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Document 61992TJ0082
Judgment of the Court of First Instance (Fourth Chamber) of 3 March 1994. # Manuel Cortes Jimenez and others v Commission of the European Communities. # Officials - Action for annulment - Confirmatory act - Conditions of admission to a competition - University studies certified by a diploma - Studies of short duration completed in Spain. # Case T-82/92.
Rozsudek Soudu prvního stupně (čtvrtého senátu) ze dne 3. března 1994.
Manuel Cortes Jimenez a další proti Komisi Evropských společenství.
Úředníci - Žaloba na neplatnost - Potvrzující akt.
Věc T-82/92.
Rozsudek Soudu prvního stupně (čtvrtého senátu) ze dne 3. března 1994.
Manuel Cortes Jimenez a další proti Komisi Evropských společenství.
Úředníci - Žaloba na neplatnost - Potvrzující akt.
Věc T-82/92.
ECLI identifier: ECLI:EU:T:1994:24
ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)
3 mars 1994 ( *1 )
«Fonctionnaires - Recours en annulation - Acte confirmatif - Conditions d'admission à un concours - Études universitaires sanctionnées par un diplôme - Études de type court accomplies en Espagne»
Dans l'affaire T-82/92,
1) Manuel Cortes Jimenez, demeurant à Bruxelles,
2) Mariano de la Sen Cardenal, demeurant à Bruxelles,
3) Dolores Hinojal Capdevilla, demeurant à Londres,
4) Julian Perez Martin, demeurant à Niederanven (Luxembourg),
5) Fernando Medina Fernandez, demeurant à Luxembourg,
6) Angeles Hermosa Lopez, demeurant à Luxembourg, et
7) Carlos Arribas Negro, demeurant à Varèse (Italie),
tous fonctionnaires de la Commission des Communautés européennes, représentés par Mes Georges Vandersanden et Laure Levi, avocats au barreau de Bruxelles, ayant élu domicile à Luxembourg en l'étude de Me Alex Schmitt, 62, avenue Guillaume,
parties requérantes,
contre
Commission des Communautés européennes, représentée par M. Gianluigi Valsesia, conseiller juridique principal, et Mme Ana Maria Alves Vieira, membre du service juridique, en qualité d'agents, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M. Georgios Kremlis, membre du service juridique, Centre Wagner, Kirchberg,
partie défenderesse,
ayant pour objet l'annulation des décisions du 6 décembre 1991 des jurys des concours généraux COM/A/720 (pour les requérants sous 2 à 7) et COM/A/721 (pour le requérant sous 1), confirmant le rejet des candidatures des requérants à ces concours, d'une part, et la reconnaissance du droit des requérants à être inscrits sur la liste des candidats admissibles à ces concours, d'autre part,
LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE- INSTANCE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (quatrième chambre),
composé de MM. C. P. Briët, président, A. Saggio et H. Kirschner, juges,
greffier: M. J. Palacio Gonzalez, administrateur,
vu la procédure écrite et à la suite de la procédure orale du 27 janvier 1994,
rend le présent
Arrêt
Les faits à l'origine du litige
1 |
Le 28 février 1991, la Commission a publié au Journal officiel des Communautés européennes no C 52 A deux avis de concours généraux visant la constitution d'une liste de réserve pour le recrutement, respectivement, d'administrateurs de grade A 7/A 6 (concours COM/A/720) et d'administrateurs adjoints de grade A 8 (COM/A/721). |
2 |
En ce qui concerne la condition d'admission relative aux titres ou diplômes requis (point II.B.2), les deux avis de concours sont identiques: les candidats doivent avoir accompli «des études universitaires complètes sanctionnées par un diplôme. Le jury tiendra compte à cet égard des différentes structures d'enseignement». La version espagnole des deux avis utilise à cet égard les termes de «estudios universitarios superiores completos» (études universitaires supérieures complètes). L'avis de concours COM/A/720 contient, en outre, une référence explicite à un «guide à l'intention des candidats», publié dans le même numéro du Journal officiel des Communautés européennes, et notamment au titre B.3 de ce guide, relatif aux études et diplômes. Il y est indiqué, entre autres, que «le niveau des études accomplies par les candidats est vérifié et évalué par le jury et, le cas échéant, par des spécialistes du système d'enseignement du pays dont le candidat est ressortissant». |
3 |
Le requérant M. Cortes Jimenez s'est porté candidat au concours COM/A/721, alors que les autres requérants ont posé leurs candidatures au concours COM/A/720. A cette occasion, ils ont produit des diplômes espagnols leur conférant, respectivement, les titres de «diplomado» (diplômé), de «ingeniero técnico» (ingénieur technicien) et de «arquitecto técnico» (architecte technicien) qu'ils avaient obtenus après avoir accompli, en Espagne, des études universitaires de trois ans (appelées «diplomatura»). |
4 |
Par lettres administratives types, datées respectivement des 14 et 15 octobre 1991, le chef de l'unité «recrutement» de la Commission a informé les requérants que les jurys de concours avaient rejeté leurs candidatures au motif que leurs «titres ou diplômes ne correspondaient pas aux conditions exigées pour ce concours». Il rappelait que les candidats devaient «prouver avoir réalisé des études universitaires supérieures complètes sanctionnées par un diplôme» et concluait: «Tel n'étant pas votre cas, le jury a dû prendre la décision mentionnée.» |
5 |
Faisant usage d'une possibilité expressément prévue dans la partie IV de chaque avis de concours, les requérants ont, par des lettres datées respectivement du 13 et du 19 novembre 1991, demandé aux présidents de jury de procéder à un réexamen de leurs candidatures. Dans leurs demandes, ils ont fait valoir, en substance,
|
6 |
Par lettres administratives du 6 décembre 1991, les requérants ont été informés que les jurys de concours avaient «réexaminé» leurs dossiers et avaient dû «confirmer (la) décision initiale de ne pas admettre» leurs candidatures, au motif que «l'avis de concours stipulait expressément que les candidats devaient avoir réalisé des études universitaires supérieures complètes et ceci en accord avec les différentes structures d'enseignement... Étant donné que votre diplôme n'est pas du niveau de la 'licenciatura', le jury n'a pas pu accepter votre requête». |
7 |
Les requérants ont introduit, entre le 27 février et le 5 mars 1992, des réclamations à l'encontre de ces dernières décisions de rejet, en soulevant les mêmes moyens et arguments que dans les demandes de réexamen susmentionnées. Ces réclamations n'ont donné lieu à aucune décision explicite de la part de la Commission. |
Procédure et conclusions des parties
8 |
C'est dans ces conditions que les requérants ont introduit le présent recours, qui a été enregistré au greffe du Tribunal le 29 septembre 1992. Par mémoire déposé le 5 novembre 1992, la Commission a soulevé une exception d'irrecevabilité, qui, par ordonnance du Tribunal (quatrième chambre) du 22 janvier 1993, a été jointe au fond. En même temps, il a été procédé, par cette ordonnance, à une première mesure d'organisation de la procédure. La procédure écrite a suivi un cours régulier. Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (quatrième chambre) a décidé d'ouvrir la procédure orale sans procéder à des mesures d'instruction préalables. Il a toutefois posé, en vertu des articles 21, deuxième alinéa, et 46, premier alinéa, du statut (CEE) de la Cour de justice, des questions au gouvernement espagnol et a invité la Commission à produire certains documents. |
9 |
La procédure orale s'est déroulée le 27 janvier 1994. Les représentants des parties ont été entendus en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions posées par le Tribunal. |
10 |
Les requérants concluent à ce qu'il plaise au Tribunal:
La Commission conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:
|
Sur les conclusions visant à l'annulation des décisions de ne pas admettre les requérants à participer aux concours
Sur la recevabilité
Arguments des parties
11 |
Dans son exception d'irrecevabilité, la Commission soutient que la phase précontentieuse s'est déroulée à l'encontre d'actes purement confirmatifs. En effet, les actes initiaux faisant grief aux requérants seraient représentés par les décisions des jurys respectifs, portant rejet de leurs candidatures, alors que les lettres adressées postérieurement aux requérants suite à leurs demandes de réexamen ne contiendraient, en elles-mêmes, aucun élément nouveau susceptible de les distinguer de ces actes initiaux. A cet égard, la Commission invoque la jurisprudence de la Cour en la matière (voir les arrêts du 10 décembre 1980, Grasselli/Commission, 23/80, Rec. p. 3709, point 18, et du 20 mai 1987, Gherardi Dandolo/Commission,214/85, Rec. p. 2163, points 16 à 18, ainsi que l'ordonnance du 8 novembre 1988, Valle Fernandez/Commission, 264/88 et 264/88 R, Rec. p. 6341, point 12). |
12 |
Les requérants rétorquent que les actes attaqués constituent, dans leur chef, de nouveaux actes faisant grief, pris à l'issue d'un réexamen de leurs dossiers. Comme il ressortirait du texte même des avis de concours, les jurys seraient obligés, en cas de demande formulée par un candidat, de procéder à un nouvel examen, c'est-à-dire à une nouvelle appréciation du dossier du candidat qui a, le cas échéant, porté de nouveaux éléments à la connaissance du jury. En l'espèce, les requérants auraient présenté une attestation émanant d'un ministère espagnol et datée du 11 novembre 1991 qui devrait être considérée comme un élément nouveau. La décision prise à l'issue de ce réexamen ne pourrait à l'évidence être qualifiée d'acte confirmatif. A l'appui de leur thèse, les requérants invoquent l'arrêt du Tribunal du 11 février 1992, Panagiotopoulou/Parlement (T-16/90, Rec. p. II-89, points 7 et 20), ainsi que les arrêts de la Cour du 11 mars 1986, Sorani e.a./Commission (293/84, Rec. p. 967, points 9 à 12), et du 16 décembre 1987, Beiten/Commission (206/85, Rec. p. 5301, point 8). |
Appréciation du Tribunal
13 |
Il y a lieu de rappeler, tout d'abord, que les requérants, au lieu de saisir directement le juge communautaire d'un recours dirigé contre les décisions des jurys de concours, ont utilisé la procédure de réclamation au titre de l'article 90, paragraphe 2, du statut. Par conséquent, leur recours n'est recevable, en vertu des dispositions combinées des articles 91, paragraphe 2, et 90, paragraphe 2, premier alinéa, du statut, que si la procédure précontentieuse a suivi un cours régulier. |
14 |
Il convient de rappeler, ensuite, que, selon une jurisprudence constante, la qualité d'acte faisant grief ne saurait être reconnue à un acte purement confirmatif, c'est-à-dire à un acte qui ne contient aucun élément nouveau par rapport à un acte antérieur et qui ne s'est donc pas substitué à celui-ci (voir, par exemple, l'arrêt Grasselli/Commission, précité, point 18, et l'arrêt de la Cour du 11 mars 1986, Adams e.a./Commission, 294/84, Rec. p. 977, points 15 et 16). Il y a, dès lors, lieu pour le Tribunal d'examiner si, en l'espèce, les décisions prises par les jurys suite aux demandes de réexamen contiennent des éléments nouveaux par rapport aux décisions antérieures de non-admission et si elles se sont, par conséquent, substituées à celles-ci. |
15 |
A cet égard, le Tribunal constate que, ainsi qu'il ressort des documents relatifs aux deux concours en cause, les jurys ont initialement rejeté les candidatures des requérants au motif que leurs diplômes espagnols n'étaient pas du niveau requis de la «licenciatura» de cinq ans. En ce qui concerne le réexamen subséquent, il ne ressort pas clairement des documents susmentionnés que, dans les rapports internes des jurys, une évaluation plus approfondie et dépassant la simple confirmation du rejet initial ait effectivement eu lieu. |
16 |
Cependant, il convient d'examiner également les aspects externes de la procédure de réexamen, seuls connus des requérants. A cet égard, il y a lieu de relever que les lettres initiales de non-admission des 14 et 15 octobre 1991 ne contenaient qu'une motivation générale et ne faisaient, en réalité, que reprendre le texte même des avis de concours. Face à ce rejet de leurs candidatures, les requérants ont avancé, dans leurs demandes de réexamen, plusieurs arguments spécifiques nouveaux par rapport à leurs actes de candidature et produit une attestation officielle relative à leurs diplômes. En réponse à ces demandes, les lettres de la Commission du 6 décembre 1991 indiquent expressément que les jurys de concours ont «réexaminé» les dossiers; en outre, elles contiennent, pour la première fois, un renvoi au point II.B.2 des avis de concours et au titre B.3 du guide à l'intention des candidats ainsi que l'indication, quant au niveau des diplômes nécessaires à l'admission au concours, que la «licenciatura» était requise. Enfin, il ressort des documents relatifs aux deux concours en cause que le réexamen effectué par les jurys a eu pour résultat effectif l'admission aux concours COM/A/720 et COM/A/721, respectivement, de 75 et de 52 candidats qui avaient, dans un premier temps, été exclus des épreuves. |
17 |
Eu égard aux principes de sécurité juridique et de bonne administration, il y a lieu d'interpréter les lettres du 6 décembre 1991 en prenant en considération ces circonstances spécifiques. Les jurys ont procédé à de véritables réexamens, comme l'atteste l'admission de nombreux autres candidats, et ils ont approfondi la motivation de leurs décisions négatives en répondant - certes de manière très succincte — aux arguments nouveaux des requérants. Ces éléments nouveaux excluent l'hypothèse d'actes purement confirmatifs. Par conséquent, il y a lieu de considérer que des nouvelles décisions se sont substituées aux précédents refus d'admission. Les conclusions en annulation doivent, dès lors, être déclarées recevables. |
Sur le fond
18 |
A l'appui de leur recours, les requérants avancent quatre moyens tirés respectivement d'une violation de l'article 5, paragraphe 1, deuxième alinéa, du statut, d'une violation de la directive 89/48, d'une violation du point II.B.2 des avis de concours ainsi que d'une violation du principe de non-discrimination. |
Quant au moyen tiré d'une violation de l'article 5, paragraphe 1, deuxième alinéa, du statut
19 |
Les requérants soutiennent que la disposition précitée ne fait pas de distinction entre des études universitaires de type long et des études de type court. Les titres qui leur ont été délivrés à l'issue de trois années d'études étant des titres universitaires reconnus comme tels en Espagne, les jurys de concours auraient, en refusant leurs candidatures au motif que leurs diplômes ne sont pas du niveau de la «licenciatura», violé ladite disposition. Les requérants précisent qu'ils ne soutiennent pas que les conditions prescrites par les avis de concours litigieux sont illégales, en ce qu'elles sont plus strictes que les termes de l'article 5, paragraphe 1, deuxième alinéa, du statut, mais qu'ils ne remettent en cause que la portée que la Commission a réservée à ces conditions dans l'examen de leurs candidatures. |
20 |
A cet égard, il suffit de rappeler que, selon une jurisprudence constante (voir, par exemple, les arrêts de la Cour du 13 juillet 1989, Jaenicke Cendoya/Commission, 108/88, Rec. p. 2711, point 24, et du Tribunal du 7 février 1991, Ferreira de Freitas/Commission, T-2/90, Rec. p. II-103, point 54), les dispositions de l'article 5 du statut, qui imposent pour la catégorie A, entre autres, des «connaissances du niveau universitaire», visent à définir, d'une manière générale, le niveau minimum des fonctionnaires de cette catégorie et ne concernent pas les conditions de recrutement, régies par les dispositions de l'article 29 et l'annexe III du statut. L'article 5 du statut ne s'oppose donc pas à ce que soient fixées par un avis de concours ou par un jury, dans l'interprétation de cet avis, des conditions plus sévères que celles correspondant aux conditions minimales résultant du classement des emplois. |
21 |
Il s'ensuit que le moyen ne saurait être retenu. |
Quant au moyen tiré d'une violation de la directive 89/48
22 |
Les requérants soulignent que l'article 1er de cette directive reconnaît comme études supérieures tout enseignement post-secondaire d'une durée minimale de trois ans. Or, en vertu du principe général patere legem quam ipse fecisti, une autorité administrative ne pourrait déroger, par voie individuelle, à un acte réglementaire qu'elle a elle-même édicté antérieurement, sans prévoir expressément qu'il puisse y être dérogé. Dès lors, et bien que les institutions communautaires ne soient pas destinataires de la directive 89/48, elles ne pourraient, par une décision de refus d'admission à un concours, porter atteinte aux règles qui y sont énoncées. Les jurys des concours litigieux n'auraient donc pu, sans violer l'article 1er de la directive, affirmer que les études de type court suivies par les requérants ne satisfaisaient pas aux conditions d'admission exigées par les avis de concours. |
23 |
A cet égard, il suffit de constater que, même si la directive 89/48 devait lier les institutions communautaires, il ressort de son douzième considérant, selon lequel le système général de reconnaissance des diplômes instauré par la directive ne préjuge en rien l'application des articles 48, paragraphe 4, et 55 du traité CE, que la directive n'entend pas régler l'accès à la fonction publique des États membres. Le Tribunal estime, par conséquent, que, même dans l'hypothèse d'une transposition, dans le cadre de la fonction publique des Communautés, du système général de reconnaissance établi par la directive, cette réserve devrait, elle aussi, être respectée. Or, s'il est vrai que la Cour a défini de manière restrictive la notion d'administration publique, en ce sens qu'elle ne couvre que les emplois qui comportent une participation, directe ou indirecte, à l'exercice de la puissance publique (voir, par exemple, l'arrêt du 27 novembre 1991, Bleis, C-4/91, Rec. p. I-5627, point 6), les fonctions d'administrateur et d'administrateur adjoint — chargés, selon le point I des deux avis de concours, de tâches de conception et d'étude concernant certaines politiques communautaires et affectés à la Commission, une des institutions politiques des Communautés - doivent être considérées comme des fonctions présentant les caractéristiques d'activités spécifiques d'une administration publique. Il s'ensuit que la directive 89/48 ne saurait trouver application ni par voie d'analogie, ni en vertu du principe patere legem quam ipse fecisti, au cas d'espèce. |
24 |
Dès lors, le moyen doit être écarté. |
Quant au moyen tiré d'une violation du point II.B.2 des avis de concours
— Arguments des parties
25 |
Les requérants soutiennent qu'ils sont tous titulaires d'un diplôme obtenu à la suite d'études universitaires supérieures complètes et qu'ils remplissent donc les conditions du point II.B.2 des deux avis de concours. Par conséquent, ce serait en violation dudit point II.B.2 que les jurys ont refusé de les admettre à participer aux concours au motif que leurs diplômes ne sont pas du niveau de la «licenciatura». |
26 |
A cet égard, les requérants se réfèrent à la législation espagnole que les jurys auraient dû appliquer et analysent la structure de l'organisation de l'enseignement supérieur en Espagne. Ils exposent que l'organisation des études universitaires en Espagne repose sur plusieurs cycles, totalement indépendants les uns des autres. Le premier cycle, de type court, serait un cycle unique de trois ans, dont le nombre d'heures de cours peut être proportionnellement, et même parfois en termes absolus, équivalent au deuxième cycle, de type long. |
27 |
Les requérants soulignent que les études de type court ne peuvent en aucune façon être assimilées au premier cycle des études de type long, mais apparaissent plutôt comme une filière d'enseignement «accéléré», puisque les connaissances qui sont acquises dans le cadre d'une «diplomatura» sont équivalentes à celles acquises dans le cadre d'une «licenciatura». Les requérants relèvent, dans ce contexte, que les titres «diplomado» et «licenciado» constituent, selon la législation espagnole, des titres universitaires officiels, valables sur tout le territoire, ce qui a été officiellement rappelé dans une attestation ministérielle espagnole du 11 novembre 1991. |
28 |
Les requérants estiment que, du moment que les avis de concours posent comme condition d'admission la possession d'un diplôme sanctionnant des études universitaires complètes, l'autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après «AIPN») ne peut, à l'égard des candidats d'un pays dont l'enseignement universitaire repose sur deux types de cursus - court et long — conduisant à des titres ayant la même validité, retenir les seuls détenteurs d'un diplôme sanctionnant un enseignement de type long. Par ailleurs, si l'on poussait la logique du raisonnement de la Commission jusqu'au bout, on devrait conclure que seul le troisième cycle de l'enseignement espagnol, à savoir le doctorat, peut être regardé comme offrant la plus large formation possible et que seul le titre de docteur pouvait donc permettre de se porter candidat aux deux concours en question. |
29 |
L'insertion d'un qualificatif supplémentaire dans la version espagnole des avis de vacance (études universitaires complètes supérieures) ne constitue pas, toujours selon les requérants, une condition supplémentaire, étant donné que toutes les études universitaires constituent, au regard de la structure de l'enseignement supérieur en Espagne, par définition même, des études supérieures. L'adjectif «supérieures» pourrait donc s'appliquer aux «diplomaturas» comme aux «licenciaturas». Enfin, l'expression «études universitaires complètes» devrait être entendue en ce sens qu'elle vise toutes les études universitaires accomplies, ces études pouvant comporter un, deux ou trois des cycles organisés par la législation espagnole. Dans la mesure où chacun des requérants a terminé le cycle d'études qu'il a choisi, il remplirait donc cette condition. |
30 |
La Commission soutient que les décisions attaquées des jurys de concours se sont inspirées, eu égard à l'article 27 du statut, de la nécessité d'assurer à l'institution le concours de candidats qui possédaient la plus large formation universitaire. De surcroît, pour tenir compte de la diversité des titres universitaires espagnols, la version espagnole du point II.B.2 des avis de concours litigieux aurait utilisé l'expression «études universitaires supérieures complètes». Or, il serait indubitable que cette expression ne peut que se référer aux diplômes sanctionnant des études universitaires assurant la plus large formation possible dans le système espagnol universitaire, en l'occurrence les diplômes du deuxième cycle, c'est-à-dire ceux sanctionnant des études du niveau de la «licenciatura», et non de la «diplomatura». Vu le nombre d'heures d'enseignement prescrit par la législation espagnole, il serait impossible d'obtenir, dans le cadre d'un enseignement de trois ans, les mêmes connaissances ou des connaissances correspondantes à celles obtenues dans le cadre d'un enseignement de cinq ans. Il serait, dès lors, évident que le niveau des deux diplômes est bien différent. |
31 |
La Commission affirme ensuite que l'adjectif «supérieures», qualifiant, dans la version espagnole des avis de concours litigieux, le niveau de la formation universitaire requise, se rapporte au niveau le plus complet possible d'après le système d'enseignement universitaire du pays de référence. Or, en l'espèce, il serait indéniable que ce sont les «licenciaturas» qui remplissent les exigences posées par les avis de concours, le diplôme de docteur (troisième cycle) devant être écarté, dans ce contexte, en raison du caractère post-universitaire de ce titre. Enfin, le qualificatif «complètes» ne saurait être compris dans le sens d'études accomplies, étant donné que cette exigence est déjà couverte par celle d'un diplôme délivré en fin d'études. Le qualificatif «complètes» devrait, dès lors, viser les études universitaires qui assurent dans le système de référence la plus large formation, en l'occurrence, les «licenciaturas». |
— Appréciation du Tribunal
32 |
Le Tribunal rappelle que, selon une jurisprudence constante en matière d'admission de candidats aux épreuves d'un concours (voir, par exemple, l'arrêt du Tribunal du 28 novembre 1991, Van Hecken/CES, T-158/89, Rec. p. II-1341, points 23 à 25, avec d'autres références), le jury est lié par le texte de l'avis de concours tel qu'il a été publié et ne peut pas appliquer des conditions qui ne figurent pas dans l'avis de concours. |
33 |
En ce qui concerne le texte des deux avis de concours en cause, il y a lieu d'examiner s'il confère aux jurys une certaine marge d'appréciation dans l'évaluation du niveau des diplômes exigés, une telle marge d'appréciation n'étant susceptible d'être contrôlée par le juge communautaire que dans une mesure restreinte. En effet, les deux avis indiquent que le jury «tient compte» des différentes structures d'enseignement, et l'avis COM/A/720 renvoie, en outre, au «guide à l'intention des candidats», aux termes duquel le niveau des études accomplies par les candidats est «vérifié et évalué par le jury». Toutefois, la Commission a déclaré à l'audience, en réponse à une question posée par le Tribunal, que l'AIPN n'avait jamais entendu conférer une marge d'appréciation aux jurys dans un domaine tel que celui de la reconnaissance des diplômes universitaires, lequel, pour des raisons d'égalité de traitement, devrait être accessible à un contrôle juridictionnel complet. Dans leurs observations orales, les requérants se sont explicitement rangés à l'opinion exprimée par la Commission. Dans ces circonstances, le Tribunal estime que le refus d'admission aux épreuves prononcé par les jurys, au motif que les diplômes espagnols présentés par les requérants n'étaient pas du niveau requis, n'est pas couvert par sa marge d'appréciation. Les jurys ayant appliqué les règles établies par les avis de concours, leur refus d'admission repose sur une analyse à caractère purement juridique. Par conséquent, il y a lieu de vérifier si les jurys ont violé, en l'espèce, les règles établies par les avis de concours (voir l'arrêt Panagiotopoulou/Parlement, précité, point 39). |
34 |
S'agissant de la question de savoir si les diplômes espagnols des requérants sont du niveau requis par les avis de concours en cause, il est de jurisprudence constante que, en l'absence de toute disposition contraire contenue soit dans un règlement ou une directive, soit dans l'avis de concours, l'exigence de la possession d'un diplôme universitaire doit nécessairement s'entendre dans le sens que donne à cette expression la législation propre à l'État membre où le candidat a fait les études dont il se prévaut (voir les arrêts Jaenicke Cendoya/Commission, précité, point 14, Ferreira de Freitas/Commission, précité, point 32, et Panagiotopoulou/Parlement, précité, point 49). |
35 |
A cet égard, le Tribunal constate que, ainsi qu'il a été jugé ci-dessus, ni l'article 5 du statut ni la directive 89/48 ne contiennent des dispositions pertinentes en la matière. En ce qui concerne le texte des deux avis de concours en cause, il convient, cependant, de rappeler que les jurys devaient prendre en considération les différentes structures d'enseignement. En outre, seule la version espagnole exigeait des études universitaires «supérieures» complètes, alors qu'aucune des autres versions linguistiques ne prévoyait un qualificatif pareil. Par conséquent, les avis de concours contenaient des dispositions spécifiques dont les jurys devaient faire une application combinée avec celle de la législation espagnole en vigueur pour examiner si les diplômes des requérants correspondaient aux exigences des avis de concours. |
36 |
Dans ce contexte, il y a lieu d'ajouter que les requérants, loin de contester le bien-fondé de la différence entre les versions linguistiques des avis de concours, affirment que leurs études universitaires ont effectivement ce caractère «supérieur». A l'audience, ils ont confirmé, en réponse à une question posée par le Tribunal, qu'ils ne soulèvent aucune objection à l'encontre du qualificatif «supérieures» prévu dans la seule version espagnole des avis de concours. Dans ces circonstances, le Tribunal estime que c'est la version espagnole de ces avis qui était déterminante quant à l'examen par les jurys du point de savoir si les diplômes espagnols des requérants étaient du niveau requis. |
37 |
Ainsi qu'il ressort des réponses du gouvernement espagnol aux questions posées par le Tribunal au sujet de la législation espagnole pertinente, les études universitaires en Espagne se décomposent en trois cycles: la réussite au premier d'entre eux (la «diplomatura») donne droit au titre officiel de diplômé, d'architecte technicien ou d'ingénieur technicien; l'accomplissement du deuxième cycle (la «licenciatura») donne droit au titre officiel de licencié, d'architecte ou d'ingénieur, et celui du troisième cycle au titre de docteur. Le premier cycle, qui a une durée de deux à trois années universitaires, comprend des enseignements de base et de formation générale ainsi que, le cas échéant, des enseignements orientés vers la préparation à l'exercice d'activités professionnelles. Le deuxième cycle, qui a normalement une durée de deux années universitaires, est consacré à l'approfondissement et à la spécialisation dans les matières correspondantes, ainsi qu'à la préparation en vue de l'exercice d'activités professionnelles. |
38 |
Au vu de cette réglementation espagnole, le Tribunal constate que les études de «diplomatura» accomplies par les requérants ne sauraient, en tout état de cause, être assimilées aux autres études universitaires «supérieures» prévues en Espagne. Les jurys de concours ont donc fait une application correcte tant des avis de concours en cause que du droit espagnol pertinent en estimant que les requérants n'avaient pas accompli des études universitaires «supérieures» complètes. |
39 |
Ce résultat n'est pas contredit par la lettre du secrétariat d'État aux Universités et à la Recherche du ministère de l'Éducation et des Sciences espagnol que les requérants ont produite en annexe 13 à leur requête. En effet, si cette lettre atteste que les diplômes des requérants sont des diplômes officiels universitaires, valables sur l'ensemble du territoire national, elle ne se prononce pas sur le niveau de ces diplômes par rapport aux autres diplômes universitaires délivrés en Espagne, mais se limite à certifier que les diplômes des requérants permettent l'accès direct aux professions «correspondantes». Par ailleurs, en indiquant que les études de «diplomatura» accomplies par les requérants doivent être considérées «comme des études universitaires complètes sanctionnées par un diplôme», l'attestation n'utilise précisément pas le qualificatif «supérieures». |
40 |
Il résulte de tout ce qui précède que le moyen tiré d'une violation du point II.B.2 des avis de concours doit être rejeté. |
Quant au moyen tiré d'une violation du principe de non-discrimination
— Arguments des parties
41 |
Les requérants affirment avoir connaissance de ce qu'un candidat titulaire d'un diplôme correspondant à celui qui leur a été délivré à l'issue de leurs études en Espagne a été admis à participer au concours COM/A/720. Dans ce contexte, les requérants estiment qu'il pourrait être utile de demander à la Commission de produire la liste des candidats espagnols admis aux épreuves du concours COM/A/720, avec la précision de leur formation universitaire respective. Par ailleurs, d'autres institutions communautaires auraient admis des candidats dont les titres requis étaient identiques à ceux des requérants à participer à des concours équivalents au concours COM/A/720. En refusant d'inscrire les requérants sur les listes des candidats admissibles aux concours litigieux, les jurys de ces concours auraient, dès lors, violé le principe de non-discrimination. |
42 |
Dans la mesure où les requérants affirment qu'un candidat qui se trouvait dans la même situation qu'eux-mêmes a été admis au concours COM/A/720, la Commission estime que, si tel devait être le cas, cette circonstance ne pourrait être plaidée à leur profit par les requérants. En effet, il s'agirait d'une éventuelle erreur commise par le jury lequel aurait, le cas échéant, mal interprété et mal appliqué l'avis de concours. De l'avis de la Commission, l'argument des requérants selon lequel d'autres institutions communautaires ont admis à des concours similaires des candidats possédant des diplômes identiques à ceux des requérants ne saurait non plus être fondé. En effet, l'avis de concours serait la lex specialis du concours et l'appréciation des titres et diplômes des candidats serait arrêtée par l'AIPN compte tenu des particularités de chaque concours et au vu des exigences que cette AIPN considère devoir être remplies par les candidats. |
— Appréciation du Tribunal
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En ce qui concerne la première branche du moyen, le Tribunal estime que les requérants n'ont pas suffisamment étayé leur affirmation, selon laquelle «un candidat titulaire d'un diplôme correspondant à celui délivré aux requérants» aurait été admis aux épreuves du concours COM/A/720. En effet, ils n'ont ni indiqué le nom de ce candidat ni fourni d'autres précisions à cet égard. Par ailleurs, à supposer même qu'une telle admission isolée ait eu lieu, elle devrait être considérée, à la lumière de ce qui a été jugé ci-dessus à l'égard du niveau des diplômes présentés par les requérants, comme une application erronée du texte de l'avis de concours en cause. Or, une telle illégalité commise par le jury en faveur d'autrui ne pourrait créer une violation du principe de non-discrimination (arrêt du Tribunal du 14 mai 1991, Zoder/Parlement, T-30/90, Rec. p. II-207, point 26). Dans ces conditions, il n'y a pas lieu de faire droit à la suggestion des requérants visant à demander à la Commission de produire la liste des candidats espagnols admis à participer audit concours. |
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Quant à la seconde branche du moyen, il suffit de rappeler que, selon la jurisprudence de la Cour et du Tribunal, un candidat à un concours, qui n'y a pas été admis, ne peut utilement se prévaloir, dans le cadre d'un recours dirigé contre sa non-admission, des conditions d'admission à d'autres concours, organisés par d'autres institutions selon des modalités distinctes et poursuivant des finalités différentes (arrêt de la Cour du 28 avril 1983, Lipman/Comraission, 143/82, Rec. p. 1301, point 10, et arrêt Panagiotopoulou/Parlement, précité, point 79). |
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Par conséquent, ce moyen doit également être écarté. |
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Il s'ensuit que les conclusions en annulation ne sauraient être accueillies. |
Sur les autres conclusions présentées par les requérants
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L'ensemble des moyens invoqués par les requérants à l'appui du présent recours devant être écarté, il y a lieu de constater que les conclusions des requérants, visant à ce que leur droit d'être inscrits sur les listes des candidats admissibles aux concours en cause, ne sont pas fondées. Elles doivent donc être rejetées sans qu'il soit nécessaire, pour le Tribunal, de se prononcer sur leur recevabilité. |
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Il résulte de l'ensemble des considérations qui précèdent que le recours doit être rejeté. |
Sur les dépens
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Aux termes de l'article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens. Toutefois, en vertu de l'article 88 du même règlement, dans les litiges entre les Communautés et leurs agents, les frais exposés par les institutions restent à la charge de celles-ci. Il y a donc lieu de condamner chacune des parties à supporter ses propres dépens. |
Par ces motifs, LE TRIBUNAL (quatrième chambre) déclare et arrête: |
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Briët Saggio Kirschner Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 3 mars 1994. Le greffier H. Jung Le président C. P. Briët |
( *1 ) Langue de procédure: le français.