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Document 62010FJ0047
Judgment of the Civil Service Tribunal (Third Chamber) of 14 September 2011. # André Hecq v European Commission. # Public service - Officials - Social security. # Case F-47/10.
Urteil des Gerichts für den öffentlichen Dienst (Dritte Kammer) vom 14. September 2011.
André Hecq gegen Europäische Kommission.
Öffentlicher Dienst - Beamte - Soziale Sicherheit.
Rechtssache F-47/10.
Urteil des Gerichts für den öffentlichen Dienst (Dritte Kammer) vom 14. September 2011.
André Hecq gegen Europäische Kommission.
Öffentlicher Dienst - Beamte - Soziale Sicherheit.
Rechtssache F-47/10.
Court reports – Reports of Staff Cases
ECLI identifier: ECLI:EU:F:2011:137
ARRÊT DU TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
DE L’UNION EUROPÉENNE (troisième chambre)
14 septembre 2011 (*)
« Fonction publique – Fonctionnaires – Sécurité sociale – Maladie professionnelle – Articles 73 et 78 du statut – Régularité de l’avis de la commission médicale – Refus de reconnaissance de l’invalidité permanente partielle »
Dans l’affaire F-47/10,
ayant pour objet un recours introduit au titre de l’article 270 TFUE, applicable au traité CEEA en vertu de son article 106 bis,
André Hecq, fonctionnaire de la Commission européenne, demeurant à Chaumont-Gistoux (Belgique), représenté par Me L. Vogel, avocat,
partie requérante,
contre
Commission européenne, représentée par MM. J. Currall et D. Martin, en qualité d’agents, assistés de Me J.-L. Fagnart, avocat,
partie défenderesse,
LE TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
(troisième chambre),
composé de M. P. Mahoney (rapporteur), président, Mmes I. Boruta et M. I. Rofes i Pujol, juges,
greffier : M. J. Tomac, administrateur,
vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 18 mai 2011,
rend le présent
Arrêt
1 Par requête parvenue au greffe du Tribunal le 18 juin 2010, M. Hecq demande, en substance, l’annulation de la décision du 7 septembre 2009 par laquelle l’autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après l’« AIPN ») a rejeté sa demande tendant à la reconnaissance d’un taux d’invalidité permanente partielle en raison de sa maladie professionnelle.
Cadre juridique
Statut
2 L’article 73 du statut des fonctionnaires de l’Union européenne (ci-après le « statut ») prévoit :
« 1. Dans les conditions fixées par une réglementation établie d’un commun accord des institutions [de l’Union européenne], après avis du comité du statut, le fonctionnaire est couvert, dès le jour de son entrée en service, contre les risques de maladie professionnelle et les risques d’accident. […]
2. Les prestations garanties sont les suivantes :
a) […]
b) en cas d’invalidité permanente totale :
paiement à l’intéressé d’un capital égal à huit fois son traitement de base annuel calculé sur la base des traitements mensuels alloués pour les douze mois précédant l’accident ;
c) en cas d’invalidité permanente partielle :
paiement à l’intéressé d’une partie de l’indemnité prévue [sous] b), calculée sur la base du barème fixé par la réglementation prévue au paragraphe 1.
[…]
Les prestations énumérées ci-dessus peuvent être cumulées avec celles qui sont prévues au chapitre 3 [du statut].
[...] »
Réglementation de couverture prise en application de l’article 73 du statut
Champ d’application
3 Le 13 décembre 2005, les institutions de l’Union européenne ont arrêté une réglementation commune relative à la couverture des risques d’accident et de maladie professionnelle des fonctionnaires de l’Union, laquelle est entrée en vigueur le 1er janvier 2006 (ci-après la « nouvelle réglementation de couverture »). Jusqu’à cette date était applicable la réglementation commune relative à la couverture des risques d’accident et de maladie professionnelle des fonctionnaires de l’Union, modifiée en dernier lieu le 18 juillet 1997 (ci-après la « réglementation de couverture »).
4 L’article 30 de la nouvelle réglementation de couverture prévoit les dispositions transitoires suivantes :
« La réglementation [de couverture] est abrogée.
Toutefois, elle demeure applicable pour tout projet de décision adopté en vertu de l’article 20, paragraphe 1, avant le 1er janvier 2006 […] »
5 Dans le présent litige, le projet de décision visé par l’article 30 de la nouvelle réglementation de couverture a été adopté le 18 mai 2004, c’est-à-dire avant le 1er janvier 2006. En conséquence, en vertu des dispositions précitées dudit article 30, la réglementation de couverture demeurait applicable à ce projet de décision.
Prestations
6 L’article 12, paragraphe 2, de la réglementation de couverture énonce que, en cas d’invalidité permanente partielle du fonctionnaire résultant d’un accident ou d’une maladie professionnelle, le capital déterminé en fonction des taux prévus au barème d’invalidité figurant en annexe à ladite réglementation (ci-après le « barème ») lui est versé.
Dispositions procédurales
7 L’article 19 de la réglementation de couverture dispose que les décisions relatives à la reconnaissance de l’origine professionnelle de la maladie ainsi qu’à la fixation du degré d’invalidité permanente sont prises par l’AIPN suivant la procédure prévue à l’article 21, à savoir sur la base des conclusions émises par le ou les médecins désignés par les institutions et, si le fonctionnaire le demande, après consultation de la commission médicale prévue à l’article 23 de ladite réglementation.
8 L’article 21 de la réglementation de couverture énonce que, avant de prendre une décision en vertu de l’article 19, l’AIPN notifie au fonctionnaire le projet de décision, accompagné des conclusions du ou des médecins désignés par l’institution. Le fonctionnaire peut, dans un délai de 60 jours, demander que la commission médicale prévue à l’article 23 donne son avis.
9 Selon l’article 22 de la réglementation de couverture, l’aggravation des lésions ou de l’invalidité peut faire l’objet d’une déclaration du fonctionnaire accompagnée d’un rapport médical, la procédure applicable étant alors celle prévue pour une demande initiale de reconnaissance d’une maladie professionnelle.
10 En vertu de l’article 23, paragraphe 1, de la réglementation de couverture, la commission médicale est composée de trois médecins désignés, le premier, par l’AIPN, le deuxième, par le fonctionnaire et le troisième, d’un commun accord par les deux médecins ainsi désignés (ci-après le « troisième médecin »). Au terme de ses travaux, la commission médicale consigne ses conclusions dans un rapport adressé à l’AIPN et au fonctionnaire.
11 Aux termes de l’article 23, paragraphe 2, de la réglementation de couverture :
« Les frais des travaux de la commission médicale sont supportés par l’institution dont relève le fonctionnaire.
[...]
Lorsque l’avis de la commission médicale est conforme au projet de décision de l’[AIPN] notifié au fonctionnaire ou à ses ayants droit en vertu de l’article 21, ceux-ci doivent supporter les honoraires et frais accessoires du médecin qu’ils ont choisi et la moitié des honoraires et frais accessoires du troisième médecin, le solde étant à la charge de l’institution, sauf lorsqu’il s’agit d’un accident survenu dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice des fonctions ou sur le chemin du travail.
Toutefois, dans des cas exceptionnels et par décision de l’[AIPN] prise après avis du médecin désigné par celle-ci, tous les frais visés aux alinéas précédents peuvent être pris à charge par l’institution. »
Faits à l’origine du litige
12 Le requérant a été recruté par la Commission européenne en 1967, en qualité de technicien chauffagiste. Affecté aux services techniques de la Commission, il a notamment travaillé à l’achèvement, à l’aménagement et à l’entretien du bâtiment dénommé « Berlaymont » situé à Bruxelles (Belgique). À cette occasion, il a été particulièrement exposé au risque de contamination due à l’amiante. En 1997, dans le cadre d’examens médicaux organisés par la Commission pour son personnel, une « fibro-hialinose pleurale d’origine asbestique », c’est-à-dire provoquée par l’inhalation de poussières d’amiante, a été diagnostiquée chez le requérant.
13 Par décision du 23 juin 1998, la Commission a reconnu l’origine professionnelle des lésions pleurales caractéristiques d’une exposition à l’amiante présentées par le requérant, mais a considéré, conformément à l’avis du médecin-conseil de l’institution, que ces lésions « ne p[ouvai]ent [alors] donner lieu à la reconnaissance d’un taux d’invalidité permanente partielle, […] celles-ci n’[ayant] aucune incidence invalidante sur la fonction respiratoire ».
14 Par une note du 29 avril 2003, le requérant a sollicité la révision de son dossier, en application de l’article 22 de la réglementation de couverture, afin de se voir reconnaître un taux d’invalidité permanente au sens de l’article 73 du statut. Au soutien de sa demande, le requérant a communiqué un rapport de son médecin traitant faisant apparaître un « déficit de diffusion CO significatif », ainsi qu’une anxiété grandissante face au risque de développement d’affections pulmonaires.
15 Entre-temps, la Commission avait constitué, sur la base de l’article 78 du statut, une commission d’invalidité chargée d’apprécier l’aptitude du requérant à poursuivre ses activités professionnelles. Dans son avis du 24 juin 2003, cette commission a estimé que le requérant était atteint d’une invalidité permanente considérée comme totale le mettant dans l’impossibilité d’exercer des fonctions correspondant à un emploi de sa carrière au sens de l’article 78 du statut. La commission d’invalidité a également relevé que cette invalidité résultait d’une maladie professionnelle et que, en raison du « caractère fixe » de la pathologie du requérant, aucun examen médical de révision ne serait nécessaire.
16 Par décision du 10 juillet 2003, l’AIPN a mis le requérant à la retraite, en lui allouant une pension d’invalidité fixée conformément à l’article 78, deuxième alinéa, du statut, dans sa version alors en vigueur.
17 La demande du requérant du 29 avril 2003 tendant à la fixation d’un taux d’invalidité permanente en application de l’article 73 du statut a fait l’objet d’un projet de décision de rejet daté du 18 mai 2004. Dans ce projet, la Commission considérait que les lésions du requérant ne pouvaient toujours pas donner lieu à la reconnaissance d’une quelconque invalidité permanente.
18 Le requérant a contesté le projet de décision du 18 mai 2004 par lettre du 7 juillet 2004 et demandé, en application de l’article 21 de la réglementation de couverture, la consultation de la commission médicale prévue à l’article 23 de ladite réglementation. Le requérant estimait notamment que la commission médicale, en refusant de reconnaître un taux d’invalidité permanente aux fins de l’article 73 du statut, contredisait l’appréciation de la commission d’invalidité, qui s’était prononcée dans le cadre de la procédure prévue par l’article 78 dudit statut.
19 La commission médicale a établi son rapport le 9 mai 2006. À la lumière de ce rapport, l’AIPN a, par décision du 15 décembre 2006, confirmé le projet de décision du 18 mai 2004.
20 Le 19 mars 2007, le requérant a formé une réclamation contre la décision du 15 décembre 2006. Dans cette réclamation, il a notamment soutenu, d’abord, que ladite décision n’était pas cohérente par rapport à celle de mise à la retraite pour invalidité du 10 juillet 2003, la Commission ne pouvant à la fois refuser de lui reconnaître un taux d’invalidité permanente et estimer qu’il n’était plus en mesure d’assumer normalement ses fonctions. Ensuite, il a fait valoir que la commission médicale avait négligé les aspects psychologiques de sa maladie professionnelle.
21 Par décision du 12 juillet 2007, l’AIPN a accueilli partiellement la réclamation du requérant, considérant que la commission médicale n’avait pas suffisamment motivé les conclusions auxquelles elle était arrivée, en particulier en ce qui concerne l’aspect psychologique des troubles invoqués par l’intéressé. À la suite de cette décision, l’AIPN a saisi la commission médicale d’un mandat complémentaire demandant à celle-ci de prendre position notamment sur l’existence des affections psychologiques dont se plaignait le requérant et sur leur lien avec sa maladie professionnelle.
22 La commission médicale, composée du médecin désigné par l’AIPN, du médecin désigné par le requérant et du troisième médecin, s’est réunie le 5 décembre 2008, en présence du requérant. Lors de cette séance, le médecin désigné par le requérant a soumis à la commission médicale une note datée du 30 octobre 2008 établie par un médecin psychiatre consulté par le requérant le 6 octobre précédent.
23 À la suite de la séance de la commission médicale du 5 décembre 2008, le troisième médecin a, en sa qualité de président de la commission médicale, établi un projet de rapport au nom de la commission médicale qu’il a soumis au médecin désigné par l’AIPN. Ce dernier lui a envoyé ses commentaires au début du mois de mars 2009. Le troisième médecin, toujours en sa qualité de président de la commission médicale, a alors établi le rapport de la commission médicale, et l’ayant signé, l’a transmis pour signature au médecin désigné par l’AIPN. Ce dernier l’a signé et l’a ensuite transmis pour signature, le 2 avril 2009, au médecin désigné par le requérant.
24 Le rapport établi au nom de la commission médicale ainsi transmis au médecin désigné par le requérant indique que la clôture des travaux de la commission médicale a été précédée d’une « longue discussion ». Ce rapport conclut « qu’il n’y a pas d’aggravation de la maladie professionnelle reconnue ou d’autres nouvelles maladies d’origine professionnelle ».
25 Le rapport établi au nom de la commission médicale relève, en premier lieu, reprenant sur ce point les conclusions d’un spécialiste consulté par cette commission à plusieurs reprises que, « si l’intéressé présente effectivement des traces d’exposition à l’asbeste avec présence de plaques pleurales, celles-ci n’ont aucune incidence sur [s]a fonction pulmonaire ».
26 S’agissant, en second lieu, des troubles psychologiques avancés par le requérant, il est rédigé dans les termes suivants, dans sa partie consacrée à l’« existence » des affections dont le requérant se déclare atteint :
« En ce qui concerne la pathologie dépressive dont se revendique [le requérant], les membres de la [c]ommission médicale ne peuvent que constater que cette pathologie n’a jamais justifié le moindre traitement psychiatrique.
Par ailleurs, ils ne peuvent évidemment que constater que ce diagnostic ne peut bien entendu reposer que sur les déclarations [du requérant] lui même.
Ils doivent rappeler à cet égard que les déclarations de l’intéressé à propos de ses problèmes pulmonaires vont totalement à l’encontre des constatations précises objectives et scientifiques qui ont pu être réalisées.
Les examens psychologiques et psychiatriques ne peuvent évidemment se targuer de ce critère d’objectivité étant donné qu’il repose uniquement sur les déclarations et la participation de l’intéressé.
Au vu de l’ensemble des pièces qui leur ont été communiquées, au vu également de l’entretien qu’ils ont eu avec l’intéressé, les membres de la commission médicale sont d’avis que les troubles psychologiques avancés par l’intéressé sont uniquement en relation avec une frustration liée à la non-reconnaissance de ce qu’il considère comme une importante invalidité alors que les éléments objectifs du dossier montrent à suffisance que l’intéressé ne présente aucune invalidité ».
27 Dans une note datée du 18 juin 2009 rédigée à l’intention du médecin désigné par l’AIPN, le médecin désigné par le requérant a fait valoir que la note du 30 octobre 2008, établie par le psychiatre consulté par le requérant le 6 octobre précédent, n’aurait pas été prise en considération par la commission médicale dans son appréciation, ladite note ayant été « écartée » par les deux membres majoritaires de cette commission comme étant un « certificat de complaisance ». Le médecin désigné par le requérant demandait ensuite que, puisque ce « rapport » n’avait pas été pris en compte, un expert indépendant examine le requérant.
28 Dans une note datée du 19 juin 2009, adressée au troisième médecin et au médecin désigné par l’AIPN, le médecin psychiatre consulté par le requérant a fait part de son étonnement au sujet des conclusions émises par la commission médicale. Cette note était notamment rédigée dans les termes suivants :
« Pour rappel, un examen clinique psychiatrique ne s’établit pas sur la seule base du discours du patient, mais principalement sur la cohérence de ce discours, les attitudes non verbales du patient, les modalités d’expression de ses affects et la concordance de son discours avec ces mêmes affects.
Lorsque la souffrance est feinte ou simulée, ce qui se détecte aisément avec l’expérience clinique, les diagnostics de trouble factice et de simulation sont prévus à cet effet.
Il ne me semble pas les avoir mentionnés dans mon rapport. Ce que je n’aurais manqué de faire si tel avait été le cas.
La souffrance psychique [du requérant] et son invalidité fonctionnelle m’apparaît bien réelle.
S’il est vrai que ce patient s’est présenté à une seule reprise en date du 6 octobre 2008, et ce, en[tre] autre[s], dans le but de produire un rapport psychiatrique, ce seul élément par ailleurs non scientifique, ne suffit pas me semble-t-il à invalider un diagnostic.
[…]
En conclusion, je me permets à nouveau d’insister sur le fait qu’il me paraît indéniable que l’exposition [du requérant] à l’amiante et les conséquences potentielles et réelles de cette exposition ont altéré de manière significative et prépondérante l’équilibre psychique de ce patient ainsi que son fonctionnement social. »
29 Le rapport de la commission médicale, tel qu’il avait été transmis au médecin désigné par le requérant le 2 avril 2009, a été signé par ledit médecin, qui l’a transmis au troisième médecin en sa qualité de président de la commission médicale, lequel l’a renvoyé à l’AIPN, ledit rapport étant parvenu à cette dernière le 13 juillet 2009.
30 Le 10 septembre 2009, le chef du secteur « Assurance accident et maladie professionnelle » de l’Office « Gestion et liquidation des droits individuels » (PMO) a envoyé au requérant un courrier électronique l’informant, premièrement, que, « avant de valider le rapport de la commission médicale », elle avait demandé au troisième médecin, en sa qualité de président de la commission médicale, pour quelles raisons « la commission n’a[vait] pas jugé nécessaire de demander l’avis d’un expert psychiatre indépendant », et, deuxièmement, que celui-ci lui avait répondu, le 5 août 2009, que « les membres de la commission médicale disposaient de suffisamment d’informations sans devoir recourir à l’avis [...] d’un expert psychiatre ».
31 Par une première décision du 7 septembre 2009, l’AIPN, sur la base du rapport de la commission médicale qu’elle avait reçu le 13 juillet 2009, a confirmé le projet de décision du 18 mai 2004 et mis à la charge du requérant la totalité des honoraires et frais accessoires du médecin le représentant au sein de la commission médicale ainsi que la moitié des honoraires et frais accessoires du troisième médecin. Par une autre décision du même jour, l’AIPN a précisé au requérant que les honoraires et frais accessoires du troisième médecin, s’élevant à la somme de 1 000 euros, seraient directement payés par l’institution, puis qu’un montant s’élevant à la moitié de ceux-ci, à savoir un montant de 500 euros, serait prélevé sur sa pension.
32 Par décision du 25 septembre 2009, faisant suite à un courrier électronique du requérant du 15 septembre 2009, l’AIPN a accepté de mettre à la charge du requérant seulement 40 % des frais et honoraires du médecin qu’il avait désigné et 40 % des frais et honoraires du troisième médecin, dans la mesure où les frais et honoraires de ces médecins postérieurs à la décision du 12 juillet 2007 faisant droit à la réclamation du 19 mars 2007 (voir point 21 supra) pouvaient être considérés comme étant imputables à l’institution.
33 Par courrier du 7 décembre 2009, l’AIPN a consenti à prendre en charge la totalité des frais et honoraires du médecin désigné par le requérant.
34 Le 9 décembre 2009, le requérant a formé une réclamation contre les décisions du 7 septembre 2009.
35 La réclamation du requérant a été rejetée par décision de l’AIPN du 5 mars 2010.
Procédure et conclusions des parties
36 Le 18 octobre 2010, le greffe du Tribunal a envoyé au requérant un courrier lui indiquant que, dans la mesure où la décision à intervenir était susceptible de faire mention de données personnelles à caractère médical le concernant, le Tribunal envisageait de lui octroyer d’office l’anonymat. Le requérant a néanmoins répondu au Tribunal, par courrier du 8 novembre 2010, qu’il ne souhaitait pas bénéficier de l’anonymat.
37 Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– « annuler la décision adoptée par l’AIPN le 5 mars 2010 (et notifiée par courrier électronique du 8 mars 2010), par laquelle a été rejetée la réclamation […], en date du 9 décembre 2009, contre deux décisions administratives datées du 7 septembre 2009 qui respectivement refusaient de [lui] reconnaître […], de manière définitive, une quelconque invalidité, dans le cadre de l’article 73 du [s]tatut, et qui par ailleurs [lui] imposaient […] de supporter la moitié des frais et honoraires du médecin qui avait présidé la commission médicale, à concurrence d’un montant de 500 [euros] (ultérieurement ramené à 300 [euros]), et de supporter également la totalité (puis dans un deuxième temps, une quotité de 60 %) des frais et honoraires du médecin qui l’avait représenté dans le cadre des travaux de ladite commission médicale ;
– annuler également lesdites décisions datées du 7 septembre 2009 ;
– condamner la partie défenderesse aux dépens de l’instance, par application de l’article 87 du règlement de procédure, ainsi qu’aux frais indispensables exposés aux fins de la procédure et, notamment, les frais de domiciliation, de déplacement et de séjour, ainsi que les honoraires d’avocats par application de l’article 91 [sous] b) du même règlement. »
38 La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– « déclarer non recevable et à tout le moins non fondée la demande introduite par la requête déposée par le requérant le 18 juin 2010 ;
– condamner le requérant aux dépens. »
En droit
39 À titre liminaire, il convient de relever que, outre l’annulation des deux décisions de l’AIPN du 7 septembre 2009, le requérant sollicite, en tant que de besoin, l’annulation de la décision de rejet de la réclamation dirigée contre lesdites décisions.
40 Or, il convient de constater, au vu de la jurisprudence (arrêt de la Cour du 17 janvier 1989, Vainker/Parlement, 293/87, point 8 ; arrêt du Tribunal de première instance du 10 juin 2004, Liakoura/Conseil, T-330/03, point 13) et de la portée de la décision de rejet de la réclamation, laquelle ne fait que confirmer en substance les deux décisions de l’AIPN du 7 septembre 2009, que les conclusions en annulation de la décision de rejet de la réclamation sont, comme telles, dépourvues de contenu autonome et se confondent en réalité avec les conclusions en annulation des deux décisions de l’AIPN du 7 septembre 2009.
41 Il y a lieu, dès lors, de considérer que les conclusions en annulation sont dirigées uniquement contre les deux décisions de l’AIPN du 7 septembre 2009.
Sur les conclusions tendant à l’annulation des décisions du 7 septembre 2009, en tant qu’elles refusent de reconnaître au requérant un taux d’invalidité permanente au sens de l’article 73 du statut
42 Le requérant soulève dans sa requête formellement trois moyens dans lesquels il dénonce la violation par l’AIPN ou la commission médicale de multiples principes ou règles de droit.
43 Les griefs suivants peuvent être dégagés de cette argumentation :
– les travaux de la commission médicale auraient été entachés d’une violation du principe de collégialité ;
– la commission médicale aurait failli à ses devoirs d’indépendance et d’impartialité ;
– la commission médicale se serait fondée sur une notion erronée de la notion d’invalidité au sens de l’article 73 du statut ;
– le rapport de la commission médicale serait insuffisamment motivé ;
– les membres de la commission médicale n’auraient pas disposé de spécialisation en psychiatrie et aucun examen complémentaire n’aurait été demandé auprès d’un médecin psychiatre.
Remarques liminaires
44 Selon une jurisprudence constante, les appréciations médicales proprement dites formulées par la commission médicale doivent être considérées comme définitives lorsqu’elles ont été émises dans des conditions régulières. Le juge est uniquement habilité à vérifier, d’une part, si ladite commission a été constituée et a fonctionné régulièrement et, d’autre part, si son avis est régulier, notamment s’il contient une motivation permettant d’apprécier les considérations sur lesquelles il est fondé et s’il établit un lien compréhensible entre les constatations médicales qu’il comporte et les conclusions auxquelles il parvient (arrêt du Tribunal du 14 septembre 2010, AE/Commission, F-79/09, point 64, et la jurisprudence citée).
45 Ainsi, eu égard au contrôle juridictionnel limité qu’il revient au Tribunal d’exercer, une critique tirée de l’erreur manifeste d’appréciation dont serait entaché l’avis de la commission médicale ne saurait prospérer (arrêts du Tribunal AE/Commission, précité, point 89, et du 11 mai 2011, J/Commission, F-53/09, point 104).
46 Dans de telles conditions, un contrôle juridictionnel rigoureux de la procédure suivie par la commission médicale apparaît comme une garantie importante des droits de l’assuré.
47 Si les garanties procédurales de l’assuré devant la commission médicale doivent être contrôlées strictement par le juge, il n’en demeure pas moins que ce contrôle doit avoir égard à la nature même des travaux de la commission médicale, lesquels, selon la jurisprudence, ne visent pas à trancher un débat contradictoire, mais à établir des constatations médicales (arrêt de la Cour du 19 janvier 1988, Biedermann/Cour des comptes, 2/87, point 16).
48 C’est à la lumière des principes qui viennent d’être rappelés qu’il convient d’examiner les griefs du requérant.
Sur le grief tiré de la violation du principe de collégialité
– Arguments des parties
49 Le requérant estime que le rapport de la commission médicale n’aurait en réalité été l’œuvre que de deux des trois médecins composant ladite commission, à savoir le médecin désigné par l’AIPN et le troisième médecin. En effet, après une unique réunion de la commission médicale, le 5 décembre 2008, le médecin qu’il avait désigné n’aurait plus reçu aucune communication de la part des deux autres médecins jusqu’à la transmission, le 2 avril 2009, d’un rapport, établi au nom de la commission médicale, déjà signé par ces derniers et auquel plus aucune modification n’aurait pu être apportée. Le médecin qu’il avait désigné n’aurait alors eu d’autre possibilité que de rédiger une note dissidente, à laquelle les deux autres membres de la commission médicale n’auraient même pas répondu.
50 La Commission objecte, en se référant à l’article 22, paragraphe 3, de la nouvelle réglementation de couverture, que « collégialité » dans l’examen par la commission médicale des documents disponibles et susceptibles de lui être utiles dans ses appréciations ne signifierait pas « unanimité » dans l’adoption de ses décisions.
– Appréciation du Tribunal
51 L’article 22, paragraphe 3, de la nouvelle réglementation de couverture, invoqué par la Commission, n’est pas directement applicable en l’espèce. En effet, dans le présent litige, le projet de décision visé par l’article 30 de la nouvelle réglementation de couverture ayant été adopté le 18 mai 2004, c’est-à-dire avant le 1er janvier 2006, la réglementation de couverture demeurait applicable à ce projet de décision, en vertu de l’article 30 de la nouvelle réglementation de couverture (voir point 5 supra).
52 Il n’existe aucune disposition expresse relative au principe de collégialité dans la réglementation de couverture. Ce principe, qui implique que chacun des membres de la commission médicale doit avoir l’occasion de faire valoir utilement son point de vue devant les autres membres, a néanmoins été consacré par la jurisprudence comme étant le corollaire de la sauvegarde des intérêts du fonctionnaire, au sein de la commission médicale, par la présence d’un médecin ayant sa confiance ainsi que par la désignation d’un troisième médecin d’un commun accord par les deux membres nommés par chaque partie (voir arrêt du Tribunal de première instance du 15 novembre 2000, Camacho-Fernandes/Commission, T-20/00, point 31).
53 C’est ainsi qu’il a été jugé que lorsque deux des trois membres de la commission médicale se réunissent en l’absence du médecin désigné par le fonctionnaire afin de débattre, pour la première fois, de l’origine de la maladie de l’intéressé, et que ceux-ci rédigent leur rapport final à ce sujet avant même d’avoir reçu communication du rapport exposant le point de vue de ce médecin, le principe de collégialité est méconnu, et l’avis de la commission médicale entaché d’un vice de procédure (voir arrêts du Tribunal de première instance Camacho-Fernandes/Commission, précité, points 31 à 35, et du 27 février 2003, Commission/Camacho-Fernandes, T-20/00-OP, points 47 à 52).
54 Par ailleurs, le statut, en prévoyant une commission médicale composée de trois membres, implique qu’en cas de désaccord entre ses membres, celle-ci puisse statuer à la majorité (arrêt de la Cour du 10 décembre 1987, Jänsch/Commission, 277/84, point 14). Il est en particulier jugé de manière constante que le rapport de la commission médicale n’est pas entaché d’un vice de forme du fait qu’un de ses membres a refusé de le signer (arrêt Jänsch/Commission, précité, point 14 ; arrêt AE/Commission, précité, point 56).
55 Ainsi, le principe de collégialité ne signifie pas que la commission médicale ne peut valablement décider à la majorité (voir arrêts Camacho-Fernandes/Commission, précité, point 32, et Commission/Camacho-Fernandes, précité, point 48), ni que la responsabilité principale de la rédaction du rapport de la commission médicale ne peut être assurée par les deux médecins majoritaires au sein de celle-ci.
56 Par ailleurs, il doit être rappelé qu’il appartient à la commission médicale de régler sa propre procédure (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal de première instance du 15 décembre 1999, Nardone/Commission, T-27/98, point 69, et la jurisprudence citée).
57 En l’espèce, le médecin désigné par le requérant a été mis en mesure de présenter ses observations et son analyse du dossier de l’intéressé lors de la réunion de la commission médicale du 5 décembre 2008, au cours de laquelle les deux autres membres de la commission médicale et lui-même ont procédé à l’examen du requérant et ont tenu « une longue discussion », ainsi que cela est mentionné dans le rapport de la commission médicale.
58 Dès lors, le désaccord opposant les deux médecins majoritaires au sein de la commission médicale, à savoir le médecin désigné par l’AIPN et le troisième médecin, rédacteurs du rapport de la commission médicale, au médecin désigné par le requérant, qui s’est séparé de l’analyse médicale de ses confrères au terme d’un examen collégial du requérant et de son dossier, ne révèle pas d’atteinte à la collégialité des travaux de la commission médicale ni d’irrégularité de nature à vicier le rapport établi en son nom. En particulier, le fait que le médecin désigné par le requérant a reçu pour signature un rapport établi au nom de la commission médicale, élaboré par ses deux confrères majoritaires et présenté comme étant déjà finalisé, et que dans ces conditions, il n’aurait pas eu d’autre possibilité que de rédiger une note dissidente, n’est pas à lui seul susceptible de constituer une atteinte au principe de collégialité devant présider aux travaux de la commission médicale.
59 D’ailleurs, le médecin désigné par le requérant n’a à aucun moment fait part de son désaccord avec cet aspect de l’organisation des travaux de la commission médicale. Au contraire, il a signé le rapport établi au nom de la commission médicale qui lui avait été transmis pour signature, reconnaissant par là implicitement qu’il avait été associé à la procédure suivie et à l’élaboration du rapport de la commission médicale, même s’il n’en partageait pas nécessairement les conclusions émises à la majorité de ses membres.
60 En conséquence, le grief tiré de la violation du principe de collégialité doit être rejeté.
Sur le grief tiré de la violation des principes d’indépendance et d’impartialité
– Arguments des parties
61 Le requérant fonde essentiellement le grief susmentionné sur le courrier électronique qui lui a été envoyé le 10 septembre 2009 par le chef du secteur « Assurance accident et maladie professionnelle » du PMO et par lequel celle-ci l’informait que, « avant de valider le rapport de la commission médicale », elle avait demandé au président de la commission médicale pour quelles raisons cette commission n’avait pas jugé nécessaire de demander l’avis d’un expert psychiatre indépendant. Selon le requérant, ce courrier électronique, en attestant d’un contact unilatéral entre l’administration et le président de la commission médicale, mettrait gravement en cause l’impartialité de cette commission. Le requérant affirme, en outre, que l’auteur du courrier électronique du 10 septembre 2009 lui avait « déjà fait l’aveu, dans le courant du mois de mars 2009, des contacts unilatéraux qu’elle entretenait non seulement avec le médecin représentant l’administration au sein de la commission médicale, mais également avec le président de celle-ci ».
62 La Commission fait valoir que la demande écrite d’éclaircissement adressée par le chef du secteur « Assurance accident et maladie professionnelle » du PMO au troisième médecin, en sa qualité de président de la commission médicale, a été faite de manière officielle, en toute transparence, le médecin désigné par le requérant ayant reçu une copie de ce courrier. Une telle démarche de l’administration, au demeurant dans l’intérêt du fonctionnaire, ne remettrait pas en cause l’indépendance et l’impartialité dont la commission médicale aurait fait preuve au cours de ses travaux. Pour le reste, la Commission estime que les éléments avancés par le requérant ne sont que des suppositions dénuées de tout fondement.
– Appréciation du Tribunal
63 En premier lieu, selon une jurisprudence constante, si la commission médicale omet, dans un premier avis, de remplir complètement son mandat, elle peut être invitée par l’institution en cause à compléter ou préciser ses conclusions dans un nouvel avis (arrêts du Tribunal de première instance du 9 juillet 1997, S/Cour de justice, T-4/96, point 42, du 15 décembre 1999, Latino/Commission, T-300/97, point 53, et Nardone/Commission, précité, point 60).
64 En l’espèce, le courrier adressé par le chef du secteur « Assurance accident et maladie professionnelle » du PMO au troisième médecin, président de la commission médicale, avait pour objet une demande de précision s’agissant des raisons ayant conduit la commission médicale à ne pas faire examiner le requérant par un expert psychiatre. Par là même, le chef du secteur « Assurance accident et maladie professionnelle » du PMO cherchait à vérifier si l’absence d’examen du requérant par un tel spécialiste s’expliquait par une décision de la commission médicale, reposant sur une appréciation médicale de celle-ci, ou si, au contraire, elle n’était pas liée à une éventuelle méconnaissance par la commission médicale de son mandat. Cette vérification portant sur l’exécution correcte de son mandat par la commission médicale était d’autant plus légitime en l’espèce que celle-ci était saisie en exécution d’une décision de l’AIPN ayant ordonné la réouverture de la procédure médicale de reconnaissance d’une invalidité permanente au sens de l’article 73 du statut, à la suite de la réclamation du requérant critiquant le fait que la commission médicale n’avait pas examiné l’origine de ses troubles psychologiques.
65 En second lieu, le courrier adressé par le chef du secteur « Assurance accident et maladie professionnelle » du PMO au troisième médecin, en sa qualité de président de la commission médicale, l’a été de manière transparente, le médecin désigné par le requérant en ayant reçu une copie. Ce contact épistolaire entre l’administration et le troisième médecin et président de la commission médicale ne peut donc être qualifié, comme le soutient le requérant, d’« unilatéral ». En outre, le courrier en cause a été envoyé au troisième médecin et président de la commission médicale après que celui-ci a transmis le rapport établi au nom de la commission à l’administration. Dans de telles conditions, il ne peut être considéré que le courrier concerné constitue une immixtion de l’administration dans les travaux de la commission médicale.
66 Par ailleurs, les affirmations du requérant selon lesquelles le chef du secteur « Assurance accident et maladie professionnelle » du PMO aurait « déjà fait l’aveu, dans le courant du mois de mars 2009, des contacts unilatéraux qu’elle entretenait non seulement avec le médecin représentant l’administration au sein de la commission médicale, mais également avec le président de celle-ci », apparaissent comme étant de pures élucubrations, non étayées du moindre commencement de preuve. Il ressort d’ailleurs du dossier que le chef du secteur « Assurance accident et maladie professionnelle » du PMO s’est expliqué auprès du requérant sur l’indication qui lui avait été donnée au téléphone selon laquelle elle était « en réunion », cette indication ne signifiant pas qu’elle était en réunion avec des membres de la commission médicale mais avec du personnel de son administration.
67 Par suite, le grief tiré de la violation des principes d’indépendance et d’impartialité doit être rejeté comme non fondé.
Sur le grief tiré d’une conception erronée de la notion d’invalidité au sens de l’article 73 du statut
– Arguments des parties
68 L’argumentation du requérant prend pour point d’ancrage l’arrêt de la Cour du 2 octobre 1979, B./Commission, par lequel la Cour a jugé qu’« [a]u sens de l’article [73 du statut], doit être considérée comme invalide la personne qui, à la suite d’un accident ou d’une maladie professionnelle, n’est plus en état, entièrement ou partiellement, de mener une vie active normale » (arrêt de la Cour du 2 octobre 1979, B./Commission, 152/77, point 10). Le requérant fait ensuite valoir que sa mise à la retraite anticipée était justifiée exclusivement par sa maladie professionnelle. Puis il conclut que si, en raison de sa maladie professionnelle, il se trouve dans l’incapacité de poursuivre toute activité professionnelle auprès de la Commission, il en résulte forcément qu’il ne peut plus « mener une vie active normale » et que, dès lors, il se trouve atteint d’une invalidité permanente au sens de l’article 73 du statut.
69 La Commission fait valoir que, selon une jurisprudence constante, notamment rappelée par le Tribunal de première instance dans son arrêt du 1er juillet 2008, Commission/D (T-262/06 P), les prestations prévues par les articles 73 et 78 du statut seraient différentes et indépendantes les unes des autres, bien qu’elles puissent être cumulées. De même, ces dispositions prévoiraient deux procédures différentes pouvant donner lieu à des décisions distinctes, indépendantes l’une de l’autre. Par conséquent, la procédure de reconnaissance d’une invalidité permanente totale ou partielle, en application de l’article 73 du statut, et la procédure d’octroi d’une pension d’invalidité, en application de l’article 78 du statut, pourraient légitimement aboutir à des résultats divergents à l’égard de la même situation factuelle.
– Appréciation du Tribunal
70 Les articles 73 et 78 du statut poursuivent des finalités différentes et reposent sur des notions distinctes (arrêt du Tribunal de première instance du 27 février 1992, Plug/Commission, T-165/89, point 56).
71 L’article 73 fait partie du chapitre 2, intitulé « Sécurité sociale », du titre V du statut, relatif au régime pécuniaire et aux avantages sociaux du fonctionnaire. Cette disposition accorde au fonctionnaire, dès le jour de son entrée en service, une couverture contre les risques de maladie professionnelle et d’accident. Elle prévoit certaines prestations en cas de décès, en cas d’invalidité permanente totale et en cas d’invalidité permanente partielle causés par un accident ou par une maladie professionnelle. Les conditions de son application sont fixées par la réglementation de couverture, laquelle, en son article 12, établit une distinction quant aux prestations entre, d’une part, les cas d’invalidité permanente totale et, d’autre part, les cas d’invalidité permanente partielle. La procédure visant à établir une invalidité permanente est la même dans tous les cas et est prévue par les articles 16 à 25 de la réglementation de couverture. L’article 25 de ladite réglementation précise que la reconnaissance d’une invalidité permanente totale ou partielle, en application de l’article 73 du statut et de la réglementation de couverture, ne préjuge en aucune façon de l’application de l’article 78 du statut et réciproquement (arrêt Plug/Commission, précité, point 56).
72 L’article 78 du statut figure au chapitre 3, intitulé « Pensions et allocation d’invalidité », du titre V du statut. Il prévoit que le fonctionnaire a droit à une allocation d’invalidité « lorsqu’il est atteint d’une invalidité permanente considérée comme totale et le mettant dans l’impossibilité d’exercer des fonctions correspondant à un emploi de son groupe de fonctions ». L’allocation d’invalidité visée à cet article n’est donc accordée qu’en cas d’incapacité de travail permanente et totale. Lorsque l’invalidité résulte d’une maladie professionnelle, l’institution prend à sa charge la totalité de la contribution au régime des pensions. L’article 78 du statut renvoie à l’annexe VIII de celui-ci, intitulée « Modalités du régime de pensions », plus précisément aux articles 13 à 15 de celle-ci, pour définir les conditions de reconnaissance d’une allocation d’invalidité. Selon l’article 13 de l’annexe VIII du statut, il appartient à la commission d’invalidité d’établir si le fonctionnaire est atteint d’une invalidité permanente considérée comme totale et le mettant dans l’impossibilité d’exercer les fonctions correspondantes à un emploi de sa carrière (arrêt Plug/Commission, précité, point 57).
73 La jurisprudence a précisé qu’il existe une distinction fondamentale entre l’invalidité permanente au sens de l’article 78 du statut, notion équivalant à l’incapacité de travail et donc au besoin d’un revenu de remplacement sous forme d’une allocation d’invalidité, et l’invalidité permanente au sens de l’article 73 du statut, équivalant à l’atteinte à l’intégrité physique et psychique (arrêt du Tribunal de première instance du 27 juin 2000, Plug/Commission, T-47/97, point 73).
74 La jurisprudence souligne la distinction entre l’inaptitude au travail – incapacité qui fait l’objet de l’article 78 du statut – et le fait d’être atteint d’une invalidité permanente à 100 % au titre de l’article 73 du statut. En effet, si une invalidité totale au sens dudit article 73 entraîne en général une incapacité de travail totale, l’inverse n’est pas forcément vrai car un fonctionnaire peut être totalement inapte au travail au sens dudit article 78, tout en ne souffrant que d’une invalidité permanente partielle très réduite au sens dudit article 73 (arrêt du 27 juin 2000, Plug/Commission, précité, point 74).
75 L’argumentation du requérant, fondée sur l’arrêt B./Commission, précité, ne saurait conduire à une autre analyse. En effet, s’il est vrai qu’au point 10 de cet arrêt la Cour a considéré qu’« au sens de [l’article 73 du statut], doit être considérée comme invalide la personne qui, à la suite d’un accident ou d’une maladie professionnelle, n’est plus en état, entièrement ou partiellement, de mener une vie active normale », au point 14 de ce même arrêt la Cour énonce que « l’indemnité d’invalidité prévue à l’article 73 [du statut] se distingue de la pension d’invalidité prévue à l’article 78 [du statut] qui elle, n’est accordée qu’en cas d’incapacité de travail. L’indemnité prévue par l’article 73 [du statut], par contre, est accordée à l’intéressé quelle que soit la capacité de l’intéressé de continuer l’exercice de son emploi. Une invalidité permanente partielle ouvre droit à l’indemnité, même si elle n’affecte en rien les possibilités de l’intéressé d’exercer son emploi. En outre, le taux d’invalidité, un des facteurs déterminant le montant de l’indemnité, est fixé forfaitairement d’après un barème général qui ne tient pas compte de la nature des emplois. [...] Il en résulte que l’invalidité au sens de l’article 73 [du statut] doit être interprétée comme visant l’atteinte à l’intégrité physique ou psychique du fonctionnaire, sans égard au degré de l’incapacité éventuelle de travail ». En d’autres termes, « le taux d’invalidité visé par l’article 73 [du statut] doit être établi en tenant compte uniquement de l’atteinte à l’intégrité physique ou psychique du fonctionnaire » (arrêt du Tribunal de première instance du 14 mai 1998, Lucaccioni/Commission, T-165/95, point 74).
76 Il s’ensuit que dans le système des articles 73 et 78 du statut, il ne peut être exclu qu’un fonctionnaire mis en invalidité sur le fondement de l’article 78 du statut en raison d’une maladie professionnelle ne se voie reconnaître aucun taux d’invalidité permanente partielle au sens des dispositions de l’article 73 du statut, de la réglementation de couverture et du barème, si cette maladie ne lui a causé aucune atteinte à son intégrité physique ou psychique au sens de ces dispositions.
77 Il résulte de l’ensemble de ce qui précède que le grief tiré d’une conception erronée de la notion d’invalidité au sens de l’article 73 du statut doit être rejeté comme non fondé.
Sur le grief tiré de l’insuffisance de motivation du rapport de la commission médicale
– Arguments des parties
78 Le requérant estime que le rapport de la commission médicale ne pourrait être considéré comme « complet, cohérent et dûment motivé en fonction de toutes les données médicales mises à la disposition des membres de ladite commission », notamment en ce qui concerne son état psychologique. Il rappelle à ce dernier égard que, par sa décision du 12 juillet 2007 ordonnant la réouverture des travaux de la commission médicale, l’AIPN avait invité celle-ci à examiner l’aspect psychologique de sa maladie professionnelle. Le requérant critique en particulier le passage du rapport de la commission médicale selon lequel « [l]es examens psychologiques et psychiatriques ne peuvent évidemment se targuer de ce critère d’objectivité étant donné qu’il repose uniquement sur les déclarations et la participation de l’intéressé ». Selon le requérant, « le propos revien[drait] à refuser purement et simplement la reconnaissance de la psychiatrie comme science médicale, les membres de la commission médicale considérant visiblement que le diagnostic posé par le psychiatre du requérant participerait d’une subjectivité totale et incontrôlée ».
79 La Commission objecte, en premier lieu, que par ce moyen le requérant critiquerait en réalité l’appréciation faite par la commission médicale sur son état psychologique. Or, selon la jurisprudence, le contrôle juridictionnel des avis des commissions médicales ne s’étendrait pas à celui de l’erreur manifeste d’appréciation. La Commission fait valoir, en second lieu, que, en l’espèce, l’avis de la commission médicale contiendrait une motivation permettant d’apprécier les considérations sur lesquelles il est fondé, et établirait un lien compréhensible entre les constatations médicales qu’il comporte et les conclusions auxquelles il parvient.
Appréciation du Tribunal
80 Selon la jurisprudence, lorsque la commission médicale est saisie de questions d’ordre médical complexes se rapportant à un diagnostic difficile ou au lien de causalité entre l’affection dont est atteint l’intéressé et l’exercice de son activité professionnelle auprès d’une institution, il lui appartient notamment d’indiquer dans son avis les éléments du dossier sur lesquels elle s’appuie et de préciser, en cas de divergence significative, les raisons pour lesquelles elle s’écarte de certains rapports médicaux, antérieurs et pertinents, plus favorables à l’intéressé (arrêt AE/Commission, précité, point 65, et la jurisprudence citée).
81 En l’espèce, il convient d’examiner successivement les deux pathologies faisant l’objet de la déclaration d’aggravation du requérant ayant motivé la réouverture de la procédure médicale, à savoir, premièrement, des plaques pleurales et une fibrohyalinose d’origine asbestosique, et, deuxièmement, des troubles psychiques.
82 S’agissant de la première pathologie, la commission médicale s’est fondée sur deux rapports établis par le professeur D., pneumologue, en date des 18 février 2004 et 5 avril 2006, pour constater que si le requérant présente effectivement des traces d’exposition à l’amiante avec présence de plaques pleurales, celles-ci n’ont aucune incidence sur sa fonction pulmonaire.
83 Il y a lieu de constater à cet égard que les rapports établis par le professeur D. n’apparaissent pas en contradiction avec le procès-verbal de la commission d’invalidité du 24 juin 2003, aux termes duquel, s’agissant de l’examen clinique du requérant, « l’épreuve fonctionnelle, refaite il y a deux mois, montrait une nette diminution de la capacité en comparaison avec l’examen de 2001 ». En effet, la partie « comparaison avec les résultats antérieurs » du rapport du professeur D. du 18 février 2004 est ainsi rédigée : « La capacité vitale que nous avons pu mesurer en février 2004 est un peu inférieure à celle qui a été mesurée antérieurement mais, en valeur absolue, ce chiffre reste plus que satisfaisant et proche de la valeur théorique. Il existe des modifications modérées de la capacité pulmonaire totale mais elles sont à mon avis non significatives. [...] La capacité de transfert pour l’oxyde de carbone est normale en valeur absolue et légèrement augmentée par rapport à l’unité de volume pulmonaire ». Le rapport du professeur D., dans la mesure où il explique clairement que, en dépit d’une diminution, la fonction pulmonaire restait normale, n’apparaît pas moins favorable au requérant que le procès-verbal de la commission d’invalidité du 24 juin 2003. Par conséquent, le rapport de la commission médicale n’avait pas à faire l’objet d’une motivation particulière sur ce point.
84 S’agissant de la seconde pathologie, le rapport du médecin traitant du requérant accompagnant la demande du 29 avril 2003 faisait état d’une anxiété grandissante de l’intéressé face au risque de développement d’affections pulmonaires, et le mandat complémentaire donné à la commission médicale à la suite de la décision de l’AIPN du 12 juillet 2007 accueillant partiellement la réclamation du requérant du 19 mars 2007 précisait expressément que la commission médicale devait s’attacher à examiner tant l’existence des troubles psychologiques dont se plaignait le requérant que leur lien avec sa maladie professionnelle.
85 Le Tribunal constate que, s’agissant de l’exposé des motifs ayant conduit la commission médicale à considérer que les troubles psychologiques invoqués par le requérant n’étaient pas en lien avec sa maladie professionnelle, le rapport de la commission médicale n’est pas exempt de faiblesses.
86 Néanmoins, la jurisprudence relative à la motivation du rapport d’une commission médicale n’exige pas qu’un tel rapport soit sur un plan formel un modèle en matière de rédaction (arrêt du Tribunal J/Commission, précité, point 96). Cette jurisprudence exige seulement qu’il contienne une motivation permettant d’apprécier sur quelles considérations sont fondées les conclusions qu’il contient et qu’il établisse un lien compréhensible entre les constatations médicales qu’il comporte et les conclusions auxquelles parvient la commission médicale (arrêt AE/Commission, précité, point 64, et la jurisprudence citée).
87 En outre, il y a lieu de préciser que le rapport de la commission médicale ayant un caractère scientifique, les exigences de cohérence et d’intelligibilité posées par la jurisprudence n’ont pas à être appréciées dans la perspective du requérant lui-même, mais dans celle du médecin le représentant au sein de la commission médicale, ledit médecin ayant notamment pour rôle d’expliquer à son patient, si cela est nécessaire, les motifs du rejet de sa demande de reconnaissance d’une maladie professionnelle.
88 En l’espèce, malgré les lacunes rédactionnelles que présente le rapport de la commission médicale, il doit être considéré qu’il était possible au médecin désigné par le requérant pour le représenter au sein de cette commission de comprendre les raisons ayant conduit ladite commission à rejeter la demande du requérant tendant à voir reconnaître l’origine professionnelle de ses troubles psychologiques.
89 En effet, le rapport de la commission médicale repose sur trois considérations énoncées ci-après.
90 Le rapport de la commission médicale indique, en premier lieu, que le requérant n’a jamais suivi de traitement psychiatrique. Cette constatation doit être lue en relation avec la première partie du rapport, dans laquelle il est expliqué que le requérant a consulté pour la première fois un médecin psychiatre le 6 octobre 2008, dans le but de fournir un rapport à la commission médicale.
91 Il semble découler de cette constatation et de celle, formulée par ailleurs dans le rapport de la commission médicale, selon laquelle le requérant prend des antidépresseurs et des anxiolytiques, que, pour la commission médicale, le fait que le requérant fasse usage de médicaments classés dans les catégories des antidépresseurs et des anxiolytiques ne constitue pas un élément suffisant pour lui permettre de considérer que l’intéressé « [suit] un traitement psychiatrique », dès lors qu’il n’y aurait pas suivi régulier de celui-ci par un médecin psychiatre. Or, une telle appréciation, de nature médicale, ne saurait être remise en cause par le juge. En tout état de cause, l’appréciation de la commission médicale selon laquelle la prescription éventuellement passagère de médicaments tels que ceux mentionnés ci-dessus par un médecin généraliste ne constitue pas un « traitement psychiatrique » n’apparaît pas entachée d’erreur manifeste.
92 En deuxième lieu, il ressort du rapport de la commission médicale que les conclusions contenues dans la note établie par le médecin psychiatre consulté par le requérant n’ont pas été prises en compte par la commission médicale, dans la mesure où cette note n’a pas été considérée comme étant un travail objectif et scientifique. Les membres de la commission médicale, statuant à la majorité, ont en effet constaté que cette note se bornait à reproduire les déclarations du requérant lui-même, et que, dans ces conditions, elle n’était pas de nature à fonder un diagnostic pertinent dans le cadre de la procédure médicale.
93 Il est vrai, s’agissant des raisons ayant conduit à l’absence de prise en compte de la note soumise par le médecin psychiatre consulté par le requérant, que les phrases suivantes des conclusions du rapport de la commission médicale sont ambiguës :
« Par ailleurs, [les membres de la commission médicale] ne peuvent évidemment que constater que ce diagnostic ne peut bien entendu reposer que sur les déclarations [du requérant] lui même.
[...]
Les examens psychologiques et psychiatriques ne peuvent évidemment se targuer de ce critère d’objectivité étant donné qu’il repose uniquement sur les déclarations et la participation de l’intéressé ».
94 Le requérant fait valoir que « le propos revien[drait] à refuser purement et simplement la reconnaissance de la psychiatrie comme science médicale ».
95 Néanmoins, en dépit de son ambiguïté, ce passage des conclusions du rapport de la commission médicale ne peut pas raisonnablement être interprété comme remettant en cause de manière générale et non argumentée le caractère scientifique de la psychiatrie en tant que branche de la médecine.
96 En effet, ce passage des conclusions du rapport de la commission médicale doit être interprété au regard de l’ensemble du rapport, et notamment de l’indication, figurant dans la partie introductive, selon laquelle « les membres de la commission ne peuvent évidemment que constater que les éléments repris dans le rapport du [d]octeur V. résultent uniquement des déclarations faites à ce confrère par [le requérant] lui-même ». Ainsi, lu dans son contexte, le passage en cause ne peut que signifier que la note établie par le médecin psychiatre consulté par le requérant ne présentait pas, en l’espèce, les caractéristiques d’un travail scientifique et objectif, dans la mesure où les conclusions qu’elle contenait reposaient exclusivement sur les déclarations du requérant.
97 Il peut d’ailleurs être relevé que tant le médecin désigné par le requérant pour le représenter au sein de la commission médicale que le psychiatre auteur de la note soumise à la commission médicale ne se sont nullement mépris sur le sens qu’il convenait de donner au passage du rapport de la commission médicale mentionné au point 93 ci-dessus. En effet, dans la note du 18 juin 2009 qu’il a adressée au médecin désigné par l’AIPN (voir point 27 supra), le médecin désigné par le requérant a contesté le fait que la majorité de la commission médicale ait écarté la note élaborée par le psychiatre consulté par le requérant comme constituant un « certificat de complaisance ». Le psychiatre consulté par le requérant, quant à lui, s’est étonné, dans la note du 19 juin 2009 qu’il a adressée au médecin désigné par l’AIPN et au troisième médecin (voir point 28 supra), de ce qu’il considérait comme une remise en cause de la souffrance psychique du requérant par la majorité de la commission médicale, alors qu’il n’avait pas mentionné dans sa note du 30 octobre 2008 que cette souffrance aurait été feinte ou simulée par l’intéressé. Ni le médecin désigné par le requérant ni le psychiatre consulté par celui-ci n’ont donc interprété le passage du rapport de la commission médicale mentionné au point 93 ci-dessus dans le sens que voudrait lui prêter le requérant, à savoir comme un refus de reconnaissance de la psychiatrie comme science médicale.
98 Il doit enfin être précisé que l’appréciation selon laquelle la note du 30 octobre 2008 établie par le psychiatre consulté par le requérant ne répondrait pas à des critères objectifs et scientifiques est de nature essentiellement médicale, et, à ce titre, ne peut être soumise au contrôle du juge.
99 En tout état de cause, il ne peut pas être considéré que le rapport de la commission médicale serait entaché d’une erreur manifeste d’appréciation en ce qu’il estime que la note établie par le psychiatre consulté par le requérant ne saurait fonder un diagnostic pertinent dans le cadre de la procédure médicale. En effet, cette note, succincte, ne présente ni la structure ni le niveau d’analyse approfondie que présentent habituellement les rapports établis par les médecins psychiatres aux fins des travaux d’une commission médicale.
100 En troisième lieu, il ressort du rapport de la commission médicale que les membres de cette commission, statuant à la majorité, ont estimé, au vu de l’entretien qu’ils ont eu avec le requérant et au vu des pièces qui leur ont été communiquées, qu’il n’existe pas de lien de causalité entre les troubles psychologiques invoqués par le requérant et son exposition à l’amiante dans le cadre de son travail à la Commission. En effet, selon la commission médicale, les troubles que le requérant présente seraient liés à une autre cause, à savoir la frustration de celui-ci de ne pas se voir reconnaître par la Commission ce qu’il considère comme étant une importante invalidité.
101 Cette constatation constitue une appréciation de nature médicale que le juge ne saurait remettre en cause. Il doit être rappelé à cet égard qu’il a été jugé que l’imputation de la maladie d’un fonctionnaire à la structure de sa personnalité et non à ses conditions de travail constitue une appréciation médicale dont le juge ne peut connaître que sous l’angle de sa motivation (arrêt AE/Commission, précité, points 64 et 84, et la jurisprudence citée).
102 Au vu de l’ensemble de ce qui précède, il apparaît que le rapport de la commission médicale était suffisamment motivé.
103 En tout état de cause, la décision rejetant la réclamation explique d’une manière suffisamment claire au requérant que c’est en raison de l’absence de lien entre les troubles psychiques dont il souffre et sa maladie professionnelle, provoquée par une exposition à l’amiante, que sa demande a été rejetée (voir, en ce sens, arrêt J/Commission, précité, point 98).
104 Le grief tiré de l’insuffisance de motivation du rapport de la commission médicale doit par conséquent être rejeté comme non fondé.
Sur les griefs tirés de l’absence de spécialisation en psychiatrie des membres de la commission médicale et de l’absence d’examen complémentaire du requérant par un médecin psychiatre
– Arguments des parties
105 Le requérant critique, d’une part, le fait qu’aucun des membres de la commission médicale ne possédait de spécialisation en psychiatrie et, d’autre part, le fait que la commission médicale n’a pas jugé utile de le soumettre à un examen par un psychiatre « indépendant », malgré une proposition faite en ce sens par le médecin le représentant au sein de cette commission.
106 La Commission objecte que l’avis de la commission médicale selon lequel, au vu du dossier du requérant, il n’était pas utile de soumettre l’intéressé à des expertises supplémentaires constitue une appréciation de nature médicale que le Tribunal ne saurait remettre en cause.
– Appréciation du Tribunal
107 S’agissant du grief selon lequel aucun des membres de la commission médicale ne possédait de spécialisation en psychiatrie, il y a lieu de relever, d’abord, que le requérant ne conteste pas la régularité formelle de la désignation des membres de la commission médicale. Les trois médecins membres de cette commission ont été nommés par les personnes habilitées à le faire, la sauvegarde des intérêts du requérant étant ainsi dûment assurée par la présence d’un médecin ayant sa confiance et par la désignation du troisième médecin, extérieur à l’administration (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 14 juillet 1981, Suss/Commission, 186/80, point 9 ; arrêt AE/Commission, précité, point 50).
108 Ensuite, la réglementation de couverture, applicable au présent litige, ne fixe aucune exigence particulière de spécialisation des membres de la commission médicale (voir arrêt AE/Commission, précité, point 51). Il peut être relevé à cet égard que, dans la mesure où la réglementation de couverture laisse une entière liberté dans le choix de son médecin tant au fonctionnaire concerné qu’à l’administration, rien n’empêchait le requérant de désigner un médecin spécialisé en psychiatrie pour le représenter au sein de la commission médicale, s’il l’estimait nécessaire.
109 Dès lors, le fait qu’aucun des membres de la commission médicale ne possédait de spécialisation en psychiatrie n’est pas de nature à vicier le rapport de la commission médicale.
110 S’agissant du grief du requérant selon lequel la commission médicale n’a pas estimé utile de le soumettre à un examen complémentaire par un expert en psychiatrie, malgré une proposition faite en ce sens par le médecin le représentant au sein de cette commission, il importe tout d’abord de constater que les raisons de l’absence de recours par la commission médicale à un examen complémentaire du requérant auprès d’un expert psychiatre sont précisées par le courrier du 5 août 2009 du troisième médecin, en sa qualité de président de la commission médicale, adressé en réponse à la question posée en ce sens par le chef du secteur « Assurance accident et maladie professionnelle » du PMO (voir point 30 supra), et tiennent au fait que les membres de la commission médicale estimaient, à la majorité, disposer de suffisamment d’informations pour se prononcer sur la demande du requérant.
111 L’appréciation de la commission médicale selon laquelle elle dispose, au vu des pièces qui lui ont été communiquées et au vu de l’examen de l’intéressé, de suffisamment d’éléments pour se prononcer, doit être considérée comme une appréciation de nature médicale.
112 Or, premièrement, comme rappelé précédemment (voir point 44 supra), les appréciations médicales proprement dites formulées par la commission médicale doivent être considérées comme définitives lorsqu’elles ont été émises dans des conditions régulières. Par conséquent, le moyen tiré d’une erreur manifeste de la commission médicale ne saurait prospérer (voir point 45 supra). Deuxièmement, il résulte de l’examen fait par le Tribunal des précédents griefs soulevés par le requérant que celui-ci n’a pas démontré que l’appréciation contestée serait intervenue dans des conditions irrégulières.
113 Par suite, le grief relatif au défaut d’examen par un expert psychiatre n’est pas susceptible de prospérer.
114 Au vu de ce qui précède, les griefs tirés de l’absence de spécialisation en psychiatrie des membres de la commission médicale et de l’absence d’examen du requérant par un expert psychiatre doivent être rejetés comme non fondés.
115 Tous les griefs soulevés au soutien des conclusions aux fins d’annulation des décisions du 7 septembre 2009, en tant qu’elles refusent de reconnaître au requérant un taux d’invalidité permanente, ayant été écartés, lesdites conclusions doivent être rejetées comme non fondées.
Sur les conclusions tendant à l’annulation des décisions du 7 septembre 2009, en tant qu’elles mettent à la charge du requérant les frais et honoraires du médecin qu’il a désigné ainsi que la moitié des frais et honoraires du troisième médecin
116 À l’audience, le requérant a expressément indiqué que la Commission lui avait remboursé la totalité des sommes litigieuses, et que, par conséquent, il se désistait du moyen soulevé à l’appui des présentes conclusions.
117 Dès lors, il n’y a pas lieu de statuer sur les conclusions tendant à l’annulation des décisions du 7 septembre 2009, en tant qu’elles mettent à la charge du requérant les frais et honoraires du médecin qu’il a désigné pour le représenter au sein de la commission médicale ainsi que la moitié des frais et honoraires du troisième médecin.
Sur les dépens
118 Aux termes de l’article 87, paragraphe 1, du règlement de procédure, sous réserve des autres dispositions du chapitre huitième du titre deuxième dudit règlement, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. En vertu du paragraphe 2 du même article, le Tribunal peut décider, lorsque l’équité l’exige, qu’une partie qui succombe n’est condamnée que partiellement aux dépens, voire qu’elle ne doit pas être condamnée à ce titre.
119 Il résulte des motifs énoncés ci-dessus que le requérant a succombé en son recours. En outre, la Commission a, dans ses conclusions, expressément demandé que le requérant soit condamné aux dépens. Les circonstances de l’espèce ne justifiant pas l’application des dispositions de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, il y a donc lieu de condamner le requérant aux dépens exposés par la Commission dans la présente instance.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
(troisième chambre)
déclare et arrête :
1) Il n’y a pas lieu de statuer sur les conclusions tendant à l’annulation des décisions de la Commission européenne du 7 septembre 2009, en tant qu’elles mettent à la charge de M. Hecq les frais et honoraires du médecin qu’il a désigné pour le représenter au sein de la commission médicale ainsi que la moitié des frais et honoraires du troisième médecin de la commission médicale désigné d’un commun accord.
2) Les conclusions tendant à l’annulation des décisions du 7 septembre 2009, en tant qu’elles refusent de reconnaître à M. Hecq un taux d’invalidité permanente, sont rejetées comme non fondées.
3) M. Hecq supporte l’ensemble des dépens.
Mahoney |
Boruta |
Rofes i Pujol |
Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 14 septembre 2011.
Le greffier |
Le président |
W. Hakenberg |
P. Mahoney |
* Langue de procédure : le français.