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Document 62015CO0285

Order of the Court (Eighth Chamber) of 21 April 2016.
Beca Engineering Srl v Ministero dell'Interno.
Request for a preliminary ruling from the Consiglio di Stato.
Reference for a preliminary ruling — Article 99 of the Court’s Rules of Procedure — Free movement of goods — Directive 89/106/EEC — Construction products — Chimney linings — National legislation requiring chimneys to be made exclusively with non-combustible materials.
Case C-285/15.

ECLI identifier: ECLI:EU:C:2016:295

ORDONNANCE DE LA COUR (huitième chambre)

21 avril 2016 (*)

« Renvoi préjudiciel ? Article 99 du règlement de procédure de la Cour ? Libre circulation des marchandises ? Directive 89/106/CEE ? Produits de construction ? Revêtements internes de cheminées ? Législation nationale imposant de réaliser des cheminées uniquement avec des matériaux incombustibles »

Dans l’affaire C‑285/15,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Consiglio di Stato (Conseil d’État, Italie), par décision du 23 avril 2015, parvenue à la Cour le 11 juin 2015, dans la procédure

Beca Engineering Srl

contre

Ministero dell’Interno,

LA COUR (huitième chambre),

composée de M. D. Šváby (rapporteur), président de chambre, MM. M. Safjan et M. Vilaras, juges,

avocat général: M. Y. Bot,      

greffier: M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

considérant les observations présentées :

–        pour Beca Engineering Srl, par Mes A. Oddo et G. Conte, avvocati,

–        pour le gouvernement italien, par Mme G. Palmieri, en qualité d’agent, assistée de Mme S. Varone, avvocato dello Stato,

–        pour la Commission européenne, par M. G. Zavvos, en qualité d’agent, assisté de Me M. Pappalardo, avvocato,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de statuer par voie d’ordonnance motivée, conformément à l’article 99 du règlement de procédure de la Cour,

rend la présente

Ordonnance

1        La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de la directive 89/106/CEE du Conseil, du 21 décembre 1988, relative au rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres concernant les produits de construction (JO 1989, L 40, p. 12), telle que modifiée par le règlement (CE) n° 1882/2003 du Parlement européen et du Conseil, du 29 septembre 2003 (JO 2003, L 284, p. 1) (ci-après la « directive 89/106 »).

2        Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Beca Engineering Srl au Ministero dell’Interno (ministère de l’Intérieur, Italie) au sujet d’un acte de ce dernier restreignant la commercialisation et l’installation de certaines catégories de gaines thermodurcies pour cheminées.

 Le cadre juridique

 Le droit de l’Union

 La directive 89/106

3        L’article 1er, paragraphe 2, de la directive 89/106 définit le « produit de construction » comme étant « tout produit qui est fabriqué en vue d’être incorporé de façon durable dans des ouvrages de construction, qui couvrent tant les bâtiments que les ouvrages du génie civil ».

4        L’article 4, paragraphe 2, de cette directive dispose :

« Les États membres présument aptes à l’usage les produits qui permettent aux ouvrages pour lesquels ils sont utilisés, à condition que ces derniers soient convenablement conçus et construits, de satisfaire aux exigences essentielles visées à l’article 3 lorsque ces produits portent le marquage “CE” indiquant qu’ils satisfont à l’ensemble des dispositions de la présente directive, y compris les procédures d’évaluation de la conformité prévues au chapitre V et la procédure prévue au chapitre III. Le marquage “CE” atteste :

a)      qu’ils sont conformes aux normes nationales qui transposent les normes harmonisées et dont les références ont été publiées au Journal officiel des Communautés européennes. Les États membres publient les références de ces normes nationales ;

b)      qu’ils sont conformes à un agrément technique européen délivré selon la procédure décrite au chapitre III ;

ou

c)      qu’ils sont conformes aux spécifications techniques nationales visées au paragraphe 3, dans la mesure où il n’existe pas de spécifications harmonisées ; une liste de ces spécifications nationales est établie selon la procédure prévue à l’article 5 paragraphe 2. »

5        L’article 6, paragraphe 2, de ladite directive prévoit :

« Les États membres autorisent toutefois la mise sur le marché sur leur territoire des produits non couverts par l’article 4 paragraphe 2 s’ils satisfont à des dispositions nationales conformes au traité, et ce, jusqu’à ce que les spécifications techniques européennes visées aux chapitres II et III en disposent autrement. La Commission et le comité visé à l’article 19 suivent et réexaminent régulièrement l’évolution des spécifications techniques européennes. »

6        Le règlement (UE) n° 305/2011 du Parlement européen et du Conseil, du 9 mars 2011, établissant des conditions harmonisées de commercialisation pour les produits de construction et abrogeant la directive 89/106 (JO 2011, L 88, p. 5), a remplacé la directive 89/106, qu’il a abrogée définitivement le 1er juillet 2013.

 La directive 98/34

7        L’article 1er, points 3 et 11, de la directive 98/34/CE du Parlement européen et du Conseil, du 22 juin 1998, prévoyant une procédure d’information dans le domaine des normes et réglementations techniques et des règles relatives aux services de la société de l’information (JO 1998, L 204 p. 37), telle que modifiée par la directive 98/48/CE du Parlement européen et du Conseil, du 20 juillet 1998 (JO 1998, L 217, p. 18) (ci-après la « directive 98/34 »), dispose :

« Au sens de la présente directive, on entend par :

[…]

3)      “spécification technique” : une spécification qui figure dans un document définissant les caractéristiques requises d’un produit, telles que les niveaux de qualité ou de propriété d’emploi, la sécurité, les dimensions, y compris les prescriptions applicables au produit en ce qui concerne la dénomination de vente, la terminologie, les symboles, les essais et les méthodes d’essai, l’emballage, le marquage et l’étiquetage, ainsi que les procédures d’évaluation de la conformité.

[…]

11)      “règle technique” : une spécification technique ou autre exigence ou une règle relative aux services, y compris les dispositions administratives qui s’y appliquent, dont l’observation est obligatoire de jure ou de facto, pour la commercialisation, la prestation de services, l’établissement d’un opérateur de services ou l’utilisation dans un État membre ou dans une partie importante de cet État, de même que, sous réserve de celles visées à l’article 10, les dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres interdisant la fabrication, l’importation, la commercialisation ou l’utilisation d’un produit ou interdisant de fournir ou d’utiliser un service ou de s’établir comme prestataire de services.

[…] »

8        L’article 8, paragraphe 1, premier alinéa, de la directive 98/34 énonce :

« Sous réserve de l’article 10, les États membres communiquent immédiatement à la Commission tout projet de règle technique, sauf s’il s’agit d’une simple transposition intégrale d’une norme internationale ou européenne, auquel cas une simple information quant à la norme concernée suffit. Ils adressent également à la Commission une notification concernant les raisons pour lesquelles l’établissement d’une telle règle technique est nécessaire, à moins que ces raisons ne ressortent déjà du projet. »

9        L’article 10, paragraphe 1, de ladite directive prévoit que « [l]es articles 8 et 9 ne sont pas applicables aux dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres ou aux accords volontaires par lesquels ces derniers […] se limitent à exécuter un arrêt de la [Cour] ».

 Le droit italien

10      L’article 282, paragraphe 1, du decreto legislativo n. 152 – Norme in materia ambientale (décret législatif n° 152, portant normes en matière environnementale), du 3 avril 2006 (supplément ordinaire à la GURI n° 88, du 14 avril 2006), dans sa version applicable au litige au principal (ci-après le « code de l’environnement »), figurant sous le titre II de ce code, intitulé « Centrales thermiques », dispose que « [l]e présent titre régit, aux fins de la prévention et de la limitation de la pollution atmosphérique, les centrales thermiques civiles dont la puissance thermique nominale est inférieure à 3 MW. Les centrales thermiques civiles dont la puissance thermique nominale est égale ou supérieure [à 3 MW] sont soumises aux dispositions du titre I ».

11      La deuxième partie de l’annexe IX de la cinquième partie du code de l’environnement, applicable aux centrales thermiques civiles, définit, à son point 1, sous d), les « cheminées » comme étant des « portions ascendantes des conduits de fumée permettant de générer un tirage naturel des foyers et d’évacuer dans l’atmosphère les produits de la combustion ».

12      En ce qui concerne les caractéristiques des cheminées, le point 2.7 de la deuxième partie de ladite annexe IX prévoit que « [l]es installations posées ou ayant subi une modification relative aux cheminées après l’entrée en vigueur de la cinquième partie du [code de l’environnement] doivent être dotées de cheminées réalisées avec des produits qui portent le marquage “CE”. Plus particulièrement, ces cheminées doivent [...] être réalisées avec des matériaux incombustibles [...] ».

13      Afin, comme l’a indiqué la République italienne dans ses observations écrites, de se conformer à l’arrêt du 18 octobre 2012, Elenca (C‑385/10, EU:C:2012:634), ledit point 2.7 a été ultérieurement modifié par l’article 4, paragraphe 1, sous a) à c), de la legge n. 161 – Disposizioni per l’adempimento degli obblighi derivanti dall’appartenenza dell’Italia all’Unione europea – Legge europea 2013-bis (loi n° 161, portant dispositions pour l’exécution des obligations résultant de l’appartenance de l’Italie à l’Union européenne – loi européenne 2013 bis), du 30 octobre 2014 (supplément ordinaire à la GURI n° 261, du 10 novembre 2014).

 Le litige au principal et la question préjudicielle

14      Selon la juridiction de renvoi, le département des sapeurs-pompiers, des secours publics et de la défense civile de la direction centrale de la prévention et de la sécurité technique du ministère de l’Intérieur a, après enquête, décidé, par un acte du 28 décembre 2010, que Beca Engineering devait actualiser sa documentation technique ainsi que les instructions d’utilisation relatives à ses gaines thermodurcies pour conduits de fumée de types « Fitfire » et « HT 1000 », qu’était interdite la commercialisation des gaines de type « Fitfire », pendant le déroulement d’essais tendant à en démontrer leur incombustibilité, pour les centrales thermiques civiles relevant du champ d’application de l’article 282 du code de l’environnement, et que Beca Engineering devait de nouveau apporter, de manière contradictoire, la preuve de l’incombustibilité des gaines de type « HT 1000 », dès lors que le certificat fourni, qui avait été délivré par un laboratoire agréé italien, n’était pas intégralement conforme.

15      Beca Engineering a formé, devant le Tribunale amministrativo regionale per il Lazio (tribunal administratif régional pour le Latium, Italie), un recours en annulation contre cet acte tout en demandant que soit constaté son droit à la réparation du préjudice subi.

16      Au soutien de son recours, Beca Engineering a fait valoir que l’acte attaqué se fonde sur une limitation à la commercialisation imposée par la réglementation en cause au principal, qui doit être qualifiée de « règle technique », au sens de l’article 1er, point 11, de la directive 98/34, qui n’a pas été notifiée à la Commission par la République italienne, alors que cette directive l’exigeait. Partant, elle considère que cette réglementation n’est pas opposable aux tiers, ce qui serait confirmé, notamment, par l’arrêt du 18 octobre 2012, Elenca (C‑385/10, EU:C:2012:634).

17      Par une décision du 28 mars 2014, le tribunale amministrativo regionale per il Lazio (tribunal administratif régional pour le Latium) a rejeté le recours dont il était saisi, au motif que, en l’absence de normes d’harmonisation, il appartient, conformément à l’article 36 TFUE, aux États membres de décider du niveau auquel ils entendent assurer la protection de la santé et de la vie des personnes et de la nécessité de contrôler les produits concernés lors de leur usage. Cette juridiction a également considéré que l’arrêt du 18 octobre 2012, Elenca (C‑385/10, EU:C:2012:634), n’était pas transposable audit recours.

18      Beca Engineering a fait appel de cette décision devant le Consiglio di Stato (Conseil d’État, Italie). Au soutien de son appel, elle a réitéré l’argumentation présentée en première instance, tout en précisant que le système « Fitfire », qui a ensuite obtenu le marquage « CE », et le système « HT 1000 » sont commercialisés notamment en France et en Suisse.

19      Le Consiglio di Stato (Conseil d’État) considère, d’une part, que la motivation retenue par le Tribunale amministrativo regionale per il Lazio (tribunal administratif régional pour le Latium) doit être, en substance, confirmée et, d’autre part, que, pour trancher l’affaire dont il est saisi, il y a lieu de déterminer si la disposition imposant l’incombustibilité en cause, s’agissant des matériaux avec lesquels doivent être réalisées les cheminées, constitue une « règle technique » posant une limite à la commercialisation des produits de construction, qui, partant, doit être notifiée à la Commission.

20      Dans ces circonstances, le Consiglio di Stato (Conseil d’État) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante :

« La directive 89/106 s’oppose-t-elle à ce que les cheminées doivent “être réalisées avec des matériaux incombustibles”, comme le prévoit la disposition figurant à la deuxième partie de l’annexe IX de la cinquième partie du code de l’environnement, concernant les “centrales thermiques civiles”, qui n’a pas été notifiée ? »

 Sur la question préjudicielle

21      À titre liminaire, il doit être relevé que, dans leurs observations écrites, tant Beca Engineering que la Commission invitent la Cour à répondre à des questions supplémentaires.

22      Beca Engineering considère que la question préjudicielle doit être reformulée en ce sens qu’elle porte sur le point de savoir si les directives 98/34 et 89/106 ainsi que les articles 30 et 36 TFUE font obstacle à l’application d’une disposition nationale qui constitue une « règle technique » n’ayant pas été notifiée à la Commission, de la nature de celles figurant à la section II de l’annexe IX de la cinquième partie du code de l’environnement, concernant les centrales thermiques civiles, visant des produits légalement fabriqués et commercialisés dans plusieurs États membres.

23      La Commission estime qu’il revient à la Cour de préciser, en premier lieu, si une réglementation telle que celle en cause au principal constitue une règle technique qui aurait dû être communiquée à la Commission en application de la directive 98/34, en deuxième lieu, si les articles 34 et 36 TFUE s’opposent à une réglementation prévoyant que les cheminées doivent « être réalisées avec des matériaux incombustibles » et, en troisième lieu, si, pour des produits de construction provenant d’un État membre pour lesquels il n’existe pas de spécifications techniques harmonisées ou reconnues au niveau de l’Union européenne, l’article 34 TFUE s’oppose à ce que l’État membre de fabrication et de mise sur le marché d’un tel produit refuse de reconnaître les certificats délivrés par un organisme d’un autre État membre, non reconnu officiellement par l’État membre de fabrication et de mise sur le marché.

24      À cet égard, il convient de rappeler que, aux termes de l’article 267 TFUE, il appartient au juge national, et non aux parties au litige au principal, de saisir la Cour et que, partant, la faculté de déterminer les questions à soumettre à la Cour est dévolue au seul juge national, les parties pas plus que les autres intéressés visés à l’article 23 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne ne pouvant en changer la teneur (voir, en ce sens, arrêts du 17 juillet 1997, Affish, C‑183/95, EU:C:1997:373, point 24, ainsi que du 6 octobre 2015, T-Mobile Czech Republic et Vodafone Czech Republic, C‑508/14, EU:C:2015:657, point 28 et jurisprudence citée).

25      Pour autant, la circonstance qu’une juridiction nationale a, sur un plan formel, formulé une question préjudicielle en se référant à certaines dispositions du droit de l’Union ne fait pas obstacle à ce que la Cour fournisse à cette juridiction tous les éléments d’interprétation qui peuvent être utiles au jugement de l’affaire dont elle est saisie, que cette juridiction y ait fait ou non référence dans l’énoncé de sa demande de décision préjudicielle (arrêt du 29 octobre 2015, Nagy, C‑583/14, EU:C:2015:737, point 20 et jurisprudence citée).

26      Il appartient, à cet égard, à la Cour d’extraire de l’ensemble des éléments fournis par la juridiction nationale, et notamment de la motivation de la décision de renvoi, les éléments du droit de l’Union qui appellent une interprétation compte tenu de l’objet du litige (arrêt du 1er octobre 2015, Doc Generici, C‑452/14, EU:C:2015:644, point 34 et jurisprudence citée).

27      Tel doit être le cas en l’occurrence compte tenu des doutes émis par la juridiction de renvoi dans sa décision de renvoi s’agissant de l’interprétation de la directive 98/34.

28      Il convient donc de considérer que, par sa question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si les directives 89/106 et 98/34 doivent être interprétées en ce sens qu’elles s’opposent à une réglementation nationale imposant que les cheminées de centrales thermiques civiles soient réalisées avec des produits, tels que ceux en cause au principal, qui soient incombustibles.

29      En vertu de l’article 99 du règlement de procédure de la Cour, lorsqu’une question posée à titre préjudiciel est identique à une question sur laquelle celle-ci a déjà statué, lorsque la réponse à une telle question peut être clairement déduite de la jurisprudence ou lorsque la réponse à la question posée à titre préjudiciel ne laisse place à aucun doute raisonnable, la Cour peut à tout moment, sur proposition du juge rapporteur, l’avocat général entendu, décider de statuer par voie d’ordonnance motivée.

30      Il y a lieu de faire application de cette disposition dans la présente affaire, compte tenu, en particulier, de l’arrêt du 18 octobre 2012, Elenca (C‑385/10, EU:C:2012:634), rendu à l’occasion d’une demande de décision préjudicielle présentée par le Consiglio di Stato (Conseil d’État) dans le cadre d’un litige concernant la réglementation en cause dans la présente affaire et intéressant des tubes gonflables pour cheminées et conduits de fumée, ainsi que des arrêts du 30 avril 1996, CIA Security International (C‑194/94, EU:C:1996:172) ; du 26 septembre 2000, Unilever (C‑443/98, EU:C:2000:496), et 16 juillet 2015, UNIC et Uni.co.pel (C‑95/14, EU:C:2015:492).

31      À cet égard, il convient de relever que les gaines thermodurcies pour conduits de fumée en cause au principal sont des « produits de construction », au sens de l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 89/106 (voir, en ce sens, arrêt du 18 octobre 2012, Elenca, C‑385/10, EU:C:2012:634, point 16).

32      Dans ce contexte, il doit être rappelé que la directive 89/106 a pour objet principal d’éliminer les obstacles aux échanges en créant des conditions permettant aux produits de construction d’être librement commercialisés à l’intérieur de l’Union. À cette fin, cette directive précise les exigences essentielles auxquelles doivent satisfaire les produits de construction et qui sont mises en œuvre par des normes harmonisées et des normes nationales de transposition, par des agréments techniques européens ainsi que par des spécifications techniques nationales reconnues au niveau de l’Union (arrêt du 18 octobre 2012, Elenca, C‑385/10, EU:C:2012:634, point 15 et jurisprudence citée).

33      Toutefois, s’agissant d’un produit de construction non couvert par l’article 4, paragraphe 2, de la directive 89/106, à savoir non couvert par une norme harmonisée, une norme nationale de transposition d’une norme harmonisée, un agrément technique européen ou une spécification technique nationale reconnue au niveau de l’Union, il y a lieu de se référer à l’article 6, paragraphe 2, de cette directive, selon lequel les États membres autorisent la mise sur le marché de ce produit sur leur territoire si celui-ci satisfait à des dispositions nationales conformes au traité FUE, et ce jusqu’à ce que les spécifications techniques européennes en disposent autrement (voir, en ce sens, arrêt du 18 octobre 2012, Elenca, C‑385/10, EU:C:2012:634, point 18).

34      Or, il est constant que les produits de construction concernés ne faisaient, à la date des faits en cause au principal, l’objet ni d’une norme harmonisée, ni d’un agrément technique européen, ni d’une spécification technique nationale reconnue au niveau de l’Union, au sens de l’article 4, paragraphe 2, de la directive 89/106.

35      Dès lors, la compatibilité avec le droit de l’Union d’une réglementation nationale telle que celle en cause au principal ne doit pas être appréciée à la lumière de la directive 89/106.

36      Toutefois, il convient de relever qu’une telle réglementation, en ce qu’elle impose des caractéristiques techniques devant être satisfaites par les produits en cause au principal, constitue une « spécification technique », au sens de l’article 1er, point 3, de la directive 98/34, et, partant, doit être qualifiée de « règle technique », au sens de l’article 1er, point 11, de cette directive.

37      En effet, il est de jurisprudence constante que la méconnaissance de l’obligation de communication immédiate des règles techniques par les États membres à la Commission, prévue à l’article 8 de la directive 98/34, entraîne l’inapplicabilité des règles techniques concernées, de sorte qu’elles ne peuvent être opposées aux particuliers et que ces derniers peuvent ainsi se prévaloir de l’article 8 de la directive 98/34 devant le juge national, auquel il incombe de refuser d’appliquer une règle technique nationale qui n’a pas été notifiée conformément à cette directive (voir, en ce sens, arrêts du 30 avril 1996, CIA Security International, C‑194/94, EU:C:1996:172, points 44 et 54 ; du 26 septembre 2000, Unilever, C‑443/98, EU:C:2000:496, point 49, ainsi que du 16 juillet 2015, UNIC et Uni.co.pel, C‑95/14, EU:C:2015:492, point 29).

38      Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de répondre à la question posée de la manière suivante :

–        la compatibilité avec le droit de l’Union d’une réglementation nationale imposant que les cheminées de centrales thermiques civiles soient réalisées avec des produits de construction, tels que ceux en cause au principal, qui soient incombustibles ne doit pas être appréciée à la lumière de la directive 89/106 ;

–        la directive 98/34 doit être interprétée en ce sens qu’une telle réglementation nationale doit être qualifiée de « règle technique », au sens de l’article 1er, points 3 et 11, de ladite directive, et que, à défaut de communication de cette réglementation à la Commission par l’État membre concerné, conformément à l’article 8 de la même directive, cette réglementation nationale est inapplicable, ce dont les particuliers peuvent se prévaloir devant le juge national.

 Sur les dépens

39      La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

Par ces motifs, la Cour (huitième chambre) dit pour droit :

La compatibilité avec le droit de l’Union d’une réglementation nationale imposant que les cheminées de centrales thermiques civiles soient réalisées avec des produits de construction, tels que ceux en cause au principal, qui soient incombustibles ne doit pas être appréciée à la lumière de la directive 89/106/CEE du Conseil, du 21 décembre 1988, relative au rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres concernant les produits de construction, telle que modifiée par le règlement (CE) n° 1882/2003 du Parlement européen et du Conseil, du 29 septembre 2003.

La directive 98/34/CE du Parlement européen et du Conseil, du 22 juin 1998, prévoyant une procédure d’information dans le domaine des normes et réglementations techniques et des règles relatives aux services de la société de l’information, telle que modifiée par la directive 98/48/CE du Parlement européen et du Conseil, du 20 juillet 1998, doit être interprétée en ce sens qu’une telle réglementation nationale doit être qualifiée de « règle technique », au sens de l’article 1er, points 3 et 11, de ladite directive, et que, à défaut de communication de cette réglementation à la Commission européenne par l’État membre concerné, conformément à l’article 8 de la même directive, telle que modifiée, cette réglementation nationale est inapplicable, ce dont les particuliers peuvent se prévaloir devant le juge national.

Signatures


* Langue de procédure: l’italien.

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