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Document 62013CO0459

Διάταξη του Δικαστηρίου (ένατο τμήμα) της 17ης Ιουλίου 2014.
Milica Široká κατά Úrad verejného zdravotníctva Slovenskej republiky.
Αίτηση για την έκδοση προδικαστικής αποφάσεως: Najvyšší súd Slovenskej republiky - Σλοβακία.
Υπόθεση C-459/13.

ECLI identifier: ECLI:EU:C:2014:2120

ORDONNANCE DE LA COUR (neuvième chambre)

17 juillet 2014 (*)

«Renvoi préjudiciel – Protection de la santé publique – Réglementation nationale prévoyant une obligation de vacciner les enfants mineurs – Droit pour les parents de refuser cette vaccination – Article 168 TFUE –Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne – Articles 33 et 35 – Mise en œuvre du droit de l’Union – Absence – Incompétence manifeste de la Cour»

Dans l’affaire C‑459/13,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Najvyšší súd Slovenskej republiky (Slovaquie), par décision du 6 août 2013, parvenue à la Cour le 19 août 2013, dans la procédure

Milica Široká

contre

Úrad verejného zdravotníctva Slovenskej republiky,

LA COUR (neuvième chambre),

composée de M. M. Safjan (rapporteur), président de chambre, Mmes A. Prechal et K. Jürimäe, juges,

avocat général: M. N. Jääskinen,

greffier: M. A. Calot Escobar,

considérant les observations présentées:

–        pour Mme Široká, par Me K. Bystrická, advokátka,

–        pour le gouvernement slovaque, par Mme B. Ricziová, en qualité d’agent,

–        pour le gouvernement tchèque, par MM. M. Smolek et J. Vláčil, en qualité d’agents,

–        pour le gouvernement allemand, par MM. T. Henze et J. Möller, en qualité d’agents,

–        pour le gouvernement français, par MM. G. de Bergues, D. Colas et S. Menez, en qualité d’agents,

–        pour le gouvernement hongrois, par M. M. Z. Fehér, Mmes K. Szíjjártó et M. M. Tátrai, en qualité d’agents,

–        pour le gouvernement polonais, par M. B. Majczyna, en qualité d’agent,

–        pour la Commission européenne, par MM. H. Krämer et A. Tokár, en qualité d’agents,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de statuer par voie d’ordonnance motivée, conformément à l’article 53, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour,

rend la présente

Ordonnance

1        La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 168 TFUE, de l’article 33 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la «Charte»), lu en combinaison avec l’article 6, paragraphe 3, TUE, ainsi que de l’article 35 de la Charte.

2        Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Mme Široká à l’Úrad verejného zdravotníctva Slovenskej republiky (office pour la santé publique de la République slovaque) au sujet du refus de celle-ci de respecter l’obligation prévue par la réglementation nationale de faire vacciner son enfant mineur contre certaines maladies.

 Le cadre juridique

3        L’article 51, paragraphes 1, sous d), et 3, de la loi n° 355/2007, relative à la protection, à la promotion et à l’amélioration de la santé publique ainsi qu’à la modification de certaines lois (Zákon č. 355/2007 Z.z. o ochrane, podpore a rozvoji verejného zdravia a o zmene a doplnení niektorých zákonov), du 21 juin 2007, dans sa version applicable au litige au principal, énonce:

«1.      Les personnes physiques sont tenues:

[...]

d)      de se soumettre, dans le contexte de la prévention des maladies transmissibles, à des examens médicaux et tests diagnostiques sans risque pour la santé, à l’administration préventive d’anticorps et d’autres préparations, à la vaccination obligatoire, au traitement des maladies transmissibles, à l’isolement et à la quarantaine.

[...]

3.      Dans le cas d’un enfant mineur, la responsabilité de l’exécution des obligations visées aux paragraphes 1 et 2 incombe à son représentant.»

4        L’article 56, paragraphes 1 et 2, de cette loi dispose:

«1.      Une personne commet une infraction aux règles de santé publique:

[...]

k)      si, en sa qualité de représentant d’un enfant, elle ne veille pas à l’exécution d’une des obligations visées à l’article 51, paragraphes 1 et 2.

2.      [...] Le fait de ne pas se soumettre à la vaccination obligatoire est passible d’une amende d’un montant total de 331 euros.»

5        L’article 5, paragraphe 3, de l’arrêté n° 585/2008 du ministère de la Santé de la République slovaque, qui fixe les modalités relatives à la prévention et au contrôle des maladies transmissibles (Vyhláška Ministerstva zdravotníctva Slovenskej republiky č. 585/2008 Z. z. o ktorou sa ustanovujú podrobnosti o prevencii a kontrole prenosných ochorení), du 10 décembre 2008, dans sa version applicable au litige au principal, est libellé comme suit:

«Les modalités relatives aux procédures de vaccination s’agissant de la vaccination obligatoire régulière des personnes qui ont atteint un certain âge et de la vaccination obligatoire et recommandée des personnes qui sont exposées à un risque accru de contracter certaines maladies transmissibles sont déterminées à l’annexe n° 2.»

6        L’annexe n° 2, partie A, point 1, sous b), de cet arrêté prévoit:

«À l’âge de 6 ans, un rappel de vaccination est effectué contre la diphtérie, le tétanos, la coqueluche et la poliomyélite; à l’âge de 13 ans, un rappel de vaccination est effectué contre la diphtérie, le tétanos, la coqueluche et la poliomyélite au moyen d’un vaccin comportant un niveau réduit d’antigènes.»

 Le litige au principal et les questions préjudicielles

7        Mme Široká est la mère d’un enfant né au cours de l’année 2005.

8        Alors que la réglementation nationale prévoit un rappel de vaccination obligatoire, à l’âge de 6 ans, contre la diphtérie, le tétanos, la coqueluche et la poliomyélite, Mme Široká et le père de cet enfant, en tant que représentants légaux de celui-ci, ont, pendant la période allant du mois de juin 2010 au mois de juin 2011, refusé de le soumettre à cette vaccination.

9        Mme Široká a invoqué plusieurs arguments pour justifier cette décision. Premièrement, elle a fait valoir que la convention pour la protection des droits de l’homme et de la dignité de l’être humain à l’égard des applications de la biologie et de la médecine, à savoir la convention sur les droits de l’homme et la biomédecine, conclue à Oviedo le 4 avril 1997, permet à toute personne de refuser la vaccination. Deuxièmement, elle a relevé que, en Slovaquie, l’obligation de vaccination est prévue non pas par la loi elle-même, mais par un acte réglementaire. Troisièmement, Mme Široká a soutenu que l’efficacité de la vaccination en cause n’avait pas été suffisamment démontrée et que celle-ci entraînerait de nombreux effets indésirables pour son enfant, lequel n’était pas susceptible de représenter une menace pour la santé publique du seul fait qu’il n’était pas vacciné. Quatrièmement, elle a souligné que, par sa décision de refus de cette vaccination, elle faisait valoir les droits fondamentaux dont elle bénéficie en tant que mère.

10      Le Regionálny úrad verejného zdravotníctva (office régional pour la santé publique) et l’Úrad verejného zdravotníctva Slovenskej republiky, respectivement en tant qu’autorités administratives de premier et de second degré, ont considéré que Mme Široká avait commis une infraction administrative en refusant de faire vacciner son enfant. Une amende de 100 euros lui a été infligée en conséquence.

11      Mme Široká a introduit un recours contre la décision de l’Úrad verejného zdravotníctva Slovenskej republiky devant le Krajský súd v Nitre (cour régionale de Nitra), qui l’a rejeté par un jugement du 20 mars 2013. Cette juridiction a considéré que Mme Široká avait l’obligation légale d’assurer la vaccination de son enfant et que, en l’occurrence, elle avait commis une infraction. Le Krajský súd v Nitre a également relevé que les autorités administratives lui avaient infligé une amende proportionnée.

12      Mme Široká a interjeté appel de ce jugement devant le Najvyšší súd Slovenskej republiky (Cour suprême de la République slovaque). Selon la juridiction de renvoi, la question de la vaccination obligatoire ou facultative des enfants mineurs, en tant que moyen de prévention des maladies humaines, doit être traitée avant tout au regard du droit de l’Union.

13      Dans ces conditions, le Najvyšší súd Slovenskej republiky a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:

«1)      L’article 35 de la [Charte] doit-il être interprété dans le sens de la tradition juridique européenne selon laquelle tout titulaire du droit conféré par cet article peut choisir d’accéder ou non à la prévention en matière de santé et bénéficier de soins médicaux, indépendamment des conditions requises par les lois ou les procédures nationales, ou en ce sens que l’intérêt public à ce que soit assuré un niveau élevé de protection de la santé des citoyens européens ne permet pas à un particulier d’effectuer un tel choix?

2)      L’article 168 [TFUE], et notamment ses paragraphes 1 et 4, sous c), doit-il être interprété en ce sens que l’objectif poursuivi par l’Union consistant notamment en la prévention des maladies et affections humaines et des causes de danger pour la santé physique et mentale ne permet pas à un citoyen européen de refuser une vaccination dite obligatoire, dès lors que, ce faisant, il représenterait une menace pour la santé publique?

3)      La responsabilité des parents – au sens de l’article 33 de la [Charte], lu conjointement avec l’article 6, paragraphe 3, [TUE], qui concerne notamment le principe d’harmonisation des traditions constitutionnelles communes – qui prodiguent des soins de manière autonome à leurs enfants mineurs l’emporte-t-elle sur l’intérêt public que constitue la protection de la santé?»

 Sur la compétence de la Cour

14      En vertu de l’article 53, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour, lorsqu’elle est manifestement incompétente pour connaître d’une affaire, la Cour, l’avocat général entendu, peut à tout moment décider de statuer par voie d’ordonnance motivée, sans poursuivre la procédure.

15      Il y a lieu de faire application de ladite disposition dans la présente affaire.

16      Selon une jurisprudence constante de la Cour, dans le cadre d’un renvoi préjudiciel au titre de l’article 267 TFUE, la Cour peut uniquement interpréter le droit de l’Union dans les limites des compétences qui lui sont attribuées (voir arrêt McB., C‑400/10 PPU, EU:C:2010:582, point 51; ordonnance Sociedade Agrícola e Imobiliária da Quinta de S. Paio, C‑258/13, EU:C:2013:810, point 16, ainsi que arrêt Torralbo Marcos, C‑265/13, EU:C:2014:187, point 27).

17      En l’occurrence, il ressort de la décision de renvoi que la procédure au principal concerne une réglementation nationale prévoyant l’obligation pour les parents de faire vacciner leurs enfants mineurs contre certaines maladies.

18      Par sa deuxième question, qu’il convient d’examiner en premier lieu, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 168, paragraphes 1 et 4, sous c), TFUE doit être interprété en ce sens qu’il ne permet pas à un citoyen de l’Union de refuser une vaccination rendue obligatoire par une réglementation nationale dans un but de protection de la santé publique.

19      À cet égard, il y a lieu de relever d’emblée que l’article 168 TFUE, qui a trait à la compétence de l’Union dans le domaine de la santé publique, n’édicte, à la charge des États membres, aucune obligation relative à la vaccination des enfants mineurs qui pourrait être invoquée pour faire examiner la conformité de mesures nationales avec le droit de l’Union (voir, en ce sens, arrêt Sbarigia, C‑393/08, EU:C:2010:388, point 37, et ordonnance Grisoli, C‑315/08, EU:C:2011:618, point16).

20      Or, la Cour a exclu sa compétence lorsqu’il est manifeste que la disposition du droit de l’Union soumise à l’interprétation de la Cour ne peut trouver à s’appliquer (arrêts Reisdorf, C‑85/95, EU:C:1996:466, point 16; Woningstichting Sint Servatius, C‑567/07, EU:C:2009:593, point 43, et Impacto Azul, C‑186/12, EU:C:2013:412, point 18). Tel est le cas en l’espèce en ce qui concerne l’article 168 TFUE.

21      Il s’ensuit que la Cour n’est manifestement pas compétente pour répondre à la deuxième question posée par la juridiction de renvoi.

22      Quant aux première et troisième questions posées par la juridiction de renvoi, elles portent respectivement sur l’interprétation des articles 35 et 33 de la Charte, ce dernier lu en combinaison avec l’article 6, paragraphe 3, TUE.

23      À cet égard, il convient de rappeler que le champ d’application de la Charte, pour ce qui est de l’action des États membres, est défini à l’article 51, paragraphe 1, de celle-ci, aux termes duquel les dispositions de la Charte s’adressent aux États membres uniquement lorsqu’ils mettent en œuvre le droit de l’Union (arrêt Åkerberg Fransson, C‑617/10, EU:C:2013:105, point 17, ainsi que ordonnance Sociedade Agrícola e Imobiliária da Quinta de S. Paio, EU:C:2013:810, point 18).

24      Lorsqu’une situation juridique ne relève pas du champ d’application du droit de l’Union, la Cour n’est pas compétente pour en connaître et les dispositions éventuellement invoquées de la Charte ne sauraient, à elles seules, fonder cette compétence (voir arrêt Åkerberg Fransson, EU:C:2013:105, point 22, ainsi que ordonnance Sociedade Agrícola e Imobiliária da Quinta de S. Paio, EU:C:2013:810, point 20).

25      Or, en l’occurrence, force est de constater que la décision de renvoi ne contient aucun élément concret permettant de considérer que l’objet de la procédure au principal, relatif à la vaccination des enfants mineurs contre certaines maladies, concerne l’interprétation ou l’application d’une règle du droit de l’Union autre que celles figurant dans la Charte, avec la conséquence que le litige au principal ne relève pas d’une situation dans laquelle le droit de l’Union est mis en œuvre, au sens de l’article 51, paragraphe 1, de la Charte.

26      Dans ces conditions, la Cour est également manifestement incompétente pour répondre aux première et troisième questions posées par la juridiction de renvoi.

27      Il résulte de tout ce qui précède que la Cour est manifestement incompétente pour répondre aux questions posées par le Najvyšší súd Slovenskej republiky.

 Sur les dépens

28      La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

Par ces motifs, la Cour (neuvième chambre) ordonne:

La Cour de justice de l’Union européenne est manifestement incompétente pour répondre aux questions posées par le Najvyšší súd Slovenskej republiky (Slovaquie), par décision du 6 août 2013 dans l’affaire C‑459/13.

Signatures


* Langue de procédure: le slovaque.

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