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Document 52014IP0044

    Résolution du Parlement européen du 16 janvier 2014 sur la situation des défenseurs des droits de l'homme et des militants de l'opposition au Cambodge et au Laos (2014/2515(RSP))

    JO C 482 du 23.12.2016, p. 145–148 (BG, ES, CS, DA, DE, ET, EL, EN, FR, HR, IT, LV, LT, HU, MT, NL, PL, PT, RO, SK, SL, FI, SV)

    23.12.2016   

    FR

    Journal officiel de l'Union européenne

    C 482/145


    P7_TA(2014)0044

    Situation des défenseurs des droits de l'homme et des militants de l'opposition au Cambodge et au Laos

    Résolution du Parlement européen du 16 janvier 2014 sur la situation des défenseurs des droits de l'homme et des militants de l'opposition au Cambodge et au Laos (2014/2515(RSP))

    (2016/C 482/22)

    Le Parlement européen,

    vu ses précédentes résolutions sur le Cambodge et le Laos,

    vu les déclarations faites par les représentants de l'Union européenne sur place le 4 janvier 2014 sur les violences autour des conflits du travail et le 23 septembre 2013 sur la nouvelle législature au Cambodge,

    vu la déclaration du porte-parole de Mme Catherine Ashton, vice-présidente de la Commission et haute représentante de l'Union européenne, à la suite des élections au Cambodge le 29 juillet 2013,

    vu le rapport du 5 août 2013 du rapporteur spécial des Nations unies sur la situation des droits de l'homme au Cambodge,

    vu le rapport intitulé «Bittersweet harvest — A human rights impact assessment of the European Union’s Everything But Arms initiative in Cambodia», élaboré en 2013 par Equitable Cambodia et Inclusive Development International,

    vu l'accord de coopération conclu en 1997 entre la Communauté européenne et le Royaume du Cambodge,

    vu la déclaration du 21 décembre 2012 du porte-parole de Mme Catherine Ashton, vice-présidente de la Commission et haute représentante de l'Union européenne, sur la disparition de M. Sombath Somphone au Laos,

    vu la déclaration faite le 19 novembre 2013 par les partenaires européens en matière de développement lors de la table ronde organisée par la République démocratique populaire lao,

    vu l'accord de coopération conclu le 1er décembre 1997 entre l'Union européenne et la République démocratique populaire lao,

    vu les lignes directrices de 2008 de l'Union européenne sur les défenseurs des droits de l'homme,

    vu la convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées et la déclaration des Nations unies du 18 décembre 1992 sur ce thème,

    vu la déclaration universelle des droits de l'homme de 1948,

    vu le pacte international relatif aux droits civils et politiques de 1966,

    vu l'article 122, paragraphe 5, et l'article 110, paragraphe 4, de son règlement,

    Cambodge

    A.

    considérant que, le 3 janvier 2014, lorsque des manifestations des travailleurs de l'industrie textile qui revendiquaient des hausses de salaires ont pris une tournure violente, les forces de l'ordre ont tiré à balles réelles sur les manifestants, faisant cinq morts et une trentaine de blessés; considérant que le lendemain, le 4 janvier 2014, les forces de l'ordre ont procédé à l'évacuation forcée du parc de la liberté, où des militants de l'opposition s'étaient rassemblés;

    B.

    considérant que, lors de ces événements récents, vingt-trois personnes, dont des défenseurs des droits de l'homme, ont été arrêtées et auraient été battues et torturées;

    C.

    considérant que ces tensions, qui se sont aggravées en présence de la police, ont donné lieu à une interdiction de manifester;

    D.

    considérant que le droit à la liberté de réunion pacifique est inscrit dans la Constitution cambodgienne, à l'article 20 de la déclaration universelle des droits de l'homme et à l'article 21 du pacte international relatif aux droits civils et politiques;

    E.

    considérant que les dirigeants du parti du sauvetage national du Cambodge (CNRP), MM. Sam Rainsy et Kem Sokha, ont été convoqués et interrogés par le tribunal municipal de Phnom Penh le 14 janvier 2014; considérant qu'ils risquent d'être inculpés pour incitation au trouble de l'ordre public;

    F.

    considérant que les pouvoirs publics n'ont pas pris toutes les mesures nécessaires pour remédier à quelques-unes des principales lacunes du processus électoral, comme l'amélioration de la fiabilité du registre électoral, l'accès équitable aux médias et la prévention de l'utilisation des moyens de l'État à des fins électorales, puisque des fonctionnaires et des militaires ont fait campagne;

    G.

    considérant que le roi du Cambodge a amnistié M. Sam Rainsy le 14 juillet 2013 et a ainsi permis son retour au pays; considérant toutefois que ni le droit de vote ni le droit d'éligibilité de M. Rainsy n'ont été rétablis;

    H.

    considérant qu'en septembre 2013, après l'annonce des résultats des élections, le CNRP a déclenché des manifestations massives et non violentes pendant trois jours pour protester contre les résultats officiels de ces élections à l'Assemblée nationale; considérant que, face à ces manifestations pacifiques, le gouvernement a déployé un grand nombre de policiers et de gendarmes armés;

    I.

    considérant que les défenseurs des droits de l'homme subissent un harcèlement permanent, sous la forme d'arrestations arbitraires ou de condamnations pour des chefs d'accusation fallacieux ou exagérés, pour l'exercice pacifique des droits de l'homme; considérant que ces actes de harcèlement demeurent impunis;

    J.

    considérant la précarité de la situation des droits de l'homme au Cambodge, en particulier à la suite des expropriations foncières systématiques et des actes de corruption commis par le gouvernement, par le parti au pouvoir et par des acteurs privés, avec l'appui et la protection des autorités;

    K.

    considérant que le rapporteur spécial des Nations unies sur la situation des droits de l'homme au Cambodge effectue une visite officielle dans ce pays du 12 au 17 janvier 2014;

    L.

    considérant que l'Union européenne est le premier bailleur d'aide au Cambodge;

    M.

    considérant que de nombreuses entreprises multinationales, dont des entreprises européennes, seraient impliquées dans des violations du droit à la terre, en particulier dans le secteur du sucre, et qu'en novembre 2013, la société Coca-Cola s'est engagée à pratiquer la «tolérance zéro» face aux expulsions foncières non indemnisées;

    Laos

    N.

    considérant que M. Sombath Somphone, militant pour les droits de l'homme et l'environnement, personnalité éminente de la société civile et coprésident du neuvième forum des peuples Asie-Europe qui s'est tenu en octobre 2012 à Vientiane préalablement au neuvième sommet de l'ASEM a vraisemblablement été enlevé le 15 décembre 2012 dans la capitale laotienne; considérant que sa famille n'a pas été en mesure de le localiser depuis ce jour, en dépit d'appels répétés aux autorités locales et de recherches effectuées dans les environs du lieu de sa disparition;

    O.

    considérant que cette disparition était un des points que la délégation pour les relations avec les pays de l'Asie du Sud-Est et l'Association des nations de l'Asie du Sud-Est (ANASE) a soulevés avec les autorités laotiennes lors de sa visite au Laos le 28 octobre 2013;

    P.

    considérant que, plus d'un an après cette disparition, des questions fondamentales restent sans réponse, notamment celle de savoir si une enquête a été effectuée, et que les autorités laotiennes ont refusé l'aide de l'étranger pour mener cette enquête;

    Q.

    considérant que les partenaires européens du Laos estiment que la disparition inexpliquée de M. Sombath Somphone est un problème extrêmement préoccupant et qu'ils jugent que les déclarations du gouvernement sur cette affaire ne sont ni suffisantes ni convaincantes;

    R.

    considérant que, le 15 décembre 2013, soixante-deux ONG ont réclamé l'ouverture d'une nouvelle enquête sur cette disparition; considérant que, le 16 décembre 2013, le groupe de travail des Nations unies sur les disparitions forcées ou involontaires a vivement insisté auprès du gouvernement du Laos afin qu'il mette tout en œuvre pour retrouver la trace de M. Sombath Somphone, pour le localiser et savoir ce qu'il est advenu de lui et pour que les responsables de sa disparition aient à répondre de leurs actes;

    S.

    considérant qu'il y a au Laos plusieurs autres cas de disparitions forcées; considérant qu'à ce jour, le sort de neuf autres personnes qui ont été détenues arbitrairement par les forces de sécurité laotiennes en novembre 2009 en divers endroits du pays demeure inconnu (deux femmes, Mmes Kingkeo et Somchit, et sept hommes, MM. Soubinh, Souane, Sinpasong, Khamsone, Nou, Somkhit et Sourigna);

    T.

    considérant que le Laos affiche depuis quelques années la plus forte croissance économique de l'Asie du Sud-Est et que l'action de la société civile est capitale pour éviter que ce développement rapide n'occulte la situation des droits de l'homme;

    Cambodge

    1.

    exprime ses condoléances aux familles des victimes; condamne le recours disproportionné et excessif à la force par les forces de sécurité cambodgiennes, qui a provoqué des morts et des blessés;

    2.

    demande aux autorités cambodgiennes de faire preuve de retenue face aux manifestants et rappelle que l'usage de la force par les forces publiques doit être régi par les principes de la légalité, de la nécessité et de la proportionnalité;

    3.

    demande aux autorités cambodgiennes de libérer immédiatement les vingt-trois personnes arrêtées injustement;

    4.

    exhorte ces mêmes autorités à mener une enquête approfondie sur les circonstances qui ont provoqué des morts et des blessés parmi les manifestants pacifiques afin que les responsables aient à répondre de leurs actes;

    5.

    s'inquiète de la situation des militants des droits de l'homme et de l'opposition au Cambodge; condamne tous les chefs d'accusation, toutes les inculpations et condamnations à caractère politique à l'encontre de détracteurs politiques, de membres de l'opposition et de militants des droits de l'homme et du droit à la terre; souligne que les pouvoirs publics ont le devoir de garantir que le droit des personnes et des organisations de défendre et de promouvoir les droits de l'homme soit protégé, notamment le droit de critiquer pacifiquement les politiques du gouvernement et de s'y opposer à travers des manifestations publiques et des grèves;

    6.

    demande au gouvernement du Cambodge de renforcer la démocratie, l'état de droit et le respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ainsi que de lever immédiatement l'interdiction de rassemblement;

    7.

    exhorte le gouvernement du Cambodge à reconnaître le rôle légitime que joue l'opposition en contribuant à l'évolution économique et politique générale du pays; demande aux autorités cambodgiennes d'abroger immédiatement les assignations en justice de MM. Sam Rainsy et Kem Sokha, ainsi que de M. Rong Chhun, chef de l'Association indépendante des enseignants cambodgiens (CITA) et de la Confédération syndicale du Cambodge (CCFU);

    8.

    s'inquiète de la polémique sur les éventuelles irrégularités du processus électoral; invite les partis politiques à collaborer pour déceler ces irrégularités éventuelles et à se mettre d'accord sur les améliorations à apporter au processus électoral, en particulier la réforme du registre électoral, l'accès aux médias et la représentation équilibrée des partis et des candidats, ainsi qu'à la commission électorale nationale; les invite également à s'entendre sur des réformes structurelles dans des domaines qui contribueront au développement du pays à long terme, notamment la réforme judiciaire, la réforme de l'Assemblée nationale et d'autres efforts visant à stimuler la bonne gouvernance et la démocratie;

    9.

    demande au gouvernement du Cambodge d'accepter la réalisation d'une enquête indépendante, avec l'aide de la communauté internationale, sur les allégations de fraude électorale et sur les autres irrégularités qui auraient été commises lors des élections de juillet 2013;

    10.

    invite le gouvernement et le Parlement du Cambodge à adopter et à appliquer des lois qui garantissent l'indépendance de la justice par rapport au milieu politique et à la corruption;

    11.

    demande au gouvernement cambodgien de mettre en place une institution nationale en charge des droits de l'homme, de coopérer pleinement avec les procédures spéciales des Nations unies et d'autoriser, notamment, une visite du rapporteur spécial sur l'indépendance des juges et des avocats ainsi que du rapporteur spécial sur le droit à la liberté de réunion pacifique et à la liberté d'association;

    12.

    exhorte le gouvernement cambodgien à mettre fin aux expulsions forcées et à introduire et à mettre en œuvre un moratoire sur les expulsions jusqu'à l'instauration d'un cadre juridique transparent et fondé sur la responsabilisation, ainsi que de politiques garantissant que les expulsions aient lieu exclusivement dans le respect des normes internationales; demande aux entreprises multinationales de ne pas tirer profit directement de ces expulsions, sans indemnisations équitables des personnes concernées;

    13.

    se félicite de la visite au Cambodge, du 12 au 17 janvier 2014, du rapporteur spécial des Nations unies sur la situation des droits de l'homme et demande au gouvernement cambodgien de se conformer aux recommandations que le rapporteur formulera dans ses rapports;

    14.

    salue des démarches telles que la récente initiative pour la transparence dans le secteur textile (GITI), qui réunit des gouvernements, des entreprises et la société civile de pays producteurs et consommateurs autour de la recherche d'un accord sur des normes de travail générales et communes;

    15.

    demande aux institutions européennes, aux États membres et aux entreprises européennes et multinationales de soutenir activement cette initiative et d'autres démarches analogues, et de mettre en place des pratiques en matière d'éthique et de responsabilité sociale des entreprises, concernant notamment la garantie de normes de travail équitables et de salaires dignes, la reconnaissance du droit à la liberté syndicale et aux conventions collectives, et la mise en place de conditions de travail saines et humaines pour tous les travailleurs;

    16.

    demande à la Commission de réagir d'urgence aux conclusions de la récente évaluation des incidences sur les droits de l'homme du fonctionnement de l'initiative européenne «Tout sauf les armes» au Cambodge; l'invite à étudier la possibilité d'ajouter aux critères applicables aux exportateurs des pays les moins avancés qui tentent d'exploiter les avantages de cette initiative l'obligation de certifier sur l'honneur qu'ils n'ont pas pratiqué d'expulsions d'habitants, de leurs terres ou de leur logement, sans les indemniser;

    17.

    demande à la vice-présidente/haute représentante de suivre attentivement la situation au Cambodge;

    Laos

    18.

    demande au gouvernement du Laos de fournir des éclaircissements sur l'état d'avancement de l'enquête sur la situation de M. Sombath Somphone, de répondre aux nombreuses questions en suspens autour de sa disparition et de solliciter et d'accepter l'aide d'experts étrangers en matière légiste et policière;

    19.

    estime que l'absence de réaction du gouvernement laotien fait peser des soupçons sur une implication éventuelle des autorités dans la disparition de M. Somphone;

    20.

    redemande à la vice-présidente de la Commission/haute représentante de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité de suivre de près les enquêtes menées par le gouvernement laotien au sujet de cette disparition;

    21.

    demande aux États membres de continuer à interpeller le gouvernement laotien sur cette disparition; souligne que les disparitions forcées restent un obstacle majeur à l'adhésion du Laos au Conseil des droits de l'homme des Nations unies;

    22.

    demande au gouvernement du Laos d'ouvrir une enquête approfondie, impartiale et efficace sur toutes les allégations de disparitions forcées, de mettre un terme à la répression de l'exercice des droits civils et politiques, notamment la liberté d'expression, d'association et de réunion pacifique, de garantir le respect et la protection des droits de tous les militants des droits de l'homme, des minorités et des membres de la société civile, et de protéger le droit à la liberté de religion ou de conviction;

    23.

    demande au gouvernement du Laos de ratifier sans plus attendre la convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, qu'il a signée en 2008;

    24.

    demande au gouvernement du Laos de promouvoir des réformes destinées à garantir le respect des droits fondamentaux et lui rappelle qu'il est astreint au respect d'obligations internationales au titre des traités sur les droits de l'homme qu'il a ratifiés;

    25.

    exprime ses préoccupations face aux expropriations et aux expulsions forcées, sans indemnisation des personnes concernées, et face à la corruption au Laos;

    o

    o o

    26.

    charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil, à la Commission, à la vice-présidente de la Commission/haute représentante de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, au représentant spécial de l'Union européenne pour les droits de l'homme, aux gouvernements et aux parlements des États membres, au secrétariat de l'ANASE, au secrétaire général des Nations unies, au haut-commissaire des Nations unies pour les droits de l'homme, au gouvernement et à l'Assemblée nationale du Royaume du Cambodge et au gouvernement et au Parlement du Laos.


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