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Document 62009CJ0460

Arrêt de la Cour (première chambre) du 28 février 2013.
Inalca SpA - Industria Alimentari Carni et Cremonini SpA contre Commission européenne.
Pourvoi - Responsabilité non contractuelle de l’Union européenne - Constat d’irrégularités dans les restitutions à l’exportation de viande bovine à destination de la Jordanie - Enquête de l’OLAF - Communication des conclusions de l’OLAF à des autorités nationales - Constitution de garanties - Demande de remboursement des frais y afférents - Lien de causalité - Pourvoi incident - Délai de prescription - Point de départ.
Affaire C-460/09 P.

Recueil – Recueil général

Identifiant ECLI: ECLI:EU:C:2013:111

ARRÊT DE LA COUR (première chambre)

28 février 2013 ( *1 )

«Pourvoi — Responsabilité non contractuelle de l’Union européenne — Constat d’irrégularités dans les restitutions à l’exportation de viande bovine à destination de la Jordanie — Enquête de l’OLAF — Communication des conclusions de l’OLAF à des autorités nationales — Constitution de garanties — Demande de remboursement des frais y afférents — Lien de causalité — Pourvoi incident — Délai de prescription — Point de départ»

Dans l’affaire C‑460/09 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice, introduit le 18 novembre 2009,

Inalca SpA – Industria Alimentari Carni, établie à Castelvetro (Italie),

Cremonini SpA, établie à Castelvetro,

représentées par Mes C. D’Andria et F. Sciaudone, avvocati,

parties requérantes,

l’autre partie à la procédure étant:

Commission européenne, représentée par MM. V. Di Bucci et P. Rossi, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie défenderesse en première instance,

LA COUR (première chambre),

composée de M. A. Tizzano, président de chambre, MM. A. Borg Barthet, E. Levits, J-J. Kasel (rapporteur) et M. Safjan, juges,

avocat général: M. N. Jääskinen,

greffier: Mme C. Strömholm, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 9 février 2012,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 18 octobre 2012,

rend le présent

Arrêt

1

Par leur pourvoi, Inalca SpA – Industria Alimentari Carni (ci-après «Inalca») et Cremonini SpA (ci-après «Cremonini») demandent l’annulation de l’ordonnance du Tribunal de première instance des Communautés européennes du 4 septembre 2009, Inalca et Cremonini/Commission (T‑174/06, ci-après l’«ordonnance attaquée»), par laquelle celui-ci a rejeté leur recours tendant à obtenir réparation du préjudice prétendument subi par elles à la suite de la communication aux autorités italiennes des conclusions les mettant en cause et résultant d’une enquête menée par l’Office européen de lutte antifraude (OLAF) afin de vérifier la légitimité de certaines restitutions à l’exportation de viande bovine à destination de la Jordanie.

Les antécédents du litige

2

Les antécédents du litige, tels qu’ils ont été exposés aux points 1 à 20 de l’ordonnance attaquée, peuvent être résumés comme suit.

3

Inalca et Cremonini font partie d’un groupe de sociétés actif dans la production et la distribution de produits à destination de la restauration ainsi que dans la restauration.

4

À la suite d’une enquête menée en Jordanie aux mois de février et de mars 1998, dans le cadre du régime des restitutions à l’exportation pour les produits agricoles, l’unité de coordination de la lutte antifraude (UCLAF), précurseur de l’OLAF, a, par lettre du 6 juillet 1998, informé les autorités italiennes que, sur un total de 37978 tonnes de viande bovine exportées en dehors de la Communauté européenne sans aucune déclaration douanière de mise sur le marché jordanien, 2272 tonnes provenaient d’Italie. Dans cette lettre, l’UCLAF a notamment invité les autorités italiennes à chercher le nom de l’exportateur pour engager les procédures de récupération des restitutions et, si la complicité était établie, des actions pénales.

5

Par lettres du 15 janvier 1999, l’administration italienne compétente a notifié à Inalca et à Cremonini des décisions de récupération des restitutions relatives aux exportations litigieuses, décisions contre lesquelles Inalca et Cremonini ont introduit des recours administratifs. Ces recours administratifs ont été rejetés par décisions du 7 mars 2000.

6

Le 16 février 1999, les résultats de l’enquête de l’UCLAF ont été communiqués par le ministère des Finances italien à l’autorité judiciaire et une procédure pénale a été ouverte à l’encontre des représentants légaux d’Inalca et de Cremonini.

7

Le 30 novembre 1999, Inalca et Cremonini ont constitué deux polices fidéjussoires afin d’obtenir la suspension de la procédure de recouvrement des sommes à restituer.

8

La plainte pénale a été classée le 18 décembre 2002. Par un jugement rendu le 16 janvier 2004, le Tribunale civile di Roma (tribunal civil de Rome) a constaté que les griefs formulés à l’encontre d’Inalca dans la décision de récupération du 15 janvier 1999 étaient dépourvus de fondement et que la somme dont le remboursement était réclamé n’était pas due par elle. Par un jugement rendu le 27 avril 2005, cette juridiction a fait le même constat en ce qui concerne Cremonini.

9

Par lettres datées respectivement des 22 et 23 mars 2004, la demande d’Inalca visant au retrait de la décision de récupération du 15 janvier 1999 la concernant a été accueillie et la police fidéjussoire constituée par cette société a été libérée. De même, par lettres datées respectivement des 22 et 23 décembre 2004, la demande de Cremonini visant au retrait de la décision de récupération du 15 janvier 1999 la concernant a été accueillie et la police fidéjussoire constituée par cette société a été, elle aussi, libérée.

10

Par lettre du 27 janvier 2005, Inalca a demandé à la Commission des Communautés européennes la réparation des dommages qu’elle prétend avoir subis à la suite de l’enquête ouverte par l’UCLAF et des conclusions communiquées par cette dernière aux autorités italiennes. Par lettre du 15 avril 2005, le directeur général de l’OLAF a informé Inalca qu’il ne pouvait pas donner suite à cette demande en réparation, au motif qu’un éventuel droit à indemnisation était, en tout état de cause, «prescrit, en vertu de l’article 46 du statut de la Cour de justice».

11

Par lettre du 9 mars 2006, Inalca et Cremonini ont adressé à la Commission une demande visant à obtenir la réparation des dommages subis, évalués pour un montant total de 2861000 euros. La Commission n’a donné aucune suite à cette demande.

12

Par décision no 2006/678/CE, du 3 octobre 2006, relative aux conséquences financières à appliquer, dans le cadre de l’apurement des comptes des dépenses financées par le Fonds européen d’orientation et de garantie agricole (FEOGA), section «Garantie», dans certains cas d’irrégularités commises par des opérateurs (JO L 278, p. 24), la Commission a retiré de la liste des communications concernant les irrégularités celles notifiées à la République italienne et relatives aux restitutions à l’exportation de viande bovine à destination de la Jordanie.

Le recours devant le Tribunal et l’ordonnance attaquée

13

Par requête déposée au greffe du Tribunal le 27 juin 2006, Inalca et Cremonini ont introduit un recours devant le Tribunal par lequel elles demandaient la constatation de la responsabilité non contractuelle de la Communauté et la condamnation de la Commission à la réparation des dommages subis, évalués à 2 861 000 euros, ainsi qu’au paiement des intérêts compensatoires afférents et des intérêts moratoires éventuels.

14

Par acte séparé du 18 septembre 2006, la Commission a soulevé une exception d’irrecevabilité au titre de l’article 114, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, au motif que ledit recours était prescrit en vertu de l’article 46 du statut de la Cour de justice.

15

Le Tribunal a rappelé, au point 45 de l’ordonnance attaquée, la jurisprudence en vertu de laquelle il ressort de l’article 288 CE et de l’article 46 du statut de la Cour de justice que l’engagement de la responsabilité non contractuelle de la Communauté et la mise en œuvre du droit à la réparation du préjudice subi dépendent de la réunion d’un ensemble de conditions relatives à l’existence d’un acte illicite des institutions communautaires, d’un dommage réel et d’un lien de causalité entre eux (arrêt du 27 janvier 1982, Birra Wührer e.a./Conseil et Commission, 256/80, 257/80, 265/80, 267/80 et 5/81, Rec. p. 85, point 9).

16

Le Tribunal a également rappelé, au point 46 de l’ordonnance attaquée, qu’il résulte d’une jurisprudence bien établie que le délai de prescription de l’action en responsabilité non contractuelle de la Communauté commence à courir lorsque sont réunies toutes les conditions auxquelles se trouve subordonnée l’obligation de réparation, notamment lorsque le dommage à réparer s’est concrétisé [ordonnance du 18 juillet 2002, Autosalone Ispra dei Fratelli Rossi/Commission, C-136/01 P, Rec. p. I-6565, point 30, et arrêt du 19 avril 2007, Holcim (Deutschland)/Commission, C-282/05 P, Rec. p. I-2941, point 29].

17

À cet égard, le Tribunal a précisé, au point 47 de l’ordonnance attaquée, que, dans les cas où la responsabilité de la Communauté trouve sa source dans un acte normatif, le délai de prescription commence à courir lorsque les effets dommageables de cet acte se sont produits [arrêt Holcim (Deutschland)/Commission, précité, point 29]. Le Tribunal a ajouté qu’il en est de même dans les contentieux nés, comme en l’espèce, d’actes individuels, ce délai ne commençant à courir qu’à partir du moment où le préjudice s’est effectivement réalisé [arrêt Holcim (Deutschland)/Commission, précité, points 30 à 33].

18

Le Tribunal en a déduit, au point 49 de l’ordonnance attaquée, qu’il y avait lieu de déterminer le moment précis auquel les effets dommageables allégués se sont effectivement produits à l’égard d’Inalca et de Cremonini en examinant successivement les différents préjudices dont celles-ci réclamaient réparation.

19

S’agissant du préjudice matériel, le Tribunal a, tout d’abord, constaté, au point 51 de l’ordonnance attaquée, que le préjudice lié à la constitution des polices fidéjussoires auprès d’une société d’assurances s’est réalisé de manière certaine dès le 30 novembre 1999, date à laquelle Inalca et Cremonini ont conclu lesdites polices. Le Tribunal a toutefois précisé, aux points 59 et 64 de l’ordonnance attaquée, que le préjudice résultant des frais liés à la constitution des polices fidéjussoires avait un caractère continu et que le recours tendant à l’indemnisation de ce préjudice était dès lors recevable en ce qui concernait les contrats reconduits après le 27 juin 2001.

20

Ensuite, s’agissant des frais supportés pour les services d’assistance et de conseil juridiques, ainsi que les frais de personnel occasionnés par la gestion des dossiers en cause, le Tribunal a retenu, aux points 71 et 73 de l’ordonnance attaquée, que les préjudices résultant de ces frais présentaient un caractère instantané et que, par conséquent, le recours en indemnité y afférent était prescrit.

21

Enfin, dans la mesure où la demande de réparation du dommage prétendument subi sous la forme de manque à gagner en raison de la réduction des disponibilités financières consécutive au paiement des primes liées à la constitution des polices fidéjussoires et des frais d’assistance et de conseil juridiques ainsi que des frais de personnel manquait de précision, le Tribunal a jugé, au point 74 de l’ordonnance attaquée, que ladite demande devait être rejetée comme irrecevable.

22

S’agissant du préjudice moral, le Tribunal a jugé, au point 77 de l’ordonnance attaquée, que le recours y afférent était prescrit dans la mesure où le dommage allégué s’était réalisé lors de l’engagement des procédures nationales, en 1999 et en 2000, soit plus de cinq ans avant l’introduction du recours devant lui. Il a rejeté, au point 78 de l’ordonnance attaquée, l’argument d’Inalca et de Cremonini selon lequel ce préjudice aurait présenté un caractère continu jusqu’au prononcé du jugement du 27 avril 2005 et il a ajouté, au point 79 de la même ordonnance, que, en tout état de cause, Inalca et Cremonini se limitaient à invoquer une atteinte à leur réputation commerciale sans fournir la moindre indication à ce sujet.

23

Au point 81 de l’ordonnance attaquée, le Tribunal a conclu que le recours était donc uniquement recevable en ce qu’il tendait à la réparation du préjudice résultant du paiement des primes liées à la constitution des polices fidéjussoires depuis le 27 juin 2001.

24

Quant au fond, le Tribunal a précisé, au point 85 de l’ordonnance attaquée, que, dès lors qu’une des trois conditions d’engagement de la responsabilité de la Communauté n’était pas remplie, les prétentions indemnitaires devaient être rejetées, sans qu’il fût nécessaire d’examiner si les deux autres conditions étaient réunies.

25

Après avoir précisé que le juge communautaire n’était pas tenu d’examiner les différentes conditions dans un ordre déterminé, le Tribunal a estimé opportun d’examiner, en premier lieu, la condition relative à l’existence d’un lien de causalité.

26

Au point 90 de l’ordonnance attaquée, le Tribunal a constaté, sans se prononcer pour autant sur la question de l’imputabilité à la Communauté du préjudice causé par les décisions de récupération du 15 janvier 1999, que le préjudice résultant de la constitution des polices fidéjussoires n’avait pas été directement causé par la lettre de l’UCLAF du 6 juillet 1998.

27

Le Tribunal en a déduit, au point 94 de l’ordonnance attaquée, que le recours en indemnité introduit par Inalca et Cremonini, pour autant qu’il était recevable, devait être rejeté comme étant manifestement dépourvu de tout fondement en droit.

La procédure devant la Cour

28

Le 18 novembre 2009, Inalca et Cremonini ont formé un pourvoi devant la Cour.

29

Le 11 février 2010, la Commission a, dans son mémoire en réponse, présenté un pourvoi incident.

Les conclusions des parties

30

Inalca et Cremonini demandent à la Cour:

d’annuler l’ordonnance attaquée et de renvoyer l’affaire devant le Tribunal;

de condamner la Commission aux dépens des deux instances.

31

La Commission demande à la Cour:

statuant sur le pourvoi incident, d’annuler l’ordonnance attaquée dans la mesure où elle déclare partiellement recevable le recours de première instance et de rejeter ce recours comme entièrement irrecevable;

à titre subsidiaire, de rejeter le pourvoi comme dénué de fondement;

à titre encore plus subsidiaire, en cas d’annulation partielle de l’ordonnance attaquée, de rejeter le recours introduit en première instance, et

en tout état de cause, de condamner Inalca et Cremonini aux dépens des deux instances.

Sur les pourvois

32

Inalca et Cremonini soulèvent sept moyens à l’appui de leur pourvoi, lesquels portent essentiellement sur des questions de fond.

33

Dans le cadre de son pourvoi incident, la Commission soulève un seul moyen relatif à la recevabilité du recours initial.

34

Dès lors qu’il n’y a lieu de se prononcer sur le pourvoi principal que si le pourvoi incident formé par la Commission est rejeté, il convient, en l’espèce, d’analyser celui-ci au préalable.

Sur le pourvoi incident

Argumentation des parties

35

Le moyen unique soulevé par la Commission est tiré d’une erreur de droit prétendument commise par le Tribunal, aux points 46 et 47 de l’ordonnance attaquée, dans la détermination de la date à partir de laquelle le délai de prescription commence à courir pour les actions en dommages et intérêts.

36

À titre principal, la Commission rappelle que, dans le cas de figure où la responsabilité de la Communauté trouve sa source dans un acte normatif et où le préjudice qui en résulte se manifeste ultérieurement à l’égard des particuliers, la Cour a, par son arrêt Birra Wührer e.a./Conseil et Commission, précité, instauré un régime particulier par rapport à celui résultant de l’article 46 de son statut. Si la Commission ajoute qu’une seule autre atténuation à l’article 46 du statut de la Cour de justice a été apportée, à juste titre, pour ce qui est du calcul du délai de prescription à l’égard de la victime qui n’a pu prendre connaissance du fait générateur du dommage qu’à une date tardive (arrêt du 7 novembre 1985, Adams/Commission, 145/83, Rec. p. 3539, points 50 et 51), elle estime, toutefois, que la jurisprudence en la matière n’est pas constante et requiert une clarification dans le cadre du présent pourvoi.

37

En effet, le Tribunal, d’une part, aurait limité l’application du régime particulier instauré par l’arrêt Birra Wührer e.a./Conseil et Commission, précité, à des cas de figure où la responsabilité trouverait sa source dans un acte normatif (ordonnance du Tribunal du 17 janvier 2001, Autosalone Ispra dei Fratelli Rossi/Commission, T-124/99, Rec. p. II-53), mais, d’autre part, l’aurait étendu à d’autres cas de figure [voir arrêt du Tribunal du 21 avril 2005, Holcim (Deutschland)/Commission, T-28/03, Rec. p. II-1357, point 59, et ordonnance du Tribunal du 14 septembre 2005, Ehcon/Commission, T-140/04, Rec. p. II-3287, point 39].

38

La Cour, de son côté, aurait précisé que ledit régime particulier s’appliquait uniquement dans les cas de figure où la responsabilité trouvait sa source dans un acte normatif (arrêt du 17 juillet 2008, Commission/Cantina sociale di Dolianova e.a., C-51/05 P, Rec. p. I-5341, point 54), alors qu’elle aurait mentionné, dans d’autres affaires, en tant qu’obiter dictum, la solution adoptée dans l’arrêt Birra Wührer e.a./Conseil et Commission, précité [ordonnance du 18 juillet 2002, Autosalone Ispra dei Fratelli Rossi/Commission, précitée, points 29 et 30; arrêts du 19 avril 2007, Holcim (Deutschland)/Commission, précité, points 29 et 30, ainsi que du 11 juin 2009, Transports Schiocchet – Excursions/Commission, C‑335/08 P, point 33].

39

La Commission considère que la Cour a manqué de fournir une motivation adéquate en appliquant le régime particulier aux contentieux nés d’actes individuels, voire même à d’autres cas de figure, comme, en l’espèce, lorsque le préjudice allégué trouve son origine dans une lettre adressée par l’UCLAF à des autorités nationales.

40

Selon la Commission, une telle extension de la règle jurisprudentielle risque de vider de toute sa substance la disposition pourtant claire de l’article 46 du statut de la Cour.

41

À titre subsidiaire, la Commission estime que le Tribunal a commis une erreur de droit en jugeant, au point 47 de l’ordonnance attaquée, que l’action en réparation dont il était saisi concernait un contentieux né d’actes individuels au sens de l’arrêt du 19 avril 2007, Holcim (Deutschland)/Commission, précité, alors que la lettre adressée aux autorités nationales ne constituait pas un acte individuel produisant des effets obligatoires à l’égard de son destinataire. À l’appui de cet argument, la Commission invoque l’arrêt du 23 novembre 1995, Nutral/Commission (C-476/93 P, Rec. p. I-4125, point 30), portant sur un cas de figure analogue dont il ressortirait que les lettres envoyées par la Commission aux autorités nationales compétentes ne constituaient que de simples recommandations ou avis dépourvus d’effet juridique.

42

À titre plus subsidiaire encore, la Commission estime que le Tribunal a commis une erreur de droit en modifiant arbitrairement les critères retenus dans l’arrêt du 19 avril 2007, Holcim (Deutschland)/Commission, précité. En effet, même en admettant qu’il s’agissait d’un contentieux né d’un acte individuel, le Tribunal aurait jugé à tort, aux points 46 et 47 de l’ordonnance attaquée, que le délai de prescription a commencé à courir seulement lorsque le dommage s’est effectivement concrétisé au lieu de retenir comme point de départ de la prescription la date du fait préjudiciable, voire même, le cas échéant, la date à laquelle Inalca et Cremonini ont eu connaissance de ce fait.

43

Inalca et Cremonini considèrent que la jurisprudence de la Cour en la matière est claire et contestent la lecture faite par la Commission des arrêts cités dans le cadre de son pourvoi incident. Inalca et Cremonini rappellent, toutefois, que la solution retenue par le Tribunal est critiquable pour des motifs plus amplement développés dans le cadre du premier moyen qu’elles ont soulevé dans le pourvoi principal.

Appréciation de la Cour

44

Afin de statuer sur le bien-fondé du pourvoi incident de la Commission, il y a lieu d’examiner si le Tribunal a commis une erreur de droit dans l’application des règles sur la prescription des actions en matière de responsabilité non contractuelle aux faits de l’espèce.

45

D’emblée, il convient de constater que, aux termes de l’article 46 du statut de la Cour, les actions contre l’Union européenne en matière de responsabilité non contractuelle se prescrivent par cinq ans à compter de la survenance du fait qui y donne lieu.

46

Ainsi que l’a rappelé le Tribunal aux points 45 et 84 de l’ordonnance attaquée, sans être contredit par la Commission à cet égard, l’engagement de la responsabilité non contractuelle de la Communauté et la mise en œuvre du droit à la réparation du préjudice subi, en vertu de l’article 288, deuxième alinéa, CE, dépendent de la réunion d’un ensemble de conditions afférentes à l’illégalité du comportement reproché aux institutions, à la réalité du dommage et à l’existence d’un lien de causalité entre ce comportement et le préjudice invoqué (voir, notamment, arrêts Birra Wührer e.a./Conseil et Commission, précité, point 9; du 29 septembre 1982, Oleifici Mediterranei/CEE, 26/81, Rec. p. 3057, point 16; du 9 septembre 2008, FIAMM e.a./Conseil et Commission, C-120/06 P et C-121/06 P, Rec. p. I-6513, point 106, ainsi que du 18 mars 2010, Trubowest Handel et Makarov/Conseil et Commission, C-419/08 P, Rec. p. I-2259, point 40).

47

Au point 46 de l’ordonnance attaquée, le Tribunal a relevé qu’il en résulte, selon une jurisprudence bien établie, que le délai de prescription de l’action en responsabilité non contractuelle commence à courir dès lors que les conditions auxquelles se trouve subordonnée l’obligation de réparation sont réunies et, notamment, lorsque le dommage à réparer s’est concrétisé [arrêts Birra Wührer e.a./Conseil et Commission, précité; du 19 avril 2007, Holcim (Deutschland)/Commission, précité, point 29; Commission/Cantina sociale di Dolianova e.a., précité, point 54, ainsi que du 8 novembre 2012, Evropaïki Dynamiki/Commission, C‑469/11 P, point 34].

48

C’est encore en se fondant sur une jurisprudence constante de la Cour que le Tribunal a rappelé, au point 47 de l’ordonnance attaquée, que, dans les cas où la responsabilité de la Communauté trouve sa source dans un acte normatif, le délai de prescription commence à courir lorsque les effets dommageables de cet acte se sont produits [arrêts Birra Wührer e.a./Conseil et Commission, précité, point 10, ainsi que du 19 avril 2007, Holcim (Deutschland)/Commission, précité, point 29] et que, de même, dans les contentieux nés d’actes individuels, le délai de prescription ne commence à courir qu’à partir du moment où le préjudice s’est effectivement réalisé [voir arrêts précités du 19 avril 2007, Holcim (Deutschland)/Commission, point 30; Transports Schiocchet – Excursions/Commission, point 33, ainsi que Evropaïki Dynamiki/Commission, point 38].

49

C’est sur le fondement de ces principes que le Tribunal a déterminé le point de départ du délai de prescription comme étant le moment où les effets dommageables allégués par Inalca et Cremonini se sont produits.

50

À cet égard, la Commission fait valoir, à titre principal, que la jurisprudence ne serait pas uniforme et qu’une clarification de la part de la Cour serait nécessaire.

51

À supposer qu’un tel argument soit recevable dans le cadre du présent pourvoi, alors qu’il n’est pas directement dirigé à l’encontre d’un point déterminé de l’ordonnance attaquée, il suffit de constater que l’ordonnance du 17 janvier 2001, Autosalone Ispra dei Fratelli Rossi/Commission, précitée, invoquée par la Commission au soutien de son argumentation, a été censurée par la Cour. En effet, la Cour a jugé que le Tribunal avait commis une erreur de droit en déterminant le point de départ du délai de prescription en fonction de la survenance du fait à l’origine du dommage (ordonnance du 18 juillet 2002, Autosalone Ispra dei Fratelli Rossi/Commission, précitée, point 34).

52

Par conséquent, contrairement à ce qui est avancé par la Commission, le critère décisif pour déterminer le point de départ du délai de prescription n’est pas la survenance du fait à l’origine du dommage, puisque, notamment, on ne saurait opposer au requérant un point de départ de la prescription situé à une date antérieure à l’apparition des effets dommageables dudit fait (arrêt Birra Wührer e.a./Conseil et Commission, précité, point 11).

53

De surcroît, il y a lieu de relever que, en se fondant sur l’arrêt Commission/Cantina sociale di Dolianova e.a., précité, pour affirmer que le régime instauré par l’arrêt Birra Wührer e.a./Conseil et Commission, précité, ne s’applique que dans les cas de figure où la responsabilité trouve sa source dans un acte normatif, la Commission procède à une lecture erronée dudit arrêt.

54

En effet, le contentieux en cause dans cette affaire était né d’un acte normatif de la Commission et la Cour n’était donc pas dans l’obligation de poursuivre son raisonnement pour ce qui est des cas de figure afférents à la responsabilité non contractuelle dans les contentieux résultant d’un acte individuel. Contrairement à ce qui est allégué par la Commission, il ne résulte pas de l’arrêt Commission/Cantina sociale di Dolianova e.a., précité, que la Cour avait exclu l’application de la jurisprudence issue de l’arrêt Birra Wührer e.a./Conseil et Commission, précité, lorsque la responsabilité de la Communauté trouve sa source dans un acte individuel.

55

La Cour a récemment encore confirmé que, dans le cas des contentieux nés d’actes individuels, le délai de prescription commence à courir lorsque la décision a produit ses effets dommageables à l’égard des personnes qu’elle vise (voir, en ce sens, arrêt Evropaïki Dynamiki/Commission, précité, point 38).

56

S’agissant de l’argument présenté à titre subsidiaire par la Commission, fondé sur l’arrêt Nutral/Commission, précité, duquel il résulterait que la lettre adressée aux autorités nationales ne constitue pas un acte individuel produisant des effets obligatoires à l’égard d’Inalca et de Cremonini, force est de constater que cet arrêt a trait aux conditions de recevabilité des recours en annulation et que les enseignements sur la qualification juridique de l’acte attaquable ne sont pas transposables dans le contexte de la détermination du point de départ du délai de prescription d’une action en responsabilité non contractuelle.

57

Dès lors, dans le cadre de la détermination du point de départ du délai de prescription dans le présent litige, il importe peu de savoir si la lettre adressée aux autorités nationales est en mesure de produire des effets juridiques obligatoires de nature à modifier de façon caractérisée la situation d’Inalca et de Cremonini.

58

En tout état de cause, et dans la mesure où il résulte du point 49 du présent arrêt que le Tribunal n’a pas commis d’erreur de droit en considérant que le délai de prescription court à partir du moment où les effets dommageables allégués par Inalca et Cremonini se sont effectivement produits, le caractère individuel ou normatif de l’acte en cause n’est pas déterminant.

59

S’agissant de l’argument avancé par la Commission à titre plus subsidiaire encore, selon lequel le Tribunal aurait dû retenir comme point de départ de la prescription la date du fait préjudiciable, il importe de relever que le Tribunal n’a commis aucune erreur de droit en jugeant, au point 49 de l’ordonnance attaquée qu’il convenait de déterminer le moment précis auquel les effets dommageables allégués dans cette lettre se sont effectivement produits à l’égard d’Inalca et de Cremonini.

60

En effet, contrairement à ce qui est allégué par la Commission, le délai de prescription commence à courir non pas à partir de la date du fait préjudiciable, mais à partir du moment où la décision litigieuse produit ses effets dommageables à l’égard des personnes qu’elle vise, c’est-à-dire au moment où le préjudice s’est effectivement réalisé dans le chef desdites personnes [voir arrêt du 19 avril 2007, Holcim (Deutschland)/Commission, précité, point 30].

61

Il résulte de tout ce qui précède qu’il y a lieu de rejeter le pourvoi incident introduit par la Commission comme étant non fondé.

Sur le pourvoi principal

Sur le premier moyen

– Argumentation des parties

62

Le premier moyen soulevé par Inalca et Cremonini est tiré du caractère contradictoire de la motivation de l’ordonnance attaquée et d’une violation de la jurisprudence communautaire, dès lors que le Tribunal n’aurait pas tenu compte, au point 55 de l’ordonnance attaquée, de la décision no 2006/678, alors que, jusqu’au moment de l’adoption de cette décision, la situation d’incertitude juridique dans laquelle elles se trouvaient, quant à l’existence et au montant du préjudice subi, se serait manifestée quotidiennement et ne se serait réalisée définitivement qu’au cours de l’année 2006.

63

Inalca et Cremonini font également valoir une erreur de droit dans le chef du Tribunal en ce qu’il s’est fondé, à ce même point 55 de l’ordonnance attaquée, sur l’ordonnance du 17 janvier 2001, Autosalone Ispra dei Fratelli Rossi/Commission, précitée, pour conclure à une confusion entre le critère procédural relatif au point de départ du délai de prescription et le constat de l’existence des conditions de responsabilité. Or, contrairement à l’événement retenu dans cette ordonnance pour déterminer le point de départ dudit délai, la décision no 2006/678 n’aurait pas affecté leur seule sphère subjective.

64

La Commission, se fondant sur l’arrêt du 19 avril 2007, Holcim (Deutschland)/Commission, précité, rappelle qu’il est indifférent, pour le déclenchement du délai de prescription, que le comportement illégal de l’Union ait été constaté par une décision de justice ou ait été reconnu par le prétendu auteur du dommage.

– Appréciation de la Cour

65

Il convient de relever que, au point 53 de l’ordonnance attaquée, le Tribunal a rappelé la jurisprudence en vertu de laquelle le délai de prescription ne court qu’à partir du moment où le préjudice pécuniaire s’est effectivement réalisé, à savoir, en ce qui concerne plus particulièrement la constitution de garanties bancaires, à partir du moment où les frais liés à la constitution de telles garanties ont été générés.

66

Le Tribunal a constaté, au point 54 de cette ordonnance, qu’il ressort du dossier que les frais liés aux deux polices fidéjussoires ont été générés à partir de la date à laquelle ces contrats ont été conclus, à savoir le 30 novembre 1999, la première prime annuelle ayant été due à cette même date.

67

Ce faisant, le Tribunal a écarté l’argument présenté par Inalca et Cremonini selon lequel les effets dommageables ne se seraient produits de manière certaine qu’au moment de l’adoption de la décision no 2006/678, par laquelle la Commission a constaté que les restitutions à l’exportation en cause ne leur avaient pas été indûment versées.

68

Le Tribunal a ajouté que la circonstance qu’Inalca et Cremonini aient estimé, avant l’adoption de la décision no 2006/678, ne pas encore disposer de l’ensemble des éléments leur permettant de démontrer à suffisance de droit la responsabilité de la Communauté dans le cadre d’une procédure judiciaire n’est pas pertinente, sous peine de créer une confusion entre le critère procédural relatif au point de départ du délai de prescription et le constat de l’existence des conditions de fond nécessaires pour l’engagement de ladite responsabilité.

69

Il résulte de ce qui précède que l’argument d’Inalca et de Cremonini consistant à reprocher au Tribunal de ne pas avoir tenu compte de la décision no 2006/678 doit être déclaré comme non fondé.

70

S’agissant de la prétendue dénaturation de l’ordonnance du 17 janvier 2001, Autosalone Ispra dei Fratelli Rossi/Commission, précitée, à laquelle se serait livré le Tribunal, il suffit de relever que la Cour a jugé que la connaissance précise et circonstanciée des faits par la victime ne figure pas au nombre des éléments qui doivent être réunis pour faire courir le délai de prescription (ordonnance du 18 juillet 2002, Autosalone Ispra dei Fratelli Rossi/Commission, précitée, point 31, et arrêt Evropaïki Dynamiki/Commission, précité, point 37). De même, l’appréciation subjective de la réalité du dommage par la victime de ce dommage ne saurait être prise en considération dans la détermination du point de départ du délai de prescription de l’action en responsabilité non contractuelle de l’Union (arrêts précités Commission/Cantina sociale di Dolianova e.a., point 61, ainsi que Evropaïki Dynamiki/Commission, point 37).

71

En outre, dans la mesure où il a été jugé qu’il est indifférent, pour le déclenchement du délai de prescription, que le comportement illégal de la Communauté ait été constaté par une décision de justice [arrêt du 19 avril 2007, Holcim (Deutschland)/Commission, précité, point 31], le fait qu’une institution reconnaisse elle-même avoir eu un comportement illégal ne saurait non plus avoir d’incidence sur la détermination du point de départ du délai de prescription.

72

Par conséquent, l’argument relatif à une prétendue dénaturation de l’ordonnance du 17 janvier 2001, Autosalone Ispra dei Fratelli Rossi/Commission, précitée, doit également être écarté comme non fondé.

73

Il résulte de ce qui précède que le premier moyen doit être écarté comme non fondé.

Sur le deuxième moyen

– Argumentation des parties

74

Le deuxième moyen soulevé par Inalca et Cremonini est tiré du caractère contradictoire et illogique de la motivation de l’ordonnance attaquée, de même que de la violation de la jurisprudence communautaire en ce qui concerne la prescription du recours au regard des dépenses d’assistance et de consultation juridique ainsi que des frais de personnel.

75

Inalca et Cremonini font grief au Tribunal d’avoir violé le principe général en matière de préjudice à caractère continu, énoncé aux points 56 et 57 de l’ordonnance attaquée, en retenant, aux points 71 et 72 de cette ordonnance, que les préjudices en question n’avaient pas présenté un tel caractère continu. La motivation du Tribunal serait contradictoire dans la mesure où il reconnaîtrait lui-même que les préjudices en question ne pouvaient pas être quantifiés de manière définitive dès l’engagement des procédures en question. Inalca et Cremonini se réfèrent à la jurisprudence du Tribunal en matière de taxation des dépens, laquelle déterminerait le montant de ces dépens en fonction du nombre d’heures de travail prestées et reconnaîtrait ainsi le caractère non instantané des prestations de conseil juridique.

76

Selon la Commission, le deuxième moyen est dénué de fondement. D’une part, Inalca et Cremonini confondraient la quantification définitive du montant du préjudice allégué avec l’appréciation du caractère continu de ce dernier. D’autre part, la référence faite à la jurisprudence en matière de taxation des dépens serait inappropriée.

– Appréciation de la Cour

77

S’agissant des préjudices à caractère continu, le Tribunal a rappelé, au point 56 de l’ordonnance attaquée, que, lorsque les dommages n’ont pas été causés instantanément, mais qu’ils se sont poursuivis pendant une certaine période, le droit à une indemnisation porte sur des périodes successives.

78

Au point 71 de l’ordonnance attaquée, le Tribunal a jugé que, dans le cas d’espèce, les préjudices constitués par les frais d’assistance et de conseil juridiques ainsi que par les frais de personnel occasionnés ont présenté un caractère instantané, dans la mesure où ils se sont effectivement réalisés à la date de l’engagement de chacune des procédures nationales en cause.

79

Le Tribunal a ajouté, au point 72 de l’ordonnance attaquée, que, même si les préjudices allégués ne pouvaient pas être quantifiés de manière définitive dès l’engagement des procédures nationales, ils résultaient de manière certaine de l’engagement de ces procédures.

80

Or, contrairement aux allégations d’Inalca et de Cremonini, un préjudice est considéré comme ayant un caractère continu en raison du fait que son montant augmente en proportion du nombre de jours écoulés [arrêt du 19 avril 2007, Holcim (Deutschland)/Commission, précité, point 35].

81

Par conséquent, c’est sans contradiction de motivation que le Tribunal a jugé que les préjudices allégués, constitués par les frais d’assistance et de conseil juridiques ainsi que par les frais de personnel occasionnés par la gestion des dossiers en cause, ne présentaient pas le caractère d’un préjudice continu. En effet, bien que les préjudices en question ne fussent pas encore fixés de manière définitive à la date de l’engagement de chacune des procédures nationales en cause, il y a lieu de constater que leurs montants ont augmenté non pas en proportion du nombre de jours écoulés, mais en raison des différentes instances judiciaires engagées.

82

Dans ce contexte, la référence faite par Inalca et Cremonini à la jurisprudence applicable en matière de taxation des dépens doit également être écartée. En effet, le simple fait que le montant des dépens soit déterminé en fonction du nombre d’heures prestées ne saurait avoir une incidence sur la nature du préjudice constitué par des prestations de conseil juridique.

83

Il résulte de ce qui précède que le deuxième moyen doit être écarté comme étant non fondé.

Sur le troisième moyen

– Argumentation des parties

84

Le troisième moyen soulevé par Inalca et Cremonini est tiré d’une dénaturation des arguments présentés et d’une violation de l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure du Tribunal pour ce qui est de la demande de réparation du préjudice subi sous la forme d’un manque à gagner.

85

Inalca et Cremonini estiment que c’est à tort que le Tribunal a retenu, au point 74 de l’ordonnance attaquée, un défaut de précision en ce qui concerne la demande de réparation du préjudice subi sous la forme d’un manque à gagner en raison de la réduction de leurs disponibilités financières consécutive au paiement des primes afférentes aux contrats de cautionnement et aux dépenses d’assistance et de consultation juridique ainsi que de personnel.

86

En rappelant les développements présentés dans le cadre de leur requête introductive en première instance, Inalca et Cremonini affirment qu’elles ne s’étaient pas limitées à soutenir de manière générale que les sommes perdues auraient pu être employées pour participer à des appels d’offres exigeant le versement d’une caution, mais qu’elles avaient fourni au Tribunal différents éléments de preuve. Elles s’appuient sur une jurisprudence en vertu de laquelle le juge peut se contenter d’estimations sur la base de valeurs statistiques moyennes dans la mesure où il peut être difficile, voire impossible, pour la partie requérante, de chiffrer exactement le préjudice qu’elle prétend avoir subi (arrêt du 27 janvier 2000, Mulder e.a./Conseil et Commission, C-104/89 et C-37/90, Rec. p. I-203, points 63 à 65).

87

La Commission considère que le troisième moyen est dénué de fondement. En effet, Inalca et Cremonini auraient omis de préciser de quels appels d’offres elles auraient été exclues et de quelle manière l’engagement des contrats de cautionnement aurait causé leur exclusion de ces appels d’offres. En outre, la référence faite à l’arrêt Mulder e.a./Conseil et Commission, précité, ne serait pas pertinente.

– Appréciation de la Cour

88

Il y a lieu de rappeler que le Tribunal a analysé, au point 74 de l’ordonnance attaquée, la demande de réparation du dommage prétendument subi sous la forme d’un manque à gagner en raison de la réduction des disponibilités financières consécutive au paiement des primes liées à la constitution des polices fidéjussoires et des frais d’assistance et de conseil juridiques ainsi que des frais de personnel. Étant donné qu’Inalca et Cremonini se sont limitées à soutenir de manière générale que les sommes ainsi perdues auraient pu être employées pour participer à des appels d’offres exigeant le versement d’une caution, le Tribunal a conclu au caractère abstrait de la demande et l’a rejetée comme irrecevable en vertu de l’article 44, paragraphe 1, sous c), de son règlement de procédure.

89

Dans la mesure où il ressort du présent moyen que celui-ci constitue une simple reformulation des arguments déjà présentés en première instance en relation avec le dommage prétendument subi sous la forme d’un manque à gagner, il y a lieu de constater qu’Inalca et Cremonini visent en réalité à contester l’appréciation que le Tribunal a effectuée à cet égard.

90

Or, il résulte d’une jurisprudence constante que le Tribunal est seul compétent, d’une part, pour constater les faits, sauf dans le cas où une inexactitude matérielle de ses constatations résulterait des pièces du dossier qui lui ont été soumises, et, d’autre part, pour apprécier ces faits. L’appréciation des faits ne constitue donc pas, sous réserve du cas de la dénaturation des éléments de preuve qui lui ont été soumis, une question de droit soumise, comme telle, au contrôle de la Cour (voir, notamment, arrêt du 3 mai 2012, Legris Industries/Commission, C‑289/11 P, point 51 et jurisprudence citée).

91

En l’occurrence, Inalca et Cremonini ne fondent leurs allégations ni sur une inexactitude matérielle des constatations faites par le Tribunal ni sur une dénaturation des éléments de preuve qui lui ont été soumis. Au contraire, elles critiquent l’appréciation, en tant que telle, portée par le Tribunal sur lesdits éléments de preuve et les arguments avancés par ce dernier lorsqu’il a jugé que la demande de réparation du dommage allégué sous la forme d’un manque à gagner n’était pas suffisamment précise.

92

À cet égard, l’arrêt Mulder e.a./Conseil et Commission, précité, invoqué par Inalca et Cremonini n’est pas pertinent, dans la mesure où les points cités ne se réfèrent aucunement à l’obligation incombant aux requérants, conformément à l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure du Tribunal, de préciser l’étendue exacte du préjudice et de chiffrer le montant de la réparation demandée, mais ont trait aux principes devant régir le mode de calcul du manque à gagner, plus particulièrement lorsqu’il s’agit de revenus hypothétiques et de revenus alternatifs.

93

Il résulte de ce qui précède que le troisième moyen doit être rejeté comme étant partiellement irrecevable et partiellement non fondé.

Sur le cinquième moyen

– Argumentation des parties

94

Le cinquième moyen soulevé par Inalca et Cremonini, qu’il convient d’analyser au préalable, est tiré d’une violation de l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure du Tribunal, d’une violation de la jurisprudence en matière de préjudice moral et du caractère manifestement illogique de la motivation.

95

Inalca et Cremonini font valoir que c’est à tort que le Tribunal a jugé, au point 79 de l’ordonnance attaquée, que la demande de réparation du préjudice moral manquait de précision. En effet, d’une part, l’acte introductif aurait contenu tous les éléments de preuve nécessaires. D’autre part, en raison des caractéristiques du préjudice moral, lequel, par définition, est impossible à quantifier, Inalca et Cremonini s’en seraient remises à l’appréciation équitable du Tribunal. En rejetant cette demande, le Tribunal aurait violé la jurisprudence applicable en la matière (voir arrêt du Tribunal du 17 décembre 1998, Embassy Limousines & Services/Parlement, T-203/96, Rec p. II-4239, point 108).

96

En outre, le renvoi fait au point 79 de l’ordonnance attaquée à la jurisprudence citée au point 69 de cette dernière constituerait une erreur de droit supplémentaire. En effet, les principes dégagés dans ces affaires relatives à des préjudices matériels ne seraient pas transposables à la présente question, qui concerne exclusivement la réparation d’un préjudice moral.

97

La Commission rappelle que la demande en réparation du préjudice moral a été déclarée irrecevable non seulement en raison de la prescription, mais également parce qu’elle ne répondait pas aux exigences énoncées à l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure du Tribunal. Dès lors, le cinquième moyen ne serait pas fondé.

– Appréciation de la Cour

98

Il convient de relever que, s’agissant du préjudice moral sous la forme d’une atteinte portée à la réputation commerciale d’Inalca et de Cremonini du fait de leur implication dans des procédures administratives, civiles et pénales, le Tribunal a constaté, au point 77 de l’ordonnance attaquée, que ce préjudice est survenu lors de l’engagement de ces procédures au cours des années 1999 et 2000 et que, par conséquent, le recours y afférent est prescrit.

99

Ce faisant, le Tribunal a écarté l’argument d’Inalca et de Cremonini selon lequel ce préjudice aurait présenté un caractère continu jusqu’au prononcé du jugement du Tribunale civile di Roma en 2005. Il a précisé que le préjudice moral allégué, même en admettant qu’il ait perduré jusqu’à cette date, s’est entièrement réalisé dès la mise en cause d’Inalca et de Cremonini et de leurs dirigeants dans les procédures susmentionnées en 1999 et en 2000. Se référant aux caractéristiques qu’un préjudice doit revêtir pour être qualifié de «préjudice continu», telles qu’elles résultent des points 56 et 57 de l’ordonnance attaquée, le Tribunal a jugé que le préjudice moral allégué ne saurait être assimilé à un tel préjudice.

100

Le Tribunal a ajouté, au point 79 de l’ordonnance attaquée, que, «en outre, et en tout état de cause, […] la demande de réparation du préjudice moral manque de la précision nécessaire et doit en toute hypothèse être déclarée irrecevable en vertu de l’article 44, paragraphe 1, sous c), […] [de son] règlement de procédure».

101

Il découle de ce qui précède que le rejet par le Tribunal de la demande de réparation du préjudice moral allégué est fondé sur deux motifs distincts.

102

S’agissant du second motif attaqué dans le cadre du cinquième moyen, relatif au caractère abstrait de la requête, le Tribunal a rappelé, à juste titre et sans commettre de violation de la jurisprudence, que la requête doit contenir les éléments permettant d’identifier le préjudice allégué et d’en apprécier la nature et l’étendue.

103

À cet égard, l’argument d’Inalca et de Cremonini consistant à affirmer que les exigences minimales requises au niveau de la requête, conformément à l’article 44, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, ne seraient applicables que pour les préjudices matériels et ne s’appliqueraient donc pas dans l’hypothèse d’un préjudice moral doit être écarté comme dépourvu de tout fondement. En effet, cet argument n’est fondé sur aucun élément juridique de nature à remettre en cause la solution à laquelle a abouti le Tribunal.

104

En ce qui concerne l’argument d’Inalca et de Cremonini tenant à l’impossibilité de quantifier le préjudice moral, il convient de rappeler que la Cour a, certes, reconnu que, dans certains cas, notamment lorsqu’il est difficile de chiffrer le préjudice allégué, il n’est pas indispensable de préciser dans la requête son étendue exacte ni de chiffrer le montant de la réparation demandée (voir, notamment, arrêts du 28 mars 1979, Granaria/Conseil et Commission, 90/78, Rec. p. 1081, 1090, ainsi que du 23 septembre 2004, Hectors/Parlement, C-150/03 P, Rec. p. I-8691, point 62). Cependant, Inalca et Cremonini n’ont pas établi, ni même allégué, l’existence de circonstances particulières justifiant l’omission de préciser ce chef de préjudice dans la requête.

105

Il résulte de ce qui précède que le cinquième moyen doit être rejeté comme étant non fondé.

Sur le quatrième moyen

– Argumentation des parties

106

Le quatrième moyen soulevé par Inalca et Cremonini est tiré d’une violation de la jurisprudence communautaire et du caractère manifestement illogique de la motivation du Tribunal en ce que ce dernier a estimé que le préjudice moral subi par Inalca et Cremonini avait été entièrement réalisé dès 1999 et 2000 et qu’il n’était donc pas assimilable à un préjudice continu.

107

Inalca et Cremonini font valoir que le Tribunal n’accorde aucune importance aux caractéristiques particulières du préjudice moral et néglige le fait que, de par sa nature, le préjudice immatériel ne s’épuise pas à l’instant où il surgit, mais perdure jusqu’au moment où se produit l’événement réparateur. À cet égard, Inalca et Cremonini se réfèrent notamment à l’arrêt du Tribunal du 8 juillet 2008, Franchet et Byk/Commission (T-48/05, Rec. p. II-1585, points 400 à 411), ainsi qu’à l’arrêt du Tribunal de la fonction publique du 2 mai 2007, Giraudy/Commission (F-23/05, RecFP p. I-A-1-00121 et II-A-1-657, point 203).

108

Elles ajoutent que le renvoi fait au point 78 de l’ordonnance attaquée à la jurisprudence citée aux points 56 et 57 de cette dernière constitue une erreur de droit supplémentaire. En effet, les principes dégagés dans ces affaires relatives à des préjudices matériels ne seraient pas transposables à la présente question, laquelle concernerait la nature continue du dommage moral.

– Appréciation de la Cour

109

Il convient de rappeler, ainsi qu’il ressort des points 100 et 101 du présent arrêt, que le rejet par le Tribunal de la demande de réparation du préjudice moral allégué est fondé sur deux motifs distincts.

110

S’agissant des arguments relatifs au quatrième moyen, il suffit de constater qu’ils sont dirigés à l’encontre du premier motif sur lequel s’est fondé le Tribunal pour rejeter la demande de réparation du préjudice moral allégué en raison de la prescription du recours y afférent.

111

Même à supposer que ces arguments soient fondés, il convient d’emblée de les rejeter dans la mesure où ils ne sont pas susceptibles de remettre en cause la conclusion à laquelle le Tribunal a abouti au point 79 de l’ordonnance attaquée, déclarant, en vertu de l’article 44, paragraphe 1, sous c), de son règlement de procédure, la demande de réparation du préjudice moral comme irrecevable.

112

Par conséquent, le quatrième moyen doit être rejeté comme étant inopérant.

Sur le sixième moyen

– Argumentation des parties

113

Le sixième moyen soulevé par Inalca et Cremonini est tiré d’une erreur de droit concernant la condition de causalité entre le fait générateur reproché à la Commission et le préjudice allégué en ce que le Tribunal a conclu à l’absence de lien de causalité.

114

Inalca et Cremonini font valoir que le Tribunal n’a pas pris en considération qu’elles ne faisaient, en réalité, que respecter l’une des deux obligations alternatives issues des décisions de récupération du 15 janvier 1999. L’existence du lien de causalité se trouverait confirmée par la circonstance que, une fois l’inexistence des créances de la Commission constatée, les autorités nationales auraient immédiatement libéré les cautions.

115

En outre, Inalca et Cremonini réfutent l’argument incident formulé par le Tribunal au point 93 de l’ordonnance attaquée, selon lequel il ne serait pas établi que l’intervention des autorités italiennes n’était pas de nature à rompre le lien de causalité direct entre le comportement reproché et le préjudice allégué.

116

La Commission estime que ce moyen est dénué de tout fondement.

– Appréciation de la Cour

117

Il y a lieu de relever que le Tribunal a rappelé, au point 88 de l’ordonnance attaquée, que le préjudice doit découler de façon suffisamment directe du comportement reproché et constituer la cause déterminante de ce préjudice.

118

Le Tribunal a également rappelé, au point 91 de l’ordonnance attaquée, que, lorsqu’une décision imposant le paiement d’une amende est assortie de la faculté de constituer une caution destinée à garantir ledit paiement et les intérêts de retard, en attendant l’issue d’un recours formé contre cette décision, le préjudice consistant dans les frais de garantie résulte non pas de ladite décision, mais du propre choix de l’intéressé de constituer une garantie plutôt que d’exécuter immédiatement l’obligation de remboursement.

119

Le Tribunal a constaté, au point 92 de l’ordonnance attaquée, que, en l’occurrence, les décisions de récupération du 15 janvier 1999 ne contenaient aucune obligation de constituer des garanties, mais laissaient ce choix à la libre appréciation d’Inalca et de Cremonini. Il a ajouté, ainsi que l’a également soulevé M. l’avocat général au point 72 de ses conclusions, que, si Inalca et Cremonini avaient opté pour le remboursement immédiat des subventions à l’exportation, elles auraient évité d’avoir eu à payer les frais liés à la constitution desdites polices.

120

Par conséquent, au point 93 de l’ordonnance attaquée, c’est à bon droit que le Tribunal a pu déduire que, même à supposer que l’intervention des autorités italiennes n’ait pas été de nature à rompre le lien de causalité entre le comportement reproché à la Commission et le préjudice allégué, il n’existe aucun lien causal direct entre ce comportement et ledit préjudice.

121

La conclusion à laquelle est parvenu le Tribunal ne saurait être remise en cause ni par l’argument d’Inalca et de Cremonini tendant à affirmer qu’elles se limitaient à respecter l’une des deux obligations alternatives prévues par les décisions de récupération du 15 janvier 1999 ni par le fait que les cautions ont été immédiatement libérées une fois l’inexistence des créances constatée.

122

S’agissant de l’argument dirigé à l’encontre du point 93 de l’ordonnance attaquée, force est de constater que le raisonnement formulé par le Tribunal dans ce point part de la prémisse selon laquelle l’intervention des autorités italiennes n’était pas de nature à rompre le lien de causalité entre le comportement reproché à la Commission et le préjudice allégué.

123

À cet égard, il importe peu de savoir si la prémisse doit être considérée comme établie, ainsi que le suggèrent Inalca et Cremonini dans le cadre du présent moyen, ou comme non établie, ainsi qu’il a été retenu par le Tribunal. En effet, tout argument relatif à cette prémisse doit être qualifié d’inopérant dans la mesure où il convient, en tout état de cause, de conclure à l’absence de lien de causalité entre la lettre de l’UCLAF du 6 juillet 1998 et le paiement des frais afférents aux polices fidéjussoires.

124

Le sixième moyen doit donc être rejeté comme étant partiellement irrecevable et partiellement non fondé.

Sur le septième moyen

– Argumentation des parties

125

Par le septième et dernier moyen du pourvoi, Inalca et Cremonini demandent à la Cour d’annuler l’ordonnance attaquée au motif que le Tribunal a violé le principe du délai raisonnable de la procédure. En effet, non seulement la procédure de première instance aurait duré plus de trois ans, mais, surtout, le Tribunal se serait borné à statuer sur la question de la recevabilité du recours.

126

À titre principal, Inalca et Cremonini affirment que, au regard des origines factuelles et procédurales du présent pourvoi, il n’est pas nécessaire de démontrer que la durée excessive de la procédure ait eu une incidence sur la solution du litige. À titre subsidiaire, elles estiment que, tout d’abord, l’ordonnance attaquée est entachée de plusieurs erreurs de droit. Elles ajoutent ensuite que, embarrassé d’avoir mis plus de trois ans à résoudre seulement la question de la recevabilité du recours, le Tribunal se serait senti obligé de se prononcer également sur le fond du litige, se privant ainsi d’importants instruments procéduraux qui lui auraient permis de parvenir à des conclusions exemptes de toute erreur de droit. Enfin, Inalca et Cremonini se réservent le droit d’introduire une action en réparation eu égard au préjudice subi en raison de la durée excessive de la procédure engagée devant le Tribunal.

127

Selon la Commission, ce moyen doit également être écarté. Elle ajoute que la référence faite à une éventuelle action en réparation du préjudice causé par la durée excessive de la procédure devant le Tribunal confirme qu’une telle action ne relève pas du présent pourvoi.

– Appréciation de la Cour

128

Il convient de rappeler que, en l’absence de tout indice selon lequel la durée de la procédure aurait eu une incidence sur la solution du litige, le moyen tiré de ce que la procédure devant le Tribunal aurait dépassé les exigences liées au respect du délai raisonnable ne saurait, en règle générale, conduire à l’annulation de la décision rendue par ce dernier (voir, en ce sens, arrêt FIAMM e.a./Conseil et Commission, précité, point 203).

129

S’agissant des indices dont se prévalent Inalca et Cremonini, force est de constater que l’ordonnance attaquée n’est entachée d’aucune erreur de droit et que des instruments procéduraux différents n’auraient eu aucune influence sur le résultat auquel le Tribunal a abouti.

130

En tout état de cause, ainsi que l’a relevé M. l’avocat général au point 79 de ses conclusions, et tel qu’envisagé par Inalca et Cremonini elles-mêmes, le non-respect par le Tribunal d’un délai de jugement raisonnable, à supposer qu’il soit établi, peut donner lieu à une demande en indemnité par la voie d’un recours introduit contre l’Union au titre des dispositions combinées des articles 268 TFUE et 340, deuxième alinéa, TFUE.

131

Le septième et dernier moyen doit dès lors être rejeté comme non fondé.

132

Aucun des moyens invoqués par Inalca et Cremonini n’ayant été accueilli, il y a lieu de rejeter le pourvoi dans son ensemble.

Sur les dépens

133

Aux termes de l’article 184, paragraphe 2, de son règlement de procédure, lorsque le pourvoi n’est pas fondé, la Cour statue sur les dépens. Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, de ce règlement, applicable à la procédure de pourvoi en vertu des articles 184, paragraphe 1, et 190, paragraphe 1, de celui-ci, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La Commission ayant conclu à la condamnation d’Inalca et de Cremonini aux dépens et celles-ci ayant succombé en leurs moyens, il y a lieu de les condamner aux dépens afférents au pourvoi principal. Inalca et Cremonini ayant conclu à la condamnation de la Commission aux dépens du pourvoi incident et celle-ci ayant succombé en son moyen, il y a lieu de la condamner aux dépens afférents à ce pourvoi incident.

 

Par ces motifs, la Cour (première chambre) déclare et arrête:

 

1)

Le pourvoi principal et le pourvoi incident sont rejetés.

 

2)

Inalca SpA – Industria Alimentari Carni et Cremonini SpA sont condamnées aux dépens afférents au pourvoi principal.

 

3)

La Commission européenne est condamnée aux dépens afférents au pourvoi incident.

 

Signatures


( *1 ) Langue de procédure: l’italien.

Haut

Parties
Motifs de l'arrêt
Dispositif

Parties

Dans l’affaire C-460/09 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice, introduit le 18 novembre 2009,

Inalca SpA – Industria Alimentari Carni, établie à Castelvetro (Italie),

Cremonini SpA, établie à Castelvetro,

représentées par M es  C. D’Andria et F. Sciaudone, avvocati,

parties requérantes,

l’autre partie à la procédure étant:

Commission européenne, représentée par MM. V. Di Bucci et P. Rossi, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie défenderesse en première instance,

LA COUR (première chambre),

composée de M. A. Tizzano, président de chambre, MM. A. Borg Barthet, E. Levits, J-J. Kasel (rapporteur) et M. Safjan, juges,

avocat général: M. N. Jääskinen,

greffier: M me  C. Strömholm, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 9 février 2012,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 18 octobre 2012,

rend le présent

Arrêt

Motifs de l'arrêt

1. Par leur pourvoi, Inalca SpA – Industria Alimentari Carni (ci-après «Inalca») et Cremonini SpA (ci-après «Cremonini») demandent l’annulation de l’ordonnance du Tribunal de première instance des Communautés européennes du 4 septembre 2009, Inalca et Cremonini/Commission (T-174/06, ci-après l’«ordonnance attaquée»), par laquelle celui-ci a rejeté leur recours tendant à obtenir réparation du préjudice prétendument subi par elles à la suite de la communication aux autorités italiennes des conclusions les mettant en cause et résultant d’une enquête menée par l’Office européen de lutte antifraude (OLAF) afin de vérifier la légitimité de certaines restitutions à l’exportation de viande bovine à destination de la Jordanie.

Les antécédents du litige

2. Les antécédents du litige, tels qu’ils ont été exposés aux points 1 à 20 de l’ordonnance attaquée, peuvent être résumés comme suit.

3. Inalca et Cremonini font partie d’un groupe de sociétés actif dans la production et la distribution de produits à destination de la restauration ainsi que dans la restauration.

4. À la suite d’une enquête menée en Jordanie aux mois de février et de mars 1998, dans le cadre du régime des restitutions à l’exportation pour les produits agricoles, l’unité de coordination de la lutte antifraude (UCLAF), précurseur de l’OLAF, a, par lettre du 6 juillet 1998, informé les autorités italiennes que, sur un total de 37 978 tonnes de viande bovine exportées en dehors de la Communauté européenne sans aucune déclaration douanière de mise sur le marché jordanien, 2 272 tonnes provenaient d’Italie. Dans cette lettre, l’UCLAF a notamment invité les autorités italiennes à chercher le nom de l’exportateur pour engager les procédures de récupération des restitutions et, si la complicité était établie, des actions pénales.

5. Par lettres du 15 janvier 1999, l’administration italienne compétente a notifié à Inalca et à Cremonini des décisions de récupération des restitutions relatives aux exportations litigieuses, décisions contre lesquelles Inalca et Cremonini ont introduit des recours administratifs. Ces recours administratifs ont été rejetés par décisions du 7 mars 2000.

6. Le 16 février 1999, les résultats de l’enquête de l’UCLAF ont été communiqués par le ministère des Finances italien à l’autorité judiciaire et une procédure pénale a été ouverte à l’encontre des représentants légaux d’Inalca et de Cremonini.

7. Le 30 novembre 1999, Inalca et Cremonini ont constitué deux polices fidéjussoires afin d’obtenir la suspension de la procédure de recouvrement des sommes à restituer.

8. La plainte pénale a été classée le 18 décembre 2002. Par un jugement rendu le 16 janvier 2004, le Tribunale civile di Roma (tribunal civil de Rome) a constaté que les griefs formulés à l’encontre d’Inalca dans la décision de récupération du 15 janvier 1999 étaient dépourvus de fondement et que la somme dont le remboursement était réclamé n’était pas due par elle. Par un jugement rendu le 27 avril 2005, cette juridiction a fait le même constat en ce qui concerne Cremonini.

9. Par lettres datées respectivement des 22 et 23 mars 2004, la demande d’Inalca visant au retrait de la décision de récupération du 15 janvier 1999 la concernant a été accueillie et la police fidéjussoire constituée par cette société a été libérée. De même, par lettres datées respectivement des 22 et 23 décembre 2004, la demande de Cremonini visant au retrait de la décision de récupération du 15 janvier 1999 la concernant a été accueillie et la police fidéjussoire constituée par cette société a été, elle aussi, libérée.

10. Par lettre du 27 janvier 2005, Inalca a demandé à la Commission des Communautés européennes la réparation des dommages qu’elle prétend avoir subis à la suite de l’enquête ouverte par l’UCLAF et des conclusions communiquées par cette dernière aux autorités italiennes. Par lettre du 15 avril 2005, le directeur général de l’OLAF a informé Inalca qu’il ne pouvait pas donner suite à cette demande en réparation, au motif qu’un éventuel droit à indemnisation était, en tout état de cause, «prescrit, en vertu de l’article 46 du statut de la Cour de justice».

11. Par lettre du 9 mars 2006, Inalca et Cremonini ont adressé à la Commission une demande visant à obtenir la réparation des dommages subis, évalués pour un montant total de 2 861 000 euros. La Commission n’a donné aucune suite à cette demande.

12. Par décision n o  2006/678/CE, du 3 octobre 2006, relative aux conséquences financières à appliquer, dans le cadre de l’apurement des comptes des dépenses financées par le Fonds européen d’orientation et de garantie agricole (FEOGA), section «Garantie», dans certains cas d’irrégularités commises par des opérateurs (JO L 278, p. 24), la Commission a retiré de la liste des communications concernant les irrégularités celles notifiées à la République italienne et relatives aux restitutions à l’exportation de viande bovine à destination de la Jordanie.

Le recours devant le Tribunal et l’ordonnance attaquée

13. Par requête déposée au greffe du Tribunal le 27 juin 2006, Inalca et Cremonini ont introduit un recours devant le Tribunal par lequel elles demandaient la constatation de la responsabilité non contractuelle de la Communauté et la condamnation de la Commission à la réparation des dommages subis, évalués à 2 861 000 euros, ainsi qu’au paiement des intérêts compensatoires afférents et des intérêts moratoires éventuels.

14. Par acte séparé du 18 septembre 2006, la Commission a soulevé une exception d’irrecevabilité au titre de l’article 114, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, au motif que ledit recours était prescrit en vertu de l’article 46 du statut de la Cour de justice.

15. Le Tribunal a rappelé, au point 45 de l’ordonnance attaquée, la jurisprudence en vertu de laquelle il ressort de l’article 288 CE et de l’article 46 du statut de la Cour de justice que l’engagement de la responsabilité non contractuelle de la Communauté et la mise en œuvre du droit à la réparation du préjudice subi dépendent de la réunion d’un ensemble de conditions relatives à l’existence d’un acte illicite des institutions communautaires, d’un dommage réel et d’un lien de causalité entre eux (arrêt du 27 janvier 1982, Birra Wührer e.a./Conseil et Commission, 256/80, 257/80, 265/80, 267/80 et 5/81, Rec. p. 85, point 9).

16. Le Tribunal a également rappelé, au point 46 de l’ordonnance attaquée, qu’il résulte d’une jurisprudence bien établie que le délai de prescription de l’action en responsabilité non contractuelle de la Communauté commence à courir lorsque sont réunies toutes les conditions auxquelles se trouve subordonnée l’obligation de réparation, notamment lorsque le dommage à réparer s’est concrétisé [ordonnance du 18 juillet 2002, Autosalone Ispra dei Fratelli Rossi/Commission, C-136/01 P, Rec. p. I-6565, point 30, et arrêt du 19 avril 2007, Holcim (Deutschland)/Commission, C-282/05 P, Rec. p. I-2941, point 29].

17. À cet égard, le Tribunal a précisé, au point 47 de l’ordonnance attaquée, que, dans les cas où la responsabilité de la Communauté trouve sa source dans un acte normatif, le délai de prescription commence à courir lorsque les effets dommageables de cet acte se sont produits [arrêt Holcim (Deutschland)/Commission, précité, point 29]. Le Tribunal a ajouté qu’il en est de même dans les contentieux nés, comme en l’espèce, d’actes individuels, ce délai ne commençant à courir qu’à partir du moment où le préjudice s’est effectivement réalisé [arrêt Holcim (Deutschland)/Commission, précité, points 30 à 33].

18. Le Tribunal en a déduit, au point 49 de l’ordonnance attaquée, qu’il y avait lieu de déterminer le moment précis auquel les effets dommageables allégués se sont effectivement produits à l’égard d’Inalca et de Cremonini en examinant successivement les différents préjudices dont celles-ci réclamaient réparation.

19. S’agissant du préjudice matériel, le Tribunal a, tout d’abord, constaté, au point 51 de l’ordonnance attaquée, que le préjudice lié à la constitution des polices fidéjussoires auprès d’une société d’assurances s’est réalisé de manière certaine dès le 30 novembre 1999, date à laquelle Inalca et Cremonini ont conclu lesdites polices. Le Tribunal a toutefois précisé, aux points 59 et 64 de l’ordonnance attaquée, que le préjudice résultant des frais liés à la constitution des polices fidéjussoires avait un caractère continu et que le recours tendant à l’indemnisation de ce préjudice était dès lors recevable en ce qui concernait les contrats reconduits après le 27 juin 2001.

20. Ensuite, s’agissant des frais supportés pour les services d’assistance et de conseil juridiques, ainsi que les frais de personnel occasionnés par la gestion des dossiers en cause, le Tribunal a retenu, aux points 71 et 73 de l’ordonnance attaquée, que les préjudices résultant de ces frais présentaient un caractère instantané et que, par conséquent, le recours en indemnité y afférent était prescrit.

21. Enfin, dans la mesure où la demande de réparation du dommage prétendument subi sous la forme de manque à gagner en raison de la réduction des disponibilités financières consécutive au paiement des primes liées à la constitution des polices fidéjussoires et des frais d’assistance et de conseil juridiques ainsi que des frais de personnel manquait de précision, le Tribunal a jugé, au point 74 de l’ordonnance attaquée, que ladite demande devait être rejetée comme irrecevable.

22. S’agissant du préjudice moral, le Tribunal a jugé, au point 77 de l’ordonnance attaquée, que le recours y afférent était prescrit dans la mesure où le dommage allégué s’était réalisé lors de l’engagement des procédures nationales, en 1999 et en 2000, soit plus de cinq ans avant l’introduction du recours devant lui. Il a rejeté, au point 78 de l’ordonnance attaquée, l’argument d’Inalca et de Cremonini selon lequel ce préjudice aurait présenté un caractère continu jusqu’au prononcé du jugement du 27 avril 2005 et il a ajouté, au point 79 de la même ordonnance, que, en tout état de cause, Inalca et Cremonini se limitaient à invoquer une atteinte à leur réputation commerciale sans fournir la moindre indication à ce sujet.

23. Au point 81 de l’ordonnance attaquée, le Tribunal a conclu que le recours était donc uniquement recevable en ce qu’il tendait à la réparation du préjudice résultant du paiement des primes liées à la constitution des polices fidéjussoires depuis le 27 juin 2001.

24. Quant au fond, le Tribunal a précisé, au point 85 de l’ordonnance attaquée, que, dès lors qu’une des trois conditions d’engagement de la responsabilité de la Communauté n’était pas remplie, les prétentions indemnitaires devaient être rejetées, sans qu’il fût nécessaire d’examiner si les deux autres conditions étaient réunies.

25. Après avoir précisé que le juge communautaire n’était pas tenu d’examiner les différentes conditions dans un ordre déterminé, le Tribunal a estimé opportun d’examiner, en premier lieu, la condition relative à l’existence d’un lien de causalité.

26. Au point 90 de l’ordonnance attaquée, le Tribunal a constaté, sans se prononcer pour autant sur la question de l’imputabilité à la Communauté du préjudice causé par les décisions de récupération du 15 janvier 1999, que le préjudice résultant de la constitution des polices fidéjussoires n’avait pas été directement causé par la lettre de l’UCLAF du 6 juillet 1998.

27. Le Tribunal en a déduit, au point 94 de l’ordonnance attaquée, que le recours en indemnité introduit par Inalca et Cremonini, pour autant qu’il était recevable, devait être rejeté comme étant manifestement dépourvu de tout fondement en droit.

La procédure devant la Cour

28. Le 18 novembre 2009, Inalca et Cremonini ont formé un pourvoi devant la Cour.

29. Le 11 février 2010, la Commission a, dans son mémoire en réponse, présenté un pourvoi incident.

Les conclusions des parties

30. Inalca et Cremonini demandent à la Cour:

– d’annuler l’ordonnance attaquée et de renvoyer l’affaire devant le Tribunal;

– de condamner la Commission aux dépens des deux instances.

31. La Commission demande à la Cour:

– statuant sur le pourvoi incident, d’annuler l’ordonnance attaquée dans la mesure où elle déclare partiellement recevable le recours de première instance et de rejeter ce recours comme entièrement irrecevable;

– à titre subsidiaire, de rejeter le pourvoi comme dénué de fondement;

– à titre encore plus subsidiaire, en cas d’annulation partielle de l’ordonnance attaquée, de rejeter le recours introduit en première instance, et

– en tout état de cause, de condamner Inalca et Cremonini aux dépens des deux instances.

Sur les pourvois

32. Inalca et Cremonini soulèvent sept moyens à l’appui de leur pourvoi, lesquels portent essentiellement sur des questions de fond.

33. Dans le cadre de son pourvoi incident, la Commission soulève un seul moyen relatif à la recevabilité du recours initial.

34. Dès lors qu’il n’y a lieu de se prononcer sur le pourvoi principal que si le pourvoi incident formé par la Commission est rejeté, il convient, en l’espèce, d’analyser celui-ci au préalable.

Sur le pourvoi incident

Argumentation des parties

35. Le moyen unique soulevé par la Commission est tiré d’une erreur de droit prétendument commise par le Tribunal, aux points 46 et 47 de l’ordonnance attaquée, dans la détermination de la date à partir de laquelle le délai de prescription commence à courir pour les actions en dommages et intérêts.

36. À titre principal, la Commission rappelle que, dans le cas de figure où la responsabilité de la Communauté trouve sa source dans un acte normatif et où le préjudice qui en résulte se manifeste ultérieurement à l’égard des particuliers, la Cour a, par son arrêt Birra Wührer e.a./Conseil et Commission, précité, instauré un régime particulier par rapport à celui résultant de l’article 46 de son statut. Si la Commission ajoute qu’une seule autre atténuation à l’article 46 du statut de la Cour de justice a été apportée, à juste titre, pour ce qui est du calcul du délai de prescription à l’égard de la victime qui n’a pu prendre connaissance du fait générateur du dommage qu’à une date tardive (arrêt du 7 novembre 1985, Adams/Commission, 145/83, Rec. p. 3539, points 50 et 51), elle estime, toutefois, que la jurisprudence en la matière n’est pas constante et requiert une clarification dans le cadre du présent pourvoi.

37. En effet, le Tribunal, d’une part, aurait limité l’application du régime particulier instauré par l’arrêt Birra Wührer e.a./Conseil et Commission, précité, à des cas de figure où la responsabilité trouverait sa source dans un acte normatif (ordonnance du Tribunal du 17 janvier 2001, Autosalone Ispra dei Fratelli Rossi/Commission, T-124/99, Rec. p. II-53), mais, d’autre part, l’aurait étendu à d’autres cas de figure [voir arrêt du Tribunal du 21 avril 2005, Holcim (Deutschland)/Commission, T-28/03, Rec. p. II-1357, point 59, et ordonnance du Tribunal du 14 septembre 2005, Ehcon/Commission, T-140/04, Rec. p. II-3287, point 39].

38. La Cour, de son côté, aurait précisé que ledit régime particulier s’appliquait uniquement dans les cas de figure où la responsabilité trouvait sa source dans un acte normatif (arrêt du 17 juillet 2008, Commission/Cantina sociale di Dolianova e.a., C-51/05 P, Rec. p. I-5341, point 54), alors qu’elle aurait mentionné, dans d’autres affaires, en tant qu’obiter dictum, la solution adoptée dans l’arrêt Birra Wührer e.a./Conseil et Commission, précité [ordonnance du 18 juillet 2002, Autosalone Ispra dei Fratelli Rossi/Commission, précitée, points 29 et 30; arrêts du 19 avril 2007, Holcim (Deutschland)/Commission, précité, points 29 et 30, ainsi que du 11 juin 2009, Transports Schiocchet – Excursions/Commission, C-335/08 P, point 33].

39. La Commission considère que la Cour a manqué de fournir une motivation adéquate en appliquant le régime particulier aux contentieux nés d’actes individuels, voire même à d’autres cas de figure, comme, en l’espèce, lorsque le préjudice allégué trouve son origine dans une lettre adressée par l’UCLAF à des autorités nationales.

40. Selon la Commission, une telle extension de la règle jurisprudentielle risque de vider de toute sa substance la disposition pourtant claire de l’article 46 du statut de la Cour.

41. À titre subsidiaire, la Commission estime que le Tribunal a commis une erreur de droit en jugeant, au point 47 de l’ordonnance attaquée, que l’action en réparation dont il était saisi concernait un contentieux né d’actes individuels au sens de l’arrêt du 19 avril 2007, Holcim (Deutschland)/Commission, précité, alors que la lettre adressée aux autorités nationales ne constituait pas un acte individuel produisant des effets obligatoires à l’égard de son destinataire. À l’appui de cet argument, la Commission invoque l’arrêt du 23 novembre 1995, Nutral/Commission (C-476/93 P, Rec. p. I-4125, point 30), portant sur un cas de figure analogue dont il ressortirait que les lettres envoyées par la Commission aux autorités nationales compétentes ne constituaient que de simples recommandations ou avis dépourvus d’effet juridique.

42. À titre plus subsidiaire encore, la Commission estime que le Tribunal a commis une erreur de droit en modifiant arbitrairement les critères retenus dans l’arrêt du 19 avril 2007, Holcim (Deutschland)/Commission, précité. En effet, même en admettant qu’il s’agissait d’un contentieux né d’un acte individuel, le Tribunal aurait jugé à tort, aux points 46 et 47 de l’ordonnance attaquée, que le délai de prescription a commencé à courir seulement lorsque le dommage s’est effectivement concrétisé au lieu de retenir comme point de départ de la prescription la date du fait préjudiciable, voire même, le cas échéant, la date à laquelle Inalca et Cremonini ont eu connaissance de ce fait.

43. Inalca et Cremonini considèrent que la jurisprudence de la Cour en la matière est claire et contestent la lecture faite par la Commission des arrêts cités dans le cadre de son pourvoi incident. Inalca et Cremonini rappellent, toutefois, que la solution retenue par le Tribunal est critiquable pour des motifs plus amplement développés dans le cadre du premier moyen qu’elles ont soulevé dans le pourvoi principal.

Appréciation de la Cour

44. Afin de statuer sur le bien-fondé du pourvoi incident de la Commission, il y a lieu d’examiner si le Tribunal a commis une erreur de droit dans l’application des règles sur la prescription des actions en matière de responsabilité non contractuelle aux faits de l’espèce.

45. D’emblée, il convient de constater que, aux termes de l’article 46 du statut de la Cour, les actions contre l’Union européenne en matière de responsabilité non contractuelle se prescrivent par cinq ans à compter de la survenance du fait qui y donne lieu.

46. Ainsi que l’a rappelé le Tribunal aux points 45 et 84 de l’ordonnance attaquée, sans être contredit par la Commission à cet égard, l’engagement de la responsabilité non contractuelle de la Communauté et la mise en œuvre du droit à la réparation du préjudice subi, en vertu de l’article 288, deuxième alinéa, CE, dépendent de la réunion d’un ensemble de conditions afférentes à l’illégalité du comportement reproché aux institutions, à la réalité du dommage et à l’existence d’un lien de causalité entre ce comportement et le préjudice invoqué (voir, notamment, arrêts Birra Wührer e.a./Conseil et Commission, précité, point 9; du 29 septembre 1982, Oleifici Mediterranei/CEE, 26/81, Rec. p. 3057, point 16; du 9 septembre 2008, FIAMM e.a./Conseil et Commission, C-120/06 P et C-121/06 P, Rec. p. I-6513, point 106, ainsi que du 18 mars 2010, Trubowest Handel et Makarov/Conseil et Commission, C-419/08 P, Rec. p. I-2259, point 40).

47. Au point 46 de l’ordonnance attaquée, le Tribunal a relevé qu’il en résulte, selon une jurisprudence bien établie, que le délai de prescription de l’action en responsabilité non contractuelle commence à courir dès lors que les conditions auxquelles se trouve subordonnée l’obligation de réparation sont réunies et, notamment, lorsque le dommage à réparer s’est concrétisé [arrêts Birra Wührer e.a./Conseil et Commission, précité; du 19 avril 2007, Holcim (Deutschland)/Commission, précité, point 29; Commission/Cantina sociale di Dolianova e.a., précité, point 54, ainsi que du 8 novembre 2012, Evropaïki Dynamiki/Commission, C-469/11 P, point 34].

48. C’est encore en se fondant sur une jurisprudence constante de la Cour que le Tribunal a rappelé, au point 47 de l’ordonnance attaquée, que, dans les cas où la responsabilité de la Communauté trouve sa source dans un acte normatif, le délai de prescription commence à courir lorsque les effets dommageables de cet acte se sont produits [arrêts Birra Wührer e.a./Conseil et Commission, précité, point 10, ainsi que du 19 avril 2007, Holcim (Deutschland)/Commission, précité, point 29] et que, de même, dans les contentieux nés d’actes individuels, le délai de prescription ne commence à courir qu’à partir du moment où le préjudice s’est effectivement réalisé [voir arrêts précités du 19 avril 2007, Holcim (Deutschland)/Commission, point 30; Transports Schiocchet – Excursions/Commission, point 33, ainsi que Evropaïki Dynamiki/Commission, point 38].

49. C’est sur le fondement de ces principes que le Tribunal a déterminé le point de départ du délai de prescription comme étant le moment où les effets dommageables allégués par Inalca et Cremonini se sont produits.

50. À cet égard, la Commission fait valoir, à titre principal, que la jurisprudence ne serait pas uniforme et qu’une clarification de la part de la Cour serait nécessaire.

51. À supposer qu’un tel argument soit recevable dans le cadre du présent pourvoi, alors qu’il n’est pas directement dirigé à l’encontre d’un point déterminé de l’ordonnance attaquée, il suffit de constater que l’ordonnance du 17 janvier 2001, Autosalone Ispra dei Fratelli Rossi/Commission, précitée, invoquée par la Commission au soutien de son argumentation, a été censurée par la Cour. En effet, la Cour a jugé que le Tribunal avait commis une erreur de droit en déterminant le point de départ du délai de prescription en fonction de la survenance du fait à l’origine du dommage (ordonnance du 18 juillet 2002, Autosalone Ispra dei Fratelli Rossi/Commission, précitée, point 34).

52. Par conséquent, contrairement à ce qui est avancé par la Commission, le critère décisif pour déterminer le point de départ du délai de prescription n’est pas la survenance du fait à l’origine du dommage, puisque, notamment, on ne saurait opposer au requérant un point de départ de la prescription situé à une date antérieure à l’apparition des effets dommageables dudit fait (arrêt Birra Wührer e.a./Conseil et Commission, précité, point 11).

53. De surcroît, il y a lieu de relever que, en se fondant sur l’arrêt Commission/Cantina sociale di Dolianova e.a., précité, pour affirmer que le régime instauré par l’arrêt Birra Wührer e.a./Conseil et Commission, précité, ne s’applique que dans les cas de figure où la responsabilité trouve sa source dans un acte normatif, la Commission procède à une lecture erronée dudit arrêt.

54. En effet, le contentieux en cause dans cette affaire était né d’un acte normatif de la Commission et la Cour n’était donc pas dans l’obligation de poursuivre son raisonnement pour ce qui est des cas de figure afférents à la responsabilité non contractuelle dans les contentieux résultant d’un acte individuel. Contrairement à ce qui est allégué par la Commission, il ne résulte pas de l’arrêt Commission/Cantina sociale di Dolianova e.a., précité, que la Cour avait exclu l’application de la jurisprudence issue de l’arrêt Birra Wührer e.a./Conseil et Commission, précité, lorsque la responsabilité de la Communauté trouve sa source dans un acte individuel.

55. La Cour a récemment encore confirmé que, dans le cas des contentieux nés d’actes individuels, le délai de prescription commence à courir lorsque la décision a produit ses effets dommageables à l’égard des personnes qu’elle vise (voir, en ce sens, arrêt Evropaïki Dynamiki/Commission, précité, point 38).

56. S’agissant de l’argument présenté à titre subsidiaire par la Commission, fondé sur l’arrêt Nutral/Commission, précité, duquel il résulterait que la lettre adressée aux autorités nationales ne constitue pas un acte individuel produisant des effets obligatoires à l’égard d’Inalca et de Cremonini, force est de constater que cet arrêt a trait aux conditions de recevabilité des recours en annulation et que les enseignements sur la qualification juridique de l’acte attaquable ne sont pas transposables dans le contexte de la détermination du point de départ du délai de prescription d’une action en responsabilité non contractuelle.

57. Dès lors, dans le cadre de la détermination du point de départ du délai de prescription dans le présent litige, il importe peu de savoir si la lettre adressée aux autorités nationales est en mesure de produire des effets juridiques obligatoires de nature à modifier de façon caractérisée la situation d’Inalca et de Cremonini.

58. En tout état de cause, et dans la mesure où il résulte du point 49 du présent arrêt que le Tribunal n’a pas commis d’erreur de droit en considérant que le délai de prescription court à partir du moment où les effets dommageables allégués par Inalca et Cremonini se sont effectivement produits, le caractère individuel ou normatif de l’acte en cause n’est pas déterminant.

59. S’agissant de l’argument avancé par la Commission à titre plus subsidiaire encore, selon lequel le Tribunal aurait dû retenir comme point de départ de la prescription la date du fait préjudiciable, il importe de relever que le Tribunal n’a commis aucune erreur de droit en jugeant, au point 49 de l’ordonnance attaquée qu’il convenait de déterminer le moment précis auquel les effets dommageables allégués dans cette lettre se sont effectivement produits à l’égard d’Inalca et de Cremonini.

60. En effet, contrairement à ce qui est allégué par la Commission, le délai de prescription commence à courir non pas à partir de la date du fait préjudiciable, mais à partir du moment où la décision litigieuse produit ses effets dommageables à l’égard des personnes qu’elle vise, c’est-à-dire au moment où le préjudice s’est effectivement réalisé dans le chef desdites personnes [voir arrêt du 19 avril 2007, Holcim (Deutschland)/Commission, précité, point 30].

61. Il résulte de tout ce qui précède qu’il y a lieu de rejeter le pourvoi incident introduit par la Commission comme étant non fondé.

Sur le pourvoi principal

Sur le premier moyen

– Argumentation des parties

62. Le premier moyen soulevé par Inalca et Cremonini est tiré du caractère contradictoire de la motivation de l’ordonnance attaquée et d’une violation de la jurisprudence communautaire, dès lors que le Tribunal n’aurait pas tenu compte, au point 55 de l’ordonnance attaquée, de la décision n o  2006/678, alors que, jusqu’au moment de l’adoption de cette décision, la situation d’incertitude juridique dans laquelle elles se trouvaient, quant à l’existence et au montant du préjudice subi, se serait manifestée quotidiennement et ne se serait réalisée définitivement qu’au cours de l’année 2006.

63. Inalca et Cremonini font également valoir une erreur de droit dans le chef du Tribunal en ce qu’il s’est fondé, à ce même point 55 de l’ordonnance attaquée, sur l’ordonnance du 17 janvier 2001, Autosalone Ispra dei Fratelli Rossi/Commission, précitée, pour conclure à une confusion entre le critère procédural relatif au point de départ du délai de prescription et le constat de l’existence des conditions de responsabilité. Or, contrairement à l’événement retenu dans cette ordonnance pour déterminer le point de départ dudit délai, la décision n o  2006/678 n’aurait pas affecté leur seule sphère subjective.

64. La Commission, se fondant sur l’arrêt du 19 avril 2007, Holcim (Deutschland)/Commission, précité, rappelle qu’il est indifférent, pour le déclenchement du délai de prescription, que le comportement illégal de l’Union ait été constaté par une décision de justice ou ait été reconnu par le prétendu auteur du dommage.

– Appréciation de la Cour

65. Il convient de relever que, au point 53 de l’ordonnance attaquée, le Tribunal a rappelé la jurisprudence en vertu de laquelle le délai de prescription ne court qu’à partir du moment où le préjudice pécuniaire s’est effectivement réalisé, à savoir, en ce qui concerne plus particulièrement la constitution de garanties bancaires, à partir du moment où les frais liés à la constitution de telles garanties ont été générés.

66. Le Tribunal a constaté, au point 54 de cette ordonnance, qu’il ressort du dossier que les frais liés aux deux polices fidéjussoires ont été générés à partir de la date à laquelle ces contrats ont été conclus, à savoir le 30 novembre 1999, la première prime annuelle ayant été due à cette même date.

67. Ce faisant, le Tribunal a écarté l’argument présenté par Inalca et Cremonini selon lequel les effets dommageables ne se seraient produits de manière certaine qu’au moment de l’adoption de la décision n o  2006/678, par laquelle la Commission a constaté que les restitutions à l’exportation en cause ne leur avaient pas été indûment versées.

68. Le Tribunal a ajouté que la circonstance qu’Inalca et Cremonini aient estimé, avant l’adoption de la décision n o  2006/678, ne pas encore disposer de l’ensemble des éléments leur permettant de démontrer à suffisance de droit la responsabilité de la Communauté dans le cadre d’une procédure judiciaire n’est pas pertinente, sous peine de créer une confusion entre le critère procédural relatif au point de départ du délai de prescription et le constat de l’existence des conditions de fond nécessaires pour l’engagement de ladite responsabilité.

69. Il résulte de ce qui précède que l’argument d’Inalca et de Cremonini consistant à reprocher au Tribunal de ne pas avoir tenu compte de la décision n o  2006/678 doit être déclaré comme non fondé.

70. S’agissant de la prétendue dénaturation de l’ordonnance du 17 janvier 2001, Autosalone Ispra dei Fratelli Rossi/Commission, précitée, à laquelle se serait livré le Tribunal, il suffit de relever que la Cour a jugé que la connaissance précise et circonstanciée des faits par la victime ne figure pas au nombre des éléments qui doivent être réunis pour faire courir le délai de prescription (ordonnance du 18 juillet 2002, Autosalone Ispra dei Fratelli Rossi/Commission, précitée, point 31, et arrêt Evropaïki Dynamiki/Commission, précité, point 37). De même, l’appréciation subjective de la réalité du dommage par la victime de ce dommage ne saurait être prise en considération dans la détermination du point de départ du délai de prescription de l’action en responsabilité non contractuelle de l’Union (arrêts précités Commission/Cantina sociale di Dolianova e.a., point 61, ainsi que Evropaïki Dynamiki/Commission, point 37).

71. En outre, dans la mesure où il a été jugé qu’il est indifférent, pour le déclenchement du délai de prescription, que le comportement illégal de la Communauté ait été constaté par une décision de justice [arrêt du 19 avril 2007, Holcim (Deutschland)/Commission, précité, point 31], le fait qu’une institution reconnaisse elle-même avoir eu un comportement illégal ne saurait non plus avoir d’incidence sur la détermination du point de départ du délai de prescription.

72. Par conséquent, l’argument relatif à une prétendue dénaturation de l’ordonnance du 17 janvier 2001, Autosalone Ispra dei Fratelli Rossi/Commission, précitée, doit également être écarté comme non fondé.

73. Il résulte de ce qui précède que le premier moyen doit être écarté comme non fondé.

Sur le deuxième moyen

– Argumentation des parties

74. Le deuxième moyen soulevé par Inalca et Cremonini est tiré du caractère contradictoire et illogique de la motivation de l’ordonnance attaquée, de même que de la violation de la jurisprudence communautaire en ce qui concerne la prescription du recours au regard des dépenses d’assistance et de consultation juridique ainsi que des frais de personnel.

75. Inalca et Cremonini font grief au Tribunal d’avoir violé le principe général en matière de préjudice à caractère continu, énoncé aux points 56 et 57 de l’ordonnance attaquée, en retenant, aux points 71 et 72 de cette ordonnance, que les préjudices en question n’avaient pas présenté un tel caractère continu. La motivation du Tribunal serait contradictoire dans la mesure où il reconnaîtrait lui-même que les préjudices en question ne pouvaient pas être quantifiés de manière définitive dès l’engagement des procédures en question. Inalca et Cremonini se réfèrent à la jurisprudence du Tribunal en matière de taxation des dépens, laquelle déterminerait le montant de ces dépens en fonction du nombre d’heures de travail prestées et reconnaîtrait ainsi le caractère non instantané des prestations de conseil juridique.

76. Selon la Commission, le deuxième moyen est dénué de fondement. D’une part, Inalca et Cremonini confondraient la quantification définitive du montant du préjudice allégué avec l’appréciation du caractère continu de ce dernier. D’autre part, la référence faite à la jurisprudence en matière de taxation des dépens serait inappropriée.

– Appréciation de la Cour

77. S’agissant des préjudices à caractère continu, le Tribunal a rappelé, au point 56 de l’ordonnance attaquée, que, lorsque les dommages n’ont pas été causés instantanément, mais qu’ils se sont poursuivis pendant une certaine période, le droit à une indemnisation porte sur des périodes successives.

78. Au point 71 de l’ordonnance attaquée, le Tribunal a jugé que, dans le cas d’espèce, les préjudices constitués par les frais d’assistance et de conseil juridiques ainsi que par les frais de personnel occasionnés ont présenté un caractère instantané, dans la mesure où ils se sont effectivement réalisés à la date de l’engagement de chacune des procédures nationales en cause.

79. Le Tribunal a ajouté, au point 72 de l’ordonnance attaquée, que, même si les préjudices allégués ne pouvaient pas être quantifiés de manière définitive dès l’engagement des procédures nationales, ils résultaient de manière certaine de l’engagement de ces procédures.

80. Or, contrairement aux allégations d’Inalca et de Cremonini, un préjudice est considéré comme ayant un caractère continu en raison du fait que son montant augmente en proportion du nombre de jours écoulés [arrêt du 19 avril 2007, Holcim (Deutschland)/Commission, précité, point 35].

81. Par conséquent, c’est sans contradiction de motivation que le Tribunal a jugé que les préjudices allégués, constitués par les frais d’assistance et de conseil juridiques ainsi que par les frais de personnel occasionnés par la gestion des dossiers en cause, ne présentaient pas le caractère d’un préjudice continu. En effet, bien que les préjudices en question ne fussent pas encore fixés de manière définitive à la date de l’engagement de chacune des procédures nationales en cause, il y a lieu de constater que leurs montants ont augmenté non pas en proportion du nombre de jours écoulés, mais en raison des différentes instances judiciaires engagées.

82. Dans ce contexte, la référence faite par Inalca et Cremonini à la jurisprudence applicable en matière de taxation des dépens doit également être écartée. En effet, le simple fait que le montant des dépens soit déterminé en fonction du nombre d’heures prestées ne saurait avoir une incidence sur la nature du préjudice constitué par des prestations de conseil juridique.

83. Il résulte de ce qui précède que le deuxième moyen doit être écarté comme étant non fondé.

Sur le troisième moyen

– Argumentation des parties

84. Le troisième moyen soulevé par Inalca et Cremonini est tiré d’une dénaturation des arguments présentés et d’une violation de l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure du Tribunal pour ce qui est de la demande de réparation du préjudice subi sous la forme d’un manque à gagner.

85. Inalca et Cremonini estiment que c’est à tort que le Tribunal a retenu, au point 74 de l’ordonnance attaquée, un défaut de précision en ce qui concerne la demande de réparation du préjudice subi sous la forme d’un manque à gagner en raison de la réduction de leurs disponibilités financières consécutive au paiement des primes afférentes aux contrats de cautionnement et aux dépenses d’assistance et de consultation juridique ainsi que de personnel.

86. En rappelant les développements présentés dans le cadre de leur requête introductive en première instance, Inalca et Cremonini affirment qu’elles ne s’étaient pas limitées à soutenir de manière générale que les sommes perdues auraient pu être employées pour participer à des appels d’offres exigeant le versement d’une caution, mais qu’elles avaient fourni au Tribunal différents éléments de preuve. Elles s’appuient sur une jurisprudence en vertu de laquelle le juge peut se contenter d’estimations sur la base de valeurs statistiques moyennes dans la mesure où il peut être difficile, voire impossible, pour la partie requérante, de chiffrer exactement le préjudice qu’elle prétend avoir subi (arrêt du 27 janvier 2000, Mulder e.a./Conseil et Commission, C-104/89 et C-37/90, Rec. p. I-203, points 63 à 65).

87. La Commission considère que le troisième moyen est dénué de fondement. En effet, Inalca et Cremonini auraient omis de préciser de quels appels d’offres elles auraient été exclues et de quelle manière l’engagement des contrats de cautionnement aurait causé leur exclusion de ces appels d’offres. En outre, la référence faite à l’arrêt Mulder e.a./Conseil et Commission, précité, ne serait pas pertinente.

– Appréciation de la Cour

88. Il y a lieu de rappeler que le Tribunal a analysé, au point 74 de l’ordonnance attaquée, la demande de réparation du dommage prétendument subi sous la forme d’un manque à gagner en raison de la réduction des disponibilités financières consécutive au paiement des primes liées à la constitution des polices fidéjussoires et des frais d’assistance et de conseil juridiques ainsi que des frais de personnel. Étant donné qu’Inalca et Cremonini se sont limitées à soutenir de manière générale que les sommes ainsi perdues auraient pu être employées pour participer à des appels d’offres exigeant le versement d’une caution, le Tribunal a conclu au caractère abstrait de la demande et l’a rejetée comme irrecevable en vertu de l’article 44, paragraphe 1, sous c), de son règlement de procédure.

89. Dans la mesure où il ressort du présent moyen que celui-ci constitue une simple reformulation des arguments déjà présentés en première instance en relation avec le dommage prétendument subi sous la forme d’un manque à gagner, il y a lieu de constater qu’Inalca et Cremonini visent en réalité à contester l’appréciation que le Tribunal a effectuée à cet égard.

90. Or, il résulte d’une jurisprudence constante que le Tribunal est seul compétent, d’une part, pour constater les faits, sauf dans le cas où une inexactitude matérielle de ses constatations résulterait des pièces du dossier qui lui ont été soumises, et, d’autre part, pour apprécier ces faits. L’appréciation des faits ne constitue donc pas, sous réserve du cas de la dénaturation des éléments de preuve qui lui ont été soumis, une question de droit soumise, comme telle, au contrôle de la Cour (voir, notamment, arrêt du 3 mai 2012, Legris Industries/Commission, C-289/11 P, point 51 et jurisprudence citée).

91. En l’occurrence, Inalca et Cremonini ne fondent leurs allégations ni sur une inexactitude matérielle des constatations faites par le Tribunal ni sur une dénaturation des éléments de preuve qui lui ont été soumis. Au contraire, elles critiquent l’appréciation, en tant que telle, portée par le Tribunal sur lesdits éléments de preuve et les arguments avancés par ce dernier lorsqu’il a jugé que la demande de réparation du dommage allégué sous la forme d’un manque à gagner n’était pas suffisamment précise.

92. À cet égard, l’arrêt Mulder e.a./Conseil et Commission, précité, invoqué par Inalca et Cremonini n’est pas pertinent, dans la mesure où les points cités ne se réfèrent aucunement à l’obligation incombant aux requérants, conformément à l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure du Tribunal, de préciser l’étendue exacte du préjudice et de chiffrer le montant de la réparation demandée, mais ont trait aux principes devant régir le mode de calcul du manque à gagner, plus particulièrement lorsqu’il s’agit de revenus hypothétiques et de revenus alternatifs.

93. Il résulte de ce qui précède que le troisième moyen doit être rejeté comme étant partiellement irrecevable et partiellement non fondé.

Sur le cinquième moyen

– Argumentation des parties

94. Le cinquième moyen soulevé par Inalca et Cremonini, qu’il convient d’analyser au préalable, est tiré d’une violation de l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure du Tribunal, d’une violation de la jurisprudence en matière de préjudice moral et du caractère manifestement illogique de la motivation.

95. Inalca et Cremonini font valoir que c’est à tort que le Tribunal a jugé, au point 79 de l’ordonnance attaquée, que la demande de réparation du préjudice moral manquait de précision. En effet, d’une part, l’acte introductif aurait contenu tous les éléments de preuve nécessaires. D’autre part, en raison des caractéristiques du préjudice moral, lequel, par définition, est impossible à quantifier, Inalca et Cremonini s’en seraient remises à l’appréciation équitable du Tribunal. En rejetant cette demande, le Tribunal aurait violé la jurisprudence applicable en la matière (voir arrêt du Tribunal du 17 décembre 1998, Embassy Limousines & Services/Parlement, T-203/96, Rec p. II-4239, point 108).

96. En outre, le renvoi fait au point 79 de l’ordonnance attaquée à la jurisprudence citée au point 69 de cette dernière constituerait une erreur de droit supplémentaire. En effet, les principes dégagés dans ces affaires relatives à des préjudices matériels ne seraient pas transposables à la présente question, qui concerne exclusivement la réparation d’un préjudice moral.

97. La Commission rappelle que la demande en réparation du préjudice moral a été déclarée irrecevable non seulement en raison de la prescription, mais également parce qu’elle ne répondait pas aux exigences énoncées à l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure du Tribunal. Dès lors, le cinquième moyen ne serait pas fondé.

– Appréciation de la Cour

98. Il convient de relever que, s’agissant du préjudice moral sous la forme d’une atteinte portée à la réputation commerciale d’Inalca et de Cremonini du fait de leur implication dans des procédures administratives, civiles et pénales, le Tribunal a constaté, au point 77 de l’ordonnance attaquée, que ce préjudice est survenu lors de l’engagement de ces procédures au cours des années 1999 et 2000 et que, par conséquent, le recours y afférent est prescrit.

99. Ce faisant, le Tribunal a écarté l’argument d’Inalca et de Cremonini selon lequel ce préjudice aurait présenté un caractère continu jusqu’au prononcé du jugement du Tribunale civile di Roma en 2005. Il a précisé que le préjudice moral allégué, même en admettant qu’il ait perduré jusqu’à cette date, s’est entièrement réalisé dès la mise en cause d’Inalca et de Cremonini et de leurs dirigeants dans les procédures susmentionnées en 1999 et en 2000. Se référant aux caractéristiques qu’un préjudice doit revêtir pour être qualifié de «préjudice continu», telles qu’elles résultent des points 56 et 57 de l’ordonnance attaquée, le Tribunal a jugé que le préjudice moral allégué ne saurait être assimilé à un tel préjudice.

100. Le Tribunal a ajouté, au point 79 de l’ordonnance attaquée, que, «en outre, et en tout état de cause, […] la demande de réparation du préjudice moral manque de la précision nécessaire et doit en toute hypothèse être déclarée irrecevable en vertu de l’article 44, paragraphe 1, sous c), […] [de son] règlement de procédure».

101. Il découle de ce qui précède que le rejet par le Tribunal de la demande de réparation du préjudice moral allégué est fondé sur deux motifs distincts.

102. S’agissant du second motif attaqué dans le cadre du cinquième moyen, relatif au caractère abstrait de la requête, le Tribunal a rappelé, à juste titre et sans commettre de violation de la jurisprudence, que la requête doit contenir les éléments permettant d’identifier le préjudice allégué et d’en apprécier la nature et l’étendue.

103. À cet égard, l’argument d’Inalca et de Cremonini consistant à affirmer que les exigences minimales requises au niveau de la requête, conformément à l’article 44, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, ne seraient applicables que pour les préjudices matériels et ne s’appliqueraient donc pas dans l’hypothèse d’un préjudice moral doit être écarté comme dépourvu de tout fondement. En effet, cet argument n’est fondé sur aucun élément juridique de nature à remettre en cause la solution à laquelle a abouti le Tribunal.

104. En ce qui concerne l’argument d’Inalca et de Cremonini tenant à l’impossibilité de quantifier le préjudice moral, il convient de rappeler que la Cour a, certes, reconnu que, dans certains cas, notamment lorsqu’il est difficile de chiffrer le préjudice allégué, il n’est pas indispensable de préciser dans la requête son étendue exacte ni de chiffrer le montant de la réparation demandée (voir, notamment, arrêts du 28 mars 1979, Granaria/Conseil et Commission, 90/78, Rec. p. 1081, 1090, ainsi que du 23 septembre 2004, Hectors/Parlement, C-150/03 P, Rec. p. I-8691, point 62). Cependant, Inalca et Cremonini n’ont pas établi, ni même allégué, l’existence de circonstances particulières justifiant l’omission de préciser ce chef de préjudice dans la requête.

105. Il résulte de ce qui précède que le cinquième moyen doit être rejeté comme étant non fondé.

Sur le quatrième moyen

– Argumentation des parties

106. Le quatrième moyen soulevé par Inalca et Cremonini est tiré d’une violation de la jurisprudence communautaire et du caractère manifestement illogique de la motivation du Tribunal en ce que ce dernier a estimé que le préjudice moral subi par Inalca et Cremonini avait été entièrement réalisé dès 1999 et 2000 et qu’il n’était donc pas assimilable à un préjudice continu.

107. Inalca et Cremonini font valoir que le Tribunal n’accorde aucune importance aux caractéristiques particulières du préjudice moral et néglige le fait que, de par sa nature, le préjudice immatériel ne s’épuise pas à l’instant où il surgit, mais perdure jusqu’au moment où se produit l’événement réparateur. À cet égard, Inalca et Cremonini se réfèrent notamment à l’arrêt du Tribunal du 8 juillet 2008, Franchet et Byk/Commission (T-48/05, Rec. p. II-1585, points 400 à 411), ainsi qu’à l’arrêt du Tribunal de la fonction publique du 2 mai 2007, Giraudy/Commission (F-23/05, RecFP p. I-A-1-00121 et II-A-1-657, point 203).

108. Elles ajoutent que le renvoi fait au point 78 de l’ordonnance attaquée à la jurisprudence citée aux points 56 et 57 de cette dernière constitue une erreur de droit supplémentaire. En effet, les principes dégagés dans ces affaires relatives à des préjudices matériels ne seraient pas transposables à la présente question, laquelle concernerait la nature continue du dommage moral.

– Appréciation de la Cour

109. Il convient de rappeler, ainsi qu’il ressort des points 100 et 101 du présent arrêt, que le rejet par le Tribunal de la demande de réparation du préjudice moral allégué est fondé sur deux motifs distincts.

110. S’agissant des arguments relatifs au quatrième moyen, il suffit de constater qu’ils sont dirigés à l’encontre du premier motif sur lequel s’est fondé le Tribunal pour rejeter la demande de réparation du préjudice moral allégué en raison de la prescription du recours y afférent.

111. Même à supposer que ces arguments soient fondés, il convient d’emblée de les rejeter dans la mesure où ils ne sont pas susceptibles de remettre en cause la conclusion à laquelle le Tribunal a abouti au point 79 de l’ordonnance attaquée, déclarant, en vertu de l’article 44, paragraphe 1, sous c), de son règlement de procédure, la demande de réparation du préjudice moral comme irrecevable.

112. Par conséquent, le quatrième moyen doit être rejeté comme étant inopérant.

Sur le sixième moyen

– Argumentation des parties

113. Le sixième moyen soulevé par Inalca et Cremonini est tiré d’une erreur de droit concernant la condition de causalité entre le fait générateur reproché à la Commission et le préjudice allégué en ce que le Tribunal a conclu à l’absence de lien de causalité.

114. Inalca et Cremonini font valoir que le Tribunal n’a pas pris en considération qu’elles ne faisaient, en réalité, que respecter l’une des deux obligations alternatives issues des décisions de récupération du 15 janvier 1999. L’existence du lien de causalité se trouverait confirmée par la circonstance que, une fois l’inexistence des créances de la Commission constatée, les autorités nationales auraient immédiatement libéré les cautions.

115. En outre, Inalca et Cremonini réfutent l’argument incident formulé par le Tribunal au point 93 de l’ordonnance attaquée, selon lequel il ne serait pas établi que l’intervention des autorités italiennes n’était pas de nature à rompre le lien de causalité direct entre le comportement reproché et le préjudice allégué.

116. La Commission estime que ce moyen est dénué de tout fondement.

– Appréciation de la Cour

117. Il y a lieu de relever que le Tribunal a rappelé, au point 88 de l’ordonnance attaquée, que le préjudice doit découler de façon suffisamment directe du comportement reproché et constituer la cause déterminante de ce préjudice.

118. Le Tribunal a également rappelé, au point 91 de l’ordonnance attaquée, que, lorsqu’une décision imposant le paiement d’une amende est assortie de la faculté de constituer une caution destinée à garantir ledit paiement et les intérêts de retard, en attendant l’issue d’un recours formé contre cette décision, le préjudice consistant dans les frais de garantie résulte non pas de ladite décision, mais du propre choix de l’intéressé de constituer une garantie plutôt que d’exécuter immédiatement l’obligation de remboursement.

119. Le Tribunal a constaté, au point 92 de l’ordonnance attaquée, que, en l’occurrence, les décisions de récupération du 15 janvier 1999 ne contenaient aucune obligation de constituer des garanties, mais laissaient ce choix à la libre appréciation d’Inalca et de Cremonini. Il a ajouté, ainsi que l’a également soulevé M. l’avocat général au point 72 de ses conclusions, que, si Inalca et Cremonini avaient opté pour le remboursement immédiat des subventions à l’exportation, elles auraient évité d’avoir eu à payer les frais liés à la constitution desdites polices.

120. Par conséquent, au point 93 de l’ordonnance attaquée, c’est à bon droit que le Tribunal a pu déduire que, même à supposer que l’intervention des autorités italiennes n’ait pas été de nature à rompre le lien de causalité entre le comportement reproché à la Commission et le préjudice allégué, il n’existe aucun lien causal direct entre ce comportement et ledit préjudice.

121. La conclusion à laquelle est parvenu le Tribunal ne saurait être remise en cause ni par l’argument d’Inalca et de Cremonini tendant à affirmer qu’elles se limitaient à respecter l’une des deux obligations alternatives prévues par les décisions de récupération du 15 janvier 1999 ni par le fait que les cautions ont été immédiatement libérées une fois l’inexistence des créances constatée.

122. S’agissant de l’argument dirigé à l’encontre du point 93 de l’ordonnance attaquée, force est de constater que le raisonnement formulé par le Tribunal dans ce point part de la prémisse selon laquelle l’intervention des autorités italiennes n’était pas de nature à rompre le lien de causalité entre le comportement reproché à la Commission et le préjudice allégué.

123. À cet égard, il importe peu de savoir si la prémisse doit être considérée comme établie, ainsi que le suggèrent Inalca et Cremonini dans le cadre du présent moyen, ou comme non établie, ainsi qu’il a été retenu par le Tribunal. En effet, tout argument relatif à cette prémisse doit être qualifié d’inopérant dans la mesure où il convient, en tout état de cause, de conclure à l’absence de lien de causalité entre la lettre de l’UCLAF du 6 juillet 1998 et le paiement des frais afférents aux polices fidéjussoires.

124. Le sixième moyen doit donc être rejeté comme étant partiellement irrecevable et partiellement non fondé.

Sur le septième moyen

– Argumentation des parties

125. Par le septième et dernier moyen du pourvoi, Inalca et Cremonini demandent à la Cour d’annuler l’ordonnance attaquée au motif que le Tribunal a violé le principe du délai raisonnable de la procédure. En effet, non seulement la procédure de première instance aurait duré plus de trois ans, mais, surtout, le Tribunal se serait borné à statuer sur la question de la recevabilité du recours.

126. À titre principal, Inalca et Cremonini affirment que, au regard des origines factuelles et procédurales du présent pourvoi, il n’est pas nécessaire de démontrer que la durée excessive de la procédure ait eu une incidence sur la solution du litige. À titre subsidiaire, elles estiment que, tout d’abord, l’ordonnance attaquée est entachée de plusieurs erreurs de droit. Elles ajoutent ensuite que, embarrassé d’avoir mis plus de trois ans à résoudre seulement la question de la recevabilité du recours, le Tribunal se serait senti obligé de se prononcer également sur le fond du litige, se privant ainsi d’importants instruments procéduraux qui lui auraient permis de parvenir à des conclusions exemptes de toute erreur de droit. Enfin, Inalca et Cremonini se réservent le droit d’introduire une action en réparation eu égard au préjudice subi en raison de la durée excessive de la procédure engagée devant le Tribunal.

127. Selon la Commission, ce moyen doit également être écarté. Elle ajoute que la référence faite à une éventuelle action en réparation du préjudice causé par la durée excessive de la procédure devant le Tribunal confirme qu’une telle action ne relève pas du présent pourvoi.

– Appréciation de la Cour

128. Il convient de rappeler que, en l’absence de tout indice selon lequel la durée de la procédure aurait eu une incidence sur la solution du litige, le moyen tiré de ce que la procédure devant le Tribunal aurait dépassé les exigences liées au respect du délai raisonnable ne saurait, en règle générale, conduire à l’annulation de la décision rendue par ce dernier (voir, en ce sens, arrêt FIAMM e.a./Conseil et Commission, précité, point 203).

129. S’agissant des indices dont se prévalent Inalca et Cremonini, force est de constater que l’ordonnance attaquée n’est entachée d’aucune erreur de droit et que des instruments procéduraux différents n’auraient eu aucune influence sur le résultat auquel le Tribunal a abouti.

130. En tout état de cause, ainsi que l’a relevé M. l’avocat général au point 79 de ses conclusions, et tel qu’envisagé par Inalca et Cremonini elles-mêmes, le non-respect par le Tribunal d’un délai de jugement raisonnable, à supposer qu’il soit établi, peut donner lieu à une demande en indemnité par la voie d’un recours introduit contre l’Union au titre des dispositions combinées des articles 268 TFUE et 340, deuxième alinéa, TFUE.

131. Le septième et dernier moyen doit dès lors être rejeté comme non fondé.

132. Aucun des moyens invoqués par Inalca et Cremonini n’ayant été accueilli, il y a lieu de rejeter le pourvoi dans son ensemble.

Sur les dépens

133. Aux termes de l’article 184, paragraphe 2, de son règlement de procédure, lorsque le pourvoi n’est pas fondé, la Cour statue sur les dépens. Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, de ce règlement, applicable à la procédure de pourvoi en vertu des articles 184, paragraphe 1, et 190, paragraphe 1, de celui-ci, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La Commission ayant conclu à la condamnation d’Inalca et de Cremonini aux dépens et celles-ci ayant succombé en leurs moyens, il y a lieu de les condamner aux dépens afférents au pourvoi principal. Inalca et Cremonini ayant conclu à la condamnation de la Commission aux dépens du pourvoi incident et celle-ci ayant succombé en son moyen, il y a lieu de la condamner aux dépens afférents à ce pourvoi incident.

Dispositif

Par ces motifs, la Cour (première chambre) déclare et arrête:

1) Le pourvoi principal et le pourvoi incident sont rejetés.

2) Inalca SpA – Industria Alimentari Carni et Cremonini SpA sont condamnées aux dépens afférents au pourvoi principal.

3) La Commission européenne est condamnée aux dépens afférents au pourvoi incident.

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