Ce document est extrait du site web EUR-Lex
Document 62009FJ0014
Judgment of the Civil Service Tribunal (Third Chamber) of 15 December 2010. # Ana Maria Almeida Campos and Others v Council of the European Union. # Public service - Officials - Promotion. # Case F-14/09.
Arrêt du Tribunal de la fonction publique (troisième chambre) du 15 décembre 2010.
Ana Maria Almeida Campos et autres contre Conseil de l’Union européenne.
Fonction publique - Fonctionnaires - Promotion - Exercice de promotion 2008 - Examen comparatif des mérites entre administrateurs affectés à des emplois de linguiste et administrateurs affectés à des emplois généralistes.
Affaire F-14/09.
Arrêt du Tribunal de la fonction publique (troisième chambre) du 15 décembre 2010.
Ana Maria Almeida Campos et autres contre Conseil de l’Union européenne.
Fonction publique - Fonctionnaires - Promotion - Exercice de promotion 2008 - Examen comparatif des mérites entre administrateurs affectés à des emplois de linguiste et administrateurs affectés à des emplois généralistes.
Affaire F-14/09.
Recueil – Recueil de la fonction publique
Identifiant ECLI: ECLI:EU:F:2010:167
ARRÊT DU TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
DE L’UNION EUROPÉENNE (troisième chambre)
15 décembre 2010 (*)
« Fonction publique — Fonctionnaires — Promotion — Exercice de promotion 2008 — Examen comparatif des mérites entre administrateurs affectés à des emplois de linguiste et administrateurs affectés à des emplois généralistes »
Dans l’affaire F-14/09,
ayant pour objet un recours introduit au titre des articles 236 CE et 152 EA,
Ana Maria Almeida Campos, fonctionnaire du Conseil de l’Union européenne, demeurant à Bruxelles (Belgique),
Roberta Dariol, fonctionnaire du Conseil de l’Union européenne, demeurant à Overijse (Belgique),
Stella Morello, fonctionnaire du Conseil de l’Union européenne, demeurant à Bruxelles (Belgique),
Kathleen Verstreken, fonctionnaire du Conseil de l’Union européenne, demeurant à Bruxelles (Belgique),
représentées par Mes S. Orlandi, A. Coolen, J.-N. Louis et É. Marchal, avocats,
parties requérantes,
contre
Conseil de l’Union européenne, représenté par M. M. Bauer et Mme G. Kimberley, en qualité d’agents,
partie défenderesse,
LE TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
(troisième chambre),
composé de MM. P. Mahoney, président, H. Kreppel (rapporteur) et S. Van Raepenbusch, juges,
greffier : M. R. Schiano, administrateur,
vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 4 mars 2010,
rend le présent
Arrêt
1 Par requête parvenue au greffe du Tribunal le 20 février 2009 par télécopie (le dépôt de l’original étant intervenu le 26 février suivant), les requérantes demandent l’annulation, d’une part, des décisions par lesquelles le Conseil de l’Union européenne a refusé de les inscrire sur la liste des fonctionnaires promus au grade AD 12 au titre de l’exercice de promotion 2008, d’autre part, des décisions de promotion au grade AD 12 des fonctionnaires du groupe de fonctions AD affectés à des fonctions autres que linguistiques.
Cadre juridique
2 L’article 43 du statut des fonctionnaires de l’Union européenne (ci-après le « statut ») prévoit, notamment, que la compétence, le rendement et la conduite dans le service de chaque fonctionnaire font l’objet d’un rapport périodique établi au moins tous les deux ans, dans les conditions fixées par chaque institution.
3 L’article 45, paragraphe 1, du statut dispose :
« La promotion est attribuée par décision de l’autorité investie du pouvoir de nomination […]. Elle entraîne pour le fonctionnaire la nomination au grade supérieur du groupe de fonctions auquel il appartient. Elle se fait exclusivement au choix, parmi les fonctionnaires justifiant d’un minimum de deux ans d’ancienneté dans leur grade, après examen comparatif des mérites des fonctionnaires ayant vocation à la promotion. Aux fins de l’examen comparatif des mérites, l’autorité investie du pouvoir de nomination prend en considération, en particulier, les rapports dont les fonctionnaires ont fait l’objet, l’utilisation dans l’exercice de leurs fonctions des langues autres que la langue dont ils ont justifié posséder une connaissance approfondie […] et, le cas échéant, le niveau des responsabilités exercées. »
4 Le 29 février 2008, le secrétaire général du Conseil a adopté la communication au personnel no 39/2008, relative à l’exercice de promotion 2008.
5 L’annexe 1 de la communication no 39/2008 était ainsi libellée :
« 1. La promotion des fonctionnaires en place avant le 1er mai 2004 est régie par le statut ainsi que par certaines règles transitoires figurant à l’annexe XIII du statut. Ces règles permettent notamment aux institutions de maintenir certaines modalités en vigueur avant le 1er mai 2004.
[…]
2. Le statut modifié introduit un système de taux de promotion destiné à donner une meilleure prévisibilité des perspectives de carrière, en établissant un rapport quantitatif fixe entre le nombre de fonctionnaires d’un grade et le nombre de possibilités de promotion vers le grade supérieur. En attendant que les taux prévus à l’annexe I, [titre] B, du statut soient définitifs, des dispositions transitoires supplémentaires sont d’application, avec des conséquences concrètes pour le présent exercice de promotion.
3. Dans le cadre de l’exercice budgétaire 2008, le nombre de possibilités de promotion pour les différentes catégories et grades a été déterminé sur la base du nombre de fonctionnaires en place au 1er janvier 2007 et en appliquant :
– pour la promotion vers les grades AD 13, AD 14 et AST 11, les taux explicitement prévus à l’article 9 de l’annexe XIII du statut ;
– pour les fonctionnaires des anciennes catégories C et D qui étaient en fonction avant le 1er mai 2004 et qui ne font pas partie du groupe de fonctions des assistants sans restriction de carrière, les taux prévus à l’article 10 de l’annexe XIII du statut ;
– pour les autres grades, les taux fondés sur la moyenne historique et les taux prévus à l’annexe I, [titre] B, du statut.
[…]
4. Dès l’entrée en vigueur du nouveau statut, l’ancien cadre L/A et la catégorie A ont été fusionnés dans un groupe de fonctions AD unique. Cependant, le cadre réglementaire pour le travail des commissions consultatives de promotion reste inchangé. À titre transitoire, l’[autorité investie du pouvoir de nomination] a pris la décision de maintenir deux commissions consultatives de promotion distinctes et deux listes distinctes de promouvables selon la fonction exercée par les fonctionnaires AD concernés.
[…]
5. Par conséquent, figurent sur la liste de promouvables ‘AD linguistes’ les noms des fonctionnaires AD officiellement affectés, à la date du 1er janvier 2008, à la [direction générale] A III — Service [l]inguistique — Unités de traduction, ou à la [d]irection ‘Qualité de la législation’ du [s]ervice juridique, y compris ceux qui, à cette date, étaient temporairement mis à la disposition d’un autre service. Les autres fonctionnaires AD figurent sur la liste ‘AD administrateurs’.
[…] »
6 L’annexe 2 de la communication no 39/2008 indiquait le nombre d’emplois à pourvoir pour chaque grade et précisait, en particulier, que 22 postes seraient ouverts à la promotion au grade AD 12 pour les fonctionnaires de grade AD 11 affectés à des fonctions linguistiques, tandis que 15 postes seraient ouverts à la promotion au même grade pour les fonctionnaires de grade AD 11 affectés à d’autres fonctions.
7 Enfin, à l’annexe 3 de la communication au personnel no 39/2008 était exposée la liste, par grade et par ordre d’ancienneté, des fonctionnaires ayant l’ancienneté requise pour bénéficier d’une promotion. Les requérantes figuraient sur la liste des 154 fonctionnaires du grade AD 11 affectés à des fonctions linguistiques promouvables au grade AD 12.
Faits à l’origine du litige
8 Le 19 juillet 2006, le secrétaire général adjoint du Conseil a envoyé aux directeurs généraux une note intitulée « Formation et mobilité des linguistes et des secrétaires » (ci-après la « note du 19 juillet 2006 »), qui contenait le passage suivant :
« Faisant suite aux décisions prises, dans le cadre de l’élargissement, sur la réduction de documents à traduire, le [secrétariat général] s’est retrouvé avec une situation de surcapacité dans certaines unités de traduction. La Cour des Comptes [des Communautés européennes] a demandé l’adoption de mesures pour remédier à cette situation et le [secrétariat général] lui a confirmé son intention de mettre en place une série de mesures appropriées pour accélérer son assainissement.
Dans ce contexte, l’[a]dministration met l’accent sur la polyvalence et la mobilité des linguistes. Elle travaille ainsi sur un plan d’action pour encourager, faciliter et accompagner la mobilité, sur base volontaire, des linguistes de huit des unités EU-15 (DA, DE, EL, ES, FI, IT, NL et PT). Ce plan d’action vise à faciliter la transition professionnelle de l’activité de traduction vers d’autres domaines d’activité du [secrétariat général] et à stimuler des linguistes dans les unités en situation de surcapacité à trouver d’autres postes.
Trois conditions sont indispensables pour la mise en œuvre de cette initiative ponctuelle :
i. une action d’information/sensibilisation des unités linguistiques concernées en vue de les encourager à postuler dans d’autres services ;
ii. un plan de formation, établi par le biais d’un groupe de travail mixte, visant à aider les linguistes à acquérir des connaissances techniques et procédurales propres à un emploi type d’administrateur généraliste ;
iii. la disponibilité des autres [directions générales] pour accueillir les linguistes intéressés par la mobilité. »
9 Dans le cadre du plan de formation visé par la note du 19 juillet 2006, les requérantes, alors fonctionnaires de grade AD 11 et affectées à des fonctions linguistiques, ont suivi un programme de formation destiné à leur faire acquérir les compétences requises pour l’exercice d’un emploi d’administrateur généraliste.
10 Par note du 17 janvier 2007, le directeur de la direction « Ressources humaines », au sein de la direction générale (DG) « Personnel et administration » du secrétariat général, a informé les linguistes de huit unités de la direction « Traduction et production des documents » de la DG « Personnel et administration » que douze emplois d’administrateur, correspondant aux grades AD 9 à AD 13, étaient vacants au Centre de situation conjoint de l’Union européenne (ci-après le « SitCent »), service rattaché au secrétaire général du Conseil.
11 Les requérantes ont soumis leur candidature pour occuper ces emplois et celles-ci ont été retenues. Les intéressées ont donc été affectées temporairement au SitCent, à compter du 1er mai 2007 pour Mmes Almeida Campos, Dariol et Morello, et du 1er juillet 2007 pour Mme Verstreken.
12 Par la suite, les intéressées ont été nommées définitivement au SitCent à compter du 1er février 2008 (Mmes Almeida Campos, Dariol et Morello) et du 1er avril 2008 (Mme Verstreken).
13 Dans le cadre de l’exercice de promotion 2008, la commission consultative de promotion chargée de formuler des propositions de promotion pour les fonctionnaires affectés à des fonctions autres que linguistiques a soumis à l’autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après l’« AIPN ») une liste de quinze fonctionnaires lui paraissant susceptibles d’être promus au grade AD 12 au titre de l’exercice de promotion 2008. Cette liste a été publiée dans la communication au personnel no 72/08 du 21 avril 2008.
14 Quant à la commission consultative de promotion chargée de formuler des propositions de promotion pour les fonctionnaires affectés à des fonctions linguistiques, celle-ci a soumis à l’AIPN une liste de 22 fonctionnaires lui paraissant susceptibles d’être promus au grade AD 12 au titre de l’exercice de promotion 2008. Les noms des requérantes ne figuraient pas sur cette liste, qui a été publiée dans la communication au personnel no 74/08 du 23 avril 2008.
15 L’AIPN a décidé de faire suite aux propositions formulées par l’une et l’autre de ces commissions consultatives et, par des décisions du 19 mai 2008, de promouvoir au grade AD 12, avec effet au 1er janvier 2008, les fonctionnaires figurant sur les listes publiées dans les communications au personnel nos 72/08 et 74/08.
16 Par des notes datées des 22 mai, 8, 9, et 22 juillet 2008, les requérantes ont, chacune, introduit, sur la base de l’article 90, paragraphe 2, du statut, une réclamation contre, d’une part, les décisions de l’AIPN de ne pas les promouvoir (ci-après les « décisions de non-promotion »), d’autre part, les décisions de l’AIPN ayant promu les fonctionnaires affectés à des fonctions linguistiques et dont les noms figuraient sur la communication au personnel no 74/08.
17 Les réclamations ont fait l’objet d’un rejet implicite, confirmé explicitement par des notes du 13 février 2009.
Procédure et conclusions des parties
18 Le présent recours a été enregistré le 20 février 2009.
19 Les requérantes concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :
– annuler les décisions de non-promotion et, pour autant que de besoin, les décisions de promotion au grade AD 12 des fonctionnaires du groupe de fonctions AD affectés à des fonctions autres que linguistiques ;
– condamner le Conseil aux dépens.
20 Le Conseil conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– rejeter le recours ;
– condamner les requérantes aux dépens.
21 À la suite d’une demande formulée en ce sens par le Tribunal lors de l’audience, le Conseil a transmis des documents relatifs à la détermination du nombre de postes ouverts à la promotion au grade AD 12 respectivement pour les fonctionnaires affectés à des fonctions linguistiques et pour les fonctionnaires affectés à des fonctions généralistes.
En droit
Sur les conclusions tendant à l’annulation des décisions de non-promotion
22 À l’appui de leur recours, les requérantes soulèvent deux moyens, tirés, pour le premier, de la violation de l’obligation de motivation, pour le second, de la violation de l’article 45 du statut et de l’existence d’une erreur manifeste d’appréciation.
23 Il convient d’abord d’examiner le second moyen.
Arguments des parties
24 Les requérantes font valoir, entre autres arguments, que l’AIPN, en fondant son appréciation exclusivement sur l’avis émis par la commission consultative de promotion, n’aurait comparé leurs mérites qu’à ceux des fonctionnaires affectés à des fonctions linguistiques et non à ceux de l’ensemble des fonctionnaires promouvables au grade AD 12, en méconnaissance de l’article 45 du statut, du principe de la vocation à la carrière et du principe d’égalité de traitement, alors que, selon une jurisprudence constante, chaque fonctionnaire susceptible d’être promu est en droit d’attendre que ses mérites soient comparés à ceux de l’ensemble des autres fonctionnaires ayant vocation à la promotion au grade concerné (arrêt du Tribunal de première instance du 8 mai 2001, Caravelis/Parlement, T-182/99, Rec. p. II-1313, point 33).
25 En défense, le Conseil conclut d’abord à l’irrecevabilité du moyen tiré de ce que l’AIPN n’aurait comparé les mérites des requérantes qu’à ceux des administrateurs linguistes, expliquant que ce moyen n’aurait pas été soulevé dans le cadre de la procédure précontentieuse.
26 Sur le fond, le Conseil expose que la pratique de l’examen comparatif des mérites des fonctionnaires de grade AD effectué par deux commissions consultatives de promotion, l’une responsable pour les fonctionnaires affectés à des emplois d’administrateurs linguistes, l’autre responsable pour les fonctionnaires affectés à des emplois d’administrateurs, serait conforme aux dispositions statutaires et aux principes d’égalité de traitement et de bonne administration, en raison de la différence entre les tâches confiées aux uns et celles dévolues aux autres.
Appréciation du Tribunal
– Sur la recevabilité du moyen
27 Il est vrai que le second moyen de la requête, selon lequel l’AIPN n’aurait à tort comparé les mérites des requérantes qu’à ceux des fonctionnaires affectés à des fonctions linguistiques, et non, comme elle aurait dû le faire, à ceux de l’ensemble des fonctionnaires promouvables au grade AD 12, n’a pas été énoncé expressément par les requérantes dans les réclamations qu’elles ont soumises à l’administration. Toutefois, il importe de relever que, dans ces réclamations, lesquelles ont été rédigées sans l’assistance d’un avocat, les requérantes ont en substance soulevé le grief selon lequel l’AIPN n’aurait pas procédé à un examen comparatif des mérites conforme aux exigences de l’article 45 du statut. Ainsi, le second moyen doit être regardé comme se rattachant étroitement aux moyens et arguments exposés par les intéressées dans leurs réclamations respectives.
28 En tout état de cause, et ainsi que l’a jugé le Tribunal dans l’arrêt du 1er juillet 2010, Mandt/Parlement (F-45/07, points 119 et 120), la règle de concordance entre la réclamation et la requête n’est méconnue que si le recours contentieux modifie l’objet de la réclamation ou sa cause, cette dernière notion de « cause » étant à interpréter au sens large. Suivant une telle interprétation, et s’agissant des conclusions en annulation, par « cause du litige » on doit entendre la contestation par le requérant de la légalité interne de l’acte attaqué ou, alternativement, la contestation de sa légalité externe. Or, en l’espèce, dès lors que les requérantes ont, dans leurs réclamations, mis en cause la légalité interne des actes attaqués dans le cadre du présent recours, le second moyen, qui vise également à contester la légalité interne desdits actes, est recevable.
– Sur le bien-fondé du moyen
29 Il importe de rappeler à titre liminaire qu’il ressort expressément des termes de l’article 45, paragraphe 1, du statut que, dans le cadre d’une procédure de promotion, l’AIPN est tenue d’effectuer son choix sur la base d’un examen comparatif des mérites des fonctionnaires ayant vocation à la promotion (arrêt du Tribunal de première instance du 19 mars 2003, Tsarnavas/Commission, T-188/01 à T-190/01, RecFP p. I-A-95 et II-495, point 98).
30 Si, conformément à une jurisprudence bien établie, l’AIPN dispose du pouvoir statutaire de procéder à un tel examen selon la procédure ou la méthode qu’elle estime la plus appropriée (voir arrêt de la Cour du 1er juillet 1976, de Wind/Commission, 62/75, Rec. p. 1167, point 17 ; arrêt du Tribunal de première instance du 13 juillet 1995, Rasmussen/Commission, T-557/93, RecFP p. I-A-195 et II-603, point 20), un tel pouvoir est limité par la nécessité de procéder audit examen avec soin et impartialité, dans l’intérêt du service et conformément au principe d’égalité de traitement. En pratique, cet examen doit être conduit sur une base égalitaire et à partir de sources d’informations et de renseignements comparables (arrêts du Tribunal de première instance du 30 novembre 1993, Tsirimokos/Parlement, T-76/92, Rec. p. II-1281, point 21, et du 9 avril 2003, Tejada Fernández/Commission, T-134/02, RecFP p. I-A-125 et II-609, point 41).
31 Il convient également de rappeler que l’article 45, paragraphe 1, du statut, qui impose à l’AIPN d’effectuer un « examen comparatif des mérites des fonctionnaires ayant vocation à la promotion », suppose qu’un tel examen soit élargi à tous les fonctionnaires promouvables, quelles que soient les fonctions exercées. En effet, une telle exigence est l’expression à la fois du principe d’égalité de traitement des fonctionnaires et de celui de leur vocation à la carrière (arrêt Tsarnavas/Commission, précité, point 121).
32 En l’espèce, les requérantes reprochent au Conseil de n’avoir comparé leurs mérites qu’à ceux des administrateurs promouvables au grade AD 12 affectés à des fonctions linguistiques et non, comme cela aurait dû être le cas, à ceux de l’ensemble des administrateurs promouvables au grade AD 12.
33 À cet égard, il est constant que le Conseil a mis en place une procédure de promotion comprenant deux étapes successives, d’abord, une première étape consistant en un examen préalable, par deux commissions consultatives de promotion distinctes, des mérites des administrateurs affectés à des fonctions linguistiques et des administrateurs affectés à des fonctions non linguistiques, ensuite, une seconde étape fondée sur un examen comparatif, par l’AIPN, des mérites des administrateurs appartenant respectivement à l’un et à l’autre de ces deux groupes.
34 S’agissant de la première étape de la procédure de promotion, à savoir l’examen préalable par deux commissions consultatives de promotion distinctes des mérites des administrateurs affectés à des fonctions linguistiques et des administrateurs affectés à des fonctions non linguistiques, le Tribunal considère, eu égard à la spécificités des tâches dévolues aux premiers par rapport à celles confiés aux seconds, qu’un tel examen, destiné seulement à fournir à l’AIPN des éléments d’information sur le nom des fonctionnaires à promouvoir, n’était pas susceptible de faire échec à un examen comparatif bien compris des mérites des candidats et participait, au contraire, du principe de bonne administration (voir, par analogie, arrêt Rasmussen/Commission, précité, point 21).
35 En revanche, s’agissant de la seconde étape de la procédure de promotion, à savoir l’examen par l’AIPN des mérites des fonctionnaires promouvables, il importe de rappeler que le règlement (CE, Euratom) no 723/2004 du Conseil, du 22 mars 2004, modifiant le statut ainsi que le régime applicable aux autres agents de l’Union européenne (JO L 124, p. 1), a mis fin à la distinction opérée auparavant entre les emplois de nature non linguistique exercés par les fonctionnaires appartenant aux catégories A à D et les emplois de nature linguistique exercés par les fonctionnaires relevant du cadre LA, et a créé une nouvelle structure de carrière, comportant deux groupes de fonctions, à savoir le groupe de fonctions des assistants (AST), destiné à remplacer les anciennes catégories C et B, et le groupe de fonctions des administrateurs (AD), ayant vocation à remplacer l’ancienne catégorie A ainsi que le cadre linguistique LA. Ainsi, dès lors que le législateur a entendu fusionner dans un groupe de fonctions unique l’ensemble des administrateurs, qu’ils exercent des fonctions linguistiques ou d’autres fonctions, il appartenait à l’AIPN, compétente pour décider des promotions, de procéder à un examen comparatif unique des mérites pour l’ensemble des administrateurs promouvables au grade AD 12.
36 Or, en l’espèce, il ressort des pièces du dossier que l’AIPN a effectué, dans le cadre de cette seconde étape, deux examens comparatifs distincts des mérites, l’un portant sur ceux des administrateurs affectés à des fonctions linguistiques, l’autre portant sur ceux des administrateurs affectés aux autres fonctions. En témoigne le fait que, dès le début de l’exercice de promotion et avant tout examen comparatif des mérites, le Conseil a prévu, en se fondant sur la répartition proportionnelle des fonctionnaires promouvables dans chacun de ces deux groupes ainsi que sur la proportion, dans l’un et l’autre de ces groupes, des fonctionnaires promus pendant les cinq dernières années avant l’exercice concerné (2003-2007), que 22 postes seraient ouverts à la promotion au grade AD 12 pour les administrateurs affectés à des fonctions linguistiques, tandis que 15 postes seraient ouverts à la promotion au même grade pour les administrateurs affectés à d’autres fonctions.
37 Dans ces conditions, le Conseil a méconnu les dispositions de l’article 45, paragraphe 1, du statut, lequel supposait que l’examen comparatif des mérites fût conduit sur une base égalitaire, ce alors qu’il n’est pas démontré que la spécificité des tâches exercées par les uns et les autres aurait fait obstacle de manière dirimante à ce que l’AIPN procède à un examen comparatif des mérites de l’ensemble de ces administrateurs.
38 Enfin, il convient d’ajouter que la circonstance que chacune des deux catégories de fonctionnaires de grade AD 11 se soit vu réserver un nombre déterminé d’emplois à la promotion a pu faire obstacle à ce qu’un ou plusieurs administrateurs affectés à des fonctions linguistiques fussent promus alors que leurs mérites auraient été supérieurs à ceux de fonctionnaires affectés à des fonctions autres que linguistiques et ayant bénéficié d’une promotion (voir, par analogie, arrêt Tsarnavas/Commission, précité, point 122).
39 Le second moyen doit être accueilli.
40 Il s’ensuit, sans qu’il soit nécessaire d’examiner l’autre moyen de la requête, que les décisions de non-promotion doivent être annulées.
Sur les conclusions tendant à l’annulation des décisions de promotion des fonctionnaires affectés à des fonctions autres que linguistiques
41 Les requérants sollicitent, pour autant que de besoin, l’annulation des décisions de promotion au grade AD 12 des fonctionnaires affectés à des fonctions autres linguistiques et dont les noms figuraient sur la communication au personnel no 72/08.
42 Toutefois, il importe de rappeler que, en vertu de l’article 91, paragraphe 2, du statut, les recours de fonctionnaires de l’Union européenne devant le juge européen ne sont recevables que dans la mesure où l’AIPN a été préalablement saisie, dans le délai imparti, d’une réclamation au sens de l’article 90, paragraphe 2, du statut contre l’acte faisant grief et si celle-ci a fait l’objet d’un rejet explicite ou implicite.
43 Or, en l’espèce, si les requérantes, dans les réclamations qu’elles ont introduites, ont contesté, outre les décisions de non-promotion, les décisions de promotion au grade AD 12 des fonctionnaires affectés à des fonctions linguistiques et dont les noms figuraient sur la communication au personnel no 74/08, elles n’ont en revanche soulevé, dans lesdites réclamations, aucune réclamation formelle à l’encontre des décisions de promotion au grade AD 12 des fonctionnaires affectés à des fonctions autres que linguistiques et dont les noms figuraient sur la communication au personnel no 72/08.
44 Il en résulte que les conclusions susmentionnées ne peuvent qu’être rejetées comme irrecevables.
Sur les dépens
45 Aux termes de l’article 87, paragraphe 1, du règlement de procédure, sous réserve des autres dispositions du chapitre huitième du titre deuxième dudit règlement, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. En vertu du paragraphe 2 du même article, le Tribunal peut décider, lorsque l’équité l’exige, qu’une partie qui succombe n’est condamnée que partiellement aux dépens, voire qu’elle ne doit pas être condamnée à ce titre.
46 Il résulte des motifs ci-dessus énoncés que le Conseil est, pour l’essentiel, la partie qui succombe. En outre, les requérantes ont, dans leurs conclusions, expressément conclu à ce que celui-ci soit condamné aux dépens. Les circonstances de l’espèce ne justifiant pas l’application des dispositions de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, il y a donc lieu de condamner le Conseil aux dépens exposés par les requérantes.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
(troisième chambre)
déclare et arrête :
1) Les décisions par lesquelles le Conseil de l’Union européenne a refusé de promouvoir au grade AD 12 Mmes Almeida Campos, Dariol, Morello et Verstreken au titre de l’exercice de promotion 2008 sont annulées.
2) Le surplus de la requête est rejeté.
3) Le Conseil de l’Union européenne supporte l’ensemble des dépens.
Mahoney |
Kreppel |
Van Raepenbusch |
Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 15 décembre 2010.
Le greffier |
Le président |
W. Hakenberg |
P. Mahoney |
* Langue de procédure : le français.