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Document 52020DC0574

    RAPPORT DE LA COMMISSION AU PARLEMENT EUROPÉEN ET AU CONSEIL en vertu de l’article 85, paragraphe 2, du règlement (UE) nº 648/2012 du Parlement européen et du Conseil du 4 juillet 2012 sur les produits dérivés de gré à gré, les contreparties centrales et les référentiels centraux, tel que modifié par le règlement (UE) 2019/834, évaluant si des solutions techniques viables ont été mises au point pour le transfert, par les dispositifs de régime de retraite, de garanties monétaires et non monétaires en tant que marges de variation et si des mesures sont nécessaires pour faciliter ces solutions techniques viables

    COM/2020/574 final

    Bruxelles, le 23.9.2020

    COM(2020) 574 final

    RAPPORT DE LA COMMISSION AU PARLEMENT EUROPÉEN ET AU CONSEIL

    en vertu de l’article 85, paragraphe 2, du règlement (UE) nº 648/2012 du Parlement européen et du Conseil du 4 juillet 2012 sur les produits dérivés de gré à gré, les contreparties centrales et les référentiels centraux, tel que modifié par le règlement (UE) 2019/834, évaluant si des solutions techniques viables ont été mises au point pour le transfert, par les dispositifs de régime de retraite, de garanties monétaires et non monétaires en tant que marges de variation et si des mesures sont nécessaires pour faciliter ces solutions techniques viables


    RAPPORT DE LA COMMISSION AU PARLEMENT EUROPÉEN ET AU CONSEIL

    en vertu de l’article 85, paragraphe 2, du règlement (UE) nº 648/2012 du Parlement européen et du Conseil du 4 juillet 2012 sur les produits dérivés de gré à gré, les contreparties centrales et les référentiels centraux, tel que modifié par le règlement (UE) 2019/834, évaluant si des solutions techniques viables ont été mises au point pour le transfert, par les dispositifs de régime de retraite, de garanties monétaires et non monétaires en tant que marges de variation et si des mesures sont nécessaires pour faciliter ces solutions techniques viables

    1.INTRODUCTION

    Le règlement sur l’infrastructure du marché européen (ci-après le «règlement EMIR») 1 , qui a introduit dans l’Union européenne, en 2012, les réformes du G20 sur les contrats dérivés de gré à gré (OTC), a accordé une exemption temporaire de l’obligation de compensation centrale aux entités gérant des dispositifs de régime de retraite (ci-après les «DRR»), en ce qui concerne certains types de produits dérivés de gré à gré 2 .

    En vertu du règlement, les DRR comprennent les institutions de retraite professionnelle au sens de l’article 6, point a), de la directive 2003/41/CE, les activités de fourniture de retraite professionnelle des institutions visées à l’article 3 de cette directive, les activités de fourniture de retraite professionnelle exercées par les entreprises d’assurance qui relèvent de la directive 2002/83/CE (sous réserve que les actifs et engagements correspondant auxdites activités soient séparés des autres activités des entreprises d’assurance), ainsi que toute autre entité agréée et surveillée ou tout autre dispositif fonctionnant dans un cadre national dont l’objet est principalement de fournir des prestations de retraite.

    L’exemption temporaire a été accordée afin de tenir compte des caractéristiques particulières du modèle d’entreprise de ces entités et de l’incidence que la compensation obligatoire pourrait avoir sur les pensions: comme le rappelle le considérant 26 du règlement EMIR, les entités gérant des dispositifs de régime de retraite «tendent en règle générale à limiter autant que possible leurs placements en liquide afin d’atteindre une efficacité et une rentabilité maximales pour leurs assurés. Par conséquent, le fait de soumettre ces entités à une obligation de compensation des contrats dérivés de gré à gré les contraindrait à placer en liquide une part importante de leurs actifs afin de respecter les exigences de marge actuelles des contreparties centrales». La compensation centrale des produits dérivés de gré à gré nécessite des liquidités suffisantes pour respecter les exigences de marge des contreparties centrales. Comme l’indique le cadre EMIR, la détention d’abondantes liquidités afin de répondre à d’éventuels appels de marge de variation pourrait avoir une incidence négative sur le niveau de revenus des retraités.

    Une étude indépendante soumise à la Commission par Europe Economics and Bourse Consult en 2014 a estimé la marge de variation potentielle que les fonds de pension de l’Union européenne pourraient être amenés à payer en cas de variation de 1 % des taux. Même si l’étude incluait encore le Royaume-Uni, les résultats à l’exclusion de ce pays ont révélé que ce montant se situerait entre 106 et 133 milliards d’EUR, voire davantage dans des scénarios de crise plus graves.

    Plus récemment, d’autres études ont été menées par l’Eurosystème 3 et la banque centrale danoise 4 . Ces études suggèrent que la marge de variation potentielle des fonds de pension néerlandais et danois – qui représentent environ 52 % des actifs financiers des fonds de pension de l’Union européenne (à l’exclusion du Royaume-Uni) 5  – dans le cadre du même scénario de crise (variation des taux de 1 %) serait inférieure à 53 milliards d’EUR et 106 milliards de couronnes danoises (DKK) (soit environ 14 milliards d’EUR) respectivement, donc légèrement inférieure aux chiffres correspondants 6 de l’étude indépendante susmentionnée. Sur la base des soldes de trésorerie disponibles, le déficit de trésorerie global pourrait s’élever à 17 milliards d’EUR pour l’ensemble des fonds de pension de la zone euro 7 .

    Des évolutions similaires en matière de taux, de coûts et de risques ne seraient pas propres aux seuls DRR, mais toucheraient d’autres entreprises financières qui effectuent également des compensations centrales (par exemple, les fonds d’investissement, les compagnies d’assurance), et des risques de défaillance par manque de garanties éligibles peuvent également apparaître dans le cas de contrats dérivés bilatéraux, et pas seulement dans le monde de la compensation centrale. Cependant, comme le reconnaît l’AEMF dans son premier rapport sur ce sujet, les DRR semblent être plus limités dans leur capacité à atténuer ces risques par la flexibilité des stratégies d’investissement, la disponibilité d’investissements correspondant à leurs engagements et l’accès à des sources de liquidité, comme il est expliqué dans les sections suivantes.

    L’exemption temporaire avait pour objectif de ménager le temps nécessaire pour trouver une solution technique appropriée, qui permettrait aux DRR de procéder à la compensation centrale auprès des contreparties centrales tout en évitant des incidences négatives importantes sur les revenus des retraités. En vertu du cadre EMIR, les activités liées aux produits dérivés de gré à gré des DRR sont déjà soumises – dans les limites des seuils applicables – aux exigences d’atténuation du risque opérationnel et de marge pour les contrats de gré à gré non compensés, énoncés à l’article 11, qui ont commencé à s’appliquer en 2017 selon un calendrier progressif 8 : ces exigences visent à traiter les risques liés aux produits dérivés non compensés par une contrepartie centrale, tout en encourageant la compensation centrale. Les DRR sont également soumis aux obligations de déclaration du règlement EMIR.

    Bien que les discussions avec les DRR et d’autres parties prenantes confirment que les DRR souhaitent compenser les contrats auprès des contreparties centrales, et le font déjà dans certains cas, la compensation obligatoire continue de poser des problèmes. L’exemption de la compensation centrale a donc été étendue au fil des ans, car aucune solution technique viable ne s’est dégagée. Le règlement EMIR Refit, entré en vigueur en juin 2019, prolonge l’exemption jusqu’en juin 2021, avec la possibilité pour la Commission de la prolonger deux fois, à chaque fois d’un an au maximum, par acte délégué. L’objectif ultime du règlement demeure toutefois la compensation centrale des DRR dans les meilleurs délais, étant donné que les évolutions actuelles de la réglementation et des marchés devraient donner la possibilité aux participants du marché de mettre au point des solutions techniques appropriées (considérant 30 du règlement EMIR). Les contreparties centrales, les membres compensateurs et les DRR sont tenus de tout mettre en œuvre pour contribuer à l’élaboration de telles solutions.

    L’article 85 du règlement EMIR Refit impose à la Commission d’élaborer des rapports annuels jusqu’à la prolongation finale de l’exemption, afin d’évaluer «si des solutions techniques viables ont été mises au point pour le transfert, par les dispositifs de régime de retraite, de garanties monétaires et non monétaires en tant que marges de variation et si des mesures sont nécessaires pour faciliter ces solutions techniques viables».

    Le règlement prévoit également que l’AEMF, en coopération avec l’ABE, l’AEAPP et le CERS, présente à la Commission des rapports annuels évaluant la question. Le premier rapport de l’AEMF a été reçu par la Commission en avril 2020. Parallèlement à ce rapport, l’AEMF a lancé une consultation publique afin de recueillir d’autres contributions des parties prenantes et de soumettre un deuxième rapport plus complet à la Commission d’ici décembre 2020. Le rapport complet de l’AEMF ne sera dès lors pas disponible en temps utile pour être intégré dans le présent rapport de la Commission européenne.

    Le règlement EMIR Refit a également mandaté la Commission pour mettre en place un groupe d’experts composé de représentants des parties prenantes concernées afin de contrôler leurs efforts et d’évaluer les progrès réalisés dans la mise au point de solutions techniques viables. Le groupe d’experts, qui poursuit le travail de son prédécesseur (groupe de haut niveau de la Commission sur les fonds de pension), comprend des représentants des contreparties centrales, des membres compensateurs, des DRR, des banques centrales et d’autres parties concernées; il s’est réuni à deux reprises, en octobre 2019 et en avril 2020 (par téléconférence) et continuera à se réunir tous les six mois. La Commission se fonde toujours sur les travaux du groupe pour établir ses rapports aux colégislateurs.

    2.OBJET DU RAPPORT

    Par ce rapport, la Commission remplit l’obligation qui lui incombe en vertu de l’article 85 du règlement EMIR.

    Le présent rapport tient dûment compte du premier rapport de l’AEMF, ainsi que des discussions qui ont eu lieu au sein du groupe d’experts. Comme expliqué, les résultats de la consultation publique lancée par l’AEMF seront intégrés dans le deuxième rapport de la Commission, qui sera publié l’année prochaine.

    Le présent rapport fournit une analyse des principaux problèmes recensés par les parties prenantes au sujet de la compensation centrale des DRR, ainsi que des solutions envisagées jusqu’à présent. Comme mentionné, l’exemption des DRR de la compensation centrale est en vigueur jusqu’en juin 2021: compte tenu de cette échéance, le présent rapport vise à informer le Parlement européen et le Conseil des progrès accomplis dans ce domaine, en vue également de définir les éléments à approfondir afin de favoriser une solution de compensation centrale réalisable et durable.

    3.PRINCIPAUX PROBLÈMES RECENSÉS

    3.1    Informations générales sur le modèle d’entreprise des DRR et l’utilisation des produits dérivés

    Les DRR européens, en particulier dans certains États membres comme les Pays-Bas et le Danemark, participent activement au marché des produits dérivés de gré à gré. Ils utilisent ces produits dérivés pour couvrir leurs engagements contre un certain nombre de risques, notamment la volatilité des taux d’intérêt et de l’inflation, et se protéger au final contre les risques pesant sur leur solvabilité financière. Les engagements des fonds de pension envers les retraités actuels et futurs sont assortis de longues échéances, qui doivent être compensées par des actifs à long terme; ces actifs sont généralement des obligations d’État ou d’entreprise; toutefois, la couverture intégrale des engagements au moyen d’obligations ne semble pas possible pour les DRR de l’Union européenne, en raison de la disponibilité limitée d’obligations présentant les caractéristiques adéquates. En outre, les produits dérivés peuvent offrir une meilleure solution pour les engagements des DRR, car les swaps sont souvent utilisés pour actualiser ces engagements à des fins de valorisation. Comme le souligne l’AEMF, la situation des DRR de l’Union européenne à cet égard est différente de celle des fonds de pension américains, qui s’appuient davantage sur des actifs à long terme tels que des obligations d’entreprises et d’État à des fins de couverture: les fonds de pension américains ont tendance à disposer d’engagements assortis d’une durée plus courte que les DRR de l’Union européenne, leurs engagements sont généralement actualisés sur la base des rendements des obligations d’entreprises notées AA, et le marché américain des obligations d’entreprises est plus profond. En tant que tels, comme le reconnaît l’AEMF, les DRR semblent avoir un besoin structurel de recourir aux produits dérivés de gré à gré.

    Le portefeuille de produits dérivés des DRR est généralement important, à longue échéance et unidirectionnel, la position agrégée du secteur représentant, selon l’AEMF, un risque systémique potentiel.

    En ce qui concerne les types de produits dérivés, les DRR sont de grands utilisateurs de swaps de taux d’intérêt à long terme: selon les données EMIR 2015 de la DTCC (Depository Trust & Clearing Corporation), environ 20 % des swaps de taux d’intérêt avec au moins une contrepartie en tant qu’assureur ou fonds de pension dans l’Union européenne avaient une échéance de 30 ans, contre une moyenne mondiale inférieure à 10 % 9 . Les swaps de taux d’intérêt sont la catégorie de produits dérivés soumise à l’obligation de compensation prévue par le règlement EMIR. Les DRR négocient leurs produits dérivés de manière bilatérale, ou les compensent de manière centralisée auprès des contreparties centrales, généralement en tant que clients des membres compensateurs.

    Il convient de noter que les régimes et les marchés des retraites sont relativement diversifiés dans l’Union européenne: dans certains États membres, les systèmes de retraite du deuxième pilier sont plus développés que dans d’autres, et les fonds de pension à prestations définies sont plus répandus; dans d’autres, ce sont les régimes à cotisations définies qui prévalent. Dans l’Union européenne, les principaux marchés de DRR se trouvent aux Pays-Bas, avec un ratio moyen des actifs par rapport au PIB de 173,3 %, et au Danemark, avec un ratio de 198,6 %, selon les données de fin 2018. L’Irlande dispose également de régimes similaires. Dans ces pays, les régimes de retraite privés jouent un rôle important dans la fourniture de revenus aux retraités.

    3.2    La question de la compensation centrale des DRR

    Le principal problème relevé en ce qui concerne la compensation centrale des DRR tient au fait que la compensation auprès des contreparties centrales exige la fourniture de la marge de variation en espèces; les discussions menées au sein du groupe des parties prenantes de la Commission ont démontré que cela constitue un problème pour les DRR en cas de tensions sur les marchés.

    Dans le modèle de compensation centrale, les contreparties centrales demandent une marge de variation à leurs participants, afin de compenser les variations de la valeur de marché des positions sur produits dérivés qu’elles gèrent. De cette manière, les contreparties centrales sont toujours couvertes contre les fluctuations du marché et les participants au marché n’accumulent pas de pertes importantes au fil du temps par rapport à leur portefeuille compensé par une contrepartie centrale. Les pertes et les gains sont calculés par la contrepartie centrale et échangés quotidiennement dans le cadre du processus d’évaluation au prix du marché. Les liquidités peuvent servir au mieux l’objectif de la marge de variation, car elles réduisent au minimum tout risque de perte de valeur et leur transfert est définitif. Le transfert de liquidités en tant que marge de variation est également moins complexe sur le plan opérationnel et est compatible avec l’approche de la gestion du risque de liquidité des contreparties centrales prévue par le règlement EMIR 10 .

    Cela signifie que les membres compensateurs doivent être en mesure de satisfaire à ces demandes en fournissant des liquidités suffisantes: si ce n’est pas le cas, et qu’un membre compensateur est incapable de fournir la marge de variation requise en temps voulu, il est déclaré en situation de défaillance par la contrepartie centrale, qui déclenche alors ses procédures en matière de défaillance afin de rapparier les positions au sein du livre. En outre, la marge de variation doit être déposée auprès des contreparties centrales dans un délai très court, ce qui pose des difficultés opérationnelles supplémentaires 11 .

    Les liquidités présentent un coût d’opportunité élevé, car elles ne sont pas aussi rentables que d’autres actifs et ne permettent pas d’équilibrer les échéances des engagements des DRR, ce qui les expose à des asymétries actif/passif. Le fait de détenir des liquidités abondantes au lieu d’autres actifs à haut rendement concourrait à diminuer les rendements des retraités et aurait une incidence sur l’allocation des actifs des DRR. En effet, les fonds de pension ne détiennent généralement pas beaucoup de liquidités, comme le montrent également les statistiques mondiales annuelles sur les pensions publiées par l’OCDE.

    La question de la marge de variation en espèces peut se révéler difficile, en particulier en période de tensions sur le marché, parallèlement à la hausse des niveaux de taux d’intérêt, lorsque les demandes de marge de variation par les contreparties centrales sont susceptibles d’augmenter considérablement pour les DRR.

    En effet, des appels de marge de variation importants peuvent également se produire dans le cadre de contrats non compensés de manière centrale, auxquels participent actuellement les DRR. Toutefois, dans ce contexte, les DRR peuvent également déposer une marge de variation sous d’autres formes qu’en espèces, en utilisant par exemple des obligations d’État de haute qualité (un actif que les fonds de pension détiennent généralement en grande quantité) – même si la mesure dans laquelle il est demandé aux DRR de déposer également une marge de variation en espèces dans leurs contrats bilatéraux peut avoir récemment augmenté.

    Il convient de noter que la raison d’être du cadre réglementaire EMIR est de promouvoir la compensation centrale également en rendant les contrats bilatéraux moins pratiques, au vu des risques associés: cette évolution réglementaire et d’autres, ainsi que les forces du marché, devraient favoriser une augmentation des volumes de produits dérivés faisant l’objet d’une compensation centrale, avec une détermination des prix potentiellement meilleure dans le segment compensé par rapport à celui qui ne l’est pas. En effet, comme mentionné, certains fonds de pension ont déjà entamé la compensation centrale sur une base volontaire et sélective.

    Il convient de noter qu’en général, les DRR sont plus susceptibles d’effectuer des compensations indirectes en tant que clients de membres compensateurs que de devenir des membres compensateurs directs d’une contrepartie centrale, comme expliqué plus en détail dans les sections suivantes.

    Les considérations ci-dessus définissent le cadre pour les caractéristiques que devrait présenter une solution potentielle au problème de la compensation centrale: celle-ci devrait permettre de trouver un juste équilibre entre l’objectif de stabilité financière et le besoin de viabilité des DRR sur le plan des coûts, afin de ne pas avoir une incidence disproportionnée sur les prestations des retraités, et elle devrait être suffisamment solide, même dans des conditions de marché difficiles.

    3.3    Solutions potentielles envisagées jusqu’à présent

    Le débat sur la compensation centrale des DRR a permis d’explorer différentes pistes au fil des ans. Un aperçu de solutions potentielles avait été présenté dans le rapport que la Commission a remis en 2015 dans le cadre du règlement EMIR sur cette question, qui concluait qu’aucune solution technique viable n’avait été mise au point.

    Les options envisagées jusqu’à présent ont porté sur la manière dont les DRR pourraient déposer des marges de variation auprès des contreparties centrales de manière sûre et rentable. Dans un premier temps, comme décrit dans le rapport de la Commission de 2015, la possibilité pour les contreparties centrales d’accepter des marges de variation sous d’autres formes qu’en espèces, telles que des obligations d’État de haute qualité, a été examinée: cependant, il a été généralement admis qu’une telle piste serait difficile à suivre, car elle obligerait les contreparties centrales à gérer un portefeuille d’obligations à convertir en espèces avec les risques associés, ce qui pourrait entraîner une distorsion de leur rôle en tant qu’intermédiaire gérant un livre neutre.

    Un deuxième éventail d’options est donc à l’étude, dans le cadre duquel les DRR pourraient échanger leurs obligations contre des espèces afin de répondre aux appels de marge des contreparties centrales (transformation de garanties). Les solutions potentielles envisagées et mises au point ces dernières années par les acteurs du secteur se sont en effet concentrées sur les moyens de permettre une transformation efficace des garanties par les DRR.

    Transformation de garanties par les membres compensateurs

    Les membres compensateurs tels que les banques peuvent généralement fournir à leurs clients, y compris les fonds de pension, des services de transformation de garanties 12 , au moyen d’opérations de pension. En effet, la plupart des DRR qui s’engagent dans la compensation centrale le font aujourd’hui en tant que clients des membres compensateurs, et pourraient continuer à le faire même dans le cadre de la compensation obligatoire. Une opération de pension est une opération dans laquelle une partie vend un actif à une autre partie et s’engage à racheter l’actif à un prix convenu à une date ultérieure. L’actif est généralement une obligation qui sert de garantie pour assurer le prêteur de fonds contre le risque de crédit de la contrepartie. Les opérations de pension peuvent donc être utilisées pour transformer des obligations en liquidités et pour fournir des marges de variation, avec l’avantage supplémentaire que le fournisseur des obligations conserve la propriété des obligations elles-mêmes et continue à en obtenir les rendements à long terme.

    Les grands groupes bancaires sont généralement actifs sur le marché des opérations de pension. Toutefois, certains éléments ont été évoqués comme des facteurs dissuadant les membres compensateurs de s’engager dans de telles opérations. Comme l’ont soulevé de nombreux acteurs du marché, la conception du ratio de levier dans le cadre de Bâle III a rendu moins pratique le recours aux opérations de pension, car ces opérations sont assorties de faibles marges et gonflent les bilans des banques, ce qui contribue à augmenter le dénominateur du ratio. Les banques doivent donc disposer d’un montant plus important de fonds propres de base de catégorie 1 pour satisfaire à cette exigence. Des considérations similaires sont exposées dans l’analyse des marchés des opérations de pension réalisée par le Comité du système financier mondial en 2017 13 , qui mettait en évidence l’éventuel arbitrage entre des réformes réglementaires axées sur la taille des bilans des banques (visant à limiter un endettement excessif) et les conséquences, y compris pour les utilisateurs finaux, en matière de disponibilité des opérations de pension 14 . À cet égard, les volumes sur le marché des opérations de pension dans l’Union européenne ont néanmoins augmenté ces dernières années 15 et, selon l’analyse de la BCE, les conséquences imprévues des réformes réglementaires sur la fourniture de services de mise en pension par les banques de la zone euro ont été négligeables 16 .

    En outre, la manière dont le ratio de levier a été conçu à l’origine a restreint la possibilité pour les banques de fournir des services de compensation de clients, car les marges déposées par les clients ne pouvaient pas être utilisées pour compenser le montant de l’exposition (ce qui aurait alimenté le dénominateur du ratio). En 2019, le Comité de Bâle 17 a proposé d’introduire des changements dans le calcul du ratio de levier, afin que la compensation de clients ne soit pas indûment pénalisée. Ces changements ont été intégrés dans le règlement révisé sur les exigences de fonds propres (CRR2), qui est entré en vigueur en juin de l’année dernière.

    Une modification du ratio de levier a également été introduite concernant le traitement des opérations de prise en pension. Ces changements pourraient contribuer à encourager les banques à s’engager dans la compensation de clients et éventuellement dans l’intermédiation des opérations de pension, ce qui favoriserait ainsi la liquidité du marché des opérations de pension. Les effets de ces changements devront être évalués.

    En outre, la capacité des marchés des opérations de pension à répondre à la demande de liquidités de l’ensemble des DRR, en particulier en période de tensions, comme expliqué plus en détail ci-dessous, a suscité des préoccupations.

    Transformation de garanties par les marchés des opérations de pension compensées

    Ces dernières années, certaines contreparties centrales ont élaboré de nouveaux modèles destinés à favoriser la compensation centrale des DRR en facilitant l’accès de ces derniers aux contreparties centrales et aux marchés des opérations de pension compensées; ces modèles peuvent également comprendre l’accès au marché des opérations de gré à gré compensées. Ces modèles ont été mis au point dans l’Union européenne par au moins une contrepartie centrale et, à la connaissance de la Commission, des modèles similaires sont susceptibles d’être adoptés également par d’autres contreparties centrales 18 . Dans ce dispositif, les DRR entretiennent une relation contractuelle directe avec la contrepartie centrale et sont «assistés» (ou autrement «parrainés») par un membre compensateur (généralement une banque) qui agit en tant qu’agent en compensation et facilite la compensation centrale des DRR, notamment en contribuant au fonds de défaillance de la contrepartie centrale et en assurant la gestion des défaillances et d’autres services (gestion de garanties, etc.).

    Ces modèles n’éliminent pas en soi la nécessité de déposer une marge de variation en espèces pour les produits dérivés de gré à gré compensés, mais ils offrent aux DRR un accès supplémentaire aux marchés des opérations de pension. Ces modèles d’«adhésion facilitée» viseraient également à lever certaines des limites inhérentes à la compensation de clients, telles que la concentration de la compensation de clients dans l’Union européenne entre quelques membres compensateurs seulement ou la question de la portabilité des positions des clients en cas de défaillance d’un membre compensateur. Du point de vue des banques, ces modèles devraient reposer sur des exigences de fonds propres moins contraignantes que les activités traditionnelles de compensation de clients.

    À la connaissance de la Commission, un tel modèle s’est développé au fil du temps avec un intérêt quelque peu croissant de la part du marché, mais seuls quelques DRR – généralement de grande taille – ont jusqu’à présent commencé à utiliser un tel service. Une raison évidente tient peut-être au fait que l’établissement d’une relation directe avec une contrepartie centrale peut nécessiter une préparation opérationnelle et juridique et des investissements supplémentaires de la part des participants au marché, qu’il s’agisse de DRR ou de membres compensateurs. En outre, les fonds de pension qui participent au groupe de parties prenantes de la Commission ont indiqué que ces modèles ne sont généralement accessibles qu’aux grands DRR, que seul un petit nombre de banques les soutiennent actuellement et qu’ils imposent toujours aux DRR de s’en remettre à la volonté des membres compensateurs pour la fourniture des services connexes.

    Selon un document conjoint de l’Association internationale des swaps et dérivés (International Swaps and Derivatives Association – ISDA) et de Pensions Europe de 2018 19 , les modèles d’adhésion directe ou d’adhésion «facilitée» sont étudiés avec intérêt par le marché, notamment parce qu’ils peuvent se révéler plus intéressants pour les banques que les relations traditionnelles de compensation de clients. L’adhésion directe à part entière semble difficile pour un certain nombre de raisons (notamment la nécessité de satisfaire aux exigences de participation des contreparties centrales et aux contributions au fonds de défaillance, ainsi que de disposer d’une capacité opérationnelle); les modèles d’accès facilité peuvent constituer un moyen de s’en rapprocher. Selon les fonds de pension qui participent au groupe de parties prenantes de la Commission, certaines améliorations supplémentaires demeureraient nécessaires.

    Discussion sur le marché des opérations de pension

    D’une manière générale, les DRR considèrent le marché des opérations de pension comme un outil utile pour répondre à leurs besoins de liquidité et, dans les discussions du groupe d’experts mis en place par la Commission européenne, il a été décrit comme un élément potentiel de la solution globale au problème des marges de variation.

    Toutefois, le secteur reste préoccupé par la capacité des marchés des opérations de pension à répondre à la demande globale de liquidités émanant de tous les DRR tenus de procéder à une compensation dans des conditions de marché tendues, alors que les marchés des opérations de pension sont susceptibles de faire l’objet de pressions pour absorber une importante demande de liquidités – et pas seulement de la part des DRR. En outre, il se peut que les banques ne soient pas toujours disposées à fournir des opérations de pension aux DRR, ou dans la même mesure, en période de tensions. Comme le souligne l’AEMF, un certain nombre de ces aspects et d’autres sont également liés à la relation commerciale globale entre les banques et leurs clients DRR. Si les DRR ne sont pas en mesure de recourir au marché des opérations de pension dans des conditions de tension, ils risquent de ne pas pouvoir répondre aux appels de marge des contreparties centrales et pourraient même être à l’origine de problèmes de stabilité financière plus vastes. À cet égard, la possibilité d’établir un ensemble diversifié d’accords de liquidité entre les banques et les DRR pourrait se révéler utile.

    Les marchés des opérations de pension compensées devraient présenter l’avantage d’être plus liquides que les marchés bilatéraux, car les banques sont en principe plus disposées à négocier des opérations de pension compensées que des opérations bilatérales – notamment parce qu’elles peuvent compenser leurs positions auprès de la contrepartie centrale. Selon le CSFM (2017), dans la zone euro, «la part des opérations sur le marché des opérations de pension réalisées par l’intermédiaire de contreparties centrales a augmenté ces dernières années, représentant 50 à 60 % des volumes du marché des opérations de pension de la zone euro, en raison de l’attrait qu’elles présentent pour la gestion des bilans». Les efforts déployés par certaines contreparties centrales pour permettre la participation directe des utilisateurs finaux à leurs plateformes d’opérations de pension compensées doivent également être placés dans cette perspective. Les DRR ont indiqué que le marché des opérations de pension compensées peut fournir une capacité d’opérations de pension supplémentaire par rapport aux opérations de pension bilatérales, mais qu’il se heurte également aux limites mentionnées ci-dessus.

    L’Association internationale des marchés de capitaux (International Capital Markets Association – ICMA) donne un aperçu du fonctionnement des marchés européens des opérations de pension. Dans son étude sur le marché des opérations de pension de 2019, elle estime la taille globale du marché à 8 310 milliards d’EUR 20 .. Les études sur le marché européen des opérations de pension menées en 2018 et 2019 par l’ICMA confirment que le marché européen des opérations de pension est considéré comme globalement performant, et constitue donc potentiellement un moyen de transformer des garanties; toutefois, les marchés des opérations de pension sont moins liquides en fin de trimestre et en fin d’exercice, car les banques ont tendance à clôturer leurs positions sur les opérations de pension à l’approche des dates limites de déclaration. Ce type de contraction régulière a connu une tendance à la baisse ces dernières années et devrait continuer à diminuer à l’avenir, notamment grâce à la mise en œuvre, dans l’Union européenne, des récentes recommandations du Comité de Bâle sur le contrôle bancaire (CBCB) visant à réduire la volatilité de fin de trimestre et de fin d’exercice.

    L’ICMA fournit également une analyse 21 des développements les plus récents survenus sur le marché pendant la crise liée à la COVID-19. Selon cette enquête, le marché européen des opérations de pension a dans l’ensemble bien résisté à la pandémie de COVID-19 qui a commencé fin février/début mars 2020. L’activité sur le marché des opérations de pension s’est accrue au cours des deux premières semaines de mars, en raison de l’augmentation des demandes de transformation de garanties en vue de répondre aux appels de marge et de l’abandon des actifs plus risqués au profit d’actifs à court terme. Toutefois, les clients ont indiqué que les banques ne parvenaient pas à faire face à la demande croissante d’opérations de pension et que certaines ne servaient que des clients de premier rang. Selon l’enquête, «si la demande d’accès au marché des opérations de pension a augmenté au plus fort de la crise, la capacité des banques à jouer un rôle d’intermédiaire dans cet accès n’a pas suivi. Les participants du côté acheteur font état d’une dépendance accrue à l’égard du marché des opérations de pension, car les sorties de fonds ont entraîné la nécessité de générer des liquidités pour couvrir les participations, ainsi que de répondre aux appels de marge pour les positions sur produits dérivés, en raison de l’augmentation de la volatilité. Cependant, il semblerait que les banques aient eu du mal à suivre la demande des clients. Nombreuses sont celles qui déclarent limiter leurs activités aux clients de premier rang, sans aucune possibilité d’en proposer de nouvelles. Les banques indiquent en outre qu’au vu de la volatilité accrue, ce sont davantage les limites en matière d’actifs pondérés en fonction du risque qui ont constitué la contrainte pesant sur les activités, plutôt que le ratio de levier, en particulier pour les flux d’activités unidirectionnels (tels que les emprunteurs nets de liquidités)».

    Les interventions des banques centrales auraient atténué ces tensions, en libérant les lignes de crédit des banques et en inversant la tendance à la vente d’actifs à risque.

    L’évolution du marché pendant la crise de la COVID-19 a également été débattue au sein du groupe de parties prenantes de la Commission. Les contreparties centrales ont fait état de la bonne tenue des marchés des opérations de pension compensées pendant la crise, avec des volumes d’activité élevés. Selon leurs informations, l’accès n’était pas restreint pour les entreprises du côté acheteur participant au marché des opérations de pension compensées. La résilience globale des infrastructures de marché a également été mise en évidence, y compris en ce qui concerne les modèles de marge, contribuant ainsi à la prévisibilité des demandes de marge adressées aux participants. Les dispositifs de régime de retraite ont déclaré souffrir de la volatilité importante du marché, avec des appels de marge substantiels de la part des contreparties bilatérales et des membres compensateurs envers les clients. Ils ont affirmé avoir été tout juste capables de faire face à une telle situation, mais si les marchés s’étaient moins bien comportés, ils auraient été confrontés à de très graves difficultés. Ils ont également confirmé que les banques étaient réticentes à s’engager dans l’intermédiation des opérations de pension et qu’ils avaient du mal à accéder au bilan des banques membres compensateurs pour accéder aux marchés des opérations de pension. En conséquence, les DRR estiment que le marché des opérations de pension ne peut pas être sollicité dans toutes les conditions de marché; bien souvent, les DRR sont fortement tributaires des banques pour y accéder, et les banques disposent de lignes de mise en pension limitées pour leurs clients en période de tensions.

    Compte tenu des difficultés rencontrées sur les marchés des opérations de pension en période de tensions, les acteurs du marché ont soulevé à plusieurs reprises la question de la nécessité d’un filet de sécurité des banques centrales en matière de liquidités en de telles périodes. Selon les acteurs du marché, ce rôle de filet de sécurité des banques centrales pourrait être envisagé de manière à ce que les banques centrales fournissent des liquidités à une entité réglementée qui les mettrait ensuite à la disposition des DRR: cette entité peut être une banque ou une contrepartie centrale. Après avoir reçu les liquidités des banques ou des contreparties centrales, les DRR seraient en mesure de répondre aux appels de marge de variation en espèces.

    Il convient de noter que, étant donné que les banques centrales sont exclusivement compétentes pour la mise en place de facilités des banques centrales et pour l’interprétation de leur utilisation prévue, toute option reposant sur un filet de sécurité des banques centrales en matière de liquidités devrait être avalisée et soutenue par les banques centrales.

    La BCE a donné son point de vue sur la question. En ce qui concerne les banques, elles sont bien sûr des contreparties de la politique monétaire et sont autorisées à fournir des services de transformation de garanties dans le respect de la réglementation bancaire applicable. Elles sont donc en mesure de jouer un rôle d’intermédiaire sur le marché des opérations de pension, notamment en utilisant les facilités des banques centrales.

    Selon la BCE, cependant, le rôle de filet de sécurité des banques centrales ne paraît pas simple, voire semble irréalisable pour les contreparties centrales, même si ces dernières possèdent un agrément bancaire: la prise en charge des services de transformation de garanties par les contreparties centrales semble ne pas relever de leur activité principale, ce qui peut susciter des inquiétudes quant aux conséquences en matière de risque. En outre, selon la BCE, si les contreparties centrales devaient se lancer dans la transformation de garanties sur la base de leur agrément bancaire supplémentaire (si cela est autorisé), les exemptions actuelles qui leur sont accordées pour certaines exigences prudentielles bancaires au motif que les contreparties centrales n’exercent pas d’activités bancaires classiques et présentent un modèle d’entreprise différent ne semblent plus justifiées. Une analyse plus approfondie serait donc nécessaire pour déterminer la nature juridique, les effets sur la gestion des risques des contreparties centrales et la conformité réglementaire de ces accords. Les premières réactions de certaines contreparties centrales ont également révélé un certain scepticisme.

    En ce qui concerne la nécessité d’un éventuel filet de sécurité «dédié» des banques centrales en faveur des DRR (les DRR devenant des contreparties des banques centrales et recevant directement des liquidités de celles-ci), la BCE a contribué au débat du groupe de parties prenantes de la Commission du point de vue de l’Eurosystème, c’est-à-dire en se concentrant sur les besoins de financement libellés en euros des entités domiciliées dans la zone euro. L’évaluation quantitative de l’Eurosystème a estimé les besoins de liquidité des DRR de la zone euro pour répondre à la marge de variation dans un scénario de tension fondé sur une variation de 1 % des taux (voir également ci-dessus). Au sein de la zone euro, selon les données dont dispose l’Eurosystème, les DRR néerlandais sont les plus engagés dans les produits dérivés, puisque ceux-ci représentent 89 % de l’ensemble des swaps de taux d’intérêt des fonds de pension qu’ils concluent. L’analyse de l’Eurosystème a révélé que les besoins réels de liquidité des DRR de la zone euro dans une telle situation seraient gérables (c’est-à-dire inférieurs à 2 %) par rapport à la taille globale du marché européen des opérations de pension (représentée par l’encours des prises en pension), ce qui laisse penser que le marché des opérations de pension en tant que tel pourrait apporter des solutions aux besoins des DRR de la zone euro. Sur la base de ces constatations, il a été conclu que le cadre de politique monétaire de l’Eurosystème, y compris le cadre des contreparties, est adapté aux fins de la mise en œuvre de la politique monétaire et ne justifie pas de modifications visant à mettre en place un filet de sécurité dédié de l’Eurosystème en matière de liquidités en faveur des DRR 22 .

    4.CONCLUSION

    La question de la compensation centrale des DRR se pose depuis longtemps, et lors des dernières négociations du règlement EMIR, il est devenu évident que les colégislateurs ont cherché à promouvoir autant que possible une solution qui pourrait permettre à ces acteurs d’accéder au système de compensation centrale conçu par les réformes du G20 en 2009, tout en tenant compte de la nécessité de disposer de solutions adéquates pour répondre aux préoccupations dans une situation de marché tendue.

    De longues discussions ont été menées au sein du groupe des parties prenantes de la Commission, au cours desquelles il a été établi que les DRR avaient déjà commencé à compenser volontairement certains produits dérivés. On peut en conclure que la question principale qui reste à résoudre est celle de la marge de variation en espèces en période de tensions sur le marché.

    La Commission a assuré un suivi constant de l’évolution du marché et a facilité les échanges et les discussions entre les acteurs concernés afin de trouver des solutions éventuelles. Au fil des ans, des efforts ont été consentis par les acteurs du secteur. En particulier, une fois que l’option consistant à fournir une marge de variation en obligations directement aux contreparties centrales a finalement été rejetée en raison de problèmes de compatibilité avec la nature et le modèle d’entreprise des contreparties centrales, d’autres pistes ont été explorées afin de permettre plus facilement aux DRR de transformer des garanties.

    Comme le souligne le présent rapport, des modèles d’accès facilité ont été mis au point ces dernières années afin d’explorer une piste potentiellement viable pour la compensation centrale des DRR. À la connaissance de la Commission, cette option est déjà utilisée par quelques DRR. La Commission a l’intention d’étudier plus avant cette option avec les parties prenantes concernées, et notamment son coût pour les DRR. L’adoption d’un tel modèle par plusieurs contreparties centrales semble être une évolution positive, en ce sens qu’elle favorise également un plus grand choix.

    La recherche d’une solution appropriée exigera très probablement des efforts sur plusieurs fronts. D’une part, certains aspects de la réglementation bancaire devraient faire l’objet d’une évaluation plus approfondie, notamment pour déterminer si les récents changements dans le calcul du ratio de levier ont été utiles. D’autre part, il convient de se pencher sur les solutions permettant de garantir la mise en place de facilités de liquidités en faveur des DRR en période de tensions.

    Les résultats de la consultation publique lancée par l’AEMF devraient permettre de mieux cerner l’évolution récente du marché et éventuellement d’obtenir d’autres données quantitatives qui seront examinées avec soin. La Commission est également déterminée à explorer toute initiative appropriée et réalisable afin de progresser vers une solution de compensation centrale viable et solide.

    Les analyses des prochains mois étayeront la décision de la Commission en ce qui concerne l’exemption de compensation centrale.

    (1)

         Règlement (UE) nº 648/2012.

    (2)

         L’exemption concerne les contrats dérivés de gré à gré dont la contribution à la réduction des risques d’investissement qui sont directement liés à la solvabilité financière des dispositifs de régime de retraite peut être objectivement mesurée, ainsi que les entités établies pour indemniser les membres de ces dispositifs en cas de défaillance, et les DRR qui rencontrent des difficultés pour respecter les exigences de marge de variation (article 89 du règlement EMIR).

    (3)

         Banque centrale européenne, Financial Stability Review (revue de stabilité financière), mai 2020. Les estimations pour les fonds de pension néerlandais sont de l’ordre de 36 à 47 milliards d’EUR; étant donné que les fonds de pension néerlandais détiennent environ 89 % des swaps de taux d’intérêt des fonds de pension de la zone euro, l’appel de marge sur l’ensemble des fonds de pension de la zone euro est estimé entre 40 et 53 milliards d’EUR.

    (4)

         Danmarks Nationalbank, « Pension companies will have large liquidity needs if interest rates rise (Les sociétés de retraite auront d’importants besoins de liquidités si les taux d’intérêt augmentent), novembre 2019.

    (5)

         Selon les comptes de la zone euro à la fin de 2019.

    (6)

         Les chiffres correspondants s’élevaient à environ 60 et 27 milliards d’EUR, respectivement, pour les fonds de pension néerlandais et danois.

    (7)

         Les estimations du déficit de trésorerie des fonds de pension néerlandais sont de l’ordre de 6 à 15 milliards d’EUR. Étant donné que les fonds de pension néerlandais détiennent environ 89 % des swaps de taux d’intérêt des fonds de pension de la zone euro, le déficit de trésorerie de l’ensemble des fonds de pension de la zone euro pourrait atteindre 17 milliards d’EUR.

    (8)

         Règlement délégué (UE) 2016/2251 de la Commission.

    (9)

    Comité européen du risque systémique, «Occasional Paper Series 11», 2016.

    (10)

         En outre, la marge de variation en espèces permet aux contreparties centrales de demeurer confiantes quant à leur capacité à évaluer correctement leurs opérations et constitue la convention de marché pour les swaps compensés adoptée par tous les participants au marché des swaps compensés.

    (11)

         Pour les appels de marge intrajournaliers, certaines contreparties centrales permettent aux participants d’utiliser des titres au lieu d’espèces; toutefois, les appels de marge de fin de journée doivent être réglés en espèces.

    (12)

         Un tel service pourrait également être fourni aux fonds de pension par d’autres banques, différentes de leur membre compensateur.

    (13)

         CSFM, «Repo market functioning» (Fonctionnement du marché des opérations de pension), 2017.

    (14)

         «Une contraction de la capacité d’intermédiation peut également réduire la mesure dans laquelle les marchés des opérations de pension sont à même de répondre à la demande lors de futures périodes de tension. Une restriction du fonctionnement du marché des opérations de pension pourrait créer des frictions sur les marchés des espèces et des produits dérivés, et réduire la capacité des établissements financiers à monétiser les actifs. L’ampleur des coûts qui en résultent pour la stabilité financière et l’économie réelle en période de tensions peut être considérable, bien que de telles situations ne se soient pas concrétisées à grande échelle dans un passé récent. Des adaptations du marché des opérations de pension pourraient réduire les coûts pour certains utilisateurs finaux, mais pourraient également introduire de nouveaux risques».

    (15)

         ICMA, enquête sur le marché européen des opérations de pension de décembre 2019 .

    (16)

         BCE, Financial Stability Review (revue de stabilité financière), 2017.

    (17)

         Comité de Bâle sur le contrôle bancaire, «Leverage ratio treatment of client cleared derivatives» (Traitement du ratio de levier des produits dérivés compensés par le client), 2019.

    (18)

         En dehors de l’Union européenne, sur la base des informations dont dispose la Commission, LCH Ltd (Royaume-Uni), la Corporation canadienne de compensation de produits dérivés (Canada) et la DTCC FICC (États-Unis) ont mis en place des offres de compensation des opérations de pension du côté acheteur.

    (19)

         Document conjoint de Pensions Europe et de l’ISDA, «Potential demand for clearing by EU Pension Funds» (Demande potentielle de compensation par les fonds de pension de l’UE), 2018.

    (20)

         Sur la base de la valeur des contrats de mise en pension et de prise en pension en cours dans les livres des 58 établissements financiers participant à l’enquête.

    (21)

         ICMA, «The European repo market and the Covid-19 crisis» (Le marché européen des opérations de pension et la crise de la COVID-19), avril 2020.

    (22)

         Un tel filet de sécurité de l’Eurosystème en matière de liquidités se distinguerait de la fourniture de liquidités d’urgence (Emergency Liquidity Assistance, ELA), qui relève des mandats des banques centrales nationales.

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