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Document 62021CO0221

Unionin tuomioistuimen määräys (yhdeksäs jaosto) 2.5.2022.
Správa železnic, státní organizace vastaan České dráhy a.s. ym. ja České dráhy a.s. vastaan Univerzita Pardubice ym.
Obvodní soud pro Prahu 1:n esittämä ennakkoratkaisupyyntö.
Ennakkoratkaisupyyntö – Unionin tuomioistuimen työjärjestyksen 53 artiklan 2 kohta – Rautatiekuljetukset – Direktiivi 2012/34/EY – Sääntelyelimen päätökset – 56 artiklan 10 kohta – Tuomioistuinvalvonta – Siviilituomioistuinten toimivaltaa koskeva kansallinen oikeus – Oikeussuojakeinot – Yhteensopivuus direktiivin 2012/34 kanssa – Ennakkoratkaisupyynnön tutkittavaksi ottamisen edellytysten selvä puuttuminen.
Yhdistetyt asiat C-221/21 ja C-222/21.

ECLI identifier: ECLI:EU:C:2022:342

ORDONNANCE DE LA COUR (neuvième chambre)

2 mai 2022 (*)

« Renvoi préjudiciel – Article 53, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour – Transports ferroviaires – Directive 2012/34/UE – Décisions de l’organisme de contrôle – Article 56, paragraphe 10 – Contrôle juridictionnel – Droit national prévoyant la compétence des juridictions civiles – Modalités du recours – Compatibilité avec la directive 2012/34 – Irrecevabilité manifeste de la demande de décision préjudicielle »

Dans les affaires jointes C‑221/21 et C‑222/21,

ayant pour objet des demandes de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduites par l’Obvodní soud pro Prahu 1 (tribunal d’arrondissement de Prague 1, République tchèque), par décisions du 22 septembre 2020 et du 1er octobre 2020, parvenues à la Cour, respectivement, le 26 et le 22 mars 2021, dans les procédures

Správa železnic, státní organizace

contre

České dráhy a.s.,

PKP Cargo International a.s.,

PDV Railway a.s.,

KŽC Doprava s.r.o. (C‑221/21),

et

České dráhy a.s.

contre

Univerzita Pardubice e.a. (C‑222/21)

LA COUR (neuvième chambre),

composée de M. S. Rodin, président de chambre, M. J.‑C. Bonichot (rapporteur) et Mme O. Spineanu‑Matei, juges,

avocat général : M. M. Campos Sánchez-Bordona,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

considérant les observations présentées :

–        pour Správa železnic, státní organizace, par M. J. Svoboda,

–        pour České dráhy a.s., par M. D. Heppner,

–        pour la Commission européenne, par MM. G. Wilms, J. Hradil et P. Messina ainsi que par Mme C. Vrignon, en qualité d’agents,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de statuer par voie d’ordonnance motivée, conformément à l’article 53, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour,

rend la présente

Ordonnance

1        Les demandes de décision préjudicielle portent sur l’interprétation des articles 55 à 57 de la directive 2012/34/UE du Parlement européen et du Conseil, du 21 novembre 2012, établissant un espace ferroviaire unique européen (JO 2012, L 343, p. 32).

2        Ces demandes ont été présentées dans le cadre de litiges opposant, dans l’affaire C‑221/21, Správa železnic, státní organizace, à České dráhy a.s., PKP Cargo International a.s., PDV Railway a.s. ainsi que KŽC Doprava, s.r.o. et, dans l’affaire C‑222/21, České dráhy a.s. à Univerzita Pardubice ainsi qu’à 103 autres parties, au sujet de décisions adoptées par l’Úřad pro přístup k dopravní infrastruktuře (Office pour l’accès aux infrastructures de transport, République tchèque, ci-après l’« Office »), puis confirmées par le předseda Úřadu (président de l’Office, République tchèque) en ce qui concerne la conformité des documents de référence du réseau publiés, dans la première affaire, par Správa železnic et, dans la seconde affaire, par České dráhy, en leur qualité de gestionnaires de l’infrastructure ferroviaire en République tchèque.

 Le cadre juridique

3        L’article 94 du règlement de procédure de la Cour dispose :

« Outre le texte des questions posées à la Cour à titre préjudiciel, la demande de décision préjudicielle contient :

a)      un exposé sommaire de l’objet du litige ainsi que des faits pertinents, tels qu’ils ont été constatés par la juridiction de renvoi ou, à tout le moins, un exposé des données factuelles sur lesquelles les questions sont fondées ;

b)      la teneur des dispositions nationales susceptibles de s’appliquer en l’espèce et, le cas échéant, la jurisprudence nationale pertinente ;

c)      l’exposé des raisons qui ont conduit la juridiction de renvoi à s’interroger sur l’interprétation ou la validité de certaines dispositions du droit de l’Union, ainsi que le lien qu’elle établit entre ces dispositions et la législation nationale applicable au litige au principal. »

4        L’article 56, paragraphe 10, de la directive 2012/34 prévoit :

« Les États membres veillent à ce que les décisions prises par l’organisme de contrôle soient soumises à un contrôle juridictionnel. Le recours ne peut avoir un effet suspensif sur la décision de l’organisme de contrôle que lorsque l’effet immédiat de ladite décision peut causer à la partie qui a formé le recours un préjudice irréparable ou manifestement excessif. Cette disposition est sans préjudice des compétences conférées, le cas échéant, par le droit constitutionnel à la juridiction saisie du recours. »

 Les litiges au principal, les questions préjudicielles et la procédure devant la Cour

5        Správa železnic et České dráhy sont deux entreprises gestionnaires de l’infrastructure ferroviaire en République tchèque. En cette qualité, ces entreprises ont publié des documents de référence du réseau, comportant des informations, notamment, relatives aux systèmes de tarification et de répartition des capacités ferroviaires.

6        Le document de référence du réseau publié par Správa železnic a été contesté par plusieurs entreprises devant l’organisme de contrôle tchèque, à savoir l’Office. En outre, ce dernier a procédé, d’office, à un examen du document de référence du réseau publié par České dráhy en ce qui concerne le système de tarification et la fixation des redevances d’infrastructure. Les décisions rendues au terme du contrôle de conformité de ces documents avec la réglementation applicable en matière ferroviaire, effectué sur la base de l’article 34e du zákon o drahách (loi sur les chemins de fer), ont fait l’objet des réclamations introduites par Správa železnic et České dráhy auprès du président de l’Office qui a rejeté ces réclamations.

7        Par requêtes introduites, respectivement, le 14 décembre 2018 et le 21 octobre 2019, Správa železnic et České dráhy ont formé un recours contre les décisions du président de l’Office devant la juridiction de renvoi, l’Obvodní soud pro Prahu 1 (tribunal d’arrondissement de Prague 1, République tchèque). Cette dernière est une juridiction civile notamment compétente, conformément au droit tchèque, pour contrôler les tarifs fixés dans les documents de référence du réseau. Par leurs requêtes respectives, ces deux entreprises demandent à la juridiction de renvoi, d’une part, d’annuler les décisions du président de l’Office et, d’autre part, de statuer sur le fond ainsi que de substituer ses propres décisions à celles prises par l’Office, conformément à l’article 250j du zákon č. 99/1963 Sb., občanský soudní řád (loi no 99/1963 établissant le code de procédure civile), tel que modifié ultérieurement (ci-après le « code de procédure civile »).

8        Le 22 juin 2020 dans l’affaire C‑221/21 et le 13 août 2020 dans l’affaire C‑222/21, l’Office qui, selon les informations figurant dans les demandes de décision préjudicielle, n’est pas partie aux procédures au principal, a fait parvenir à la juridiction de renvoi un document lui suggérant de saisir la Cour d’une demande de décision préjudicielle. Dans ces documents, qui ont été versés aux dossiers dont dispose la Cour, l’Office, d’une part, expose les raisons pour lesquelles il considère que le système de contrôle juridictionnel établi par le droit tchèque est contraire à la directive 2012/34 et, d’autre part, propose un libellé de questions préjudicielles à cet égard.

9        Par courriels des 2 et 3 mars 2021, s’agissant respectivement des affaires C‑222/21 et C‑221/21, la juridiction de renvoi a, dans un premier temps, transmis à la Cour le texte même des questions proposées par l’Office. Le 4 mars 2021, le greffe de la Cour a adressé une réponse à la juridiction de renvoi dans chacune de ces deux affaires en lui indiquant, d’une part, que la Cour ne pouvait pas être saisie d’une demande de décision préjudicielle par courriel et, d’autre part, que les questions posées à la Cour par une juridiction nationale devaient être motivées. Par courrier postal du 26 mars 2021 dans l’affaire C‑221/21 et du 22 mars 2021 dans l’affaire C‑222/21, la juridiction de renvoi a renvoyé, dans un deuxième temps, lesdites questions à la Cour. Enfin, dans un troisième temps, le 6 avril 2021, cette juridiction a fait parvenir à la Cour, pour chacune des affaires jointes, un document censé motiver ces mêmes questions, mais dans lequel elle se borne toutefois à reproduire purement et simplement l’argumentation développée par l’Office.

10      Il ressort, en substance, de cette argumentation de l’Office que le système de contrôle juridictionnel prévu par le droit tchèque et, en particulier, le rôle des juridictions civiles, serait contraire à l’objectif de l’unité du contrôle effectué par l’organisme de contrôle ferroviaire, conformément à l’article 55, paragraphe 1, de la directive 2012/34.

11      L’Office relève que, en République tchèque, 86 juridictions sont, en principe, matériellement compétentes pour connaître des recours contre ses décisions. Leur compétence territoriale serait déterminée en fonction du lieu du siège des parties à la procédure.

12      Dans certains cas, les juridictions administratives seraient compétentes pour statuer sur les décisions de l’Office, notamment lorsque ce dernier constate une infraction, par le gestionnaire de l’infrastructure, aux règles régissant les redevances ferroviaires. Toutefois, les juridictions civiles demeureraient compétentes pour examiner la compatibilité des redevances en cause avec ces mêmes règles. Les procédures devant ces deux types de juridiction ne seraient pas coordonnées.

13      Il existerait donc, en premier lieu, un risque d’incompatibilité entre les décisions rendues par les différentes juridictions nationales compétentes et de divergence dans la pratique de régulation du secteur ferroviaire.

14      En deuxième lieu, l’Office considère que, contrairement aux exigences qui découlent de l’article 56, paragraphe 10, de la directive 2012/34, les juridictions civiles nationales ne procèdent pas à un contrôle juridictionnel de ses décisions.

15      En effet, les règles de procédure civile nationales applicables prévoiraient que ces juridictions réexaminent l’affaire ayant fait l’objet de la décision de l’Office, sans avoir égard à cette dernière. En outre, en vertu de ces règles, après l’annulation des décisions de l’Office, lesdites juridictions ne pourraient pas lui renvoyer les affaires pour décision. Ainsi, sauf en cas de rejet du recours, les juridictions civiles adopteraient des décisions qui se substitueraient à celles de l’Office. Elles statueraient donc en lieu et place de l’Office et, partant, agiraient en tant qu’autorité de décision, ce que le Nejvyšší správní soud (Cour administrative suprême, République tchèque) aurait confirmé par un arrêt du 21 juin 2007.

16      En troisième lieu, l’Office estime que les règles de procédure civile nationales applicables sont incompatibles avec le caractère obligatoire et contraignant du contrôle que doit effectuer l’organisme de contrôle, conformément à l’article 56 de la directive 2012/34.

17      En effet, l’Office n’aurait pas la qualité de partie dans le cadre de la procédure civile et, en vertu de l’article 158 du code de procédure civile, les décisions adoptées par les juridictions civiles ne seraient signifiées qu’aux seules parties, ce qui limiterait sa possibilité de défendre ses propres décisions.

18      En outre, les règles de procédure civile nationales permettraient à l’entreprise ferroviaire et au gestionnaire de l’infrastructure ferroviaire concernés de s’accorder sur l’issue du litige soit par la non-comparution des parties défenderesses, soit par la conclusion d’une transaction, étant entendu que l’accord entre les parties devrait être approuvé par le juge, conformément à l’article 99 du code de procédure civile. Les parties au litige pourraient, de la sorte, modifier les conditions légales dans lesquelles s’exerce l’activité de régulation du secteur ferroviaire et altérer la portée des décisions de l’Office, voire contourner ces dernières qui auraient pourtant un caractère contraignant. Cela violerait non seulement le principe de protection de la partie contractante plus faible, mais également l’article 56, paragraphe 6, de la directive 2012/34 dont il découlerait que les négociations concernant le niveau des redevances d’infrastructure ne seraient autorisées que si elles ont lieu sous l’égide de l’organisme de contrôle.

19      En quatrième et dernier lieu, l’Office fait valoir que la directive 2012/34 s’oppose à ce que les juridictions civiles substituent leurs décisions à celles de l’Office, notamment au motif qu’elles ne disposent pas de certaines compétences et prérogatives qui sont indispensables pour la prise de décision de l’organisme de contrôle.

20      Ainsi, contrairement aux exigences qui découleraient, respectivement, de l’article 56, paragraphes 2 et 12, de cette directive, les juridictions civiles ne seraient pas habilitées à assurer le suivi de la situation de la concurrence sur les marchés des services ferroviaires ou à effectuer ou à commander des audits auprès les acteurs du secteur. En outre, contrairement à ce que prévoirait le paragraphe 6 du même article, les règles de procédure civile nationales ne permettraient pas de garantir que les négociations concernant le niveau des redevances d’infrastructure ont lieu sous l’égide de l’organisme de contrôle. Enfin, les juridictions civiles ne pourraient pas coopérer avec les organismes de contrôle des autres États membres à des fins d’assistance mutuelle lors du traitement des plaintes, contrairement à ce que prévoirait l’article 57, paragraphe 2, de la directive 2012/34.

21      Par ailleurs, l’Office estime que l’enseignement qui se dégage de l’arrêt du 9 novembre 2017, CTL Logistics (C‑489/15, EU:C:2017:834), est pleinement transposable aux affaires jointes.

22      Enfin, selon l’Office, les juridictions administratives tchèques répondent pleinement aux exigences découlant de l’article 56, paragraphe 10, de la directive 2012/34 en ce qui concerne le contrôle juridictionnel des décisions de l’organisme de contrôle. En effet, une seule juridiction administrative serait compétente pour connaître des recours contre les décisions de l’Office. En outre, le soudní řád správní (code de justice administrative) prévoirait une procédure de cassation, permettant l’annulation des décisions de l’Office pour illégalité ou vice de procédure. L’Office serait lié par les motifs d’annulation lorsqu’il statue une nouvelle fois sur l’affaire.

23      Pour le surplus, la juridiction de renvoi indique qu’il y a lieu de se référer aux dossiers qu’elle a transmis à la Cour.

24      C’est dans ces circonstances que l’Obvodní soud pro Prahu 1 (tribunal d’arrondissement de Prague 1) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour, dans l’affaire C‑221/21, les questions préjudicielles suivantes :

« 1)      La réglementation nationale prévue à la cinquième partie [du code de la procédure civile] satisfait-elle aux exigences relatives au contrôle juridictionnel des décisions de l’organisme de contrôle en vertu de l’article 56, paragraphe 10, de la directive [2012/34] ?

2)      En cas de réponse affirmative à la première question, l’article 56, paragraphe 10, de la directive 2012/34 peut-il être interprété en ce sens que le contrôle juridictionnel d’une décision de l’organisme de contrôle peut être clôturé par une transaction judiciaire au titre de l’article 99 [du code de procédure civile] ?

3)      En cas de réponse affirmative à la première question, les exigences relatives à l’institution d’un organisme de contrôle national unique du secteur ferroviaire en vertu de l’article 55, paragraphe 1, [de la directive 2012/34], celles relatives aux fonctions de l’organisme de contrôle en vertu de l’article 56, paragraphes 2, 6, 11 et 12, [de cette directive] ainsi que celles relatives à la coopération des organismes de contrôle en vertu de l’article 57, paragraphe 2, de la [même directive] permettent-elles que se substituent, au fond, à des décisions de l’organisme de contrôle des décisions de juridictions de droit commun, qui ne sont pas liées par les faits, tels qu’ils ont été constatés par l’organisme de contrôle ? »

25      Les première et troisième questions dans les affaires C‑221/21 et C‑222/21 sont identiques. Aux termes de la deuxième question dans l’affaire C‑222/21 :

« En cas de réponse affirmative à la première question, le fait que puissent se substituer à des décisions de l’organisme de contrôle des décisions de juridictions de droit commun, rendues au fond sur la question du niveau des redevances d’utilisation de l’infrastructure, dans des procédures auxquelles participent des candidats [à l’attribution de capacités] et le gestionnaire de l’infrastructure et qui excluent la participation de l’organisme de contrôle est-il compatible avec l’article 56, paragraphe 6, de la directive 2012/34 ? »

26      Par décision du président de la Cour du 18 mai 2021, les affaires C‑221/21 et C‑222/21 ont été jointes aux fins des procédures écrite et orale ainsi que de l’arrêt.

 Sur la recevabilité des demandes de décision préjudicielle

27      En vertu de l’article 53, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour, lorsqu’une demande de décision préjudicielle est manifestement irrecevable, la Cour, l’avocat général entendu, peut à tout moment décider de statuer par voie d’ordonnance motivée, sans poursuivre la procédure.

28      Il y a lieu de faire application de cette disposition dans les présentes affaires jointes.

29      Selon une jurisprudence constante de la Cour, la procédure instituée à l’article 267 TFUE est un instrument de coopération entre la Cour et les juridictions nationales grâce auquel la première fournit aux secondes les éléments d’interprétation du droit de l’Union qui leur sont nécessaires pour la solution du litige qu’elles sont appelées à trancher. Dans le cadre de cette coopération, il appartient à la juridiction nationale saisie du litige au principal, qui seule possède une connaissance précise des faits à l’origine de celui-ci et qui doit assumer la responsabilité de la décision juridictionnelle à intervenir d’apprécier tant la nécessité d’une décision préjudicielle pour être en mesure de rendre son jugement que la pertinence des questions qu’elle pose à la Cour. En conséquence, dès lors que les questions posées portent sur l’interprétation du droit de l’Union, la Cour est, en principe, tenue de statuer (ordonnance du 10 janvier 2022, ZI et TQ, C‑437/20, non publiée, EU:C:2022:53, point 16 et jurisprudence citée).

30      Cela étant, la Cour ne saurait statuer sur une question préjudicielle lorsqu’elle ne dispose pas des éléments de fait ou de droit nécessaires pour répondre de façon utile aux questions qui lui sont posées (ordonnance du 10 janvier 2022, ZI et TQ, C‑437/20, non publiée, EU:C:2022:53, point 17).

31      En outre, selon une jurisprudence constante, dans le cadre de la coopération entre la Cour et les juridictions nationales, la nécessité de parvenir à une interprétation du droit de l’Union qui soit utile pour le juge national exige que celui-ci respecte scrupuleusement les exigences concernant le contenu d’une demande de décision préjudicielle et figurant de manière explicite à l’article 94 du règlement de procédure (ordonnance du 10 janvier 2022, ZI et TQ, C‑437/20, non publiée, EU:C:2022:53, point 18 et jurisprudence citée).

32      Aux termes de l’article 94, sous b), du règlement de procédure, la demande de décision préjudicielle doit contenir la teneur des dispositions nationales susceptibles de s’appliquer en l’espèce et, le cas échéant, la jurisprudence nationale pertinente.

33      Ces exigences sont également reflétées dans les recommandations de la Cour de justice de l’Union européenne à l’attention des juridictions nationales, relatives à l’introduction de procédures préjudicielles (JO 2018, C 257, p. 1). Il ressort, notamment, du point 15 de ces recommandations qu’une demande de décision préjudicielle doit contenir « la teneur des dispositions nationales susceptibles de s’appliquer en l’espèce et, le cas échéant, la jurisprudence nationale pertinente ». En outre, il ressort du point 16 desdites recommandations que « la juridiction de renvoi doit fournir les références précises des dispositions nationales applicables aux faits du litige au principal » (ordonnance du 10 janvier 2022, ZI et TQ, C‑437/20, non publiée, EU:C:2022:53, point 20).

34      Par ailleurs, les informations contenues dans les demandes de décision préjudicielle servent non seulement à permettre à la Cour de fournir des réponses utiles à la juridiction de renvoi, mais également à donner aux gouvernements des États membres ainsi qu’aux autres intéressés la possibilité de présenter des observations conformément à l’article 23 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne. Il incombe à la Cour de veiller à ce que cette possibilité soit sauvegardée, compte tenu du fait que, en vertu de cette disposition, seules les décisions de renvoi sont notifiées aux intéressés (ordonnance du 10 janvier 2022, ZI et TQ, C‑437/20, non publiée, EU:C:2022:53, point 21).

35      En l’occurrence, la juridiction de renvoi interroge la Cour sur la conformité, avec le droit de l’Union, du droit national qui, d’une part, permet d’établir si une juridiction administrative ou civile est compétente pour statuer sur un recours contre une décision de l’organisme de contrôle ferroviaire tchèque et, d’autre part, régit les modalités de procédure s’appliquant aux juridictions civiles.

36      S’il ne peut être exclu que les questions préjudicielles présentent un intérêt pour la résolution des litiges au principal, la juridiction de renvoi n’a cependant pas apporté les éléments nécessaires à la compréhension de l’ensemble de la réglementation nationale pertinente susceptible de s’appliquer à ces litiges. En particulier, contrairement à ce qu’exige l’article 94, sous b), du règlement de procédure et à ce qu’indiquent les points 15 et 16 des recommandations de la Cour de justice de l’Union européenne à l’attention des juridictions nationales, relatives à l’introduction de procédures préjudicielles, cette juridiction n’a pas fourni les références précises des dispositions nationales applicables, pas plus qu’elle n’en a expliqué la teneur précise (voir, par analogie, ordonnances du 10 janvier 2022, ZI et TQ, C‑437/20, non publiée, EU:C:2022:53, point 25, et du 21 février 2022, Leonardo, C‑550/21, non publiée, EU:C:2022:139, point 17).

37      En effet, dans chacune des affaires jointes, la juridiction de renvoi s’est bornée à recopier et à transmettre à la Cour une synthèse sommaire et lacunaire du droit national applicable qui, au surplus, lui a été fournie par un tiers à la procédure menée devant elle, à savoir l’Office. Si cette synthèse vise, de manière globale, la cinquième partie du code de la procédure civile, elle ne comporte pas, sous réserve de trois exceptions, de référence aux dispositions de ce code. Outre ces trois dispositions qui ont été expressément mentionnées, les demandes de décision préjudicielle ne se réfèrent qu’aux articles 33 et 34e de la loi sur les chemins de fer ainsi que, de manière globale, au code de justice administrative. Or, ni ces dispositions de la loi sur les chemins de fer ni celles de ce dernier code ne sont visées par les questions préjudicielles. Par ailleurs, aucune des dispositions mentionnées dans les demandes de décision préjudicielle n’a été reproduite par la juridiction de renvoi.

38      Par ailleurs, un exposé suffisamment précis du droit national applicable est d’autant plus nécessaire dans une situation telle que celle en cause dans les litiges au principal, dans laquelle le droit de l’Union visé par les questions préjudicielles, à savoir les articles 55, 56 et 57 de la directive 2012/34, laisse aux États membres le soin d’organiser un système de recours et, notamment, la répartition des compétences des juridictions nationales ainsi que les modalités procédurales applicables devant ces juridictions, sous réserve de ce qui est prévu à l’article 56, paragraphe 10, de cette directive. Or cette dernière disposition se borne à prévoir que les États membres veillent à ce que les décisions prises par l’organisme de contrôle soient soumises à un contrôle juridictionnel et que, en principe, le recours prévu à cette fin ne peut avoir un effet suspensif sur la décision de cet organisme (voir, par analogie, ordonnance du 28 octobre 2020, Repsol Comercial de Productos Petrolíferos, C‑716/19, non publiée, EU:C:2020:870, point 24).

39      Dans ces conditions, il n’est pas possible de déterminer, à partir des indications fournies par la juridiction de renvoi dans ses demandes de décision préjudicielle, ni la nécessité des questions posées pour la résolution du litige au principal ni si le droit de l’Union doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à la réglementation nationale applicable.

40      Par conséquent, en application de l’article 53, paragraphe 2, du règlement de procédure, les présentes demandes de décision préjudicielle doivent être déclarées manifestement irrecevables.

41      Il convient cependant de rappeler que la juridiction de renvoi conserve la faculté de soumettre une nouvelle demande de décision préjudicielle en fournissant à la Cour l’ensemble des éléments permettant à celle-ci de statuer (voir, en ce sens, arrêt du 11 septembre 2019, Călin, C‑676/17, EU:C:2019:700, point 41 et jurisprudence citée).

 Sur les dépens

42      La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autre que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

Par ces motifs, la Cour (neuvième chambre) dit pour droit :

Les demandes de décision préjudicielle introduites par l’Obvodní soud pro Prahu 1 (tribunal d’arrondissement de Prague 1, République tchèque), par décisions du 22 septembre 2020 et du 1er octobre 2020, sont manifestement irrecevables.

Signatures


*      Langue de procédure : le tchèque.

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