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Document 62018CJ0014

Arrêt de la Cour (sixième chambre) du 28 février 2019.
Alfamicro – Sistemas de computadores, Sociedade Unipessoal, Lda. contre Commission européenne.
Pourvoi – Clause compromissoire – Article 272 TFUE – Notion d’“action déclaratoire” – Article 263 TFUE – Notion de “décision administrative” – Convention de subvention conclue dans le cadre du programme-cadre pour l’innovation et la compétitivité (CIP) (2007 – 2013) – Rapports d’audit ayant constaté le caractère non éligible de certains coûts déclarés.
Affaire C-14/18 P.

Recueil – Recueil général – Partie «Informations sur les décisions non publiées»

Identifiant ECLI: ECLI:EU:C:2019:159

ARRÊT DE LA COUR (sixième chambre)

28 février 2019 ( *1 )

« Pourvoi – Clause compromissoire – Article 272 TFUE – Notion d’“action déclaratoire” – Article 263 TFUE – Notion de “décision administrative” – Convention de subvention conclue dans le cadre du programme-cadre pour l’innovation et la compétitivité (CIP) (2007–2013) – Rapports d’audit ayant constaté le caractère non éligible de certains coûts déclarés »

Dans l’affaire C‑14/18 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 5 janvier 2018,

AlfamicroSistemas de computadores, Sociedade Unipessoal, Lda, établie à Cascais (Portugal), représentée par Mes G. Gentil Anastácio et D. Pirra Xarepe, advogados,

partie requérante,

l’autre partie à la procédure étant :

Commission européenne, représentée par M. J. Estrada de Solà et Mme M. M. Farrajota, en qualité d’agents,

partie défenderesse en première instance,

LA COUR (sixième chambre),

composée de Mme C. Toader (rapporteure), présidente de chambre, MM. L. Bay Larsen et M. Safjan, juges,

avocat général : Mme J. Kokott,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

vu la décision prise, l’avocate générale entendue, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1

Par son pourvoi, Alfamicro – Sistemas de computadores, Sociedade Unipessoal, Lda (ci-après « Alfamicro ») demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 14 novembre 2017, Alfamicro/Commission (T‑831/14, non publié, ci-après l’« arrêt attaqué », EU:T:2017:804), par lequel celui-ci a rejeté son recours ayant pour objet une demande fondée sur l’article 272 TFUE et tendant, en substance, à faire constater l’inexistence de la créance de la Commission européenne à l’égard de la requérante en vertu de la convention de subvention no 238882 relative au financement par l’Union européenne du projet « Save Energy », conclue dans le cadre du programme-cadre pour l’innovation et la compétitivité (2007-2013) établi par la décision no 1639/2006/CE du Parlement européen et du Conseil, du 24 octobre 2006 (JO 2006, L 310, p. 15, ci-après la « convention de subvention litigieuse »).

Le cadre juridique

2

Conformément à l’article 1, paragraphe 2, de la décision no 1639/2006, lu à la lumière de son considérant 2, celle-ci a été adoptée afin de contribuer à promouvoir la compétitivité et le potentiel d’innovation de la Communauté européenne en tant que société de la connaissance avancée dont le développement durable repose sur une croissance économique solide, sur une économie sociale de marché très compétitive assurant un niveau de protection élevé et sur l’amélioration de la qualité de l’environnement. Cette décision a été abrogée à compter du 31 décembre 2013 par le règlement (UE) no 1287/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 11 décembre 2013, établissant un programme pour la compétitivité des entreprises et des petites et moyennes entreprises (COSME) (2014 – 2020) et abrogeant la décision no 1639/2006 (JO 2013, L 347, p. 33).

3

Selon le considérant 19 de la décision no 1639/2006, celle-ci visait notamment à prendre des mesures appropriées pour prévenir les irrégularités et les fraudes, ainsi que les mesures nécessaires pour récupérer les fonds perdus, indûment versés ou mal employés, conformément aux règlements (CE, Euratom) no 2988/95 du Conseil, du 18 décembre 1995, relatif à la protection des intérêts financiers des Communautés européennes (JO 1995, L 312, p. 1), (Euratom, CE) no 2185/96 du Conseil, du 11 novembre 1996, relatif aux contrôles et vérifications sur place effectués par la Commission pour la protection des intérêts financiers des Communautés européennes contre les fraudes et autres irrégularités (JO 1996, L 292, p. 2) et (CE) no 1073/1999 du Parlement européen et du Conseil, du 25 mai 1999, relatif aux enquêtes effectuées par l’Office européen de lutte antifraude (OLAF) (JO 1999, L 136, p. 1).

4

Parmi les objectifs prévus à l’article 2 de cette décision, figurait, au paragraphe 2, sous b), de cet article, le programme d’appui stratégique en matière de technologie de l’information et de la communication (TIC).

5

L’article 9 de ladite décision, intitulé « Protection des intérêts financiers de la Communauté », prévoyait, à son paragraphe 3 :

« Toute mesure de mise en œuvre adoptée en application de la présente décision prévoit notamment une supervision et un contrôle financier exercés par la Commission ou par tout représentant habilité par elle, ainsi que des audits réalisés par la Cour des comptes, sur place, si nécessaire. »

Les antécédents du litige

6

Alfamicro est une société unipersonnelle de droit portugais qui fournit des services dans le domaine de l’informatique et des technologies de l’information. Le 9 juin 2009, elle a signé avec la Commission la convention de subvention litigieuse.

7

Le projet « Save Energy », financé par cette convention, visait à permettre la sensibilisation des citoyens et des décideurs politiques aux questions liées à l’efficacité énergétique. Ce projet s’est déroulé du 1er mars 2009 au 31 octobre 2011.

8

Alfamicro a participé audit projet en qualité de coordonnateur, dans le cadre d’un consortium avec 17 partenaires issus de cinq États membres. Elle a coordonné la mise en œuvre des projets pilotes d’innovation en matière technologique et sociale. En outre, elle a participé à d’autres projets européens dans lesquels elle assumait le rôle de consultant technique ou de coordinateur de projet.

9

La convention de subvention litigieuse fixait, à son article 5, paragraphe 1, la contribution financière maximale de la Communauté à 2230000 euros et précisait que cette contribution financière serait limitée à 50 % des coûts éligibles.

10

L’article 10 de cette convention, intitulé « Loi applicable et juridiction compétente », prévoyait, à son premier alinéa, que celle-ci serait régie par ses termes, les actes communautaires pertinents concernant le programme-cadre pour l’innovation et la compétitivité, le règlement financier applicable au budget général des Communautés européennes et ses règles d’application, les autres dispositions pertinentes du droit communautaire en général et, à titre subsidiaire, le droit belge.

11

Selon l’article 10, deuxième alinéa, de ladite convention, « les bénéficiaires déclarent savoir et acceptent que la Commission puisse prendre des décisions comportant des obligations pécuniaires [et formant titre exécutoire,] conformément à l’article 256 CE ».

12

L’article 10, troisième alinéa, de la même convention stipulait que, sans préjudice du droit de la Commission d’adopter directement les décisions visées à son article 10, deuxième alinéa, le Tribunal ou, en cas de pourvoi, la Cour de justice des communautés européennes, étaient seuls compétents pour connaître des litiges entre la Communauté, d’une part, et les bénéficiaires, d’autre part, concernant l’interprétation, l’application ou la validité de la convention de subvention litigieuse et la légalité des décisions susvisées.

13

L’annexe II de la convention de subvention litigieuse, qui faisait partie à part entière de celle-ci, énonçait les conditions générales auxquelles elle était soumise. L’article II.28 de ces conditions générales, intitulé « Audit financier », prévoyait, à son paragraphe 1, premier alinéa, que la Commission pouvait, à tout moment de la réalisation du projet concerné et pendant cinq ans à dater du paiement final, soumettre le bénéficiaire à un audit. Aux termes du deuxième alinéa de ce paragraphe, cette procédure pouvait être assurée par des contrôleurs des comptes extérieurs ou par les services de la Commission, y compris l’Office européen de lutte antifraude (OLAF). Selon le libellé de l’article II.28, paragraphe 6, desdites conditions générales, la Cour des comptes européenne avait les mêmes droits que la Commission, notamment le droit d’accès, aux fins des contrôles et des audits.

14

La durée du projet « Save Energy », initialement prévue pour 30 mois, a été ultérieurement étendue à 32 mois, de sorte qu’il s’est achevé le 3 octobre 2011. Après l’exécution de ce projet, la Commission s’est acquittée du paiement d’une somme de 680300 euros, à savoir 50 % des coûts déclarés par Alfamicro.

15

Par lettre du 25 octobre 2012, la Cour des comptes a informé Alfamicro que, conformément à l’article 287 TFUE et comme prévu à l’article II.28, paragraphe 6, des conditions générales de la convention de subvention litigieuse, elle ferait l’objet d’un audit dans ses locaux à Cascais (Portugal), du 17 au 19 décembre 2012. La Cour des comptes a clôturé cet audit le 11 avril 2013.

16

Le rapport provisoire de l’audit, communiqué à Alfamicro par lettre du 29 avril 2013, a ensuite été révisé par la Cour des comptes, en tenant compte des observations provisoires soumises par la requérante. Par lettre du 25 août 2014, la Commission a communiqué à Alfamicro le rapport d’audit final et lui a signifié la clôture définitive de ce dernier. À l’issue de cet audit, la Cour des comptes a rejeté comme étant non conformes aux cadres contractuel et réglementaire applicables les coûts déclarés relatifs au personnel, aux services fournis par deux sous-traitants d’Alfamicro ainsi que d’« autres coûts directs », concernant principalement des frais de voyage et des frais relatifs à l’achat de produits de consommation, à concurrence d’un montant de 934262 euros.

17

Par lettre du 8 septembre 2014 (ci-après la « lettre de pré-information »), la Commission a informé Alfamicro que, sur la base des conclusions de l’audit, elle allait procéder au recouvrement d’une somme de 467131 euros et qu’une note de débit à concurrence de ce montant allait être établie en l’absence de soumission par Alfamicro d’observations dans un délai de 30 jours à partir de la réception de cette lettre. La Commission y indiquait également que, à défaut de paiement de cette somme dans le délai précisé dans la note de débit, des intérêts de retard seraient calculés au taux indiqué dans cette note. Enfin, la Commission précisait qu’elle avait la possibilité de recouvrer ladite somme soit par compensation, soit par l’adoption d’un acte formant titre exécutoire. Par lettre du 8 octobre 2014, Alfamicro a contesté le contenu de la lettre de pré-information.

18

Par lettre du 28 octobre 2014, la Commission a confirmé sa position exprimée dans la lettre de pré-information et y a joint une note de débit portant le numéro 3241413112, à concurrence d’un montant de 467131 euros, la date d’échéance pour le paiement étant fixée au 12 décembre 2014.

19

Ultérieurement, par lettres des 15 et 24 avril 2015, adressées à Alfamicro pendant la phase écrite de la procédure devant le Tribunal, la Commission a informé cette dernière qu’elle procéderait à la compensation entre cette créance et d’autres montants dus à la requérante en tant que bénéficiaire dans le cadre de trois autres projets subventionnés par l’Union. Du fait de ces compensations, le montant réclamé par la Commission à Alfamicro s’élève, à présent, à 270436 euros.

La procédure devant le Tribunal et l’arrêt attaqué

20

Par requête déposée au greffe du Tribunal le 29 décembre 2015, Alfamicro a introduit un recours fondé sur l’article 272 TFUE, selon lequel la Cour est compétente pour statuer en vertu d’une clause compromissoire contenue dans un contrat de droit public ou de droit privé passé par l’Union ou pour son compte.

21

Alfamicro a demandé au Tribunal de constater l’invalidité de la décision de la Commission prétendument contenue dans sa lettre du 28 octobre 2014, emportant toutes les conséquences légales qui s’ensuivent, à savoir l’annulation de la note de débit jointe à cette lettre, d’un montant de 467131 euros, et l’émission d’une note de crédit du même montant en sa faveur.

22

Devant le Tribunal, Alfamicro a invoqué des moyens tirés de la violation de la convention de subvention litigieuse en ce qui concerne l’appréciation des coûts déclarés comme étant non éligibles, du principe de proportionnalité, des principes de protection de la confiance légitime, de sécurité juridique et de bonne administration ainsi que de l’obligation de motivation.

23

Dans son mémoire en réplique, introduit après que les actes de compensation visés au point 19 du présent arrêt ont été pris par la Commission, Alfamicro a étendu l’objet de son recours, en demandant au Tribunal de constater l’invalidité de ces actes de compensation et de condamner la Commission à procéder à l’annulation de ceux-ci ainsi qu’à lui rembourser les sommes correspondantes, augmentées des intérêts de retard.

24

La Commission a, à son tour, introduit une demande reconventionnelle tendant, en substance, à la condamnation d’Alfamicro au remboursement de la subvention indûment versée dans le cadre de la convention de subvention litigieuse.

25

Le Tribunal a qualifié la demande formée par Alfamicro sur le fondement de l’article 272 TFUE d’ « action déclaratoire », visant à la constatation de l’inexistence de la créance dont la Commission se prévaut au titre de la convention de subvention litigieuse.

26

En ce qui concerne le premier moyen, tiré de la violation de la convention de subvention litigieuse, le Tribunal s’est livré à une analyse approfondie des conclusions de la Cour des comptes quant aux coûts relatifs aux services fournis par des consultants internes et des sous-traitants, en l’occurrence des sociétés O. et D. Il a validé l’appréciation de la Cour des comptes et de la Commission à cet égard, selon laquelle un montant correspondant à 93 % de la subvention payée par la Commission n’était pas vérifiable et fiable et ne pouvait, dès lors, pas être considéré comme représentant des coûts réellement engagés par Alfamicro. Par conséquent, il a jugé que ces coûts n’étaient pas éligibles au titre de la convention de subvention litigieuse et a rejeté le premier moyen.

27

Par son deuxième moyen, Alfamicro invoquait une violation du principe de proportionnalité. Dès lors que le projet « Save Energy » a été finalisé et que la Commission en a bénéficié pleinement, Alfamicro soutenait qu’il serait disproportionné de ramener la subvention à seulement 7 % de son montant initial. Le Tribunal a jugé que, dans une convention de ce type, la subvention ne constitue pas une rémunération du travail effectué par le bénéficiaire, mais une subvention des projets dont le versement est soumis à des conditions précises. Pour cette raison, la Commission ne pourrait rembourser que des coûts éligibles au titre de la convention signée avec ledit bénéficiaire. Le Tribunal a donc considéré que le principe de proportionnalité n’avait pas été violé et a rejeté ce moyen.

28

Par son troisième moyen, Alfamicro invoquait la violation des principes de protection de la confiance légitime, de sécurité juridique et de bonne administration. Le Tribunal a rejeté ce moyen comme inopérant, considérant que ces principes ne s’appliquent pas dans un contexte contractuel. En tout état de cause, ces principes n’auraient pas été violés en l’espèce.

29

Le quatrième et dernier moyen de la requérante était tiré d’une violation de l’obligation de motivation par la Commission. Alfamicro soutenait que la motivation de la décision prétendument contenue dans la lettre du 28 octobre 2014 était « extrêmement brève », de sorte que cette décision était entachée d’une erreur de droit. Le Tribunal a rejeté ce moyen, en retenant que, la lettre ne constituant pas un acte administratif, l’obligation de motivation ne trouvait pas à s’appliquer en l’espèce. De plus, il a considéré que, même si on interprétait ce moyen comme un moyen tiré de l’obligation d’exécuter le contrat de bonne foi, il ne saurait prospérer, car cette lettre intervenait dans un cadre connu par Alfamicro, qui avait déjà été suffisamment informée par la lettre de pré-information.

30

Le Tribunal a donc rejeté l’action déclaratoire dans son ensemble.

31

Quant aux chefs de conclusions présentés par Alfamicro dans son mémoire en réplique, dans lequel elle demandait la constatation de l’invalidité des actes de compensation pris par la Commission après le dépôt de la requête introductive d’instance et la condamnation de la Commission à lui rembourser la somme correspondant auxdites compensations, augmentée des intérêts de retard, le Tribunal les a rejetés comme étant irrecevables, au motif que ces actes de compensation constituaient des actes administratifs dont l’annulation devait être demandée sur le fondement de l’article 263 TFUE. Or, le règlement de procédure du Tribunal ne permet pas une modification de la nature du recours en cours d’instance.

32

En ce qui concerne la demande reconventionnelle de la Commission, le Tribunal a confirmé le bien-fondé de l’appréciation de la Cour des comptes quant aux coûts considérés comme inéligibles et, partant, l’existence d’une créance à due concurrence en faveur de la Commission. Ainsi, il a condamné Alfamicro à payer à la Commission le montant restant dû après les actes de compensation, soit 277849,93 euros, majoré de 26,88 euros d’intérêts pour chaque jour de retard à compter du 20 juin 2015 et jusqu’à l’extinction complète de sa dette résultant de l’exécution de la convention de subvention litigieuse.

Les conclusions des parties

33

Par son pourvoi, Alfamicro demande à la Cour :

d’annuler l’arrêt attaqué ;

de renvoyer l’affaire devant le Tribunal afin qu’elle soit jugée dans les conditions de l’article 263 TFUE, et

de condamner la Commission à l’ensemble des dépens.

34

La Commission demande à la Cour :

à titre principal, de déclarer irrecevable le pourvoi formé par la requérante ;

à titre subsidiaire, de rejeter le pourvoi comme non fondé et, partant, de confirmer l’arrêt attaqué, et

de condamner la requérante à l’ensemble des dépens.

Sur le pourvoi

35

À l’appui de son pourvoi, Alfamicro soulève quatre moyens, le premier tiré d’une interprétation erronée par le Tribunal des chefs de conclusions de la requête initiale comme visant la constatation du fait que la créance dont la Commission se prévalait au titre de la convention de subvention litigieuse était inexistante, le deuxième, de la violation de la convention de subvention litigieuse, le troisième, de la violation du principe de proportionnalité et, le quatrième, d’une violation du principe de sécurité juridique.

Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 263 TFUE

Sur la recevabilité du premier moyen

– Argumentation des parties

36

La Commission excipe de l’irrecevabilité du premier moyen. Elle s’appuie sur le fait qu’Alfamicro avait introduit sa requête devant le Tribunal sur le fondement de l’article 272 TFUE et de la clause compromissoire contenue dans la convention de subvention litigieuse. En demandant, dans le cadre du pourvoi, à la Cour d’annuler l’arrêt attaqué et de renvoyer l’affaire devant le Tribunal pour qu’il statue, sur le fondement de l’article 263 TFUE, sur la validité d’une prétendue décision administrative adoptée par la Commission et contenue dans sa lettre du 28 octobre 2014, la requérante modifierait l’objet du litige, en violation de l’article 170 du règlement de procédure de la Cour. Le moyen devrait, dès lors, être rejeté comme irrecevable.

37

Alfamicro fait valoir qu’elle avait indiqué clairement dans sa requête introductive d’instance qu’elle concluait à ce que le Tribunal constate l’invalidité de la décision de la Commission contenue, à son estime, dans la lettre du28 octobre 2014 et à l’annulation de la note de débit qui y était jointe. Le Tribunal aurait aussi admis, aux points 35 et 36 de l’arrêt attaqué, qu’Alfamicro demandait l’annulation d’une décision de la Commission, en soutenant que la décision contenue dans cette lettre constituait un acte administratif. L’exception d’irrecevabilité soulevée par la Commission devrait donc être écartée.

– Appréciation de la Cour

38

Conformément à la jurisprudence de la Cour, permettre à une partie de soulever pour la première fois devant celle-ci un moyen qu’elle n’a pas soulevé devant le Tribunal reviendrait à lui permettre de saisir la Cour d’un litige plus étendu que celui dont a eu à connaître le Tribunal. Dans le cadre d’un pourvoi, la compétence de la Cour est, en principe, limitée à l’examen de l’appréciation par le Tribunal des moyens qui ont été débattus devant lui. Toutefois, un argument qui n’a pas été soulevé en première instance ne constitue pas un moyen nouveau qui est irrecevable au stade du pourvoi s’il ne constitue que l’ampliation d’une argumentation déjà développée dans le cadre d’un moyen présenté dans la requête devant le Tribunal (arrêt du 16 novembre 2017, Ludwig-Bölkow-Systemtechnik/Commission, C‑250/16 P, EU:C:2017:871, point 29 et jurisprudence citée).

39

Certes, Alfamicro avait demandé, devant le Tribunal, que celui-ci statue sur la base non pas de l’article 263 TFUE, mais de l’article 272 TFUE et de la clause compromissoire contenue dans la convention de subvention litigieuse.

40

Toutefois, il ressort du point 36 de l’arrêt attaqué que la requérante concluait, dès le début, à la constatation de l’invalidité de la décision de la Commission prétendument contenue dans la lettre du 28 octobre 2014. Il s’ensuit qu’Alfamicro visait, en effet, une action en annulation. De surcroît, le Tribunal a constaté cette contradiction et a considéré, au point 41 de l’arrêt attaqué, qu’un éventuel recours en annulation serait irrecevable, au motif que ni cette lettre ni la note de débit ne constituent des actes administratifs attaquables dans le cadre d’un tel recours.

41

Il en résulte qu’Alfamicro soutenait déjà, dans le cadre de son recours devant le Tribunal, que la lettre de la Commission du 28 octobre 2014 devait être regardée comme un acte administratif émanant de cette institution, quand bien même aurait-elle appuyé son action sur une base légale erronée. Dès lors que le premier moyen du pourvoi est pris d’une appréciation erronée, par le Tribunal, de la nature juridique de la lettre de la Commission du 28 octobre 2014, un tel moyen ne constitue qu’une ampliation d’une argumentation déjà développée dans le cadre d’un moyen présenté dans la requête devant le Tribunal.

42

En conséquence, il y a lieu de déclarer ce moyen recevable.

Sur le fond

– Argumentation des parties

43

Par son premier moyen, Alfamicro reproche au Tribunal d’avoir jugé à tort que l’acte dont elle avait demandé l’annulation ne présentait pas les caractéristiques d’un acte attaquable, au sens de l’article 263 TFUE, et, au point 50 de l’arrêt attaqué, que la demande d’Alfamicro visait en réalité à ce que le Tribunal constate l’inexistence de la créance dont la Commission se prévaut au titre de la convention de subvention litigieuse.

44

Selon Alfamicro, plusieurs éléments sont en mesure de démontrer le fait que la lettre de la Commission du 28 octobre 2014 constitue un acte administratif. Cette lettre établirait de manière unilatérale la créance et sa date d’échéance et prévoirait le pouvoir de la Commission de prendre des actes exécutoires. Ainsi, la nature de l’audit mené par la Cour des comptes et le fait que les résultats de cet audit ont été extrapolés à d’autres conventions entre Alfamicro et la Commission démontreraient que cet audit sort du cadre contractuel.

45

De même, les mesures de compensation prises par la Commission à la suite de ladite lettre seraient, elles aussi, constitutives d’actes administratifs. Or, il serait contradictoire, d’une part, d’affirmer que la créance de la Commission repose sur une base contractuelle en obligeant, de ce fait, le bénéficiaire à introduire une action sur le fondement de l’article 272 TFUE et, d’autre part, de reconnaître à cette institution la possibilité de procéder unilatéralement au recouvrement forcé de cette créance par voie de compensation, soit au moyen d’un acte administratif qui ne peut être attaqué que sur le fondement de l’article 263 TFUE.

46

La Commission conteste l’argumentation soulevée par Alfamicro à l’appui du premier moyen de son pourvoi.

– Appréciation de la Cour

47

À titre liminaire, il y a lieu de rappeler, à l’instar du Tribunal au point 42 de l’arrêt attaqué, que, selon une jurisprudence constante de la Cour, le recours en annulation au titre de l’article 263 TFUE est ouvert à l’encontre de tous les actes pris par les institutions, quelles qu’en soient la nature ou la forme, qui visent à produire des effets juridiques obligatoires de nature à affecter les intérêts du requérant, en modifiant de façon caractérisée sa situation juridique (arrêts du 9 septembre 2015, Lito Maieftiko Gynaikologiko kai Cheirourgiko Kentro/Commission, C‑506/13 P, EU:C:2015:562, point 16 et jurisprudence citée, ainsi que du 20 février 2018, Belgique/Commission, C‑16/16 P, EU:C:2018:79, point 31 et jurisprudence citée).

48

Or, la Cour a, à plusieurs occasions, jugé que la compétence d’interprétation et d’application des dispositions du traité FUE par le juge de l’Union dans le cadre du recours en annulation ne trouve pas à s’appliquer lorsque la situation juridique du requérant s’inscrit dans le cadre de relations contractuelles dont le régime juridique est régi par la loi nationale désignée par les parties contractantes (voir, en ce sens, arrêt du 9 septembre 2015, Lito Maieftiko Gynaikologiko kai Cheirourgiko Kentro/Commission, C‑506/13 P, EU:C:2015:562, point 18, et ordonnance du 21 avril 2016, Borde et Carbonium/Commission, C‑279/15 P, non publiée, EU:C:2016:297, point 39).

49

En effet, si le juge de l’Union se reconnaissait compétent pour connaître du contentieux de l’annulation d’actes s’inscrivant dans un cadre purement contractuel, il risquerait non seulement de vider de son sens l’article 272 TFUE, lequel permet d’attribuer la compétence juridictionnelle de l’Union en vertu d’une clause compromissoire, mais encore, dans les cas où le contrat ne contiendrait pas pareille clause, d’étendre sa compétence juridictionnelle au-delà des limites tracées par l’article 274 TFUE, lequel confie aux juridictions nationales la compétence de droit commun pour connaître des litiges auxquels l’Union est partie (arrêt du 9 septembre 2015, Lito Maieftiko Gynaikologiko kai Cheirourgiko Kentro/Commission, C‑506/13 P, EU:C:2015:562, point 19).

50

Il découle de cette jurisprudence que, en présence d’un contrat liant le requérant à l’une des institutions de l’Union, les juridictions de l’Union ne peuvent être saisies d’un recours sur le fondement de l’article 263 TFUE que si l’acte attaqué vise à produire des effets juridiques contraignants qui se situent en dehors de la relation contractuelle liant les parties et qui impliquent l’exercice de prérogatives de puissance publique conférées à l’institution contractante en sa qualité d’autorité administrative (arrêt du 9 septembre 2015, Lito Maieftiko Gynaikologiko kai Cheirourgiko Kentro/Commission, C‑506/13 P, EU:C:2015:562, point 20).

51

En l’espèce, l’acte attaqué par Alfamicro est la lettre de la Commission du 28 octobre 2014 par laquelle celle-ci adresse une note de débit à Alfamicro et la met en demeure de procéder au remboursement des sommes indûment versées en vertu de la convention de subvention litigieuse, dont le montant correspond à celui figurant dans cette note de débit.

52

Partant, ladite note de débit s’inscrit dans le contexte de la convention de subvention litigieuse, en ce qu’elle a pour objet le recouvrement d’une créance qui trouve son fondement dans celle-ci. Une telle note de débit et la mise en demeure qui l’accompagne ne comportent que l’indication de la date d’échéance ainsi que les conditions de paiement de la créance qu’elles constatent et ne sauraient être assimilées à un titre exécutoire en tant que tel, bien qu’elles mentionnent la voie exécutoire de l’article 299 TFUE comme étant une option possible parmi d’autres s’offrant à la Commission dans l’hypothèse où le débiteur ne s’exécuterait pas à la date d’échéance fixée (voir, par analogie, arrêt du 9 septembre 2015, Lito Maieftiko Gynaikologiko kai Cheirourgiko Kentro/Commission, C‑506/13 P, EU:C:2015:562, point 23).

53

En tout état de cause, en l’espèce, la Commission n’a pas eu recours à l’exécution forcée mais a décidé d’introduire une demande reconventionnelle devant le Tribunal tendant à la condamnation d’Alfamicro au paiement de cette créance.

54

De plus, aucun élément invoqué par Alfamicro ne permet de considérer que la Commission a agi en sa qualité d’autorité administrative ou que sa lettre du 28 octobre 2014 a produit des effets juridiques en dehors du cadre contractuel, susceptibles de modifier la situation juridique d’Alfamicro.

55

En effet, l’audit mené par la Cour des comptes était prévu par la convention de subvention litigieuse et relève d’une procédure habituellement prévue dans ce type de convention. Les audits poursuivent l’objectif de garantir que le bénéficiaire d’une subvention ne se voit remboursé que des coûts éligibles en vertu de la convention qui l’alloue, de manière à garantir une gestion et une utilisation responsables des fonds européens.

56

Il est vrai que, à la suite de l’envoi de sa lettre du 28 octobre 2014, la Commission a procédé à une extrapolation des résultats de l’audit relatif à la convention de subvention litigieuse à d’autres conventions qu’elle avait conclues avec Alfamicro et que les décisions de la Commission prises sur la base de ces extrapolations pourraient, le cas échéant, constituer des actes administratifs de cette institution, s’ils sortent du cadre contractuel de ces autres conventions. Cependant, d’une part, la créance constatée par la Commission dans sa lettre du 28 octobre 2014 est fondée non pas sur de telles extrapolations mais, de manière directe, sur les résultats de l’audit mené par la Cour des comptes en ce qui concerne les dépenses déclarées par Alfamicro au titre de la convention de subvention litigieuse et, d’autre part, le Tribunal n’était pas saisi d’une demande visant lesdites autres conventions.

57

De même, les actes de compensation ultérieurement pris par la Commission sont des actes distincts, dont l’éventuel caractère administratif n’a aucune incidence sur la nature contractuelle de la déclaration de créance constatée dans la note de débit accompagnant la lettre de cette institution du 28 octobre 2014. D’ailleurs, si Alfamicro critique, de manière générale, l’approche différenciée des mesures contractuelles et des actes administratifs de compensation par la jurisprudence du Tribunal, elle ne conteste pas, dans le cadre du présent pourvoi, la décision du Tribunal, au point 196 de l’arrêt attaqué, de déclarer irrecevables les chefs de conclusions visant à l’annulation des actes de compensation de la Commission, mais se borne à faire valoir que le Tribunal aurait dû considérer que la lettre du 28 octobre 2014 et la note de débit jointe à cette lettre constituent des actes attaquables, au sens de l’article 263 TFUE.

58

Par conséquent, le Tribunal n’a pas commis d’erreur de droit en considérant que, même si le recours en première instance, bien qu’explicitement fondé sur l’article 272 TFUE, devait être qualifié de « recours en annulation » trouvant son fondement légal dans l’article 263 TFUE, un tel recours serait irrecevable, dès lors que ni la lettre du 28 octobre 2014 ni la note de débit jointe à cette lettre ne constituent des actes attaquables, au sens de l’article 263 TFUE, de sorte qu’il convenait de considérer que le recours d’Alfamicro était fondé sur l’article 272 TFUE, compte tenu de la clause compromissoire figurant dans la convention de subvention litigieuse.

59

Il résulte de ce qui précède que le premier moyen doit être écarté comme étant non fondé.

Sur les deuxième et troisième moyens, tirés de la violation de la convention de subvention litigieuse et du principe de proportionnalité

Argumentation des parties

60

Par ses deuxième et troisième moyens, qu’il convient d’examiner ensemble, Alfamicro reproche au Tribunal d’avoir décidé, au point 142 de l’arrêt attaqué, que la Commission se trouvait dans l’obligation de demander le remboursement du financement des coûts considérés comme étant non éligibles et qu’elle n’a pas enfreint le principe de proportionnalité ou son obligation d’exécuter de bonne foi ses obligations contractuelles.

61

Selon Alfamicro, la clause II.28 de la convention de subvention litigieuse prévoyant que la Commission prend « toutes les mesures appropriées qu’elle juge nécessaires », celle-ci aurait dû tenir compte du principe de proportionnalité dans l’application du résultat de l’audit mené par la Cour des comptes. La convention de subvention litigieuse serait un contrat synallagmatique et Alfamicro aurait rempli les obligations qui lui incombaient en vertu de celui-ci. Or, en réduisant la subvention de 93 %, nonobstant le fait que le projet « Save Energy » a été mené à terme, la Commission aurait violé cette convention et le principe de proportionnalité.

62

La Commission conteste les arguments avancés par Alfamicro à l’appui de ses deuxième et troisième moyens.

Appréciation de la Cour

63

Il convient de rappeler, à titre liminaire, que le Tribunal a constaté, aux points 90 et 128 de l’arrêt attaqué, que la Cour des comptes avait apprécié correctement le caractère non éligible des coûts déclarés par Alfamicro. Ce constat, qui procède en tout état de cause d’une appréciation en fait relevant du pouvoir souverain du Tribunal, n’est pas contesté dans le présent pourvoi.

64

Il s’agit, partant, uniquement de vérifier si le Tribunal a, à bon droit, jugé que, en déduisant la totalité des coûts jugés non éligibles du montant de la subvention et en demandant, par conséquent, le remboursement d’une grande partie de cette subvention, la Commission n’a pas violé le principe de proportionnalité.

65

Dans ce contexte, il convient de relever que la Commission est tenue, aux termes de l’article 317 TFUE, de respecter le principe de bonne gestion financière. Elle veille également à la protection des intérêts financiers de l’Union dans l’exécution du budget de celle-ci. Il en est de même en matière contractuelle, dès lors que les subventions accordées par la Commission sont issues du budget de l’Union. Selon un principe fondamental régissant les aides accordées par l’Union, celle-ci ne peut subventionner que des dépenses effectivement engagées (arrêt du 28 février 2013, Portugal/Commission, C‑246/11 P, non publié, EU:C:2013:118, point 102 et jurisprudence citée).

66

Par conséquent, la Commission ne peut pas, sans porter atteinte auxdits principes établis par le traité FUE, approuver une dépense à charge du budget de l’Union sans fondement juridique. Or, dans le contexte d’une subvention, c’est la convention de subvention qui régit les conditions d’octroi et d’utilisation de celle-ci et, plus particulièrement, les clauses relatives à la détermination du montant de cette subvention en fonction des coûts déclarés par le cocontractant de la Commission.

67

Partant, si les coûts déclarés par le bénéficiaire ne sont pas éligibles au titre de la convention de subvention concernée, parce qu’ils ont été jugés non vérifiables et/ou non fiables, la Commission n’a d’autre choix que de procéder au recouvrement de la subvention à concurrence des montants non justifiés, dès lors que, sur la base du fondement juridique que constitue cette convention de subvention, cette institution n’est autorisée à liquider, à charge du budget de l’Union, que des sommes dûment justifiées. Dans ces circonstances, en l’espèce, demander le remboursement de la partie de la subvention correspondant aux coûts non éligibles, tels que constatés dans le rapport d’audit de la Cour des comptes, représente une mesure appropriée.

68

En ce qui concerne les arguments tenant au caractère synallagmatique de cette convention, il suffit de rappeler que la subvention ne représente pas la contrepartie de la réalisation du projet visé par la convention de subvention. Les sommes versées par la Commission au titre de celle-ci le sont uniquement en vue de permettre au bénéficiaire de faire face à des coûts générés par cette réalisation. Dès lors qu’une partie de ces coûts a été jugée inéligible, le bénéficiaire n’ayant pas respecté son obligation contractuelle d’avoir à justifier l’utilisation des sommes qui lui ont été allouées, cette partie des coûts doit faire l’objet d’un recouvrement à due concurrence par la Commission, le fait que le bénéficiaire a entre-temps mené à bien le projet visé par la convention de subvention n’étant pas de nature à influer sur cette obligation.

69

Quant à l’argument d’Alfamicro tiré de l’existence d’un enrichissement sans cause, il suffit de constater que celui-ci est soulevé pour la première fois devant la Cour et n’est, dès lors, pas recevable.

70

Par conséquent, le Tribunal n’a pas commis d’erreur de droit en constatant que la Commission, en demandant le remboursement du financement des coûts considérés comme étant non éligibles, a pris, à l’égard de la requérante, une mesure appropriée, celle-ci étant la seule qu’elle pouvait adopter en vertu de ses obligations découlant tant de la convention de subvention litigieuse que du droit de l’Union, et qu’elle n’a pas, dans ce contexte, agi d’une manière contraire au principe de proportionnalité ou d’exécution de bonne foi des conventions.

71

Compte tenu des considérations qui précèdent, il convient de rejeter les deuxième et troisième moyens comme non fondés.

Sur le quatrième moyen, tiré de la violation du principe de sécurité juridique

Argumentation des parties

72

Par ce moyen, Alfamicro fait valoir que le Tribunal a commis une erreur de droit, en ce qu’il aurait dû constater une violation du principe de sécurité juridique par la Commission. La requérante relève que l’article II.28, paragraphe 5, de la convention de subvention litigieuse prévoyait que la Commission pouvait prendre des « mesures appropriées ». Or, la requérante fait valoir que, même si elle avait pu anticiper que le fait de ne pas être en mesure de justifier des coûts déclarés au titre de la convention de subvention litigieuse pourrait avoir des conséquences sur le montant de la subvention, elle n’aurait jamais pu prévoir que celle-ci serait diminuée de 93 %, nonobstant le fait que le projet a été mené à son terme. La Commission aurait, ce faisant, adopté des mesures inappropriées, contrairement à ce que prévoyait la convention de subvention litigieuse et, aurait, de ce fait, violé le principe de sécurité juridique.

73

La Commission conteste cette argumentation.

Appréciation de la Cour

74

Il convient de rappeler que le Tribunal était saisi en sa qualité de juge du contrat, chargé de statuer sur un litige de nature contractuelle, et non pas en tant que juge de la légalité d’un acte susceptible d’un recours en annulation au titre de l’article 263 TFUE.

75

Or, le principe de sécurité juridique, qui fait partie des principes généraux du droit de l’Union, exige que les règles de droit soient claires, précises et prévisibles dans leurs effets, afin que les intéressés puissent s’orienter dans des situations et des relations juridiques relevant de l’ordre juridique de l’Union (arrêt du 8 décembre 2011, France Télécom/Commission, C‑81/10 P, EU:C:2011:811, point 100 et jurisprudence citée).

76

Dans ce contexte, il s’ensuit que c’est à bon droit que le Tribunal a jugé, aux points 156 et 157 de l’arrêt attaqué, que le principe de sécurité juridique ne trouvait pas à s’appliquer dans un litige de nature contractuelle, dans lequel le Tribunal n’est pas appelé à vérifier la légalité d’un acte administratif. Dès lors, une éventuelle violation de ce principe serait sans influence sur les obligations incombant à la Commission en vertu de la convention de subvention litigieuse.

77

Le quatrième moyen doit donc être rejeté comme inopérant.

78

Il résulte de tout ce qui précède qu’aucun des moyens soulevés par Alfamicro à l’appui de son pourvoi n’est susceptible de prospérer.

79

Il y a lieu, partant, de rejeter le pourvoi dans son intégralité.

Sur les dépens

80

En vertu de l’article 184, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour, lorsqu’un pourvoi n’est pas fondé, la Cour statue sur les dépens. Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, de ce règlement, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, de celui–ci, toute personne qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Alfamicro ayant succombé en ses moyens et la Commission ayant conclu à la condamnation de celle-ci aux dépens, il y a lieu de la condamner aux dépens.

 

Par ces motifs, la Cour (sixième chambre) déclare et arrête :

 

1)

Le pourvoi est rejeté.

 

2)

Alfamicro – Sistemas de computadores, Sociedade Unipessoal, Lda est condamnée aux dépens.

 

Signatures


( *1 ) Langue de procédure : le portugais.

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