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Document 61995TJ0021

    Judgment of the Court of First Instance (Third Chamber) of 5 November 1996.
    Marco Mazzocchi-Alemanni v Commission of the European Communities.
    Officials - Supplementary sickness insurance schene for officials serving in a third country - Procedure for reimbursement of medical expenses - Application of ceilings.
    Joined cases T-21/95 and T-186/95.

    European Court Reports – Staff Cases 1996 I-A-00501; II-01377

    ECLI identifier: ECLI:EU:T:1996:158

    ARRÊT DU TRIBUNAL (troisième chambre)

    5 novembre 1996 ( *1 )

    «Fonctionnaires - Régime d'assurance maladie complémentaire pour fonctionnaires affectés dans un pays tiers - Modalités du remboursement de frais médicaux - Application de plafonds»

    Dans les affaires jointes T-21/95 et T-186/95,

    Marco Mazzocchi-Alemanni, fonctionnaire de la Commission des Communautés européennes, résidant à Libreville (Gabon), représenté par Me Nicolas Lhoëst, avocat au barreau de Bruxelles, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de la fiduciaire Myson SARL, 1, rue Glesener,

    partie requérante,

    contre

    Commission des Communautés européennes, représentée par M. Julian Curiali, membre du service juridique, en qualité d'agent, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M. Carlos Gómez de la Cruz, membre du service juridique, Centre Wagner, Kirchberg,

    partie défenderesse,

    ayant pour objet une demande d'annulation de la décision de la Commission refusant au requérant le remboursement à 100 % de certains frais dentaires,

    LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (troisième chambre),

    composé de MM. C. P. Briët, président, B. Vesterdorf et A. Potocki, juges,

    greffier: Mme B. Pastor, administrateur principal,

    vu la procédure écrite et à la suite de la procédure orale du 11 juillet 1996,

    rend le présent

    Arrêt

    Cadre réglementaire

    1

    L'article 72, paragraphe 1, du statut des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après «statut») prévoit un plafond pour le remboursement de frais médicaux à concurrence de 80 ou 85 % des frais exposés, selon le cas, à l'exception de frais causés par une maladie grave pour lesquels un remboursement à 100 % est prévu. L'annexe X du statut (ci-après «annexe X») contient des dispositions particulières et dérogatoires applicables aux fonctionnaires des Communautés européennes affectés dans un pays tiers. Cette annexe a été insérée dans le statut par le règlement (Euratom, CECA, CEE) no 3019/87 du Conseil, du 5 octobre 1987 (JO L 286, p. 3, ci-après «règlement no 3019/87»).

    2

    L'article 24, premier alinéa, de l'annexe X se lit comme suit:

    «Le fonctionnaire, son conjoint, ses enfants et les autres personnes à sa charge sont couverts par une assurance maladie complémentaire qui couvre la différence entre les frais réellement exposés et les prestations du régime de couverture prévu à l'article 72 du statut, à l'exclusion du paragraphe 3 dudit article.»

    3

    L'article 24 de l'annexe X a fait l'objet de dispositions générales d'exécution, adoptées par la Commission et publiées aux Informations administratives no 642, du 17 septembre 1990 (ci-après «DGE»).

    4

    L'article 5 des DGE dispose:

    «Le fonctionnaire affecté hors Communauté est remboursé des frais réellement exposés par lui-même et ses ayants droit [...] Toutefois, au-delà d'une limite à partir de laquelle les frais exposés sont considérés comme excessifs, l'intéressé ne peut prétendre à aucun remboursement.

    La notion d'excessivité est déterminée par le Bureau central après avis des médecins-conseil, lesquels tiennent compte des coûts normaux dans le pays hors Communauté où les frais ont été exposés.

    [...]

    Lorsque les frais sont exposés à l'intérieur de la Communauté, leur remboursement s'effectue dans la limite maximale du seuil d'excessivité tel que fixé en liaison avec le point XV.2 de l'annexe I de la réglementation.»

    Faits à l'origine du litige

    Affaire T-21/95

    5

    Le requérant est un fonctionnaire affecté à la délégation de la Commission au Gabon.

    6

    Ayant des problèmes dentaires, il s'est rendu lors de son congé annuel chez son dentiste à Rome. Celui-ci a établi un devis relatif, notamment, à la pose de prothèses fixes. Le montant prévu pour cette intervention s'élevait à une somme de 18 600 000 LIT, soit environ 362 309 BFR.

    7

    Le 28 mars 1994, le requérant a adressé ledit devis à la direction générale Personnel et administration (DG IX) de la Commission en invoquant le bénéfice des dispositions de l'article 24 de l'annexe X.

    8

    Le 8 avril 1994, Mme D., responsable au sein de l'unité 5 («assurance maladie et accidents») de la direction B («droits et obligations») de la DG IX, lui a renvoyé le devis en précisant que le remboursement en application de l'article 72 du statut s'élèverait à 108 956 BFR. Elle a ajouté: «Le remboursement prévu par l'article 24 de l'annexe X du statut vous sera accordé si les conditions de résidence sont remplies.»

    9

    Par courrier du 18 avril 1994, le requérant a invité Mme D. à lui indiquer à quelles conditions de résidence elle faisait allusion dans sa lettre du 8 avril 1994. Il lui a par ailleurs demandé jusqu'à quel montant précis l'article 24 de l'annexe X était, selon ses services, susceptible d'être appliqué. Plus précisément, il lui a demandé si la différence totale entre 18 600 000 LIT et le montant de 108 956 BFR accordé sur la base de l'article 72 du statut serait prise en charge au titre dudit article 24.

    10

    En réponse à cette lettre, Mme D. a fait savoir au requérant, par lettre du 4 mai 1994, que la phrase «Le remboursement prévu par l'article 24 de l'annexe X du statut vous sera accordé si les conditions de résidence sont remplies» provenait d'une lettre type et que, pour le requérant, ces conditions de résidence étaient automatiquement remplies. En outre, elle a indiqué que le «remboursement complémentaire au titre de l'article 24, annexe X, [lui serait] accordé conformément [aux] dispositions en vigueur et notamment [à l'] article 5, dernier alinéa» des DGE.

    11

    Le 5 juillet 1994, le requérant a introduit en vertu de l'article 90, paragraphe 2, du statut une réclamation contre la «décision» de la Commission du 4 mai 1994 de ne pas lui rembourser la totalité de la différence entre les frais qui seraient réellement exposés par lui et les prestations du régime commun d'assurance maladie (ci-après «RCAM»).

    12

    Le 9 novembre 1994, le chef de l'unité «assurance maladie et accidents» de la DG IX a répondu que, en l'absence d'acte faisant grief, il considérait sa réclamation comme une demande au titre de l'article 90, paragraphe 1, du statut.

    13

    Il a ajouté:

    «Quant au remboursement éventuel au titre de l'article 24 de l'annexe X du statut, le bureau liquidateur a indiqué dans sa lettre du 4 mai 1994 que ce remboursement vous serait accordé conformément aux dispositions en vigueur.

    Or, l'article 5 des DGE de l'article 24, premier et deuxième alinéas, de l'annexe X du statut stipule que lorsque les frais sont exposés à l'intérieur de la Communauté, leur remboursement s'effectue dans la limite maximale du seuil d'excessivité tel que fixé en liaison avec le point XV.2 de l'annexe I de la réglementation relative à la couverture des risques de maladie.

    Par conséquent, dans la mesure où vous exposez les frais dentaires, dont il est fait mention dans le devis dentaire du 4 mars 1994, à l'intérieur des Communautés, dans ce cas, l'Italie, le remboursement au titre de l'article 24 de l'annexe X, en tenant compte des seuils d'excessivité précités, s'élève à 95 337 BFR.

    Au cas où vous ne pouvez marquer votre accord sur cette décision, il vous est toujours loisible d'introduire une réclamation au titre de l'article 90, paragraphe 2, du statut.»

    Affaire T-186/95

    14

    Le 9 février 1995, le requérant a introduit, à titre purement conservatoire et sous toute réserve, une réclamation au sens de l'article 90, paragraphe 2, du statut contre la décision de la Commission du 9 novembre 1994.

    15

    Par décision du 3 juillet 1995, notifiée au requérant le 7 juillet 1995, la défenderesse a rejeté cette réclamation.

    Procédure

    16

    Par requête déposée au greffe du Tribunal le 8 février 1995, le requérant a introduit un recours enregistré sous le numéro T-21/95.

    17

    Par acte séparé, déposé le 9 mars 1995, la Commission a soulevé une exception d'irrecevabilité en application de l'article 114, paragraphe 1, du règlement de procédure. Par ordonnance du 9 juin 1995, le Tribunal (troisième chambre) a décidé de joindre l'exception au fond, en application de l'article 114, paragraphe 4, du règlement de procédure.

    18

    Par requête déposée au greffe du Tribunal le 6 octobre 1995, le requérant a introduit un recours enregistré sous le numéro T-186/95.

    19

    Par ordonnance du 21 juin 1996, le président de la troisième chambre du Tribunal a décidé de joindre les affaires T-21/95 et T-186/95 aux fins de la procédure orale et de l'arrêt.

    20

    Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (troisième chambre) a décidé d'ouvrir la procédure orale sans procéder à des mesures d'instruction préalables. Il a toutefois décidé de poser une question écrite à la Commission, à laquelle celle-ci a répondu lors de la procédure orale.

    21

    Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions du Tribunal lors de l'audience publique qui s'est déroulée le 11 juillet 1996.

    Conclusions des parties

    22

    Dans l'affaire T-21/95, le requérant conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

    déclarer le recours recevable et fondé;

    annuler la décision de la Commission du 4 mai 1994 de ne pas lui rembourser l'intégralité de ses frais médicaux conformément à l'article 24 de l'annexe X, ainsi que, pour autant que de besoin, la décision de la Commission du 9 novembre 1994 faisant suite à sa réclamation;

    condamner la Commission à payer l'intégralité de la différence entre les frais qui seraient réellement exposés et les prestations du RCAM, soit dans le cas présent la somme de 253 353 BFR;

    déclarer que les DGE de l'article 24, premier et deuxième alinéas, de l'annexe X sont entachées d'illégalité et, en conséquence, les retirer;

    condamner la Commission aux dépens.

    23

    Dans l'affaire T-186/95, le requérant conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

    déclarer le recours recevable et fondé;

    annuler la décision de la Commission du 9 novembre 1994 de ne pas lui rembourser l'intégralité de la différence entre les frais médicaux réellement exposés et les prestations du RCAM, conformément à l'article 24 de l'annexe X, ainsi que, pour autant que de besoin, la décision de la Commission du 3 juillet 1995 rejetant sa réclamation;

    condamner la Commission à payer l'intégralité de la différence entre les frais qui seraient réellement exposés et les prestations du RCAM, soit dans le cas présent la somme de 253 353 BFR;

    déclarer que les DGE de l'article 24, premier et deuxième alinéas, de l'annexe X sont entachées d'illégalité et, en conséquence, les retirer;

    condamner la Commission aux dépens.

    24

    La Commission conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

    déclarer les recours irrecevables et, à titre subsidiaire, non fondés;

    statuer sur les dépens comme de droit.

    Sur la recevabilité

    Affaire T-21/95

    Argumentation des parties

    25

    La Commission fait valoir que la lettre du 9 novembre 1994 constitue sa réponse à une demande, au sens de l'article 90, paragraphe 1, du statut, que le requérant lui avait adressée par lettre du 5 juillet 1994.

    26

    Le recours serait prématuré pour absence de procédure précontentieuse. Le requérant lui-même ne serait pas certain de la recevabilité de son recours, dès lors qu'il a introduit, le 9 février 1995, une autre réclamation, cette fois dirigée contre la décision contenue dans la lettre du 9 novembre 1994.

    27

    Le requérant fait valoir que la Commission reconnaît explicitement dans sa lettre du 9 novembre 1994 avoir pris une décision concernant le remboursement complémentaire de ses frais dentaires. Selon lui, cette décision ne constitue qu'une confirmation d'une décision antérieure, formulée dans la lettre de la Commission du 4 mai 1994.

    28

    Cette dernière lettre produirait des effets directs et immédiats sur sa situation personnelle, dans la mesure où elle détermine de manière définitive le montant du remboursement dont il pourra bénéficier en application de l'article 24 de l'annexe X. Il s'agirait, dès lors, d'une décision à caractère individuel lui faisant grief.

    29

    La Commission rétorque que la lettre du 4 mai 1994 contient seulement des renseignements généraux quant au montant du remboursement qui «sera accordé» au requérant. Toutefois, aucune décision n'aurait été prise au titre de l'article 24 de l'annexe X.

    Appréciation du Tribunal

    30

    La réglementation relative à la couverture des risques de maladie des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après «réglementation de couverture») prévoit deux stades dans la procédure permettant d'obtenir le remboursement des frais de certaines prothèses dentaires (voir point VI de l'annexe I en combinaison avec le titre B de l'annexe III de la réglementation de couverture). En application de l'article 11, paragraphe 1, de la réglementation de couverture, le fonctionnaire doit d'abord demander une autorisation préalable au bureau liquidateur en soumettant une estimation des frais médicaux. Si cette autorisation est délivrée, le fonctionnaire doit ensuite introduire, en vertu de l'article 11, paragraphe 2, de la réglementation de couverture, une demande de remboursement des frais exposés qui doit être accompagnée des pièces justificatives originales (voir, à titre d'exemple, l'ordonnance du Tribunal du 25 octobre 1993, B./Commission, T-41/93, Rec. p. II-1037, point 17).

    31

    En vertu de l'article 4 des DGE, l'article 11 de la réglementation de couverture est également applicable à l'assurance complémentaire prévue par l'article 24 de l'annexe X. Dès lors, les frais médicaux pour lesquels le remboursement prévu par l'article 72 du statut ne peut être effectué qu'après autorisation préalable, sont également soumis à une demande d'autorisation préalable pour pouvoir bénéficier d'un remboursement complémentaire au titre dudit article 24.

    32

    En l'espèce, le requérant a introduit la demande d'autorisation préalable en communiquant à la Commission, le 28 mars 1994, le devis pour les frais dentaires (voir ci-dessus point 7). Cette demande relevait des articles 72 du statut et 24 de l'annexe X. Toutefois, la décision prise par la Commission le 8 avril 1994 à propos de cette demande concernait uniquement l'application de l'article 72 du statut. En effet, dans cette lettre, la Commission a fait savoir au requérant que le remboursement prévu par l'article 72 du statut s'élèverait à 108 956 BFR et que le remboursement complémentaire prévu par l'article 24 de l'annexe X serait accordé si les conditions de résidence étaient remplies. Pour ce qui est de l'application de l'article 24 de l'annexe X, la Commission n'a donc pris aucune décision susceptible d'être qualifiée d'acte faisant grief au requérant.

    33

    Il en va de même pour la lettre du 4 mai 1994, dans laquelle la Commission a écrit au requérant: «Le remboursement complémentaire au titre de l'article 24, annexe X, vous sera accordé conformément [aux] dispositions en vigueur et notamment [à ľ] article 5, dernier alinéa [des DGE].» Il ressort de sa formulation que cette lettre ne faisait pas non plus grief au requérant. En effet, il ne s'agissait pas d'une prise de position définitive de la Commission sur l'application, aux frais dentaires en question, de l'article 24 de l'annexe X.

    34

    A ce stade de raisonnement, il convient de rappeler que, en l'absence d'un acte faisant grief au fonctionnaire concerné, la procédure précontentieuse de l'article 90 du statut se divise en principe en deux étapes. Ainsi qu'il ressort du paragraphe 1 de l'article 90, toute personne visée au statut peut saisir l'autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après «AIPN») d'une demande l'invitant à prendre à son égard une décision. En cas de réponse défavorable ou à défaut d'une décision, l'intéressé peut saisir l'AIPN d'une réclamation contestant la décision explicite ou implicite de cette autorité, dans les conditions prévues à l'article 90, paragraphe 2 (voir, à titre d'exemple, l'arrêt du Tribunal du 11 juin 1996, Sanchez Mateo/Commission, T-110/94, RecFP p. II-805, point 23).

    35

    Dès lors que la Commission n'avait donné aucune suite à la demande d'autorisation préalable en tant que fondée sur l'article 24 de l'annexe X, le requérant aurait dû, en l'absence d'un acte faisant grief, introduire par la voie hiérarchique une demande formelle au sens de l'article 90, paragraphe 1, du statut.

    36

    Il s'ensuit que la Commission a correctement requalifié la «réclamation» du 5 juillet 1994 de demande au sens de l'article 90, paragraphe 1, du statut. La lettre du 9 novembre 1994 constitue en conséquence la décision de la Commission contre laquelle le requérant aurait dû introduire une réclamation.

    37

    Ayant introduit directement un recours devant le Tribunal contre la décision de la Commission du 9 novembre 1994 et contre la prétendue décision du 4 mai 1994, le requérant n'a donc pas régulièrement suivi la procédure précontentieuse.

    38

    Pour les motifs qui précèdent, le recours dans l'affaire T-21/95 doit être déclaré irrecevable.

    Affaire T-186/95

    Argumentation des parties

    39

    Le requérant considère que la lettre que la Commission lui a adressée le 9 novembre 1994 constitue un acte faisant grief au sens de l'article 90, paragraphe 2, du statut, dans la mesure où cette lettre, faisant suite à la demande d'autorisation préalable, contient la décision explicite de la Commission de limiter le remboursement des frais dentaires sollicité au titre de l'article 24 de l'annexe X. Il fait remarquer que la Commission a explicitement reconnu que sa lettre constituait une décision susceptible de faire l'objet d'une réclamation.

    40

    La Commission conteste la recevabilité du recours, sans toutefois soulever une exception formelle d'irrecevabilité au sens de l'article 114 du règlement de procédure. Selon elle, le requérant n'a à aucun moment été destinataire d'une décision lui refusant le remboursement d'un traitement effectivement entrepris et payé.

    Appréciation du Tribunal

    41

    La lettre de la Commission du 9 novembre 1994 constitue une prise de position sur la demande du requérant du 5 juillet 1994 concernant l'application de l'article 24 de l'annexe X aux frais dentaires du requérant. En effet, dans cette lettre, la Commission a décidé que, compte tenu des seuils d'excessivité précités, le remboursement au titre de l'article 24 de l'annexe X s'élèverait à 95 337 BFR.

    42

    Par ailleurs, la procédure précontentieuse prévue par le statut a été régulièrement suivie à l'égard de cette décision (ci-après «décision litigieuse»).

    43

    Il convient d'observer, ensuite, que les troisième et quatrième chefs des conclusions du requérant visent non seulement à l'annulation de la décision litigieuse, mais également à ce que le Tribunal formule certaines injonctions et déclarations.

    44

    Sur ce dernier point, il ressort d'une jurisprudence constante que, dans le cadre du contrôle de légalité fondé sur l'article 91 du statut, le juge communautaire n'est pas compétent pour adresser à l'administration des injonctions ou pour faire des déclarations en droit (voir, à titre d'exemple, l'arrêt du Tribunal du 11 juin 1996, Pavan/Parlement, T-147/95, RecFP p. II-861, point 24).

    45

    Pour les motifs qui précèdent, le recours est recevable dans la mesure où il tend à l'annulation de la décision litigieuse, mais irrecevable pour le surplus.

    Sur le bien-fondé des conclusions en annulation dans l'affaire T-186/95

    Argumentation des parties

    46

    Le requérant invoque deux moyens à l'appui de son recours. Le premier est pris de la violation de l'article 24 de l'annexe X, le second de l'illégalité des DGE sur la base desquelles la décision litigieuse a été prise.

    Premier moyen: violation de l'article 24 de l'annexe X

    47

    Le requérant soutient que la Commission a violé l'article 24 de l'annexe X, en ce qu'elle a décidé de plafonner le remboursement des frais pour les soins dentaires envisagés. L'article 24 de l'annexe X ne mentionnerait aucune restriction ou plafond de remboursement. Ses termes seraient impératifs, clairs, précis et suffisants en soi et n'octroieraient aucun pouvoir d'appréciation à la Commission pour leur interprétation ou leur application. Le requérant ajoute que l'exposé des motifs qui accompagnait la proposition soumise au Conseil, devenue par la suite le règlement no 3019/87, énonce de manière non équivoque: «[...] il est prévu qu'une assurance complémentaire couvrira 100 % des frais médicaux.» La volonté du législateur communautaire consisterait donc à octroyer un remboursement intégral des frais médicaux subis par les fonctionnaires affectés hors de la Communauté, ce qui aurait été entériné par l'adoption de l'article 24 de l'annexe X.

    48

    Par le biais de cette dernière disposition, le législateur aurait voulu octroyer un avantage pécuniaire aux fonctionnaires affectés dans un pays tiers afin de rendre la carrière hors Communauté plus attrayante et de compenser les inconvénients que comporte leur expatriation. Il aurait voulu créer une certaine uniformité parmi les fonctionnaires affectés hors de la Communauté, pour qu'ils bénéficient tous des mêmes droits malgré la disparité des risques et des coûts médicaux pouvant exister entre les différents pays tiers. Le requérant souligne que, selon le libellé même de l'article 24 de l'annexe X, un fonctionnaire affecté dans un pays tiers n'est pas obligé de se faire soigner dans ce pays même afin de pouvoir prétendre au remboursement complémentaire visé à cet article.

    49

    La Commission se réfère à l'arrêt du Tribunal du 7 mars 1996, De Rijk/Commission (T-362/94, RecFP p. II-365, point 31), dans lequel l'argumentation selon laquelle l'article 24 de l'annexe X ne nécessiterait aucune interprétation aurait été rejetée. Elle fait valoir qu'une analyse qui se borne à rappeler le libellé de l'article 24 de l'annexe X, en faisant abstraction de son contexte et de la genèse de l'annexe X, conduit à une fausse interprétation de cette disposition.

    50

    Selon la Commission, il ressort tant du règlement no 3019/87 que de l'exposé des motifs qui l'accompagnait lors de sa transmission au Conseil que l'annexe X et son article 24 répondent au souci de compenser les coûts supplémentaires occasionnés par le fait de résider dans un pays tiers. Toutefois, cette raison d'être ne signifierait nullement qu'il faille faire abstraction de principes qui sous-tendent le RCAM. L'article 24 de l'annexe X ne serait que le complément de l'article 72 du statut, ayant pour objet, selon la jurisprudence, de contribuer à la création d'une couverture sociale assurée à chaque fonctionnaire (arrêt du Tribunal du 26 octobre 1993, Reinarz/Commission, T-6/92 et T-52/92, Rec. p. II-1047, point 74). Le principe de couverture sociale ne serait pas remis en cause par l'application de plafonds d'excessivité nécessaires à l'effet de préserver l'équilibre financier du régime (arrêt du Tribunal du 12 juillet 1991, Pincherle/Commission, T-110/89, Rec. p. II-635, points 26 et 27).

    51

    La Commission conteste que les avantages de l'annexe X, et notamment ceux prévus à l'article 24, aient pour objet d'attirer les fonctionnaires vers une carrière dans les délégations extérieures. Au contraire, le principe de l'égalité de traitement entre fonctionnaires commanderait que soit respectée une certaine proportionnalité entre l'avantage supplémentaire et la contrainte et/ou la dépense supplémentaire qu'entraîne l'affectation dans un pays tiers (arrêt du Tribunal du 15 décembre 1992, Scaramuzza/Commission, T-75/91, Rec. p. II-2557, point 33, confirmé sur pourvoi par arrêt de la Cour du 20 octobre 1994, Scaramuzza/Commission, C-76/93 P, Rec. p. I-5173).

    52

    Le requérant rétorque que l'article 72 du statut, contrairement à l'article 24 de l'annexe X, prévoit l'adoption d'une réglementation pour sa mise en œuvre, réglementation qui a explicitement prévu des plafonds de remboursement. Dans l'hypothèse où le législateur aurait réellement voulu instaurer des plafonds de remboursement pour l'article 24 de l'annexe X, il n'aurait pas manqué de le faire explicitement, comme il l'a fait dans les articles 15 et 17 de la même annexe en ce qui concerne l'allocation scolaire et les frais d'installation.

    Second moyen: illégalité des DGE de l'article 24 de l'annexe X

    53

    Le requérant fait valoir que les DGE ne peuvent pas, en précisant un terme statutaire clair, limiter le champ d'application du statut (arrêt du Tribunal du 14 décembre 1990, Brems/Conseil, T-75/89, Rec. p. II-899, confirmé sur pourvoi par arrêt de la Cour du 7 mai 1992, Conseil/Brems, C-70/91 P, Rec. p. I-2973). L'article 24 de l'annexe X assurerait la couverture de l'intégralité de la différence entre les frais réellement exposés et les prestations du RCAM, quel que soit le niveau de cette différence. Dès lors, l'introduction, par le biais des DGE, d'un seuil d'excessivité limitant le montant de ce remboursement constituerait une violation de cette disposition.

    54

    La Commission soutient qu'une lecture de l'article 24 de l'annexe X excluant la possibilité de plafonds de remboursement tendrait à créer une différence de traitement injustifiée entre, d'une part, les fonctionnaires qui, bénéficiant de l'annexe X, seraient affranchis de toute contrainte en matière de remboursement de frais médicaux et, d'autre part, les fonctionnaires ne bénéficiant pas de ladite annexe. L'objectif de l'annexe X ne justifierait pas une renonciation au principe de plafonnement des remboursements. Ce principe aurait toujours fait partie intégrante du RCAM, dont les remboursements prévus par l'annexe X ne constitueraient qu'un complément. La Commission reconnaît que la notion d'excessivité peut donner lieu à contestation dans des cas individuels, mais elle estime que l'exclusion pure et simple de tout plafonnement des remboursements au titre de l'annexe X ne serait pas justifiée.

    Appréciation du Tribunal

    55

    Il convient de constater que la partie requérante ne conteste ni le fait que le plafond de remboursement dont fait état la décision litigieuse constitue l'application pure et simple des seuils d'excessivité prévus par les DGE, ni la façon dont ce plafond a été calculé en l'espèce. Il s'ensuit que si les plafonds des DGE sont légaux dans leur principe, la décision litigieuse, dès lors qu'elle constitue une application correcte de ces plafonds, sera également légale.

    56

    Il y a donc lieu d'examiner tout d'abord la légalité des DGE.

    57

    A cet égard, bien que l'article 24 de l'annexe X, contrairement à l'article 72 du statut, ne prévoie pas l'adoption d'une réglementation pour sa mise en œuvre, la Commission était néanmoins compétente pour adopter les DGE sur la base de l'article 1er, troisième alinéa, de l'annexe X, qui renvoie à l'article 110 du statut. Le premier alinéa de cette dernière disposition dispose en effet: «Les dispositions générales d'exécution du présent statut sont arrêtées par chaque institution après consultation de son comité du personnel et avis du comité du statut prévu à l'article 10.» Dès lors, le Conseil, en tant qu'autorité ayant adopté le statut et ses annexes, a délégué le pouvoir d'adopter des DGE à la Commission ainsi qu'aux autres institutions.

    58

    Il convient donc d'examiner si le principe du plafonnement des remboursements pour des frais considérés comme excessifs, tel qu'il a été prévu par les DGE, est compatible avec les dispositions de l'article 24 de l'annexe X. En effet, en vertu du principe du respect de la hiérarchie des normes, des dispositions d'exécution d'un article du statut ne peuvent pas déroger aux règles contenues dans cette disposition (voir, à titre d'exemple, l'arrêt du Tribunal du 27 octobre 1994, Chavane de Dalmassy e.a./Commission, T-64/92, RecFP p. II-723, point 52).

    59

    Pour déterminer la portée de l'article 24 de l'annexe X, il convient de se référer aux méthodes d'interprétation traditionnellement appliquées par la juridiction communautaire (voir, à titre d'exemple, l'arrêt De Rijk/Commission, précité, point 31). Pour l'interprétation d'une disposition de droit communautaire, il y a lieu de tenir compte non seulement des termes de celle-ci, mais également de son contexte et des objectifs poursuivis par la réglementation dont elle fait partie (voir, à titre d'exemple, l'arrêt de la Cour du 17 novembre 1983, Merck, 292/82, Rec. p. 3781, point 12).

    60

    En ce qui concerne les plafonds prévus dans la réglementation de couverture pour le remboursement des frais médicaux au titre de l'article 72 du statut, le Tribunal a déjà jugé que, à défaut de plafonds de remboursement établis par le statut, les institutions se trouvent habilitées à fixer dans les dispositions d'exécution des plafonds adéquats en respectant le principe de couverture sociale qui inspire l'article 72 du statut, et cela d'autant plus que les ressources de ce régime sont limitées aux contributions des affiliés et des institutions et que l'équilibre financier du régime doit être sauvegardé (voir, à titre d'exemple, l'arrêt Pincherle/Commission, précité, point 26, confirmé sur pourvoi par arrêt de la Cour du 22 décembre 1993, Pincherle/Commission, C-244/91 P, Rec. p. I-6965).

    61

    Cette jurisprudence peut être appliquée par analogie à la présente affaire.

    62

    Les DGE ne dérogent pas au principe établi dans l'article 24 de l'annexe X selon lequel le fonctionnaire affecté dans un pays tiers a droit à un remboursement de la totalité des frais exposés par lui. En effet, l'article 5 des DGE dispose que «le fonctionnaire affecté hors Communauté est remboursé des frais réellement exposés par lui-même». Toutefois, dans un souci d'assurer l'équilibre financier du système d'assurance maladie complémentaire, la même disposition ajoute que, «au-delà d'une limite à partir de laquelle les frais exposés sont considérés comme excessifs, l'intéressé ne peut prétendre à aucun remboursement».

    63

    Il apparaît ainsi que les seuils d'excessivité instaurés relèvent d'un souci identique à celui qui a conduit le législateur communautaire à prévoir des plafonds dans la réglementation de couverture pour le remboursement des frais médicaux au titre de l'article 72 du statut. Comme dans le contexte de cette dernière disposition, l'imposition de seuils d'excessivité à l'article 5 des DGE témoigne d'une saine gestion du régime d'assurance maladie complémentaire sans mettre en cause les principes mêmes sur lesquels cette assurance est fondée.

    64

    Les dispositions pertinentes des DGE dont le requérant conteste la légalité traduisent donc correctement la finalité de l'article 24 de l'annexe X et ne sont pas contraires à ce dernier.

    65

    Par suite, la décision litigieuse, dès lors qu'elle constitue une application correcte du plafond prévu par les DGE pour les frais médicaux en question, n'est pas elle-même entachée d'illégalité.

    66

    Il découle de ce qui précède qu'il y a lieu de rejeter les moyens invoqués par le requérant et, par conséquent, de rejeter le recours dans son ensemble.

    Sur les dépens

    67

    Aux termes de l'article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens. Toutefois, en vertu de l'article 88 du même règlement, dans les litiges entre les Communautés et leurs agents, les frais exposés par les institutions restent à la charge de celles-ci. Chaque partie supportera donc ses propres dépens.

     

    Par ces motifs,

    LE TRIBUNAL (troisième chambre)

    déclare et arrête:

     

    1)

    Le recours dans l'affaire T-21/95 est rejeté comme irrecevable.

     

    2)

    Le recours dans l'affaire T-186/95 est rejeté comme irrecevable en tant qu'il vise à ce que le Tribunal formule des injonctions et déclarations.

     

    3)

    Il est rejeté comme non fondé pour le surplus.

     

    4)

    Chaque partie supportera ses propres dépens.

     

    Briët

    Vesterdorf

    Potocki

    Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 5 novembre 1996.

    Le greffier

    H. Jung

    Le président

    B. Vesterdorf


    ( *1 ) Langue de procedure: le français.

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