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Dokument 62014CO0604
Order of the Court (Fourth Chamber) of 21 January 2016.#Alcoa Trasformazioni Srl v European Commission.#Appeal — Article 181 of the Rules of Procedure — State aid — Aid granted by the Italian Republic in favour of Alcoa Trasformazioni Srl — Reimbursement by the Equalisation Fund of part of the electricity costs invoiced to that company by its supplier — Incompatibility with the common market — Advantage — European Commission required to undertake an economic analysis.#Case C-604/14 P.
Euroopa Kohtu määrus (neljas koda), 21.1.2016.
Alcoa Trasformazioni Srl versus Euroopa Komisjon.
Apellatsioonkaebus – Euroopa Kohtu kodukorra artikkel 181 – Riigiabi – Itaalia poolt Alcoa Trasformazioni Srl‑ile antud abi – Nimetatud äriühingule tema tarnija poolt esitatud elektriarvete ühe osa tasumine tasakaalustusfondi poolt – Ühisturuga kokkusobimatus – Eelis – Euroopa Komisjoni kohustus viia läbi majanduslik analüüs.
Kohtuasi C-604/14 P.
Euroopa Kohtu määrus (neljas koda), 21.1.2016.
Alcoa Trasformazioni Srl versus Euroopa Komisjon.
Apellatsioonkaebus – Euroopa Kohtu kodukorra artikkel 181 – Riigiabi – Itaalia poolt Alcoa Trasformazioni Srl‑ile antud abi – Nimetatud äriühingule tema tarnija poolt esitatud elektriarvete ühe osa tasumine tasakaalustusfondi poolt – Ühisturuga kokkusobimatus – Eelis – Euroopa Komisjoni kohustus viia läbi majanduslik analüüs.
Kohtuasi C-604/14 P.
Euroopa kohtulahendite tunnus (ECLI): ECLI:EU:C:2016:54
ORDONNANCE DE LA COUR (quatrième chambre)
21 janvier 2016 (*)
«Pourvoi – Article 181 du règlement de procédure de la Cour – Aides d’État – Aide accordée par la République italienne en faveur d’Alcoa Trasformazioni Srl – Remboursement par la Caisse de péréquation d’une partie des frais d’électricité facturés à cette société par son fournisseur – Incompatibilité avec le marché commun – Avantage – Obligation de la Commission européenne de procéder à une analyse économique»
Dans l’affaire C‑604/14 P,
ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 27 décembre 2014,
Alcoa Trasformazioni Srl, établie à Portoscuso (Italie), représentée par Me O. W. Brouwer, advocaat, ainsi que par Mes T. Salonico et M. Siragusa, avvocati,
partie requérante,
les autres parties à la procédure étant:
Commission européenne, représentée par MM. V. Di Bucci et É. Gippini Fournier, en qualité d’agents,
partie défenderesse en première instance,
République italienne,
partie intervenante en première instance,
LA COUR (quatrième chambre),
composée de M. T. von Danwitz (rapporteur), président de chambre, MM. C. Lycourgos, E. Juhász, C. Vajda et Mme K. Jürimäe, juges,
avocat général: M. M. Campos Sánchez-Bordona,
greffier: M. A. Calot Escobar,
vu la décision prise, l’avocat général entendu, de statuer par voie d’ordonnance motivée, conformément à l’article 181 du règlement de procédure de la Cour,
rend la présente
Ordonnance
1 Par son pourvoi, Alcoa Trasformazioni Srl (ci-après «Alcoa») demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 16 octobre 2014, Alcoa Trasformazioni/Commission (T‑177/10, EU:T:2014:897, ci-après l’«arrêt attaqué»), par lequel celui-ci a rejeté sa demande d’annulation de la décision 2010/460/CE de la Commission, du 19 novembre 2009, relative aux aides d’État C 38/A/04 (ex NN 58/04) et C 36/B/06 (ex NN 38/06) mises à exécution par l’Italie en faveur d’Alcoa Trasformazioni (JO 2010, L 227, p. 62, ci-après la «décision litigieuse»), dont l’article 1er déclare incompatible avec le marché commun l’aide d’État illégalement accordée par la République italienne à la requérante à partir du 1er janvier 2006 en application du décret du président du Conseil des ministres du 6 février 2004 (GURI n° 93, du 21 avril 2004, p. 5, ci-après le «décret de 2004») et de l’article 11, paragraphe 11, du décret-loi n° 35, du 14 mars 2005 (GURI n° 111, du 14 mai 2005, p. 4), converti en loi, après modification, par la loi n° 80, du 14 mai 2005 (supplément ordinaire à la GURI n° 91, du 14 mai 2005, ci-après la «loi de 2005») (ci-après la «mesure en cause»).
Les antécédents du litige et la décision litigieuse
2 Aux fins du présent pourvoi, les antécédents du litige tels qu’ils ressortent des points 1 à 14 de l’arrêt attaqué peuvent se résumer comme suit.
3 La requérante est propriétaire de deux usines produisant de l’aluminium primaire, implantées à Portovesme, en Sardaigne (Italie), et à Fusina, en Vénétie (Italie). Ces dernières ont été cédées à la requérante par Alumix SpA (ci-après «Alumix») dans le cadre de la privatisation de celle-ci.
4 Par sa communication, adressée aux autres États membres et autres intéressés, conformément à l’article [108], paragraphe 2, [TFUE], concernant une aide d’État du gouvernement italien en faveur d’Alumix, notifiée à la République italienne et publiée le 1er octobre 1996 (JO C 288, p. 4, ci-après la «décision Alumix»), la Commission européenne a considéré qu’un tarif d’électricité préférentiel consenti par l’Ente nazionale per l’energia elettrica (ENEL), le fournisseur historique d’électricité en Italie, aux usines acquises par la requérante, ne constituait pas une aide d’État au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE. Ce tarif était originairement accordé par ENEL conformément à l’article 2 du décret ministériel du 19 décembre 1995 (GURI n° 39, du 16 février 1996, p. 8, ci-après le «décret de 1995») et était applicable jusqu’au 31 décembre 2005. Dans la décision Alumix, la Commission a estimé, notamment, que, «en facturant un tarif pour la production d’aluminium primaire [aux usines acquises par la requérante] qui couvr[ait] [s]es coûts variables et qui contribu[ait] à ses coûts fixes, ENEL se comport[ait] [en opérateur agissant dans des conditions normales de marché] dès lors que ces tarifs permett[ai]ent de fournir de l’électricité à ses clients industriels les plus importants dans des régions où il exist[ait] une surcapacité importante en termes de production électrique».
5 L’autorité pour l’énergie électrique et le gaz (Autorità per l’energia elettrica e il gas) a, par la décision n° 204/99, du 29 décembre 1999 (ci-après la «décision n° 204/99»), transféré aux distributeurs locaux d’électricité la gestion du tarif de l’énergie électrique. La fourniture d’électricité à la requérante a alors été facturée par ENEL, son distributeur local d’électricité, au tarif standard et non plus au tarif visé à l’article 2 du décret de 1995 applicable jusqu’au 31 décembre 2005. Afin de compenser cette différence tarifaire, ENEL accordait à la requérante un remboursement, mentionné sur sa facture d’électricité, financé au moyen d’un prélèvement parafiscal imposé à l’ensemble des consommateurs d’électricité en Italie.
6 Par la décision n° 148/04, du 9 août 2004, l’autorité pour l’énergie électrique et le gaz a chargé un organisme public, à savoir la caisse de péréquation pour le secteur électrique (Cassa Conguaglio per il settore elettrico, ci-après la «Caisse de péréquation»), de la gestion du tarif de l’électricité à la place des distributeurs locaux. À ce titre, la Caisse de péréquation effectuait elle-même le remboursement à la requérante de la somme correspondant à la différence entre le montant du tarif qui lui était facturé par ENEL et celui du tarif visé dans le décret de 1995, en ayant recours au même prélèvement parafiscal.
7 Par la suite, ont été adoptés le décret de 2004 et la loi de 2005. L’article 1er du décret de 2004 visait à étendre le bénéfice de tarifs d’électricité préférentiels au profit, notamment, de Portovesme Srl et d’Eurallumina SpA. Bien qu’il pût être compris comme étant également destiné à proroger, jusqu’au mois de juin 2007, le tarif préférentiel dont bénéficiait la requérante, il n’a, dans les faits, pas été appliqué à cette dernière, qui est demeurée régie par le décret de 1995 jusqu’à l’entrée en vigueur de l’article 11, paragraphe 11, de la loi de 2005, qui a prorogé, jusqu’au 31 décembre 2010, le tarif préférentiel appliqué aux deux usines de la requérante.
8 L’article 1er de la décision litigieuse déclare incompatible avec le marché commun l’aide d’État que la République italienne a illégalement accordée à la requérante à partir du 1er janvier 2006 en application de la mesure en cause. Dans cette décision, la Commission a considéré comme étant dépourvus de pertinence tant l’analyse qu’elle avait retenue dans la décision Alumix que les calculs fournis par les autorités italiennes et par la requérante afin de démontrer que le tarif préférentiel consenti à celle-ci restait conforme aux critères adoptés dans la décision Alumix. Elle a indiqué que le montant de l’aide à récupérer correspondait à la somme de toutes les indemnités compensatoires versées à la requérante par la Caisse de péréquation.
La procédure devant le Tribunal et l’arrêt attaqué
9 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 19 avril 2010, la requérante a introduit un recours en annulation contre la décision litigieuse.
10 Dans sa requête, la requérante a invoqué six moyens, décrits par le Tribunal comme tirés, respectivement, de la qualification illégale d’aide d’État en l’absence d’avantage consenti à la requérante, de l’illégalité résultant de l’absence de détermination du montant de l’aide, de la qualification erronée d’aide au fonctionnement et de l’éligibilité d’une telle aide au titre des lignes directrices concernant les aides d’État à finalité régionale (JO 1998, C 74, p. 9), de la violation du principe de bonne administration et de celle de l’article 107, paragraphe 3, TFUE, de la méconnaissance du principe de protection de la confiance légitime et d’une violation des formes substantielles.
11 Par l’arrêt attaqué, le Tribunal a rejeté chacun des moyens soulevés par la requérante, ainsi que le recours dans son ensemble, et a condamné celle-ci aux dépens.
Les conclusions des parties
12 La requérante demande à la Cour:
– d’annuler les points 50, 81 à 90 et 92 de l’arrêt attaqué et, en conséquence, d’annuler ce dernier;
– de statuer définitivement sur le litige et d’annuler la décision litigieuse, et
– de condamner la Commission aux dépens des deux instances.
13 La Commission demande à la Cour:
– de rejeter le pourvoi, par ordonnance, comme, en partie, manifestement irrecevable et, en partie, manifestement inopérant et, en toute hypothèse, manifestement non fondé;
– à titre subsidiaire, de rejeter le pourvoi comme, en partie, irrecevable et, en partie, inopérant, et, en toute hypothèse, non fondé, et
– de condamner la requérante aux dépens du pourvoi et de la première instance.
Sur le pourvoi
14 En vertu de l’article 181 de son règlement de procédure, lorsqu’un pourvoi est, en tout ou en partie, manifestement irrecevable ou manifestement non fondé, la Cour peut, à tout moment, sur rapport du juge rapporteur, l’avocat général entendu, rejeter ce pourvoi totalement ou partiellement, par voie d’ordonnance motivée. Il y a lieu de faire application de cette disposition dans la présente affaire.
Sur le premier moyen
Argumentation des parties
15 Dans le cadre de son premier moyen, dirigé contre les points 81 à 83 de l’arrêt attaqué, la requérante reproche au Tribunal d’avoir confirmé la conclusion erronée de la Commission selon laquelle le tarif qui lui a été consenti, qui n’a pas été qualifié d’aide d’État au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE dans la décision Alumix, aurait subi une «modification substantielle» entre le décret de 1995 et la mesure en cause, de sorte que les critères mis en œuvre dans cette décision ne seraient plus applicables.
16 À cet égard, la requérante soutient que le Tribunal a dénaturé la réglementation applicable et, en particulier, l’article 15, paragraphe 2, de la décision n° 204/99. Cette réglementation n’aurait apporté aucune modification substantielle, ni quant au prix de l’électricité payé par Alcoa ni quant au financement du mécanisme qui lui assurait ledit prix.
17 L’article 15, paragraphe 2, de la décision n° 204/99, selon lequel «l’exploitant applique une composante tarifaire compensatoire, qui [...] rend les recettes concernant la fourniture admise au régime tarifaire spécial égales à celles qui seraient obtenues par l’application à la même fourniture des conditions tarifaires prévues pour elle par la réglementation en vigueur au 31 décembre 1999», confirmerait clairement que non seulement le coût qu’Alcoa continuait de supporter à partir du 1er janvier 2000, mais aussi les recettes assurées à ENEL par le régime antérieur restaient inchangés.
18 La Commission soutient que le premier moyen est manifestement irrecevable, ou, à titre subsidiaire, manifestement inopérant et manifestement non fondé.
Appréciation de la Cour
19 Dans la mesure où la requérante se réfère de manière générale à la législation nationale en cause, le premier moyen est manifestement irrecevable.
20 En effet, à l’exception de l’article 15, paragraphe 2, de la décision n° 204/99, la requérante n’identifie pas les dispositions de la législation nationale qui ont, selon elle, été dénaturées par le Tribunal. Or, selon une jurisprudence constante, lorsqu’un requérant allègue une dénaturation d’éléments de preuve par le Tribunal, il doit indiquer de façon précise les éléments qui auraient été dénaturés par cette juridiction et démontrer les erreurs d’analyse qui, dans son appréciation, auraient conduit le Tribunal à cette dénaturation (voir, en ce sens, arrêts Comitato «Venezia vuole vivere» e.a./Commission, C‑71/09 P, C‑73/09 P et C‑76/09 P, EU:C:2011:368, point 152, ainsi que ICF/Commission, C‑467/13 P, EU:C:2014:2274, point 31).
21 En outre, dans la mesure où la requérante invoque une dénaturation de l’article 15, paragraphe 2, de cette décision, ce moyen doit manifestement être écarté.
22 En effet, ainsi qu’il ressort du point 82 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a motivé sa conclusion selon laquelle le tarif appliqué à Alcoa a subi une modification substantielle entre le décret de 1995 et la mesure en cause en constatant, en substance, que le tarif consenti à Alcoa en vertu de ce décret, qui pouvait équivaloir au rabais octroyé par un fournisseur à l’un de ses plus importants clients, avait été remplacé par un mécanisme en vertu duquel la requérante se faisait rembourser par la Caisse de péréquation au moyen de ressources publiques la différence existant entre le tarif d’électricité facturé à ses usines par ENEL et le tarif prévu par le décret 1995.
23 Le Tribunal a donc inféré notamment du financement du remboursement accordé à Alcoa par une taxe parafiscale ainsi que de la gestion de ce remboursement par la Caisse de péréquation la conclusion selon laquelle le tarif appliqué à Alcoa a subi une modification substantielle entre le décret de 1995 et la mesure en cause.
24 En invoquant une dénaturation de l’article 15, paragraphe 2, de la décision n° 204/99, la requérante s’appuie cependant sur un élément de la législation nationale qui n’est pas à la base de la conclusion du Tribunal selon laquelle le tarif qui lui a été appliqué a subi une modification substantielle entre le décret de 1995 et la mesure en cause.
25 En effet, d’une part, le Tribunal n’a pas constaté que le financement du remboursement accordé à Alcoa par une taxe parafiscale ou la gestion de ce remboursement par la Caisse de péréquation découlent de l’article 15, paragraphe 2, de la décision n° 204/99. Au contraire, il ressort des constatations faites au point 4 de l’arrêt attaqué, non contestées par la requérante, que notamment la gestion du remboursement accordé à cette dernière n’a été confiée à la Caisse de péréquation que par la décision n° 148/04, du 9 août 2004.
26 D’autre part, en faisant valoir que l’article 15, paragraphe 2, de la décision n° 204/99 confirme que non seulement le coût supporté par elle-même, mais aussi les recettes d’ENEL restaient inchangés après l’entrée en vigueur de la décision n° 204/99, la requérante se borne à souligner un aspect qu’elle estime commun au tarif qui lui a été consenti en vertu du décret de 1995 et au tarif appliqué en vertu de la mesure en cause, tout en s’abstenant de contester les changements apportés au premier constatés par le Tribunal.
27 Le premier moyen doit, dès lors, manifestement être écarté.
Sur le deuxième moyen
28 Dans le cadre de son deuxième moyen, dirigé contre les points 50, 80 à 85 et 92 de l’arrêt attaqué, la requérante reproche au Tribunal d’avoir, à tort, considéré que la Commission n’était pas tenue d’effectuer une analyse économique appropriée pour déterminer si la mesure en cause lui avait procuré un quelconque avantage. Ce moyen s’articule en trois branches.
Sur les première et deuxième branches du deuxième moyen
– Argumentation des parties
29 Par la première branche de son deuxième moyen, la requérante fait valoir que, en affirmant qu’il n’était pas nécessaire de procéder à une analyse économique plus fine que celle effectuée dans la décision litigieuse pour démontrer que la mesure en cause lui procurait un avantage économique, le Tribunal a contredit les arrêts Alcoa Trasformazioni/Commission (T‑332/06, EU:T:2009:79) et Alcoa Trasformazioni/Commission (C‑194/09 P, EU:C:2011:497), relatifs à la décision d’ouverture de la procédure formelle d’examen, et ainsi violé l’article 107, paragraphe 1, TFUE.
30 Par la deuxième branche de son deuxième moyen, la requérante reproche au Tribunal d’avoir erronément fait coïncider, aux points 82 et 84 de l’arrêt attaqué, l’analyse relative à l’existence d’un avantage pour Alcoa avec l’analyse relative à la nature étatique de la mesure en cause. Cela constituerait une violation de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, dans la mesure où l’existence d’un avantage devrait faire l’objet d’une analyse économique appropriée et ne pourrait pas être simplement présumée du fait que la mesure en cause était financée par des ressources étatiques.
31 Selon la requérante, la nécessité d’effectuer une analyse économique ressort de la jurisprudence de la Cour (arrêts Commission/EDF, C‑124/10 P, EU:C:2012:318, points 78, 88 et 93; Frucona Košice/Commission, C‑73/11 P, EU:C:2013:32, point 82, ainsi que Commission/Pays-Bas et ING Groep, C‑224/12 P, EU:C:2014:213, point 37).
32 Étant donné que, en l’absence de la nécessaire analyse économique, la Commission n’aurait pas pu vérifier à suffisance si Alcoa bénéficiait d’un éventuel avantage économique en termes de «réduction des charges qui auraient normalement dû grever ses budgets», ni dans quelle mesure elle bénéficiait d’un tel avantage, la conclusion que le Tribunal a adoptée au point 92 de l’arrêt attaqué, selon laquelle «l’aide en cause [...] permettait à la requérante d’alléger les coûts liés à sa consommation d’électricité», ce qui constituait «bien une aide au fonctionnement», serait tout aussi erronée.
33 La Commission conteste l’argumentation de la requérante.
– Appréciation de la Cour
34 L’argumentation avancée par la requérante au soutien de la deuxième branche du deuxième moyen ne saurait prospérer.
35 À cet égard, il convient de rappeler, en premier lieu, que le Tribunal a constaté, au point 84 de l’arrêt attaqué, que la Commission avait «fourni de nombreuses indications d’ordre économique tenant à la fois à l’évolution du marché (fin du monopole) et aux caractéristiques propres aux usines des requérantes (analyse du marché de l’électricité sarde, par exemple)» et qu’elle s’était «donc conformée à l’article [107 TFUE], qui exige que la Commission établisse qu’un avantage économique a été conféré à l’entreprise aidée».
36 Ce n’est qu’après avoir posé ce constat que le Tribunal a jugé qu’«il n’était pas nécessaire que la Commission exposât d’autres arguments, puisque l’existence d’un avantage consenti à la requérante résultait de la simple description du mécanisme mis en place» et que «la Commission n’était [...] point tenue de procéder à une analyse économique plus fine que celle figurant dans la décision [litigieuse]».
37 La requérante soutient toutefois que ces éléments ne constituent pas une analyse économique suffisante permettant de déterminer l’existence d’un éventuel avantage au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE. Selon la requérante, il était nécessaire de comparer le tarif accordé à Alcoa en vertu de la mesure en cause avec le vrai prix de marché qu’Alcoa aurait payé en l’absence de cette mesure.
38 Or, contrairement à ce que soutient la requérante, la jurisprudence de la Cour n’a pas consacré une obligation générale pour la Commission d’effectuer, dans tous les cas de figure, une analyse complexe du prix hypothétique de marché qu’aurait payé le bénéficiaire d’une mesure donnée en l’absence de celle-ci afin de constater l’existence d’un avantage au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE.
39 La requérante ne démontre pas non plus l’existence de circonstances particulières qui auraient rendu une telle analyse nécessaire dans la présente affaire.
40 Par ailleurs, s’il ressort de la jurisprudence de la Cour que l’application du critère de l’investisseur privé requiert de procéder à une appréciation économique complexe (voir, en ce sens, arrêts Espagne/Lenzing, C‑525/04 P, EU:C:2007:698, point 59; Frucona Košice/Commission, C‑73/11 P, EU:C:2013:32, point 74, ainsi que Land Burgenland e.a./Commission, C‑214/12 P, C‑215/12 P et C‑223/12 P, EU:C:2013:682, point 77), ni la décision litigieuse ni l’arrêt attaqué ne reposent sur une application de ce critère, ce que la requérante ne conteste pas.
41 En conséquence, l’argument de la requérante selon lequel le Tribunal aurait, dans les circonstances de la présente affaire, dû exiger une analyse économique complexe, allant au-delà de celle effectuée dans la décision litigieuse, ne peut pas être retenu.
42 En deuxième lieu, l’argument de la requérante selon lequel le Tribunal a erronément fait coïncider l’analyse relative à l’existence d’un avantage pour Alcoa avec l’analyse relative à la nature étatique de la mesure en cause ne saurait prospérer.
43 En effet, contrairement à ce que soutient la requérante, le Tribunal n’a pas simplement présumé l’existence d’un avantage au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE du fait que la mesure en cause était financée par des ressources étatiques. Ainsi qu’il ressort des points 82 et 84 de l’arrêt attaqué, le Tribunal s’est notamment appuyé sur le fait que la requérante se faisait rembourser par la Caisse de péréquation la différence existant entre le tarif d’électricité facturé aux usines d’Alcoa par ENEL et le tarif prévu par le décret de 1995 et que ce mécanisme de compensation visait donc à libérer une société du paiement d’une partie des charges d’électricité nécessaires à la production des produits qu’elle commercialisait sur le territoire de l’Union européenne. Le Tribunal en a conclu que les usines de la requérante ne supportaient pas la totalité des charges qui auraient normalement dû grever leurs budgets.
44 En troisième lieu, eu égard aux observations qui précèdent, le Tribunal n’a pas non plus commis d’erreur de droit en jugeant, au point 92 de l’arrêt attaqué, que l’aide en cause permettait à la requérante d’alléger les coûts liés à sa consommation d’électricité.
45 S’agissant de la première branche du deuxième moyen, l’argumentation avancée par la requérante ne saurait prospérer, en ce qu’elle procède d’une lecture manifestement erronée des arrêts Alcoa Trasformazioni/Commission (T‑332/06, EU:T:2009:79) et Alcoa Trasformazioni/Commission (C‑194/09 P, EU:C:2011:497).
46 En effet, aux points 80 à 83 de l’arrêt Alcoa Trasformazioni/Commission (C‑194/09 P, EU:C:2011:497), la Cour a constaté, en substance, que, dans sa présentation des aspects qu’elle estimait communs aux tarifs fondés sur le décret de 1995 et à ceux fondés sur la loi de 2005, Alcoa omettait de mentionner les changements, non contestés, qui avaient été apportés aux premiers en 1999 et en 2004, qu’Alcoa s’abstenait ainsi d’indiquer que le tarif qui lui était facturé en vertu du décret de 1995 avait été remplacé par un tarif dont le montant avait été réduit au moyen d’un remboursement financé par une taxe parafiscale gérée par la Caisse de péréquation, que, compte tenu de la pertinence de ces caractéristiques dans la qualification d’une aide, le Tribunal n’avait pas commis d’erreur de droit en soulignant celles-ci et que, en conséquence, le Tribunal avait correctement jugé que la seule constatation du mécanisme de remboursement en cause justifiait que la Commission ne puisse exclure, dans le cadre de la phase préliminaire, qu’Alcoa bénéficiait d’un avantage au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE.
47 Dans ce contexte, la Cour a, au point 84 de l’arrêt Alcoa Trasformazioni/Commission (C‑194/09 P, EU:C:2011:497), confirmé le point 70 de l’arrêt du Tribunal Alcoa Trasformazioni/Commission (T‑332/06, EU:T:2009:79). À ce point, le Tribunal a rejeté comme inopérants les arguments soulevés par la requérante selon lesquels la Commission aurait dû déterminer si le tarif en cause correspondait à un tarif de marché et si les critères sur lesquels la Commission s’était appuyée pour conclure à l’absence d’un avantage dans la décision Alumix étaient encore valables. À cet égard, la Cour a considéré notamment que le Tribunal avait valablement pu conclure que la question de savoir si le tarif octroyé aux usines d’Alcoa constituait ou non un tarif de marché nécessitait une appréciation économique complexe soulevant des doutes qui seraient le plus utilement abordés dans le cadre de la procédure formelle d’examen.
48 Or, contrairement à ce que prétend la requérante, en procédant ainsi, la Cour n’a pas jugé, dans l’arrêt Alcoa Trasformazioni/Commission (C‑194/09 P, EU:C:2011:497), que, dans le cadre de la procédure formelle d’examen, la Commission devait procéder à l’analyse économique complexe invoquée par la requérante pour démontrer que la mesure en cause procurait à Alcoa un avantage au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE.
49 En effet, la Cour a seulement indiqué, dans ledit arrêt, que l’examen des arguments avancés par la requérante n’était, en tout état de cause, pas nécessaire dans le cadre de la phase préliminaire d’examen, en ce que ces arguments visaient une appréciation économique complexe, alors que la seule constatation du mécanisme de remboursement en cause justifiait déjà que la Commission ne pouvait pas exclure qu’Alcoa bénéficiait d’un avantage au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE. En revanche, la Cour ne s’est pas prononcée, dans ce même arrêt, sur la question de savoir quelle analyse économique était nécessaire dans le cadre de la procédure formelle d’examen, cette dernière procédure ne faisant pas l’objet du litige devant la Cour.
50 Il s’ensuit que les première et deuxième branches du deuxième moyen doivent être écartées comme manifestement non fondées.
Sur la troisième branche du deuxième moyen
– Argumentation des parties
51 La requérante soutient que le Tribunal a dénaturé les arguments qu’elle a développés dans le cadre de son premier moyen, sous B, présenté devant le Tribunal. Au point 85 de l’arrêt attaqué, le Tribunal aurait interprété ces arguments comme s’ils portaient «sur le fait que la Commission aurait dû raisonner dans le cadre d’un marché normal et non du marché existant», concluant sur ce point qu’«une aide d’État doit être appréciée en elle-même, et non au regard des objectifs tenant, par exemple, à remédier au caractère imparfaitement concurrentiel d’un marché», alors que, en réalité, Alcoa aurait seulement demandé au Tribunal de vérifier si, dans la décision litigieuse, la Commission avait commis une erreur en comparant le prix résultant du contrat conclu entre ENEL et Alcoa avec le tarif spécial pour vérifier si la mesure en cause procurait un avantage à Alcoa.
52 La Commission est d’avis que cette argumentation est manifestement non fondée.
– Appréciation de la Cour
53 L’argumentation de la requérante repose sur une lecture manifestement erronée de l’arrêt attaqué.
54 En effet, il ressort clairement de la lecture du point 85 de l’arrêt attaqué, en combinaison avec le point 79 de cet arrêt, que, au point 85 dudit arrêt, le Tribunal a répondu non pas aux arguments développés par Alcoa dans le cadre de son premier moyen, sous B, présenté devant le Tribunal, portant sur la nécessité d’effectuer une analyse économique afin de déterminer l’existence éventuelle d’un avantage consenti à la requérante, mais aux arguments développés par Alcoa dans le cadre de son premier moyen, sous C, présenté devant le Tribunal, portant sur le fait que la Commission aurait dû raisonner dans le cadre d’un marché normal et non dans celui du marché existant.
55 En conséquence, la troisième branche du deuxième moyen et, partant, le deuxième moyen dans son ensemble doivent être écartés comme étant manifestement non fondés.
Sur le troisième moyen
Argumentation des parties
56 Par son troisième moyen, dirigé contre les points 87 à 90 de l’arrêt attaqué, la requérante reproche au Tribunal d’avoir dénaturé le deuxième moyen soulevé devant ce dernier et, en conséquence, d’avoir omis de statuer et d’avoir procédé à une motivation incorrecte.
57 En effet, au point 88 dudit arrêt, le Tribunal aurait erronément interprété le moyen soulevé par Alcoa comme étant «tiré de l’illégalité résultant de l’absence de détermination du montant de l’aide», puis l’aurait rejeté au motif qu’«aucune disposition du droit de l’Union n’exige que la Commission, lorsqu’elle ordonne la restitution d’une aide déclarée incompatible avec le marché intérieur, fixe le montant exact de l’aide à restituer». Le Tribunal aurait donc considéré que la décision litigieuse était correcte en ce qu’elle «indique la méthode selon laquelle ce montant doit être calculé» et que ledit montant équivalait à la «différence entre le prix contractuel et le prix préférentiel, ce qui correspond à l’indemnité compensatoire touchée par la requérante durant la période concernée».
58 Toutefois, par son deuxième moyen présenté devant le Tribunal, Alcoa n’aurait nullement critiqué la décision litigieuse en ce que la Commission s’était bornée à indiquer dans celle-ci la méthode de calcul du montant à récupérer, sans préciser «le montant exact de l’aide à restituer». Au contraire, Alcoa aurait critiqué la méthode même adoptée par la Commission pour calculer l’avantage présumé, en soulignant que la Commission se serait abstenue d’effectuer une analyse économique appropriée.
59 La Commission conteste l’argumentation de la requérante.
Appréciation de la Cour
60 L’argumentation avancée par la requérante, à la supposer correcte, ne saurait fonder l’annulation de l’arrêt attaqué.
61 Ainsi qu’il a été constaté dans le cadre de l’examen de la deuxième branche du deuxième moyen du présent pourvoi, le Tribunal n’était pas tenu d’exiger une analyse économique complexe, allant au-delà de celle effectuée par la Commission, dans le cadre de son examen du premier moyen soulevé devant lui, relatif à l’absence d’un avantage au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE.
62 En conséquence, une telle analyse n’était pas non plus nécessaire afin de déterminer le montant de l’aide à récupérer.
63 Partant, le troisième moyen doit manifestement être écarté.
64 Eu égard à l’ensemble des observations qui précèdent, il convient de rejeter le pourvoi dans son intégralité.
Sur les dépens
65 En vertu de l’article 184, paragraphe 2, du règlement de procédure, lorsque le pourvoi n’est pas fondé, la Cour statue sur les dépens. Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, de ce règlement, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, de celui-ci, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.
66 La Commission ayant conclu à la condamnation de la requérante et cette dernière ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de la condamner aux dépens.
Par ces motifs, la Cour (quatrième chambre) ordonne:
1) Le pourvoi est rejeté.
2) Alcoa Trasformazioni Srl est condamnée aux dépens.
Signatures
* Langue de procédure: l’italien.