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Document 52007DC0269

    Livre vert sur l'amélioration des pratiques de démantèlement des navires {SEC(2007) 645}

    /* COM/2007/0269 final */

    52007DC0269

    Livre vert sur l'amélioration des pratiques de démantèlement des navires {SEC(2007) 645} /* COM/2007/0269 final */


    [pic] | COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES |

    Bruxelles, le 22.5.2007

    COM(2007) 269 final

    LIVRE VERT

    sur l'amélioration des pratiques de démantèlement des navires

    (présentée par la Commission){SEC(2007) 645}

    LIVRE VERT

    sur l'amélioration des pratiques de démantèlement des navires

    1. INTRODUCTION: CONTRIBUTION DE L'EUROPE À LA RÉSOLUTION D'UN PROBLÈME MONDIAL

    Le démantèlement des navires sur fond de mondialisation est une source de préoccupation. L'activité est pour le moment viable d'un strict point de vue économique, mais les coûts sont très élevés sur les plans de la santé humaine et de l'environnement. Un changement radical s'impose dans les meilleurs délais.

    - Entre 200 et 600 navires de mer représentant plus de 2 000 tonnes de port en lourd (tpl) sont démantelés chaque année dans le monde. Un pic est à prévoir en 2010 lorsqu'environ 800 pétroliers à simple coque vont devoir être retirés de la circulation.

    - Aujourd'hui, plus de deux-tiers de ces navires sont démantelés sur les plages et les rives des fleuves du sous-continent indien, le Bangladesh détenant la plus grosse part du marché.

    - Entre 2001 et 2003, 14 % des navires partis au déchirage battaient pavillon d'un État membre de l'Union européenne et 18 % celui d'un des États qui ont adhéré à l'Union depuis 2004.En 2006, 36 % au moins du tonnage mondial était assuré par navires appartenant à des armateurs domiciliés dans l'UE.

    - Une centaine de navires de guerre et autres vaisseaux d'État battant pavillon d'un État de l'UE (essentiellement la France et le Royaume-Uni) devraient être désarmés au cours des 10 prochaines années. Les vaisseaux construits entre les années soixante et le début des années quatre-vingt contiennent des quantités relativement importantes d'amiante et autres substances dangereuses.

    - Sur les navires qui seront démolis entre 2006 et 2015, on estime à 5,5 millions de tonnes le volume des substances potentiellement nuisibles pour l'environnement qui finiront dans les chantiers de déconstruction (en particulier boues d'hydrocarbures, huiles, peintures, PVC et amiante).

    - Aucun des sites utilisés pour la déconstruction des navires dans le sous-continent indien ne dispose de systèmes de confinement pour éviter la pollution du sol et de l'eau; rares sont ceux qui sont dotés d'installations d'entreposage des déchets; quant au traitement de ces déchets, il est rarement conforme aux normes, même minimales, de protection de l'environnement.

    - La déconstruction des navires est une importante source de matières premières en Asie du Sud. 80 à 90 % de l'acier utilisé par le Bangladesh provient des navires en fin de vie. Actuellement, les entreprises de démolition du Bangladesh achètent ces navires à un prix qui dépasse largement les 400 USD par tonne de déplacement lège (tdl), soit beaucoup plus cher que le prix pratiqué dans les autres pays.

    - La déconstruction des navires est une activité dangereuse. Selon un récent rapport indien, à Alang qui est le plus grand site de déconstruction d'Inde, un ouvrier sur six souffre d'asbestose. Le taux d'accidents mortel y serait six fois plus élevé que dans l'industrie minière indienne. Au Bangladesh, quelque 200 personnes travaillant dans le secteur de la déconstruction ont trouvé la mort entre 1998 et 2003. Les ONG estiment le nombre total de décès dans le secteur à plusieurs milliers, et ce chiffre va considérablement augmenter à mesure que seront recrutés de nouveaux ouvriers inexpérimentés pour faire face au pic de démolition des navires à simple coque dans les prochaines années.

    - Il existe à l'heure actuelle une capacité de recyclage «vert» des navires, c'est-à-dire respectant les normes de sécurité et de protection de l'environnement, qui permet de traiter tout au plus 2 millions de tonnes de déplacement lège/an à l'échelle mondiale, ce qui représente à peu près 30 % de la demande totale de déconstruction prévue dans les années normales. La plupart de ces installations, situées principalement en Chine mais aussi dans certains États membres de l'UE, connaissent des difficultés d'exploitation car elles ont des frais bien supérieurs à ceux de leurs concurrentes d'Asie du Sud et ne sont pas en mesure proposer les mêmes tarifs de déconstruction que ces dernières.

    En principe, le transfert des navires en fin de vie, des pays industrialisés vers les pays en développement est régi par le droit international relatif au transfert des déchets, et l'exportation de navires contenant des substances dangereuses en provenance de la Communauté européenne est interdite par le règlement communautaire sur le transfert des déchets. Cependant, ces dernières années, plusieurs cas très médiatisés de navires européens envoyés au recyclage en Asie du Sud ont mis en évidence les difficultés d'application de cette législation.

    L'opinion publique internationale s'est émue de ces carences manifestes et de l'absence d'une filière de démantèlement socialement et écologiquement acceptable, et le débat a été porté au niveau politique. L'Organisation maritime internationale (OMI) a commencé à travailler à l'élaboration d'une convention internationale sur le recyclage sûr et écologiquement rationnel des navires. Certaines nations maritimes telles que le Royaume-Uni élaborent des stratégies nationales applicables aux vaisseaux d'État et aux navires battant leur pavillon. Le Parlement européen et les organisations non gouvernementales ont exigé que des mesures soient prises au niveau de l'Union européenne.

    Dans ses conclusions du 20 novembre 2006, le Conseil de l'Union européenne a reconnu que la mise en place d'une filière écologiquement rationnelle de démantèlement des navires était une priorité pour l'Union européenne. Il a indiqué que les évènements récents et les prévisions de tonnages à démanteler dans un proche avenir appelaient une réponse appropriée et dans les meilleurs délais de la part de la communauté internationale, et notamment de l'Union européenne. Le Conseil a accueilli favorablement la proposition de la Commission d'envisager une stratégie communautaire sur le démantèlement des navires. Il conviendrait que cette stratégie renforce le contrôle de l'application du droit communautaire en vigueur, tout en tenant compte de la spécificité du monde maritime et des éléments nouveaux intervenant dans ce cadre, en particulier de l'évolution de la législation maritime internationale, sans perdre de vue l'objectif final qui est de parvenir à une solution durable sur le plan mondial. Dans cette optique, la Commission est invitée à analyser les besoins de création d'une capacité suffisante de déconstruction des navires dans l'Union européenne.

    La Commission a déjà pris position à ce sujet dans le livre vert sur la politique maritime[1], de juin 2006. Elle y déclare en effet qu'une future politique maritime de l’Union devra soutenir les initiatives prises à l’échelon international en vue d'imposer des normes minimales en matière de recyclage des navires et de promouvoir la création d’infrastructures de recyclage propres. Toutefois, l'Union européenne pourrait également être amenée à envisager une série d'initiatives au niveau régional pour pallier les lacunes du régime international à venir et les retards possibles dans sa prise d'effet.

    Le présent livre vert cherche à suggérer des idées neuves sur le démantèlement des navires, afin de poursuivre et d'intensifier le dialogue avec les États membres et les parties prenantes et de préparer le terrain pour de nouvelles mesures s'inscrivant dans le cadre des politiques communautaires, et notamment de la future politique maritime. L'objectif principal est d'assurer la protection de l'environnement et de la santé humaine; il ne s'agit pas de ramener artificiellement dans l'UE des activités de recyclage des navires, et de priver ainsi les pays d'Asie du Sud d'une source de revenus essentielle. Bien au contraire, en reconnaissant l'avantage comparatif structurel de ces pays sur le plan des coûts, l'Union européenne vise en définitive à faire en sorte que les normes minimales de sécurité et de protection de la santé et de l'environnement soient respectées partout dans le monde.

    2. ASPECTS PRINCIPAUX

    2.1 . Situation juridique: l'interdiction d'exportation des déchets dangereux

    À la fin des années quatre-vingt, des cas de transferts de déchets toxiques depuis des pays industrialisés vers des pays en développement ont fait scandale dans le monde entier. Les huit mille fûts de déchets chimiques abandonnés sur la plage de Kolo au Nigéria et les pérégrinations de navires tel le Karin B naviguant de port en port pour tenter de se débarrasser de sa cargaison de déchets dangereux ont fait la une des journaux. Un renforcement du cadre juridique international est apparu nécessaire. La Convention de Bâle des Nations unies a été adoptée le 22 mars 1989 afin d'instaurer un cadre pour contrôler les mouvements transfrontières de déchets dangereux. Jusqu'à présent, la convention a été signée par 168 pays et ratifiée par 165. La Communauté européenne dans son ensemble est partie à la Convention de Bâle, de même que chacun de ses États membres.

    En vertu d'un amendement à la Convention de Bâle, adopté en 1995, les exportations de déchets dangereux depuis des pays de l'OCDE à destination de pays non OCDE sont interdites. Cette interdiction avait été décidée pour apaiser les inquiétudes des décideurs politiques, tant des pays développés que des pays en développement, face aux quantités croissantes de déchets dangereux exportés des pays développés vers les pays en développement, et gérés ensuite de manière anarchique et risquée.

    Cette «interdiction de Bâle» a été intégrée dans la législation communautaire en 1997, et tous les États membres sont tenus de s'y conformer (articles 14 et 16 du règlement sur les transferts de déchets2). L'Union européenne est le principal acteur sur la scène internationale a avoir transposé cette interdiction dans son droit interne. Les États-Unis, par exemple, n'ont pas ratifié la Convention de Bâle, pas même dans sa version antérieure à l'amendement. Parmi les grands pays parties à la convention, la Chine, l'Indonésie, l'Égypte et le Nigéria ont accepté l'amendement portant interdiction, tandis que l'Australie, le Brésil, le Canada, l'Inde, le Japon, la Corée et la Russie l'ont rejeté. L'Union européenne et ses États membres s'emploient, avec leurs partenaires internationaux, à faire ratifier «l'interdiction de Bâle» qui constitue un élément essentiel pour l'amélioration du cadre juridique relatif aux transferts internationaux de déchets.

    Le droit international relatif aux transferts de déchets admet qu'un navire puisse devenir un déchet au sens de l'article 2 de la Convention de Bâle tout en étant défini comme un navire au sens d'autres règles internationales3. En droit communautaire, la définition du déchet, à savoir toute substance ou tout objet qui relève des catégories figurant à l'annexe I de la directive-cadre relative aux déchets4, dont le détenteur se défait ou dont il a l'intention ou l'obligation de se défaire, s'applique également aux navires destinés au démantèlement. Si un navire contient des quantités considérables de substances dangereuses ou, pour reprendre le libellé de l'entrée GC 030 de la liste des déchets, s'il n'a pas été «convenablement vidé» de sa cargaison de substances dangereuses, il est considéré comme un déchet dangereux. L'exportation d'un tel navire en vue de sa démolition, depuis la Communauté européenne vers des pays hors OCDE, est interdite en vertu de l'interdiction de Bâle et du règlement relatif aux transferts de déchets, et tout démantèlement doit être réalisé dans un pays de l'OCDE, dans des conditions écologiquement rationnelles. L'autre solution est de procéder à une décontamination (nettoyage préalable) du navire de sorte qu'il ne constitue plus un déchet dangereux. Cette interprétation juridique a été confirmée par le Conseil d'État français dans l'affaire de l'ex-porte-avions Clemenceau 5 .

    Les obligations auxquelles sont tenus les États membres de l'UE en vertu des conventions de l'OMI n'invalident pas ces règles relatives aux transferts de déchets, quand bien même un navire ne saurait être arrêté ou subir des retards excessifs dès lors qu'il est muni de certificats OMI valides. La Convention de Bâle et l'interdiction d'exportation des déchets dangereux, telles qu'elles sont mises en œuvre dans l'Union européenne par le règlement relatif aux transferts de déchets, sont juridiquement contraignantes, et les États membres doivent en contrôler l'application. Les deux cadres réglementaires sont compatibles, puisque tant le droit de la mer que les conventions de l'OMI reconnaissent aux États côtiers le droit (et le devoir) de faire respecter d'autres règles du droit international concernant la protection de l'environnement.

    Dans la pratique, les exigences de notification de la Convention de Bâle, qui s'imposent à toutes les parties, sont rarement respectées dans le cas des navires en fin de vie. L'interdiction d'exportation au titre du règlement communautaire relatif aux transferts de déchets est difficilement applicable dans le cas d'un navire qui a quitté les eaux communautaires et que son propriétaire décide ensuite d'expédier dans d'autres parties du monde en vue de sa démolition. Le projet de convention actuellement examiné par l'IMO prévoit des règles juridiquement contraignantes spécifiques pour le recyclage des navires, mais ces règles n'existent pas pour le moment.

    2.2. L'économie du démantèlement des navires

    Aujourd'hui le marché du démantèlement des navires fonctionne de la façon suivante: l'armateur d'un navire qui a décidé de mettre fin à l'exploitation commerciale de celui-ci se met en quête d'un acquéreur. C'est généralement ce qui arrive lorsque les frais d'entretien du navire commencent à devenir plus importants que les recettes potentielles, ou lorsque le navire n'est plus intéressant pour le marché de l'occasion, autrement dit lorsqu'il est peu probable qu'il puisse être revendu. L'acquéreur est soit un courtier spécialisé, soit l'exploitant du chantier de déconstruction lui-même. En règle générale, le navire transporte une dernière cargaison jusque dans la zone où se trouve le chantier de déconstruction. Une fois ce dernier voyage accompli, le navire est acheminé par ses moyens de propulsion propres sur le chantier de déconstruction où il sera démantelé.

    Le prix payé par l'acquéreur en USD par tonne de déplacement lège (tdl) est approximativement équivalent à celui du poids d'acier du navire. Ce prix s'est situé pendant des années aux alentours de 150 USD/tdl (avec des minima de l'ordre de 100 USD/tdl et des maxima de 200 USD/tdl), mais récemment, la forte demande de ferraille d'acier de la part de la Chine et l'offre limitée de navires ont fait monter les prix jusqu'à des niveaux records de près de 500 USD/tdl pour un navire moyen, et davantage pour les navires particulièrement cotés. Les prix les plus élevés sont actuellement proposés par le Bangladesh.

    Un superpétrolier (VLCC) d'un port en lourd supérieur ou égal à 300 000 tonnes représente 45 000 tdl, et son démantèlement coûtera donc entre 5 et 10 millions USD (voire davantage) suivant les conditions du marché. Ces chiffres sont indicatifs car le prix dépend également d'autres facteurs tels que la quantité et la qualité de l'acier, la présence de métaux tels que le cuivre ou le nickel, et les équipements qui peuvent encore être vendus. La présence ou non à bord de substances problématiques ne semble pas intervenir dans le prix.

    La Commission s'est intéressée à l'économie du démantèlement des navires dans une étude réalisée en 20006. Selon les conclusions de cette étude, il sera extrêmement difficile, pour diverses raisons, de rendre l'activité de recyclage des navires économiquement viable tout en respectant des normes écologiquement rationnelles.

    - Le nombre de navire à déconstruire dépend des conditions du marché du fret. Si les navires sont encore rentables, leurs propriétaires ne prendront pas la décision de les faire démolir. Ces deux dernières années, les volumes de navires à démanteler ont été très faibles en raison du dynamisme et de la rentabilité du marché du fret. La grande majorité des navires à démanteler proviendra nécessairement de la flotte marchande de haute mer et comprendra essentiellement des pétroliers et des vraquiers (segments à volume important). Les autres segments du marché, tels que les navires de guerre, les bateaux de navigation intérieure et les installations en mer représentent un faible volume et une offre de démantèlement limitée, et ne peuvent donc guère être à l'origine d'un flux continu de matériaux justifiant un recyclage à grande échelle. L'exploitant d'une installation de recyclage moderne aura donc du mal à élaborer un modèle d'entreprise qui lui permette de couvrir totalement ses coûts d'amortissement. C'est la raison pour laquelle les exploitants qui subsistent en Europe n'ont pu survivre qu'en se concentrant sur des marchés de niche, en particulier les structures en mer, les bateaux de pêche et les bateaux de navigation intérieure7.

    - Les navires sont des constructions particulières, à cycle de vie long, qui font l'objet de nombreuses réparations et opérations d'entretien au cours de leurs vingt à trente années d'exploitation. Un très petit nombre de ces interventions est correctement consigné. L'exploitant de l'installation de recyclage ne sait donc pas ce qu'il l'attend et ne connaît pas la nature du travail de recyclage qui sera nécessaire. Cela vaut en particulier pour les navires de transport de passagers qui renferment toute une série de matériaux, dont des composites qui sont très difficiles à séparer et à recycler. Les navires qui arrivent aujourd'hui dans les chantiers de déchirage ont été construits dans les années soixante-dix à l'aide de matériaux qui ne sont plus utilisés aujourd'hui (par exemple, l'amiante). En conséquence, la main-d'œuvre nécessaire est très importante et restera probablement un élément majeur du prix de revient. Le recours aux engins de levage est limité pour ce type de navires.

    - Certains matériaux se trouvant à bord sont recyclables et peuvent être générateurs de revenus. D'autres en revanche nécessitent un traitement onéreux dont il est difficile de déterminer le prix à l'avance.

    - Les principales sources de revenus des chantiers de déconstruction d'Asie sont l'acier, utilisé pour la construction, et le marché de l'occasion de l'équipement nautique. Ces sources de revenus par définition n'existent pas dans les pays développés, en raison des contraintes réglementaires.

    Les différences de coûts de main-d'œuvre entre l'Asie et l'Europe sont un autre facteur à prendre en considération. Si les ouvriers des sites de démolition du Bangladesh et d'Inde gagnent entre 1 et 2 USD/jour, les coûts relatifs à la sécurité des travailleurs et à la protection de la santé qui incombent à l'employeur sont négligeables, alors qu'en Europe ces coûts sont de l'ordre de 250 USD/jour et par ouvrier aux Pays-Bas et de 13 USD/jour en Bulgarie8.

    Ce sont donc ces différences de coûts salariaux, ainsi que les exigences de protection de l'environnement et de la santé et les revenus du recyclage et du marché de l'occasion qui expliquent que les exploitants d'Asie du Sud puissent proposer aux propriétaires de navires des prix nettement plus intéressants que leurs concurrents potentiels des autres pays. Actuellement, les exploitants de chantiers de déconstruction bangladeshi qui n'ont aucun frais liés à la sécurité et à la protection de l'environnement ou de la santé achètent un navire entre 450 et 500 USD/tonne, alors que leurs homologues chinois qui protègent un peu mieux leur personnel et l'environnement proposent la moitié de ce prix, et les américains un dixième seulement. D'ailleurs, avant la flambée des cours de l'acier, les chantiers de recyclage des pays industrialisés percevaient même une redevance pour le démantèlement des navires.

    Du fait de l'évolution du marché, la capacité de déconstruction de l'Union européenne a diminué au cours des 20 dernières années et est aujourd'hui extrêmement faible. Il existe actuellement des installations pour les navires de gros tonnage, essentiellement en Belgique, en Italie et aux Pays-Bas, qui représentent une capacité totale de 230 000 tdl/an, ainsi qu'une multitude d'installations de plus petite taille pour les navires de pêche et autres petites embarcations dans la plupart des autres États membres à tradition maritime. Globalement, la capacité de démantèlement des navires de l'UE peut être estimée à 500 000 tdl par an9. En outre, des procédures d'octroi de licence sont en cours au Royaume-Uni pour autoriser des activités de démantèlement dans deux chantiers navals existants qui auraient une capacité beaucoup plus importante (600 000 tdl/an dans le cas de Able UK). Cette énumération ne tient pas compte des nombreuses cales sèches désaffectées qui existent dans les ports un peu partout en Europe et qui se prêteraient techniquement à des activités de déconstruction, mais qui ont peu de chances d'être remises en service dans les conditions économiques actuelles.

    Pour trouver une capacité de démantèlement plus conséquente que celle dont dispose actuellement l'UE, il faut se tourner vers la Turquie voisine qui, en tant que pays membre de l'OCDE, remplit en principe les conditions requises pour être pays de destination des exportations, même de déchets dangereux. Les quelque 20 chantiers de déconstruction de la baie d'Aliaga (près d'Izmir) ont une capacité globale d'environ 1 million de tonnes par an, qui est aujourd'hui largement inexploitée.

    Les installations de l'Union européenne respectent en général des normes élevées de protection des travailleurs et de l'environnement. Leurs homologues turques ont considérablement progressé dans ces domaines ces dernières années, bien qu'il subsiste certains problèmes d'environnement. Il existe également de nombreuses installations dotées de quais réservés à la démolition des navires en Chine; celles-ci ont été récemment modernisées et répondent aujourd'hui à des normes de qualité acceptables, mais leur capacité ne dépasse guère 500 000 tdl par an. Les installations de démantèlement de Brownsville au Texas et d'ailleurs aux États-Unis sont de qualité comparable, mais elles ne sont en principe pas accessibles aux navires étrangers.

    La capacité de démantèlement écologiquement rationnel des navires qui existe dans l'UE et en Turquie est donc suffisante pour les navires de guerre et autres navires d'État (une centaine de navires de plus de 1 000 tdl, soit un tonnage global atteignant 500 000 tdl10) qui seront désarmés dans les dix ans à venir, mais elle ne l'est que pour une très faible proportion de la flotte marchande naviguant sous pavillon d'un pays de l'Union européenne. D'après les rapports de la CNUCED, les navires vendus pour déchirage entre 2000 et 2005 représentent un tonnage de 6 à 30 millions tdl/an, alors qu'environ 23 % de la flotte marchande mondiale navigue sous le pavillon d'un État membre de l'Union européenne11.

    Le problème de cette capacité «écologique» insuffisante va encore être aggravé avec le retrait prochain de tous les pétroliers à simple coque. Les accidents impliquant des pétroliers comme l' Erika et le Prestige ont provoqué de véritables catastrophes écologiques ces dernières décennies. En réaction, une réglementation communautaire et des règles internationales prévoyant le retrait progressif des pétroliers à simple coque ont été adoptées, qui commenceront à produire tous leurs effets au cours de la prochaine décennie. 1 300 pétroliers à simple coque, dont environ un tiers battant pavillon d'un État membre, devraient ainsi être désarmés et envoyés à la démolition d'ici à 201512. On s'attend à un pic de la demande de recyclage aux alentours de 2010, principale date butoir pour le retrait de ces pétroliers. Toutefois, il y aura aussi des augmentations de la demande à plus long terme, en raison de l'essor généralisé de la construction navale ces dernières années.

    Pour le moment, le marché de la déconstruction des navires reste économiquement viable, abstraction faite de l'externalisation extrême des coûts. La vente des navires désarmés rapporte bien à leurs propriétaires (pour reprendre l'exemple du superpétrolier VLCC évoqué précédemment, la construction d'un tel navire coûterait aujourd'hui quelque 90 millions USD et sa revente pour déconstruction après 25 ans d'exploitation rapporterait 10 millions USD). Le recyclage des matériaux récupérés fait réaliser des bénéfices aux chantiers de déconstruction, mais ce marché fonctionne fatalement dans des conditions très difficiles qui sont décrites ci-après. Cette situation est de moins en moins acceptable pour l'opinion publique des pays développés où résident la plupart des armateurs et où sont perçus les revenus de l'exploitation du navire, et elle n'est pas compatible avec les principes de viabilité environnementale et sociale.

    2.3. Incidences sociales et environnementales

    La plupart des navires contiennent de grandes quantités de substances dangereuses telles que l'amiante (en particulier sur les navires construits avant les années quatre-vingt), les huiles et boues d'hydrocarbures, les PCB (diphényles polychlorés) et les métaux lourds contenus dans les peintures et les équipements. Lorsqu'ils partent à la démolition, ces navires représentent donc un des principaux flux de déchets dangereux entre pays industrialisés et pays en développement. Selon une étude réalisée en 2004 pour la Commission (direction générale des transports), la quantité d'huiles d'hydrocarbures récupérée sur les seuls navires en fin de vie sera comprise entre 400 000 et 1,3 million de tonnes par an jusqu'en 2015. Sur l'ensemble des déchets dangereux récupérés chaque année dans les installations de démantèlement, l'amiante représentera entre 1 000 et 3 000 tonnes, le TBT entre 170 et 540 tonnes et les peintures toxiques pour l'environnement entre 6 000 et 20 000 tonnes13.

    Au Bangladesh, en Inde et au Pakistan, la démolition des navires est réalisée sur des plages de sable, sans aucun confinement ou dispositif d'isolement permettant d'éviter la pollution des eaux et du sol. Les installations d'entreposage des déchets dangereux sont rares, et les matériaux non recyclables sont généralement éliminés sur place. Les revêtements de câbles en PVC sont souvent brûlés à l'air libre.

    Les incidences de ces pratiques sur l'environnement ont rarement été étudiées en détail. Les données disponibles indiquent que les propriétés physico-chimiques de l'eau de mer, du sol et des sédiments de rivage sont considérablement modifiées par l'activité de déconstruction14. La pollution des plages et des eaux côtières par les hydrocarbures est nettement visible sur les photographies aériennes des sites de démantèlement d'Alang (Inde) et de Chittagong (Bangladesh), et les ONG signalent une raréfaction de la végétation et de la faune sous-marine dans ces régions.

    Les conditions en matière de santé et de sécurité des travailleurs sont précaires dans les chantiers de démolition d'Asie du Sud. Le risque d'accident grave est élevé, surtout du fait de l'absence d'engins de levage (grues) et d'équipements de protection pour les travailleurs. Selon un rapport du gouvernement indien de 2004, 434 accidents ont été enregistrés dans les chantiers d'Alang entre 1996, et 209 personnes y ont trouvé la mort15. Au Bangladesh, les médias font état de plus de 400 décès et de 6 000 blessés graves au cours des 20 dernières années16. Le fait que le Bangladesh, contrairement à l'Inde, n'exige même pas en pratique de certification du type «gas-free-for-hot-work» (dégazage pour travail à chaud), contrairement à l'Inde, explique les coûts particulièrement bas dans ce pays, mais aussi la fréquence élevée des explosions mortelles sur les chantiers de déconstruction.

    En outre, des milliers d'ouvriers contracteraient des affections irréversibles du fait de la manipulation et de l'inhalation de substances toxiques au mépris de précautions ou de règles de protection minimales. Selon un rapport médical de la Cour suprême d'Inde de septembre 2006, le diagnostic d'asbestose aurait été porté sur 16 % des travailleurs manipulant de l'amiante à Alang, lesquels courraient donc un risque sérieux de développer un mésothéliome17. On sait grâce à la recherche médicale que l'incidence de cette forme de cancer du poumon17 culmine seulement plusieurs dizaines d'années après l'exposition.

    Les chantiers de déconstruction du Bangladesh employaient quelque 25 000 personnes en 2005. En Inde, la main-d'œuvre a atteint 40 000 personnes dans les périodes de grande activité avant de retomber à 6 000 à la fin de l'année 200618. Dans chacun de ces pays, ce sont les régions les plus pauvres qui fournissent la plus grande partie de la main-d'œuvre, généralement non qualifiée. Ces employés travaillent sans contrat ni assurance maladie ou accident, et n'ont pas le droit de constituer des syndicats. Les indemnisations en cas d'accident sont minimes voire inexistantes. Le travail des enfants n'est pas rare pour les tâches les plus légères.

    Les conditions de travail dans les installations de déconstruction navale ont été dénoncées par les organisations de protection de l'environnement et de défense des droits de l'homme et par les médias, ainsi que par la Cour suprême d'Inde. Cependant, les gouvernements des États d'Asie du Sud semblent réticents à faire évoluer les pratiques car le démantèlement des navires est pour eux une activité économiquement importante qu'il convient d'entraver le moins possible.

    2.4. État de la situation sur le plan international

    La question du démantèlement des navires fait débat depuis de longues années, tant au niveau de l'UE qu'au sein des organisations internationales compétentes, à savoir l'Organisation maritime internationale (OMI), l'Organisation internationale du travail (OIT) et la Convention de Bâle (ou plus précisément l'organisme dont elle émane: le programme des Nations unies pour l'environnement (PNUE)). Ces trois organismes ont élaboré des lignes directrices non contraignantes concernant le recyclage des navires19. Un groupe de travail mixte OIT/OMI/Convention de Bâle sur le démantèlement des navires s'est réuni à deux reprises en 2005 pour envisager une approche coordonnée de la question afin d'éviter les doubles emplois et les chevauchement des attributions et des compétences entre les trois organismes.

    L'OMI travaille depuis 2005 à la mise en place d'un régime international contraignant en vue du démantèlement écologiquement rationnel des navires. Les États membres de l'Union européenne et la Commission participent à ces travaux. Un projet de convention portant sur le recyclage sûr et écologiquement rationnel des navires est en cours de négociation au sein du comité pour la protection du milieu marin de l'OMI, en vue de son adoption par une conférence diplomatique en 2008/2009 et de son entrée en vigueur quelques années plus tard. Ce projet comporte une annexe qui énonce des règles et des conditions applicables aux navires (y compris pour la conception, la construction, l'exploitation et l'entretien) et aux installations de recyclage des navires, ainsi que certaines dispositions relatives aux rapports à fournir. Le projet de convention envisage le recyclage des navires «de bout en bout» dans l'optique d'éviter les substances dangereuses sur les navires neufs et de les éliminer sur les navires existants pendant la période d'exploitation de ceux-ci. Les modalités techniques, qui passent également par la gestion écologiquement rationnelle des installations de recyclage des navires, sont censées faire l'objet de recommandations annexées à la convention.

    En l'état actuel du projet, la convention, à l'instar d'autres instruments de l'OMI, ne s'appliquera pas aux petits navires d'un tonnage brut inférieur à 400 ou 500 tonnes, ni aux navires de guerre, aux navires militaires auxiliaires ou autres vaisseaux appartenant à un État ou exploités par un État et affectés exclusivement à un service public non commercial. Les questions qui suscitent la controverse et qui seront examinées par les groupes de travail de l'OMI en 2007 portent notamment sur l'opportunité d'une référence aux règles et normes adoptées en dehors du cadre de l'OMI, sur la norme environnementale de référence pour les installations de recyclage des navires, sur les futures exigences en matière d'information et de communication (une notification d'État à État sera-t-elle nécessaire comme dans le cas de la Convention de Bâle?) et sur le type de mécanisme de contrôle de la mise en œuvre à mettre en place pour faciliter l'application de la convention.

    Eu égard à la Convention de Bâle, le principal point faisant débat est la question de savoir si la convention sur le recyclage des navires proposée garantira un niveau de contrôle et d'exécution équivalent à celui assuré par la Convention de Bâle. La question a de nouveau été posée lors de 8e conférence des parties, tenue le 1er décembre 2006, et il a été déclaré, entre autres, que le futur instrument juridique devrait définir des conditions de démantèlement des navires permettant de protéger les travailleurs et l'environnement contre les effets nocifs des substances dangereuses et les méthodes de travail qui présentent des risques.

    3. POSSIBILITES D'AMÉLIORATION DE LA GESTION EUROPÉENNE DU DÉMANTELEMENT DES NAVIRES

    La Commission a examiné les très nombreuses questions entrant en ligne de compte et a dégagé certaines options qui permettraient de combler ou tout au moins de limiter les lacunes dans la mise en œuvre de la réglementation et d'améliorer la gestion du démantèlement des navires. Ces options ne doivent pas être considérées comme des solutions s'excluant mutuellement, mais au contraire comme des éléments qui se complètent et se renforcent mutuellement.

    3.1. Renforcement du contrôle de l'application de la législation communautaire relative au transfert des déchets

    Les États membres de l'Union européenne ont l'obligation d'appliquer et de contrôler l'application du règlement communautaire relatif aux transferts de déchets ainsi que «l'interdiction de Bâle» frappant les exportations de déchets dangereux.

    Bien que la mobilité des navires facilite dans une certaine mesure le contournement de l'interdiction d'exportation, le contrôle de l'application pourrait être amélioré, au moins dans le cas des navires et des compagnies maritimes qui opèrent régulièrement dans les eaux européennes. Cela nécessitera:

    - davantage de contrôles de la part des autorités responsables du transfert des déchets et des autorités portuaires européennes, ciblés sur les navires d'un certain âge (plus de 25 ans) ou qui, suivant d'autres critères, paraissent voués à la démolition;

    - éventuellement, des orientations supplémentaires de la part de la Commission et des États membres concernant la définition des déchets et des déchets dangereux en ce qui concerne les navires, et une liste des installations de recyclage répondant à des normes de gestion écologiquement rationnelle et garantissant la protection des travailleurs;

    - une coopération et un échange d'information systématiques entre les États membres et entre ces derniers et la Commission, passant notamment par le recours aux bases de données et aux communiqués de presse pour recenser les navires en fin de vie potentiels et suivre leur périple jusqu'aux installations de démantèlement;

    - davantage de coopération avec certains pays tiers, en particulier les États assurant le recyclage et les États de transit (par ex. l'Égypte pour les navires en fin de vie qui empruntent le canal de Suez);

    - une ligne d'action centrée sur les navires de guerre et autres navires d'État ainsi que sur les navires commerciaux qui opèrent régulièrement dans les eaux communautaires (par exemple, les transbordeurs).

    Dans la mesure ou le règlement relatif aux transferts de déchets ne s'applique pas uniquement aux navires battant pavillon d'un État membre de l'UE, mais à toutes les exportations de déchets et donc aux navires en fin de vie qui quittent un port de l'Union européenne, les armateurs ne peuvent pas échapper aux contrôles en passant sous le pavillon d'un pays tiers. Le risque de voir le transport maritime freiné par un contrôle plus strict de l'application n'est pas très élevé tant que l'Union européenne reste un marché économiquement attrayant et rentable. En revanche, le risque que des armateurs irresponsables de pays tiers, soumis à ces contrôles, abandonnent leurs navires dans les ports européens en laissant finalement le contribuable assumer le coût de leur élimination dans les règles est plus réaliste. Ce type de problème ne peut être résolu que par un contrôle plus efficace de l'application de la réglementation maritime en général.

    3.2. Solutions internationales

    Un consensus semble s'être dégagé au sein des organismes internationaux compétents sur l'importance primordiale d'un recyclage sûr et écologiquement rationnel des navires. Afin de garantir des conditions équitables pour tous partout dans le monde, des règles internationales contraignantes sont nécessaires. Il convient que ces normes fassent véritablement évoluer les pratiques actuelles de démantèlement, en mettant un terme à la pollution trop fréquente du sol et de l'eau et en protégeant les travailleurs contre les accidents et la contamination. Par exemple, le confinement sûr des résidus d'hydrocarbures afin d'éviter les déversements accidentels, l'élimination préalable de l'amiante par des ouvriers revêtus d'un équipement de protection, les précautions de dégazage pour éviter les explosions et le recours aux engins de levage pour soulever les lourdes charges sont autant de pratiques qui devraient être rendues obligatoires.

    Il subsistera certainement un écart de prix entre pays européens et pays asiatiques, même si ces derniers adoptent des normes élevées de protection de la santé et de l'environnement, mais cet écart ne sera peut-être pas systématiquement prohibitif. Dans un avenir prévisible, les pays en développement auront toujours des coûts salariaux plus faibles et seront toujours en mesure de proposer des prix plus élevés pour l'acier et les équipements recyclables. Cependant, il y aurait davantage de marge de manœuvre pour combler cet écart de prix par des mesures volontaires qui autoriseraient une certaine activité de démantèlement des navires en Europe où les normes de protection de l'environnement et de la santé humaine sont particulièrement élevées.

    La future convention internationale sera essentielle pour résoudre le problème du démantèlement des navires à l'échelle mondiale. L'OMI est donc le cadre tout désigné pour régler cette question au niveau mondial. La nouvelle convention aura des répercussions sur le règlement relatif aux transferts de déchets et sur d'autres textes de la législation communautaire concernant la protection de l'environnement et la sécurité sur le lieu de travail. Il faut que la Communauté dans son ensemble se fixe pour objectif de devenir partie à cette convention, précise de l'OMI. Il serait possible à cet effet d'inclure une clause relative aux organisations d'intégration économique régionale dans la convention, comme c'est le cas dans tous les accords environnementaux multilatéraux. Afin de parvenir le plus rapidement possible à des normes internationales sûres et écologiquement rationnelles, il y a lieu de renforcer le rôle de la Communauté dans l'OMI.

    L'Union européenne a tout intérêt à ce que, premièrement, les travaux de l'OMI soient menés à bonne fin le plus rapidement possible et, deuxièmement, la convention soit d'une portée suffisamment large et débouche sur des normes rationnelles de protection de la santé et de gestion de l'environnement, ainsi que sur les mécanismes nécessaires au contrôle de l'application de ces normes. À cet effet, il convient que la convention définisse clairement et de façon équilibrée les droits et obligations respectifs des États du pavillon, des États du port et des États dans lesquels il est procédé au recyclage. Il faut rendre opérationnel le système proposé par l'OMI, c'est-à-dire créer un système au sein duquel les navires sont nécessairement démantelés d'une façon sûre et écologiquement rationnelle.

    Il est peu probable que le futur instrument juridique prévoie une obligation de décontamination du navire avant son dernier voyage, car le secteur des transports maritimes considère ce nettoyage préalable comme impraticable du point de vue sanitaire ou non rentable. Selon le projet de convention, l'élimination préalable des substances dangereuses n'est pas obligatoire si l'installation de recyclage choisie est parfaitement autorisée à gérer le type ou la quantité de substances dangereuses contenues dans le navire. Le projet (version de décembre 2006) vise à faire correspondre les exigences de chaque navire et les capacités du chantier de recyclage au moyen d'un plan de recyclage et d'un certificat international attestant que le navire est prêt pour le recyclage. Il reste toutefois à préciser que, si l'installation de recyclage finale n'est pas en mesure de gérer certaines substances dangereuses, le propriétaire du navire en fin de vie doit choisir un autre chantier ou faire procéder au préalable à l'enlèvement de ces substances en vue de leur élimination sans danger ou à leur récupération. Pour le moment, étant donné que le règlement relatif aux transferts de déchets dispose que les navires doivent être «convenablement vidés» de leurs substances dangereuses pour pouvoir être considérés comme déchets non dangereux, la Commission diligente une étude concernant les risques, les coûts et les avantages du nettoyage préalable. Les résultats devraient être disponibles à la fin du printemps 2007.

    La modification du règlement relatif aux transferts de déchets ou d'autres dispositions de la législation communautaire visées par la convention proposée ne fait pas partie des options envisagées actuellement. Il convient que cette législation communautaire reste en vigueur, et elle le restera vu qu'il n'est pas prévu d'y apporter des modifications avant que les règles internationales de l'OMI ne garantissent des normes aussi élevées. Il n'y a en particulier aucune raison de modifier le système instauré par la Convention de Bâle pour le contrôle des mouvements transfrontières de déchets, et d'accorder des dérogations aux navires en fin de vie, à moins qu'un nouveau régime international ne garantisse un niveau équivalent de contrôle de ces mouvements.

    Toutefois, pour renforcer le rôle de la Communauté dans les négociations de l'OMI relatives à une convention internationale sur le recyclage des navires, il convient:

    a) de définir un position communautaire et si possible de donner mandat à la Commission pour poursuivre la négociation de la convention OMI, sur le recyclage des navires en raison des retombées possibles sur la législation communautaire;

    b) de prévoir une clause relative aux organisations d'intégration économique régionale afin que la Communauté devienne partie à la convention sur le recyclage des navires;

    c) d'améliorer la coordination des positions des États membres de l'UE et de la Commission dans les négociations; la coopération est déjà satisfaisante mais elle doit être renforcée.

    Une fois adoptées, la convention et ses recommandations devront être transposées dans le droit communautaire afin de les rendre contraignantes pour les navires battant le pavillon d'un État membre de l'Union européenne ou entrant dans les eaux communautaires. Ce fut le cas pour de nombreuses conventions de l'OMI comme par exemple, la convention relative au système antisalissure, transposée dans le droit communautaire par le règlement (CE) n° 782/2003. C’est grâce à cette approche qui consiste à établir des règles communautaires fondées sur des instruments juridiques internationaux, que l'action de l'Union européenne en matière de transport maritime peut aujourd'hui tenir compte des spécificités du transport maritime international.

    Il se peut toutefois que la convention sur le recyclage des navires arrive trop tard pour résoudre le problème des navires à simple coque devant être définitivement retirés de la circulation, puisqu'il faut en moyenne six ans pour qu'une convention de l'OMI entre en vigueur et que le pic des retraits devrait se situer aux alentours de 2010. En conséquence, s'il convient de tout mettre en œuvre pour la convention entre en vigueur le plus tôt possible, il n'en reste pas moins que des solutions doivent être trouvées dans l'intervalle.

    3.3. Renforcer la capacité de déconstruction navale de l'Union européenne

    Comme indiqué au point 2.2, la capacité de déconstruction navale disponible dans l'Union européenneet dans d'autres pays de l'OCDE (en particulier la Turquie) est suffisante pour l'ensemble des navires de guerre et autres navires d'État qui seront désarmés au cours des 10 prochaines années, mais elle ne l'est pas pour les pétroliers et autres grands navires marchands battant pavillon d'un État membre de l'UE ou appartenant à des sociétés domiciliées dans l'UE, qui sont beaucoup plus nombreux. Cette situation ne va pas évoluer sensiblement, même une fois que les chantiers navals du Royaume-Uni qui ont demandé les licences nécessaires seront devenus opérationnels dans un proche avenir20. Même en comptant les installations de recyclage modernisées de Chine comme solution possible pour ces navires communautaires qui deviennent des déchets en dehors des eaux européennes, la capacité de démantèlement sûre et écologiquement rationnelle sera nettement déficitaire au cours des prochaines années.

    Cependant, la sous-utilisation des installations «vertes» ou modernisées existant dans l'Union européenne, en Turquie et en Chine indique que le problème du démantèlement des navires se situe davantage du côté de l'offre que de celui de la demande. En raison des conditions qui caractérisent les marchés actuellement, les exploitants de l'UE sont incapables de rivaliser avec les chantiers d'Asie du Sud qui ont des coûts bien moins élevés et achètent le métal bien plus cher. À moins que ne soient garanties des conditions égales pour tous, sous la forme de normes internationales contraignantes, rationnelles et efficaces, en matière de démantèlement des navires, les installations européennes auront du mal à rester compétitives sur le marché, et les armateurs auront tendance à envoyer leurs bateaux dans les sites asiatiques qui ne répondent pas aux mêmes critères de qualité.

    Face à cette situation, le Conseil de l'Union européenne a adopté une déclaration, le 17 mai 2006, faisant valoir que les États membres mettront tout mettre en œuvre pour accroître la capacité de démantèlement des navires de l'Union européenne. De plus, les États membres feront de leur mieux pour faire avancer les négociations internationales visant à établir des exigences obligatoires à l'échelle mondiale en matière de démantèlement des navires. Dans les conclusions du Conseil adoptées le 20 novembre 2006, avant la 8e conférence des parties à la Convention de Bâle, la Commission a été invitée à analyser les besoins de création d'une capacité suffisante de déconstruction des navires dans l'Union européenne.

    La recherche de solutions permettant de renforcer les capacités de démantèlement écologiquement rationnel des navires en général et celles des installations de l'Union européenne en particulier, afin de couvrir les besoins pendant la période transitoire jusqu'à l'instauration d'un nouveau régime international garantissant des conditions égales partout, doit être centrée dans un premier temps sur les navires d'État. Les gouvernements des États membres de l'Union européenne ont l'obligation particulière de se conformer à la législation communautaire et d'avoir une conduite exemplaire en ce qui concerne le démantèlement des navires de guerre et des autres vaisseaux qui sont propriété d'État. Dans le cas des navires de guerre, les États assument une responsabilité supplémentaire du fait de la proportion relativement élevée de substances dangereuses (en particulier d'amiante) se trouvant à bord des navires les plus vieux.

    Les gouvernements des États membres pourraient, à travers les marchés publics, susciter une offre de services «verts» de démantèlement et de nettoyage préalable des navires en fin de vie, en respectant des règles strictes d'adjudication autorisant exclusivement un démantèlement conforme à la législation en vigueur en matière de transferts de déchets, dans le respect de normes élevées de protection et de gestion de l'environnement. Davantage de transparence dans le déclassement des navires d'État, une meilleure coordination du calendrier et une harmonisation, à l'échelle de l'Union, des normes de qualité exigées par les gouvernements dans les contrats de démantèlement permettraient déjà d'améliorer la viabilité des installations de démantèlement européennes.

    Lorsque les États membres revendent leurs navires à d'autres pays ou à des sociétés commerciales, ils peuvent néanmoins conserver une certaine influence en incluant des dispositions relatives au démantèlement dans le contrat de vente, par exemple une clause exigeant le consentement préalable du gouvernement pour la destruction. La proposition de stratégie relative au recyclage des navires que le Royaume-Uni a publiée en mars 200621 prévoit de telles dispositions.

    Étant donné la taille beaucoup plus importante de la flotte marchande, les considérations économiques susmentionnées revêtent une importance capitale. Tant qu'un régime international contraignant ne sera pas parfaitement en place, et probablement même après son instauration, des mesures d'incitation très fortes seront nécessaires pour induire des changements dans les pratiques actuelles du secteur des transports maritimes. À plus long terme, il conviendrait de viser la mise en place d'un système de financement viable dans le cadre duquel les armateurs et éventuellement les autres bénéficiaires du transport maritime contribueraient au démantèlement sûr et écologiquement rationnel des navires partout dans le monde. Les modalités possibles d'un tel système sont examinées ci-après (3.6).

    Durant la période transitoire, les engagements volontaires relevant de la responsabilité sociale des entreprises pourront jouer un certain rôle et il conviendra de les encourager (voir point 3.5 ci–après). Les systèmes de prix et de certification en particulier peuvent aider à progresser.

    En outre, pour améliorer rapidement la situation actuelle, la question à se poser est de savoir s'il convient d'accorder une aide financière directe aux installations de démantèlement de l'UE qui sont respectueuses de l'environnement ou bien aux propriétaires qui envoient leurs navires dans les chantiers «verts» pour un démantèlement complet ou pour une décontamination . Ce type de soutien accordé aux installations innovantes pourrait indirectement réduire le nombre de navires qui sont démantelés dans des conditions inacceptables. On entrevoit toutefois aisément le risque que cela comporterait de mobiliser des sommes énormes sur une longue période sans créer d'activité industrielle durable, ainsi que le risque de subventions croisées au profit d'autres activités, en particulier dans le secteur de la construction navale où la concurrence est très forte. Indépendamment de ces considérations, le fait de subventionner directement les installations de démantèlement, et plus encore les armateurs, irait à l'encontre du principe du «pollueur payeur» inscrit dans le droit communautaire. C'est la raison pour laquelle, en toute logique, les règles en matière d'aides d'État accordent plutôt peu de place aux aides de ce type.

    L'actuel encadrement communautaire des aides d'État pour la protection de l'environnement22, qui définit le champ d'application de ces aides, porte sur certains services de gestion des déchets mais pas sur le démantèlement des navires en tant que tel. Pour le moment, c'est au cas par cas qu'il convient de déterminer si des subventions accordées à certaines activités telles que les investissements en faveur de l'innovation, l'élimination de l'amiante ou la participation d'une entreprise à des programmes de certification et de surveillance constituent des aides d'État telles que définies et autorisées par ce document. La politique européenne de cohésion, sous réserve que ses objectifs, ses règles et ses procédures soient respectés, peut également apporter un certain soutien aux chantiers navals, et notamment aux installations de recyclage.

    3.4. Assistance technologique, transfert de technologie et diffusion des meilleures pratiques en faveur des États assurant le recyclage

    En dépit de conditions de travail précaires et dangereuses et de la détérioration de l'environnement local, les chantiers de déconstruction navale sont importants du point de vue économique pour les pays d'Asie du Sud. Au Bangladesh, par exemple, 90 % de l'acier provient du démantèlement des navires et ce secteur emploie des dizaines de milliers de personnes.

    Pour encourager la mise à niveau des installations de ces pays, il sera nécessaire de leur apporter une assistance technique et de promouvoir une amélioration de la réglementation, ce que font déjà, à petite échelle, les organisations internationales, certains pays de l'OCDE et également la Commission. Les modalités de cette assistance technique et financière devront être réexaminées en étroite collaboration avec les pays concernés et les autres donateurs internationaux, dans le but d'encourager un démantèlement sûr et écologiquement rationnel des navires. L'Union européenne va prochainement négocier de nouveaux accords politiques ou économiques, ou actualiser des accords existants, avec plusieurs États qui assurent le recyclage, et le cas échéant, elle étudiera les possibilités d'amélioration des méthodes de travail et des normes environnementales.

    L'Union européenne jouit d'une grande expérience et dispose de capacités techniques considérables dans le domaine du démantèlement écologiquement rationnel des navires. De même, l'Union européenne peut partager son expérience et diffuser ses pratiques en ce qui concerne la gestion des risques liés à l'amiante, contribuant ainsi à élever les normes de protection et de sécurité dans les pays concernés.

    Au-delà de l'aspect technique, il faut cependant reconnaître que l'absence ou le non-respect de règles élémentaires de sécurité sur le lieu de travail et de protection de l'environnement est étroitement lié à la pauvreté structurelle et à d'autres problèmes sociaux et juridiques dans certaines régions d'Asie du Sud, comme par exemple, l'absence de droits de propriété et les baux souvent extrêmement courts qui sont accordés aux exploitants dans les zones côtières, la faiblesse des autorités chargées du contrôle de l'application de la réglementation et les pratiques gouvernementales critiquables. Pour induire un changement durable, il faudra que l'assistance s'inscrive dans un cadre plus vaste.

    3.5. Encourager les démarches spontanées

    Les navires marchands sont source de profits importants pour leurs propriétaires, sur une période d'exploitation relativement longue. Lorsqu'un navire devient un déchet à la fin de sa vie, son propriétaire, qui en règle générale est aussi celui qui a pris la décision d'envoyer le navire au déchirage et donc, le «producteur» du déchet, est le mieux placé pour s'assurer que l'élimination ou larécupération de ce déchet sont effectuées de manière sûre et écologiquement rationnelle. Un armateur qui se respecte ne devrait pas tolérer les pratiques actuelles de démantèlement qui mettent en danger la vie et la santé des travailleurs et qui polluent l'environnement.

    Des engagements volontaires de la part des armateurs, de leurs associations et de leurs clients pourraient constituer le moyen le plus simple et le plus rapide de faire évoluer les pratiques sur le terrain. La compagnie maritime P&O Nedlloyd (qui fait désormais partie du groupe Maersk), par exemple, a créé un partenariat avec des installations chinoises qui ont pu se mettre à niveau en matière de protection du personnel et de l'environnement grâce à l'assistance technique et à la formation dont elles ont bénéficié. L'organisation des propriétaires de pétroliers indépendants, Intertanko, a annoncé en septembre 2006 l'adoption d'une «stratégie provisoire» invitant les armateurs à ne faire appel qu'aux seules installations de recyclage ayant accompli des progrès démontrables en matière de sécurité et de gestion de l'environnement, tels que définis dans la partie C du projet de convention internationale.

    Dans une décision adoptée le 1er décembre 2006, la conférence des parties à la Convention de Bâle, a enjoint aux armateurs et autres parties prenantes de prendre toutes les mesures nécessaires pour que les navires en fin de vie soient démantelés de façon écologiquement rationnelle.

    Les accords volontaires peuvent se révéler efficaces lorsqu'ils sont bien conçus quant aufond et qu'ils prévoient des mécanismes clairs pour garantir la mise en œuvre des engagements pris par les parties prenantes du secteur privé, ainsi que des systèmes de surveillance et de contrôle. Ce type d'engagements constitue une première étape utile pour induire le changement. Il convient donc de les encourager explicitement et, si possible, de les soutenir par des incitations de la part de l'Union européenne et des États membres, après quoi, il conviendra d'en surveiller la mise en œuvre. S'il apparaît alors qu'un engagement n'est pas respecté dans la pratique, il sera peut-être malgré tout nécessaire de recourir à la législation.

    3.6. Fonds de démantèlement des navires

    A plus long terme surtout, il ne sera pas acceptable que les investissements en installations de démantèlement écologiquement rationnel en Europe ou en Asie soient financés sur des fonds publics. Le principe du «pollueur payeur» et celui de la responsabilité du producteur exigent que les propriétaires assument l'entière responsabilité de l'élimination en bonne et due forme. Un tel système de financement pourrait être organisé sur une base volontaire, sous la forme d'engagements de la part du secteur des transports maritimes en particulier, mais compte tenu de la concurrence très vive sur ce marché, il serait plus efficace d'instaurer ce système en tant qu'élément obligatoire du nouveau régime international sur le démantèlement des navires. L'OMI serait la mieux placée pour gérer ce fonds, à l'instar du fonds d'indemnisation pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures dans le cadre de la convention MARPOL. Pour éviter le changement de pavillon au profit d'États ne participant pas au fonds, il conviendrait de rattacher les cotisations à l'enregistrement à l'OMI ou à l'exploitation des navires sur toute leur durée de vie, par exemple, à travers les taxes portuaires ou les régimes d'assurance obligatoires. Ce lien avec la période d'exploitation du navire est également préférable à un versement au moment de la construction du navire, car souvent le chantier naval de construction n'existe plus au moment où le navire part au déchirage. Si la mise en place d'un fonds géré par l'OMI n'est pas possible, un système régional, pourrait être envisagé.

    3.7. Autres options

    Plusieurs autres mesures pourraient s'avérer utiles pour promouvoir la filière de démantèlement des navires à court et moyen termes:

    a) La législation communautaire, concernant en particulier les pétroliers à simple coque. Dans la mesure où ces pétroliers constitueront une grande partie des navires en fin de vie qui devront être démantelés ces prochaines années, il serait peut-être utile d'envisager de compléter la législation en vigueur en matière de sécurité maritime par des règles relatives au démantèlement sûr et écologiquement rationnel des navires.

    Certains États membres ont fait savoir qu'ils soutiendraient une telle proposition si la Commission en prenait l'initiative. L'inconvénient d'une telle réglementation, dans la mesure où les pétroliers à simple coque sont de toute façon interdits dans les ports de l'UE, est qu'elle s'adresserait principalement aux États du pavillon au sein de l'UE et qu'elle risquerait ainsi de déclencher une vague de changement de pavillon qui n'apporterait rien sur les plans de la sécurité et de l'environnement.

    Mis à part le cas spécifique des pétroliers, des mesures plus générales sont envisageables pour empêcher l'utilisation de matériaux dangereux dans la construction des nouveaux navires. La nouvelle législation REACH sur les produits chimiques récemment adoptée (règlement (CE) n° 1907/2006) constitue le cadre réglementaire relatif à l'utilisation des produits chimiques dangereux. L'opportunité de mesures supplémentaires, spécifiques d'autres substances employées dans la construction des navires, devra être décidée après une analyse d'impact approfondie.

    b) Rationalisation des aides au transport maritime, couplées au démantèlement écologique des navires. Il conviendrait de lier l'octroi des subventions communautaires et des aides d'État en faveur du transport maritime à l'utilisation par le bénéficiaire d'installations de démantèlement écologiques et sûres pour tous les navires dont il est responsable.

    c) Création d'un système de certification européen pour le démantèlement écologique des navires et de prix récompensant les pratiques de recyclage exemplaires. Il serait possible d'utiliser des systèmes de certification existants ou à adapter, comme EMAS, pour améliorer la gestion des installations de démantèlement des navires et conférer une visibilité à cette amélioration pour les clients et le public. La révision prévue du règlement EMAS pourrait ouvrir le système également aux sites hors UE et permettre ainsi aux exploitants intéressés, en Turquie par exemple, d'acquérir un certificat de gestion environnementale de valeur. Parallèlement, un système de label écologique ou de prix pour récompenser les pratiques préservant la santé humaine et la sécurité pourrait inciter les propriétaires de navires, les installations de recyclage et les autres parties prenantes à agir au plus tôt pour mettre en place des pratiques sûres et écologiques en matière de recyclage des navires. Les systèmes existants tels que le prix «Clean Marine» décerné aux compagnies maritimes ou le label «Green award» accordé aux ports pourraient servir d'exemple. En outre, un registre public des installations propres pourrait fournir des orientations aux propriétaires de navires.

    d) Intensification de la recherche internationale sur le démantèlement des navires. Au titre du sixième programme-cadre de recherche et développement, la Commission européenne subventionne actuellement un projet de recherche sur le sujet («SHIPDISMANTL»), qui examine les différentes options techniques sous l'angle de la coopération internationale. Dans ce cadre, les instituts de recherche et les chantiers de démolition de l'UE, de Turquie et d'Inde mettent au point des systèmes d'aide à la décision qui seront mis gratuitement à la disposition du secteur du démantèlement des navires partout dans le monde. Dans le premier appel de propositions du septième programme-cadre, publié récemment, le domaine de recherche concernant les stratégies de fin de vie pour les navires est clairement défini comme une priorité.

    Parallèlement et en plus des autres recherches directement entreprises par la Commission23, il serait utile de renforcer la coopération scientifique sous forme de partenariat entre équipes d'Europe et d'Asie afin d'analyser les différentes options et leurs implications dans une perspective globale incluant les aspects environnementaux, sociaux, économiques et institutionnels. Il serait alors possible de proposer des lignes de conduite scientifiquement fondées qui pourraient s'avérer utiles pour les différents intervenants sur le plan interne et dans les négociations internationales. Toutefois, il pourrait bien s'écouler plusieurs années avant que cette recherche ne débouche sur des résultats.

    4. CONCLUSION

    Le présent livre vert présente les données de base concernant le démantèlement des navires et expose les problèmes. Des informations plus détaillées figurent dans l'annexe. Pour avoir une idée plus précise de l'action requise au niveau de l'UE, nous invitons les États membres, les parties prenantes et le grand public à réfléchir aux questions suivantes.

    1. Comment améliorer le contrôle de l'application de la législation communautaire en vigueur (règlement sur le transfert des déchets) concernant les navires en fin de vie ? Quelle est la meilleure combinaison de mesures pour attirer les navires battant pavillon d'un État membre de l'UE ou appartenant à des armateurs domiciliés dans l'UE vers des sites de démantèlement respectant des normes élevées de sécurité des travailleurs et de protection de l'environnement ?

    2. Des orientations concernant les règles en matière de transferts de déchets et la définition des navires en fin de vie seraient-elles utiles pour améliorer l'application de la réglementation et les pratiques commerciales, et quelle forme ces orientations devraient-elles revêtir ?

    3. Quelle est la meilleure façon de mener les négociations en cours concernant la convention de l'OMI sur le recyclage des navires afin d'améliorer les pratiques de démantèlement partout dans le monde ?

    4. L'Union européenne doit elle viser, dans le cadre de la convention de l'OMI, l'adoption de normes internationales en matière de sécurité et de protection de l'environnement qui soient comparables aux normes communautaires ?

    5. Comment l'UE peut elle garantir au mieux que les navires européens seront démantelés de façon sûre et écologiquement rationnelle pendant la période transitoire avant que la convention OMI ne prenne effet ? Quid des navires qui sont la propriété du secteur public ? Les stratégies nationales et les engagements volontaires des propriétaires de navires seront-ils suffisants? Quelles seraient les mesures supplémentaires nécessaires au niveau de l'UE ?

    6. Convient-il que l'UE et ses États membres cherchent activement à accroître la capacité de recyclage des navires de l'Union européenne ? Convient-il d'utiliser les aides d'États et les fonds communautaires pour augmenter cette capacité et de quelle manière ?

    7. Quelles mesures et initiatives conviendrait-il que l'UE prenne pour encourager les pays d'Asie du Sud à adopter et à appliquer des normes plus exigeantes en matière de sécurité et de protection de l'environnement dans le domaine du démantèlement des navires ?

    8. Quelles mesures et initiatives conviendrait-il que l'UE prenne pour inciter les armateurs à envoyer leurs navires en fin de vie vers des sites de démantèlement appliquant des normes élevées de sécurité et de protection de l'environnement ?

    9. Quelles mesures et initiatives conviendrait-il que l'UE prenne afin d'assurer un financement durable, compatible avec le principe du pollueur payeur, pour le démantèlement écologiquement rationnel des navires ?

    Les contributions apportées dans le cadre de cette consultation sont à adresser à la Commission au plus tard le 30 septembre 2007 , par courrier électronique à «ship-dismantling@ec.europa.eu» ou par la poste à :

    Commission européenne

    Direction générale de l'environnement

    Unité G.4 «Production et consommation durables»

    B-1049 Bruxelles

    Le livre vert et les contributions reçues seront publiées sur le site internet de la Commission, sauf demande expresse des auteurs stipulant le contraire. Fin 2007, la Commission présentera son analyse des réponses reçues et, le cas échéant, ses propositions concernant une stratégie de l'UE sur le démantèlement des navires.

    [1] Les références se trouvent à la fin de l'annexe.

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