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Document 52009PC0328

    Proposition de recommandation du Conseil relative aux environnements sans tabac {SEC(2009)894} {SEC(2009)895} {SEC(2009)896)

    /* COM/2009/0328 final - CNS 2009/0088 */

    52009PC0328

    Proposition de recommandation du Conseil relative aux environnements sans tabac {SEC(2009)894} {SEC(2009)895} {SEC(2009)896) /* COM/2009/0328 final - CNS 2009/0088 */


    [pic] | COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES |

    Bruxelles, le 30.6.2009

    COM(2009) 328 final

    2009/0088 (CNS)

    Proposition de

    RECOMMANDATION DU CONSEIL

    relative aux environnements sans tabac

    {SEC(2009)894} {SEC(2009)895} {SEC(2009)896)

    EXPOSÉ DES MOTIFS

    Le tabac est la première cause de décès, de maladies et d'incapacités évitables dans l'Union européenne, où il fait environ 650 000 morts chaque année [1]. L'exposition à la fumée de tabac ambiante (FTA) – que l'on appelle également «fumée de tabac secondaire» – est une importante source supplémentaire de mortalité, de morbidité et d'incapacité dans l'UE. La FTA contient plus de 4 000 composés gazeux et particulaires, dont 69 substances cancérogènes connues et de nombreux agents toxiques. Il n'existe pas de seuil au-dessous duquel l'exposition à la fumée de tabac secondaire serait sans danger[2]. Il a été démontré que la FTA a des effets néfastes immédiats sur le système cardiovasculaire et peut provoquer une cardiopathie coronarienne ou un cancer du poumon chez l'adulte. Les données disponibles indiquent également qu'elle peut être à l'origine d'un accident vasculaire cérébral, d'un asthme ou d'une bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO) chez l'adulte[3], et aggraver des maladies préexistantes comme l'asthme et la BPCO[4]. La FTA est particulièrement dangereuse pour les enfants: elle est associée à l'asthme, à la pneumonie et à la bronchite, aux symptômes respiratoires, à la maladie de l'oreille moyenne et à la mort subite du nourrisson[5]. Outre le risque qu'elle présente pour la santé, l'exposition à la fumée de tabac dans les foyers et les lieux publics pourrait amener les enfants à penser que fumer est un comportement ordinaire pour un adulte et, partant, augmenter les risques qu'ils deviennent fumeurs eux aussi.

    Selon des estimations prudentes, 7 300 adultes, dont 2 800 non-fumeurs, sont décédés en 2002 dans l'UE-25 parce qu'ils avaient été exposés à la FTA sur leur lieu de travail, et 72 000 personnes supplémentaires, dont 16 400 non-fumeurs, ont perdu la vie à la suite d'une telle exposition dans leur foyer[6]. D'après les estimations réalisées dans le contexte de l'analyse d'impact accompagnant cette proposition, l'exposition à la FTA dans les lieux de travail a fait 6 000 morts, dont 2 500 non-fumeurs, dans l'Union en 2008. Elle pèse aussi lourdement sur l'économie, avec plus de 1,3 milliard d'euros de coûts directs liés aux soins médicaux et plus de 1,1 milliard d'euros de coûts indirects résultant des pertes de productivité. Par ailleurs, l'exposition à la fumée de tabac des personnes extérieures au personnel telles que les clients des bars et des restaurants est également à l'origine d'une importante charge sanitaire et financière.

    Des progrès notables dans le développement des environnements sans tabac ont été réalisés ces dernières années dans certains États membres. À ce jour, plus d'un tiers des États membres de l'Union ont adopté des lois prévoyant l'interdiction générale de fumer dans les lieux de travail et les lieux publics intérieurs. Toutefois, le niveau de protection contre l'exposition à la fumée de tabac varie encore considérablement d'un État membre à un autre et au sein même des États. Les travailleurs du secteur Horeca constituent le groupe professionnel le plus vulnérable en raison du caractère incomplet de la protection assurée dans la majorité des États membres et des concentrations extrêmement élevées de fumée de tabac dans les bars et les restaurants.

    Les politiques d'interdiction générale de fumer déjà en place dans plusieurs États membres et pays tiers se sont avérées efficaces pour réduire la charge liée au tabac sans nuire à l'économie. Les effets sanitaires immédiats des lois interdisant de fumer sont notamment l'amélioration de la santé respiratoire des travailleurs du secteur Horeca et la réduction de l'incidence des attaques cardiaques dans la population en général. Il a été démontré que les politiques d'interdiction réduisent la consommation de tabac, encouragent les fumeurs à arrêter de fumer et dissuadent les jeunes de commencer. De plus, les lois de ce type ont tendance à sensibiliser la population aux dangers de la fumée de tabac et peuvent donc contribuer à réduire le tabagisme dans les foyers, en particulier en présence d'enfants. Neuf citoyens de l'UE sur dix sont en faveur de l'interdiction de fumer dans les lieux de travail et les lieux publics. Des études ont montré que l'adhésion aux politiques d'interdiction tend à croître après leur introduction.

    Au niveau de l'Union européenne, la question des environnements sans tabac a jusqu'ici fait l'objet de résolutions et de recommandations non contraignantes, mais celles-ci ne contiennent pas d'orientations détaillées concernant la manière de parvenir à éliminer totalement la fumée de ces environnements. Ce thème est également abordé dans plusieurs directives relatives à la santé et la sécurité au travail, mais certaines y touchent indirectement seulement, tandis que d'autres prévoient une protection incomplète.

    Au niveau international, l'article 8 de la Convention-cadre de l'OMS pour la lutte antitabac – ratifiée à ce jour par vingt-six États membres et la Communauté – oblige l'ensemble des Parties à assurer une protection efficace contre l'exposition à la fumée du tabac dans les lieux de travail intérieurs, les lieux publics intérieurs et les transports publics. Selon les directives adoptées par la Conférence des Parties lors de sa deuxième session en juillet 2007, chaque Partie doit s'efforcer d'assurer une protection universelle dans les cinq ans suivant l'entrée en vigueur de la Convention à son égard (c'est-à-dire pour 2010 en ce qui concerne la Communauté européenne et la majorité de ses États membres).

    La consultation lancée par la Commission au moyen de son Livre vert «Vers une Europe sans fumée de tabac: les options stratégiques au niveau de l'Union européenne»[7] a fait apparaître que nombreux étaient les partisans de politiques d'interdiction générale de fumer dans tous les lieux de travail et lieux publics fermés et de nouvelles mesures à l'échelon communautaire en faveur du développement des espaces non-fumeurs dans l'ensemble des États membres.

    Sur la base des résultats de cette consultation, cinq grandes options stratégiques ont été envisagées dans le contexte de l'analyse d'impact accompagnant cette proposition: le maintien du statu quo, l'application de la méthode ouverte de coordination, l'adoption d'une recommandation de la Commission, l'adoption d'une recommandation du Conseil et l'adoption d'un acte législatif communautaire contraignant. C'est l'adoption d'une recommandation du Conseil qui a été considérée comme la meilleure solution à court terme, car elle semble être le moyen le plus rapide et le plus complet d'aider les États membres à appliquer une législation contraignante sur les environnements sans tabac au niveau national conformément à leurs engagements internationaux au titre de la Convention-cadre de l'OMS tout en apportant une réponse proportionnée au problème.

    La recommandation proposée est principalement axée sur la mise en œuvre effective, dans l'Union européenne, de l'article 8 de la Convention-cadre de l'OMS pour la lutte antitabac, conformément aux directives sur la protection contre l'exposition à la fumée du tabac adoptées par la Conférence des Parties à la Convention lors de sa deuxième session. Ces directives fournissent des orientations stratégiques très complètes, scientifiquement fondées et équilibrées qui cadrent avec les politiques de l'Union en ce qui concerne les environnements sans tabac. Elles indiquent clairement qu'il n'existe pas de seuil au-dessous duquel l'exposition à la fumée secondaire serait sans danger et demandent l'élimination de la fumée de tabac de tous les lieux de travail intérieurs, les lieux publics intérieurs et les transports publics et, éventuellement, d'autres lieux publics (extérieurs ou semi-ouverts). L'adoption d'une législation contraignante et l'application, la surveillance et l'évaluation rigoureuses de celle-ci sont recommandées comme étant le seul moyen approprié de résoudre le problème de la fumée secondaire.

    La recommandation proposée fixe un délai de mise en œuvre identique pour l'ensemble de l'Union et prévoit des mécanismes de communication d'informations et de suivi à la fois au niveau des États membres et au niveau communautaire, le but étant d'accélérer et de faciliter l'application de l'article 8 de la Convention-cadre de l'OMS conformément aux directives adoptées par la Conférence des Parties lors de sa deuxième session.

    La recommandation proposée préconise: 1) des mesures visant à lutter contre l'exposition des enfants et des adolescents à la FTA; 2) des mesures d'accompagnement telles que des politiques efficaces en matière de sevrage tabagique et des avertissements sous la forme d'images sur les conditionnements des produits du tabac; 3) l'élaboration de stratégies plurisectorielles globales et d'instruments adéquats pour les appliquer; 4) des échanges réguliers d'informations et de bonnes pratiques ainsi qu'une coordination stratégique entre les États membres par l'intermédiaire d'un réseau de points de contact nationaux. Compte tenu du caractère relativement inédit de certaines de ces dispositions, il est attendu des États membres qu'ils coopèrent étroitement entre eux et avec la Commission afin d'élaborer des définitions, des critères et des indicateurs communs aux fins de leur application.

    Cette proposition est conforme aux principes de proportionnalité et de subsidiarité. Elle vise à aider les États membres à assurer une protection efficace contre la fumée de tabac et, partant, à remplir les obligations qui leur incombent en vertu de l'article 8 de la Convention-cadre de l'OMS, conformément au résultat des discussions du Conseil des 30 et 31 mai 2007 selon lequel il est nécessaire de disposer «d'orientations communautaires pour promouvoir davantage les espaces sans fumée de tabac au niveau de l'Union européenne, ainsi que, pour les mesures nationales, d'un soutien communautaire et d'une coordination» pour donner suite au livre vert de la Commission.

    Compte tenu des différences dans le niveau de protection contre le risque d'exposition à la FTA entre et dans les États membres, il est nécessaire d'agir à l'échelon communautaire pour aider ces derniers à résoudre le problème. L'Union européenne peut encourager la coopération entre les États membres et appuyer leur action, comme prévu à l'article 152 du traité CE, afin d'améliorer la santé publique et de prévenir les maladies et affections humaines.

    La recommandation proposée soutiendrait les États membres dans leurs efforts en donnant une impulsion politique et en créant un engagement de la part des États membres, en mettant en place un mécanisme de suivi clair au niveau communautaire et en facilitant l'échange de bonnes pratiques et la coordination stratégique entre les États membres.

    La Commission facilitera la bonne application de cette recommandation en aidant les États membres qui ne l'ont pas encore fait à élaborer, adopter et mettre en œuvre des politiques d'interdiction générale de fumer, en soutenant l'élaboration des politiques et en fournissant un ensemble de données au moyen des programmes communautaires pertinents, et en coordonnant les travaux du réseau de points de contact nationaux pour la lutte antitabac. La Commission évaluera l'efficacité de la recommandation et des mesures prises dans les États membres pour y donner suite.

    2009/0088 (CNS)

    Proposition de

    RECOMMANDATION DU CONSEIL

    relative aux environnements sans tabac

    LE CONSEIL DE L'UNION EUROPÉENNE,

    vu le traité instituant la Communauté européenne, et notamment son article 152, paragraphe 4, deuxième alinéa,

    vu la proposition de la Commission[8],

    vu l'avis du Parlement européen[9],

    vu l'avis du Comité économique et social européen[10],

    vu l'avis du Comité des régions[11],

    considérant ce qui suit:

    (1) L'article 152 du traité dispose que l'action de la Communauté, qui complète les politiques nationales, porte sur l'amélioration de la santé publique et la prévention des maladies et des affections humaines et des causes de danger pour la santé humaine.

    (2) En vertu de l'article 137 du traité, la Communauté soutient et complète l'action des États membres dans l'amélioration, en particulier, du milieu de travail pour protéger la santé et la sécurité des travailleurs.

    (3) L'exposition à la fumée de tabac ambiante (FTA) – que l'on appelle également «fumée de tabac secondaire» – est une source considérable de mortalité, de morbidité et d'incapacité dans l'Union européenne.

    (4) Selon des estimations prudentes, 7 300 adultes, dont 2 800 non-fumeurs, sont décédés en 2002 dans l'Union européenne parce qu'ils avaient été exposés à la FTA sur leur lieu de travail, et 72 000 adultes supplémentaires, dont 16 400 non-fumeurs, ont perdu la vie à la suite d'une telle exposition dans leur foyer[12].

    (5) L'exposition à la fumée de tabac secondaire est particulièrement dangereuse pour les enfants et pourrait accroître les risques qu'ils commencent à fumer.

    (6) Chaque citoyen a droit à un niveau élevé de protection de sa santé et doit être protégé contre l'exposition à la fumée de tabac.

    (7) Les politiques nationales reposant sur le volontariat se sont avérées inefficaces pour réduire l'exposition à la fumée de tabac. L'adoption d'une législation contraignante par les États membres et l'application et la surveillance adéquates de celle-ci sont le seul moyen de protéger les citoyens de manière appropriée contre les risques de la fumée secondaire pour la santé.

    (8) Pour une efficacité optimale de la législation sur les environnements sans tabac, celle-ci doit être assortie de mesures telles que des campagnes de sensibilisation, des programmes d'aide aux personnes souhaitant arrêter de fumer et des avertissements marquants relatifs à la santé sur les conditionnements des produits du tabac.

    (9) La société civile a un rôle important à jouer en soutenant la législation sur les environnements sans tabac et en contribuant à la faire respecter.

    (10) Les politiques d'interdiction de fumer doivent être assorties d'instruments adéquats permettant de mener la lutte antitabac selon une approche plurisectorielle.

    (11) Il est nécessaire de renforcer la coopération entre les États membres pour faciliter l'échange d'informations et de bonnes pratiques et mettre au point un système de suivi normalisé à l'échelle européenne.

    (12) La résolution du Conseil et des ministres de la santé des États membres réunis au sein du Conseil du 18 juillet 1989 concernant l'interdiction de fumer dans les lieux accueillant du public[13] a invité les États membres à prendre des mesures pour interdire de fumer dans certains lieux fermés accueillant du public et étendre l'interdiction de fumer à tous les moyens collectifs de transport.

    (13) Dans sa recommandation 2003/54/CE du 2 décembre 2002 relative à la prévention du tabagisme et à des initiatives visant à renforcer la lutte antitabac[14], le Conseil a invité les États membres à appliquer des dispositions législatives et/ou d'autres mesures efficaces de manière à assurer une protection contre l'exposition à la fumée de tabac ambiante dans les locaux de travail, les lieux publics fermés et les transports en commun.

    (14) La directive 89/391/CEE du Conseil du 12 juin 1989 concernant la mise en œuvre de mesures visant à promouvoir l'amélioration de la sécurité et de la santé des travailleurs au travail[15] ne fait pas explicitement référence à la fumée de tabac, mais elle s'applique à l'ensemble des risques pour la santé et la sécurité des travailleurs[16].

    (15) Dans son plan d'action 2004-2010 en faveur de l'environnement et de la santé[17], la Commission a assuré qu'elle «[engagerait] des travaux sur l'amélioration de la qualité de l'air à l'intérieur des bâtiments», en particulier en «[encourageant] les mesures visant à restreindre le tabagisme au travail en recourant aux instruments juridiques en vigueur et aux initiatives en faveur de la santé existant au niveau de l'UE et des États membres».

    (16) La consultation lancée par la Commission au moyen de son Livre vert «Vers une Europe sans fumée de tabac: les options stratégiques au niveau de l'Union européenne»[18] a fait apparaître que nombreux étaient les partisans de politiques d'interdiction générale de fumer dans tous les lieux de travail et lieux publics fermés et de nouvelles mesures à l'échelon communautaire en faveur du développement des espaces non-fumeurs dans l'ensemble des États membres.

    (17) Un échange de vues sur les options stratégiques au niveau de l'Union européenne concernant les environnements sans tabac a eu lieu au Conseil «Emploi, politique sociale, santé et consommateurs» des 30 et 31 mai 2007. Le Conseil a accueilli avec satisfaction le livre vert de la Commission et souligné la nécessité de disposer d'orientations communautaires pour promouvoir davantage les espaces sans fumée de tabac au niveau de l'Union européenne, ainsi que, pour les mesures nationales, d'un soutien communautaire et d'une coordination.

    (18) Dans sa résolution du 24 octobre 2007 sur le livre vert, le Parlement européen a invité les États membres à introduire des interdictions totales de fumer dans un délai de deux ans et demandé à la Commission de présenter une proposition législative appropriée pour 2011 en cas de progrès insuffisants. Il a également invité la Commission à proposer une modification du cadre législatif actuel afin de classer la fumée de tabac dans l'environnement comme agent cancérigène et de faire obligation aux employeurs de garantir que le lieu de travail est exempt de fumée.

    (19) L'article 8 de la Convention-cadre de l'OMS pour la lutte antitabac, signée en juin 2003 par tous les membres de l'OMS et ratifiée à ce jour par 161 Parties – dont la Communauté et vingt-six de ses États membres –, crée une obligation juridique pour ses Parties d'adopter et appliquer, dans le domaine relevant de la compétence de l'État en vertu de la législation nationale, et d'encourager activement, dans les domaines où une autre compétence s'exerce, l'adoption et l'application de mesures efficaces pour protéger les citoyens contre l'exposition à la fumée de tabac secondaire dans l'ensemble des lieux de travail intérieurs, des transports publics et des lieux publics intérieurs et, le cas échéant, d'autres lieux publics.

    (20) Lors de sa deuxième session qui s'est tenue en juillet 2007, la Conférence des Parties à la Convention-cadre de l'OMS a adopté des directives sur la protection contre l'exposition à la fumée du tabac[19] afin d'aider les Parties à remplir leurs obligations au titre de l'article 8 de la Convention. Chaque Partie doit s'efforcer d'appliquer les directives dans les cinq ans suivant l'entrée en vigueur de la Convention à son égard.

    (21) L'article 14 de la Convention-cadre de l'OMS crée une obligation juridique pour ses Parties d'élaborer et de diffuser des directives appropriées, globales et intégrées fondées sur des données scientifiques et sur les meilleures pratiques, et de prendre des mesures efficaces pour promouvoir le sevrage tabagique et le traitement adéquat de la dépendance à l'égard du tabac. Lors de sa troisième session, la Conférence des Parties à la Convention-cadre de l'OMS a décidé d'établir un groupe de travail chargé d'élaborer des directives pour l'application de cet article.

    (22) Dans la stratégie européenne pour la lutte antitabac qu'il a adoptée en septembre 2002, le Comité régional de l'OMS pour l'Europe a recommandé aux États membres de faire en sorte que les citoyens jouissent effectivement de leur droit à un environnement sans fumée, notamment en interdisant de fumer dans les lieux publics, les lieux de travail et les transports en commun, en interdisant le tabagisme à l'extérieur de tous les établissements d'enseignement pour mineurs, de tous les lieux de prestation de soins de santé et lors des manifestations publiques, et en classant la fumée de tabac ambiante en tant que cancérigène.

    (23) La fumée de tabac ambiante a été classée dans la catégorie des substances connues pour être cancérogènes chez l'homme par le Centre international de recherche sur le cancer de l'OMS et dans celle des agents cancérogènes professionnels par la Finlande et l'Allemagne.

    (24) La présente recommandation ne porte atteinte ni à la législation communautaire établissant des prescriptions minimales aux fins de la protection de la sécurité et de la santé des travailleurs adoptée en application de l'article 137 du traité, ni à la directive 2001/37/CE du Parlement européen et du Conseil du 5 juin 2001 relative au rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres en matière de fabrication, de présentation et de vente des produits du tabac[20], ni à la décision 2003/641/CE de la Commission du 5 septembre 2003 sur l'utilisation de photographies en couleurs ou d'autres illustrations comme avertissements relatifs à la santé à faire figurer sur les conditionnements des produits du tabac[21],

    RECOMMANDE AUX ÉTATS MEMBRES:

    1. d'assurer une protection efficace contre l'exposition à la fumée du tabac dans les lieux de travail intérieurs, les lieux publics intérieurs, les transports publics et, le cas échéant, d'autres lieux publics, comme le prévoit l'article 8 de la Convention-cadre de l'OMS pour la lutte antitabac, en se fondant sur les directives sur la protection contre l'exposition à la fumée du tabac adoptées par la Conférence des Parties à la Convention lors de sa deuxième session, qui figurent en annexe, dans un délai de cinq ans à compter de l'entrée en vigueur de la Convention à l'égard de l'État membre concerné ou, au plus tard, dans un délai de trois ans à compter de l'adoption de la présente recommandation;

    2. d'élaborer et/ou de renforcer des stratégies et des mesures visant à réduire l'exposition des enfants et des adolescents à la fumée de tabac secondaire;

    3. d'assortir les politiques d'interdiction de fumer de mesures d'appui telles que:

    a) l'adoption de mesures efficaces pour promouvoir le sevrage tabagique et le traitement adéquat de la dépendance à l'égard du tabac, comme indiqué à l'article 14 de la Convention-cadre de l'OMS,

    b) l'introduction d'avertissements combinés (au sens de l'article 2, paragraphe 4, de la décision 2003/641/CE de la Commission du 5 septembre 2003 sur l'utilisation de photographies en couleurs ou d'autres illustrations comme avertissements relatifs à la santé à faire figurer sur les conditionnements des produits du tabac[22]) et d'informations relatives aux services d'aide aux personnes souhaitant arrêter de fumer sur les conditionnements des produits du tabac à fumer, afin de mieux informer les consommateurs des risques du tabagisme et de l'exposition à la fumée de tabac pour la santé, d'encourager les personnes qui fument à arrêter et de dissuader celles qui ne fument pas de commencer;

    4. d'élaborer, d'appliquer, de mettre à jour régulièrement et de réexaminer des stratégies, des plans et des programmes nationaux plurisectoriels globaux de lutte antitabac, portant entre autres sur la protection contre la fumée de tabac dans les environnements tant publics que privés;

    5. de mettre en place des instruments adéquats pour appliquer les stratégies, les politiques de lutte antitabac et les programmes nationaux, de manière à assurer une protection efficace contre l'exposition à la fumée de tabac;

    6. d'établir et de communiquer à la Commission, si possible dans un délai de six mois à compter de l'adoption de la présente recommandation, des points de contact nationaux pour la lutte antitabac, aux fins de l'échange d'informations et de bonnes pratiques et de la coordination stratégique avec les autres États membres;

    7. de coopérer étroitement entre eux et avec la Commission dans le but d'établir un cadre cohérent de définitions, de critères et d'indicateurs pour l'application de la présente recommandation;

    8. de procéder au suivi et à l'évaluation de l'efficacité des mesures stratégiques à l'aide des indicateurs susmentionnés;

    9. d'informer la Commission des mesures législatives et autres adoptées pour donner suite à la présente recommandation et des résultats du suivi et de l'évaluation;

    INVITE LA COMMISSION:

    1. à faire rapport sur l'application, le fonctionnement et les effets des mesures proposées, sur la base des informations fournies par les États membres.

    Fait à Bruxelles, le

    Par le Conseil

    Le Président

    ANNEXE

    Directives sur la protection contre l'exposition à la fumée du tabac adoptées par la Conférence des Parties à la Convention-cadre de l'OMS pour la lutte antitabac lors de sa deuxième session

    BUT, OBJECTIFS ET CONSIDÉRATIONS ESSENTIELLES

    But des directives

    1. En conformité avec les autres dispositions de la Convention-cadre de l’OMS pour la lutte antitabac et avec les intentions de la Conférence des Parties, les présentes directives visent à aider les Parties à satisfaire à leurs obligations au titre de l’article 8 de la Convention. Elles s’appuient sur les meilleures données factuelles disponibles et sur l’expérience des Parties qui ont réussi à mettre en œuvre des mesures efficaces pour réduire l’exposition à la fumée du tabac.

    2. Les directives contiennent des déclarations de principe et des définitions convenues des termes employés, ainsi que des recommandations sur les mesures à prendre pour satisfaire aux obligations découlant de la Convention. Elles recensent en outre les mesures nécessaires pour mettre en place une protection efficace contre les dangers de la fumée secondaire. Les Parties sont encouragées à les utiliser non seulement pour satisfaire à leurs obligations juridiques au titre de la Convention, mais aussi pour adopter les meilleures pratiques en matière de protection de la santé publique.

    Objectifs des directives

    3. Ces directives ont deux objectifs concomitants. Le premier est d’aider les Parties à répondre à leurs obligations au titre de l’article 8 de la Convention-cadre, en tenant compte des données scientifiques relatives à l’exposition à la fumée de tabac secondaire et des meilleures pratiques mondiales concernant l’application de mesures destinées à promouvoir les environnements sans tabac, de manière à garantir un haut niveau d’observation des dispositions conventionnelles et aider les Parties à atteindre le meilleur état de santé possible. Le second est de recenser les éléments clés d’une législation visant à protéger efficacement la population contre l’exposition à la fumée du tabac conformément à l’article 8.

    Considérations sous-jacentes

    4. L’élaboration de ces directives a été influencée par les considérations fondamentales suivantes:

    a) Le devoir de protéger la population contre la fumée du tabac, consacré par l’article 8 de la Convention, trouve son origine dans les droits et libertés fondamentaux de la personne humaine. Compte tenu des dangers présentés par la fumée de tabac secondaire, le devoir de protéger la population contre l’exposition à la fumée du tabac fait implicitement partie, notamment, du droit à la vie et du droit au meilleur état de santé qu’il est possible d’atteindre reconnus dans de nombreux instruments juridiques internationaux (y compris la Constitution de l’Organisation mondiale de la Santé, la Convention relative aux droits de l’enfant, la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes et le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels), et il est expressément proclamé dans le préambule de la Convention-cadre de l’OMS et reconnu dans les constitutions de nombreuses nations.

    b) Le devoir de protéger les individus contre la fumée du tabac correspond à une obligation, pour les gouvernements, de promulguer des lois protégeant les personnes contre tout ce qui menace leurs droits et libertés fondamentaux. Cette obligation vaut pour l’ensemble de la population et non pas seulement pour certains groupes.

    c) Plusieurs organismes scientifiques faisant autorité ont déterminé que la fumée de tabac secondaire est cancérogène. Certaines Parties à la Convention-cadre de l’OMS (par exemple la Finlande et l’Allemagne) ont classé la fumée de tabac secondaire parmi les substances cancérogènes et ont inclus la prévention contre l’exposition à cette fumée sur les lieux de travail dans leur législation en matière de santé et de sécurité. En dehors des prescriptions de l’article 8, les Parties pourraient donc être amenées à régler le problème de l’exposition à la fumée du tabac conformément à leurs lois existantes sur l’environnement professionnel et à d’autres lois régissant l’exposition à des substances dangereuses, y compris les produits cancérogènes.

    DÉCLARATION DE PRINCIPES ET DÉFINITIONS RELATIVES À LA PROTECTION CONTRE L’EXPOSITION À LA FUMÉE DU TABAC

    Principes

    5. Ainsi que le souligne l’article 4 de la Convention-cadre de l’OMS, un engagement politique fort est nécessaire pour prendre des mesures visant à protéger tous les individus contre l’exposition à la fumée du tabac. L’application de l’article 8 de la Convention devrait être guidée par les principes convenus suivants.

    Principe 1

    6. Des mesures efficaces de protection contre l’exposition à la fumée du tabac comme celles qui sont envisagées à l’article 8 de la Convention-cadre de l’OMS passent par une interdiction totale de fumer et par une élimination totale de la fumée du tabac dans un espace ou un environnement donnés afin de créer un environnement à 100 % sans tabac. Il n’existe pas de seuil au-dessous duquel l’exposition à la fumée du tabac serait sans danger, et des notions comme celles de seuil de toxicité pour la fumée secondaire devraient être rejetées, car elles sont démenties par les données scientifiques. Toutes les solutions autres qu’un environnement à 100 % sans tabac, y compris la ventilation, la filtration de l’air et la création de zones fumeurs désignées (qu’elles soient ou non équipées de systèmes de ventilation séparés) ont fait à maintes reprises la preuve de leur inefficacité et il existe quantité de données probantes, scientifiques ou autres, qui montrent que les solutions techniques ne protègent pas contre l’exposition à la fumée du tabac.

    Principe 2

    7. Tout le monde devrait être protégé contre l’exposition à la fumée du tabac. Tous les lieux de travail intérieurs et tous les lieux publics intérieurs devraient être sans tabac.

    Principe 3

    8. Il est nécessaire de légiférer pour protéger les gens contre l’exposition à la fumée du tabac. En la matière, les politiques reposant sur le volontariat ont montré à maintes reprises leur inefficacité et n’offrent pas une protection adéquate. Pour être efficace, la législation doit être simple et claire et doit pouvoir être appliquée dans la pratique.

    Principe 4

    9. Une bonne planification et des ressources adéquates sont indispensables pour réussir à mettre en œuvre et à faire appliquer la législation sur les environnements sans tabac.

    Principe 5

    10. La société civile a un rôle central à jouer en soutenant les mesures de protection contre la fumée du tabac et en contribuant à les faire respecter, et elle devrait être activement associée au processus d’élaboration, de mise en œuvre et d’application de la loi.

    Principe 6

    11. La mise en œuvre de la législation sur les environnements sans tabac ainsi que son application pratique et son impact devraient faire l’objet d’une surveillance et d’une évaluation. Il faudrait en particulier surveiller – et lutter contre – les activités de l’industrie du tabac qui font obstacle à la mise en œuvre et à l’application de la législation, comme le prévoit l’article 20.4 de la Convention-cadre de l’OMS.

    Principe 7

    12. La protection de la population contre l’exposition à la fumée du tabac devrait être renforcée et étendue si nécessaire, notamment par une modification de la législation ou l’adoption de nouvelles lois et leur application plus stricte et par d’autres mesures tenant compte des nouvelles données scientifiques et des enseignements tirés des études de cas.

    Définitions

    13. Lorsqu’on élabore une législation, il est important de définir avec soin les principaux termes employés. Plusieurs recommandations concernant les définitions qui paraissent appropriées à la lumière de l’expérience de nombreux pays sont formulées ci-après. Les définitions proposées dans cette section complètent celles qui figurent déjà dans la Convention-cadre de l’OMS.

    «Fumée secondaire» ou «fumée environnementale»

    14. Plusieurs termes différents sont communément employés pour décrire le type de fumée visé à l’article 8 de la Convention-cadre de l’OMS, par exemple «fumée secondaire», «fumée environnementale» et «fumée des autres». Il faut éviter d’utiliser des expressions telles que «tabagisme passif» et «exposition involontaire à la fumée du tabac», car l’expérience en France et dans d’autres pays a montré que l’industrie du tabac pouvait utiliser ces termes pour étayer l’idée que l’exposition «volontaire» serait acceptable. Les expressions «fumée secondaire» et «fumée environnementale», pour lesquelles les abréviations anglaises «SHS» et «ETS» sont parfois employées, sont préférables; dans les directives, on a choisi d’utiliser l’expression «fumée secondaire».

    15. La fumée secondaire peut être définie comme étant «la fumée produite par la combustion d’une cigarette ou d’un autre produit du tabac à laquelle s’ajoute généralement la fumée exhalée par le fumeur».

    16. «Une atmosphère sans fumée» est une atmosphère qui est à 100 % sans fumée. Cette définition s’applique, mais pas limitativement, aux atmosphères dans lesquelles on ne peut ni voir, ni sentir, ni déceler, ni mesurer de la fumée de tabac[23].

    «Fumer»

    17. Ce terme doit être défini comme incluant le seul fait de détenir ou d’utiliser un produit du tabac allumé, que la fumée soit ou non activement inhalée ou exhalée.

    «Lieux publics»

    18. La définition précise des «lieux publics» peut varier d’un pays ou territoire à l’autre, mais il est important que la législation définisse ce terme de manière aussi large que possible. La définition utilisée doit s’appliquer à tous les lieux accessibles au grand public et à tous les lieux à usage collectif, indépendamment de leur régime de propriété ou des conditions d’accès.

    Lieux «intérieurs» ou «clos»

    19. Aux termes de l’article 8, les lieux de travail et les lieux publics «intérieurs» doivent être protégés contre l’exposition à la fumée du tabac. Étant donné que la définition des lieux «intérieurs» peut présenter certains pièges, il y a lieu d’examiner attentivement l’expérience des différents pays en la matière. Cette définition doit être aussi large et aussi claire que possible, et il faut prendre soin de ne pas établir de listes qui pourraient être interprétées comme excluant potentiellement certains lieux «intérieurs» pertinents. Il est souhaitable que la définition des lieux «intérieurs» (ou «clos») inclue tout espace couvert par un toit ou entouré par un ou plusieurs murs ou côtés, quels que soient les types de matériaux utilisés pour le toit, le mur ou les côtés, et qu’il s’agisse d’une structure permanente ou temporaire.

    «Lieux de travail»

    20. Un «lieu de travail» devrait être défini en gros comme étant «tout lieu utilisé par des personnes au cours de leur travail ou dans le cadre de leur emploi». Par travail, on n’entend pas seulement les tâches rétribuées, mais aussi le travail volontaire s’il s’agit d’un type de travail pour lequel un salaire est normalement versé. En outre, les «lieux de travail» ne comprennent pas seulement les lieux où le travail est effectué, mais aussi tous les lieux annexes communément utilisés par les travailleurs dans le cadre de leur emploi, y compris par exemple les couloirs, ascenseurs, cages d’escalier, halls d’entrée, installations communes, cafétérias, toilettes, salons, salles de repas, ainsi que les bâtiments extérieurs comme les abris ou hangars. Les véhicules utilisés au cours du travail sont considérés comme des lieux de travail et doivent être nommément désignés comme tels.

    21. Une attention particulière doit aussi être accordée aux lieux de travail qui sont également des lieux d’habitation ou de séjour tels que les prisons, les établissements pour malades mentaux ou les maisons de retraite ou de repos. Ces lieux constituent aussi des lieux de travail pour d’autres personnes qui doivent être protégées contre l’exposition à la fumée du tabac.

    «Transports publics»

    22. Les transports publics doivent être définis comme englobant tout véhicule utilisé pour le transport de membres du public, généralement contre rémunération ou pour réaliser un bénéfice commercial. Ils incluent les taxis.

    PORTÉE D’UNE LÉGISLATION EFFICACE

    23. L’article 8 prescrit d’adopter des mesures efficaces pour protéger les personnes contre l’exposition à la fumée du tabac dans 1) les lieux de travail intérieurs, 2) les lieux publics intérieurs, 3) les transports publics et 4) «d’autres lieux publics», «le cas échéant».

    24. Cet article crée une obligation d’assurer une protection universelle en faisant en sorte que tous les lieux publics intérieurs, tous les lieux de travail intérieurs, tous les transports publics et éventuellement d’autres lieux publics (extérieurs ou semi-ouverts) soient protégés contre l’exposition à la fumée secondaire. Aucune exception à cette règle ne peut être justifiée par des arguments sanitaires ou juridiques. Si des exceptions doivent être envisagées sur la base d’autres arguments, elles doivent être réduites au minimum. En outre, si une Partie n’est pas en mesure d’assurer immédiatement une couverture universelle, l’article 8 lui fait obligation de s’efforcer d’éliminer aussi vite que possible toutes les exceptions et de rendre la protection générale. Chaque Partie doit s’efforcer d’assurer une protection universelle dans les cinq ans suivant l’entrée en vigueur de la Convention-cadre de l’OMS à l’égard de cette Partie.

    25. Aucun niveau d’exposition à la fumée secondaire n’est sans danger et, ainsi que la Conférence des Parties l’a précédemment reconnu dans sa décision FCTC/COP1(15), les solutions techniques telles que la ventilation, l’aération (échange d’air) et la création de zones fumeurs désignées ne protègent pas contre l’exposition à la fumée du tabac.

    26. La protection devrait être assurée dans tous les lieux de travail intérieurs ou clos, y compris les véhicules à moteur utilisés comme lieux de travail (par exemple les taxis, les ambulances et les véhicules de livraison).

    27. Aux termes de la Convention, des mesures de protection doivent être mises en place non seulement dans tous les lieux publics «intérieurs», mais aussi, le cas échéant, dans «d’autres» lieux publics (c’est-à-dire des lieux extérieurs ou semi-ouverts). Pour déterminer quels sont les lieux publics extérieurs ou semi-ouverts dans lesquels l’application de la législation se justifie, les Parties devraient prendre en compte les données disponibles quant aux risques potentiels pour la santé existant dans ces différents environnements et faire en sorte d’adopter la protection la plus efficace contre l’exposition à la fumée du tabac lorsque les données factuelles prouvent qu’un risque existe.

    INFORMER LE PUBLIC, LE CONSULTER ET L’ASSOCIER POUR GAGNER SON SOUTIEN ET FACILITER L’APPLICATION DE LA LÉGISLATION

    28. Un rôle important des organismes gouvernementaux, en partenariat avec la société civile, est de sensibiliser le public et les leaders d’opinion aux risques de l’exposition à la fumée de tabac secondaire par des campagnes d’information permanentes, pour faire en sorte que la population comprenne et appuie l’action législative. Les principaux acteurs à cet égard sont les entreprises, les associations de restaurateurs et hôteliers, les groupements d’employeurs, les syndicats, les médias, les professionnels de la santé, les organisations représentant les enfants et adolescents, les institutions d’éducation et les institutions confessionnelles, la communauté des chercheurs et le grand public. L’action de sensibilisation devrait comprendre des consultations avec les secteurs affectés et avec d’autres organisations et institutions lors de l’élaboration de la législation.

    29. Les principaux messages diffusés devraient mettre l’accent sur les dommages causés par l’exposition à la fumée secondaire, sur le fait que l’élimination de la fumée à l’intérieur des locaux est la seule solution scientifiquement valable pour assurer une protection complète contre l’exposition à cette fumée, sur le droit de tous les travailleurs à une égale protection de la loi et sur le fait qu’il ne peut pas y avoir de compromis entre la santé et l’économie, car l’expérience montre dans un nombre croissant de pays que les environnements sans tabac sont profitables à la fois pour la santé et pour l’économie. Les campagnes d’éducation du public devraient aussi cibler des lieux dans lesquels il n’est pas possible ou approprié d’appliquer la législation, comme les résidences privées.

    30. De vastes consultations avec toutes les parties prenantes sont aussi essentielles pour éduquer et mobiliser la communauté et faciliter l’application de la loi lorsqu’elle a été promulguée. Une fois la législation adoptée, des campagnes d’éducation doivent être menées pour aider à la faire appliquer et des informations doivent être fournies aux propriétaires d’entreprises commerciales et aux gestionnaires de bâtiments pour leur expliquer le contenu de la loi et les responsabilités qui leur incombent. Il faut également s’occuper de produire du matériel de signalisation et d’affichage approprié. Ces mesures augmentent les chances d’obtenir que la législation soit appliquée en douceur et en grande partie volontairement. Les messages qui donnent des possibilités d’action aux non-fumeurs et remercient les fumeurs de respecter la loi sont un moyen de faire participer le public à une application en douceur de la législation.

    APPLICATION DE LA LOI ET RÉPRESSION DES INFRACTIONS

    Obligation de respecter la loi

    31. Pour que la législation soit efficace, il faut qu’elle engage la responsabilité juridique aussi bien des fumeurs individuels que des établissements commerciaux concernés et qu’elle prévoie des peines applicables en cas d’infractions aux entreprises commerciales et, si possible, aux fumeurs eux-mêmes. Toutefois, l’action répressive devrait viser plutôt les entreprises commerciales. La législation devrait rendre le propriétaire, le gestionnaire ou toute autre personne s’occupant des locaux responsable au premier chef du respect de la loi et devrait préciser de manière claire les mesures qu’il ou elle est tenu(e) de prendre. Ces mesures devraient notamment comprendre:

    a) l’obligation d’afficher à l’entrée ou dans d’autres lieux appropriés des avertissements clairs indiquant qu’il est interdit de fumer. Le format et le contenu de ces avertissements devraient être déterminés par les autorités sanitaires ou d’autres services gouvernementaux; un numéro de téléphone ou tout autre mécanisme permettant au public de signaler les violations devraient éventuellement y être mentionnés, de même que le nom de la personne qui est chargée, sur place, de recueillir les plaintes;

    b) l’obligation de retirer tous les cendriers existant dans l’établissement;

    c) l’obligation de veiller à l’observation des règles;

    d) l’obligation de prendre les mesures raisonnables spécifiées pour dissuader le public de fumer dans l’établissement. Ces mesures pourraient consister à demander à la personne de s’abstenir de fumer, à cesser de la servir, à lui demander de quitter les lieux et à avertir les services répressifs ou toute autre autorité compétente.

    Sanctions

    32. La législation devrait préciser le montant des amendes ou autres sanctions financières applicables en cas de violation. Le niveau des sanctions applicables refléterait bien entendu les pratiques et coutumes spécifiques de chaque pays, mais plusieurs principes devraient guider les décisions prises à cet égard. Tout d’abord, les sanctions devraient être suffisamment lourdes pour dissuader les auteurs de violations sans quoi elles risquent de ne pas être prises au sérieux par ces personnes ou d’être considérées comme de simples coûts annexes de leurs activités. Les sanctions applicables aux entreprises qui enfreignent la loi devraient être plus importantes que celles applicables aux fumeurs individuels qui ont généralement de moindres ressources. Les sanctions devraient être plus lourdes en cas de récidive et être comparables à celles appliquées dans le même pays pour des infractions de gravité équivalente.

    33. Outre les amendes, la législation peut aussi prévoir l’application de sanctions administratives telles que des suspensions de licences commerciales, conformes aux pratiques et règles juridiques du pays. Ces «sanctions de dernier recours» sont rarement utilisées mais sont très importantes pour faire respecter la loi par les entreprises qui choisissent de la braver systématiquement.

    34. Des sanctions pénales peuvent également être prévues si le contexte juridique et culturel du pays s’y prête.

    Services chargés de faire respecter la loi

    35. La législation devrait préciser quelle est ou quelles sont la ou les autorité(s) chargée(s) de faire respecter la loi et prévoir un système permettant à la fois de surveiller l’application de la loi et de poursuivre les contrevenants.

    36. La surveillance devrait comprendre des procédures d’inspection des entreprises pour vérifier qu’elles se conforment à la loi. Il est rarement nécessaire de créer un nouveau système d’inspection pour faire respecter la législation sur les environnements sans tabac. Il suffit habituellement d’utiliser un ou plusieurs des mécanismes déjà mis en place pour l’inspection des locaux commerciaux et des lieux de travail et, à cet égard, on a généralement le choix entre diverses options. Dans de nombreux pays, les inspections concernant l’application de la législation antitabac peuvent se faire dans le cadre des vérifications des licences commerciales, des inspections sanitaires et d’hygiène, et des vérifications de l’hygiène et de la sécurité des lieux de travail et de la sécurité incendie ou d’autres programmes analogues. Il peut être intéressant d’utiliser simultanément ces différentes sources d’information.

    37. Lorsque cela est possible, il est recommandé de faire appel à des inspecteurs ou agents locaux, ce qui permet généralement de disposer d’un personnel plus nombreux pour faire respecter la loi et donc d’obtenir de meilleurs résultats. Cette solution nécessite de créer un mécanisme national de coordination pour assurer une cohérence à l’échelle de tout le pays.

    38. Quel que soit le mécanisme utilisé, la surveillance doit s’appuyer sur un plan d’application global et comprendre un processus de formation efficace des inspecteurs. Un système de surveillance efficace peut reposer sur une combinaison d’inspections régulières et d’inspections inopinées, complétées par des visites effectuées à la suite de plaintes. Ces visites peuvent très bien être à visée éducative dans la période qui suit immédiatement l’entrée en vigueur de la loi, car la plupart des infractions sont alors souvent commises par inadvertance. La législation devrait autoriser les inspecteurs à pénétrer dans les locaux dans les conditions prévues par la loi et à y recueillir des échantillons et éléments de preuve si ces pouvoirs ne leur sont pas déjà conférés par la loi existante. De même, la législation devrait interdire aux entreprises de faire obstruction au travail des inspecteurs.

    39. Le coût d’une surveillance efficace n’est pas excessif. Il n’est pas nécessaire de recruter un grand nombre d’inspecteurs, car les inspections peuvent être effectuées par du personnel et dans le cadre de programmes existants. L’expérience montre en effet que la législation sur les environnements sans tabac a tendance à être rapidement auto-appliquée (c’est-à-dire appliquée essentiellement par le public lui-même). Le nombre de poursuites nécessaires reste limité si la législation est appliquée consciencieusement et si l’on s’emploie activement à éduquer les entreprises et le public.

    40. Bien que ces programmes ne soient pas très coûteux, des ressources sont nécessaires pour éduquer les chefs d’entreprise, former les inspecteurs, coordonner les inspections et rétribuer le personnel pour les inspections de locaux commerciaux effectuées en dehors des heures de travail normales. Un mécanisme de financement devrait être mis en place à cet effet. Les programmes d’inspection efficaces font appel à des sources de financement diverses, y compris des revenus fiscaux dédiés, des redevances de licence payables par les entreprises ou des prélèvements sur les amendes payées par les contrevenants.

    Stratégies d’application

    41. Des stratégies d’application judicieuses permettent de faire mieux respecter la loi, de simplifier sa mise en œuvre et de réduire l’ampleur de l’arsenal répressif nécessaire.

    42. En particulier, l’action des services chargés de faire respecter la loi dans la période qui suit immédiatement l’entrée en vigueur de celle-ci est un facteur important aussi bien pour l’acceptation de la loi elle-même que pour le succès des mesures de surveillance et d’application futures. De nombreux pays recommandent d’appliquer dans un premier temps la loi avec souplesse. Durant cette période, les contrevenants sont mis en garde mais ne sont pas sanctionnés. Cette approche doit être combinée avec une campagne active d’information des chefs d’entreprise sur leurs responsabilités légales: ceux-ci doivent comprendre que le délai de grâce initial ou la phase d’adaptation sera suivi d’une application plus rigoureuse de la législation.

    43. Pour ce qui est de la répression active, de nombreux pays recommandent de donner un large écho des poursuites engagées contre les contrevenants pour en accroître les effets dissuasifs. En débusquant les principaux délinquants qui bravent délibérément la loi ou qui sont bien connus de la communauté et en prenant des mesures fermes et rapides à leur égard et en sensibilisant au maximum le public à leurs activités, les autorités montrent leur détermination et prouvent qu’il faut prendre la loi au sérieux. Cela incite la population à respecter volontairement la législation et réduit d’autant les ressources qui doivent ensuite être consacrées à la surveillance et à l’application de la loi.

    44. Bien que les lois sur les environnements sans tabac soient rapidement auto-appliquées, il n’en demeure pas moins essentiel que les autorités soient prêtes à réagir rapidement et résolument à tous les cas isolés de violation manifeste. En particulier lorsque la loi vient d’entrer en vigueur, il arrive parfois que des personnes la défient ouvertement. Une réaction très ferme en pareil cas donne un signal fort qui rend ensuite l’application de la loi plus facile, tandis que l’indécision peut rapidement conduire à des violations généralisées.

    Mobiliser et associer la communauté

    45. On renforce l’efficacité des programmes de surveillance et d’application de la loi en y associant la communauté. En gagnant son soutien et en encourageant les membres du public à veiller au respect de la loi et à signaler les violations, on élargit d’autant le champ d’action des services chargés de faire respecter la loi tout en réduisant les ressources dont ils ont besoin pour ce faire. En fait, dans de nombreux pays ou territoires, les plaintes du public sont le principal moyen d’obtenir que la loi soit respectée. C’est la raison pour laquelle la législation sur les environnements sans tabac doit préciser nommément que les membres du public peuvent déposer des plaintes et doit autoriser toute personne ou organisation non gouvernementale à engager une action pour imposer le respect des mesures réglementant l’exposition à la fumée secondaire. Les programmes d’application de la loi devraient comprendre la mise en place de lignes téléphoniques gratuites ou d’autres systèmes similaires pour encourager le public à signaler les violations.

    SUIVI ET ÉVALUATION DES MESURES

    46. Le suivi et l’évaluation des mesures prises pour réduire l’exposition à la fumée du tabac sont importants pour plusieurs raisons, en particulier:

    a) pour inciter les responsables politiques et le public à appuyer le renforcement et l’extension des dispositions législatives;

    b) pour recueillir des données sur les succès remportés, afin d’éclairer les autres pays et de les aider dans leurs efforts;

    c) pour repérer et faire connaître les efforts faits par l’industrie du tabac pour compromettre l’application des mesures.

    47. La portée et la complexité du suivi et de l’évaluation varient évidemment selon les pays, en fonction des compétences d’expert et des ressources disponibles. Toutefois, il est important d’évaluer le résultat des mesures mises en œuvre notamment en ce qui concerne l’indicateur clé constitué par l’exposition à la fumée de tabac secondaire sur les lieux de travail et dans les lieux publics. Il peut exister à cet égard des moyens d’un bon rapport coût/efficacité, consistant par exemple à utiliser les données recueillies au cours d’activités de routine telles que les inspections régulières des lieux de travail.

    48. Les huit principaux indicateurs de processus et de résultats à examiner sont les suivants:[24]

    Processus

    a) connaissance, attitude et soutien à l’égard des politiques d’interdiction de fumer parmi le grand public et, éventuellement, dans certains groupes spécifiques, par exemple les personnes travaillant dans les bars;

    b) mise en œuvre et respect des politiques d’interdiction de fumer;

    Résultats

    c) réduction de l’exposition des employés à la fumée de tabac secondaire sur les lieux de travail et dans les lieux publics;

    d) réduction de la teneur en fumée de tabac secondaire de l’air ambiant sur les lieux de travail (en particulier les restaurants) et dans les lieux publics;

    e) réduction de la mortalité et de la morbidité liées à l’exposition à la fumée de tabac secondaire;

    f) réduction de l’exposition à la fumée de tabac secondaire dans les résidences privées;

    g) évolution de la prévalence du tabagisme et modification des comportements liés au tabac;

    h) conséquences économiques. [pic][pic][pic][pic][pic][pic][pic][pic][pic][pic][pic][pic][pic][pic][pic][pic][pic][pic][pic][pic][pic][pic][pic][pic]

    [1] ASPECT Consortium , Tobacco or health in the European Union: Past, present and future , octobre 2004.

    [2] Surgeon General, The Health Consequences of Involuntary Exposure to Tobacco Smoke: A Report of the Surgeon General , U.S. Dept. of Health and Human Services, Centers for Disease Control and Prevention, Coordinating Center for Health Promotion, National Center for Chronic Disease Prevention and Health Promotion, Office on Smoking and Health, Atlanta, Ga, 2006.

    [3] Surgeon General, 2006, op. cit.

    [4] Foreman, M. G., DeMeo, D. L., et al., «Clinical determinants of exacerbations in severe, early-onset COPD», European Respiratory Journal, 30(6), 2007, p. 1124-1130.

    [5] Surgeon General, 2006, op. cit.

    [6] The Smoke Free Partnership, Lifting the smokescreen: 10 reasons for a smoke free Europe , European Respiratory Society, Bruxelles, Belgique, 2006.

    [7] COM(2007) 27 final.

    [8] JO C […] du […], p. […].

    [9] JO C […] du […], p. […].

    [10] JO C du , p. .

    [11] JO C du , p. .

    [12] The Smoke Free Partnership, Lifting the smokescreen: 10 reasons for a smoke free Europe , European Respiratory Society, Bruxelles, Belgique, 2006.

    [13] JO C 189 du 26.7.1989, p. 1.

    [14] JO L 22 du 25.1.2003, p. 31.

    [15] JO L 183 du 29.6.1989, p. 1.

    [16] Voir l'arrêt de la Cour de justice dans l'affaire C-49/00, Commission/Italie, points 10 à 18.

    [17] COM(2004) 416 final.

    [18] COM(2007) 27 final.

    [19] [FCTC/COP2(7)] Directives sur la protection contre l'exposition à la fumée du tabac élaborées par le groupe de travail établi conformément à la décision FCTC/COP1(15) de la Conférence des Parties à la Convention-cadre de l'OMS pour la lutte antitabac.

    [20] JO L 194 du 18.7.2001, p. 26.

    [21] JO L 226 du 10.9.2003, p. 24.

    [22] JO L 226 du 10.9.2003, p. 24.

    [23] Il peut arriver que des éléments constituants de la fumée du tabac soient présents dans l’atmosphère en quantités si infimes qu’ils ne puissent être mesurés. Il faut prendre garde au fait que l’industrie du tabac ou le secteur hôtelier pourraient chercher à exploiter les limitations de cette définition.

    [24] La publication intitulée WHO policy recommandations: protection from exposure to second-hand tobacco smoke (Genève, Organisation mondiale de la Santé, 2007) contient des références et des liens avec des études effectuées ailleurs sur l’ensemble de ces indicateurs.

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