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Document 62019CO0755

Beschluss des Gerichtshofs (Sechste Kammer) vom 11. Februar 2021.
T.H.C. gegen Commissaire général aux réfugiés et aux apatrides.
Vorabentscheidungsersuchen des Conseil d'État (Belgien).
Rechtssache C-755/19.

ECLI identifier: ECLI:EU:C:2021:108

ORDONNANCE DE LA COUR (sixième chambre)

11 février 2021 (*)

« Renvoi préjudiciel – Article 99 du règlement de procédure de la Cour – Politique d’asile – Procédures communes pour l’octroi et le retrait de la protection internationale – Directive 2013/32/UE – Article 46 – Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne – Article 47 – Droit à un recours effectif – Recours contre une décision de rejet d’une demande ultérieure de protection internationale comme étant irrecevable – Délai de recours – Placement en rétention »

Dans l’affaire C‑755/19,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Conseil d’État (Belgique), par décision du 1er octobre 2019, parvenue à la Cour le 15 octobre 2019, dans la procédure

T.H.C.

contre

Commissaire général aux réfugiés et aux apatrides,

LA COUR (sixième chambre),

composée de M. L. Bay Larsen, président de chambre, Mme R. Silva de Lapuerta (rapporteure), vice‑présidente de la Cour, et Mme C. Toader, juge,

avocat général : M. P. Pikamäe,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de statuer par voie d’ordonnance motivée, conformément à l’article 99 du règlement de procédure de la Cour,

rend la présente

Ordonnance

1        La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 46 de la directive 2013/32/UE du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, relative à des procédures communes pour l’octroi et le retrait de la protection internationale (JO 2013, L 180, p. 60), ainsi que de l’article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte »).

2        Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant T.H.C. au Commissaire général aux réfugiés et aux apatrides (Belgique) (ci‑après le « Commissaire général »), au sujet de la décision de ce dernier déclarant irrecevable la demande ultérieure de protection internationale introduite par T.H.C.

 Le cadre juridique

 Le droit de l’Union

3        Les considérants 18 et 23 de la directive 2013/32 énoncent :

« (18)      Il est dans l’intérêt à la fois des États membres et des demandeurs d’une protection internationale que les demandes de protection internationale fassent l’objet d’une décision aussi rapide que possible, sans préjudice de la réalisation d’un examen approprié et exhaustif.

[...]

(23)      Dans le cadre des procédures de recours, les demandeurs devraient pouvoir bénéficier, sous réserve de certaines conditions, d’une assistance juridique et d’une représentation gratuites par des personnes compétentes pour assurer cette assistance et cette représentation en vertu du droit national. En outre, les demandeurs devraient, à tous les stades de la procédure, avoir le droit de consulter, à leurs frais, des conseils juridiques ou des conseillers reconnus en tant que tels ou autorisés à cette fin en vertu du droit national. »

4        L’article 20, paragraphe 1, de la directive 2013/32 prévoit :

« Les États membres veillent à ce que l’assistance juridique et la représentation gratuites soient accordées sur demande dans le cadre des procédures de recours visées au chapitre V. [...] »

5        L’article 22 de cette directive reconnaît le droit des demandeurs d’une protection internationale à l’assistance juridique et à la représentation à toutes les étapes de la procédure.

6        L’article 23 de ladite directive dispose, à son paragraphe 1 :

« Les États membres veillent à ce que le conseil juridique ou un autre conseiller reconnu en tant que tel ou autorisé à cette fin en vertu du droit national, qui assiste ou représente un demandeur en vertu du droit national, ait accès aux informations versées au dossier du demandeur sur la base duquel une décision est prise ou le sera. »

7        L’article 46, paragraphes 1 et 4, de cette directive prévoit :

« 1.      Les États membres font en sorte que les demandeurs disposent d’un droit à un recours effectif devant une juridiction contre les actes suivants :

a)      une décision concernant leur demande de protection internationale, y compris :

[...]

ii)      les décisions d’irrecevabilité de la demande en application de l’article 33, paragraphe 2 ;

[...]

[...]

4.      Les États membres prévoient des délais raisonnables et énoncent les autres règles nécessaires pour que le demandeur puisse exercer son droit à un recours effectif en application du paragraphe 1. Les délais prévus ne rendent pas cet exercice impossible ou excessivement difficile. »

 Le droit belge

8        L’article 39/2, paragraphe 1, de la loi sur l’accès au territoire, le séjour, l’établissement et l’éloignement des étrangers, du 15 décembre 1980 (Moniteur belge du 31 décembre 1980, p. 14584) dans sa version en vigueur à la date des faits au principal (ci-après la « loi du 15 décembre 1980 »), dispose :

« Le Conseil [du contentieux des étrangers] statue, par voie d’arrêts, sur les recours introduits à l’encontre des décisions du [Commissaire général].

[...] »

9        L’article 39/57 de la loi du 15 décembre 1980 est ainsi libellé :

« § 1er.      Les recours visés à l’article 39/2 sont introduits par requête, dans les trente jours suivant la notification de la décision contre laquelle ils sont dirigés.

La requête est introduite dans les dix jours suivant la notification de la décision contre laquelle le recours est dirigé :

[...]

3º      lorsque le recours est dirigé contre une décision d’irrecevabilité visée à l’article 57/6, § 3, alinéa 1er. La requête est toutefois introduite dans les cinq jours suivant la notification de la décision contre laquelle elle est dirigée lorsqu’il s’agit d’une décision d’irrecevabilité prise sur la base de l’article 57/6, § 3, alinéa 1er, 5°, et que l’étranger se trouve, au moment de sa demande, dans un endroit déterminé visé aux articles 74/8 et 74/9 ou qu’il est mis à la disposition du gouvernement.

[...]

§ 2.      Les délais de recours visés au § 1er commencent à courir :

[...]

3º      lorsque la notification est effectuée contre accusé de réception, le premier jour qui suit la délivrance ou le refus de réception ;

[...]

Le jour de l’échéance est compris dans le délai. Toutefois, lorsque ce jour est un samedi, un dimanche ou un jour férié, le jour de l’échéance est reporté au plus prochain jour ouvrable.

Pour l’application de la présente disposition, sont considérés comme jours ouvrables, tous les jours, excepté le samedi, le dimanche ou les jours fériés.

[...] »

10      Aux termes de l’article 57/6, § 3, de ladite loi :

« Le [Commissaire général] peut déclarer irrecevable une demande de protection internationale lorsque :

[...]

5º      le demandeur introduit une demande ultérieure de protection internationale pour laquelle aucun élément ou fait nouveau au sens de l’article 57/6/2 n’apparaît ni n’est présenté par le demandeur ;

[...] »

11      En vertu de l’article 57/6/2, § 1, de la même loi, « [a]près réception de la demande ultérieure transmise par le ministre ou son délégué sur la base de l’article 51/8, le [Commissaire général] examine en priorité si de nouveaux éléments ou faits apparaissent, ou sont présentés par le demandeur, qui augmentent de manière significative la probabilité qu’il puisse prétendre à la reconnaissance comme réfugié au sens de l’article 48/3 ou à la protection subsidiaire au sens de l’article 48/4. En l’absence de ces éléments ou faits, le [Commissaire général] déclare la demande irrecevable ».

 Le litige au principal et la question préjudicielle

12      Après le rejet d’une première demande d’asile, T.H.C. a introduit une seconde demande de protection internationale qui a été déclarée irrecevable par une décision du 11 septembre 2018 du Commissaire général, sur le fondement de l’article 57/6, § 3, alinéa 1er, 5°, de la loi du 15 décembre 1980 (ci‑après la « décision contestée »).

13      La décision contestée lui a été notifiée par porteur contre accusé de réception le mercredi 12 septembre 2018, au lieu assimilé à un lieu déterminé situé à la frontière où T.H.C. était retenu.

14      Conformément au droit belge, le délai de cinq jours pour introduire un recours contre cette décision a commencé à courir le lendemain du jour où ladite décision a été remise à T.H.C., à savoir le jeudi 13 septembre 2018, et a expiré le lundi 17 septembre 2018 à minuit.

15      Le 18 septembre 2018, T.H.C. a introduit un recours contre la décision contestée devant le Conseil du contentieux des étrangers (Belgique). Cette juridiction a rejeté ce recours en raison de son caractère tardif.

16      Le 9 octobre 2018, T.H.C. s’est pourvu en cassation contre cet arrêt devant le Conseil d’État (Belgique).

17      Dans ces conditions, le Conseil d’État a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante :

« L’article 46 de la [directive 2013/32], selon lequel les demandeurs doivent disposer d’un droit de recours effectif à l’encontre des décisions “concernant leur demande de protection internationale”, et l’article 47 de la [Charte] doivent-ils être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une règle de procédure nationale, telle que l’article 39/57, § 1er, deuxième alinéa, sous 3, seconde phrase, de la [loi du 15 décembre 1980], lu en combinaison avec l’article 57/6, § 3, premier alinéa, sous 5, ainsi que l’article 57/6/2, § 1er, de la même loi, fixant à cinq jours “calendrier” à partir de la notification de la décision administrative le délai de recours contre une décision d’irrecevabilité d’une demande ultérieure de protection internationale introduite par un ressortissant d’un pays tiers, lorsque “l’étranger se trouve, au moment de sa demande, dans un endroit déterminé visé aux articles 74/8 et 74/9 [de la même loi] ou qu’il est mis à la disposition du gouvernement” ? »

 Sur la question préjudicielle

18      En vertu de l’article 99 du règlement de procédure de la Cour, lorsque la réponse à une question posée à titre préjudiciel peut être clairement déduite de la jurisprudence ou lorsque la réponse à une telle question ne laisse place à aucun doute raisonnable, la Cour peut, à tout moment, sur proposition du juge rapporteur, l’avocat général entendu, décider de statuer par voie d’ordonnance motivée.

19      Il y a lieu de faire application de cette disposition dans le cadre du présent renvoi préjudiciel.

20      Par sa question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 46 de la directive 2013/32, lu à la lumière de l’article 47 de la Charte, doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une réglementation nationale soumettant le recours contre une décision d’irrecevabilité d’une demande ultérieure de protection internationale à un délai de forclusion de cinq jours, incluant les jours fériés et chômés, lorsque le demandeur concerné est placé en rétention.

21      L’article 46 de la directive 2013/32 impose aux États membres de garantir le droit à un recours effectif devant une juridiction contre la décision de rejet d’une demande de protection internationale, y compris contre les décisions qui déclarent la demande irrecevable.

22      Les caractéristiques du recours prévu à l’article 46 de la directive 2013/32 doivent être déterminées en conformité avec l’article 47 de la Charte, aux termes duquel toute personne dont les droits et les libertés garantis par le droit de l’Union ont été violés a droit à un recours effectif devant un tribunal dans le respect des conditions prévues audit article [arrêt du 9 septembre 2020, Commissaire général aux réfugiés et aux apatrides (Rejet d’une demande ultérieure – Délai de recours), C‑651/19, EU:C:2020:681, point 27 et jurisprudence citée].

23      S’agissant, notamment, du délai de recours, il convient de relever que la directive 2013/32 ne prévoit pas de règles harmonisées en matière de délais de recours, mais, ainsi qu’il ressort de son article 46, paragraphe 4, laisse aux États membres le soin de prévoir des délais raisonnables pour que les demandeurs d’une protection internationale puissent exercer leur droit à un recours effectif, en précisant que les délais prévus ne doivent pas rendre cet exercice impossible ou excessivement difficile.

24      Par ailleurs, il y a lieu de rappeler que, conformément à une jurisprudence constante de la Cour, en l’absence de règles de l’Union en la matière, il appartient à l’ordre juridique interne de chaque État membre de régler les modalités procédurales des recours en justice destinés à assurer la sauvegarde des droits des justiciables, en vertu du principe de l’autonomie procédurale, à condition, toutefois, qu’elles ne soient pas moins favorables que celles régissant des situations similaires soumises au droit interne (principe d’équivalence) et qu’elles ne rendent pas impossible en pratique ou excessivement difficile l’exercice des droits conférés par le droit de l’Union (principe d’effectivité) [arrêt du 9 septembre 2020, Commissaire général aux réfugiés et aux apatrides (Rejet d’une demande ultérieure – Délai de recours), C‑651/19, EU:C:2020:681, point 34 et jurisprudence citée].

25      Partant, la fixation des délais de recours dans le cadre de la procédure de protection internationale relève du principe d’autonomie procédurale des États membres, dans le respect des principes d’équivalence et d’effectivité [arrêt du 9 septembre 2020, Commissaire général aux réfugiés et aux apatrides (Rejet d’une demande ultérieure – Délai de recours), C‑651/19, EU:C:2020:681, point 50].

26      En ce qui concerne, en premier lieu, le principe d’équivalence, il ressort de la jurisprudence de la Cour que le respect de celui-ci requiert un traitement égal des recours fondés sur une violation du droit national et de ceux, similaires, fondés sur une violation du droit de l’Union [arrêt du 9 septembre 2020, Commissaire général aux réfugiés et aux apatrides (Rejet d’une demande ultérieure – Délai de recours), C‑651/19, EU:C:2020:681, point 36 ainsi que jurisprudence citée].

27      Ainsi, il convient, d’une part, d’identifier les procédures ou les recours comparables et, d’autre part, de déterminer si les recours fondés sur le droit national sont traités d’une manière plus favorable que les recours ayant trait à la sauvegarde des droits que les particuliers tirent du droit de l’Union [arrêt du 9 septembre 2020, Commissaire général aux réfugiés et aux apatrides (Rejet d’une demande ultérieure – Délai de recours), C‑651/19, EU:C:2020:681, point 37 ainsi que jurisprudence citée].

28      S’agissant du caractère comparable des recours, il appartient à la juridiction nationale, qui a une connaissance directe des modalités procédurales applicables, de vérifier la similitude des recours concernés sous l’angle de leur objet, de leur cause et de leurs éléments essentiels [arrêt du 9 septembre 2020, Commissaire général aux réfugiés et aux apatrides (Rejet d’une demande ultérieure – Délai de recours), C‑651/19, EU:C:2020:681, point 38 ainsi que jurisprudence citée].

29      Pour ce qui est du traitement similaire des recours, il convient de rappeler que chaque cas où se pose la question de savoir si une disposition procédurale nationale concernant les recours fondés sur le droit de l’Union est moins favorable que celles concernant des recours similaires de nature interne doit être analysé par la juridiction nationale en tenant compte de la place des règles concernées dans l’ensemble de la procédure, du déroulement de ladite procédure et des particularités de ces règles, devant les diverses instances nationales [arrêt du 9 septembre 2020, Commissaire général aux réfugiés et aux apatrides (Rejet d’une demande ultérieure – Délai de recours), C‑651/19, EU:C:2020:681, point 39 ainsi que jurisprudence citée].

30      En ce qui concerne, en second lieu, le principe d’effectivité, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante de la Cour, chaque cas dans lequel se pose la question de savoir si une disposition procédurale nationale rend impossible ou excessivement difficile l’application du droit de l’Union doit être analysé en tenant compte de la place de cette disposition dans l’ensemble de la procédure, de son déroulement et des particularités de celle-ci, devant les diverses instances nationales. Dans cette perspective, il y a lieu, notamment, de prendre en considération, le cas échéant, la protection des droits de la défense, le principe de la sécurité juridique et le bon déroulement de la procédure [arrêt du 9 septembre 2020, Commissaire général aux réfugiés et aux apatrides (Rejet d’une demande ultérieure – Délai de recours), C‑651/19, EU:C:2020:681, point 42 ainsi que jurisprudence citée].

31      La Cour a ainsi reconnu la compatibilité avec le droit de l’Union de la fixation de délais raisonnables de recours à peine de forclusion dans l’intérêt de la sécurité juridique, en constatant que de tels délais ne sont pas de nature à rendre pratiquement impossible ou excessivement difficile l’exercice des droits conférés par l’ordre juridique de l’Union. La Cour a également jugé qu’il appartient aux États membres de déterminer, pour les réglementations nationales qui entrent dans le champ d’application du droit de l’Union, des délais en rapport avec, notamment, l’importance pour les intéressés des décisions à prendre, la complexité des procédures et de la législation à appliquer, le nombre de personnes susceptibles d’être concernées et les autres intérêts publics ou privés qui doivent être pris en considération [arrêt du 9 septembre 2020, Commissaire général aux réfugiés et aux apatrides (Rejet d’une demande ultérieure – Délai de recours), C‑651/19, EU:C:2020:681, point 53 ainsi que jurisprudence citée].

32      Enfin, ainsi qu’il résulte d’une jurisprudence constante de la Cour, il n’appartient pas à cette dernière de se prononcer sur l’interprétation du droit interne, cette mission incombant exclusivement à la juridiction de renvoi, laquelle doit déterminer si les exigences d’équivalence et d’effectivité sont satisfaites par les dispositions de la réglementation nationale pertinente. Toutefois, la Cour, statuant sur renvoi préjudiciel, peut, le cas échéant, apporter des précisions visant à guider la juridiction nationale dans son appréciation (arrêt du 29 octobre 2009, Pontin, C‑63/08, EU:C:2009:666, point 49 et jurisprudence citée).

33      C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient de répondre à la question posée par la juridiction de renvoi.

34      À cet égard, la réglementation nationale en cause au principal fixe à cinq jours, incluant les jours fériés et chômés, le délai de recours contre une décision d’irrecevabilité d’une demande ultérieure de protection internationale, lorsque le demandeur est placé en rétention. Ce faisant, cette réglementation raccourcit de moitié le délai de dix jours imparti aux demandeurs n’étant pas placés en rétention pour introduire un recours contre de telles décisions, ainsi qu’il ressort du point 9 de la présente ordonnance.

35      S’agissant, en premier lieu, de la question de savoir si le principe d’équivalence est en l’occurrence respecté, il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier, à la lumière de la jurisprudence évoquée aux points 26 à 29 de la présente ordonnance, si la réglementation nationale en cause au principal, en ce que, s’agissant des demandeurs placés en rétention, elle prévoit, d’une part, un délai de cinq jours pour former un recours contre une décision d’irrecevabilité d’une demande ultérieure de protection internationale, et, d’autre part, que ce délai inclut les jours fériés et chômés, respecte le principe d’équivalence.

36      En ce qui concerne, en second lieu, le respect du principe d’effectivité, d’une part, ainsi que la Cour l’a déjà constaté, le fait que les recours contre les décisions d’irrecevabilité d’une demande ultérieure de protection internationale sont soumis à un délai plus court est conforme à l’objectif de célérité dans le traitement des demandes de protection internationale, répondant à l’intérêt à la fois des États membres et des demandeurs d’une telle protection, conformément au considérant 18 de la directive 2013/32 [arrêt du 9 septembre 2020, Commissaire général aux réfugiés et aux apatrides (Rejet d’une demande ultérieure – Délai de recours), C‑651/19, EU:C:2020:681, point 54].

37      D’autre part, il ressort de la jurisprudence de la Cour que, en ce qu’elle assure un traitement plus rapide des demandes de protection internationale irrecevables, une réglementation nationale prévoyant le raccourcissement d’un tel délai de recours permet un traitement plus efficace des demandes présentées par les personnes qui sont bien fondées à bénéficier du statut de réfugié et contribue, ainsi, au bon déroulement de la procédure d’examen des demandes de protection internationale [voir arrêt du 9 septembre 2020, Commissaire général aux réfugiés et aux apatrides (Rejet d’une demande ultérieure – Délai de recours), C‑651/19, EU:C:2020:681, point 55 ainsi que jurisprudence citée].

38      Ainsi, une réglementation nationale prévoyant que le délai de recours contre une décision d’irrecevabilité d’une demande de protection internationale est fixé à cinq jours, y compris les jours fériés et chômés, lorsque le demandeur est placé en rétention, peut, en principe, être justifiée eu égard à l’objectif de célérité auquel tend la directive 2013/32, au principe de sécurité juridique et au bon déroulement de la procédure d’examen des demandes de protection internationale [arrêt du 9 septembre 2020, Commissaire général aux réfugiés et aux apatrides (Rejet d’une demande ultérieure – Délai de recours), C‑651/19, EU:C:2020:681, point 56].

39      Toutefois, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence de la Cour, afin de respecter les exigences du principe d’effectivité, ce délai doit être matériellement suffisant pour préparer et former un recours effectif [arrêt du 9 septembre 2020, Commissaire général aux réfugiés et aux apatrides (Rejet d’une demande ultérieure – Délai de recours), C‑651/19, EU:C:2020:681, point 57 ainsi que jurisprudence citée].

40      À cet égard, il convient d’observer que l’objet du recours contre une décision d’irrecevabilité d’une demande ultérieure de protection internationale est circonscrit à déterminer si des éléments ou des faits nouveaux par rapport à ceux examinés dans le cadre de la demande précédente, qui augmentent de manière significative la probabilité que le demandeur concerné remplisse les conditions requises pour prétendre au statut de bénéficiaire d’une protection internationale, sont apparus ou ont été présentés par ledit demandeur dans sa demande ultérieure. Ainsi, dans sa requête devant la juridiction saisie d’un tel recours, le demandeur doit, en substance, se borner à établir qu’il était fondé à considérer qu’il existerait de tels éléments ou de tels faits [voir, en ce sens, arrêt du 9 septembre 2020, Commissaire général aux réfugiés et aux apatrides (Rejet d’une demande ultérieure – Délai de recours), C‑651/19, EU:C:2020:681, points 59 et 60].

41      Le contenu utile de la requête dans le cadre d’un recours contre une décision d’irrecevabilité d’une demande ultérieure de protection internationale étant, dès lors, non seulement limité aux éléments évoqués au point précédent de la présente ordonnance, mais également étroitement lié à celui de la demande ultérieure ayant donné lieu à la décision d’irrecevabilité, il y a lieu de constater que la rédaction d’une telle requête ne présente pas, a priori, une complexité particulière exigeant un délai supérieur à cinq jours, incluant les jours fériés et chômés [voir, par analogie, arrêt du 9 septembre 2020, Commissaire général aux réfugiés et aux apatrides (Rejet d’une demande ultérieure – Délai de recours), C‑651/19, EU:C:2020:681, point 61].

42      Cela étant, il importe de rappeler que, dans le cadre du recours juridictionnel prévu à l’article 46 de la directive 2013/32, un certain nombre de droits procéduraux spécifiques sont garantis aux requérants, dont, notamment, ainsi qu’il ressort des articles 20 et 22 de la directive 2013/32, lus à la lumière du considérant 23 de celle-ci, la possibilité d’une assistance juridique et d’une représentation gratuites, ainsi que l’accès à un conseil juridique. Par ailleurs, l’article 23 de ladite directive assure au conseil juridique du demandeur l’accès aux informations versées au dossier de ce dernier sur la base duquel une décision est ou sera prise [arrêt du 9 septembre 2020, Commissaire général aux réfugiés et aux apatrides (Rejet d’une demande ultérieure – Délai de recours), C‑651/19, EU:C:2020:681, point 62].

43      Par conséquent, ainsi que la Cour l’a déjà précisé, un délai de recours ne saurait être considéré comme étant matériellement suffisant pour préparer et former un recours effectif que pour autant que l’accès du demandeur aux garanties procédurales mentionnées au point précédent de la présente ordonnance soit assuré dans un tel délai [arrêt du 9 septembre 2020, Commissaire général aux réfugiés et aux apatrides (Rejet d’une demande ultérieure – Délai de recours), C‑651/19, EU:C:2020:681, point 63].

44      Dans ces conditions, s’agissant, en l’occurrence, d’un délai imparti aux demandeurs de protection internationale placés en rétention, il incombe à la juridiction de renvoi de vérifier si, eu égard à la privation de la liberté de mouvement dont ces demandeurs font l’objet en raison de leur placement en rétention, et, compte tenu, notamment, des mesures adoptées par l’État membre concerné tant pour ce qui est des modalités procédurales relatives à l’accès desdits demandeurs à l’assistance juridique et à la représentation gratuites ainsi qu’à l’accès de leurs conseils juridiques à leurs dossiers que pour ce qui est de l’accès de ces conseils juridiques aux centres de rétention, un délai de forclusion de cinq jours, incluant les jours fériés et chômés, permet, dans la pratique, à tous ces demandeurs non seulement de se faire utilement conseiller, mais également de demander et d’obtenir, éventuellement, l’aide juridique, ainsi que d’introduire leurs recours après avoir accédé à leurs dossiers, ou, si, en revanche, un tel délai est excessivement court pour assurer, dans la pratique, à tous ces demandeurs une possibilité effective d’accéder à ces garanties procédurales.

45      Eu égard aux considérations qui précèdent, il y a lieu de répondre à la question posée que l’article 46 de la directive 2013/32, lu à la lumière de l’article 47 de la Charte, doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à une réglementation nationale soumettant le recours contre une décision d’irrecevabilité d’une demande ultérieure de protection internationale à un délai de forclusion de cinq jours, incluant les jours fériés et chômés, lorsque le demandeur concerné est placé en rétention, à condition, d’une part, que le principe d’équivalence soit respecté et, d’autre part, que l’accès effectif des demandeurs placés en rétention aux garanties procédurales reconnues aux demandeurs de protection internationale par le droit de l’Union soit assuré dans un tel délai. Il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier si la réglementation nationale en cause au principal répond à de telles exigences.

 Sur les dépens

46      La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens.

Par ces motifs, la Cour (sixième chambre) dit pour droit :

L’article 46 de la directive 2013/32/UE du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, relative à des procédures communes pour l’octroi et le retrait de la protection internationale, lu à la lumière de l’article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à une réglementation nationale soumettant le recours contre une décision d’irrecevabilité d’une demande ultérieure de protection internationale à un délai de forclusion de cinq jours, incluant les jours fériés et chômés, lorsque le demandeur concerné est placé en rétention, à condition, d’une part, que le principe d’équivalence soit respecté et, d’autre part, que l’accès effectif des demandeurs placés en rétention aux garanties procédurales reconnues aux demandeurs de protection internationale par le droit de l’Union soit assuré dans un tel délai.


Il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier si la réglementation nationale en cause au principal répond à de telles exigences.

Fait à Luxembourg, le 11 février 2021.

Le greffier

Le président de la VIème chambre

A. Calot Escobar

 

L. Bay Larsen


*      Langue de procédure : le français.

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