Choose the experimental features you want to try

This document is an excerpt from the EUR-Lex website

Document 61997TO0301

    Order of the Court of First Instance (Fourth Chamber) of 20 March 1998.
    Pierre-Alexis Feral v Committee of the Regions of the European Union.
    Officials - Time-limit for lodging complaints - Manifest inadmissibility of the action.
    Case T-301/97.

    European Court Reports – Staff Cases 1998 I-A-00145; II-00471

    ECLI identifier: ECLI:EU:T:1998:61

    ORDONNANCE DU TRIBUNAL (quatrième chambre)

    20 mars 1998 ( *1 )

    «Fonctionnaires — Délai de réclamation — Irrecevabilité manifeste du recours»

    Dans l'affaire T-301/97,

    Pierre-Alexis Feral, fonctionnaire du Comité des régions de l'Union européenne, demeurant à Bruxelles, représenté par Me Georges Vandersanden, avocat au barreau de Bruxelles, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de la fiduciaire Myson SARL, 30, rue de Cessange,

    partie requérante,

    contre

    Comité des régions de l'Union européenne, représenté par M. Jordi Garcia-Petit, en qualité d'agent, assisté de Me Denis Waelbroeck, avocat au barreau de Bruxelles, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M. Carlos Gómez de la Cruz, membre du service juridique de la Commission, Centre Wagner, Kirchberg,

    partie défenderesse,

    ayant pour objet une demande d'annulation d'une décision du Comité des régions du 2 septembre 1997 refusant d'accorder au requérant l'indemnité journalière prévue à l'article 10, paragraphe 2, premier alinéa, sous b), de l'annexe VII du statut des fonctionnaires des Communautés européennes,

    LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (quatrième chambre),

    composé de Mme P. Lindh, président, MM. K. Lenaerts et J. D. Cooke, juges,

    greffier: M. H. Jung,

    rend la présente

    Ordonnance

    Faits à l'origine du recours

    1

    Le requérant, M. Ferai, est entré au service du Comité des régions (ci-après «CdR») le 16 mai 1994, en qualité d'agent auxiliaire. Le 1er janvier 1995, il a été engagé comme agent temporaire. Le 16 avril 1996, il a été nommé fonctionnaire stagiaire à la direction du greffe du service juridique et des études du CdR. Son stage s'est achevé le 16 janvier 1997.

    2

    Par lettre du 1er juillet 1996, le requérant a introduit une demande au titre de l'article 90, paragraphe 1, du statut des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après «statut»), «visant à obtenir la pleine et légitime application de l'article 10 de l'annexe VII du statut relatif à ľ'indemnité journalière'». Dans la dernière phrase de cette demande, il a précisé: «Le demandeur n'ayant pas droit à l'allocation de foyer, la durée d'octroi de l'indemnité journalière est fixée à 120 jours.»

    3

    Dans une note du 9 octobre 1996, adressée au requérant, le secrétaire général du CdR a indiqué que l'administration avait décidé de donner une suite favorable à ladite demande (ci-après «décision du 9 octobre 1996»).

    4

    Le 13 novembre 1996, le compte en banque du requérant a été crédité d'une somme correspondant aux indemnités journalières pour une période de 120 jours.

    5

    Par lettre datée du 14 février 1997, le requérant a introduit une autre demande au titre de l'article 90, paragraphe 1, du statut, visant de nouveau à obtenir «la pleine et légitime application de l'article 10 de l'annexe VII du statut relatif à ľ'indemnité journalière'». Il a précisé que, «ayant déjà perçu une somme équivalant à 120 jours d'indemnités (soit 4 mois), il [demandait] que lui [fût] versée une somme équivalant à 6 mois d'indemnités, soit au total 10 mois». Il a soutenu que lui avait été appliqué par erreur le dispositif de l'article 10, paragraphe 2, premier alinéa, sous a), de l'annexe VII du statut, qui limite la durée d'octroi de l'indemnité à 120 jours, alors qu'il aurait fallu lui appliquer le dispositif de l'article 10, paragraphe 2, premier alinéa, sous b), de l'annexe VII du statut, qui fixe la durée d'octroi de l'indemnité à toute «la durée du stage augmentée d'un mois», «si le fonctionnaire intéressé a la qualité de fonctionnaire stagiaire».

    6

    Par courrier du 2 septembre 1997, notifié au requérant le 3 septembre 1997 (ci-après «décision du 2 septembre 1997»), le secrétaire général du CdR a informé le requérant que ladite demande s'analysait, «en fait et en droit, comme une ‘réclamation’ au titre de l'article 90, paragraphe 2, du statut portant sur la durée d'octroi des indemnités journalières». Il a rejeté cette réclamation comme irrecevable, au motif que le requérant ne l'avait pas présentée contre la décision du 9 octobre 1996 dans le délai statutaire de trois mois, c'est-à-dire au plus tard le 9 janvier 1997. Il a ajouté que, dans la mesure où la décision de l'administration résultait d'une lecture littérale des termes de l'article 10 de l'annexe VII du statut, la réclamation était également non fondée.

    7

    Par lettre du 20 novembre 1997, le requérant a demandé au secrétaire général du CdR une copie de la décision du 9 octobre 1996, au motif qu'il ne lui semblait pas en avoir reçu copie.

    8

    Par requête déposée au greffe du Tribunal le 2 décembre 1997, le requérant a introduit le présent recours à rencontre de la décision du 2 septembre 1997.

    Conclusions des parties

    9

    Le requérant conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

    annuler la décision du 2 septembre 1997;

    ordonner en conséquence le versement complémentaire de l'indemnité journalière sur une période de six mois;

    condamner le CdR aux dépens.

    10

    Le CdR conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

    rejeter le recours comme irrecevable et, en tout état de cause, comme non fondé;

    statuer comme de droit sur les dépens.

    Sur la recevabilité

    11

    Aux termes de l'article 111 du règlement de procédure, lorsqu'un recours est manifestement irrecevable, le Tribunal peut, sans poursuivre la procédure, statuer par voie d'ordonnance motivée.

    12

    En l'espèce, le Tribunal s'estime suffisamment éclairé par la requête et le mémoire en défense, ainsi que par les pièces y annexées. Il n'y a donc pas lieu de poursuivre la procédure écrite ni d'ouvrir la procédure orale.

    Arguments des parties

    13

    Le requérant considère qu'il a correctement ouvert la procédure précontentieuse en introduisant une demande le 14 février 1997. Toutefois, il aurait estimé qu'il ne devait pas poursuivre dans cette voie, qui aurait exigé qu'il introduisît une réclamation au titre de l'article 90, paragraphe 2, du statut avant le 14 septembre 1997, soit dans les trois mois suivant le délai de réponse de quatre mois dont disposait l'administration en vertu de cette dernière disposition. Il aurait dès lors accepté la requalification opérée par le secrétaire général du CdR dans la décision du 2 septembre 1997, notifiée le 3 septembre 1997. Le délai pour introduire un recours contre cette dernière décision de rejet d'une réclamation aurait donc expiré le 3 décembre 1997, délai de distance non compris.

    14

    Cette conclusion serait étayée non seulement par le fait que le secrétaire général serait l'autorité administrative la plus élevée du CdR, mais également par le fait que l'objectif principal de la procédure précontentieuse, à savoir permettre à l'autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après «AIPN») de se prononcer avant tout recours sur la contestation qui lui est présentée par l'un de ses fonctionnaires, aurait été atteint. En outre, la décision du 2 septembre 1997 étant de toute évidence constitutive d'un acte définitif lui faisant grief, une «nouvelle» réclamation n'aurait eu aucun sens. Il aurait donc été obligé d'utiliser la procédure de recours prévue à l'article 91 du statut dès lors qu'il entendait demander l'annulation de ladite décision.

    15

    Le requérant affirme que, en dépit de ses recherches, il n'a pas retrouvé trace de la décision du 9 octobre 1996. Il ne se souvient pas l'avoir réceptionnée, soulignant que, par sa lettre du 20 novembre 1997, il en a demandé une copie à l'administration. Selon lui, il faudrait prendre en considération, comme acte faisant grief, l'extrait de compte en banque du 15 novembre 1996 qui fait apparaître le paiement d'indemnités journalières pour une période de 120 jours. Dans ces conditions, la réclamation, du 14 février 1997, aurait été introduite dans le délai statutaire de trois mois. Ayant été notifiée le 3 septembre 1997, soit après le délai de quatre mois prescrit, mais dans le délai de recours, la réponse à la réclamation aurait reporté le délai de recours jusqu'au 5 décembre 1997, délai de distance inclus.

    16

    Le CdR fait valoir que la décision du 9 octobre 1996 avait déjà accueilli la demande du 1er juillet 1996. D'après lui, si le requérant estimait que cette décision lui faisait grief, il aurait dû introduire une réclamation contre elle dans le délai statutaire de trois mois, soit avant le 9 janvier 1997. Introduite le 14 février 1997, la réclamation aurait donc été irrecevable. Par suite, le présent recours serait lui-même irrecevable.

    17

    Au cas où le Tribunal considérerait que la lettre du 14 février 1997 constituait une demande au titre de l'article 90, paragraphe 1, du statut, le CdR fait remarquer que le recours serait de toute façon irrecevable, car le requérant n'a pas introduit une réclamation contre la décision implicite de rejet de cette demande, intervenue le 14 juin 1997.

    18

    Même si le Tribunal considérait que la décision du 2 septembre 1997 constituait en soi un acte faisant grief, le recours devrait être rejeté comme irrecevable, en l'absence d'une réclamation introduite contre cet acte.

    Appréciation du Tribunal

    19

    Les délais de réclamation et de recours prévus par les articles 90 et 91 du statut sont d'ordre public. Même dans l'hypothèse où l'administration a répondu au stade de la phase précontentieuse aux arguments invoqués quant au fond par le réclamant, le Tribunal ne se trouve pas dispensé de l'obligation de vérifier la recevabilité du recours au regard des délais statutaires (voir arrêt de la Cour du 12 juillet 1984, Moussis/Commission, 227/83, Rec. p. 3133, points 12 et 13, et ordonnance du Tribunal du 15 juillet 1993, Hogan/Parlement, T-115/92, Rec. p. II-895, point 31).

    20

    En l'espèce, le requérant a introduit une demande au titre de l'article 90, paragraphe 1, du statut le 1er juillet 1996. Cette demande a été accueillie par le CdR par décision du 9 octobre 1996.

    21

    Le requérant a initialement qualifié de demande au titre de l'article 90, paragraphe 1, du statut sa lettre du 14 février 1997. Il affirme avoir ensuite accepté la «requalification» en réclamation opérée par le secrétaire général du CdR dans la décision du 2 septembre 1997.

    22

    A cet égard, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, la qualification juridique exacte d'une lettre ou d'une note relève de la seule appréciation du Tribunal et non de la volonté des parties. C'est ainsi que la lettre par laquelle un fonctionnaire, sans demander expressément le retrait de la décision en cause, vise clairement à obtenir satisfaction de ses griefs à l'amiable ou encore la lettre qui manifeste clairement la volonté du requérant de contester la décision qui lui fait grief ont été qualifiées de «réclamations» (voir ordonnance Hogan/Parlement, précitée, point 36).

    23

    En l'espèce, il ressort des termes mêmes de la lettre du 14 février 1997 que le requérant conteste la décision lui octroyant une somme équivalant à seulement 120 jours d'indemnités journalières, en faisant valoir que ladite décision, «suite certainement à une erreur», avait appliqué l'article 10, paragraphe 2, premier alinéa, sous a), de l'annexe VII du statut, alors qu'elle aurait dû lui allouer une somme équivalant à dix mois d'indemnités journalières, en application de l'article 10, paragraphe 2, premier alinéa, sous b), de l'annexe VII du statut.

    24

    Cette lettre doit donc être analysée comme une réclamation au titre de l'article 90, paragraphe 2, du statut dirigée contre ladite décision.

    25

    Toutefois, il n'est pas établi que le requérant ait eu connaissance de la décision du 9 octobre 1996 avant l'expiration du délai de quatre mois dont disposait le CdR pour prendre une décision sur la demande du 1er juillet 1996. Par suite, en application de l'article 90, paragraphe 2, premier alinéa, troisième tiret, du statut, la réclamation aurait dû être introduite au plus tard le 4 février 1997, c'est-à-dire dans les trois mois suivant la décision implicite de rejet de la demande, intervenue à l'expiration du délai de réponse de quatre mois, soit, conformément aux articles 2, paragraphe 1, et 3, paragraphe 4, du règlement (CEE, Euratom) no 1182/71 du Conseil, du 3 juin 1971, portant détermination des règles applicables aux délais, aux dates et aux termes (JO L 124, p. 1), le 4 novembre 1996, premier jour ouvrable suivant le vendredi 1er novembre 1996, jour férié (voir, en ce qui concerne le délai de réponse à une réclamation, ordonnance du Tribunal du 13 mars 1998, Lonuzzo-Murgante/Parlement, T-247/97, RecFP p. II-317, point 42), à un moment où aucune indemnité ne lui avait encore été versée.

    26

    II y a lieu de souligner que, à la différence de l'article 91, paragraphe 3, du statut en ce qui concerne le délai de recours, l'article 90, paragraphe 2, du statut ne dispose pas qu'une décision explicite intervenant après la décision implicite de rejet d'une demande introduite au titre de l'article 90, paragraphe 1, du statut fait à nouveau courir le délai de réclamation. Le fait que, en l'espèce, le requérant a eu connaissance de la décision explicite de l'administration à la réception de l'extrait de compte en banque du 15 novembre 1996 est donc sans pertinence.

    27

    II s'ensuit que la réclamation était irrecevable comme n'ayant pas été introduite dans le délai prévu à l'article 90, paragraphe 2, du statut.

    28

    En conséquence, le présent recours est lui-même manifestement irrecevable.

    29

    Au surplus, même si la lettre du 14 février 1997 devait être considérée comme une demande au titre de l'article 90, paragraphe 1, du statut, ce qui n'est pas le cas, le recours serait irrecevable pour non-respect de la procédure administrative préalable prévue par les articles 90 et 91 du statut. En effet, ainsi que le requérant le reconnaît lui-même, il aurait dû dans ce cas introduire une réclamation au titre de l'article 90, paragraphe 2, du statut dans un délai de trois mois à compter de l'expiration du délai de réponse à la demande, ce qu'il n'a pas fait.

    30

    Enfin, le requérant ne peut soutenir que la réponse négative de l'AIPNdu 2 septembre 1997 constituait un acte définitif faisant grief, qui était dès lors directement attaquable. En effet, en vertu de l'article 91, paragraphe 2, du statut, un recours n'est recevable que si l'AIPN a été préalablement saisie d'une réclamation au sens de l'article 90, paragraphe 2, du statut, dans le délai prévu par cette disposition et si cette réclamation a fait l'objet d'une décision explicite ou implicite de rejet.

    Sur les dépens

    31

    Conformément à l'article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens. Toutefois, en vertu de l'article 88 du même règlement, dans les litiges entre les Communautés et leurs agents, les frais exposés par les institutions restent à la charge de celles-ci. En l'espèce, chacune des parties supportera donc ses propres dépens.

     

    Par ces motifs,

    LE TRIBUNAL (quatrième chambre) ordonne:

     

    1)

    Le recours est rejeté comme manifestement irrecevable.

     

    2)

    Chaque partie supportera ses propres dépens.

     

    Fait à Luxembourg, le 20 mars 1998.

    Le greffier

    H. Jung

    Le président

    P. Lindh


    ( *1 ) Lingue de procédure: le français.

    Top