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Document 62011CJ0074
Judgment of the Court (Fourth Chamber) of 25 April 2013.#European Commission v Republic of Finland.#Failure of a Member State to fulfil obligations — Taxation — Directive 2006/112/EC — Articles 9 and 11 — National legislation permitting the inclusion of non-taxable persons in a group of persons which can be regarded as a single taxable person for VAT purposes and restricting the possibility of forming such a group to the financial and insurance sector.#Case C‑74/11.
Euroopa Kohtu (neljas koda) 25.4.2013. aasta otsus.
Euroopa Komisjon versus Soome Vabariik.
Liikmesriigi kohustuste rikkumine – Maksustamine – Direktiiv 2006/112/EÜ – Artiklid 9 ja 11 – Siseriiklikud õigusnormid, mis lubavad mittemaksukohustuslastel kuuluda isikute gruppi, mida võib pidada üheks käibemaksukohustuslaseks, ja näevad ette piirangu, mille kohaselt grupi võivad moodustada ainult finants‑ ja kindlustusteenuse pakkujaid.
Kohtuasi C‑74/11.
Euroopa Kohtu (neljas koda) 25.4.2013. aasta otsus.
Euroopa Komisjon versus Soome Vabariik.
Liikmesriigi kohustuste rikkumine – Maksustamine – Direktiiv 2006/112/EÜ – Artiklid 9 ja 11 – Siseriiklikud õigusnormid, mis lubavad mittemaksukohustuslastel kuuluda isikute gruppi, mida võib pidada üheks käibemaksukohustuslaseks, ja näevad ette piirangu, mille kohaselt grupi võivad moodustada ainult finants‑ ja kindlustusteenuse pakkujaid.
Kohtuasi C‑74/11.
ECLI identifier: ECLI:EU:C:2013:266
ARRÊT DE LA COUR (quatrième chambre)
25 avril 2013 (*)
«Manquement d’État – Fiscalité – Directive 2006/112/CE – Articles 9 et 11 – Législation nationale permettant l’inclusion de personnes non assujetties dans un groupe de personnes pouvant être considérées comme un seul assujetti à la TVA et limitant aux entreprises du secteur financier et des assurances la possibilité de former un tel groupe»
Dans l’affaire C‑74/11,
ayant pour objet un recours en manquement au titre de l’article 258 TFUE, introduit le 21 février 2011,
Commission européenne, représentée par MM. I. Koskinen, D. Triantafyllou et R. Lyal, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg,
partie requérante,
contre
République de Finlande, représentée par Mme H. Leppo ainsi que par MM. J. Heliskoski et S. Hartikainen, en qualité d’agents,
partie défenderesse,
soutenue par:
République tchèque, représentée par MM. M. Smolek et T. Müller, en qualité d’agents,
Royaume de Danemark, représenté par M. C. Vang, en qualité d’agent,
Irlande, représentée par M. D. O’Hagan, en qualité d’agent, assisté de Mme G. Clohessy, SC, et de M. N. Travers, BL, ayant élu domicile à Luxembourg,
Royaume de Suède, représenté par Mmes A. Falk et S. Johannesson, en qualité d’agents,
Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord, représenté par Mme H. Walker, en qualité d’agent, assistée de Mme M. Hall, QC,
parties intervenantes,
LA COUR (quatrième chambre),
composée de M. L. Bay Larsen, faisant fonction de président de la quatrième chambre, M. J.‑C. Bonichot, Mmes C. Toader, A. Prechal et M. E. Jarašiūnas (rapporteur), juges,
avocat général: M. N. Jääskinen,
greffier: Mme C. Strömholm, administrateur,
vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 6 septembre 2012,
vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,
rend le présent
Arrêt
1 Par sa requête, la Commission européenne demande à la Cour de constater que, en autorisant les non-assujettis à intégrer un groupe de personnes considérées comme étant un seul assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée (ci-après, respectivement, un «groupe TVA» et la «TVA») et en limitant aux prestataires de services financiers et de services d’assurance la possibilité de former un groupe TVA, la République de Finlande a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 9 et 11 de la directive 2006/112/CE du Conseil, du 28 novembre 2006, relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée (JO L 347, p. 1, ci-après la «directive TVA»).
Le cadre juridique
Le droit de l’Union
2 Sous le titre III de la directive TVA, intitulé «Assujettis», figurent les articles 9 à 13 de cette directive.
3 Aux termes de l’article 9 de ladite directive:
«1. Est considéré comme ‘assujetti’ quiconque exerce, d’une façon indépendante et quel qu’en soit le lieu, une activité économique, quels que soient les buts ou les résultats de cette activité.
Est considérée comme ‘activité économique’ toute activité de producteur, de commerçant ou de prestataire de services, y compris les activités extractives, agricoles et celles des professions libérales ou assimilées. Est en particulier considérée comme activité économique, l’exploitation d’un bien corporel ou incorporel en vue d’en tirer des recettes ayant un caractère de permanence.
2. Outre les personnes visées au paragraphe 1, est considérée comme un assujetti toute personne qui effectue à titre occasionnel la livraison d’un moyen de transport neuf expédié ou transporté à destination de l’acquéreur par le vendeur, par l’acquéreur ou pour leur compte, en dehors du territoire d’un État membre mais dans le territoire de la Communauté.»
4 L’article 10 de la même directive précise que la condition que l’activité économique soit exercée d’une façon indépendante exclut de la taxation des salariés et autres personnes dans la mesure où ils sont liés à leur employeur par un contrat de louage de travail ou par tout autre rapport juridique créant des liens de subordination en ce qui concerne les conditions de travail et de rémunération et la responsabilité de l’employeur.
5 L’article 11 de la directive TVA dispose:
«Après consultation du comité consultatif de la [TVA], chaque État membre peut considérer comme un seul assujetti les personnes établies sur le territoire de ce même État membre qui sont indépendantes du point de vue juridique mais qui sont étroitement liées entre elles sur les plans financier, économique et de l’organisation.
Un État membre qui fait usage de la faculté prévue au premier alinéa peut prendre toutes mesures utiles pour éviter que l’application de cette disposition rende la fraude ou l’évasion fiscales possibles.»
6 L’article 12 de ladite directive prévoit que les États membres peuvent considérer comme assujetti quiconque effectue, à titre occasionnel, une opération relevant des activités visées à l’article 9, paragraphe 1, second alinéa, de la même directive, et notamment la livraison d’un bâtiment ou d’un terrain à bâtir.
7 Selon l’article 13 de la directive TVA, les régions, les départements, les communes et les autres organismes de droit public ne sont pas, en principe, considérés comme des assujettis pour les activités ou les opérations qu’ils accomplissent en tant qu’autorités publiques.
Le droit finlandais
8 Aux termes de l’article 13 bis de la loi 1501/1993 relative à la taxe sur la valeur ajoutée [arvonlisäverolain (1501/1993), ci-après la «loi relative à la TVA»]:
«Le Bureau régional des impôts peut décider, sur demande d’au moins deux opérateurs économiques, que ceux-ci sont, aux fins de la présente loi, considérés comme un seul opérateur économique (c’est-à-dire comme un groupe [TVA]). Lesdits opérateurs économiques doivent être domiciliés ou avoir un établissement stable en Finlande.
Seuls peuvent être membres d’un groupe [TVA]:
1) les opérateurs économiques vendant essentiellement les services financiers visés à l’article 41 ou les services d’assurance visés à l’article 44, paragraphe 1;
2) les sociétés holdings visées à l’article 15 de la loi 121/2007 relative aux établissements de crédit ou la société mère d’un groupe d’assurance visé au chapitre 3, article 1er, paragraphe 2, du règlement 1339/1997 sur la comptabilité;
3) les opérateurs économiques au sein desquels les opérateurs économiques visés aux points 1 ou 2 disposent du pouvoir de contrôle visé au chapitre 1, article 5 ou article 6, paragraphe 2, de la loi 1336/1997 sur la comptabilité;
4) les opérateurs économiques au sein desquels les opérateurs économiques visés aux points 1 à 3 sont conjointement en mesure de faire usage du pouvoir de contrôle correspondant au pouvoir visé au chapitre 1, article 5 ou article 6, paragraphe 2, de la loi sur la comptabilité et les opérateurs économiques soumis au pouvoir de contrôle des opérateurs économiques précités de la manière visée au point 3.
Ladite demande n’est approuvée que si les opérateurs économiques sont étroitement liés entre eux sur les plans financier, économique et de l’organisation.
Un opérateur économique ne peut appartenir qu’à un seul groupe [TVA].
Nonobstant le paragraphe 1, les dispositions de la présente loi relatives aux factures s’appliquent individuellement à chaque opérateur économique.»
La procédure précontentieuse et la procédure devant la Cour
9 Le 23 septembre 2008, la Commission a adressé à la République de Finlande une lettre de mise en demeure dans laquelle elle attirait l’attention de cet État membre sur la possible incompatibilité, avec les articles 9 et 11 de la directive TVA, de la loi relative à la TVA qui, d’une part, n’établit pas de distinction selon qu’un membre d’un groupe TVA ou une personne demandant son adhésion à un tel groupe est ou non assujetti et, d’autre part, limite l’application du régime relatif aux groupes TVA aux prestataires de services financiers et de services d’assurance. Conformément à l’article 226 CE, elle invitait cet État membre à présenter ses observations.
10 Dans leur lettre en réponse du 17 novembre 2008, les autorités finlandaises ont contesté l’interprétation de l’article 11 de la directive TVA effectuée par la Commission.
11 N’étant pas satisfaite de cette réponse, la Commission a émis, le 20 novembre 2009, un avis motivé, auquel la République de Finlande a répondu, par une lettre du 19 janvier 2010, en s’opposant aux allégations de la Commission et en faisant valoir que les dispositions de la loi relative à la TVA étaient conformes aux articles 9 et 11 de la directive TVA.
12 C’est dans ces conditions que la Commission a décidé d’introduire le présent recours.
13 Par ordonnance du président de la Cour du 4 juillet 2011, la République tchèque, le Royaume de Danemark, l’Irlande, le Royaume de Suède ainsi que le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord ont été admis à intervenir au soutien des conclusions de la République de Finlande.
Sur le recours
Sur le grief relatif à l’inclusion de personnes non assujetties dans un groupe TVA
Argumentation des parties
14 À l’appui de son recours, la Commission soutient que l’article 11 de la directive TVA doit être interprété en ce sens que des personnes non assujetties à la TVA ne peuvent être incluses dans un groupe TVA.
15 Elle estime, en effet, que le terme «personnes» figurant à l’article 11 de la directive TVA ne vise que des personnes remplissant les conditions requises pour être considérées comme des assujettis. Elle observe, à cet égard, que l’article 11 de la directive TVA figure sous le titre III de ladite directive, intitulé «Assujettis», et qu’il ne comporte pas de dérogation à l’article 9 de celle-ci définissant l’«assujetti» comme étant «quiconque exerce, d’une façon indépendante, [...] une activité économique».
16 L’article 11 de la directive TVA constituerait une exception à la règle générale selon laquelle chaque assujetti doit être traité comme une entité distincte pour l’application des règles relatives à la TVA. Cette disposition devrait donc être interprétée de façon à ce qu’elle ne diverge pas de la règle générale dans une mesure plus large que ce qui est nécessaire. Or, si ladite disposition ne prévoit pas expressément que les membres d’un groupe TVA doivent être des personnes assujetties, le fait que les personnes composant un tel groupe doivent être traitées comme «un seul assujetti» impliquerait néanmoins que chaque membre de ce groupe doit être lui-même assujetti. De même, le concept de «groupement» supposerait que les personnes concernées appartiennent à la même catégorie aux fins du système commun de la TVA. Le terme «personnes» n’aurait donc été utilisé que pour éviter la répétition du mot «assujetti».
17 D’ailleurs, selon la Commission, si le terme «personnes» devait être compris comme se référant à toute personne sans restriction, un groupe TVA pourrait être entièrement composé de personnes non assujetties, ce qui serait contraire à la directive TVA.
18 L’interprétation qu’elle fait de l’article 11 de la directive TVA serait en outre conforme à la finalité de celui-ci, qui est, ainsi que cela ressortirait de l’exposé des motifs de la proposition de la Commission [COM(73) 950 final] ayant conduit à l’adoption de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d’harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d’affaires – Système commun de taxe sur la valeur ajoutée: assiette uniforme (JO L 145, p. 1, ci-après la «sixième directive»), d’une part, de permettre une simplification administrative pour les contribuables et l’administration fiscale ainsi que, d’autre part, d’éviter les abus en empêchant que des personnes qui ne sont pas réellement des entités commerciales indépendantes soient traitées comme des assujettis distincts. En effet, l’inclusion de personnes non assujetties dans un groupe TVA ne permettrait ni une simplification administrative ni la prévention des abus.
19 Ni le libellé de l’article 11 de la directive TVA ni les travaux préparatoires de celle-ci n’indiqueraient que cette disposition était destinée à modifier la notion d’«assujetti» ou à étendre à d’autres personnes les droits et les obligations des assujettis. Or, tel serait le résultat, selon la Commission, si des personnes non assujetties pouvaient intégrer un groupe TVA. En particulier, comme les acquisitions effectuées au sein d’un groupe TVA sont considérées comme inexistantes du point de vue de la TVA, cela permettrait de livrer des biens ou de fournir des services à des personnes non assujetties sans facturer de TVA et, pour le groupe en cause, de récupérer la TVA acquittée en amont sur les livraisons effectuées à de telles personnes, ce qui serait clairement contraire au système commun de la TVA.
20 Il conviendrait, par conséquent, de ne pas s’en tenir à une interprétation littérale de l’article 11 de la directive TVA, mais de lire celui-ci à la lumière de son contexte, à savoir le titre III de cette directive, et, plus généralement, de l’économie de ladite directive.
21 Bien que la Cour n’ait pas encore eu l’occasion de statuer sur la question soulevée en l’espèce, un soutien indirect à la position de la Commission se trouverait au point 19 de l’arrêt du 22 mai 2008, Ampliscientifica et Amplifin (C‑162/07, Rec. p. I‑4019), ainsi que dans les conclusions de l’avocat général Van Gerven dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 20 juin 1991, Polysar Investments Netherlands (C‑60/90, Rec. p. I‑3111).
22 La République de Finlande conteste le grief relatif à l’inclusion de personnes non assujetties dans un groupe TVA. Elle fait observer, tout d’abord, que le libellé de l’article 11 de la directive TVA emploie le terme de «personnes» et non celui d’«assujettis», de manière cohérente avec les autres dispositions de ladite directive. Elle souligne que des versions linguistiques autres que la version en langue française de cet article font une différence similaire entre «assujettis» et «personnes». L’expression «comme un seul assujetti» se réfère seulement, selon elle, à l’assujettissement du groupe et ne signifie nullement que chacun des membres de celui-ci doit être personnellement assujetti.
23 Elle considère, ensuite, que la possibilité pour les non-assujettis d’intégrer un groupe TVA est conforme à la finalité de la directive TVA et à l’article 11 de celle-ci, qui est de permettre aux États membres de considérer comme un seul assujetti les personnes qui, indépendamment de leur autonomie juridique, entretiennent entre elles des liens étroits sur les plans financier, économique et d’organisation. Le fait que l’activité exercée par une personne appartenant à un tel ensemble, et dont l’indépendance est purement juridique, échappe entièrement au champ d’application de la TVA ne serait pas pertinent du point de vue de l’appartenance au groupe. Par ailleurs, l’interprétation proposée par la Commission aboutirait à ce que la TVA ait une incidence sur la manière d’organiser un ensemble financier, économique et de gestion, tandis que l’appartenance de non-assujettis à un groupe TVA permettrait de respecter le principe de neutralité fiscale.
24 La République de Finlande estime, en outre, que les dispositions litigieuses de la loi relative à la TVA sont compatibles avec les objectifs de simplification administrative et de lutte contre les abus. Elle remarque, à cet égard, que si l’argumentation de la Commission était valable, les opérateurs économiques exerçant des activités exonérées ne pourraient pas faire partie d’un tel groupe, puisque les objectifs de lutte contre les abus et de simplification administrative n’ont de sens qu’à l’égard de ceux qui exercent des activités imposables. Elle ajoute que les documents préparatoires de la sixième directive n’ont pas défini de manière exhaustive les objectifs du groupe TVA.
25 Il conviendrait d’examiner l’entité financière, économique et organisationnelle comme un ensemble et il importerait peu, dès lors, que l’activité du membre du groupe auquel des produits ou des services sont fournis soit ou non imposable ou en dehors du champ d’application de la TVA. L’immatriculation d’un groupe TVA ayant pour objet de permettre que les livraisons et les prestations entre les membres de ce groupe soient écartées du champ d’application de la TVA, il n’existerait pas dans le système commun de la TVA de motifs particuliers justifiant qu’une entité faisant partie du même ensemble soit traitée différemment des autres entités du fait qu’elle exerce uniquement des activités tombant en dehors du champ d’application de la TVA.
26 Enfin, la République de Finlande constate que la jurisprudence à laquelle se réfère la Commission n’est d’aucun apport pour déterminer si la directive TVA permet d’inclure des personnes non assujetties dans un groupe TVA.
27 À l’instar de la République de Finlande, la République tchèque, le Royaume de Danemark, l’Irlande et le Royaume-Uni estiment que ni les termes et les objectifs de l’article 11 de la directive TVA, ni le système commun de la TVA, ni la jurisprudence de la Cour n’étayent la position de la Commission.
Appréciation de la Cour
28 À titre liminaire, il convient de rappeler que, pour déterminer la portée d’une disposition du droit de l’Union, il y a lieu de tenir compte à la fois de ses termes, de son contexte et de ses finalités (arrêt du 29 octobre 2009, NCC Construction Danmark, C‑174/08, Rec. p. I‑10567, point 23 et jurisprudence citée).
29 En l’occurrence, il résulte du libellé de l’article 11, premier alinéa, de la directive TVA que ce dernier permet à chaque État membre de considérer plusieurs personnes comme un seul assujetti lorsque celles-ci sont établies sur le territoire de ce même État membre et que, bien qu’elles soient indépendantes du point de vue juridique, elles sont étroitement liées entre elles sur les plans financier, économique et de l’organisation. Cet article, selon son libellé, ne soumet pas son application à d’autres conditions et, en particulier, à celle que lesdites personnes aient pu elles-mêmes, individuellement, avoir la qualité d’assujetti au sens de l’article 9, paragraphe 1, de la directive TVA. Employant le mot «personnes» et non les termes «personnes assujetties», il ne fait pas de distinction entre personnes assujetties et personnes non assujetties (arrêt du 9 avril 2013, Commission/Irlande, C‑85/11, non encore publié au Recueil, point 36).
30 Il convient de relever que l’article 11 de la directive TVA est issu de l’article 4, paragraphe 4, second alinéa, de la sixième directive. Or, tandis que le point 2 de l’annexe A de la deuxième directive 67/228/CEE du Conseil, du 11 avril 1967, en matière d’harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d’affaires – Structure et modalités d’application du système commun de taxe sur la valeur ajoutée (JO 1967, 71, p. 1303), qui a introduit en droit de l’Union la notion de groupe TVA, permettait aux États membres «de ne pas considérer comme des assujettis séparés, mais comme un seul assujetti», les personnes organiquement liées entre elles par des rapports économiques, financiers et d’organisation, l’expression «comme des assujettis séparés» a été abandonnée dans la rédaction dudit article 4, paragraphe 4, second alinéa, de la sixième directive (arrêt Commission/Irlande, précité, point 37).
31 Par ailleurs, alors que la formulation de l’article 4, paragraphe 4, second alinéa, de la sixième directive a été reprise dans des termes similaires dans la plupart des versions linguistiques de l’article 11 de la directive TVA, dans la version en langue anglaise de cet article, le terme «any» (toutes) a été ajouté de sorte que le passage pertinent de cette disposition se lit comme suit: «each Member State may regard as a single taxable person any persons established in the territory of that Member State» (chaque État membre peut considérer comme un seul assujetti toutes personnes établies sur le territoire de cet État membre) (arrêt Commission/Irlande, précité, point 38).
32 Il ne ressort pas de ces modifications rédactionnelles successives que le législateur de l’Union ait eu l’intention, lors de l’adoption de la sixième directive, puis de la directive TVA, d’exclure que des personnes non assujetties puissent être incluses dans un groupe TVA et que le mot «personnes» ait été employé au lieu des termes «personnes assujetties» pour éviter une répétition. Le fait que d’autres dispositions de la directive TVA, qui ne relèvent pas du titre III de celle-ci consacré à la notion d’«assujetti», emploient le terme «personnes» pour désigner des personnes assujetties ne saurait conduire à une autre constatation, ce terme étant utilisé dans un autre contexte que celui de l’article 11 de la directive TVA (arrêt Commission/Irlande, précité, point 39).
33 Il convient en outre de relever que, contrairement à ce que prétend la Commission, il ne peut se déduire des termes «comme un seul assujetti» que l’article 11 de la directive TVA vise uniquement à permettre de traiter plusieurs assujettis comme une entité unique, ces termes se rapportant non pas à une condition d’application de cet article, mais à son résultat, qui consiste à considérer plusieurs personnes comme un assujetti unique. Ne trouvent pas non plus de fondement, dans la formulation dudit article, l’argument de la Commission selon lequel celui-ci représenterait une exception à la règle générale disposant que chaque assujetti doit être traité comme une entité distincte, de sorte qu’il conviendrait d’interpréter ce même article de façon restrictive, ni l’argument selon lequel le concept de groupement impliquerait que les personnes en faisant partie appartiennent toutes à la même catégorie, le terme «groupement» n’y figurant pas (arrêt Commission/Irlande, précité, point 40).
34 Par conséquent, il ne ressort pas du libellé de l’article 11 de la directive TVA que des personnes non assujetties ne peuvent être incluses dans un groupe TVA (arrêt Commission/Irlande, précité, point 41).
35 La Commission fait cependant valoir que, au-delà du libellé de l’article 11 de la directive TVA, l’interprétation qu’elle fait de cet article s’impose au regard de son contexte, de ses objectifs ainsi que de la jurisprudence de la Cour. Il convient, dès lors, d’examiner si les arguments avancés par la Commission à l’appui de cette position démontrent que ledit article 11 doit être interprété en ce sens que des personnes non assujetties ne peuvent être incluses dans un groupe TVA.
36 Il convient de relever, en premier lieu, que la jurisprudence de la Cour à laquelle se réfère la Commission quant à cette question ne saurait être utilement invoquée en l’espèce, puisque ladite question n’est pas l’objet des arrêts précités Polysar Investments Netherlands ainsi que Ampliscientifica et Amplifin (arrêt Commission/Irlande, précité, point 43).
37 S’agissant, en deuxième lieu, du contexte de l’article 11 de la directive TVA, il convient d’observer que l’article 9, paragraphe 1, de celle-ci contient une définition générale de la notion d’«assujetti». Le paragraphe 2 de cet article et les articles 10, 12 et 13 de ladite directive, quant à eux, apportent des précisions sur cette notion soit en y incluant ou en permettant aux États membres d’y inclure des personnes qui ne répondent pas à cette définition générale, telles que des personnes effectuant certaines opérations à titre occasionnel, soit en en excluant d’autres personnes, telles que les salariés ou les collectivités publiques. Dès lors, il ne peut être déduit de l’économie du titre III de la directive TVA qu’une personne ne répondant pas à ladite définition générale est nécessairement exclue des personnes visées à l’article 11 de celle-ci (arrêt Commission/Irlande, précité, point 44).
38 Quant à l’articulation, au sein du titre III de la directive TVA, entre les articles 9, paragraphe 1, et 11 de cette directive, force est de constater qu’une lecture combinée de ces articles ne permet pas de conclure, comme le fait la Commission, que les personnes visées à cet article 11 doivent individuellement répondre à la définition générale de l’assujetti donnée à l’article 9, paragraphe 1, de ladite directive. En effet, le rapprochement de ces deux dispositions n’exclut pas que, comme le soutiennent la République de Finlande et les intervenants, ce sont ces personnes, prises ensemble, étant étroitement liées entre elles sur les plans financier, économique et de l’organisation, qui doivent répondre collectivement à cette définition (arrêt Commission/Irlande, précité, point 45).
39 Par conséquent, ne sauraient prospérer les arguments de la Commission selon lesquels, au vu du contexte de l’article 11 de la directive TVA, celui-ci doit être interprété en ce sens que des personnes non assujetties ne peuvent être incluses dans un groupe TVA (arrêt Commission/Irlande, précité, point 46).
40 En ce qui concerne, en troisième lieu, les objectifs poursuivis par l’article 11 de la directive TVA, il ressort des motifs de la proposition de la Commission ayant conduit à l’adoption de la sixième directive que, en adoptant l’article 4, paragraphe 4, second alinéa, de celle-ci, auquel s’est substitué ledit article 11, le législateur de l’Union a voulu permettre aux États membres de ne pas lier systématiquement la qualité d’assujetti à la notion d’indépendance purement juridique, soit dans un souci de simplification administrative, soit pour éviter certains abus tels que, par exemple, le fractionnement d’une entreprise entre plusieurs assujettis dans le but de bénéficier d’un régime particulier (arrêt Commission/Irlande, précité, point 47).
41 Or, il n’apparaît pas que la possibilité, pour les États membres, de considérer comme un assujetti unique un groupe de personnes comprenant une ou des personnes qui ne pourraient avoir individuellement la qualité d’assujetti aille à l’encontre desdits objectifs. Il ne peut être exclu, au contraire, que la présence, au sein d’un groupe TVA, de telles personnes contribue à une simplification administrative tant pour ledit groupe que pour l’administration fiscale et permette d’éviter certains abus, ladite présence pouvant même être indispensable à ces fins si elle seule établit le lien étroit devant exister, sur les plans financier, économique et de l’organisation, entre les personnes composant ce même groupe pour être considérées comme un assujetti unique (arrêt Commission/Irlande, précité, point 48).
42 Il convient en outre d’observer que, à supposer qu’une telle possibilité puisse donner lieu elle-même à des abus, l’article 11, second alinéa, de la directive TVA permet aux États membres de prendre toutes mesures utiles pour éviter que l’application du premier alinéa de cet article rende la fraude ou l’évasion fiscales possibles (arrêt Commission/Irlande, précité, point 49).
43 Par conséquent, la Commission n’a pas établi que les objectifs de l’article 11 de la directive TVA militent en faveur d’une interprétation selon laquelle des personnes non assujetties ne peuvent être incluses dans un groupe TVA.
44 Eu égard à tout ce qui précède, il convient de rejeter le grief relatif à l’inclusion de personnes non assujetties dans un groupe TVA.
Sur le grief relatif à la limitation aux entreprises du secteur financier et des assurances de la possibilité de former un groupe TVA
Sur la recevabilité du grief
– Argumentation des parties
45 La République de Finlande, soutenue par l’Irlande et le Royaume de Suède, conclut à l’irrecevabilité du grief relatif à la limitation aux entreprises du secteur financier et des assurances de la possibilité de former un groupe TVA dans la mesure où ce grief est fondé sur une violation du principe d’égalité de traitement. Elle fait valoir, d’une part, que, contrairement aux exigences découlant de l’article 258 TFUE, la requête ne permet pas de déterminer clairement si la Commission lui reproche une violation du principe de neutralité fiscale ou une violation du principe d’égalité de traitement et, d’autre part, que cette dernière violation a été invoquée pour la première fois dans la requête.
46 La Commission considère qu’elle n’a pas étendu ou modifié l’objet du litige par rapport au grief formulé au cours de la procédure précontentieuse pendant laquelle elle s’est référée au principe de neutralité fiscale, celui-ci étant la transposition, dans le système commun de la TVA, du principe d’égalité de traitement.
– Appréciation de la Cour
47 Il convient de rappeler que les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels un recours est fondé doivent ressortir d’une façon cohérente et compréhensible du texte de la requête elle-même (voir, notamment, arrêt du 24 mars 2011, Commission/Espagne, C‑400/08, Rec. p. I‑1915, point 36 et jurisprudence citée). En l’espèce, la requête de la Commission répond à cette exigence. En effet, la Commission y expose clairement que la limitation aux entreprises du secteur financier et des assurances du régime relatif aux groupes TVA est, selon elle, «en contradiction avec le principe de neutralité fiscale consacré par le droit de l’Union, qui constitue la traduction, en matière de TVA, du principe d’égalité de traitement garanti par le droit de l’Union», et que ce dernier principe est applicable en l’espèce.
48 Il convient également de rappeler que, selon une jurisprudence constante, l’objet d’un recours intenté en application de l’article 258 TFUE est circonscrit par la procédure précontentieuse prévue à cette disposition. Dès lors, le recours doit être fondé sur les mêmes motifs et moyens que ceux invoqués dans l’avis motivé. Toutefois, cette exigence ne saurait aller jusqu’à imposer, en toute hypothèse, une coïncidence parfaite entre l’énoncé des griefs dans le dispositif de l’avis motivé et les conclusions de la requête, dès lors que l’objet du litige, tel que défini dans l’avis motivé, n’a pas été étendu ou modifié (voir, notamment, arrêts du 11 juillet 2002, Commission/Espagne, C‑139/00, Rec. p. I‑6407, points 18 et 19, ainsi que du 18 novembre 2010, Commission/Portugal, C‑458/08, Rec. p. I‑11599, points 43 et 44).
49 Il est, par ailleurs, de jurisprudence constante que le principe de neutralité fiscale constitue la traduction, en matière de TVA, du principe d’égalité de traitement qui exige que des situations comparables ne soient pas traitées de manière différente, à moins qu’une différenciation ne soit objectivement justifiée. Toutefois, alors que la méconnaissance du principe de neutralité fiscale ne peut être envisagée qu’entre opérateurs économiques concurrents, la violation du principe général d’égalité de traitement peut se trouver caractérisée, en matière fiscale, par d’autres types de discriminations, affectant des opérateurs économiques qui ne sont pas forcément concurrents, mais se trouvent néanmoins dans une situation comparable sous d’autres rapports (voir, en ce sens, arrêt du 10 avril 2008, Marks & Spencer, C‑309/06, Rec. p. I‑2283, points 49 et 51).
50 Il en découle que le principe d’égalité de traitement, en matière fiscale, ne coïncide pas avec le principe de neutralité fiscale. Dès lors, en faisant valoir, dans sa requête, que la loi relative à la TVA, en ce qu’elle limite aux entreprises du secteur financier et des assurances la possibilité de former un groupe TVA, n’est pas compatible avec le principe d’égalité de traitement, alors qu’elle invoquait à cet égard le principe de neutralité fiscale dans l’avis motivé, la Commission a étendu l’objet du litige.
51 Par conséquent, le grief relatif à la limitation aux entreprises du secteur financier et des assurances de la possibilité de former un groupe TVA est irrecevable dans la mesure où il est fondé sur une violation du principe d’égalité de traitement. Il est recevable pour le surplus.
Sur le fond
– Argumentation des parties
52 La Commission considère que les dispositions de la loi relative à la TVA sont contraires à l’article 11 de la directive TVA dans la mesure où leur champ d’application est limité aux entreprises exerçant leurs activités dans le secteur financier et des assurances.
53 Elle fait valoir qu’un régime national relatif aux groupes TVA doit s’appliquer à toutes les entreprises établies dans l’État membre concerné, quel que soit le type d’activité qu’elles exercent. En effet, selon elle, le système commun de la TVA étant un système uniforme, l’institution d’un régime particulier dans le cadre de ce système doit, en principe, être d’application générale.
54 Une interprétation en ce sens de l’article 11 de la directive TVA serait étayée par le libellé même de cette disposition, dans lequel rien n’indique qu’un État membre puisse limiter l’application du régime qu’il prévoit aux entreprises d’un secteur déterminé. Elle serait, en outre, conforme à l’objectif de ladite disposition, qui est, comme l’indiquait l’exposé des motifs de la proposition de la Commission ayant conduit à l’adoption de la sixième directive, de permettre aux États membres, à des fins de simplification administrative ou de lutte contre les abus, de ne pas considérer comme distincts les assujettis dont l’indépendance est purement juridique.
55 En outre, si la Commission admet que les prestataires de services financiers et de services d’assurance ne sont pas en concurrence avec les entreprises relevant d’autres secteurs d’activité, elle soutient que le régime finlandais relatif aux groupes TVA est néanmoins contraire au principe d’égalité de traitement en ce qu’il favorise ces prestataires par rapport aux entreprises qui ne sont pas autorisées à former un groupe TVA. Or, la République de Finlande ne démontrerait pas que ces prestataires ne se trouvent pas dans une situation comparable à celle d’entreprises relevant d’autres secteurs ni que la limitation du champ d’application dudit régime à ces prestataires soit objectivement justifiée.
56 Contestant le grief relatif à la limitation aux entreprises du secteur financier et des assurances de la possibilité de former un groupe TVA, la République de Finlande expose, à titre liminaire, que le secteur financier et des assurances est soumis en Finlande à un régime spécifique d’autorisation et de contrôle qui restreint la possibilité des entreprises de ce secteur d’exercer directement, ou par l’intermédiaire de personnes morales leur appartenant, une autre activité que celle visée dans l’autorisation qui leur est accordée. Dans ce contexte, le régime relatif aux groupes TVA permettrait à ces entreprises de bénéficier de la fourniture de services d’appui, tels que des services informatiques, et répondrait à une nécessité de favoriser la neutralité du système de la TVA dans ledit secteur.
57 À l’appui de sa position, la République de Finlande fait valoir, tout d’abord, que le libellé de l’article 11 de la directive TVA n’indique pas que le régime relatif aux groupes TVA doit être appliqué aux entreprises de tous les secteurs d’activité et que l’objectif d’uniformité du système commun de la TVA conforte davantage sa position que celle de la Commission. Selon elle, l’uniformité du système commun de la TVA exige en effet que le recours aux régimes spéciaux autorisés par la directive TVA, qui constituent une exception aux règles générales applicables, soit limité de la manière la plus précise possible, afin de répondre à un besoin réel et en tenant compte du principe de neutralité fiscale. La limitation en cause serait donc cohérente avec le principe selon lequel les exonérations et les dérogations doivent être interprétées strictement. Partant, la limitation du champ d’application du régime relatif aux groupes TVA ne saurait être subordonnée à aucune autre condition que celle de respecter le principe de neutralité fiscale.
58 La République de Finlande fait observer, ensuite, que, selon une jurisprudence constante, le principe d’égalité de traitement se traduit, en matière de TVA, par le principe de neutralité fiscale, de sorte que le premier de ces principes ne trouve à s’appliquer que lorsque, en raison de circonstances particulières, le second ne peut être appliqué. Or, d’une part, la limitation du régime relatif aux groupes TVA au secteur financier et des assurances ne serait pas contraire au principe de neutralité fiscale dès lors qu’elle n’aboutit pas à traiter de manière différente des opérateurs qui exercent les mêmes activités ou des activités similaires. D’autre part, le principe d’égalité de traitement ne serait pas applicable, puisque le principe de neutralité fiscale trouve à s’appliquer en l’occurrence, et il n’aurait pas été violé, les entreprises du secteur financier et des assurances n’étant pas dans la même situation que celle des entreprises relevant d’autres secteurs.
59 L’Irlande partage la position de la République de Finlande et observe, notamment, que l’approche «uniformisante» de la Commission est en contradiction avec le pouvoir étendu qui est conféré, par l’article 11, second alinéa, de la directive TVA, aux États membres pour adopter toutes les mesures nécessaires afin de prévenir les abus résultant de la transposition de cette disposition dans leur droit national.
60 Le Royaume de Suède fait valoir également que l’uniformité du système commun de la TVA exige que l’exception prévue à l’article 11 de la directive TVA fasse l’objet d’une application limitée. Le libellé de cet article militerait en faveur de la thèse selon laquelle il relève de la compétence des États membres de préciser quelles sont les personnes établies sur leur territoire qui peuvent bénéficier du régime relatif aux groupes TVA, tandis que l’interprétation de la Commission introduirait une condition qui ne figure pas dans le texte de cette disposition. L’obligation de généraliser le régime relatif aux groupes TVA ne découlerait pas des objectifs dudit article 11 et augmenterait, au contraire, le risque d’abus. Par ailleurs, le régime finlandais relatif aux groupes TVA ne serait pas contraire aux principes de neutralité fiscale et d’égalité de traitement, car les entreprises du secteur financier et des assurances ne seraient pas dans une situation comparable à celle des entreprises relevant d’autres secteurs d’activité et, en tout état de cause, des raisons objectives justifieraient les limitations qu’il impose.
– Appréciation de la Cour
61 Il découle des exigences tant de l’application uniforme du droit de l’Union que du principe d’égalité que les termes d’une disposition du droit de l’Union qui ne comporte aucun renvoi exprès au droit des États membres pour déterminer son sens et sa portée doivent normalement trouver, dans toute l’Union européenne, une interprétation autonome et uniforme (arrêt NCC Construction Danmark, précité, point 24).
62 Il importe spécialement, pour une application uniforme de la directive TVA, que la notion d’«assujetti» définie sous le titre III de celle-ci reçoive une interprétation autonome et uniforme. Dans ce cadre, une telle interprétation s’impose pour l’article 11 de la directive TVA, malgré le caractère facultatif, pour les États membres, du régime qu’il prévoit, afin d’éviter, lorsqu’il est mis en œuvre, des divergences dans l’application de ce régime d’un État membre à l’autre.
63 À cet égard, ainsi qu’il a été relevé au point 29 du présent arrêt, il résulte du libellé de l’article 11, premier alinéa, de la directive TVA que ce dernier permet à chaque État membre de considérer plusieurs personnes comme un seul assujetti lorsque celles-ci sont établies sur le territoire de ce même État membre et que, bien qu’elles soient indépendantes du point de vue juridique, elles sont étroitement liées entre elles sur les plans financier, économique et de l’organisation. Cet article, selon son libellé, ne soumet pas son application à d’autres conditions. Il ne prévoit pas non plus la possibilité, pour les États membres, d’imposer d’autres conditions aux opérateurs économiques pour pouvoir constituer un groupe TVA, telles que celle d’exercer un certain type d’activité ou de relever d’un secteur d’activité déterminé.
64 Il ne ressort ni du libellé de l’article 11 de la directive TVA ni du contexte de cet article, à savoir le titre III de ladite directive, que ledit article aurait le caractère d’une disposition dérogatoire ou particulière qui devrait être interprétée de façon restrictive comme le suggèrent la République de Finlande et le Royaume de Suède.
65 Quant aux objectifs poursuivis par l’article 11 de la directive TVA, ainsi qu’il a été relevé au point 40 du présent arrêt, il ressort des motifs de la proposition de la Commission ayant conduit à l’adoption de la sixième directive que, en adoptant l’article 4, paragraphe 4, second alinéa, de celle-ci, auquel s’est substitué ledit article 11, le législateur de l’Union a voulu permettre aux États membres de ne pas lier systématiquement la qualité d’assujetti à la notion d’indépendance purement juridique, soit dans un souci de simplification administrative, soit pour éviter certains abus tels que, par exemple, le fractionnement d’une entreprise entre plusieurs assujettis dans le but de bénéficier d’un régime particulier (arrêt Commission/Irlande, précité, point 47).
66 L’article 11, second alinéa, de la directive TVA permet également aux États membres de prendre toutes mesures utiles pour éviter que l’application du premier alinéa de cet article rende la fraude ou l’évasion fiscales possibles. De telles mesures ne sauraient cependant être prises que dans le respect du droit de l’Union. Ainsi, sous cette réserve, il est loisible aux États membres de restreindre l’application du régime prévu audit article 11 pour contrer la fraude ou l’évasion fiscales.
67 Or, en l’occurrence, la Commission n’a pas démontré que la limitation aux entreprises du secteur financier et des assurances de l’application du régime prévu à l’article 11 de la directive TVA, sur la base du second alinéa de cet article, n’était pas fondée.
68 Force est donc de constater que la Commission n’a pas démontré que la limitation aux entreprises du secteur financier et des assurances de l’application du régime prévu à l’article 11 de la directive TVA était contraire au droit de l’Union.
69 Par conséquent et étant donné que le grief relatif à la limitation aux entreprises du secteur financier et des assurances de la possibilité de former un groupe TVA est irrecevable dans la mesure où il est fondé sur une violation du principe d’égalité de traitement, il convient de rejeter ledit grief.
70 Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de rejeter le recours.
Sur les dépens
71 En vertu de l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure de la Cour, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La République de Finlande ayant conclu à la condamnation de la Commission et celle-ci ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de la condamner aux dépens. Par ailleurs, conformément à l’article 140, paragraphe 1, du même règlement, selon lequel les États membres qui sont intervenus au litige supportent leurs propres dépens, il convient de décider que la République tchèque, le Royaume de Danemark, l’Irlande, le Royaume de Suède ainsi que le Royaume-Uni supporteront leurs propres dépens.
Par ces motifs, la Cour (quatrième chambre) déclare et arrête:
1) Le recours est rejeté.
2) La Commission européenne est condamnée aux dépens.
3) La République tchèque, le Royaume de Danemark, l’Irlande, le Royaume de Suède ainsi que le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord supportent leurs propres dépens.
Signatures
* Langue de procédure: le finnois.