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Document 52013IR5250

    Avis du Comité des régions — Lignes directrices de l’Union européenne sur les aides d’État aux aéroports et aux compagnies aériennes

    JO C 114 du 15.4.2014, p. 11–17 (BG, ES, CS, DA, DE, ET, EL, EN, FR, HR, IT, LV, LT, HU, MT, NL, PL, PT, RO, SK, SL, FI, SV)

    15.4.2014   

    FR

    Journal officiel de l'Union européenne

    C 114/11


    Avis du Comité des régions — Lignes directrices de l’Union européenne sur les aides d’État aux aéroports et aux compagnies aériennes

    2014/C 114/03

    I.   RECOMMANDATIONS POLITIQUES

    LE COMITÉ DES RÉGIONS,

    Remarques générales

    1.

    fait remarquer que, dans le cadre de l'ample processus de modernisation de la réglementation en matière d'aides d'État lancé par la Commission européenne en 2012 (1), le secteur du transport aérien a été l'un des premiers pour lesquels il est apparu nécessaire de mettre à jour le cadre réglementaire qui en régit le financement public, s'agissant des infrastructures et des aides au fonctionnement des aéroports ainsi que des aides au démarrage des compagnies aériennes (2);

    2.

    rappelle qu'en 1994 (3), la Commission européenne a introduit pour la première fois un encadrement des aides de l'État pour le secteur de l'aviation civile, à la suite de la réalisation progressive du programme de libéralisation du secteur du transport aérien, qui a considérablement stimulé la concurrence au sein de celui-ci, en rendant nécessaire une intervention régulatrice qui permette à la concurrence de s'exercer sur la base de règles équitables pour tous les opérateurs du secteur;

    3.

    souligne qu'en 2005 (4), la consolidation de la libéralisation du transport aérien et, parallèlement, l'évolution rapide du secteur les années suivantes, ont vu émerger sur le marché et croître sans interruption le nouveau modèle commercial des compagnies low cost, implanté dans les aéroports de petite taille, situation qui a rendu nécessaire une mise à jour du cadre législatif existant, sous la forme de nouvelles lignes directrices de la Commission européenne sur le financement public des aéroports et des compagnies aériennes opérant à partir d'aéroports régionaux;

    4.

    constate que, en seulement huit ans, les évolutions du marché européen ont entraîné un changement radical des volumes du trafic aérien, en raison notamment de la croissance exponentielle des parts de marché acquises par les compagnies low cost, dont le modèle commercial se fonde essentiellement sur les petits aéroports régionaux excentrés, par opposition aux traditionnels aéroports nationaux et aux grandes plates-formes aéroportuaires;

    5.

    convient avec la Commission européenne qu'il est nécessaire et urgent d'intervenir dans le cadre réglementaire régissant l'intervention publique en faveur du secteur aéroportuaire, de manière cohérente avec l'objectif du programme de modernisation visant à délivrer aux États membres, pour la période 2014-2020, un paquet législatif composé de réglementations relatives à la protection de la concurrence et du marché unique, qui soit actualisé, souple et efficace, en rappelant à cet effet les recommandations déjà formulées dans l'avis sur la modernisation des aides d'État (5);

    6.

    se félicite de la consultation publique lancée par la Commission européenne en deux phases — une première le 6 juin 2011; une deuxième en cours, le 3 juillet 2013 — en vue de recueillir les contributions de tous les acteurs concernés sur la révision du cadre réglementaire en vigueur et sur la proposition de nouvelles lignes directrices; soutient cependant l'approche de la Commission européenne visant à instaurer une concurrence équitable entre les différents acteurs du secteur aérien européen, quel que soit leur modèle d'exploitation, afin de permettre au secteur aérien européen de réussir et d'être compétitif;

    7.

    craint toutefois que le droit européen dans le secteur de la concurrence, qui relève de la compétence exclusive de la Commission européenne, ainsi que l'excès de législation non contraignante (soft law) n'empêchent les collectivités locales et régionales d'intervenir par des contributions substantielles dans certains secteurs clés du développement régional et local, comme celui des aéroports régionaux et des politiques de soutien au développement régional;

    8.

    attire l'attention de la Commission sur l'hétérogénéité du paysage aéroportuaire dans l'espace européen, notamment s'agissant de la situation des régions ultrapériphériques, dont l'isolement et l'éloignement ne permettent pas aux aéroports qui y sont situés, indépendamment du trafic de passagers enregistré, d'être viables financièrement ou de faire concurrence aux autres aéroports de l'UE, et encore moins de constituer une quelconque menace pour d'autres modes de transport alternatifs, qu'ils soient terrestres ou ferroviaires;

    9.

    rappelle que dans ces secteurs, les collectivités régionales et locales sont les actrices de politiques de développement et de croissance des territoires, lesquelles passent également par les aides d'État, et qu'elles sont dépositaires d'une profonde connaissance des économies locales grâce à leur proximité avec les acteurs économiques et sociaux, dont la législation européenne ne peut faire abstraction si elle prétend véritablement se mettre au service des territoires et de leur cohésion dans le cadre du marché unique et renforcer la cohésion territoriale dans l'ensemble de l'UE;

    10.

    rappelle ce qu'il a déjà énoncé dans son avis sur les «Lignes directrices relatives aux aides d'État à finalité régionale pour la période 2014-2020» (6), à savoir que, lorsqu'elle propose des règles relatives aux aides d'État, la Commission européenne devrait consulter systématiquement au préalable le Comité des régions (CdR) (7) afin de recueillir les éléments nécessaires à une évaluation d'impact, dans le respect du principe de gouvernance à multiniveaux (8);

    Rôle que revêtent les institutions publiques pour le financement des infrastructures

    11.

    s'associe au Comité économique et social européen (9) pour rappeler à la Commission le rôle central assumé par les aéroports régionaux dans l'ensemble de l'aviation européenne: en effet, en 2010, environ 60 % des aéroports de l'UE ont eu une fréquentation inférieure à un million de passagers. Partant, espère qu'il sera également tenu compte de ce rôle central dans les nouvelles lignes directrices;

    12.

    insiste sur l'importance que revêtent les aéroports régionaux pour la promotion du développement local et l'amélioration de l'accessibilité, contribuant par là-même à la réalisation des objectifs de cohésion territoriale, de croissance économique des territoires et de création d'emplois. L'accessibilité, par exemple sous la forme de liaisons aériennes abordables, joue un rôle déterminant si l'on veut que les zones de l'UE dont la population est plus clairsemée ainsi que les régions ultrapériphériques, et celles qui dépendent exclusivement du transport aérien, puissent prendre une part active au marché unique;

    13.

    estime que ce rôle est d'autant plus important et stratégique dans le moment historique où nous nous trouvons, où l'Union peine à sortir de la crise économique. En effet, la crise actuelle, depuis ses premières manifestations en 2008, a rendu nécessaire une intervention puissante et incisive, à finalité anticyclique, des autorités publiques européennes et nationales dans l'économie, cette intervention étant reconnue et justifiée par la Commission européenne elle-même, puisqu'elle a abondamment eu recours à la dérogation du paragraphe 107.3 b) du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (10). Dans les périodes où la conjoncture économique est difficile, il importe donc tout particulièrement de disposer de la possibilité d'encourager un accès renforcé à toutes les parties du marché;

    14.

    rappelle en outre, compte tenu de la communication de la Commission relative à la politique aéroportuaire européenne, l'importance des aéroports régionaux, qui permettent de diminuer de manière notable la surcharge croissante des grandes plates-formes aéroportuaires, sources de nuisances considérables pour la population locale comme pour l'environnement (11), tout en favorisant le tourisme au sein de l'Union et en soutenant les PME dans leur accès aux marchés en améliorant leur compétitivité (12);

    15.

    estime par conséquent que le caractère durable et efficace du transport aérien dans l'Union dépend fortement de l'existence d'un réseau adéquat d'infrastructures de petits aéroports;

    16.

    partage la préoccupation exprimée par la Commission européenne (13) selon laquelle, face au besoin croissant en infrastructures induit par la stratégie Europe 2020, il sera nécessaire de disposer d'infrastructures de réseau modernes, appropriées et flexibles dans le secteur de l'énergie, des TIC et des transports, aptes à soutenir l'Europe dans sa transition vers une économie à haute intensité de connaissances, à faibles émissions et fortement compétitive;

    17.

    partage en outre la position de la Commission selon laquelle le marché n'est pas toujours en mesure de fournir les infrastructures dont l'Europe aurait besoin, et que, sans l'intervention publique, bien des investissements nécessaires à la réalisation des objectifs de la stratégie Europe 2020 ne pourraient être obtenus ou seraient reportés à des échéances postérieures à 2020;

    18.

    accueille favorablement l'appel de la Commission à augmenter les investissements dans les infrastructures de l'Union, dont le besoin est estimé à plus de 1 500 milliards d'euros pour la période 2010-2020, s'agissant de satisfaire la demande actuelle de transports; la Commission met en évidence la forte corrélation qui existe entre l'accessibilité géographique des territoires et leur croissance économique;

    19.

    prend acte des principes élaborés par la jurisprudence de la Cour dans l'affaire Leipzig/Halle (14), mais souligne le contexte concret particulier à l'origine de ces principes; invite par conséquent la Commission à tenir compte de la grande variété des interventions publiques destinées à soutenir les infrastructures, à l'heure d'élaborer ses lignes directrices. En plus des capitaux privés, une participation du secteur public est souvent essentielle pour garantir la réussite de projets d'infrastructure d'envergure, tels que la construction d'aéroports, que leur finalité soit ou non commerciale;

    20.

    souligne que le nombre absolu de passagers ne devrait être un critère pertinent pour évaluer la rentabilité possible d'un aéroport du point de vue de l'infrastructure et procéder à sa classification que dans des cas généraux; plaide dès lors pour une définition plus souple des conditions de compatibilité en la matière, qui permette encore de prendre en compte certaines spécificités au cas par cas;

    21.

    exhorte en outre à prendre en considération le fait que, dans la conjoncture actuelle de sortie de crise, il serait d'autant plus opportun d'évaluer en priorité les effets positifs que les financements publics dans les infrastructures ont sur la cohésion, la croissance et l'emploi, et de mettre ceux-ci de manière appropriée en balance avec les règles sur la concurrence;

    22.

    prend note du principe de l'opérateur en économie de marché développé par la Commission; se déclare cependant préoccupé par les conséquences de l'application de ce principe aux infrastructures, où le rôle joué historiquement et institutionnellement par l'État est irremplaçable: compte tenu du volume d'investissements nécessaire et de l'impossibilité de reporter dans son intégralité le refinancement des coûts d'investissement sur la collectivité qui utilise les infrastructures, la plupart des investissements dans les infrastructures ne sont en principe pas tenables pour un investisseur privé. Le présupposé selon lequel l'État peut être assimilé à un opérateur privé et faire abstraction de toute considération à caractère social, sectoriel ou de politique régionale, est sans rapport avec la réalité et constitue un risque pour le bien commun s'il s'applique aux interventions en matière d'infrastructure des territoires, lesquelles font partie intégrante de la mission du secteur public;

    23.

    invite la Commission à considérer que les interventions publiques en faveur de la construction et de l'extension des infrastructures (15), y compris celles qui sont destinées à corriger le déficit d'accessibilité dont pâtissent les habitants, sont souvent de véritables mesures générales de politique économique et ne constituent donc pas des aides d'État, mais des mesures d'intérêt général. Exhorte dès lors la Commission à poursuivre le processus de modernisation des règles relatives aux aides d'État, en tenant compte des principes fondamentaux qui sont à la base de la politique publique et du rôle institutionnel de l'État; fait observer que, tout comme les routes et les chemins de fer, les aéroports remplissent une fonction publique d'infrastructures;

    Aéroports de petite et très petite taille qui n'entrent pas dans le champ d'application des règles en matière d'aides d'État

    24.

    demande instamment à la Commission de poursuivre cette modernisation dans le sens d'une véritable simplification, en concentrant ses efforts sur les contextes et les cas les plus manifestes de distorsion de concurrence, qui représentent une réelle menace pour l'intégrité du marché intérieur;

    25.

    partage l'idée qu'il est nécessaire de disposer de règles garantissant, dans l'Espace économique européen, une concurrence équitable pour toutes les entreprises opérant dans le domaine du transport aérien, en réduisant au minimum les interventions publiques qui créent des distorsions sur les marchés concernés, et permettant d'éviter la course aux subventions entre États membres;

    26.

    considère toutefois que les efforts de la Commission doivent se concentrer sur les grands aéroports, et que les interventions en faveur des petits aéroports dont le trafic annuel moyen est inférieur à 300 000 passagers doivent être considérés en dehors du champ d'application des aides d'État, car ils ne peuvent pas avoir d'incidence sur les échanges entre États membres et, dès lors, ces aéroports sont structurellement dans l'impossibilité de couvrir les coûts d'exploitation et d'investissement. Souligne que la Commission a déjà reconnu le caractère approprié du seuil fixé à 300 000 passagers, dans le cadre de la décision du 20 décembre 2011 relative à l'application des dispositions de l'article 106, paragraphe 2, du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne aux aides d'État sous forme de compensations de service public octroyées à certaines entreprises chargées de la gestion de services d'intérêt économique général, tout en la restreignant aux liaisons aériennes vers les îles ou les ports et en fixant un seuil plus bas pour les SIEG relatifs aux aéroports. Demande dès lors que la Commission gère de manière plus cohérente et plus simple les seuils dans les différentes bases juridiques et modifie en conséquence la proposition de nouvelles lignes directrices, notamment les paragraphes 80.1 et 80.2 relatifs à la classification des aéroports, le paragraphe 92 sur l'intensité des aides, dans lequel il conviendrait de prévoir la création d'une catégorie d'aéroports avec moins de 300 000 passagers, ainsi que l'article 2, paragraphe 1, point (e) de la décision précitée;

    27.

    se félicite de l'attention que la Commission a décidé de consacrer à la catégorie des aéroports avec une capacité très limitée de trafic annuel de passagers, et du fait qu'elle reconnaisse l'impossibilité structurelle fréquente de ces aéroports, et plus en général de ceux ayant une capacité allant jusqu'à cinq millions de passagers par an, de couvrir les coûts d'investissement et les coûts d'exploitation, sans une aide publique. Déplore en même temps de ne pas retrouver en conséquence une telle attention s'agissant des critères de compatibilité des aides destinées à ces aéroports (16);

    28.

    note, en particulier, que ces aéroports possèdent les caractéristiques suivantes:

    nombre limité de passagers,

    mauvaise accessibilité de la région où ils se trouvent, pour des raisons d'éloignement, d'orographie ou de manque d'infrastructures pour les connexions alternatives avec le territoire environnant,

    zone de chalandise réduite, et perspectives de développement limitées qui en résultent,

    caractéristiques qui leur confèrent un profil strictement local et les privent d'attractivité transfrontalière;

    29.

    relève que, dans la plupart des cas, il s'agit de petits aéroports pour lesquels il n'y a que peu ou pas de possibilité de substitution en termes de capacité de transport par d'autres aéroports ou par d'autres moyens de transport public: l'éventuelle redistribution des passagers des premiers n'aurait aucune influence sur le volume de trafic des seconds;

    30.

    considère dès lors que le financement de ces aéroports ne constitue pas une aide d'État au sens du paragraphe 1 de l'article 107 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, car il est incapable de fausser la concurrence et d'altérer les échanges entre États membres, et qu'il ne devrait donc pas faire partie du champ d'application des nouvelles lignes directrices;

    31.

    propose (17) que la période transitoire de dix ans maximum au cours de laquelle la Commission estime que les aides d'État sont compatibles avec le fonctionnement des aéroports soit appliquée seulement aux aéroports ayant une taille, en termes de trafic annuel, supérieure à un million de passagers. L'interdiction proposée ne devrait pas entraîner la fermeture massive de petits aéroports. Il propose aussi que dans le tableau exposant le niveau maximal des aides à l'investissement, la catégorie des aéroports avec moins d'un million de passagers soit désormais intitulée «aéroports dont le trafic annuel est compris entre 300 000 et 1 million de passagers»;

    32.

    convient avec la Commission européenne qu'il est souhaitable d'éviter la multiplication d'aéroports non rentables et la création de capacités excessives, mais estime que, lorsque les conditions juridiques ne sont pas réunies pour que les financements soient considérés comme des aides d'État, comme c'est la cas pour les petits aéroports d'importance locale, ces recommandations ne devraient pas faire l'objet de règles relatives aux aides d'État, dont l'objectif réside dans la protection des équilibres concurrentiels entre États membres pour l'intégrité du marché unique, et non dans l'évaluation de la qualité des décisions en matière de dépenses publiques des gouvernements;

    Services d'intérêt économique général

    33.

    prend connaissance du fait que la Commission considère la construction et l'entretien d'aéroports comme un cas de figure dans lequel des compensations peuvent être versées au titre de l'exercice d'obligations de service public, mais considère toutefois le champ d'application comme beaucoup trop restreint;

    34.

    estime qu'il convient de réfléchir au maintien d'un aéroport même en dehors de zones qui seraient, sans celui-ci, coupées du reste de l'UE d'une manière telle que cela affecterait leur développement économique et social;

    35.

    fait remarquer que déterminer les missions d'intérêt économique général relève en principe de l'autonomie des États membres et de leurs collectivités locales et régionales et que la Commission ne peut procéder à une vérification qu'en cas de manquements manifestes;

    36.

    estime que la construction et l'entretien d'un aéroport correspondent à une mission d'intérêt général surtout lorsque l'aéroport améliore la situation d'une région structurellement défavorisée de telle manière qu'il permet tout simplement à cette région de bénéficier d'une perspective de développement économique;

    37.

    estime qu'il est nécessaire de mettre en œuvre une politique de coopération entre régions transfrontalières européennes aux fins de coordonner et/ou de créer des aéroports à vocation régionale qui concerneraient des régions de plusieurs États;

    Aides au fonctionnement des aéroports recevant entre 300 000 et 1 million de passagers

    38.

    constate que la Commission européenne reconnaît que l'existence d'aides au fonctionnement des petits aéroports régionaux dépend largement de leur incapacité à couvrir leurs propres coûts d'exploitation. La Commission estime par ailleurs qu'il est possible, dans dix ans tout au plus, de faire passer ces aéroports à des modes de gestion davantage axés sur le marché, leur permettant de récupérer des ressources suffisantes pour couvrir les coûts de fonctionnement;

    39.

    doute fort qu'une telle transition puisse avoir lieu avant que ces aéroports aient atteint un volume de trafic de plus d'un million de passagers par an, et cela indépendamment de la période de 10 ans prévue par la Commission, en vertu des caractéristiques de marché des petits aéroports régionaux;

    40.

    marque son accord de principe avec l'approche de la Commission européenne orientée vers le marché, avec l'allocation des ressources publiques aux modèles d'aéroports efficaces pour éviter la multiplication d'aéroports inefficaces, et avec la protection de la concurrence entre aéroports et compagnies aériennes;

    41.

    estime toutefois que la méthode par laquelle la Commission prétend atteindre ses objectifs n'est pas appropriée, car elle ignore que les dynamiques de marché varient beaucoup en fonction des dimensions et des caractéristiques des aéroports et que, en conséquence, les sociétés de gestion des aéroports n'opèrent qu'en apparence sur le même marché;

    42.

    note, comme souligné par le Conseil international des aéroports (ACI) dans une récente analyse (18), que 80 % des coûts d'un aéroport sont des coûts fixes, indépendants du trafic de passagers, qui sont imputables tant aux infrastructures qu'aux coûts de fonctionnement, lesquels dérivent en majeure partie des obligations de sécurité, ce qui rend le coût par passager nettement supérieur pour un petit aéroport par rapport à un grand aéroport qui peut répartir les coûts fixes sur un grand nombre de passagers, ce qui augmente considérablement pour eux les difficultés à atteindre le seuil de rentabilité;

    43.

    souligne par ailleurs que les petits aéroports sont caractérisés par des désavantages concurrentiels structurels qui les empêchent de pouvoir compenser les coûts fixes soit par les recettes commerciales, qui sont étroitement liées au volume de passagers en transit, soit par l'augmentation des taxes d'aéroport imposées aux compagnies aériennes, qui aurait pour effet de rendre encore moins attractive une escale dans ces aéroports, déjà pénalisés par la taille réduite de leur zone de chalandise et l'insuffisance des connexions, et conduirait en bout de chaîne les compagnies aériennes à se tourner vers les aéroports plus grands;

    44.

    met aussi en évidence le fait qu'une grande partie des petits aéroports ayant une dimension comprise entre 300 000 et 1 million de passagers par an tendent à conserver leurs dimensions réduites en raison des caractéristiques peu favorables des territoires où ils sont situés (zone insulaire, montagneuse ou périphérique; manque d'infrastructures ou de connexions intermodales, etc.). Nonobstant, ces aéroports représentent près de 20 % (19) du réseau RTE-T principal et général, en jouant un rôle essentiel pour l'avenir des réseaux transeuropéens et des objectifs de connectivité de la stratégie Europe 2020;

    45.

    souligne en effet que des analyses récentes (20) ont démontré qu'en face du volume global de pertes accumulées par les aéroports ayant moins d'un million de passagers par an, lequel est égal à 445 millions d'euros par an, la contribution de ces aéroports à la croissance du PIB de l'UE s'élève à 16,15 milliards d'euros annuels et représente environ 265 000 emplois;

    46.

    estime par conséquent que les nouvelles lignes directrices ne doivent pas interdire les aides destinées au fonctionnement des aéroports ayant un trafic inférieur à un million de passagers par an, ainsi qu'à celui des aéroports des régions ultrapériphériques, y compris après une période de 10 ans maximum: en effet, ces aides représentent l'unique instrument capable d'atténuer les distorsions provoquées par les déficits structurels évoqués ci-dessus, et sont pleinement justifiées par les effets externes positifs qu'elles induisent;

    47.

    invite la Commission à reconnaître que les avantages procurés aux citoyens européens par le soutien public aux petits aéroports régionaux doit avoir la priorité sur les considérations à caractère strictement financier et économique;

    48.

    rappelle à la Commission les effets externes positifs qui découlent d'une offre ample et variée de petits aéroports régionaux: l'augmentation de la mobilité, non seulement nationale mais surtout transeuropéenne, grâce à l'accroissement de la pression concurrentielle sur les tarifs du transport aérien et à la réduction des coûts; la consolidation de la cohésion sociale, culturelle et territoriale de l'Union;

    49.

    s'accorde sur la nécessité de veiller à ce que les aides publiques aux petits aéroports ne se traduisent pas en subventions croisées en faveur de bénéficiaires autres que ceux des infrastructures aéroportuaires;

    50.

    propose que la fin de la période de transition soit considérée comme une «révision à moyen terme» qui n'exclut pas la possibilité de poursuivre l'aide au fonctionnement après cette période si les conditions requises à cette fin sont toujours réunies; propose en outre que, comme cela est prévu pour les aides à l'investissement, les aides au fonctionnement puissent être modulées en proportion des dimensions de l'aéroport et éventuellement d'une amélioration de l'efficacité de sa gestion, qui ne peut et ne doit pas être conditionnée de façon rigide aux 10 % annuels pour tous les aéroports sans distinction;

    51.

    estime que la période maximale de 24 mois accordée pour la promotion de nouvelles lignes doit être comprise comme 24 mois non consécutifs, étant donné que le modèle d'affaires des vols saisonniers, souvent liés au tourisme, est particulièrement répandu dans les petits aéroports régionaux;

    Aides à l'investissement pour les aéroports

    52.

    fait part de son inquiétude quant au fait que les taux de financement rigides fondés sur la taille que propose la Commission en ce qui concerne les coûts d'investissement ne répondent pas aux spécificités des différentes situations et invite dès lors la Commission à autoriser une approche souple des aides au financement, conformément à la pratique suivie jusqu'à présent, lorsque l'aéroport sert un objectif d'intérêt général (essentiellement l'accessibilité, la politique de développement régional), permet d'espérer une rentabilité à long terme compte tenu des prévisions en matière de trafic et sur la base d'un plan d'affaires, et garantit un accès non discriminatoire aux passagers et aux compagnies aériennes; considère également comme inappropriée la proposition de conditionner les aides d'État à l'investissement dans ces aéroports, lesquelles sont autorisées à concurrence de 25 %, au remboursement des aides en cas de succès de l'investissement; propose que ce taux de 25 % ne soit pas entièrement lié à la forme d'une avance remboursable;

    53.

    met en exergue les résultats de l'analyse du secteur (21), qui indiquent que les aéroports ne sont en mesure de réaliser des économies d'échelle compétitives que lorsqu'ils atteignent le seuil de 5 millions de passagers par an: comme le reconnaît la Commission européenne elle-même, les aéroports dont la taille est comprise entre 3 et 5 millions passagers par an ne parviennent pas toujours à couvrir la totalité de leurs coûts;

    Financement de l'intermodalité des aéroports

    54.

    recommande de soutenir des plans pour la conversion, dans les centres régionaux, des infrastructures aéroportuaires existantes qui seront coordonnées avec le développement du transport intermodal à l'échelle régionale; souscrit à la nécessité et au caractère urgent, déjà exprimés dans le livre blanc sur la politique des transports de 2011 (22), d'une intervention rapide de l'Union en faveur de l'intégration multimodale des déplacements, notamment de la comodalité entre le transport ferroviaire et aérien; invite par ailleurs la Commission à poursuivre la modernisation des aides d'État afin que la nouvelle réglementation favorise les aides publiques dans le but de corriger ces inquiétantes lacunes en matière d'infrastructures et la fragmentation modale du système de transport aérien, en les considérant comme partie intégrante d'une politique publique soutenant la mobilité des citoyens européens;

    Les défis de la concurrence mondiale

    55.

    rappelle le rôle essentiel joué par l'aviation dans l'économie européenne, tant pour les citoyens que pour les entreprises de l'Union, sachant qu'elle crée plus de 5 millions d'emplois et contribue au PIB européen à hauteur de 365 milliards d'euros, soit 2,4 %, apportant ainsi une contribution essentielle à la croissance économique, à l'emploi, au tourisme, aux contacts humains ainsi qu'à la cohésion régionale et sociale de l'Union, et restant donc un domaine essentiel pour les liaisons entre l'Europe et le reste du monde;

    56.

    partage l'idée que la concurrence ne doit pas être faussée par des pratiques déloyales, ni à l'intérieur, ni à l'extérieur de l'UE. Le Comité invite la Commission à faire en sorte que les efforts déployés pour achever le marché intérieur ne limitent pas la capacité de l'Union à faire face aux défis de la concurrence mondiale, face à des pays qui sont aujourd'hui parmi nos principaux concurrents et face auxquels la Commission a déjà signalé une perte de compétitivité préoccupante et croissante de l'aviation européenne (23);

    57.

    estime que la concurrence concernant les nouvelles lignes aériennes ne se limite pas à l'Europe mais qu'elle est mondiale. Si l'on souhaite préserver ou développer la compétitivité économique des régions périphériques, il est nécessaire de les aider à améliorer leur connectivité, en partageant le risque inhérent au démarrage de toute nouvelle ligne aérienne. De telles liaisons à l'extérieur de l'UE sont de plus en plus importantes pour le maintien et le développement de liens avec les marchés existants et émergents, et sur le plan des avantages économiques directs qu'elles peuvent apporter; aussi mériteraient-elles, sous certaines conditions, de bénéficier également d'aides;

    58.

    rappelle que le système rigoureux de contrôle des aides d'État de l'Union est unique au monde et que, s'agissant de la compétitivité de l'aviation européenne au niveau mondial, on ne peut faire abstraction des financements publics massifs que les États-Unis, les pays d'Asie et du Moyen-Orient continuent à injecter dans leurs infrastructures aéroportuaires et compagnies aériennes, en mettant l'Union dans une situation de désavantage concurrentiel périlleux: le processus de modernisation ne peut ignorer ce scénario et l'Union ne peut se permettre à l'heure actuelle de persévérer dans une approche restrictive, en particulier concernant les aides publiques aux infrastructures, approche qui menace de saper encore davantage la compétitivité du secteur de l'aviation européenne et de l'économie de l'UE dans son ensemble.

    Bruxelles, le 28 novembre 2013.

    Le Président du Comité des régions

    Ramón Luis VALCÁRCEL SISO


    (1)  COM(2012) 209 final.

    (2)  Consultation publique lancée le 7 avril 2011 et terminée le 7 juin 2011.

    (3)  94/C 350/07.

    (4)  2005/C 312/01.

    (5)  CdR 1528/2012.

    (6)  CdR 2232/2012.

    (7)  CdR 76/2005, p. 1.

    (8)  Cf. CdR 2232/2012, paragraphes 18 à 20.

    (9)  2012/C 299/10.

    (10)  Voir les mesures adoptées par la Commission européenne en réponse à la crise économique et financière à partir de 2008: http://ec.europa.eu/competition/state_aid/legislation/temporary.html.

    (11)  COM(2011) 823 final.

    (12)  COM(2006) 819 final.

    (13)  SEC(2011) 391 final.

    (14)  Arrêt de la Cour de justice européenne du 19 décembre 2012 — Mitteldeutsche Flughafen AG, Flughafen Leipzig/Halle GmbH/Commission européenne, République fédérale d'Allemagne, Arbeitsgemeinschaft Deutscher Verkehrsflughäfen ev.

    (15)  94/C 350/07, p. 1.

    (16)  Voir les articles 80, paragraphe 1, et 92 du Projet de communication de la Commission — Lignes directrices de l'UE sur les aides d'État aux aéroports et aux compagnies aériennes (2013).

    (17)  Ibid. p. 102.

    (18)  Airports and State Aid: How To Protect Both Growth and Competition («Aéroports et aides d'État: comment préserver à la fois la croissance et la concurrence»), ACI, 2013.

    (19)  Ibid.

    (20)  Ibid.

    (21)  Ibid.

    (22)  COM(2011) 144 final.

    (23)  COM(2012) 556 final.


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