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Document 52010DC0796

    COMMUNICATION DE LA COMMISSION AU PARLEMENT EUROPÉEN ET AU CONSEIL Vers une surveillance renforcée du marché relatif au système européen d'échange de quotas d'émission

    /* COM/2010/0796 final */

    52010DC0796

    /* COM/2010/0796 final */ COMMUNICATION DE LA COMMISSION AU PARLEMENT EUROPÉEN ET AU CONSEIL Vers une surveillance renforcée du marché relatif au système européen d'échange de quotas d'émission


    [pic] | COMMISSION EUROPÉENNE |

    Bruxelles, le 21.12.2010

    COM(2010) 796 final

    COMMUNICATION DE LA COMMISSION AU PARLEMENT EUROPÉEN ET AU CONSEIL

    Vers une surveillance renforcée du marché relatif ausystème européen d'échange de quotas d'émission

    COMMUNICATION DE LA COMMISSION AU PARLEMENT EUROPÉEN ET AU CONSEIL

    Vers une surveillance renforcée du marché relatif ausystème européen d'échange de quotas d'émission

    INTRODUCTION

    Le système d'échange de quotas d'émission (SEQE)[1] de l'Union européenne a été mis en place le 1er janvier 2005. Il garantit la réduction des émissions polluantes au moindre coût pour la société, et représente donc l'un des principaux outils de l'Union européenne pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. Ce système couvre les secteurs industriels à forte intensité d'énergie et le secteur de l'énergie, et sera étendu au secteur aérien dès 2012. Le train de mesures sur le climat et l'énergie adopté en avril 2009 a renforcé et amélioré le SEQE afin de stabiliser le cadre réglementaire sur le long terme[2]. En fait, un plafond dégressif a été fixé jusqu'en 2020 et au-delà pour la quantité de quotas à délivrer. Ce plafond pourrait être revu à la baisse dans le cadre de nouvelles décisions politiques, mais les acteurs du marché peuvent d'ores et déjà tenir compte, dans leurs décisions d'investissement, des diminutions minimales actuellement connues.

    Bien que le marché européen du carbone[3] se soit considérablement développé et sophistiqué au cours de ses six premières années de fonctionnement, il reste relativement jeune. Il importe donc de veiller à ce qu'il puisse poursuivre son expansion et permette l'émergence d'un signal de prix du carbone fiable et non faussé. Pour cela, un cadre de surveillance adapté doit être mis en place. Il devra garantir à tous les acteurs du marché des conditions d'échange équitables et efficientes en imposant des exigences de transparence et en prévenant et sanctionnant toute pratique abusive, notamment les opérations d'initiés et les manipulations de marché. Ce cadre devrait également prévoir des mesures pour limiter le plus possible le risque de détournement du marché du carbone à d'autres fins illégales (blanchiment de capitaux ou fraude à la TVA, par exemple).

    OBJECTIF DE LA PRÉSENTE COMMUNICATION

    L'article 12, paragraphe 1 bis , de la directive 2003/87/CE («directive SEQE») dispose que la Commission examine si le marché des quotas d'émission est suffisamment à l'abri des opérations d'initiés ou des manipulations de marché et présente, si besoin est, des propositions afin de garantir que tel est le cas.

    La présente communication fournit une première évaluation des niveaux actuels de protection du marché du carbone contre ce type d'abus ou tout autre problème similaire. Sur la base de cette évaluation, la Commission lancera, au premier semestre 2011, une vaste consultation des parties concernées afin de déterminer la meilleure voie à suivre et présentera, si nécessaire, ses propositions législatives avant fin 2011.

    SITUATION ACTUELLE DU MARCHÉ EUROPÉEN DU CARBONE

    Structure du marché – Qui? Quoi? Où?

    Actuellement, toute personne peut accéder au marché du carbone, directement ou indirectement en passant par un intermédiaire financier. Deux grandes catégories d'acteurs interviennent sur le marché des quotas d'émission: les acheteurs assujettis, qui sont réglementairement tenus de restituer des quotas dans les délais prescrits, et les intermédiaires financiers, qui ne sont, eux, soumis à aucune obligation de conformité[4]. Parmi les acheteurs assujettis , il faut distinguer les compagnies d'électricité et les sociétés industrielles. Les deux principaux groupes de participants au marché sont les compagnies d'électricité, qui sont les plus gros émetteurs de gaz à effet de serre dans les secteurs assujettis, et les intermédiaires financiers.

    Le SEQE se caractérise notamment par la participation active d' intermédiaires financiers , qui ont facilité les échanges entre installations et élaboré des produits dérivés, tels que les futures (contrats à terme fermes standardisés), les contrats d'option et les swaps (contrats d'échange), pour aider les entreprises assujetties à gérer le risque. L'éventail plus large de participants qui en résulte accroît la liquidité du marché du carbone et contribue à l'émergence d'un signal de prix du carbone fiable. L'intermédiation d'entreprises financières est particulièrement importante pour les petites et moyennes entreprises et pour les exploitants d'installations qui ne disposent pas des ressources ou du savoir-faire nécessaires, ou dont les besoins de conformité peu importants ne justifient pas une présence directe en continu sur le marché du carbone.

    Les produits qui sont actuellement échangés sur le marché du carbone et qui peuvent être utilisés à des fins de conformité dans le cadre du SEQE sont les quotas, au sens de la directive 2003/87/CE établissant un système d'échange de quotas d'émission de gaz à effet de serre (ci-après «directive SEQE»), et les crédits d'émission au titre des mécanismes de compensation du protocole de Kyoto, c'est-à-dire les unités de réduction certifiée des émissions (URCE) résultant du mécanisme de développement propre (MDP) et les unités de réduction des émissions (URE) provenant de projets de mise en œuvre conjointe (MOC)[5]. Toutes ces unités peuvent être échangées et livrées immédiatement (« négociation au comptant »), mais la plupart des transactions portent sur des produits dérivés sur quotas et URCE ( forwards , futures , options et swaps , par exemple). D'après les premières informations dont dispose la Commission, les produits dérivés ont représenté entre 75 et 80 % du volume total des échanges en 2009.

    Le tableau 1 joint en annexe illustre la diversification du marché européen du carbone et donne un aperçu des produits proposés par certaines bourses du carbone .

    Les transactions de gré à gré [6] (spot et forwards), qui prévalaient auparavant sur le marché du carbone, ont perdu du terrain face aux transactions de contrats spot et futures standardisés en bourse, ainsi que le montre le graphique nº 1.

    Figure nº 1 – Évolution des transactions en bourse et des transactions de gré à gré depuis 2005[7]

    [pic]

    En plus des transactions en bourse et des transactions de gré à gré via un courtier, il existe aussi les transactions bilatérales directes entre deux parties qui se connaissent. Ces transactions concernent généralement de gros volumes, et leurs prix ne sont pas publiés. De plus en plus de transactions bilatérales sont aujourd'hui compensées par une contrepartie centrale[8].

    Enfin, les quotas d'émission peuvent aussi être achetés aux enchères dans certains États membres. Cette procédure est encore peu utilisée[9], mais deviendra le principal mode d'allocation des quotas du SEQE dès 2013. La mise aux enchères sera introduite progressivement, l'objectif étant qu'elle devienne l'unique mode d'allocation à partir de 2027. En vertu du nouveau règlement sur la mise aux enchères (voir la partie 5.2), l'accès au marché primaire sera, dans un premier temps, réservé à certaines catégories de participants. Il n'est toutefois pas exclu que la liste des personnes autorisées à participer aux enchères soit étendue à d'autres catégories, à mesure que des informations sur les enchères seront recueillies durant la troisième période d'échange.

    Disponibilité des données et transparence du marché

    La transparence du marché accroît la capacité des participants à un marché spécifique à prendre des décisions éclairées. Elle renforce aussi leur confiance en l'intégrité et en l'efficience de ce marché. La transparence est en outre un outil indispensable pour lutter contre plusieurs formes de pratiques abusives sur le marché. Il importe donc d'examiner quelles données sont actuellement disponibles sur le marché européen du carbone. On établit généralement une distinction entre les données de transaction et les données fondamentales, et entre les données publiques et les données réservées aux seules autorités de régulation.

    Les bourses et autres plateformes d'échange organisées communiquent en temps réel aux participants des informations anonymisées sur les offres des acheteurs et des vendeurs, sur les transactions et sur les prix de clôture . Ces informations sont également mises à la disposition du public en différé de quelques minutes. Les modalités des transactions de gré à gré ne sont, en principe, pas accessibles à d'autres acteurs du marché . Toutefois, des analystes du marché et des agences de presse financière publient et vendent au public des données sur les transactions, notamment des informations journalières sur le volume des transactions de gré à gré ( spot et forwards ) compensées.

    Les données fondamentales les plus pertinentes ont trait aux émissions vérifiées des quelque 11 000 installations qui sont tenues, dans le cadre du SEQE, de restituer des quotas pour couvrir leurs émissions de gaz à effet de serre. Le « journal des transactions communautaire indépendant» (ci-après «le CITL»)[10] fournit des données annuelles sur les émissions vérifiées de manière indépendante de toutes les installations couvertes par le SEQE. C'est le niveau des émissions des installations qui détermine la demande sur le marché. Cette information influence donc grandement l'évolution des prix. Conformément au règlement révisé sur les registres, la Commission publie le 1er avril, ou à partir du premier jour ouvrable qui suit cette date si le 1er avril tombe un week-end ou un jour férié, le chiffre des émissions vérifiées de chaque installation pour l'année civile précédente [11]. Les informations concernant la quantité de quotas que les États membre ont alloués gratuitement aux installations sont, elles aussi, publiques[12]. Les informations sur l'allocation gratuite perdront de leur importance à mesure que les enchères deviendront le principal mode d'allocation des quotas du SEQE. D'autres informations utiles (concernant, par exemple, les mesures prises pour mettre en œuvre la directive SEQE) sont aussi publiées par la Commission d'une manière générale et non discriminatoire.

    Par ailleurs, plusieurs mesures favorisant la transparence sont envisagées au titre du règlement sur la mise aux enchères (voir la partie 6.2); elles concernent notamment le calendrier des enchères, l'annonce des résultats et les rapports mensuels et annuels relatifs aux séances d'enchères.

    TYPES D'ABUS DE MARCHÉ ET AUTRES QUESTIONS À TRAITER

    La notion d'«abus de marché» au sens strict de la directive sur les abus de marché[13] ne recouvre que les opérations d'initiés et les manipulations de marché définies par cette même directive. C'est aussi ce à quoi fait référence l'article 12, paragraphe 1 bis , de la directive SEQE et ce à quoi sera essentiellement consacrée la suite de la présente communication. Toutefois, la Commission estime important d'examiner ce problème plus globalement afin de garantir l'intégrité et la protection du marché du carbone. À mesure que le marché gagnera en maturité, des mesures devront être prises pour protéger l'ensemble du marché européen du carbone et prévenir, déceler et sanctionner non seulement les opérations d'initiés et les manipulations de marché, mais aussi d'autres formes de pratiques abusives, telles que le blanchiment de capitaux, le financement du terrorisme et toute autre activité criminelle .

    Trois incidents survenus en 2009 et 2010 sur le marché européen du carbone fournissent un bon exemple de l'éventail plus large des risques à prendre en considération. Même si ces incidents ne constituent pas des abus de marché au sens de la directive sur les abus de marché, ils ont tout de même suscité des appels en faveur d'une régulation plus stricte du marché européen du carbone:

    - des cas de fraude à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) ont été détectés sur le marché du carbone en 2009 et en 2010. Bien qu'il pose un grave problème, ce type de fraude n'est pas propre à ce marché et s'est déjà produit sur d'autres marchés. La Commission a travaillé en étroite collaboration avec les États membres pour lutter contre ce problème et une nouvelle directive concernant l'application du mécanisme d'autoliquidation sur les échanges de quotas d'émission[14] a été adoptée le 16 mars 2010. Entrée en vigueur en avril 2010, cette directive permet de réduire les possibilités de fraude;

    - le « hameçonnage », pratique qui consiste à essayer d'accéder sans autorisation aux comptes d'intervenants sur le marché, n'est pas non plus une spécificité du marché du carbone, mais elle a néanmoins poussé la Commission à adopter rapidement des mesures en coopération avec les États membres[15];

    - la revente, par un État membre, sur le marché européen du carbone, d'URCE déjà utilisées à des fins de conformité dans le cadre du SEQE constitue, en revanche, une spécificité du marché du carbone. Afin de prévenir ce recyclage des URCE , l'Union européenne a agi promptement en modifiant le règlement sur les registres[16]. Si de nouveaux risques devaient apparaître, la Commission n'hésiterait pas à prendre des mesures d'urgence, comme elle l'a déjà fait.

    D'autres questions relatives au marché du carbone se posent: même si elles n'ont pas trait aux abus de marché ou à la fraude, leur résolution permettrait de renforcer la transparence et l'efficacité globale du SEQE. L'une porte sur les normes comptables harmonisées relatives aux quotas d'émission[17]. Après avoir vainement tenté d'établir des règles comptables en 2004 (l'IFRIC 3 a été retirée), l'International Accounting Standards Board (IASB) s'est associé, en 2008, au Financial Accounting Standards Board (FASB) américain en vue d'élaborer des orientations complètes sur la comptabilisation des quotas d'émission[18]. La Commission invite ces deux organismes à achever rapidement leurs travaux afin d'examiner les nouvelles normes qu'ils auront élaborées et d'envisager leur adoption à l'échelle de l'Union européenne.

    RÉGIME INSTAURÉ PAR LA DIRECTIVE SEQE ET AUTRES DISPOSITIONS PERTINENTES

    La directive SEQE donne à la Commission un rôle spécifique de surveillance du système d'échange qui est lié, mais pas limité, à l'introduction des enchères comme principal mode d'allocation des quotas.

    La directive prévoit que la Commission surveille le fonctionnement du marché européen du carbone et présente, au Parlement européen et au Conseil, un rapport annuel portant sur la mise en œuvre des enchères, la liquidité et les volumes échangés sur le marché. Si la Commission dispose de preuves d'un mauvais fonctionnement du marché du carbone, elle présente, au Parlement européen et au Conseil, un rapport visant à accroître la transparence du marché et à améliorer son fonctionnement.

    Étant donné que les intermédiaires financiers et les compagnies d'électricité sont les principaux acteurs du marché européen du carbone, l'examen du niveau de surveillance du marché doit tenir compte de la législation applicable aux marchés financiers et de celle relative aux marchés de l'énergie. De plus, le règlement sur la mise aux enchères instaure un cadre qui vise à garantir l'intégrité et la transparence de la mise aux enchères des quotas d'émission.

    Législation relative aux marchés financiers

    La législation relative aux marchés financiers est adaptée aux réalités du marché du carbone dans la mesure où les transactions qui s'effectuent sur ce marché impliquent l'utilisation d'instruments financiers, sont réalisées par des intermédiaires financiers agréés ou passent par des places boursières et/ou des infrastructures organisées et surveillées conformément aux dispositions réglementaires applicables aux marchés financiers. Étant donné la diversité des produits, des plateformes d'échange et des participants qui caractérise le marché du carbone, les règles applicables aux marchés financiers ne s'appliquent pas de la même manière aux différents segments du marché. Il est néanmoins possible de formuler un certain nombre d'observations générales sur la manière dont la législation relative aux marchés financiers régule le fonctionnement des marchés du carbone.

    Premièrement, la directive sur les abus de marché (DAM) s'applique aux dérivés sur quotas d'émission qui répondent à la définition d'un instrument financier donnée par cette même directive. Pour que la directive s'applique, l'instrument financier doit être admis à la négociation sur un «marché réglementé» ou une demande d'admission à la négociation sur ce type de marché doit avoir été présentée. L'interdiction relative aux opérations d'initiés et aux manipulations de marché prévue par la DAM s'applique donc déjà à la négociation de dérivés sur quotas d'émission sur les marchés réglementés. Les régulateurs financiers de chaque État membre ont l'obligation de maintenir une surveillance continue de ces marchés et peuvent adopter des mesures de contrôle de l'application pour lutter contre les abus de marché, le cas échéant.

    Deuxièmement, la directive concernant les marchés d'instruments financiers[19] (directive MiF) s'applique aux instruments dérivés sur quotas à la condition qu'ils satisfassent à un certain nombre de critères, par exemple qu'ils soient négociés sur un marché réglementé ou dans un «système multilatéral de négociation» (MTF) . En conséquence, les intermédiaires financiers qui fournissent des services d'investissement pour les produits dérivés sur quotas d'émission doivent obtenir un agrément conformément à la directive MiF et sont soumis à la surveillance continue des régulateurs financiers. Cela signifie également qu'ils doivent poursuivre leur activité conformément à toute une série d'exigences opérationnelles et de notification (par exemple, les règles de conduite, la notification de transactions pour les intermédiaires, la disponibilité d'informations suffisantes concernant les instruments admis à la négociation sur les marchés réglementés et les MTF) qui visent à garantir la protection des investisseurs et la transparence du marché.

    Les bourses d'échange de quotas d'émission, d'URCE et d'URE sont soit des marchés réglementés, soit des systèmes multilatéraux de négociation. Les autres plateformes d'échange de produits au comptant sont régulées au niveau national, ou s'auto-régulent.

    La directive sur les abus de marché et la directive MiF font actuellement l'objet d'un réexamen global et les propositions de la Commission sont attendues pour 2011. Le réexamen de ces deux directives n'est pas encore achevé. Toutefois, en ce qui concerne la première, l'un des objectifs généraux est d'étendre son champ d'application afin de tenir compte de l'évolution technique et réglementaire des marchés financiers, étant donné que les règles relatives aux abus de marché deviendront applicables aux nouvelles plateformes d'échange ainsi qu'aux nouveaux instruments financiers qui actuellement n'entrent pas dans son champ d'application. Dans ce cadre, seront également examinés les moyens de renforcer l'efficacité des mesures de contrôle de l'application et la coordination de la surveillance en accordant un rôle prééminent à l'Autorité européenne des marchés financiers (AEMF), et d'améliorer la transparence, la surveillance et l'intégrité des marchés dérivés, notamment les marchés de dérivés sur produits de base et les marchés au comptant associés. En ce qui concerne le réexamen de la directive MiF, la Commission cherche notamment à améliorer les mesures de surveillance et de transparence pour garantir le bon fonctionnement des marchés de dérivés sur produits de base à des fins de couverture et de détermination des prix. Des améliorations pourraient être également envisagées en ce qui concerne les informations et la protection fournies par les intermédiaires financiers aux investisseurs. Les mesures législatives que la Commission pourrait proposer dans ces domaines auront une incidence marquée sur le cadre de régulation du marché du carbone et la protection des investisseurs sur ce marché.

    Troisièmement, de nouvelles mesures relatives aux marchés financiers pourraient être appliquées à d'autres segments spécifiques du marché du carbone. Plus particulièrement, la Commission a adopté, le 15 septembre 2010, une proposition de règlement sur les dérivés de gré à gré, les contreparties centrales et les référentiels centraux[20]. Ce futur règlement devrait imposer notamment une obligation de déclaration relative aux contrats de dérivés de gré à gré, une obligation de compensation des contrats de ce type qui peuvent en faire l'objet (décidée par l'AEMF), et des mesures visant à réduire le risque de crédit de la contrepartie et le risque opérationnel pour les dérivés de gré à gré compensés sur une base bilatérale. Ces obligations spécifiques s'appliqueraient aux acteurs du marché du carbone qui négocient de gré à gré des dérivés sur quotas d'émission, à moins que ceux-ci ne bénéficient de l'une des exemptions prévues par la proposition de règlement pour les entreprises non financières.

    Règlement sur la mise aux enchères des quotas d'émission

    Le règlement sur la mise aux enchères[21] met en place le cadre régissant la mise aux enchères des quotas d'émission durant la troisième période d'échange. Il a en fait étendu au marché du carbone le champ d'application des règles de la directive sur les abus de marché et de la directive MiF, puisqu'il impose des exigences globalement identiques aux plateformes d'enchère et aux intermédiaires financiers, même si leur activité est menée hors du cadre habituel du marché secondaire et peut porter sur des quotas d'émission qui ne sont pas des instruments financiers (un contrat au comptant à deux jours pourrait, par exemple, être mis aux enchères). En vertu du règlement sur la mise aux enchères, l'application de plusieurs mesures découlant de la directive anti-blanchiment sera aussi étendue aux acteurs du processus d'enchère. Plus particulièrement, le règlement impose notamment aux plateformes d'enchère l'obligation d'avertir les autorités de surveillance si elles décèlent ou soupçonnent un abus de marché, un blanchiment de capitaux, un financement du terrorisme ou toute autre activité criminelle.

    La Commission réexaminera les différents éléments de ce régime dans le cadre de la poursuite de ses travaux sur la surveillance du marché du carbone.

    Législation relative aux marchés de l'énergie

    En décembre 2010, la Commission a adopté une proposition législative qui fait suite au troisième train de mesures sur la libéralisation des marchés de l'énergie et qui traite de la transparence et de l'intégrité des marchés de gros de l'énergie en Europe. La proposition de règlement sur l'intégrité et la transparence du marché de l'énergie (REMIT[22]) interdit les abus de marché (opérations d'initiés et manipulations de marché) sur les marchés de gros de l'électricité et du gaz et des produits associés. Les mesures prises conformément au REMIT sont compatibles avec les dispositions de la DAM et ne s'appliquent pas aux instruments financiers qu'elle couvre déjà. Bien que ce règlement ne soit pas directement applicable à toutes les parties du marché du carbone, il convient d'en tenir compte car il concerne un marché présentant de nombreux liens avec l'échange de quotas d'émission de carbone, et son introduction pourrait avoir comme effet de discipliner le comportement de certains acteurs présents à la fois sur le marché de l'énergie et sur le marché du carbone.

    CONCLUSIONS ET ÉTAPES SUIVANTES

    Conclusions:

    1) Le marché du carbone a progressé de manière satisfaisante en termes de liquidité, de participation des intermédiaires au niveau de l'UE et de transparence, ce qui – toutes choses égales par ailleurs – réduit le risque d'abus de marché comparativement à d'autres marchés (les marchés de produits de base, par exemple). L'apparition de bourses du carbone aux côtés du marché de gré à gré et la forte participation d'intermédiaires financiers parallèlement aux acheteurs assujettis sont les signes d'une grande maturité du marché européen du carbone.

    2) Une grande partie du marché du carbone est déjà régulée. Dans la mesure où le marché des dérivés sur quotas d'émission entre dans le champ de la législation applicable aux marchés financiers, il bénéficie des garanties et des mécanismes de surveillance qui s'appliquent généralement à tout marché de dérivés sur produits de base.

    3) Actuellement, la négociation au comptant des quotas d'émission n'est pas régulée au niveau de l'Union européenne. Quelques États membres ont décidé individuellement d'étendre les règles de la négociation d'instruments financiers aux quotas d'émission échangés sur des marchés au comptant relevant de leur juridiction[23].

    4) L'un des futurs segments clés du marché primaire (les enchères) sera intégralement couvert par le régime de surveillance instauré par le règlement sur la mise aux enchères , que les produits mis aux enchères soient des instruments financiers ou non. Le marché du carbone sera ainsi moins exposé aux pratiques abusives.

    Prochaines étapes:

    1) Pour poursuivre son expansion et être en mesure de faire émerger un signal de prix du carbone non faussé, le marché doit notamment être doté des moyens de limiter les risques d'abus et les autres formes de pratique abusive. La Commission lancera une étude approfondie et consultera les parties concernées afin d'examiner de façon plus détaillée la structure du marché du carbone et son niveau actuel de surveillance. L'étude en question portera non seulement sur les abus de marché au sens strict, mais aussi sur l'intégrité des enchères et des échanges sur le marché européen du carbone, notamment les aspects relatifs à la surveillance.

    2) La Commission examinera les implications, pour le marché du carbone, de la révision de la législation financière et de l'introduction de dispositions législatives relatives aux marchés de l'énergie. Certaines dispositions de ces deux cadres de régulation sont envisagées pour remédier aux insuffisances du marché européen du carbone. Il importe donc d'assurer la plus grande cohérence entre ces régimes et les mesures qu'il pourrait encore être nécessaire de prendre pour le marché du carbone. Dans ce contexte, la Commission examinera la possibilité d'incorporer le marché européen du carbone dans le champ de la législation applicable aux marchés financiers, par exemple en remplaçant la négociation au comptant actuelle par la négociation de « spot-futures» [24] admis à la négociation sur les marchés réglementés. La possibilité de requalifier en instruments financiers les unités utilisées à des fins de conformité dans le cadre du SEQE sera, elle aussi, examinée, en accordant une attention particulière au caractère adéquat et proportionné d'une telle approche. Il sera également envisagé d'inclure les transactions au comptant d'unités utilisées à des fins de conformité dans le cadre du SEQE – en tant qu'instruments financiers à part entière – dans le champ des dispositions de la directive sur les abus de marché et/ou de la directive concernant les marchés d'instruments financiers, ainsi que de toute autre législation relative aux marchés financiers nécessaire pour garantir l'efficience et l'intégrité du marché du carbone, telle que la directive anti-blanchiment[25], la directive sur le caractère définitif du règlement[26] ou la directive sur les contrats de garantie financière[27].

    3) Ainsi qu'elle l'a déjà fait, la Commission agira avec célérité si de nouveaux risques apparaissent, et examinera plus avant la nécessité de présenter une proposition législative d'ici à fin 2011. Toute proposition législative tendant à établir un régime de surveillance spécifique du marché du carbone devrait faire l'objet d'une analyse d'impact préalable. Les bienfaits de dispositions visant à protéger l'intégrité du marché seraient mis en balance avec tout effet négatif sur la liquidité et sur l'accès de différentes catégories de participants au marché du carbone (notamment les petits émetteurs et les PME).

    ANNEXE

    Tableau 1 – Produits négociés sur différentes bourses du carbone[28]

    Bourses | Pays | Type de produit |

    | |Spot |Futures |Forwards |Options |Swaps |Enchères |Compensation de gré à gré | | | |EUA |URCE |URE |EUA |URCE |URE |EUA |URCE |EUA |URCE |URE |URCE / EUA | | | | ECX/ICE |Royaume-Uni |( |( | |( |( |( | | |( |( |( | | |( | | Bluenext |France |( |( |( |( |( | | | | | | |( |( |( | | EEX |Allemagne |( | | |( |( | | | |( | | | |( |( | | NASDAQ OMX |Norvège |( |( | |( |( | |( |( |( |( | | | |( | | Green Exchange |États-Unis | | | |( |( | | | |( |( | | | |( | | Climex |Pays-Bas |( |( |( | | | | | | | | | |( | | |

    [1] Directive 2003/87/CE établissant un système d'échange de quotas d'émission de gaz à effet de serre dans la Communauté et modifiant la directive 96/61/CE du Conseil, JO L 275 du 25.10.2003.

    [2] Directive 2009/29/CE modifiant la directive 2003/87/CE afin d’améliorer et d’étendre le système communautaire d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre, JO L 140, p. 63.

    [3] Aux fins de la présente communication, le «marché européen du carbone» couvre les échanges de quotas d'émission de l'UE et d'autres unités utilisables à des fins de conformité dans le cadre du SEQE, entre les 30 pays qui participent actuellement au système d'échange de l'Union européenne (l'UE-27, l'Islande, le Liechtenstein et la Norvège).

    [4] A.D. Ellerman, F.J. Convery and Ch. de Perthuis. 2010. Pricing Carbon . Cambridge University Press, New York. Voir les pages 127 à 139 pour un aperçu de l'évolution du marché.

    [5] Voir la directive 2004/101/CE modifiant la directive 2003/87/CE établissant un système d'échange de quotas d'émission de gaz à effet de serre dans la Communauté, au titre des mécanismes de projet du protocole de Kyoto (directive dite «de liaison»), JO L 338 du 13.11.2004, p. 18.

    [6] Les transactions de gré à gré sont négociées à titre privé entre deux contreparties, en dehors de toute place d'échange.

    [7] Source: State and trends of the carbon market 2010, p. 9. http://siteresources.worldbank.org/INTCARBONFINANCE/Resources/State_and_Trends_of_the_Carbon_Market_2010_low_res.pdf

    [8] A.D. Ellerman, F.J. Convery and Ch. de Perthuis. 2010.

    [9] Dans la deuxième phase du système d'échange de quotas d'émission de l'Union européenne (2008-2012), environ 4 % des quotas sont délivrés dans le cadre d'enchères organisées en Autriche, en Allemagne, en Hongrie, en Irlande, aux Pays-Bas et au Royaume-Uni.

    [10] Le CITL est un système électronique qui consigne la délivrance, le transfert et l'annulation des quotas d'émission et procède à une vérification automatisée de chaque transaction pour garantir l'absence d'irrégularité.

    [11] Annexe XVI, point 4 a), du règlement (CE) nº 2216/2004 de la Commission du 21 décembre 2004 concernant un système de registres normalisé et sécurisé conformément à la directive 2003/87/CE du Parlement européen et du Conseil et à la décision nº 280/2004/CE du Parlement européen et du Conseil, JO L 386 du 29.12.2004, p. 1, modifié en dernier lieu par le règlement (UE) nº 920/2010 de la Commission du 7 octobre 2010 concernant un système de registres normalisé et sécurisé conformément à la directive 2003/87/CE, JO L 270 du 14.10.2010, p. 1.

    [12] http://ec.europa.eu/environment/climat/emission/2nd_phase_ep.htm

    [13] Directive 2003/6/CE sur les opérations d'initiés et les manipulations de marché (abus de marché), JO L 96 du 12.4.2003, p. 16.

    [14] http://europa.eu/rapid/pressReleasesAction.do?reference=IP/09/1376.

    [15] http://europa.eu/rapid/pressReleasesAction.do?reference=IP/10/125.

    [16] Article 53 du règlement (CE) nº 2216/2004 de la Commission modifié en dernier lieu par le règlement (UE) nº 920/2010 de la Commission.

    [17] Cette question est liée à celle du traitement comptable national des quotas et crédits.

    [18] Http://www.ifrs.org/Current+Projects/IASB+Projects/Emission+Trading+Schemes/Emissions+Trading+Schemes.htm

    [19] Directive 2004/39/CE du Parlement européen et du Conseil concernant les marchés d'instruments financiers, modifiant les directives 85/611/CEE et 93/6/CEE du Conseil et la directive 2000/12/CE du Parlement européen et du Conseil et abrogeant la directive 93/22/CEE du Conseil, JO L 145 du 30.4.2004, p. 1.

    [20] COM (2010) 484 final.

    [21] Règlement (UE) nº 1031/2010 de la Commission du 12 novembre 2010 relatif au calendrier, à la gestion et aux autres aspects de la mise aux enchères des quotas d’émission de gaz à effet de serre conformément à la directive 2003/87/CE du Parlement européen et du Conseil établissant un système d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre dans la Communauté, JO L 302 du 18.11.2010, p. 1.

    [22] COM(2010) xxx.

    [23] Par exemple, l'Allemagne applique déjà les règles des marchés réglementés aux échanges de produits de base et de droits d'émission qui ont lieu sur une place boursière. La France, quant à elle, a adopté à l'automne 2010 une législation envisageant de soumettre le marché au comptant du carbone aux règles actuelles relatives aux marchés réglementés. Les modifications de la législation française s'inspirent d'un rapport de mission générale de M. Michel Prada, intitulé La régulation des marchés du CO 2 , qui peut être consulté à l'adresse suivante: http://www.economie.gouv.fr/services/rap10/100419rap-prada.pdf

    [24] C'est-à-dire un instrument financier avec livraison dans des délais relativement courts.

    [25] Directive 2005/60/CE relative à la prévention de l'utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme, JO L 309 du 25.11.2005, p.15.

    [26] Directive 98/26/CE concernant le caractère définitif du règlement dans les systèmes de paiement et de règlement des opérations sur titres, JO L 166 du 11.6.1998, p. 45.

    [27] Directive 2002/47/CE concernant les contrats de garantie financière, JO L 168 du 27.6.2002, p. 43.

    [28] Sur la base du tableau figurant dans The Post-Trade Infrastructure for Carbon Emissions Trading. Rapport préparé par Bourse Consult pour la City of London Corporation, publié en juillet 2010. http://217.154.230.218/NR/rdonlyres/EA473E51-37BD-49CA-8729-3CD87BF4A2A0/0/BC_RS_CarbonEmissionsTrading.pdf

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