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Document 52023DC0141

    COMMUNICATION DE LA COMMISSION AU CONSEIL Orientations en matière de politique budgétaire pour 2024

    COM/2023/141 final

    Bruxelles, le 8.3.2023

    COM(2023) 141 final

    COMMUNICATION DE LA COMMISSION AU CONSEIL

    Orientations en matière de politique budgétaire pour 2024


    COMMUNICATION DE LA COMMISSION AU CONSEIL

    Orientations en matière de politique budgétaire pour 2024

    1.Introduction

    L’économie européenne a entamé l’année 2023 en meilleure santé qu’on ne le prévoyait à l’automne. Le prix de référence européen pour le gaz est tombé en dessous des niveaux qui prévalaient avant l’invasion de l’Ukraine par la Russie, grâce à la modération de la demande et à la poursuite de la diversification des sources d’approvisionnement. Les marchés du travail ont, eux aussi, continué d’enregistrer de solides résultats, avec un taux de chômage dans l’UE qui est resté à un niveau historiquement bas en décembre 2022. Par ailleurs, trois mois de diminution des taux d’inflation semblent indiquer que le pic est désormais passé, bien que les tensions liées à l’inflation sous-jacente demeurent élevées et que les risques soient orientés à la hausse. Le climat économique a également continué de s’améliorer, ce qui suggère que l’activité économique dans l’UE pourrait éviter une contraction au premier trimestre de 2023 et échapper de peu à la récession annoncée précédemment.

    Dans le même temps, l’économie européenne reste confrontée à de fortes turbulences, dans un contexte d’incertitude élevée. Du fait de la persistance des tensions inflationnistes, le resserrement de la politique monétaire devrait se poursuivre, freinant la demande. Bien que la Commission ait revu à la hausse les perspectives de croissance pour 2023 dans ses prévisions de l’hiver, la croissance devrait donc rester modérée cette année. Dans le contexte géopolitique actuel, l’incertitude demeure élevée.

    En 2023 et 2024, les politiques budgétaires devraient viser à garantir la soutenabilité de la dette à moyen terme et à accroître durablement la croissance potentielle. Les mesures budgétaires ont atténué l’impact de la crise énergétique sur les entreprises et les consommateurs. Cependant, un stimulus budgétaire visant à soutenir la demande globale d’une manière généralisée n’est pas souhaitable, pas plus que les mesures de soutien coûteuses ne peuvent être maintenues indéfiniment: il faut à présent se concentrer sur le renforcement de la viabilité budgétaire par un assainissement progressif des finances publiques, parallèlement à un soutien budgétaire ciblé, lorsque celui-ci reste nécessaire, aux ménages et aux entreprises vulnérables qui souffrent des prix élevés de l’énergie. Une politique budgétaire prudente, tout en augmentant le potentiel de croissance, contribuera à garantir la stabilité de l’économie européenne et facilitera la transmission efficace de la politique monétaire dans un contexte d’inflation élevée.

    La présente communication définit, à l’intention des États membres, des orientations sur les politiques budgétaires à conduire et leur coordination, à la lumière des défis auxquels sont confrontées les finances publiques et l’économie et des discussions sur le futur cadre de gouvernance économique. Dans sa communication du 9 novembre 2022 sur les orientations pour une réforme du cadre de gouvernance économique de l’UE (ci-après les «orientations de réforme»), la Commission indiquait qu’elle fournirait aux États membres des orientations budgétaires pour 2024 au cours du premier trimestre de 2023( 1 ). Le cadre budgétaire de l’UE est actuellement en phase de transition. Le réexamen du cadre de gouvernance économique a été lancé en février 2020, la nécessité d’en améliorer certains pans ayant été reconnue. Un simple retour à la mise en œuvre des règles du cadre juridique existant ne permettrait pas non plus de tenir compte de la nouvelle réalité post-pandémie. Étant donné qu’un nouveau cadre juridique, fondé sur les conclusions du réexamen en cours de la gouvernance économique, n’est pas encore en place, le cadre juridique actuel continue néanmoins de s’appliquer. Dans le même temps, afin de permettre une transition efficace vers l’application du futur ensemble de règles budgétaires de l’UE et de tenir compte des défis actuels, le cycle de surveillance budgétaire qui débutera au printemps 2023 pourrait intégrer certains éléments des orientations de réforme de la Commission. C’est pourquoi, comme indiqué dans la communication de la Commission du 9 novembre 2022, les orientations reflètent la situation économique globale et la situation spécifique de chaque État membre et tiennent compte des éléments des orientations de réforme de la Commission qui sont conformes à l’esprit du cadre juridique existant. Il sera essentiel de parvenir le plus vite possible à un accord sur le futur cadre de gouvernance économique, afin de disposer d’un ensemble de règles budgétaires de l’UE qui tienne pleinement compte de la nouvelle réalité post-pandémie.

    Les orientations visent à éclairer les États membres dans l’élaboration de leur programme de stabilité ou de convergence. Elles seront suivies, au printemps, de recommandations budgétaires par pays pour 2024, qui serviront quant à elles de guide pour l’élaboration, puis l’évaluation des projets de plans budgétaires à l’automne.

    Le reste de la communication se compose de six sections. La section 2 présente les perspectives économiques pour cette année et l’année prochaine, sur la base des prévisions de l’hiver 2023 de la Commission. La section 3 présente l’état d’avancement du réexamen en cours de la gouvernance économique. La section 4 traite de la réponse budgétaire à la crise énergétique. La section 5 examine les implications, pour les orientations budgétaires relatives à 2024, de la désactivation de la clause dérogatoire générale. La section 6 traite de l’ouverture de procédures concernant les déficits excessifs (PDE). Enfin, la section 7 présente les prochaines étapes.

    2.Situation et perspectives économiques

    Dans ses prévisions de l’hiver 2023, la Commission a revu à la hausse les perspectives de croissance pour cette année. La crise énergétique et la dégradation des termes d’échange qui en a résulté ont impacté la production et érodé le pouvoir d’achat des ménages, avec des effets sur la confiance économique. Les ménages et les entreprises ont cependant fait preuve d’une résilience remarquable, et l’inflation semble désormais avoir passé son pic, ce qui devrait permettre une reprise de la croissance au printemps. Les marchés du travail devraient rester solides malgré l’environnement difficile, même si l’inflation continue à surpasser la croissance des salaires, affaiblissant la consommation. Les dépenses engagées au titre de la facilité pour la reprise et la résilience (FRR) et la mise en œuvre des programmes relevant de la politique de cohésion devraient continuer à monter en puissance, soutenant les investissements publics. Après une stagnation généralisée au dernier trimestre de 2022, au lieu de diminuer comme attendu, la croissance du PIB réel devrait atteindre 0,8 % dans l’UE en 2023, parallèlement à une inflation de 6,4 %. En 2024, la croissance du PIB de l’UE devrait s’établir à 1,6 %, tandis que l’inflation devrait ralentir pour retomber à 2,8 %. La conjonction d’une faible croissance économique et d’une inflation élevée à court terme réclame une solide coordination des politiques budgétaires de l’UE et de la zone euro, sur la base d’orientations claires pouvant faire l’objet d’un suivi transparent. Cela contribuera également à garantir un dosage cohérent des politiques.

    L’incertitude entourant les perspectives économiques européennes reste élevée, même si les risques pesant sur la croissance sont globalement équilibrés. Les aléas liés aux perspectives de croissance ne sont plus baissiers. La demande intérieure pourrait réserver de bonnes surprises, en particulier si les récentes baisses des prix de gros du gaz sont répercutées plus fortement sur les consommateurs. Par ailleurs, si la menace de pénuries de gaz reste importante, elle semble moins aiguë qu’auparavant. Néanmoins, l’adaptation à un environnement de taux d’intérêt élevés pourrait se révéler difficile, et l’incertitude demeure élevée, compte tenu de la poursuite de la guerre que livre la Russie à l’Ukraine. Les risques de hausse de l’inflation restent largement liés à l’évolution des marchés de l’énergie – ce qui impose de rester vigilant face à l’évolution future des prix de l’énergie. Pour 2024, en particulier, les risques de hausse de l’inflation prédominent, parce que les taux de croissance des salaires pourraient rester supérieurs à la moyenne pendant une période prolongée.

    Les défis à moyen terme auxquels l’économie européenne est confrontée ne se sont pas atténués. Conjugués aux évolutions démographiques, les défis économiques déjà évidents avant la pandémie, et notamment la nécessité de renforcer la croissance potentielle, d’accélérer la double transition d’une manière équitable et de gagner en résilience, accroîtront la pression sur les finances publiques à moyen terme. Ces défis soulignent l’importance de la cohésion et de la résilience sociales, objectifs du socle européen des droits sociaux. Dans ce contexte, les politiques budgétaires devraient viser à préserver la soutenabilité de la dette, à accroître le potentiel de croissance de manière durable et inclusive et, ce faisant, à faciliter aussi la mission de la politique monétaire. Pour maintenir un niveau élevé d’investissement public, tout en réduisant durablement les ratios de la dette au PIB, il sera d’autant plus nécessaire de définir des priorités en matière de dépenses et de constituer des réserves budgétaires. Dans une perspective à plus long terme, la dernière décennie a été marquée par des chocs majeurs: la crise économique et financière, la crise de la COVID-19, l’invasion de l’Ukraine par la Russie, et la crise énergétique et la flambée inflationniste qui s’en sont suivies. L’incertitude actuelle réclame que les politiques budgétaires demeurent souples.

    3.État d’avancement du réexamen de la gouvernance économique

    C’est en novembre 2022, à l’issue d’un processus de consultation étendue, que la Commission a publié ses orientations pour une réforme du cadre de gouvernance économique. Les orientations de réforme s’appuient sur l’expérience et l’analyse tirées par la Commission de la mise en œuvre du cadre avant la pandémie, ainsi que sur les leçons apprises de la réponse de l’UE à la pandémie. Elles tiennent également compte des conclusions d’une consultation publique qui a été relancée en octobre 2021 auprès d’un large éventail de parties prenantes, dont les États membres, les autres institutions de l’UE, les partenaires sociaux, les citoyens et le monde universitaire, entre autres. Tel qu’il est proposé de le réviser, le cadre visera à renforcer la soutenabilité de la dette et à réduire les ratios d’endettement public élevés, tout en favorisant une croissance durable et inclusive dans tous les États membres. Les principaux objectifs de la proposition sont de faire en sorte que les États membres s’approprient davantage le cadre, de simplifier celui-ci et de cibler davantage le moyen terme, tout en veillant à une application plus stricte et plus cohérente des règles. Des plans budgétaires et structurels nationaux à moyen terme intégrant des objectifs en matière budgétaire, de réforme et d’investissement constitueront la pierre angulaire du cadre révisé. Les États membres disposeront ainsi d’une plus grande marge de manœuvre pour définir leur trajectoire d’ajustement budgétaire, dans les limites d’un cadre commun de l’UE qui s’accompagnerait d’une application plus stricte des règles.

    Les discussions sur le cadre budgétaire révisé progressent. Les éléments budgétaires de la proposition ont été examinés au sein du Comité économique et financier ainsi qu’au niveau ministériel au sein du Conseil ECOFIN et, pour les questions qui concernent spécifiquement la zone euro, au sein de l’Eurogroupe. La Commission a également discuté de ses orientations avec le Parlement européen, le Comité économique et social européen, le Comité européen des régions et d’autres parties prenantes. Les échanges se sont concentrés sur diverses questions, et notamment: la différenciation des exigences budgétaires entre les États membres selon l’évaluation des défis liés à leur endettement (qui se fondera sur l’analyse de la soutenabilité de la dette réalisée par la Commission); un recentrage sur le moyen à long terme, par un engagement des États membres à respecter un plan budgétaire et structurel à moyen terme, propre à chacun et fondé sur les orientations données par la Commission; l’évaluation et le suivi de ces plans; la nécessité de conserver la PDE fondée sur le déficit tout en renforçant la PDE fondée sur la dette; l’utilisation d’instruments de suivi et coercitifs efficaces, notamment un compte de contrôle, des sanctions financières moins importantes, mais plus crédibles, et des sanctions réputationnelles; le rôle des institutions budgétaires indépendantes; le rôle des investissements et des réformes dans la prolongation des trajectoires d’ajustement et un nouvel outil pour assurer le respect des engagements pris à cet égard.

    Une convergence de vues se dégage sur plusieurs questions clés, tandis que d’autres points restent à clarifier. Il y a accord pour ne pas modifier les valeurs de référence de 3 % et de 60 % du PIB fixées dans le protocole nº 12 annexé aux traités. Les vues convergent aussi sur un certain nombre de questions: une surveillance annuelle sera maintenue, mais l’approche à moyen terme proposée est appropriée pour garantir une réduction soutenue des ratios d’endettement élevés, et les plans budgétaires et structurels à moyen terme élaborés par les États membres devraient constituer la pierre angulaire du cadre révisé; à la lumière des enseignements tirés de l’impact de la crise financière mondiale sur l’investissement, comme des besoins d’investissement très importants qu’implique la double transition écologique et numérique, il faut favoriser davantage l’investissement et les réformes; il est également nécessaire de veiller plus efficacement au respect des règles en continuant d’appliquer des sanctions financières, de moindre montant, mais avec un plus fort impact réputationnel; les règles existantes pour l’ouverture et la clôture d’une PDE fondée sur le déficit demeureraient inchangées, tandis que la PDE fondée sur la dette devrait être renforcée; les grands principes d’appropriation nationale et d’égalité de traitement seront respectés; et les efforts budgétaires demandés devront être différenciés d’une manière appropriée. Les discussions devront se poursuivre sur la manière de mettre en œuvre ces principes.

    La Commission a l’intention de présenter des propositions législatives à la suite du prochain Conseil ECOFIN et du Conseil européen de mars 2023, qui viseront à parvenir à un accord sur les principaux éléments du futur cadre de gouvernance économique.

    4.Réponse budgétaire à la crise énergétique

    La flambée des prix de l’énergie a amené les États membres à mettre en œuvre des mesures de politique budgétaire très coûteuses. Ces mesures ont atténué l’impact économique et social de la flambée soudaine des prix de l’énergie, en particulier du gaz et de l’électricité, sur les ménages et les entreprises. Selon les prévisions de l’automne 2022 de la Commission, le coût net de ces mesures s’est élevé en 2022 à 1,2 % du PIB annuel de l’UE. D’après les informations disponibles à l’automne, leur coût net devrait diminuer pour s’établir à 0,9 % du PIB de l’UE en 2023. Toutefois, arriver à ce chiffre impose que les États membres entreprennent de démanteler progressivement la plupart des mesures de soutien. Dans certains États membres, ce démantèlement progressif est en cours, tandis que d’autres États membres ont, depuis l’automne, prolongé certaines mesures ou en ont adopté de nouvelles. Une prolongation jusqu’à la fin de 2023 des mesures énergétiques en vigueur entraînerait une augmentation substantielle des coûts budgétaires liés.

    Les perspectives concernant les prix de l’énergie se sont améliorées. Depuis janvier 2023, les prix de gros au comptant du gaz en Europe sont revenus à un niveau bien inférieur à leur niveau d’avant la guerre, même s’ils restent plus de trois fois supérieurs aux prix de 2019. Étant donné que la répercussion des prix de gros du gaz et de l’électricité sur les prix à la consommation se fait en général plus lentement que pour les carburants, la forte baisse récente de ces prix de gros n’a pas encore d’effet visible sur les prix de détail. La demande intérieure pourrait se révéler plus forte que prévu si les baisses récentes des prix de gros du gaz se répercutent plus fortement sur les prix à la consommation. Dans le même temps, les prix du gaz ont été exceptionnellement volatils en 2023, et un renversement des récentes pressions à la baisse ne saurait donc être exclu à l’approche de l’hiver prochain.

    Graphique 1: Le coût budgétaire des mesures relatives à l’énergie surpasse
    la hausse des dépenses énergétiques des ménages vulnérables

    Remarque: le graphique montre l’augmentation estimée des dépenses énergétiques des ménages à faibles revenus (pour le chauffage domestique et les transports) par rapport au coût budgétaire total des mesures relatives à l’énergie en 2022, déduction faite des recettes tirées des impôts et prélèvements sur les bénéfices exceptionnels. Le Portugal et la Suède sont omis faute de données suffisantes. Malte est omise, car aucune hausse des prix n’apparaît au niveau de la composante énergie de l’inflation (mesure de l’IPCH).

    Source: services de la Commission.

    L’accent devrait désormais être mis sur la suppression progressive des mesures budgétaires nationales instaurées pour protéger les ménages et les entreprises du choc sur les prix de l’énergie. Les États membres devraient supprimer progressivement les mesures de soutien sur l’énergie, en commençant par les mesures les moins ciblées. Si une prolongation des mesures de soutien devait être nécessaire en raison d’un regain des pressions sur l’énergie, les États membres devraient cibler ces mesures beaucoup mieux que par le passé, en s’abstenant d’accorder un soutien généralisé et en ne protégeant que ceux qui en ont besoin, à savoir les ménages et les entreprises vulnérables. Cela limitera les coûts budgétaires et, surtout, incitera à limiter la consommation d’énergie et à accroître l’efficacité énergétique. En 2022, plus de 70 % des montants consacrés à l’aide en matière d’énergie ont correspondu à des mesures ciblant insuffisamment les ménages et les entreprises les plus vulnérables( 2 ). En outre, deux tiers des mesures ont faussé le signal de prix et ont peut-être réduit les incitations à limiter la consommation d’énergie et à accroître l’efficacité énergétique. La conception des mesures s’est néanmoins améliorée avec le temps, sur la base de l’expérience acquise depuis la première réaction rapide à la hausse brutale des prix de l’énergie.

    La solution durable à la crise énergétique consiste à réduire la dépendance aux combustibles fossiles importés. Dans ce contexte, les efforts devraient se concentrer sur la mise en œuvre rapide des réformes et des investissements destinés à accroître l’efficacité énergétique, à diversifier les sources d’approvisionnement et à accélérer le développement des énergies renouvelables, comme souligné dans le cadre de la FRR. Ces efforts devraient encore être renforcés dans le cadre de REPowerEU( 3 ).  Le plan industriel du pacte vert contribuera également à renforcer la compétitivité de l’industrie manufacturière européenne à zéro émission nette et soutiendra la transition rapide vers la neutralité climatique, y compris par la transformation de nos systèmes énergétiques( 4 ). 

    5.Désactivation de la clause dérogatoire générale: implications pour les orientations budgétaires

    La clause dérogatoire générale du pacte de stabilité et de croissance sera désactivée à la fin de 2023. Dans sa communication de mai 2022 sur le Semestre européen 2022, la Commission indiquait que les conditions de désactivation de la clause dérogatoire générale seraient considérées comme remplies à partir de 2024 ( 5 , 6 ). L’examen annuel de la croissance durable, de novembre 2022, a confirmé cette évaluation, relevant que l’économie européenne n’était plus dans une période de grave récession économique( 7 ). L’économie européenne s’est en effet redressée au-delà de son niveau d’avant la pandémie et a maintenant dépassé la phase aiguë du choc sur les prix de l’énergie causé par l’agression de l’Ukraine par la Russie, bien que l’incertitude demeure élevée.

    Dans le contexte de la désactivation de la clause dérogatoire générale à partir de 2024, et vu la nécessité de politiques budgétaires prudentes, il est nécessaire de convenir de principes clés pour guider les États membres dans l’élaboration de leur programme de stabilité ou de convergence. Au moment de sortir de la période d’application de la clause dérogatoire générale, le retour à des recommandations par pays différenciées, formulées en termes quantitatifs et assorties d’orientations qualitatives concernant les investissements et les mesures relatives à l’énergie, contribuera à apporter aux États membres la clarté nécessaire. Dans le même temps, dans la période précédant l’entrée en vigueur d’un nouveau cadre budgétaire, et compte tenu de la situation économique actuelle, caractérisée par un haut degré d’incertitude, il ne serait pas approprié de revenir à la «matrice des ajustements requis» utilisée dans le cadre du volet préventif du pacte de stabilité et de croissance entre 2015 et 2020( 8 ).

    Le cycle de surveillance budgétaire refléterait l’esprit des orientations de réforme de la Commission. Tant que le débat sur la réforme du cadre de gouvernance économique se poursuit, le cadre juridique actuel continue de s’appliquer. La Commission ne propose pas de basculer sur un nouveau système de surveillance budgétaire en 2024. Dans le même temps, afin de permettre une transition efficace vers l’application du futur ensemble de règles budgétaires de l’UE et de tenir compte de la réalité post-pandémie, le cycle de surveillance budgétaire qui débutera au printemps 2023 pourrait intégrer certains éléments des orientations de réforme de la Commission. Ainsi, dans l’esprit des orientations de réforme de la Commission, les États membres sont invités à présenter des programmes de stabilité ou de convergence contenant leurs plans budgétaires et structurels à moyen terme. De son côté, la Commission est prête à proposer des recommandations budgétaires par pays pour 2024 qui fixent notamment, en ce qui concerne les investissements et les mesures sur l’énergie, une exigence quantitative et des orientations qualitatives, et qui sont ainsi conformes aux critères proposés dans ses orientations de réforme, tout en restant cohérentes par rapport aux critères de la législation actuelle dans le cadre du pacte de stabilité et de croissance. Ces recommandations budgétaires serviraient de base au suivi des résultats budgétaires par la Commission, qui commencera par évaluer à l’automne les projets de plans budgétaires des États membres de la zone euro pour 2024.

    Les États membres sont invités à exposer, dans leur programme de stabilité ou de convergence, de quelle manière leur plan budgétaire garantira le respect de la valeur de référence de 3 % du PIB fixée pour le déficit, ainsi qu’une réduction plausible et continue de leur dette ou le maintien de leur dette à des niveaux prudents, à moyen terme. Il leur est demandé de fixer, dans leur programme de stabilité ou de convergence pour 2023, des objectifs budgétaires conformes aux critères d’ajustement budgétaire énoncés dans les orientations de réforme de la Commission. Plus précisément, les États membres dont la dette publique pose un défi important ou moyen sont invités à fixer des objectifs budgétaires qui garantissent une réduction plausible et continue de leur dette ou le maintien de leur dette à des niveaux prudents à moyen terme( 9 ). En outre, tous les États membres sont invités à fixer des objectifs budgétaires qui garantissent que le déficit ne dépassera pas 3 % du PIB ou sera ramené sous les 3 % du PIB au cours de la période couverte par le programme de stabilité ou de convergence, et à garantir de manière crédible qu’à moyen terme, le déficit restera inférieur à 3 % du PIB sur la base de politiques inchangées. Les États membres sont également invités à déclarer, dans leur programme de stabilité ou de convergence, les mesures de soutien qu’ils prévoient dans le domaine de l’énergie, y compris leur incidence budgétaire, les modalités de leur suppression progressive et les hypothèses relatives à l’évolution des prix de l’énergie qui les sous-tendent. Enfin, les États membres sont invités à exposer, dans leur programme de stabilité ou de convergence, la manière dont leurs plans de réforme et d’investissement, y compris ceux décrits dans leur plan pour la reprise et la résilience, doivent contribuer à la viabilité budgétaire et à une croissance durable et inclusive, conformément aux critères énoncés dans les orientations de réforme de la Commission.

    La Commission est disposée à proposer des recommandations budgétaires par pays pour 2024 qui soient conformes aux propres objectifs des États membres, pour autant que ces objectifs soient de nature à inscrire le ratio d’endettement public sur une trajectoire descendante ou à le maintenir à un niveau prudent, ainsi qu’à garantir un déficit budgétaire inférieur à la valeur de référence de 3 % du PIB à moyen terme. Conformément à l’approche à moyen terme privilégiée et à l’accent mis sur l’appropriation nationale, la Commission est prête à fonder ses recommandations par pays sur les objectifs budgétaires définis dans les programmes de stabilité ou de convergence des États membres. Les États membres sont donc invités à veiller à ce que les objectifs budgétaires définis dans leur programme de stabilité ou de convergence soient conformes aux critères proposés dans les orientations de réforme de la Commission. Si les objectifs budgétaires d’un État membre devaient apparaître insuffisamment ambitieux, la Commission proposerait, pour cet État membre, une recommandation budgétaire qui serait conforme aux critères proposés dans ses orientations de réforme, tout en restant cohérente par rapport aux critères de la législation actuelle dans le cadre du pacte de stabilité et de croissance. À ce stade, l’exigence quantifiée fixée dans la recommandation par pays se concentrera sur l’année 2024.

    Les propositions de recommandations budgétaires par pays de la Commission pour 2024 devraient être quantifiées et différenciées en fonction du défi que représente la dette publique de chaque État membre. L’accent sera ainsi mis sur la nécessité, pour les États membres dont la dette publique pose un défi important ou moyen, d’inscrire celle-ci sur une trajectoire descendante plausible et continue. Plus précisément, les États membres confrontés à des difficultés importantes ou moyennes en matière de dette publique (sur la base de l’analyse de la soutenabilité de la dette réalisée par la Commission) se verraient recommander des objectifs budgétaires qui garantissent une réduction plausible et continue de la dette ou le maintien de la dette à des niveaux prudents à moyen terme, tout en restant cohérents par rapport à la législation actuelle dans le cadre du pacte de stabilité et de croissance. Concernant les États membres dont la dette publique pose un défi mineur, il leur serait recommandé de maintenir ou de ramener leur déficit sous les 3 % du PIB au cours de la période couverte par leur programme de stabilité ou de convergence, et de veiller à conserver un déficit inférieur à 3 % du PIB à moyen terme, sur la base de politiques inchangées.

    Les recommandations budgétaires par pays seraient formulées sur la base des dépenses primaires nettes, comme le propose la Commission dans ses orientations de réforme( 10 ). Passer à cet indicateur représentera un changement de focale par rapport à la période où la clause dérogatoire générale était appliquée et où la surveillance budgétaire se concentrait sur les dépenses courantes primaires nettes financées au niveau national et sur la préservation des investissements financés au niveau national.

    Compte tenu du rôle essentiel de l’investissement public, la Commission continuera à mettre l’accent sur celui-ci dans ses recommandations budgétaires. Tous les États membres devraient continuer à protéger les investissements financés au niveau national et à veiller à l’utilisation efficace des fonds octroyés au titre de la FRR et des autres fonds de l’UE, notamment au regard des objectifs relatifs aux transitions écologique et numérique et des objectifs en matière de résilience. Il convient de veiller à la haute qualité des investissements publics, ce qui suppose notamment de mener pleinement à terme les investissements financés par la FRR. Les politiques budgétaires devraient soutenir la double transition, en vue de permettre une croissance durable et inclusive. L’ajustement budgétaire des États membres confrontés à des difficultés importantes ou moyennes en matière de dette publique ne devrait pas restreindre l’investissement, mais passer plutôt par une limitation de la croissance des dépenses courantes financées au niveau national par rapport à la croissance du PIB potentiel à moyen terme. Les États membres devraient également tenir compte de la nature temporaire du soutien financier non remboursable accordé au titre de la FRR («subventions»). Pour sa part, la Commission tiendra compte de la nécessité de soutenir l’investissement dans son suivi des résultats budgétaires à l’aune des recommandations budgétaires.

    Les recommandations par pays pour 2024 fourniront également des orientations concernant le coût budgétaire des mesures énergétiques. Si, comme on le prévoit actuellement, la baisse des coûts de l’énergie est répercutée sur les prix de détail et que les prix de gros restent stables, la suppression progressive des mesures publiques de soutien sur l’énergie devrait se poursuivre en 2024, et les économies correspondantes devraient contribuer à réduire les déficits publics. Si, par contre, les prix de l’énergie repartent à la hausse et qu’il n’est pas envisageable de supprimer tout soutien, les mesures devraient être ciblées et protéger uniquement les ménages et les entreprises vulnérables, tandis que des mesures plus larges, comme celles mises en œuvre en 2022, devraient être évitées. Une telle approche réduirait les coûts budgétaires, encouragerait les économies d’énergie et permettrait à l’économie de s’adapter progressivement et durablement en un laps de temps limité.

    La Commission invite le Conseil à approuver cette approche.

    6.Une mise en œuvre cohérente de la procédure concernant les déficits excessifs (PDE)

    Au printemps 2022, la Commission s’est engagée à évaluer l’opportunité d’engager des procédures concernant les déficits excessifs au printemps 2023, en tenant compte en particulier du respect des recommandations budgétaires par pays adressées aux États membres par le Conseil le 12 juillet 2022. La Commission suit en permanence la situation économique et budgétaire des États membres. Elle rappelle aussi ses avis sur les projets de plans budgétaires des États membres de la zone euro, qui préconisaient les mesures à prendre dans le cadre de la procédure budgétaire nationale pour faire en sorte que le budget 2023 cadre avec les recommandations par pays adoptées par le Conseil le 12 juillet 2022. La Commission évaluera le respect des critères du déficit et de la dette conformément à l’article 126, paragraphe 3, du TFUE dans le cadre du cycle de surveillance du printemps. Compte tenu de la grande incertitude qui entoure toujours les perspectives macroéconomiques et budgétaires à ce stade, la Commission estime qu’il n’y a pas lieu de décider ce printemps si certains États membres devraient être soumis à la procédure concernant les déficits excessifs. Par ailleurs, la Commission proposera au Conseil d’engager, au printemps 2024, des procédures concernant les déficits excessifs fondées sur le déficit sur la base des données réelles pour 2023, conformément aux dispositions légales en vigueur. Les États membres devraient en tenir compte dans l’exécution de leur budget pour 2023 et dans l’élaboration de leur programme de stabilité ou de convergence ce printemps, ainsi que dans leur projet de plan budgétaire pour 2024 cet automne.

    7.Prochaines étapes

    La présente communication définit des orientations préliminaires en matière de politique budgétaire pour 2024, qui seront mises à jour si nécessaire dans le cadre du paquet de printemps du Semestre européen, en mai 2023. Les orientations actualisées continueront à tenir compte de la situation économique mondiale, de la situation spécifique de chaque État membre, de l’état d’avancement du réexamen en cours de la gouvernance économique et des discussions au niveau du Conseil sur les politiques à mener. L’évolution des perspectives économiques et budgétaires sera suivie de près et dûment prise en considération. Les États membres sont invités à tenir compte des présentes orientations dans leur programme de stabilité ou de convergence.


    Appendice

    A.Tableaux supplémentaires à fournir dans les programmes de stabilité ou de convergence pour 2023

    Outre les prévisions budgétaires requises pour la période couverte par le programme de stabilité ou de convergence, les estimations correspondantes pour l’année en cours devraient également être incluses, ainsi que les résultats pour la période 2020-2022 (conformément aux tableaux de notification au titre de la PDE). Les tableaux seront de préférence soumis à la Commission via l’application web dédiée.

    Tableau relatif à l’incidence de la FRR sur les projections du programme – SUBVENTIONS 

    Recettes provenant des subventions FRR (en % du PIB)

     

    2020

    2021

    2022

    2023

    2024

    2025

    2026

    Subventions FRR telles qu’incluses dans les projections de recettes

    Décaissements de subventions FRR par l’UE

     

     

     

     

     

     

     

     

    Dépenses financées par les subventions FRR (en % du PIB)

     

    2020

    2021

    2022

    2023

    2024

    2025

    2026

    Rémunération des salariés D.1

    Consommation intermédiaire P.2

    Paiements sociaux D.62 + D.632

    Dépenses d’intérêts D.41

    Subventions à payer D.3

    Transferts courants D.7

    TOTAL DES DÉPENSES COURANTES

    Formation brute de capital fixe P.51g

    Transferts en capital D.9

    TOTAL DES DÉPENSES EN CAPITAL

     

     

     

     

     

     

     

     

    Autres coûts financés par les subventions FRR (en % du PIB)1

     

    2020

    2021

    2022

    2023

    2024

    2025

    2026

    Réduction des recettes fiscales

    Autres coûts ayant une incidence sur les recettes

    Opérations financières

    Tableau relatif à l’incidence de la FRR sur les projections du programme – PRÊTS 

    Flux de trésorerie provenant des prêts FRR prévus dans le programme (en % du PIB)

     

    2020

    2021

    2022

    2023

    2024

    2025

    2026

    Décaissements de prêts FRR par l’UE

    Remboursements à l’UE de prêts FRR

     

     

     

     

     

     

     

     

    Dépenses financées par les prêts FRR (en % du PIB)

     

    2020

    2021

    2022

    2023

    2024

    2025

    2026

    Rémunération des salariés D.1

    Consommation intermédiaire P.2

    Paiements sociaux D.62 + D.632

    Dépenses d’intérêts D.41

    Subventions à payer D.3

    Transferts courants D.7

    TOTAL DES DÉPENSES COURANTES

    Formation brute de capital fixe P.51g

    Transferts en capital D.9

    TOTAL DES DÉPENSES EN CAPITAL

     

     

     

     

     

     

     

     

    Autres coûts financés par les prêts FRR (en % du PIB)1

     

    2020

    2021

    2022

    2023

    2024

    2025

    2026

    Réduction des recettes fiscales

    Autres coûts ayant une incidence sur les recettes

    Opérations financières

    Remarques: la fourniture de données pour les variables indiquées en caractères gras est exigée; la fourniture de données pour les autres variables est facultative.



    B.Informations supplémentaires à fournir dans les programmes de stabilité ou de convergence pour 2023

    Les États membres sont invités à fournir des informations sur: i) les coûts budgétaires annuels liés à l’accueil de personnes ayant fui l’Ukraine, exprimés en termes de principale(s) catégorie(s) du SEC directement concernée(s); et ii) le nombre annuel de personnes accueillies. Ces coûts budgétaires devraient se limiter aux coûts qui sont directement liés à l’afflux sans précédent de personnes ayant fui l’Ukraine et qui en sont une conséquence immédiate. La communication de ces informations permettrait à la Commission de tenir compte de ces coûts budgétaires dans son évaluation des programmes de stabilité ou de convergence pour 2023, ainsi que des progrès accomplis dans la mise en œuvre des recommandations par pays de 2022.

    (1)

    () Commission européenne, Communication sur les orientations pour une réforme du cadre de gouvernance économique de l’UE , COM(2022) 583 final du 9 novembre 2022.

    (2)

    () La Commission évalue la qualité des mesures budgétaires relatives à l’énergie selon les critères suivants: les mesures doivent être financièrement abordables pour les États membres, cibler les plus vulnérables, préserver le signal de prix (c’est-à-dire encourager à réduire la consommation d’énergie ou à améliorer l’efficacité énergétique) et être facilement applicables dans tous les États membres sans charge administrative excessive. Commission européenne, Communication sur les projets de plans budgétaires pour 2023: évaluation globale , COM(2022) 900 final du 22 novembre 2022.

    (3)

    () Voir le règlement (UE) 2023/435 du Parlement européen et du Conseil du 27 février 2023 modifiant le règlement (UE) 2021/241 en ce qui concerne les chapitres REPowerEU des plans pour la reprise et la résilience (JO L 63 du 28.2.2023, p. 1).

    (4)

    () Voir Commission européenne, « Un plan industriel du pacte vert pour l’ère du zéro émission nette », COM(2023) 62 final du 1er février 2023.

    (5)

    () Commission européenne, « Semestre européen 2022 – paquet de printemps », COM(2022) 600 final du 23 mai 2022.

    (6)

    () Certaines dispositions des règles budgétaires de l’Union permettent à tous les États membres se trouvant dans une situation de crise généralisée causée par une grave récession économique dans la zone euro ou dans l’ensemble de l’Union de s’écarter temporairement, de façon coordonnée et ordonnée, des exigences normales [voir l’article 5, paragraphe 1, l’article 6, paragraphe 3, l’article 9, paragraphe 1, et l’article 10, paragraphe 3, du règlement (CE) nº 1466/97 ainsi que l’article 3, paragraphe 5, et l’article 5, paragraphe 2, du règlement (CE) nº 1467/97].

    (7)

    () Commission européenne (2022), « Examen annuel 2023 de la croissance durable », COM(2022) 780 final du 22 novembre 2022.

    (8)

    () Voir l’encadré 1.6, p. 16, de l’édition 2019 du vade-mecum sur le pacte de stabilité et de croissance et Commission européenne, « Utiliser au mieux la flexibilité offerte par les règles existantes du pacte de stabilité et de croissance », COM(2015) 12 final du 13 janvier 2015.

    (9)

    () Comme indiqué dans l’encadré 1 de la communication de la Commission sur les orientations pour une réforme du cadre de gouvernance économique de l’UE (voir la note de bas de page 1), la Commission propose d’utiliser son cadre d’analyse de la soutenabilité de la dette pour classer les États membres selon le défi que pose leur dette publique.

    (10)

    () Les dépenses primaires nettes sont définies comme les dépenses financées au niveau national, déduction faite des mesures discrétionnaires en matière de recettes et à l’exclusion des dépenses d’intérêts et des dépenses conjoncturelles en matière de chômage.

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