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Document 62021CO0550

    Order of the Court (Tenth Chamber) of 21 February 2022.
    Leonardo SpA v Agenzia delle Entrate - Direzione Regionale del Lazio.
    Request for a preliminary ruling from the Commissione tributaria provinciale di Roma.
    Reference for a preliminary ruling – Article 53(2) and Article 94 of the Rules of Procedure of the Court of Justice – Common system of value added tax – Lack of sufficient information – Manifest inadmissibility.
    Case C-550/21.

    ECLI identifier: ECLI:EU:C:2022:139


    ORDONNANCE DE LA COUR (dixième chambre)

    21 février 2022 (*)

    « Renvoi préjudiciel – Article 53, paragraphe 2, et article 94 du règlement de procédure de la Cour – Système commun de taxe sur la valeur ajoutée – Absence de précisions suffisantes – Irrecevabilité manifeste »

    Dans l’affaire C‑550/21,

    ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par la Commissione tributaria provinciale di Roma (commission fiscale provinciale de Rome, Italie), par décision du 21 juillet 2021, parvenue à la Cour le 6 septembre 2021, dans la procédure

    Leonardo SpA

    contre

    Agenzia delle Entrate – Direzione regionale del Lazio,

    LA COUR (dixième chambre),

    composée de M. I. Jarukaitis, président de chambre, MM. D. Gratsias et Z. Csehi (rapporteur), juges,

    avocat général : M. J. Richard de la Tour,

    greffier : M. A. Calot Escobar,

    vu la décision prise, l’avocat général entendu, de statuer par voie d’ordonnance motivée, conformément à l’article 53, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour,

    rend la présente

    Ordonnance

    1        La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation du droit de l’Union en matière de taxe sur la valeur ajoutée (TVA).

    2        Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Leonardo SpA à l’Agenzia delle Entrate – Direzione regionale del Lazio (administration fiscale – direction régionale du Latium, Italie) (ci-après l’« administration fiscale »), au sujet du paiement des intérêts de retard liés au remboursement d’un excédent de TVA relatif à l’année 2014.

     Le cadre juridique

     Le droit de lUnion

    3        L’article 94 du règlement de procédure de la Cour dispose :

    « Outre le texte des questions posées à la Cour à titre préjudiciel, la demande de décision préjudicielle contient :

    a)      un exposé sommaire de l’objet du litige ainsi que des faits pertinents, tels qu’ils ont été constatés par la juridiction de renvoi ou, à tout le moins, un exposé des données factuelles sur lesquelles les questions sont fondées ;

    b)      la teneur des dispositions nationales susceptibles de s’appliquer en l’espèce et, le cas échéant, la jurisprudence nationale pertinente ;

    c)      l’exposé des raisons qui ont conduit la juridiction de renvoi à s’interroger sur l’interprétation ou la validité de certaines dispositions du droit de l’Union, ainsi que le lien qu’elle établit entre ces dispositions et la législation nationale applicable au litige au principal. »

     Le droit italien

    4        Le Decreto del Presidente della Repubblica n. 633 – Istituzione e disciplina dell’imposta sul valore aggiunto (décret no 633 du président de la République, instituant et régissant la taxe sur la valeur ajoutée), (supplément ordinaire à la GURI no 292, du 11 novembre 1972) (ci-après le « décret no 633/1972 ») prévoit, à son article 38 bis, paragraphe 1, certaines règles applicables aux demandes de remboursement de l’excédent de TVA.

     Le litige au principal et les questions préjudicielles

    5        Le 29 septembre 2015, le prédécesseur en droit de Leonardo a présenté, dans le cadre de la procédure de liquidation de la TVA du groupe auquel il appartient, une déclaration de TVA pour l’année 2014, par laquelle il a demandé le remboursement d’un excédent de TVA.

    6        Par un avis du 8 février 2019, l’administration fiscale a reconnu le droit au remboursement de la TVA pour le montant total de l’excédent déclaré, assorti d’intérêts de retard.

    7        Le 6 mai 2019, Leonardo a introduit un recours contre cet avis devant la Commissione tributaria provinciale di Roma (commission fiscale provinciale de Rome, Italie), visant à contester le montant des intérêts de retard qui lui avaient été accordés. Dans le cadre de ce recours, elle a invoqué, notamment, une violation du droit de l’Union et a demandé que la Cour soit saisie d’une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE.

    8        Dans ces conditions, la Commissione tributaria provinciale di Roma (commission fiscale provinciale de Rome) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

    «1)      Le droit de l’Union s’oppose-t-il à une disposition nationale, telle que l’article 38 bis, paragraphe 1, du décret no 633/1972, en vertu de laquelle, lorsque l’administration fiscale ouvre une procédure de contrôle fiscal, la date de remboursement de l’excédent de TVA peut être reportée jusqu’à l’issue du contrôle et le paiement des intérêts de retard peut être refusé, même si la durée de la procédure de contrôle fiscal est excessive et n’est pas entièrement imputable au comportement de l’assujetti ?

    2)      Le droit de l’Union s’oppose-t-il à une disposition nationale, telle que l’article 38 bis, paragraphe 1, du décret no 633/1972, en vertu de laquelle, lorsque l’administration fiscale ouvre une procédure de contrôle fiscal, la date de remboursement de l’excédent de TVA peut être reportée jusqu’à l’issue du contrôle et le paiement des intérêts de retard peut être refusé, alors que l’assujetti a, par erreur, omis de produire quelques documents parmi les nombreux documents demandés par l’administration fiscale ?

    3)      Le droit de l’Union s’oppose-t-il à une disposition nationale, telle que l’article 38 bis, paragraphe 1, du décret no 633/1972, en vertu de laquelle le cours des intérêts est suspendu pendant une période de quatre-vingt-dix jours suivant la présentation de la déclaration contenant la demande de remboursement ?

    4)      Le droit de l’Union s’oppose-t-il à une disposition nationale, telle que l’article 38 bis, paragraphe 1, du décret no 633/1972, en vertu de laquelle, lorsque l’administration fiscale demande la constitution de garanties pour procéder à un remboursement de la TVA reconnue comme étant due – au terme d’une longue instruction constituant un véritable contrôle fiscal –, elle peut suspendre le cours des intérêts, lorsque ces garanties sont présentées après le quinzième jour de la demande ?

    5)      Le droit de l’Union s’oppose-t-il à une disposition nationale en vertu de laquelle, lorsque l’administration fiscale doit calculer à nouveau les intérêts d’un remboursement de la TVA reconnue comme étant due – au terme d’une longue instruction constituant un véritable contrôle fiscal –, le contribuable, pour obtenir un tel nouveau calcul, doit d’abord restituer les montants qu’il a déjà reçus de l’administration fiscale à titre de remboursement d’un excédent de TVA et des intérêts afférents à celui-ci ? »

     Sur la recevabilité de la demande de décision préjudicielle

    9        En vertu de l’article 53, paragraphe 2, du règlement de procédure, lorsqu’une demande ou une requête est manifestement irrecevable, la Cour, l’avocat général entendu, peut à tout moment décider de statuer par voie d’ordonnance motivée, sans poursuivre la procédure.

    10      Il y a lieu de faire application de cette disposition dans la présente affaire.

    11      À cette fin, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, la procédure instituée à l’article 267 TFUE est un instrument de coopération entre la Cour et les juridictions nationales, grâce auquel la première fournit aux secondes les éléments d’interprétation du droit de l’Union qui leur sont nécessaires pour la solution des litiges qu’elles sont appelées à trancher (arrêt du 19 décembre 2013, Fish Legal et Shirley, C‑279/12, EU:C:2013:853, point 29 ainsi que jurisprudence citée).

    12      Ainsi, dès lors que la décision de renvoi constitue le fondement de la procédure suivie devant la Cour, il est indispensable que la juridiction nationale explicite, dans cette décision, le cadre factuel et réglementaire dans lequel s’inscrit le litige au principal et donne un minimum d’explications sur les raisons du choix des dispositions du droit de l’Union dont elle demande l’interprétation, ainsi que le lien qu’elle établit entre ces dispositions et la législation nationale applicable au litige qui lui est soumis [arrêt du 16 juillet 2020, Governo della Repubblica italiana (Statut des juges de paix italiens), C‑658/18, EU:C:2020:572, point 68 et jurisprudence citée]. Cette obligation doit tout particulièrement être observée dans certains domaines caractérisés par des situations de droit et de fait complexes, tels que celui de la TVA (voir, par analogie, ordonnance du 25 avril 2018, Secretaria Regional de Saúde dos Açores, C‑102/17, EU:C:2018:294, point 29 et jurisprudence citée).

    13      Ces exigences cumulatives concernant le contenu d’une demande de décision préjudicielle figurent de manière explicite à l’article 94 du règlement de procédure et sont rappelées, notamment, dans les recommandations de la Cour de justice de l’Union européenne à l’attention des juridictions nationales, relatives à l’introduction de procédures préjudicielles (JO 2019, C 380, p. 1), dont le point 15 reproduit, à chacun de ses trois tirets, les exigences énoncées, respectivement, à l’article 94, sous a) à c), du règlement de procédure. En outre, aux termes du point 16 de ces recommandations, « la juridiction de renvoi doit fournir les références précises des dispositions nationales applicables aux faits du litige au principal ainsi que des dispositions du droit de l’Union dont l’interprétation est sollicitée ou la validité mise en cause ».

    14      Il convient également de rappeler que les informations contenues dans les décisions de renvoi servent non seulement à permettre à la Cour de fournir des réponses utiles, mais également à donner aux gouvernements des États membres ainsi qu’aux autres intéressés la possibilité de présenter des observations conformément à l’article 23 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne. Il incombe à la Cour de veiller à ce que cette possibilité soit sauvegardée, compte tenu du fait que, en vertu de cette disposition, seules les décisions de renvoi sont notifiées aux intéressés, accompagnées d’une traduction dans la langue officielle de chaque État membre, à l’exclusion du dossier national éventuellement transmis à la Cour par la juridiction de renvoi (arrêt du 27 novembre 2012, Pringle, C‑370/12, EU:C:2012:756, point 85).

    15      En l’occurrence, la décision de renvoi ne répond manifestement pas à aux exigences rappelées aux points 12 à 14 de la présente ordonnance.

    16      En premier lieu, s’agissant de l’exigence énoncée à l’article 94, sous a), du règlement de procédure, il y a lieu de constater que la juridiction de renvoi n’expose que très succinctement l’objet du litige, en se bornant à fournir une description générale des faits. Ainsi, cette juridiction n’expose pas avec un niveau de clarté et de précision suffisant l’ensemble des faits pertinents, ni même les données factuelles sur lesquelles ses questions sont fondées.

    17      En deuxième lieu, en ce qui concerne l’exigence figurant à l’article 94, sous b), du règlement de procédure, il convient de relever que la juridiction de renvoi ne mentionne qu’une disposition de droit national, à savoir l’article 38 bis, paragraphe 1, du décret no 633/1972, sans en fournir, contrairement à ce qu’exige cet article 94, sous b), la teneur. Elle n’en indique pas davantage les références ni les intitulés précis, et n’apporte pas les éléments nécessaires à la compréhension de l’ensemble de la réglementation nationale pertinente susceptible de s’appliquer au litige au principal (voir, par analogie, ordonnance du 30 juin 2020, Airbnb Ireland et Airbnb Payments UK, C‑723/19, non publiée, EU:C:2020:509, point 23 ainsi que jurisprudence citée).

    18      En troisième lieu, quant à l’exigence mentionnée audit article 94, sous c), la juridiction de renvoi ne spécifie pas les dispositions du droit de l’Union sur l’interprétation desquelles elle s’interroge. Elle se limite à interroger la Cour, de manière générale, sur la conformité dudit article 38 bis, paragraphe 1, avec le « droit de l’Union », sans viser aucune disposition ou aucun principe spécifique de ce dernier.

    19      Or, cette absence d’identification, avec un minimum de précisions, des dispositions du droit de l’Union dont l’interprétation est sollicitée fait obstacle non seulement à l’énoncé, par la juridiction de renvoi, des raisons qui l’ont conduite à poser les questions préjudicielles, mais également à l’établissement d’un lien entre ces dispositions et les dispositions nationales applicables au litige au principal, lesquelles, ainsi qu’il a été constaté au point 17 de la présente ordonnance, ne font pas non plus l’objet de références précises (voir, par analogie, ordonnance du 30 juin 2020, Airbnb Ireland et Airbnb Payments UK, C‑723/19, non publiée, EU:C:2020:509, point 31 ainsi que jurisprudence citée).

    20      Eu égard aux considérations qui précèdent, il y a lieu de constater, en application de l’article 53, paragraphe 2, du règlement de procédure, que la présente demande de décision préjudicielle est manifestement irrecevable.

    21      Cela étant, la juridiction de renvoi conserve la faculté de soumettre à la Cour une nouvelle demande de décision préjudicielle comprenant l’ensemble des éléments permettant à la Cour de donner des réponses utiles aux questions posées.

     Sur les dépens

    22      La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens.

    Par ces motifs, la Cour (dixième chambre) ordonne :

    La demande de décision préjudicielle introduite par la Commissione tributaria provinciale di Roma (commission fiscale provinciale de Rome, Italie), par décision du 21 juillet 2021, est manifestement irrecevable.

    Signatures


    *      Langue de procédure : l’italien.

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