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Dieses Dokument ist ein Auszug aus dem EUR-Lex-Portal.

Dokument 62015CJ0200

Urteil des Gerichtshofs (Siebte Kammer) vom 16. Juni 2016.
Europäische Kommission gegen Republik Portugal.
Vertragsverletzung eines Mitgliedstaats – Art. 110 AEUV – Inländische Abgaben – Diskriminierende Besteuerung – Aus anderen Mitgliedstaaten eingeführte Gebrauchtkraftfahrzeuge – Bestimmung des Steuerwerts – Wertminderungssätze.
Rechtssache C-200/15.

ECLI-Identifikator: ECLI:EU:C:2016:453

ARRÊT DE LA COUR (septième chambre)

16 juin 2016 (*)

« Manquement d’État – Article 110 TFUE – Impositions intérieures – Impositions discriminatoires – Véhicules automobiles d’occasion importés des autres États membres – Détermination de la valeur imposable – Taux de dépréciation »

Dans l’affaire C‑200/15,

ayant pour objet un recours en manquement au titre de l’article 258 TFUE, introduit le 29 avril 2015,

Commission européenne, représentée par MM. M. Wasmeier et P. Guerra e Andrade, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie requérante,

contre

République portugaise, représentée par M. L. Inez Fernandes, Mme A. Cunha, MM. A. Brigas Afonso et N.  da Silva Vitorino, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

LA COUR (septième chambre),

composée de Mme C. Toader, président de chambre, Mme A. Prechal et M. E. Jarašiūnas (rapporteur), juges,

avocat général : Mme J. Kokott,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1        Par sa requête, la Commission européenne demande à la Cour de constater que, en appliquant, en vue de déterminer la valeur imposable des véhicules d’occasion introduits sur le territoire portugais en provenance d’un autre État membre, un système relatif au calcul de la dépréciation des véhicules qui ne tient pas compte de la valeur réelle de ceux-ci et, notamment, qui ne tient pas compte de la dépréciation subie par ces véhicules au cours de leur première année d’utilisation, ni d’aucune autre dépréciation dans le cas des véhicules de plus de cinq ans, la République portugaise a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 110 TFUE.

 Le cadre juridique

2        Aux termes de l’article 1er du código do imposto sobre veículos (code de la taxe sur les véhicules), introduit par la loi n° 22‑A/2007 [Diário da República, 1re série, n° 124, du 29 juin 2007, p. 4164-(2)] :

« La taxe sur les véhicules est régie par le principe d’équivalence et vise à répercuter sur les contribuables les coûts que ceux-ci engendrent dans les domaines de l’environnement, des infrastructures routières et des accidents de la route, en application d’une règle générale d’égalité fiscale. »

3        Conformément à l’article 2 de ce code, tel que modifié par la loi n° 66‑B/2012, du 31 décembre 2012 (Diário da República, 1re série, n° 252, suplemento, du 31 décembre 2012), sont soumis à cette taxe les véhicules automobiles légers destinés au transport de passagers, les véhicules automobiles légers mixtes, les véhicules automobiles légers destinés au transport de marchandises, les véhicules automobiles de plus de 3,5 tonnes destinés au transport de passagers et disposant d’une capacité maximale de neuf places, les caravanes, ainsi que les motocycles, tricycles et quadricycles. Ne sont pas soumis à cette taxe les véhicules non motorisés, les ambulances et les véhicules automobiles légers destinés au transport de marchandises sans cabine intégrée à la carrosserie ni traction à quatre roues.

4        Conformément à l’article 5 du même code, tel que modifié par la loi n° 66‑B/2012, les faits générateurs de la taxe sur les véhicules sont la fabrication, l’assemblage, l’admission ou l’importation sur le territoire national de véhicules imposables dont l’immatriculation au Portugal est obligatoire. Le terme « admission » vise l’entrée sur le territoire national d’un véhicule originaire d’un autre État membre ou mis en libre pratique dans ce dernier. Le terme « importation » vise l’entrée sur le territoire national d’un véhicule originaire d’un pays tiers.

5        L’article 6 du code de la taxe sur les véhicules dispose que cette taxe devient exigible, notamment, au moment de l’introduction de la demande de mise à la consommation par les concessionnaires agréés et les concessionnaires reconnus ou au moment de la présentation de la déclaration en douane du véhicule ou de la déclaration complémentaire de véhicules par les particuliers.

6        Intitulé « Taux – Véhicules d’occasion », l’article 11 dudit code, modifié en dernier lieu par la loi n° 55‑A/2010, du 31 décembre 2010 (Diário da República, n° 253, 1re série, suplemento, du 31 décembre 2010), dispose :

« 1.      La taxe grevant les véhicules portant une immatriculation [de l’Union] définitive délivrée par d’autres États membres de l’Union européenne est sujette à une liquidation provisoire sur la base des pourcentages de réduction prévus au tableau D appliqués au taux prévu par le barème correspondant, lesquels sont associés à la dépréciation sociale moyenne des véhicules sur le marché national, calculée en fonction de la dépréciation commerciale moyenne corrigée du coût environnemental correspondant :

TABLEAU D

Temps d’utilisation

Pourcentage réduction

Entre 1 et 2 ans

20

Entre 2 et 3 ans

28

Entre 3 et 4 ans

35

Entre 4 et 5 ans

43

Plus de 5 ans

52


2.      Aux fins de l’application du paragraphe précédent, on entend par “temps d’utilisation” la période qui s’est écoulée entre la délivrance de la première immatriculation et des documents correspondants par l’entité compétente et l’expiration du délai pour la présentation de la déclaration en douane de véhicules.

3.      Sans préjudice de la liquidation provisoire effectuée, l’assujetti peut, dès lors qu’il estime que le montant de la taxe dont il s’est acquitté en vertu du paragraphe 1 excède celui de la taxe calculée en fonction de la formule indiquée ci-dessous, demander au directeur des douanes, moyennant le paiement préalable d’une taxe devant être déterminée par un arrêté du membre du gouvernement chargé des finances, et jusqu’à l’expiration du délai de paiement indiqué à l’article 27, paragraphe 1, que la formule suivante soit appliquée pour calculer la taxation à laquelle le véhicule est soumis en vue de réaliser la liquidation définitive de la taxe :

ISV = (V/VR) × (Y + C)

où :

ISV      représente le montant de la taxe à payer ;

V      représente la valeur commerciale du véhicule, fondée sur la valeur moyenne de référence indiquée dans les publications spécialisées du secteur, présentées par l’intéressé, pondérée, moyennant évaluation du véhicule, dans le cas où cela se justifie, en fonction de facteurs concrets déterminés, comme le kilométrage, l’état mécanique et l’état de conservation ;

VR      est le prix de vente au public de véhicules identiques de la même année que celle de la première immatriculation du véhicule à taxer, conformément aux déclarations de l’intéressé, étant considérés comme tels les véhicules de la même marque, du même modèle et disposant du même système de propulsion, ou, dans le cas où ces informations ne sont pas disponibles, tout véhicule similaire mis sur le marché national l’année où le véhicule à introduire sur le marché a été immatriculé pour la première fois ;

Y      représente le montant de la taxe calculé en fonction de la cylindrée, en tenant compte du barème et de la taxe en vigueur au moment de l’exigibilité de la taxe et qui sont applicables au véhicule ;

C      est le coût de l’impact environnemental, applicable aux véhicules relevant du tableau A, en vigueur au moment de l’exigibilité de la taxe et dont la valeur correspond à la composante environnementale de ce même barème.

4.      En l’absence de demande d’évaluation formulée conformément au paragraphe précédent, le redevable est présumé accepter comme définitive la liquidation de la taxe acquittée en application du barème défini au paragraphe 1. »

 La procédure précontentieuse

7        À la suite d’un échange de courriers intervenu entre les services de la Commission et l’administration portugaise, la Commission a, le 22 novembre 2012, adressé à la République portugaise une lettre de mise en demeure dans laquelle elle estimait que l’article 11 du code de la taxe sur les véhicules était contraire à l’article 110 TFUE. La Commission relevait, à cet égard, que ledit article 11 entraînait une discrimination à l’égard des véhicules automobiles d’occasion provenant des autres États membres dans la mesure où le montant de ladite taxe calculé selon ce dernier article ne reflétait pas la dépréciation réelle subie par les véhicules automobiles d’occasion similaires déjà immatriculés au Portugal et, en particulier, dans la mesure où, d’une part, aucune dépréciation de la valeur des véhicules automobiles d’occasion importés de moins d’un an n’était prise en compte et, d’autre part, la dépréciation des véhicules de plus de cinq ans était plafonnée à 52 %.

8        Dans sa lettre en réponse du 30 janvier 2013, la République portugaise a contesté ce grief. Elle y a fait valoir que le régime national de la taxation des véhicules automobiles d’occasion provenant des autres États membres n’était pas discriminatoire, car les barèmes forfaitaires et la possibilité pour les assujettis de demander une expertise du véhicule, prévus à l’article 11 du code de la taxe sur les véhicules, étaient de nature à garantir que le montant de cette taxe n’excédait pas le montant de la taxe résiduelle incorporée dans la valeur des véhicules similaires déjà immatriculés au Portugal.

9        N’étant pas satisfaite de cette réponse, la Commission a, par lettre du 27 janvier 2014, adressé à la République portugaise un avis motivé dans lequel elle relevait à nouveau que le mode de calcul de la taxe sur les véhicules automobiles d’occasion provenant des autres États membres tel que prévu par la réglementation nationale en cause constituait une violation de l’article 110 TFUE en ce que la dépréciation réelle desdits véhicules n’était pas prise en compte aux fins du calcul du montant de cette taxe.

10      La République portugaise a répondu à l’avis motivé par lettre du 28 mars 2014 en maintenant sa position.

11      Dans ces conditions, la Commission a décidé d’introduire le présent recours.

 Sur le recours

 Argumentation des parties

12      La Commission fait valoir que le taux de la taxe sur les véhicules d’occasion admis au Portugal, calculé en fonction d’un barème forfaitaire, ne reflète pas de manière appropriée la dépréciation de ces véhicules, dès lors que, ainsi qu’il résulte de l’article 11, paragraphe 1, du code de la taxe sur les véhicules, la dépréciation des véhicules utilisés depuis moins d’un an n’est pas prise en compte et que celle des véhicules de plus de cinq ans est plafonnée à 52 %. Cette disposition est donc, selon elle, discriminatoire.

13      La Commission considère que, ainsi que la Cour l’a déjà relevé dans les arrêts du 19 septembre 2002, Tulliasiamies et Siilin (C‑101/00, EU:C:2002:505, point 78) ainsi que du 20 septembre 2007, Commission/Grèce (C‑74/06, EU:C:2007:534, point 30), la dépréciation d’un véhicule automobile commence dès son achat ou sa mise en service. Or, l’article 11 du code de la taxe sur les véhicules aurait pour effet que les véhicules automobiles d’occasion de l’Union ayant moins d’un an admis au Portugal sont taxés comme les véhicules neufs, ce qui constitue, selon elle, une violation de l’article 110 TFUE.

14      En outre, les véhicules automobiles continuant à perdre de la valeur au-delà de cinq années d’utilisation, il en résulterait que les véhicules automobiles d’occasion provenant des autres États membres utilisés depuis plus de cinq ans sont frappés d’une taxe d’un montant plus important que les véhicules automobiles d’occasion similaires initialement mis sur le marché au Portugal, ce qui serait également contraire à l’article 110 TFUE.

15      Par ailleurs, la Commission relève que, aux termes de l’article 11 du code de la taxe sur les véhicules, une fois que l’établissement provisoire du montant de cette taxe est effectué sur la base du barème forfaitaire prévu à cet article, l’assujetti est tenu de payer la taxe dans un délai de dix jours ouvrables. Si cet assujetti considère que ce montant est excessif, il peut demander, dans ce même délai, l’évaluation du véhicule en vue de l’établissement définitif du montant de la taxe. Cependant, la réglementation portugaise ne prévoirait aucun délai pour effectuer cette évaluation, en sorte que l’administration nationale percevrait la taxe en cause entre la date de son établissement provisoire et celle de son établissement définitif. En pratique, dans tous les cas où il s’agit d’un véhicule automobile d’occasion importé au Portugal d’un autre État membre et ayant moins d’un an ou ayant subi une dépréciation supérieure à 52 %, l’assujetti serait contraint de solliciter une expertise afin de vérifier que le montant de la taxe sur les véhicules n’excède pas la taxe résiduelle incorporée dans la valeur de véhicules similaires immatriculés au Portugal et qu’il n’est donc pas excessif.

16      La Commission rappelle que, selon la jurisprudence de la Cour, d’une part, il ne suffit pas, pour éviter qu’un système d’imposition donné ne soit contraire à l’article 110 TFUE, que le propriétaire d’un véhicule ait la possibilité de demander une évaluation équitable et, d’autre part, si la loi nationale a prévu un barème forfaitaire, il est nécessaire que ce barème permette de fixer la valeur des véhicules d’occasion à un niveau très proche de leur valeur réelle et que l’assujetti ait la possibilité de contester l’application d’un tel mode de calcul. Or, les barèmes forfaitaires prévus au code de la taxe sur les véhicules ne permettraient pas d’établir la valeur des véhicules automobiles d’occasion conformément à ces exigences, et ce d’autant plus que ces barèmes seraient conçus sur la base d’un critère unique, à savoir l’ancienneté du véhicule, sans prévoir la prise en compte du kilométrage.

17      La République portugaise conclut au rejet du recours. Elle fait valoir que le mode de calcul de la taxe fondé sur l’évaluation de chaque véhicule présente, comme le reconnaît, selon elle, la Cour dans son arrêt du 22 février 2001, Gomes Valente (C‑393/98, EU:C:2001:109), d’importantes difficultés et entraîne des coûts élevés tant pour l’administration fiscale que pour les contribuables, ainsi que des pertes de temps et une lourde charge administrative. L’établissement de barèmes généraux tenant compte de l’ancienneté, du kilométrage, de l’état général, du mode de propulsion, de la marque ou du modèle du véhicule présenterait également des difficultés.

18      La République portugaise aurait, en exécution de l’arrêt du 22 février 2001, Gomes Valente (C‑393/98, EU:C:2001:109), choisi un système mixte d’imposition des véhicules automobiles d’occasion en provenance des autres États membres fondé sur deux modes de calcul de la taxe, à savoir un barème forfaitaire et une évaluation des véhicules. Un tel système serait en vigueur depuis l’année 2002 et aurait, par ailleurs, reçu le soutien implicite de la Commission dans le cadre de la mise en œuvre dudit arrêt. Dans ce système, un barème forfaitaire serait applicable à la majorité des véhicules imposables, tandis que l’évaluation serait effectuée, en principe, pour les véhicules non couverts par ce barème, si l’assujetti le demande. La République portugaise aurait ainsi cherché à profiter des avantages de chacun desdits modes de calcul et à éviter les inconvénients administratifs résultant de l’évaluation de chaque véhicule importé, ainsi que les difficultés de conception et d’application d’un barème exhaustif tenant compte de tous les critères susmentionnés.

19      Par ailleurs, contrairement à ce qu’affirme la Commission, l’assujetti ne devrait pas payer la taxe sur les véhicules immédiatement, sur le fondement d’un établissement provisoire de la taxe. Ce dernier ne deviendrait définitif et cette taxe ne serait exigible que dans le cas où l’assujetti ne demande pas une évaluation du véhicule.

20      La République portugaise ajoute que l’élaboration du barème forfaitaire figurant à l’article 11 du code de la taxe sur les véhicules est fondée sur des raisons d’ordre pratique, étant donné que la plupart des véhicules automobiles d’occasion importés au Portugal et originaires des autres États membres sont des véhicules ayant entre un an et cinq ans. En ce qui concerne les autres véhicules, l’assujetti aurait intérêt à demander leur évaluation, ce mode de calcul de la taxe étant probablement plus favorable. Par ailleurs, l’application du barème forfaitaire s’avérerait souvent plus avantageuse pour les véhicules automobiles de plus de cinq ans, notamment lorsqu’il s’agit de véhicules classiques ou de collection, compte tenu de leur valeur historique.

21      En conclusion, le système mixte d’imposition des véhicules d’occasion serait conçu de manière à exclure tout effet discriminatoire et garantirait que le montant de la taxe due n’excède, en aucun cas, le montant résiduel de la taxe incorporée dans la valeur de véhicules automobiles d’occasion similaires immatriculés sur le territoire national. Il serait donc compatible avec l’article 110 TFUE.

 Appréciation de la Cour

22      À titre liminaire, il convient de relever que la Commission demande, dans le petitum de sa requête, figurant au point 1 du présent arrêt, de constater que la République portugaise a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 110 TFUE en ce qu’elle applique, en vue de déterminer la valeur imposable des véhicules introduits sur le territoire national en provenance des autres États membres, un mode de calcul de la dépréciation de ces véhicules « qui ne tient pas compte de la valeur réelle de ceux-ci et, notamment, qui ne tient pas compte de la dépréciation subie par ces véhicules au cours de leur première année d’utilisation, ni d’aucune autre dépréciation dans le cas des véhicules de plus de cinq ans ». À cet égard, même si la Commission y emploie le terme « notamment », il ressort du corps de sa requête que la Commission formule, en réalité, deux griefs, à savoir, d’une part, l’absence, aux fins du calcul de la taxe sur les véhicules en cause, de la prise en compte de la dépréciation des véhicules automobiles utilisés depuis moins d’un an et, d’autre part, le plafonnement de la dépréciation des véhicules automobiles utilisés depuis plus de cinq ans à 52 %. Dans ces conditions, le recours introduit par la Commission doit être compris comme portant sur ces deux griefs.

23      Ainsi qu’il ressort d’une jurisprudence constante de la Cour, l’article 110 TFUE a pour objectif d’assurer la libre circulation des marchandises entre les États membres dans des conditions normales de concurrence par l’élimination de toute forme de protection pouvant résulter de l’application d’impositions intérieures discriminatoires à l’égard des produits originaires d’autres États membres (voir, notamment, arrêts du 18 janvier 2007, Brzeziński, C‑313/05, EU:C:2007:33, point 27, et du 7 avril 2011, Tatu, C‑402/09, EU:C:2011:219, point 34).

24      Cet article est violé lorsque l’imposition frappant le produit importé et celle frappant le produit national similaire sont calculées de façon différente et suivant des modalités différentes aboutissant, ne fût-ce que dans certains cas, à une imposition supérieure du produit importé (arrêts du 22 février 2001, Gomes Valente, C‑393/98, EU:C:2001:109, point 21 ; du 19 septembre 2002, Tulliasiamies et Siilin, C‑101/00, EU:C:2002:505, point 53, ainsi que du 20 septembre 2007, Commission/Grèce, C‑74/06, EU:C:2007:534, point 25).

25      Ainsi, la perception par un État membre d’une taxe sur les véhicules d’occasion en provenance d’un autre État membre est contraire à l’article 110 TFUE lorsque le montant de la taxe, calculé sans prise en compte de la dépréciation réelle du véhicule, excède le montant de la taxe résiduelle incorporé dans la valeur des véhicules automobiles d’occasion similaires déjà immatriculés sur le territoire national (voir, notamment, arrêts du 9 mars 1995, Nunes Tadeu, C‑345/93, EU:C:1995:66, point 20, et du 22 février 2001, Gomes Valente, C‑393/98, EU:C:2001:109, point 23).

26      Pour l’application de l’article 110 TFUE, et en particulier pour les besoins de la comparaison entre le régime de taxation des véhicules d’occasion importés et celui des véhicules d’occasion qui sont achetés sur place, qui constituent des produits similaires ou concurrents, il y a lieu de prendre en considération non seulement le taux de l’imposition intérieure frappant directement ou indirectement les produits nationaux et les produits importés, mais également l’assiette et les modalités de la taxe en cause. Plus précisément, un État membre ne peut percevoir une taxe sur les véhicules d’occasion importés assise sur une valeur supérieure à la valeur réelle du véhicule, avec pour conséquence une taxation plus lourde de ceux-ci par rapport à celle des véhicules d’occasion similaires disponibles sur le marché national. La valeur du véhicule d’occasion importé retenue par l’administration en tant que base d’imposition doit refléter fidèlement la valeur d’un véhicule similaire déjà immatriculé sur le territoire national (voir arrêt du 20 septembre 2007, Commission/Grèce, C‑74/06, EU:C:2007:534, points 27 et 28 ainsi que jurisprudence citée).

27      En l’espèce, l’article 11, paragraphe 1, du code de la taxe sur les véhicules prévoit, aux fins du calcul de la taxe applicable aux véhicules d’occasion importés d’autres États membres, la prise en compte d’une dépréciation selon un barème forfaitaire fixant notamment à 20 % la dépréciation d’un véhicule automobile utilisé pendant une durée d’un à deux ans et à 52 % la dépréciation d’un véhicule automobile utilisé depuis plus de cinq ans.

28      Il en découle que la République portugaise applique aux véhicules automobiles d’occasion importés d’autres États membres un système de taxation dans lequel, d’une part, la taxe due pour un véhicule utilisé depuis moins d’un an est égale à la taxe frappant un véhicule neuf similaire mis en circulation au Portugal et, d’autre part, la dépréciation des véhicules automobiles utilisés depuis plus de cinq ans est plafonnée, aux fins du calcul du montant de cette taxe, à 52 %, quel que soit l’état général réel de ces véhicules.

29      Or, il est constant que la valeur marchande d’un véhicule automobile commence à diminuer dès son achat ou sa mise en circulation et que cette diminution se poursuit au-delà de la cinquième année de son utilisation (voir, en ce sens, arrêt du 19 septembre 2002, Tulliasiamies et Siilin, C‑101/00, EU:C:2002:505, point 78).

30      Dès lors, la réglementation nationale en cause a pour conséquence que le montant de la taxe d’immatriculation payable pour les véhicules automobiles d’occasion importés au Portugal des autres États membres et utilisés depuis moins d’un an ou depuis plus de cinq ans est calculé sans prendre en compte la dépréciation réelle de ces véhicules.

31      Par conséquent, la réglementation nationale en cause n’assure pas que, dans les cas indiqués au point précédent du présent arrêt, les véhicules d’occasion importés d’un autre État membre soient soumis à une taxe d’un montant égal à celui de la taxe frappant les véhicules d’occasion similaires disponibles sur le marché national, ce qui est contraire à l’article 110 TFUE.

32      À cet égard, ne saurait être retenu l’argument de la République portugaise selon lequel l’application du barème forfaitaire s’avère souvent plus avantageuse en ce qui concerne les véhicules automobiles de plus de cinq ans, notamment lorsqu’il s’agit de véhicules classiques ou de collection compte tenu de leur valeur historique. En effet, même si cette affirmation était étayée, il demeurerait que ce barème est, au moins dans certains des cas indiqués au point 30 du présent arrêt, discriminatoire.

33      Il y a lieu également de rejeter l’argument de la République portugaise selon lequel le système mixte d’imposition des véhicules d’occasion fondé sur un barème forfaitaire et, en complément, dès lors que l’assujetti le souhaite, sur l’évaluation du véhicule, est organisé de manière à exclure tout effet discriminatoire, de telle sorte qu’il est compatible avec l’article 110 TFUE.

34      En effet, il ne suffit pas, pour éviter qu’un système de taxation ne soit contraire à cet article, que l’assujetti ait la possibilité de demander une expertise du véhicule concerné (voir, en ce sens, arrêt du 20 septembre 2007, Commission/Grèce, C‑74/06, EU:C:2007:534, point 41). Cette possibilité n’amoindrit pas le fait que le barème forfaitaire qui s’applique, à moins que l’assujetti ne sollicite une expertise du véhicule, est discriminatoire et ne permet pas d’assurer que les véhicules d’occasion importés d’autres États membres soient soumis à une taxe n’excédant pas le montant de celui de la taxe résiduelle incorporé dans la valeur des véhicules d’occasion similaires déjà immatriculés sur le territoire national.

35      De même, il convient d’écarter les arguments de la République portugaise tirés du fait que l’article 11 du code de la taxe sur les véhicules reposerait sur des raisons d’ordre pratique, étant donné que, d’une part, la plupart des véhicules automobiles d’occasion importés au Portugal des autres États membres seraient des véhicules ayant entre un an et cinq ans d’ancienneté, et que, d’autre part, tant l’application du mode de calcul de la taxe fondé sur l’évaluation de tous les véhicules automobiles concernés que la conception et l’application d’un tableau tenant compte exhaustivement de tous les critères, tels que l’ancienneté, le kilométrage, l’état général, le mode de propulsion, ainsi que la marque ou le modèle du véhicule automobile, généreraient des inconvénients administratifs, des coûts élevés et des pertes de temps.

36      À cet égard, en ce qui concerne les difficultés pratiques liées à l’estimation de la valeur réelle des véhicules d’occasion aux fins du calcul de la taxe litigieuse, à supposer que leur existence soit établie, de telles difficultés ne sauraient être de nature à justifier l’application d’impositions intérieures discriminatoires à l’égard des produits originaires d’autres États membres, contraires à l’article 110 TFUE (voir arrêt du 9 mars 1995, Nunes Tadeu, C‑345/93, EU:C:1995:66, point 19).

37      En outre, la Cour a déjà jugé que la prise en compte de la dépréciation réelle des véhicules ne doit pas nécessairement donner lieu à une évaluation ou à une expertise de chacun de ceux-ci. En effet, en évitant la lourdeur inhérente à un tel système, un État membre peut fixer, au moyen de barèmes forfaitaires déterminés par une disposition législative, réglementaire ou administrative, et calculés sur la base de critères tels que l’ancienneté, le kilométrage, l’état général, le mode de propulsion, la marque ou le modèle du véhicule, une valeur des véhicules d’occasion qui, en règle générale, soit très proche de leur valeur réelle (arrêts du 22 février 2001, Gomes Valente, C‑393/98, EU:C:2001:109, point 24, et du 20 septembre 2007, Commission/Grèce, C‑74/06, EU:C:2007:534, point 29).

38      Ainsi, s’il ne découle pas de cette jurisprudence que les barèmes forfaitaires doivent être conçus sur la base de l’ensemble desdits critères, celle-ci ne contenant, ainsi que le confirme l’emploi des termes « tels que », qu’une liste exemplative et non exhaustive de critères d’élaboration desdits barèmes, il importe néanmoins que, ainsi qu’il ressort des points 24 à 26 du présent arrêt, l’application de ces barèmes n’aboutisse pas, ne fût-ce que dans certains cas, à une imposition supérieure des véhicules d’occasion importés des autres États membres par rapport à celle des véhicules similaires déjà immatriculés dans l’État membre concerné.

39      À cet égard, la Cour a déjà énoncé que la prise en compte de plusieurs facteurs de dépréciation, tels que ceux indiqués au point 37 du présent arrêt, était de nature à garantir que le barème forfaitaire reflète de manière beaucoup plus précise la dépréciation réelle des véhicules et permet d’aboutir à l’objectif d’une taxation des véhicules d’occasion importés qui ne soit en aucun cas supérieure au montant de la taxe résiduelle incorporé dans la valeur des véhicules d’occasion similaires déjà immatriculés sur le territoire national (voir, en ce sens, arrêt du 22 février 2001, Gomes Valente, C‑393/98, EU:C:2001:109, point 28).

40      Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que le recours de la Commission doit être considéré comme fondé.

41      Par conséquent, il convient de constater que la République portugaise, en appliquant, en vue de déterminer la valeur imposable des véhicules d’occasion introduits sur le territoire portugais en provenance d’un autre État membre, un système relatif au calcul de la dépréciation des véhicules qui ne tient pas compte de la dépréciation subie par ces véhicules au cours de leur première année d’utilisation, ni de la dépréciation excédant 52 % dans le cas des véhicules utilisés depuis plus de cinq ans, a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 110 TFUE.

 Sur les dépens

42      Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure de la Cour, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La Commission ayant conclu à la condamnation de la République portugaise et celle-ci ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de condamner cette dernière aux dépens.

Par ces motifs, la Cour (septième chambre) déclare et arrête :

1)      La République portugaise, en appliquant, en vue de déterminer la valeur imposable des véhicules d’occasion introduits sur le territoire portugais en provenance d’un autre État membre, un système relatif au calcul de la dépréciation des véhicules qui ne tient pas compte de la dépréciation subie par ces véhicules au cours de leur première année d’utilisation, ni de la dépréciation excédant 52 % dans le cas des véhicules utilisés depuis plus de cinq ans, a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 110 TFUE.

2)      La République portugaise est condamnée aux dépens.

Signatures


* Langue de procédure : le portugais.

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