Choose the experimental features you want to try

This document is an excerpt from the EUR-Lex website

Document 62019CO0553

    Order of the Court (Ninth Chamber) of 2 April 2020.
    International Tax Stamp Association Ltd (ITSA) v European Commission.
    Appeal — Article 181 of the Rules of Procedure of the Court of Justice — Approximation of laws — Manufacture, presentation and sale of tobacco and related products — Establishment and operation of a traceability system for tobacco products — Delegated regulation and implementing measures — Action for annulment — Admissibility — Article 263, fourth para., TFEU — Lack of individual concern — Article 256(1), second para., TFEU — Article 58, first para., of the Statue of the Court of Justice of the European Union — Article 168(1)(d) and Article 169(2) of the Rules of Procedure of the Court of Justice — Paragraphs of the contested grounds of the judgment under appeal and specific legal arguments in support of the appeal not made clear — Line of argument asking the Court simply to re-examine the arguments put forward at first instance — Manifestly inadmissible appeal.
    Case C-553/19 P.

    ECLI identifier: ECLI:EU:C:2020:248

    ORDONNANCE DE LA COUR (neuvième chambre)

    2 avril 2020 (*)

    « Pourvoi – Article 181 du règlement de procédure de la Cour – Rapprochement des législations – Fabrication, présentation et vente des produits du tabac et des produits connexes ‐ Mise en place et fonctionnement d’un système de traçabilité des produits du tabac – Règlement délégué et actes d’exécution – Recours en annulation – Recevabilité – Article 263, quatrième alinéa, TFUE – Défaut d’affectation directe – Article 256, paragraphe 1, second alinéa, TFUE – Article 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne – Article 168, paragraphe 1, sous d), et article 169, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour – Absence d’identification précise des points de motifs critiqués de l’arrêt attaqué et d’arguments juridiques spécifiques au soutien du pourvoi – Argumentation visant à obtenir de la Cour un simple réexamen des arguments présentés en première instance – Pourvoi manifestement irrecevable »

    Dans l’affaire C‑553/19 P,

    ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 18 juillet 2019,

    International Tax Stamp Association Ltd (ITSA), établie à Sunbury‑on‑Thames (Royaume-Uni), représentée par Me F. Scanvic, avocat,

    partie requérante,

    l’autre partie à la procédure étant :

    Commission européenne, représentée par Mmes I. Rubene et C. Valero, en qualité d’agents,

    partie défenderesse en première instance,



    LA COUR (neuvième chambre),

    composée de M. S. Rodin (rapporteur), président de chambre, M. D. Šváby et Mme K. Jürimäe, juges,

    avocat général : M. E. Tanchev,

    greffier : M. A. Calot Escobar,

    vu la décision prise, l’avocat général entendu, de statuer par voie d’ordonnance motivée, conformément à l’article 181 du règlement de procédure de la Cour,

    rend la présente

    Ordonnance

    1        Par son pourvoi, International Tax Stamp Association Ltd (ITSA) demande l’annulation de l’ordonnance du Tribunal de l’Union européenne du 16 mai 2019, ITSA/Commission (T‑396/18, non publiée, ci-après l’« ordonnance attaquée », EU:T:2019:342), par laquelle celui-ci a rejeté comme étant irrecevable son recours tendant à l’annulation du règlement délégué (UE) 2018/573 de la Commission, du 15 décembre 2017, relatif aux éléments essentiels des contrats de stockage de données devant être conclus dans le cadre d’un système de traçabilité des produits du tabac (JO 2018, L 96, p. 1), du règlement d’exécution (UE) 2018/574 de la Commission, du 15 décembre 2017, relatif aux normes techniques pour la mise en place et le fonctionnement d’un système de traçabilité des produits du tabac (JO 2018, L 96, p. 7), et de la décision d’exécution (UE) 2018/576 de la Commission, du 15 décembre 2017, concernant les normes techniques nécessaires pour les dispositifs de sécurité appliqués aux produits du tabac (JO 2018, L 96, p. 57) (ci-après, ensemble, les « actes litigieux »).

     Les antécédents du litige, la procédure devant le Tribunal et l’ordonnance attaquée

    2        Les antécédents du litige ont été exposés par le Tribunal aux points 1 à 8 de l’ordonnance attaquée et peuvent, pour les besoins de la présente procédure, être résumés de la manière suivante.

    3        L’ITSA est une association de droit du Royaume-Uni dont les membres sont des fabricants de timbres fiscaux.

    4        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 29 juin 2018, l’ITSA a formé un recours en annulation contre les actes litigieux, qui ont été adoptés sur le fondement, notamment, des articles 15 et 16 de la directive 2014/40/UE du Parlement européen et du Conseil, du 3 avril 2014, relative au rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres en matière de fabrication, de présentation et de vente des produits du tabac et des produits connexes, et abrogeant la directive 2001/37/CE (JO 2014, L 127, p. 1).

    5        Ces articles énoncent, respectivement, des règles relatives à la traçabilité des produits du tabac et des conditions applicables au dispositif de sécurité devant être présent sur les unités de conditionnement de ces produits.

    6        Par acte déposé au greffe du Tribunal le 5 octobre 2018, la Commission européenne a soulevé une exception d’irrecevabilité de ce recours au titre de l’article 130 du règlement de procédure du Tribunal. Cette exception reposait sur deux fins de non-recevoir, tirées, la première, du défaut de qualité pour agir de la requérante et de ses membres et, la seconde, du défaut d’intérêt à agir de ceux-ci.

    7        En ce qui concerne la qualité pour agir, la Commission soutenait que la requérante et ses membres n’étaient ni directement ni individuellement concernés par les actes litigieux, qui, en outre, comportaient des mesures d’exécution.

    8        Dans l’ordonnance attaquée, le Tribunal a, en l’absence d’arguments précis de la requérante concernant sa propre situation juridique, examiné uniquement la qualité pour agir des membres de celle-ci.

    9        À cet égard, le Tribunal a, aux points 28 à 68 de l’ordonnance attaquée, examiné au regard de chacun des actes litigieux si les membres de l’ITSA étaient directement concernés par ceux-ci, au sens de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE.

    10      Estimant, au point 69 de l’ordonnance attaquée, que tel n’était pas le cas, le Tribunal a, sans avoir examiné les autres fins de non-recevoir soulevées par la Commission, dont l’examen n’était plus nécessaire, accueilli l’exception d’irrecevabilité tirée du défaut de qualité pour agir de la requérante et, par conséquent, rejeté le recours comme étant irrecevable.

     Les conclusions des parties

    11      La requérante demande à la Cour :

    –        d’annuler l’ordonnance attaquée et

    –        d’annuler les actes litigieux.

    12      La Commission demande à la Cour :

    –        de rejeter le pourvoi et

    –        de condamner la requérante aux dépens.

     Sur le pourvoi

    13      En vertu de l’article 181 du règlement de procédure de la Cour, lorsque le pourvoi est, en tout ou en partie, manifestement irrecevable ou manifestement non fondé, cette dernière peut, à tout moment, sur proposition du juge rapporteur, l’avocat général entendu, décider de rejeter totalement ou partiellement ce pourvoi par voie d’ordonnance motivée.

    14      Il y a lieu de faire application de cette disposition dans le cadre du présent pourvoi.

     Argumentation des parties

    15      L’ITSA soutient, à titre liminaire, qu’elle devrait être considérée non pas comme une association de producteurs de timbres fiscaux pour les produits du tabac, mais plutôt comme une association de fournisseurs de technologies, de systèmes et de stratégies pour la sécurité des chaînes de distribution ainsi que pour l’authentification. Elle estime également que c’est à tort que l’ordonnance attaquée indique que des droits spécifiques ne lui ont pas été accordés dans le cadre de la procédure d’élaboration des actes litigieux, alors qu’elle a joué un rôle dans le cadre de cette procédure.

    16      Sur le fond, l’ITSA énonce les raisons pour lesquelles elle estime disposer d’un intérêt propre pour attaquer les actes litigieux.

    17      S’agissant, en premier lieu, du règlement d’exécution 2018/574, elle fait valoir, premièrement, que, en raison de l’affaiblissement des technologies de suivi de traçabilité auquel cet acte mènerait, celui-ci affecterait directement et individuellement l’ITSA car il réduirait la portée du standard, la robustesse des technologies de lutte contre les trafics et, dès lors, la raison d’être de l’ITSA.

    18      Deuxièmement, dans la mesure où le Tribunal a jugé que les règles établies par ce règlement d’exécution, relatives aux informations devant apparaître sur l’identifiant ainsi qu’à l’obligation de conclure des contrats de stockage de données avec des tiers indépendants, avaient déjà été prévues à l’article 15, paragraphes 2 et 8, de la directive 2014/40, alors que, d’une part, ni la requérante ni ses membres n’avaient contesté cette directive, et, d’autre part, l’exception d’illégalité de ladite directive soulevée par la requérante dans sa requête en première instance devait être écartée au motif que la possibilité donnée par l’article 277 TFUE ne constitue pas un droit d’action autonome et ne peut être exercée que de manière incidente, l’ITSA fait valoir que rien dans la jurisprudence de la Cour n’interdit d’exciper de l’illégalité d’un acte qu’un requérant aurait pu attaquer directement.

    19      Troisièmement, ce serait à tort que le Tribunal a considéré que son argumentation quant à l’identifiant n’était pas cohérente. En effet, le Tribunal aurait procédé à une lecture erronée tant de sa requête en première instance que de son mémoire en réponse.

    20      Quatrièmement, serait également erronée la considération du Tribunal selon laquelle l’ITSA n’aurait fourni aucun élément de preuve du fait que les opérations de marquage et celles du dispositif anti-manipulation sont confiées à l’industrie du tabac, ce qui priverait ses membres des marchés traditionnels qui leur étaient confiés par les États membres.

    21      Cinquièmement, le Tribunal aurait à tort déduit de la jurisprudence de la Cour, d’une part, que, à supposer même « que le système prévu par le règlement soit susceptible de mettre en danger les activités commerciales des membres de la requérante, ces conséquences économiques ne concerneraient pas leur situation juridique, mais uniquement leur situation de fait » et, d’autre part, « que le fait que les dispositions du règlement d’exécution 2018/574 placent les membres de la requérante dans une situation concurrentielle désavantageuse ne permet pas en soi de considérer qu'ils sont affectés dans leur situation juridique par les dispositions contestées et, partant, directement concernés par celles-ci ».

    22      Sixièmement, le Tribunal, en estimant que la requérante ne présentait pas d’arguments concrets permettant de déterminer de quelle manière les dispositions du règlement d’exécution 2018/574 affecteraient directement ses membres en ce qui concerne plus particulièrement leur devoir d’enregistrer certaines données, aurait mal compris l’argumentation de l’ITSA sur ce point.

    23      L’ITSA déduit des considérations qui précèdent que les motifs de l’ordonnance attaquée sont insuffisants et de nature à être censurés par la Cour.

    24      En deuxième lieu, en réponse aux arguments que la Commission soulevait en première instance pour contester le fait que les producteurs de timbres fiscaux étaient directement affectés par le règlement délégué 2018/573, l’ITSA fait valoir que son intérêt propre est de défendre la sécurité et la robustesse des systèmes de lutte contre les trafics illicites et estime que ce règlement affaiblit ces systèmes. Elle critique, en outre, l’ordonnance attaquée en ce que le Tribunal n’a affirmé que de façon lapidaire que l’ITSA n’était pas directement affectée par ledit règlement.

    25      S’agissant, en troisième lieu, de la décision d’exécution 2018/576, l’ITSA conteste les motifs de l’ordonnance attaquée selon lesquels l’article 3 de cette décision d’exécution, lu conjointement avec l’article 4 de celle-ci, laisse un certain pouvoir d’appréciation aux États membres souhaitant maintenir l’utilisation des timbres fiscaux en tant que dispositifs de sécurité et n’a pas un caractère purement automatique, découlant de la seule réglementation de l’Union. L’ITSA fait valoir, à cet égard, qu’elle ne critiquait, en première instance, que l’article 3, paragraphe 2, de ladite décision d’exécution.

    26      L’ITSA conclut de l’ensemble des considérations qui précèdent que c’est à tort que le Tribunal a jugé que la condition relative à son affectation directe n’était pas remplie en l’espèce. Elle renvoie, s’agissant des autres conditions applicables à sa qualité pour agir, aux développements qu’elle y avait consacrés en première instance.

    27      La Commission estime que les arguments avancés par l’ITSA doivent être écartés comme étant irrecevables ou, en tout état de cause, comme étant dénués de fondement.

     Appréciation de la Cour

    28      Il convient de rappeler, à titre liminaire, qu’il résulte de l’article 256, paragraphe 1, second alinéa, TFUE, de l’article 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne ainsi que de l’article 168, paragraphe 1, sous d), et de l’article 169, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour qu’un pourvoi doit identifier avec précision les points de motifs critiqués de l’arrêt dont l’annulation est demandée et indiquer de façon précise les arguments juridiques qui soutiennent de manière spécifique cette demande, sous peine d’irrecevabilité du pourvoi ou du moyen concerné (arrêts du 26 janvier 2017, Mamoli Robinetteria/Commission, C‑619/13 P, EU:C:2017:50, point 42, ainsi que du 8 juin 2017, Dextro Energy/Commission, C‑296/16 P, non publié, EU:C:2017:437, point 60).

    29      Ne répond, notamment, pas à cette exigence le pourvoi ou le moyen du pourvoi qui, sans même comporter une argumentation visant spécifiquement à identifier l’erreur de droit dont seraient entachés l’arrêt ou l’ordonnance dont l’annulation est demandée, se limite à reproduire les moyens et arguments qui ont déjà été présentés devant le Tribunal. En effet, un tel pourvoi ou moyen constitue en réalité une demande visant à obtenir un simple réexamen de la requête présentée devant le Tribunal, ce qui échappe à la compétence de la Cour dans le cadre d’un pourvoi (voir, en ce sens, arrêt du 7 janvier 2004, Aalborg Portland e.a./Commission, C‑204/00 P, C‑205/00 P, C‑211/00 P, C‑213/00 P, C‑217/00 P et C‑219/00 P, EU:C:2004:6, point 51 ainsi que jurisprudence citée, et ordonnance du 29 janvier 2020, Silgan Closures et Silgan Holdings/Commission, C‑418/19 P, non publiée, EU:C:2020:43, point 71).

    30      En l’espèce, il y a lieu de constater que, de manière générale, le pourvoi n’identifie pas de façon précise les points de motifs de l’ordonnance attaquée qui sont contestés.

    31      En effet, dans sa requête en pourvoi, la requérante avance une argumentation qui semble mettre en cause la majeure partie de la motivation de l’ordonnance attaquée en suivant, pour l’essentiel, l’ordre suivant lequel celle-ci est développée, sans, pour autant, que cette requête comporte, d’une part, des indications précises relatives aux points critiqués de cette ordonnance et, d’autre part, des moyens précis et identifiables.

    32      Dans la mesure où le contexte permettrait néanmoins d’identifier les points de l’ordonnance attaquée qui seraient visés par les arguments invoqués, force est de constater, en tout état de cause, que la requérante se limite, notamment aux points 30 à 40, 53 à 58 et 73 à 75 de son pourvoi, à des critiques et à des affirmations générales, en réitérant, par ailleurs, en grande partie des arguments qu’elle a déjà présentés en première instance, tout en restant en défaut de spécifier les erreurs de droit que le Tribunal aurait ainsi commises dans l’ordonnance attaquée.

    33      Dans ces conditions, cette argumentation, dès lors qu’elle vise, en réalité, à obtenir de la Cour un simple réexamen des arguments présentés devant le Tribunal, doit être déclarée, conformément à la jurisprudence rappelée au point 29 de la présente ordonnance, comme étant manifestement irrecevable.

    34      En ce qui concerne, plus particulièrement, les arguments invoqués par la requérante aux points 41 à 52 et 59 à 72 de son pourvoi, dans lesquels elle indique reprendre des arguments de la Commission pour les réfuter, ces arguments sont également manifestement irrecevables, dès lors, d’une part, qu’ils ne visent pas l’ordonnance attaquée et, d’autre part, se bornent à répéter des arguments qu’elle opposait à l’exception d’irrecevabilité soulevée par la Commission en première instance [voir, par analogie, ordonnance du 19 mars 2019, Sevenfriday/EUIPO, C‑733/18 P, non publiée, EU:C:2019:222, point 5 (prise de position de l’avocat général Campos Sánchez-Bordona, point 8)].

    35      Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que le pourvoi doit être rejeté dans son intégralité comme étant manifestement irrecevable.


     Sur les dépens

    36      En application de l’article 137 du règlement de procédure de la Cour, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, de ce règlement, il est statué sur les dépens dans l’ordonnance qui met fin à l’instance.

    37      Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, de ce règlement, également applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, dudit règlement, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La Commission ayant conclu à la condamnation de la requérante et cette dernière ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de la condamner aux dépens.

    Par ces motifs, la Cour (neuvième chambre) ordonne :

    1)      Le pourvoi est rejeté comme étant manifestement irrecevable.

    2)      International Tax Stamp Association Ltd (ITSA) est condamnée aux dépens.

    Fait à Luxembourg, le 2 avril 2020.

    Le greffier

    Le président de la IXème chambre

    A. Calot Escobar

     

    S. Rodin


    *      Langue de procédure : le français.

    Top