévoit à l' égard des documents contenant des informations couvertes par le secret professionnel. La thèse des requérantes aurait du reste été consacrée par la Cour dans son arrêt Italie/Haute Autorité, précité.
52 Deuxièmement, les requérantes s' appuient sur un principe de "transparence administrative" qui imprégnerait l' ensemble du traité CECA, et plus particulièrement les mécanismes de contrôle juridictionnel qu' il instaure. La requérante Unimétal invoque en ce sens l' opinion du professeur Paul Reuter dans son ouvrage: La Communauté européenne charbon acier (Paris, LGJD, 1953, p. 76 et 77). A la différence des autres parties ou des États membres, les institutions de la Communauté ne pourraient pas se retrancher derrière un principe tiré du secret administratif qui n' existerait pas dans ce domaine. En ce sens, le traité CECA aurait été particulièrement novateur et rejoindrait les droits les plus avancés des États membres.
53 Troisièmement, certaines requérantes justifient leur droit d' accès au dossier interne de l' institution concernée, au titre de l' article 23 du statut (CECA) de la Cour, par le fait que celui-ci concerne la procédure judiciaire devant la Cour, et non la procédure administrative devant la Commission. Alors qu' il pourrait, selon elles, y avoir un intérêt public assez évident à assurer la protection du caractère confidentiel des documents et du processus menant à l' adoption d' une décision, notamment pour des motifs d' efficacité administrative (voir Lenz et Grill: "Zum Recht auf Akteninsicht im EG-Kartellverfahrensrecht", Festschrift fuer Arved Deringer, 1993, p. 310 et suivantes, 318), la situation serait différente, une fois cette décision adoptée, au stade du contrôle de sa légalité par la Cour. A ce stade, la règle de la confidentialité des documents internes de la Commission ne correspondrait plus à aucun intérêt légitime par rapport aux entreprises impliquées dans la procédure. Au contraire, le bon fonctionnement de la justice et la protection des droits fondamentaux des parties exigeraient que la Cour soit parfaitement informée de tous les faits et documents relatifs à l' affaire qui sont en possession de l' institution et qu' elle soit mise en mesure d' examiner toutes les questions soulevées par les parties, relativement à l' adoption de la décision ou à sa motivation. L' article 23 du statut (CECA) de la Cour serait destiné à atteindre cet objectif.
54 Dans ce contexte, il est fait valoir que la jurisprudence développée par la Cour et le Tribunal dans le domaine du traité CE, en matière de restrictions d' accès au dossier interne de la Commission, concerne essentiellement le stade antérieur à l' adoption d' une décision sur la base de l' article 3 du règlement n 17 du Conseil, du 6 février 1962, premier règlement d' application des articles 85 et 86 du traité (JO 1962, 13, p. 204), et s' appuie principalement sur la description de la pratique administrative de la Commission qui figure au paragraphe 35 du Douzième Rapport sur la politique de concurrence (voir l' arrêt du Tribunal du 17 décembre 1991, Hercules/Commission, T-7/89, Rec. p. II-1711). Au stade de la procédure judiciaire, en revanche, la règle générale serait que tous les documents, internes ou autres, doivent être communiqués à la Cour et aux requérantes, s' ils sont pertinents pour la solution des questions en litige.
55 Quatrièmement, certaines requérantes complètent l' argument qui précède par la considération que, lorsqu' elle est saisie d' un recours de pleine juridiction au titre de l' article 36, paragraphe 2, du traité CECA, comme c' est le cas en l' espèce, la Cour doit contrôler tous les aspects touchant à l' exercice, par l' institution intéressée, de son pouvoir discrétionnaire, et notamment le caractère utile et équitable de la décision prise (Groeben, Thiesing, Ehlermann: Kommentar zum EWG-Vertrag, 4e édition, 1991, article 172, note 10). Or, les éléments nécessaires à ce contrôle se trouveraient principalement dans les documents internes de l' institution et il n' y aurait pas lieu, à cet égard, d' en protéger le caractère prétendument confidentiel. Aussi longtemps que l' administration applique exclusivement les procédures en vigueur dans un État de droit, et des considérations objectives, elle n' aurait pas à craindre que les parties concernées en prennent connaissance. Si elle devait s' écarter de ces principes, il serait de l' intérêt général que ces pratiques soient découvertes et l' administration ne mériterait dans ce cas aucune protection.
56 A cet égard, il est allégué que la jurisprudence consacrée, dans le domaine du traité CE, par l' ordonnance de la Cour du 18 juin 1986, BAT et Reynolds/Commission (142/84 et 156/84, Rec. p. 1899, point 11), selon laquelle l' examen par la Cour du dossier interne de la Commission constitue une mesure d' instruction de caractère exceptionnel, est inapplicable dans un cas comme celui de l' espèce, puisque, dans cette affaire, la Cour n' avait pas à connaître d' un recours de pleine juridiction, et que, comme la Cour l' a elle-même relevé, aucune des requérantes n' avait soulevé le moyen de détournement de pouvoir.
57 Cinquièmement, certaines requérantes justifient la règle de l' article 23 par la structure et le fonctionnement mêmes du traité CECA. La Commission exercerait, dans le cadre de ce traité, le rôle d' un gestionnaire politique doté de pouvoirs d' intervention économique étendus, très différent du rôle qu' elle joue dans le cadre du traité CE. Ces fonctions et ces pouvoirs de gestion des secteurs du charbon et de l' acier, qui se traduiraient notamment par la mise en oeuvre des articles 5, 46, 47, 48, 57, 60 et 65 du traité CECA, nécessiteraient la mise en place d' un système de contrôle juridictionnel étendu des activités de la Commission.
58 Sixièmement, enfin, en combinaison avec les arguments qui précèdent, les requérantes invoquent le respect des droits de la défense, le principe de l' égalité des armes et celui du caractère contradictoire de la procédure, qui impliqueraient que toutes les parties se voient reconnaître un accès égal au dossier de la juridiction communautaire, afin de pouvoir étayer leurs arguments, et réfuter ceux de la partie adverse, sur la base de la même information et des mêmes documents que ceux auxquels l' institution défenderesse et la Cour elle-même ont accès. Les requérantes se fondent notamment sur les arrêts de la Cour Italie/Haute Autorité, précité, du 22 mars 1961, Snupat/Haute Autorité (42/59 et 49/59, Rec. p. 101, 105), et du 13 février 1979, Hoffmann-La Roche/Commission (85/76, Rec. p. 461, point 9), ainsi que sur les arrêts Solvay/Commission et ICI/Commission, précités.
59 A titre subsidiaire, pour le cas où le Tribunal estimerait, nonobstant les termes de l' article 23 du statut (CECA) de la Cour, que la communication des documents internes de la Commission peut en principe faire l' objet de certaines restrictions en raison de leur caractère confidentiel, la plupart des requérantes soutiennent qu' il incomberait alors à la Commission de justifier, au cas par cas, en quoi l' intérêt public au maintien de la confidentialité des documents en question doit l' emporter sur l' intérêt des requérantes et du Tribunal à une bonne administration de la justice. A cet égard, trois tempéraments principaux à la règle de l' article 23 du statut (CECA) de la Cour ont été envisagés, à titre subsidiaire, par certaines requérantes.
60 Tout d' abord, la protection de la confidentialité de certains documents pourrait avoir pour objet de permettre le bon déroulement et la régularité de la procédure administrative. Cet objet ne pouvant plus être affecté que dans une faible mesure une fois ladite procédure clôturée, il conviendrait toutefois d' accorder la priorité aux droits fondamentaux de la défense lors de la mise en balance des intérêts. Dans ce contexte, certaines requérantes admettent que l' on puisse supprimer le nom des personnes ayant rédigé les notes ou avis internes et le nom des personnes qui y sont mentionnées. Ce tempérament aurait été utilisé par la Cour, à titre exceptionnel, dans l' affaire Italie/Haute Autorité, précitée. Une telle formule éviterait la personnalisation des débats, sans porter effectivement atteinte aux droits des parties dès lors que le débat ne concerne pas le comportement de l' un ou l' autre individu, mais celui de l' institution. Elle ne devrait toutefois être utilisée que dans des circonstances véritablement exceptionnelles, comme la Cour l' a relevé dans l' arrêt Italie/Haute Autorité, précité.
61 Un deuxième tempérament à la règle de l' article 23 du statut (CECA) de la Cour pourrait résulter d' une application indirecte de l' article 47 du traité CECA. Certaines requérantes font ainsi valoir que, si une information fournie par un tiers doit être considérée comme couverte par la règle de la confidentialité de l' article 47, il serait illogique d' en permettre la communication aux requérantes simplement parce qu' elle se trouve reprise dans un document interne de la Commission.
62 Enfin, un troisième tempérament pourrait consister, selon certaines requérantes, en la non-communication des documents internes manifestement sans pertinence. La Cour en aurait fait usage dans son ordonnance du 10 mars 1966, Fonzi/Commission CEEA (28/65, Rec. p. 734), étrangère il est vrai au traité CECA, en décidant d' écarter un document des débats au motif que son maintien au dossier pouvait aboutir à une violation du secret des délibérations de la Commission CEEA, alors qu' il apparaissait que ce document concernait des "matières étrangères" au litige porté devant elle (voir également l' ordonnance de la Cour du 6 juillet 1989, Commission/Irlande, 352/88, non publiée au Recueil). Les requérantes qui admettent ce tempérament soulignent cependant que le Tribunal ne devrait exclure du dossier que les pièces dont il est évident, prima facie, qu' elles n' ont aucun intérêt pour décider de l' affaire portée devant lui.
63 A titre subsidiaire également, neuf des onze requérantes ont joint, en réponse aux questions du Tribunal, une liste des documents internes de la Commission qui revêtent à leurs yeux une importance particulière et dont elles demandent la communication en se fondant non seulement sur l' article 23 du statut (CECA) de la Cour, mais aussi sur la jurisprudence du Tribunal dans le cadre du traité CE, et notamment sur les arrêts Solvay/Commission et ICI/Commission, précités. Elles ont, pour la plupart, explicitement motivé leur demande de communication de ces documents en faisant référence soit aux divers moyens d' annulation qu' elles invoquent à l' appui de leur recours, soit à certaines considérations qu' elles tirent de la lecture de l' inventaire des pièces du dossier interne de la Commission. Cette demande porte, en substance, sur les documents concernant:
° les relations entre la Commission et les autorités nationales ou les producteurs de poutrelles scandinaves, qui seraient susceptibles d' éclairer les raisons pour lesquelles ces derniers ont échappé, dans une large mesure, aux lourdes sanctions imposées aux requérantes, bien que la Décision reconnaisse leur participation à l' une au moins des infractions alléguées; à cet égard, certaines requérantes ont renvoyé à des déclarations qui auraient été faites devant le conseiller-auditeur par certaines entreprises scandinaves, selon lesquelles elles auraient été encouragées par leur gouvernement ainsi que par la direction générale I de la Commission à participer aux réunions du groupe Eurofer/Scandinavie;
° la participation éventuelle de certains fonctionnaires de la direction générale III, voire d' autres directions générales de la Commission, à la mise en place et à la gestion de certains mécanismes identifiés dans la Décision comme étant des accords ou pratiques restrictifs de la concurrence, et l' enquête menée à ce sujet par le conseiller-auditeur, suite à l' audition administrative des 11, 12, 13 et 14 janvier 1993;
° les circonstances ayant entouré la détermination du montant des amendes infligées aux requérantes ainsi que les modalités de calcul de ces amendes, en relation notamment avec les moyens d' annulation tirés de la violation des principes d' égalité de traitement et de proportionnalité;
° la phase de l' adoption finale de la Décision dans ses différentes versions linguistiques par la défenderesse, et l' éventuelle violation des formes substantielles commise à cette occasion, dont les requérantes soutiennent avoir relevé certains indices sur la base de leur lecture de l' inventaire du dossier interne de la défenderesse.
64 Outre ces demandes, principales et subsidiaires, plusieurs requérantes font grief à la défenderesse de ne pas avoir transmis au Tribunal la totalité des pièces relatives aux présentes affaires, en violation de l' obligation qui lui incombe au titre de l' article 23 du statut (CECA) de la Cour. Elles demandent au Tribunal d' ordonner la production des documents manquants et d' en autoriser la communication aux parties.
65 Certaines requérantes relèvent ainsi que le dossier transmis au Tribunal ne contient pas certaines notes ou mémorandums internes échangés entre la direction générale III et la direction générale IV, qui ont pourtant été annexés aux mémoires en défense déposés par la Commission dans les présentes affaires. Plus généralement, les requérantes estiment que la défenderesse aurait dû transmettre au Tribunal non seulement le dossier administratif de la direction générale IV, mais aussi celui de la direction générale III, relatifs aux présentes affaires, et notamment les rapports et notes internes préparés par les fonctionnaires de la direction générale III au sujet de leurs contacts avec les producteurs de poutrelles et de la politique de la Commission dans ce secteur, pendant la période visée par la Décision.
66 D' autres requérantes font valoir que le dossier transmis au Tribunal ne contient apparemment pas le procès-verbal de la réunion du collège des commissaires du 16 février 1994, relative à l' adoption de la Décision attaquée, ni la version finale, dûment datée et authentifiée, de ladite Décision dans toutes les versions linguistiques dans lesquelles elle fait foi.
Appréciation du Tribunal
67 Aux termes de l' article 23 du statut (CECA) de la Cour, lorsqu' un recours est formé contre une décision prise par une des institutions de la Communauté, cette institution est tenue de transmettre à la Cour toutes les pièces relatives à l' affaire qui est portée devant elle.
68 Il convient de relever, à titre liminaire, que cette disposition, qui n' a d' équivalent ni dans le protocole sur le statut (CEE) de la Cour ni dans le protocole sur le statut (CEEA) de la Cour, est une règle de droit judiciaire spécifiquement applicable à la procédure en cours devant la juridiction communautaire, lorsque celle-ci est saisie d' un recours contre une décision prise par l' une des institutions de la CECA.
69 Ainsi qu' il ressort de l' arrêt Italie/Haute Autorité, précité (voir p. 103 et 104), l' exécution par l' institution concernée de ses obligations au titre de l' article 23 du statut (CECA) de la Cour n' est pas subordonnée à l' adoption par la Cour d' une quelconque mesure d' instruction à cet effet et s' étend, en règle générale, à toutes les pièces relatives à l' affaire, sans qu' il faille, à ce stade, prévoir une exception de principe pour les documents internes. En effet, le principe même du contrôle juridictionnel des actes de l' administration, dans une Communauté de droit, fait obstacle à l' application d' une règle générale de confidentialité administrative vis-à-vis de la Cour.
70 Il importe de souligner, par ailleurs, que les pièces transmises à la Cour et au Tribunal en application de l' article 23 du statut (CECA) de la Cour doivent en principe être rendues accessibles à toutes les parties à la procédure. Ce serait en effet violer un principe élémentaire du droit que de baser une décision judiciaire sur des faits et des documents dont les parties ou l' une d' entre elles n' ont pas pu prendre connaissance et sur lesquels elles n' ont donc pas été en mesure de prendre position (arrêt Snupat/Haute Autorité, précité, p. 105).
71 Le Tribunal estime, dès lors, que la partie défenderesse n' est pas fondée à se prévaloir uniquement de sa pratique administrative ni de la jurisprudence de la Cour en matière d' examen par elle du dossier interne de la Commission, dans le cadre du contrôle de légalité d' une procédure d' application des règles de concurrence du traité CE (voir l' ordonnance BAT et Reynolds/Commission, précitée, point 11), pour s' opposer sans autre justification, à ce stade, à la divulgation de ses documents internes aux parties requérantes.
72 Toutefois, ainsi que la Cour l' a jugé dans son ordonnance du 6 novembre 1954 Italie/Haute Autorité, (2/54, non publiée au Recueil), "les dispositions du traité ne sauraient être interprétées que dans le sens le plus favorable au bon fonctionnement des institutions de la Communauté". Cette considération, qui, selon la Cour, s' applique également à l' article 23 du statut (CECA), justifie, notamment, qu' il ne soit pas fait droit à une demande de production de documents internes relatifs à l' affaire en cause, lorsque ceux déjà produits suffisent à éclairer la Cour (voir, outre l' arrêt Italie/Haute Autorité, précité, les arrêts de la Cour du 11 février 1955, Assider/Haute Autorité, 3/54, Rec. p. 123, et ISA/Haute Autorité, 4/54, Rec. p. 177).
73 De même, le Tribunal considère qu' on ne saurait exclure, a priori, l' éventualité d' une atteinte au bon fonctionnement des institutions, préjudiciable à la réalisation des objectifs du traité CECA, en cas de divulgation inconsidérée de certains documents qui, de par leur nature ou leur contenu, méritent une protection particulière. C' est ainsi par exemple que, dans l' arrêt Italie/Haute Autorité, précité, la Cour s' est montrée soucieuse d' assurer la protection du secret des délibérations de la Haute Autorité et du comité consultatif, et que dans le cadre du traité CE elle a, dans l' arrêt du 7 novembre 1985, Adams/Commission (145/83, Rec. p. 3539), reconnu dans le chef de l' institution concernée une obligation de garder secrète l' identité d' un informateur ayant requis l' anonymat.
74 Dans l' appréciation d' une telle éventualité, le Tribunal est amené à trancher un conflit entre, d' une part, le principe de l' efficacité de l' action administrative, et, d' autre part, le principe du contrôle judiciaire des actes de l' administration, dans le respect des droits de la défense et du caractère contradictoire de la procédure.
75 Dans l' état actuel des présentes procédures, le Tribunal ne s' estime pas suffisamment éclairé pour trancher ce conflit. En effet, si les requérantes ont clairement exposé les raisons pour lesquelles elles estiment pertinentes, eu égard notamment à leurs moyens de fond, leurs demandes d' accès au dossier interne de la Commission, et plus particulièrement aux documents visés par leurs demandes subsidiaires (voir points 51 à 63 ci-dessus), force est de constater que la défenderesse n' a pas autrement spécifié les raisons pour lesquelles il y aurait lieu, en l' espèce, de la délier à titre exceptionnel de ses obligations au titre de l' article 23 du statut (CECA) de la Cour.
76 Il convient donc d' inviter la partie défenderesse à identifier, dans le délai qui lui sera accordé à cette fin, les documents qualifiés par elle d' internes, dans le dossier transmis au Tribunal, qui, en raison de leur nature ou de leur contenu spécifiques, lui paraissent ne pas pouvoir faire l' objet d' une communication aux requérantes, en exposant de façon circonstanciée et concrète, pour chacun d' eux, les raisons qui justifient selon elle ce traitement exceptionnel et en déposant, le cas échéant, une version non confidentielle de ces documents. La défenderesse ayant soutenu que la correspondance échangée avec les autorités nationales doit faire l' objet d' un traitement analogue à celui de ses documents internes (voir point 48 ci-dessus), il lui appartient de justifier pareillement les raisons spécifiques pour lesquelles elle s' oppose, en l' espèce, à la communication de cette correspondance aux requérantes.
77 Il y a lieu, entre-temps, de réserver à statuer sur la demande d' accès des requérantes aux pièces du dossier transmis au Tribunal, classées par la Commission comme documents internes, ainsi que sur leurs demandes visant à la production de documents qui ne figurent pas dans ledit dossier. De même, le Tribunal statuera ultérieurement, le cas échéant, quant à l' opportunité d' ordonner à cet égard des mesures d' instruction ou d' organisation de la procédure au titre des articles 64 et 65 du règlement de procédure.
78 Le dossier transmis au Tribunal ne pouvant être réorganisé par la Commission en vue de sa consultation par les parties, conformément au point 1, in fine, de la lettre du greffe aux parties du 30 mars 1995, qu' une fois qu' il aura été statué sur toutes les questions encore en suspens, il y également lieu de prévoir, dans l' intérêt d' une bonne organisation de la procédure, que les modalités d' accès des requérantes à ce dossier leur seront communiquées ultérieurement par le greffier.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (deuxième chambre élargie)
ordonne:
1) Les documents portant les numéros 1922 à 1936, 1940 à 1960, 1990 à 1992, 2179, 2180 et 8787 du dossier transmis au Tribunal par lettre de la partie défenderesse du 24 novembre 1994 ne sont accessibles, dans leur version intégrale, qu' à la partie requérante dans l' affaire T-151/94 et à la Commission. A l' égard des autres parties requérantes dans les présentes affaires, ils sont remplacés par leur version non confidentielle, telle qu' adressée au Tribunal par lettres de la partie requérante dans l' affaire T-151/94 respectivement datées des 31 mai et 15 septembre 1995.
2) Le document émanant de l' entreprise Stefana, portant le numéro 8028 du dossier transmis au Tribunal, est retiré du dossier.
3) La partie défenderesse spécifiera de manière circonstanciée et concrète, dans les six semaines de la notification de la présente ordonnance, les raisons pour lesquelles elle considère que certains documents qualifiés par elle d' "internes" , parmi les documents qui composent le dossier transmis par elle au Tribunal, ne peuvent, selon elle, être communiqués aux parties requérantes. Le cas échéant, elle transmettra au Tribunal, dans le même délai, une version non confidentielle de ces documents.
4) Il est réservé à statuer sur la demande d' accès des parties requérantes aux pièces du dossier transmis au Tribunal, classées par la partie défenderesse comme documents internes, ainsi que sur leur demande visant à la production de documents qui ne figurent pas dans ledit dossier.
5) Les modalités selon lesquelles les parties seront autorisées à consulter, dans les locaux du greffe, le dossier transmis au Tribunal leur seront communiquées ultérieurement par le greffier.
6) Les dépens sont réservés.
Fait à Luxembourg, le 19 juin 1996.