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Document 52022PC0091

Proposition de DÉCISION D’EXÉCUTION DU CONSEIL constatant l’existence d’un afflux massif de personnes déplacées en provenance d’Ukraine, au sens de l’article 5 de la directive 2001/55/CE du Conseil du 20 juillet 2001, et ayant pour effet d’introduire une protection temporaire

COM/2022/91 final

Bruxelles, le 2.3.2022

COM(2022) 91 final

2022/0069(NLE)

Proposition de

DÉCISION D’EXÉCUTION DU CONSEIL

constatant l’existence d’un afflux massif de personnes déplacées en provenance d’Ukraine, au sens de l’article 5 de la directive 2001/55/CE du Conseil du 20 juillet 2001, et ayant pour effet d’introduire une protection temporaire


EXPOSÉ DES MOTIFS

1.CONTEXTE DE LA PROPOSITION

Justification et objectifs de la proposition

Activation de l’application de la directive 2001/55/CE du Conseil du 20 juillet 2001 au moyen d’une décision d’exécution du Conseil constatant l’existence d’un afflux massif de personnes déplacées en provenance d’Ukraine, au sens de l’article 5 de la directive 2001/55/CE du 20 juillet 2001, ayant pour effet d’introduire une protection temporaire conformément aux dispositions de la présente directive

À la suite de l’invasion de l’Ukraine lancée par l’armée russe le 24 février 2022, le Conseil européen, dans ses conclusions publiées le jour même, a condamné avec la plus grande fermeté l’agression militaire non provoquée et injustifiée commise par la Fédération de Russie (ci-après dénommée la «Russie») contre l’Ukraine, en soulignant la violation flagrante du droit international et des principes inscrits dans la charte des Nations unies ainsi que le risque pour la sécurité et la stabilité européennes et mondiales. Le Conseil européen a appelé la Russie à respecter pleinement l’intégrité territoriale, la souveraineté et l’indépendance de l’Ukraine à l’intérieur de ses frontières reconnues au niveau international, ce qui incluait le droit de l'Ukraine de choisir son propre destin. Les chefs d’État ou de gouvernement des États membres ont en outre confirmé que le gouvernement russe portait l’entière responsabilité de son acte d’agression engendrant des souffrances et des pertes de vies humaines, et qu’il devrait répondre de ses actes. Par solidarité avec l’Ukraine, le Conseil européen a adopté une deuxième série de sanctions.

Dans ce contexte, le Conseil européen a appelé à faire avancer les travaux de préparation à tous les niveaux et a invité la Commission à proposer des mesures d’urgence.

L’Union européenne est directement touchée par la guerre à ses frontières extérieures, notamment à cause de la pression migratoire croissante exercée par les milliers de personnes qui cherchent une protection dans les États membres de l’UE. Début mars, après quelques jours seulement, plus de 650 000 personnes déplacées étaient arrivées dans l’Union européenne par la Pologne, la Slovaquie, la Hongrie et la Roumanie. Ces chiffres devraient croître encore davantage. Les Nations unies ont lancé un «appel éclair» humanitaire pour répondre aux besoins de protection et d’assistance en Ukraine, ainsi que le plan régional d’aide aux réfugiés pour l’Ukraine, qui apporte des précisions sur le nombre de personnes ayant besoin d’aide et sur celles qui seront ciblées par l’assistance.

L’Ukraine est un pays bénéficiant d’une exemption de visa 1 pour l’entrée dans l’UE. Les titulaires de passeports biométriques ukrainiens sont ainsi exemptés de l’obligation de visa lorsqu’ils se rendent dans l’UE. Sur la base de l’expérience acquise au lendemain de l’annexion illégale, par la Russie, de la République autonome de Crimée et de la ville de Sébastopol, et pendant la guerre dans l’Est de l’Ukraine, on estime que la moitié des Ukrainiens qui arriveront dans l’Union européenne en bénéficiant du régime d’exemption de visa rejoindront des membres de leur famille ou chercheront un emploi dans l’Union européenne, tandis que l’autre moitié pourrait demander une protection internationale. En fonction de l’évolution du conflit, il est probable que l’UE doive accueillir un nombre considérable de personnes. Selon les estimations, les chiffres pourraient se situer entre 2,5 et 6,5 millions de personnes déplacées en raison du conflit armé, dont 1,2 à 3,2 millions pourraient demander une protection internationale. Le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés estime que, dans le scénario le plus pessimiste, jusqu’à 4 millions de personnes pourraient fuir l’Ukraine.

Ces chiffres, la gravité de la guerre et sa proximité avec les frontières extérieures de l’Union européenne indiquent que cette dernière est susceptible d’être confrontée à une situation caractérisée par un afflux massif d’Ukrainiens et d’autres ressortissants de pays tiers ou apatrides en séjour régulier en Ukraine au moment du conflit, qui ont été forcés de quitter ce pays à cause de l’invasion russe.

Pour faire face à cette situation, la Commission présente une proposition de décision d’exécution du Conseil permettant à celui-ci de constater l’existence d’un afflux massif de personnes déplacées, en l’occurrence des Ukrainiens et d’autres ressortissants de pays tiers ou apatrides en séjour régulier en Ukraine au moment du conflit, sur le fondement de la directive 2001/55/CE du 20 juillet 2001 relative à la protection temporaire 2 .

Cette directive avait été adoptée après le conflit en ex-Yougoslavie, lorsque, pour la première fois depuis la Seconde Guerre mondiale, l’Europe avait été confrontée à des déplacements massifs de personnes à travers l’Europe, consécutifs à un conflit européen. Elle a été spécialement conçue pour contribuer à un équilibre entre les efforts consentis pour gérer en commun les déplacements intra-européens, en octroyant une protection immédiate aux personnes qui fuient la guerre, et éviter ainsi de submerger les régimes d’asile des États membres. Les dispositions prévues dans la directive relative à la protection temporaire ainsi que les mesures nationales d’exécution permettraient aux États membres de gérer de manière contrôlée et efficace, dans le plein respect des droits fondamentaux et des obligations internationales, les flux de personnes déplacées qui fuient l’Ukraine.

L’objectif de la présente proposition est d’activer l’application de la directive relative à la protection temporaire, en énonçant, conformément à son article 5, les principaux éléments, notamment une description des groupes spécifiques de personnes auxquels devrait s’appliquer la protection temporaire et la date à laquelle celle-ci prendra effet. Une fois adoptée, la décision d’exécution du Conseil imposera aux États membres d’appliquer les mesures qu’ils ont prises pour transposer et appliquer la directive relative à la protection temporaire, et de remplir ainsi leurs obligations envers les bénéficiaires de la protection temporaire, énoncées au chapitre III de la directive.

La proposition introduit une protection temporaire pour trois catégories de personnes:

·les ressortissants ukrainiens résidant en Ukraine qui ont été déplacés à partir du 24 février 2022, à la suite de l’invasion militaire lancée par les forces armées russes à cette date;

·les ressortissants de pays tiers ou les apatrides en séjour régulier en Ukraine qui ont été déplacés à partir du 24 février 2022, à la suite de l’invasion militaire lancée par les forces armées russes à cette date, et qui ne sont pas en mesure de retourner dans leur pays ou leur région d’origine, dans des conditions sûres et durables, en raison de la situation qui règne dans ce pays. Cela pourrait inclure des personnes qui bénéficiaient du statut de réfugié ou d’une protection équivalente ou qui étaient demandeurs d’asile en Ukraine au moment des événements ayant conduit à l’afflux massif. Les ressortissants de pays tiers qui se trouvaient en séjour régulier de longue durée en Ukraine au moment des événements ayant entraîné l’afflux massif devraient bénéficier d’une protection temporaire, qu’ils puissent ou non retourner dans leur pays ou leur région d’origine dans des conditions sûres et durables; et

·les membres de la famille des personnes relevant des deux catégories susmentionnées, à condition que la famille ait été déjà constituée en Ukraine au moment des circonstances entourant l’afflux massif, que le membre de la famille concerné puisse ou non retourner dans son pays d’origine dans des conditions sûres et durables. Conformément à la directive 2001/55/CE du Conseil, est considéré(e) comme un membre de la famille le conjoint d’une personne relevant de l’une des deux catégories susmentionnées, ou son/sa partenaire non marié(e) engagé(e) dans une relation stable, lorsque la législation ou la pratique en vigueur dans l'État membre concerné traite les couples non mariés de manière comparable aux couples mariés dans le cadre de sa législation sur les étrangers; les enfants mineurs célibataires d’une personne relevant de l’une des deux catégories susmentionnées, ou de son conjoint, qu’ils soient légitimes, nés hors mariage ou adoptés; d’autres parents proches qui vivaient au sein de l’unité familiale au moment des circonstances entourant l’afflux massif et qui étaient alors entièrement ou principalement à la charge d’une personne relevant de l’une des deux catégories susmentionnées.

La protection temporaire est l’instrument approprié dans la présente situation. Eu égard au caractère extraordinaire et exceptionnel de l’invasion militaire de l’Ukraine par la Russie et à l’ampleur de l’afflux massif, la protection temporaire devrait rapidement permettre aux personnes déplacées de jouir de droits harmonisés dans toute l’Union qui offrent un niveau de protection adéquat, notamment un titre de séjour, la possibilité d’exercer une activité salariée ou indépendante, l’accès à un hébergement approprié, l’assistance nécessaire en matière d'aide sociale, une aide médicale ou autre, et des moyens de subsistance. Dans le cas des mineurs non accompagnés, la protection temporaire devrait en outre leur permettre de bénéficier de la tutelle légale. Les personnes de moins de 18 ans devraient également avoir accès à l’éducation.

L’introduction d’une protection temporaire servirait également les intérêts des États membres concernés par l’afflux massif puisque, jouissant des droits associés à la protection temporaire, ces personnes déplacées auraient moins besoin de demander immédiatement une protection internationale, ce qui limiterait le risque de submerger les régimes d’asile des États membres, les formalités étant réduites au minimum en raison de l’urgence de la situation. Les mesures prévues dans la directive relative à la protection temporaire et les mesures nationales d’exécution permettraient donc aux États membres de gérer l’afflux de personnes déplacées de manière contrôlée et efficace, dans le plein respect des droits fondamentaux et des obligations internationales.

Une protection temporaire permettrait aux États membres de se préparer pour faire face à l’afflux actuel et à l’afflux imminent de personnes déplacées en provenance d’Ukraine qui demandent une protection internationale. Elle permettrait également aux États membres de s’occuper des Ukrainiens qui, bénéficiant d’un régime d’exemption de visa, chercheront une autre forme de statut une fois expirés les 90 jours de séjour régulier dans l’Union. D’après l’expérience de 2014, on peut s’attendre à ce que nombre d’entre eux n’aient pas d’autre choix que d’entamer des démarches pour obtenir une protection internationale. La présente proposition répond donc également à l’appel du Conseil européen à faire avancer les travaux pour se préparer et être prêts et constitue l’un des éléments de la réponse de l’Union à la pression migratoire résultant de l’incursion militaire russe en Ukraine.

Dernier point mais non des moindres, les dispositions prévues par la directive relative à la protection temporaire tendent à assurer un équilibre entre les efforts consentis par les États membres supportant les conséquences de l’accueil de personnes déplacées en provenance d’Ukraine. Les ressortissants ukrainiens, en tant que voyageurs exemptés de l’obligation de visa, pourront circuler librement après avoir été admis sur le territoire de l’UE, ce qui leur permettra de rejoindre leur famille et leurs amis au sein de l’importante diaspora actuellement présente dans toute l’Union européenne, facilitant ainsi un équilibre entre les efforts consentis par les États membres. La proposition aiderait l’Union et ses États membres à assurer une gestion efficace et contrôlée des flux de personnes déplacées en provenance d’Ukraine au sein de l’Union européenne en cas d’arrivées massives.

La décision d’exécution du Conseil permettra à l’UE de coordonner et de suivre de près les capacités d’accueil dans les États membres afin de prendre des mesures et d’apporter un soutien supplémentaire en cas de nécessité. La directive impose aux États membres, en liaison avec la Commission, de coopérer et d’échanger des informations afin de faciliter la mise en œuvre de la protection temporaire. Cela peut prendre la forme d’une «plateforme de solidarité» permettant aux États membres d’échanger des informations sur leurs capacités d’accueil et le nombre de personnes bénéficiant d’une protection temporaire sur leur territoire. À cette fin, la proposition confie un rôle de coordination à la Commission. En outre, ces dernières années, différentes plateformes ont été mises en place dans le but d’assurer une coopération entre les États membres. Parmi ces plateformes, la proposition choisit de recourir au réseau de préparation et de gestion de crise en matière de migration [conformément à la recommandation (UE) 2020/1366 de la Commission du 23 septembre 2020 relative à un mécanisme de l’Union européenne de préparation et de gestion de crise en matière de migration] comme étant le cadre le plus adapté à la coopération administrative prévue par la directive 2001/55/CE.

Au cours des années qui ont suivi l’adoption de la directive, plusieurs agences de l’UE ont été créées ou ont vu leur mandat renforcé. C’est pourquoi la proposition inclut spécifiquement l’exigence pour la Commission de coopérer avec l’Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes (Frontex), l’Agence de l’Union européenne pour l’asile et l’Agence de l’Union européenne pour la coopération des services répressifs (Europol) afin d’exercer un suivi et un réexamen constants de la situation.

Conformément à la directive 2001/55/CE, la durée de la protection temporaire est d'une année et, à moins qu'il n'y soit mis fin par une autre voie, elle peut être prorogée automatiquement par périodes de six mois pour une durée maximale d'un an. La Commission, dans le cadre du suivi dont elle a la charge et conformément à l’article 6 de la directive 2001/55/CE, peut à tout moment proposer au Conseil de mettre fin à la protection temporaire, en se fondant sur la constatation que la situation en Ukraine permet un retour sûr et durable des personnes ayant bénéficié de la protection temporaire. La Commission peut également proposer au Conseil de prolonger la protection temporaire si la période initiale n’est pas jugée suffisante pour permettre aux États membres de gérer efficacement la situation, ou si la situation ne permet toujours pas aux personnes bénéficiant d’une protection temporaire de retourner en toute sécurité en Ukraine.

Cohérence avec les dispositions existantes dans le domaine d'action

La présente proposition est en parfaite cohérence avec l’acquis de l’UE en matière d’asile, puisque la directive relative à la protection temporaire fait partie intégrante du régime d’asile européen commun et qu’elle a été conçue pour face à une situation extraordinaire d’afflux massif de personnes déplacées, comme c’est actuellement le cas en raison de l’invasion de l’Ukraine par la Fédération de Russie. En outre, elle répond parfaitement à l’objectif de l’Union européenne visant à mettre en place un espace de liberté, de sécurité et de justice ouvert à ceux qui, poussés par les circonstances, recherchent légitimement une protection internationale dans l’Union européenne.

Les éléments de la proposition sont également conformes au pacte sur la migration et l’asile de septembre 2020 et aux propositions législatives qui l’accompagnent. Dans le cadre du pacte, la Commission a proposé d’abroger la directive relative à la protection temporaire et de la remplacer par un règlement amélioré qui sauvegarderait la notion de statut de protection temporaire mais viserait à faire face plus généralement aux situations de crise et aux cas de force majeure dans le domaine de la migration et de l’asile, en veillant à ce que les nouveaux outils européens opèrent de manière cohérente dans le cadre de la nouvelle approche globale proposée par le pacte. Toutefois, étant donné que les propositions législatives correspondantes sont en cours de négociation et que leur adoption n’interviendra pas à brève échéance, le règlement visant à faire face aux crises et aux cas de force majeure ne saurait constituer une réponse au défi que pose la crise ukrainienne dans l’immédiat. La directive relative à la protection temporaire, qui constitue l’acquis actuel en vigueur, offre l’outil approprié pour remédier à la situation de manière efficace et proportionnée.

Cohérence avec les autres politiques de l'Union

La présente proposition est pleinement conforme à l’exigence de maintenir des frontières extérieures solides en permettant aux États membres de traiter d’éventuelles demandes de protection internationale de manière ordonnée sans submerger leurs régimes d’asile en cas d’afflux massif d’Ukrainiens déplacés, évitant ainsi des difficultés aux points de passage frontaliers situés aux frontières extérieures orientales de l’Union européenne. Elle cadre également avec les mesures relevant de l’action extérieure de l’Union, comme les sanctions et autres mesures restrictives adoptées par l’UE, et devrait être utilisée parallèlement à celles-ci. La présente proposition fait partie d’un ensemble complet d’actions de l’UE qui répondent à l’incursion militaire russe en Ukraine.

2.BASE JURIDIQUE, SUBSIDIARITÉ ET PROPORTIONNALITÉ

Base juridique

La base juridique de la proposition est la directive 2001/55/CE du Conseil du 20 juillet 2001 relative à des normes minimales pour l'octroi d'une protection temporaire en cas d'afflux massif de personnes déplacées et à des mesures tendant à assurer un équilibre entre les efforts consentis par les États membres pour accueillir ces personnes et supporter les conséquences de cet accueil, et notamment son article 5.

Subsidiarité (en cas de compétence non exclusive)

Le titre V du TFUE relatif à l’espace de liberté, de sécurité et de justice investit l’Union européenne de certaines compétences dans ces matières. Ces compétences doivent être exercées conformément à l’article 5 du traité sur l’Union européenne, c’est-à-dire si, et dans la mesure où, les objectifs de l’action envisagée ne peuvent pas être atteints de manière suffisante par les États membres et peuvent donc l’être mieux, en raison des dimensions ou des effets de l’action envisagée, au niveau de l’Union européenne.

Une situation dans laquelle le bon fonctionnement des régimes d’asile des États membres est menacé en raison d’un afflux massif de personnes déplacées en provenance d’un pays voisin de l’Union européenne qui ont fui des zones de conflit armé devrait être considérée comme ayant une incidence sur l’Union dans son ensemble et nécessitant dès lors des solutions et un soutien de l’UE. Il est nécessaire que tous les États membres réagissent rapidement et mobilisent le soutien nécessaire pour faire face efficacement à cet afflux et garantir les mêmes normes et les mêmes droits dans l’ensemble de l’Union.

La réalisation de ces objectifs nécessite une action au niveau de l’UE étant donné qu’ils sont transnationaux par nature. De toute évidence, les mesures prises individuellement par les États membres ne sauraient répondre de manière satisfaisante à la nécessité, pour l’UE, d’adopter une approche commune face à un problème commun.

Cette approche commune ne peut pas être réalisée de manière suffisante par les États membres agissant individuellement et peut, en raison des dimensions et des effets de la présente proposition de décision d’exécution du Conseil, l’être mieux au niveau de l’Union. L’Union doit donc intervenir et peut adopter des mesures conformément au principe de subsidiarité énoncé à l’article 5, paragraphe 3, du traité sur l’Union européenne.

Proportionnalité

Conformément au principe de proportionnalité énoncé à l’article 5, paragraphe 4, du traité sur l’Union européenne, la présente proposition de décision d’exécution du Conseil décrit le groupe spécifique de personnes auquel elle s’applique, indique la date de mise en œuvre de la protection temporaire et fournit une estimation de l’ampleur des mouvements de personnes déplacées.

Tous les éléments des mesures proposées pour faire face à la situation spécifique d’un afflux massif de personnes déplacées, en l’occurrence des Ukrainiens, vers l’Union européenne sont clairement décrits dans la directive relative à la protection temporaire et se limitent à ce qui est nécessaire pour que les États membres puissent gérer la situation de manière ordonnée et efficace tout en assurant aux personnes concernées l’égalité de traitement du point de vue des droits et des garanties. Conformément aux exigences de la directive relative à la protection temporaire, ces mesures sont également limitées dans le temps et sont nécessaires pour permettre aux États membres concernés de faire face à une situation aux frontières extérieures orientales de l’Union européenne qui met en péril la sécurité et la stabilité de l’Union. La directive autorise les États membres à appliquer des dispositions plus favorables.

Choix de l'instrument

En vertu de l’article 5 de la directive 2001/55/CE du Conseil, une décision d’exécution du Conseil est nécessaire pour établir l’existence d’un afflux massif de personnes déplacées et mettre en place une protection temporaire pour ces personnes.

3.RÉSULTATS DES ÉVALUATIONS EX POST, DES CONSULTATIONS DES PARTIES INTÉRESSÉES ET DES ANALYSES D'IMPACT

Élaboration des politiques sur la base d’éléments concrets

La proposition a été élaborée d’urgence, comme la situation le commandait. La proposition contient des dispositions relatives à la coopération entre la Commission, les États membres et les agences de l’UE, ainsi qu’à l’obligation, pour les États membres, de communiquer les données et statistiques pertinentes via le réseau de préparation et de gestion de crise en matière de migration de l’UE. Les éléments d’appréciation de l’ampleur potentielle des mouvements de personnes déplacées sont fondés sur les données les plus récentes partagées dans le cadre dudit réseau et sur les scénarios élaborés à partir des scénarios des agences des Nations unies pour les personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays et des informations recueillies au sujet des mouvements (de demandeurs d’asile et de migration légale) observés après 2014, ainsi que de la taille et de la composition (russe/non russe) de la population des régions touchées dans les différents scénarios. Cinq scénarios initiaux tenant compte de l’intensité de l’intervention russe en Ukraine ont été établis.

Le scénario D repose sur l’hypothèse d’une invasion militaire d’une grande partie de l’Ukraine, dont les trois plus grandes villes: Kiev, Kharkiv et Odessa, comme c’est le cas actuellement; le scénario E, sur l’hypothèse d’une intensification considérable des hostilités et d’une invasion du pays tout entier. Sur la base de ces scénarios, on peut s’attendre à ce qu’entre 2,5 et 6,5 millions de personnes déplacées entrent dans l’Union européenne. Le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés estime que, dans le scénario le plus pessimiste, jusqu’à 4 millions de personnes pourraient fuir l’Ukraine.

Compte tenu des tendances observées pour les titres de séjour et les demandes de protection internationale après les événements de 2014, environ la moitié des personnes déplacées devraient être prises en charge par les importants réseaux existants de la diaspora un peu partout dans l’UE et exploiteront les possibilités de migration légale, principalement, mais pas uniquement, dans les pays de destination «traditionnels» (Pologne, République tchèque, Allemagne, Italie et Espagne), sans qu’aucune pression soit exercée sur la capacité d’accueil de ces pays. L’autre moitié, entre 1,2 million et 3,5 millions de personnes, pourrait demander une protection internationale sur une période de deux ans.

Consultation des parties intéressées et obtention et utilisation d’expertise

Lorsque le risque d’une intervention militaire russe en Ukraine est devenu patent, la Commission a activé le mécanisme de suivi régulier par l’intermédiaire du réseau de préparation et de gestion de crise en matière de migration afin de consulter les États membres, le Service européen pour l’action extérieure et les agences de l’UE concernées et de partager des données, des informations et des renseignements, qui font l’objet de rapports réguliers. La Commission a également consulté le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés, qui a évalué la situation et fourni une contribution pertinente. Le Haut-Commissariat s’est félicité du soutien exprimé par de nombreux États membres en faveur de l’activation de la directive 2001/55/CE, qui permet un refuge immédiat et temporaire dans l’Union et facilite le partage des responsabilités entre les États européens en ce qui concerne les personnes fuyant l’Ukraine.

Droits fondamentaux

La présente proposition respecte les droits fondamentaux et observe les principes reconnus, en particulier, par la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, ainsi que les obligations découlant du droit international, et notamment de la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, modifiée par le protocole de New York du 31 janvier 1967.

4.INCIDENCE BUDGÉTAIRE

En raison de la nature de la présente proposition, il n’est pas possible d’estimer a priori l’éventuelle incidence budgétaire. La proposition sera intégrée dans le budget des instruments de financement existants de l’UE pour les périodes 2014-2020 et 2021-2027 dans le domaine de la migration, de l’asile et de la gestion des frontières. La Commission étudiera les possibilités d’utiliser pleinement le financement au titre du Fonds «Affaires intérieures». Exceptionnellement, si cela devait s’avérer nécessaire en cas de nouvelle aggravation de la situation, les ressources disponibles dans le CFP 2021-2027 pourraient être redéployées. Dans le cas où d’autres besoins exceptionnels apparaîtraient, les mécanismes de flexibilité prévus dans le CFP 2021-2027 pourraient être activés.

5.AUTRES ÉLÉMENTS

Explication détaillée de certaines dispositions de la proposition

L’article 1er constate l’existence d’un afflux massif dans l’Union de personnes déplacées qui ont dû quitter l’Ukraine en raison d’un conflit armé.

L’article 2 décrit le groupe de personnes auquel s’appliquera la protection temporaire. Cette disposition introduit une protection temporaire pour les ressortissants ukrainiens résidant en Ukraine qui ont été déplacés à partir du 24 février 2022 à la suite de l’invasion militaire des forces armées russes à cette date. Afin de respecter l’esprit de la directive 2001/55/CE, l’article 2 introduit également une protection temporaire pour les ressortissants de pays tiers et les apatrides en séjour régulier en Ukraine qui ont été déplacés à partir du 24 février 2022 et qui ne sont pas en mesure de retourner dans leur pays ou leur région d’origine dans des conditions sûres et durables en raison de la situation qui règne dans ce pays. Cela pourrait inclure des personnes qui bénéficiaient du statut de réfugié ou d’une protection équivalente ou qui étaient demandeurs d’asile en Ukraine au moment des événements ayant conduit à l’afflux massif. Les ressortissants de pays tiers en séjour régulier de longue durée en Ukraine au moment des événements ayant conduit à l’afflux massif devraient bénéficier d’une protection temporaire, que les membres de la famille puissent ou non retourner dans leur pays d’origine dans des conditions sûres et durables.

Comme il importe en outre de préserver l’unité des familles et d’éviter que des membres d’une même famille jouissent de statuts différents, l’article 2 prévoit également une protection temporaire pour les membres des familles qui étaient déjà constituées en Ukraine au moment des circonstances entourant l’afflux massif, que les membres de la famille puissent ou non retourner dans leur pays d’origine dans des conditions sûres et durables. Est considéré comme un membre de la famille, le conjoint de la personne qui bénéficie de la protection temporaire ou son/sa partenaire non marié(e) engagé(e) dans une relation stable, lorsque la législation ou la pratique en vigueur dans l'État membre concerné accorde aux couples non mariés un traitement comparable à celui des couples mariés dans le cadre de sa législation sur les étrangers; les enfants mineurs célibataires de la personne bénéficiant d’une protection temporaire ou de son conjoint, qu’ils soient légitimes, nés hors mariage ou adoptés; et d’autres parents proches qui vivaient au sein de l’unité familiale au moment des circonstances entourant l’afflux massif et qui étaient alors entièrement ou principalement à la charge de la personne bénéficiant de la protection temporaire à ce moment-là.

L’article 3 dispose que le réseau de préparation et de gestion des crises en matière de migration sera utilisé comme principale plateforme pour assurer la coopération administrative aux fins de l’article 27 de la directive 2001/55/CE du Conseil. Cette disposition prévoit également que les États membres devraient aussi contribuer à une connaissance commune de la situation au niveau de l’Union par le partage d’informations pertinentes au travers du dispositif intégré pour une réaction au niveau politique dans les situations de crise et la consultation du Service européen pour l’action extérieure, le cas échéant. En vertu de cette disposition, la Commission assumera un rôle de coordination de la coopération et de l’échange d’informations entre les États membres, notamment en ce qui concerne le suivi des capacités d’accueil dans chaque État membre et le recensement de tout besoin de soutien supplémentaire. À cette fin, la Commission assurera, en coopération avec les États membres, l’Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes (Frontex), l’Agence de l’Union européenne pour l’asile et l’Agence de l’Union européenne pour la coopération des services répressifs (Europol), un suivi et un réexamen permanents de la situation. En outre, ces agences de l’UE devraient apporter un soutien aux États membres.

L’article 4, compte tenu du caractère exceptionnel et de l’urgence de la situation, fixe l’entrée en vigueur de la décision du Conseil au jour de sa publication.

2022/0069 (NLE)

Proposition de

DÉCISION D’EXÉCUTION DU CONSEIL

constatant l’existence d’un afflux massif de personnes déplacées en provenance d’Ukraine, au sens de l’article 5 de la directive 2001/55/CE du Conseil du 20 juillet 2001, et ayant pour effet d’introduire une protection temporaire

LE CONSEIL DE L'UNION EUROPÉENNE,

vu le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne,

vu la directive 2001/55/CE du Conseil du 20 juillet 2001 relative à des normes minimales pour l’octroi d’une protection temporaire en cas d’afflux massif de personnes déplacées et à des mesures tendant à assurer un équilibre entre les efforts consentis par les États membres pour accueillir ces personnes et supporter les conséquences de cet accueil 3 , et notamment son article 5,

vu la proposition de la Commission européenne,

considérant ce qui suit:

(1)Le 24 février 2022, les forces armées russes ont lancé une invasion à grande échelle de l’Ukraine en plusieurs points depuis la Fédération de Russie, la Biélorussie et à partir de régions de l’Ukraine qui ne sont pas contrôlées par le gouvernement.

(2)En conséquence, des parties considérables du territoire ukrainien constituent désormais des zones de conflit armé d’où ont fui des milliers de personnes.

(3)À la suite de cette invasion, le Conseil européen, dans ses conclusions du 24 février 2022, a condamné avec la plus grande fermeté l’agression militaire non provoquée et injustifiée commise par la Russie contre l’Ukraine, en soulignant la violation flagrante du droit international et des principes de la charte des Nations unies, qui vise à porter atteinte à la sécurité et à la stabilité européennes et mondiales. Le Conseil européen a appelé la Russie à respecter pleinement l’intégrité territoriale, la souveraineté et l’indépendance de l’Ukraine à l’intérieur de ses frontières reconnues au niveau international, ce qui incluait le droit de l’Ukraine de choisir son propre destin. Le Conseil européen a en outre confirmé que le gouvernement russe portait l’entière responsabilité de son acte d’agression engendrant des souffrances et des pertes de vies humaines, et qu’il devrait répondre de ses actes. Par solidarité avec l’Ukraine, le Conseil européen a adopté une deuxième série de sanctions et a appelé à faire avancer les travaux de préparation à tous les niveaux, invitant la Commission à proposer des mesures d’urgence.

(4)L’Union a montré, et continuera de montrer, son soutien résolu à l’Ukraine et à ses citoyens, face à un acte d’agression sans précédent de la part de la Fédération de Russie. La présente proposition s’inscrit dans le cadre de la réponse de l’Union à la pression migratoire résultant de l’invasion militaire russe en Ukraine.

(5)Le conflit a déjà des implications pour l’Union, y compris la probabilité qu’une forte pression migratoire soit exercée sur ses frontières orientales au fur et à mesure de l’évolution du conflit. Au 1er mars, plus de 650 000 personnes déplacées étaient arrivées dans l’Union européenne en passant par la Pologne, la Slovaquie, la Hongrie et la Roumanie. Ces chiffres devraient croître encore davantage.

(6)L’Ukraine figure sur la liste de l’annexe II du règlement (UE) 2018/1806 4 et les ressortissants ukrainiens sont exemptés de l’obligation de visa lors du franchissement des frontières extérieures des États membres pour des séjours n’excédant pas 90 jours sur toute période de 180 jours. Sur la base de l’expérience acquise au lendemain de l’annexion illégale, par la Russie, en 2014, de la République autonome de Crimée et de la ville de Sébastopol, ainsi que de la guerre dans l’est de l’Ukraine, on estime que la moitié des Ukrainiens qui arriveront dans l’Union en bénéficiant d’un régime d’exemption de visa rejoindront des membres de leur famille ou chercheront un emploi dans l’Union, tandis que l’autre moitié demandera une protection internationale. En fonction de l’évolution du conflit et sur la base des estimations actuelles, l’Union pourrait être confrontée à l’arrivée d'un nombre très important de personnes déplacées en raison du conflit armé, potentiellement compris entre 2,5 et 6,5 millions de personnes, dont on prévoit qu’entre 1,2 et 3,2 millions devraient demander une protection internationale. Le Haut-Commissaire des Nations unies pour les réfugiés estime, dans le scénario le plus pessimiste, que jusqu’à 4 millions de personnes pourraient fuir l’Ukraine.

(7)Il ressort de ces chiffres que l’Union est susceptible de faire face à une situation caractérisée par un afflux massif de personnes déplacées en provenance d’Ukraine, qui ne sont pas en mesure de retourner dans leur pays ou leur région d’origine en raison de l’agression militaire russe, et que l’ampleur de cet afflux serait telle que les régimes d’asile des États membres risquent manifestement de ne pas être en mesure de traiter ces arrivées sans qu’il soit porté atteinte au bon fonctionnement de ces régimes, aux intérêts des personnes concernées et à ceux d’autres demandeurs d’une protection.

(8)Les Nations unies ont lancé un «appel éclair» humanitaire pour répondre aux besoins de protection et d’assistance en Ukraine, ainsi que le plan régional d’aide aux réfugiés pour l’Ukraine, qui apporte des précisions sur le nombre de personnes ayant besoin d’aide et sur celles qui seront ciblées par l’assistance.

(9)Le Haut-Commissaire des Nations unies pour les réfugiés s’est félicité du soutien exprimé par de nombreux États membres en faveur de l’activation de la directive 2001/55/CE, qui permet un refuge immédiat et temporaire dans l’Union et facilite le partage des responsabilités entre les États européens en ce qui concerne les personnes fuyant l’Ukraine.

(10)Pour faire face à cette situation, il convient d’établir l’existence d’un afflux massif de personnes déplacées au sens de la directive 2001/55/CE, avec pour effet d’instaurer une protection temporaire pour les personnes déplacées concernées.

(11)La présente décision d’exécution vise à introduire une protection temporaire pour les ressortissants ukrainiens résidant en Ukraine qui ont été déplacés à partir du 24 février 2022 à la suite de l’invasion militaire des forces armées russes à cette date. Afin de respecter l’esprit de la directive 2001/55/CE, une protection temporaire devrait également être introduite pour les ressortissants de pays tiers en séjour régulier en Ukraine qui ont été déplacés à partir du 24 février 2022 et qui ne sont pas en mesure de retourner dans leur pays ou leur région d’origine dans des conditions sûres et durables en raison de la situation qui prévaut dans ce pays. Cela pourrait inclure des personnes qui bénéficiaient du statut de réfugié ou d’une protection équivalente ou qui étaient demandeurs d’asile en Ukraine au moment des événements ayant conduit à l’afflux massif. En outre, pour les ressortissants de pays tiers non ukrainiens qui sont résidents de longue durée en Ukraine, la condition de ne pas pouvoir retourner dans leur pays ou région d’origine ne devrait pas s’appliquer. Ces ressortissants devraient donc aussi bénéficier d’une protection temporaire. Il importe également de préserver l’unité des familles et d’éviter que les différents membres d’une même famille jouissent de statuts différents. Par conséquent, il est nécessaire d’introduire une protection temporaire pour les membres des familles qui étaient déjà constituées en Ukraine au moment des circonstances entourant l’afflux massif, que les membres de la famille puissent ou non retourner dans leur pays d’origine dans des conditions sûres et durables.

(12)Toutefois, les ressortissants de pays tiers non ukrainiens ou les apatrides qui sont en mesure de retourner dans leur pays ou région d’origine dans des conditions sûres et durables et qui ne peuvent être considérés comme des résidents de longue durée en Ukraine ou des membres de la famille d’une personne bénéficiant d’une protection temporaire ne devraient pas relever du champ d’application de la présente décision. Il pourrait notamment s’agir des ressortissants de pays tiers qui étudiaient ou travaillaient en Ukraine pour une courte période au moment des événements ayant conduit à l’afflux massif et qui peuvent retourner en toute sécurité dans leur pays d’origine. Ces personnes devraient néanmoins être admises dans l’Union pour des raisons humanitaires sans exiger, en particulier, la possession d’un visa en cours de validité ou de moyens de subsistance suffisants ou d’un document de voyage en cours de validité, afin d’assurer un passage en toute sécurité en vue de leur retour dans leur pays ou région d’origine.

(13)Conformément à la directive 2001/55/CE, les États membres peuvent faire bénéficier de la protection temporaire des catégories supplémentaires de personnes déplacées qui ne sont pas visées par la présente décision du Conseil, lorsqu'elles sont déplacées pour les mêmes raisons et à partir du même pays ou de la même région d'origine. Dans ce cas, ils devraient en informer immédiatement le Conseil et la Commission. Dans ce contexte, les États membres devraient être encouragés à envisager d’étendre la protection temporaire aux personnes qui ont fui l’Ukraine peu avant le 24 février 2022, alors que la tension augmentait, ou qui se sont retrouvées sur le territoire de l’Union (par exemple, en vacances ou pour des raisons professionnelles) juste avant cette date et qui, en raison du conflit armé, ne peuvent pas retourner en Ukraine.

(14)La protection temporaire est l’instrument le plus approprié dans la présente situation. Eu égard au caractère extraordinaire et exceptionnel de l’invasion militaire de l’Ukraine par la Fédération de Russie et à l’ampleur de l’afflux massif, la protection temporaire devrait permettre aux personnes déplacées de jouir dans toute l’Union de droits harmonisés offrant un niveau de protection adéquat. L’introduction d’une protection temporaire servirait également les intérêts des États membres puisque, jouissant des droits associés à la protection temporaire, les personnes déplacées ont moins besoin de demander immédiatement une protection internationale, ce qui limite le risque de submerger les régimes d’asile des États membres concernés, les formalités étant réduites au minimum en raison de l’urgence de la situation. En outre, les ressortissants ukrainiens, en tant que voyageurs exemptés de l’obligation de visa, ont le droit de circuler librement dans l’Union pendant une période de 90 jours après avoir été admis sur le territoire. Sur cette base, ils peuvent choisir l’État membre dans lequel ils souhaitent bénéficier des droits attachés à la protection temporaire et rejoindre leur famille et leurs amis au sein des vastes réseaux de diasporas qui existent actuellement dans l’ensemble de l’Union. Dans la pratique, cela facilitera l’équilibre des efforts entre les États membres, réduisant ainsi la pression sur les systèmes nationaux d’accueil. Une fois qu’un État membre a délivré un titre de séjour conformément à la directive 2001/55/CE, la personne bénéficiant d’une protection temporaire, tout en ayant le droit de voyager au sein de l’Union pendant 90 jours sur une période de 180 jours, ne devrait pouvoir se prévaloir des droits découlant de la protection temporaire que dans l’État membre qui a accordé le titre de séjour. Cela devrait s’entendre sans préjudice de la possibilité pour un État membre de décider de délivrer à tout moment un titre de séjour aux personnes bénéficiant d’une protection temporaire en vertu de la présente décision d’exécution.

(15)La présente décision serait compatible avec les régimes nationaux de protection temporaire, qui peuvent être considérés comme mettant en œuvre la directive, et peut être appliquée en complémentarité avec ces régimes. Si l’État membre dispose d’un régime national plus favorable que la directive, il devrait pouvoir continuer à l’appliquer, étant donné que, conformément à la directive 2001/55/CE, les États membres peuvent adopter ou maintenir des conditions plus favorables pour les personnes bénéficiant d’une protection temporaire. En revanche, si le régime national était moins favorable, l’État membre devrait garantir les droits supplémentaires prévus dans la directive.

(16)La directive 2001/55/CE tient dûment compte des responsabilités qui incombent aux États membres en ce qui concerne le maintien de l’ordre public et la sauvegarde de la sécurité intérieure, puisqu’elle permet aux États membres d’exclure du bénéfice de la protection temporaire les personnes déplacées dont on a des raisons sérieuses de penser qu'elles ont commis un crime contre la paix, un crime de guerre ou un crime contre l'humanité, au sens des instruments internationaux élaborés pour prévoir des dispositions relatives à ces crimes; qu'elles ont commis un crime grave de droit commun en dehors de l'État membre d'accueil avant d'y être admises en tant que bénéficiaires de la protection temporaire; ou qu'elles se sont rendues coupables d'agissements contraires aux buts et aux principes des Nations unies. La directive permet également aux États membres d’exclure du bénéfice de la protection temporaire les personnes déplacées dont on a des motifs raisonnables de penser qu'elles représentent un danger pour la sécurité de l'État membre d'accueil ou qu'elles constituent une menace pour la communauté de cet État membre d'accueil.

(17)Lorsqu’ils accordent une protection temporaire, les États membres devraient veiller à ce que le traitement des données à caractère personnel des personnes bénéficiant d’une protection temporaire respecte les exigences établies dans l’acquis de l’Union européenne en matière de protection des données, en particulier le règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil 5 .

(18)La présente décision d’exécution devrait permettre à l’Union de coordonner et de suivre de près les capacités d’accueil dans les États membres afin de prendre des mesures et d’apporter un soutien supplémentaire si nécessaire. La directive 2001/55/CE impose aux États membres, en liaison avec la Commission, de coopérer et d’échanger des informations afin de faciliter la mise en œuvre de la protection temporaire. Cela devrait se faire au moyen d’une «plateforme de solidarité» permettant aux États membres d’échanger des informations sur leurs capacités d’accueil et le nombre de personnes bénéficiant d’une protection temporaire sur leur territoire. Jusqu’à présent, sur la base des informations communiquées par quelques États membres dans le cadre du réseau de préparation et de gestion de crise en matière de migration, les capacités d’accueil, au-delà de la capacité d’absorption de la diaspora résidant dans l’Union, représentent plus de 310 000 places, au minimum. Aux fins de cet échange d’informations, la Commission devrait assumer un rôle de coordination. En outre, ces dernières années, différentes plateformes ont été mises en place dans le but d’assurer une coopération entre les États membres. Parmi ces plateformes, le réseau de préparation et de gestion de crise en matière de migration [conformément à la recommandation (UE) 2020/1366 de la Commission] est le plus adapté à la coopération administrative prévue par la directive 2001/55/CE. Les États membres devraient également être encouragés à contribuer à une connaissance commune de la situation au niveau de l’Union par le partage d’informations pertinentes dans le cadre du dispositif intégré pour une réaction au niveau politique dans les situations de crise (IPCR). Le cas échéant, le Service européen pour l’action extérieure devrait être consulté. Dans ce contexte, les États membres devraient également travailler en étroite collaboration avec le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés.

(19)Conformément à la directive 2001/55/CE, la durée de la protection temporaire devrait être initialement d’une année. À moins qu’il n’y soit mis fin sur la base de l’article 6, paragraphe 1, point b), de la directive, cette durée initiale peut être prorogée automatiquement par périodes de six mois pour une durée maximale d’un an. La Commission assurera un suivi et un réexamen constants de la situation. À tout moment, elle peut proposer au Conseil de mettre fin à la protection temporaire, en se fondant sur la constatation que la situation en Ukraine permet un retour sûr et durable des personnes ayant bénéficié de la protection temporaire, ou de proroger la protection temporaire pour une durée maximale d’un an.

(20)Aux fins de l’article 24 de la directive 2001/55/CE du Conseil, la référence au Fonds européen pour les réfugiés mis en place par la décision 2000/596/CE devrait s’entendre comme une référence au Fonds «Asile, migration et intégration» institué par le règlement (UE) 2021/1147. Tous les efforts déployés par les États membres pour se conformer aux obligations découlant de la présente décision d’exécution seront soutenus financièrement par les Fonds de l’Union. Les mécanismes d’urgence et de flexibilité prévus par le cadre financier pluriannuel 2021-2027 peuvent également mobiliser des fonds pour répondre à des besoins urgents spécifiques dans les États membres. En outre, le mécanisme de protection civile de l’Union a été activé 6 . Grâce audit mécanisme, les États membres peuvent demander des articles essentiels pour répondre aux besoins des personnes déplacées originaires d’Ukraine présentes sur leur territoire et bénéficier d’un cofinancement pour la fourniture d’une telle assistance.

(21)Depuis l’adoption de la directive 2001/55/CE, plusieurs agences de l’Union ont été créées ou ont vu leur mandat renforcé. Dans ce contexte, la Commission devrait coopérer avec l’Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes (Frontex), l’Agence de l’Union européenne pour l’asile (AUEA) et l’Agence de l’Union européenne pour la coopération des services répressifs (Europol) afin d’exercer un suivi et un réexamen constants de la situation. En outre, l’Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes (Frontex), l’Agence de l’Union européenne pour l’asile (AUEA) et Europol devraient apporter un soutien opérationnel aux États membres qui en ont fait la demande, ce afin de les aider à faire face à la situation, y compris aux fins de l’application de la présente décision d’exécution.

(22)La présente décision d’exécution respecte les droits fondamentaux et observe les principes reconnus par la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.

(23)Conformément à l’article 4 du protocole nº 21 sur la position du Royaume-Uni et de l’Irlande à l’égard de l’espace de liberté, de sécurité et de justice, annexé au traité sur l’Union européenne et au traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, l’Irlande a notifié, par lettre du 11 avril 2003, son souhait de participer à l’adoption et à l’application de la directive 2001/55/CE. L’Irlande est donc liée par la présente décision d’exécution du Conseil.

(24)Conformément aux articles 1er et 2 du protocole nº 22 sur la position du Danemark annexé au traité sur l’Union européenne et au traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, le Danemark ne participe pas à l’adoption de la présente décision d’exécution et n’est pas lié par celle-ci ni soumis à son application.

(25)Eu égard à l’urgence de la situation, la présente décision d’exécution devrait entrer en vigueur le jour de sa publication au Journal officiel de l’Union européenne,

A ADOPTÉ LA PRÉSENTE DÉCISION:

Article premier

Objet

L’existence d’un afflux massif dans l’Union de personnes déplacées qui ont dû quitter l’Ukraine en raison d’un conflit armé est constatée.

Article 2

Personnes auxquelles s’applique la protection temporaire

1.La présente décision s’applique aux catégories ci-dessous de personnes déplacées à compter du 24 février 2022 à la suite de l’invasion militaire par les forces armées russes à cette date:

(a)les ressortissants ukrainiens résidant en Ukraine;

(b)les ressortissants de pays tiers ou apatrides en séjour régulier en Ukraine et qui ne sont pas en mesure de retourner dans leur pays ou région d’origine dans des conditions sûres et durables;

L’exigence relative au fait de ne pas être en mesure de retourner dans des conditions sûres et durables dans le pays ou la région d’origine ne s’applique pas aux ressortissants de pays tiers ou apatrides en séjour régulier de longue durée en Ukraine.

(c)les membres de la famille des personnes visées aux points a) et b), que lesdits membres de la famille puisse ou non retourner dans des conditions sûres et durables dans leur pays ou région d’origine.

2.Aux fins du paragraphe 1, point c), les personnes suivantes sont considérées comme membres de la famille, dans la mesure où la famille était déjà constituée en Ukraine au moment des circonstances entourant l’afflux massif:

(a)le conjoint d’une personne visée aux points a) ou b) du paragraphe 1 ou son partenaire non marié engagé dans une relation stable, lorsque la législation ou la pratique en vigueur dans l’État membre concerné traite les couples non mariés de manière comparable aux couples mariés dans le cadre de sa législation sur les étrangers;

(b)les enfants mineurs célibataires d’une personne visée aux points a) ou b) du paragraphe 1 ou de son conjoint, qu’ils soient légitimes, nés hors mariage ou adoptés;

(c)d’autres parents proches qui vivaient au sein de l’unité familiale au moment des circonstances entourant l’afflux massif et qui étaient alors entièrement ou principalement à la charge d’une personne visée aux points a) ou b) du paragraphe 1.

Article 3

Coopération et suivi

1.Aux fins de l’article 27 de la directive 2001/55/CE, les États membres utilisent le réseau de préparation et de gestion de crise de l’Union en matière de migration conformément à la recommandation (UE) 2020/1366. Les États membres devraient également contribuer à une connaissance commune de la situation au niveau de l’Union par le partage d’informations pertinentes dans le cadre du dispositif intégré pour une réaction au niveau politique dans les situations de crise.

2.La Commission coordonne la coopération et l’échange d’informations entre les États membres, notamment en ce qui concerne le suivi des capacités d’accueil dans chaque État membre et le recensement de tout besoin d’aide supplémentaire.

À cette fin, la Commission, en coopération avec les États membres, l’Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes (Frontex), l’Agence de l’Union européenne pour l’asile (AUEA) et l’Agence de l’Union européenne pour la coopération des services répressifs (Europol) assure un suivi et un réexamen constants de la situation tout en utilisant le réseau de préparation et de gestion de crise de l’Union en matière de migration visé au paragraphe 1 ci-dessus.

En outre, l’Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes (Frontex), l’Agence de l’Union européenne pour l’asile (AUEA) et Europol apportent un soutien opérationnel aux États membres qui en ont fait la demande, ce afin de les aider à faire face à la situation, y compris aux fins de l’application de la présente décision d’exécution.

Article 4

La présente décision entre en vigueur le jour de sa publication au Journal officiel de l’Union européenne.

Fait à Bruxelles, le

   Par le Conseil

   Le président

(1)    Le règlement (UE) 2018/1806 fixe la liste des pays tiers dont les ressortissants sont soumis à l'obligation de visa pour franchir les frontières extérieures des États membres (annexe I du règlement) et la liste de ceux dont les ressortissants sont exemptés de cette obligation pour des séjours n’excédant pas 90 jours sur toute période de 180 jours (annexe II du règlement). L'exemption de l'obligation de visa s’applique aux titulaires de passeports biométriques délivrés par l'Ukraine en conformité avec les normes de l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI).
(2)    JO L 212 du 7.8.2001, p. 12.
(3)    JO L 212 du 7.8.2001, p. 12.
(4)    Règlement (UE) 2018/1806 du Parlement européen et du Conseil du 14 novembre 2018 fixant la liste des pays tiers dont les ressortissants sont soumis à l’obligation de visa pour franchir les frontières extérieures des États membres et la liste de ceux dont les ressortissants sont exemptés de cette obligation (JO L 303 du 28.11.2018, p. 39).
(5)    Règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, et abrogeant la directive 95/46/CE (règlement général sur la protection des données) (JO L 11 du 4.5.2016, p. 1).
(6)    À compter du 28 février 2022 par la Slovaquie.
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