Vyberte pokusně zaváděné prvky, které byste chtěli vyzkoušet

Tento dokument je výňatkem z internetových stránek EUR-Lex

Dokument 62012CO0178

    Usnesení Soudního dvora (osmého senátu) ze dne 7. března 2013.
    Rafaela Rivas Montes v. Instituto Municipal de Deportes de Córdoba (IMDECO).
    Článek 53 odst. 2 a článek 99 jednacího řádu Soudního dvora – Sociální politika – Zásada rovného zacházení – Směrnice 1999/70/CE – Rámcová dohoda CES, UNICE a CEEP o pracovních poměrech na dobu určitou – Ustanovení 4 − Pracovní smlouvy na dobu určitou ve veřejném sektoru – Stanovení počtu odpracovaných let – Rozdílné zacházení se zaměstnanci v úředním poměru a se smluvními zaměstnanci – Započtení dříve vykonávané služby v rámci veřejné správy – Zjevná nepříslušnost Soudního dvora.
    Věc C‑178/12.

    Identifikátor ECLI: ECLI:EU:C:2013:150

    ORDONNANCE DE LA COUR (huitième chambre)

    7 mars 2013 (*)

    «Articles 53, paragraphe 2, et 99 du règlement de procédure de la Cour – Politique sociale – Principe d’égalité de traitement – Directive 1999/70/CE − Accord-cadre CES, UNICE et CEEP sur le travail à durée déterminée – Clause 4 − Contrats de travail à durée déterminée dans le secteur public – Détermination de l’ancienneté – Différence de traitement entre personnel statutaire et agents contractuels – Prise en compte des périodes d’activité antérieures accomplies au sein de l’administration – Incompétence manifeste de la Cour»

    Dans l’affaire C‑178/12,

    ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Juzgado de lo Social n° 1 de Córdoba (Espagne), par décision du 27 février 2012, parvenue à la Cour le 17 avril 2012, dans la procédure

    Rafaela Rivas Montes

    contre

    Instituto Municipal de Deportes de Córdoba (Imdeco),

    LA COUR (huitième chambre),

    composée de M. E. Jarašiūnas, président de chambre, M. A. Ó Caoimh (rapporteur) et Mme C. Toader, juges,

    avocat général: M. N. Wahl,

    greffier: M. A. Calot Escobar,

    vu la décision prise, l’avocat général entendu, de statuer par voie d’ordonnance motivée, conformément aux articles 53, paragraphe 2, et 99 du règlement de procédure de la Cour,

    rend la présente

    Ordonnance

    1        La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation du principe général d’égalité de traitement consacré par le droit de l’Union.

    2        Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Mme Rivas Montes à l’Instituto Municipal de Deportes de Córdoba (ci-après l’«Imdeco»), une entité qui fait partie de l’administration publique locale de l’Ayuntamiento de Córdoba (municipalité de Cordoue), au sujet des modalités de calcul de la prime d’ancienneté qui lui est octroyée.

     Le cadre juridique

     La réglementation de l’Union

    3        Aux termes de l’article 1er de la directive 1999/70/CE du Conseil, du 28 juin 1999, concernant l’accord-cadre CES, UNICE et CEEP sur le travail à durée déterminée (JO L 175, p. 43), celle-ci vise «à mettre en œuvre l’accord-cadre sur le travail à durée déterminée, figurant en annexe de cette directive, conclu le 18 mars 1999 entre les organisations interprofessionnelles à vocation générale (CES, UNICE, CEEP)» (ci‑après l’«accord-cadre»).

    4        Il ressort des considérants 14 et 17 de la même directive ainsi que du troisième alinéa du préambule et des points 7 à 10 des considérations générales de l’accord-cadre que ce dernier énonce les principes généraux et les prescriptions minimales relatifs aux contrats et aux relations de travail à durée déterminée, en établissant, notamment, un cadre général destiné à assurer l’égalité de traitement pour les travailleurs à durée déterminée en les protégeant contre la discrimination. Cet accord-cadre vise également à prévenir les abus découlant de l’utilisation de relations de travail à durée déterminée successives, tout en renvoyant aux États membres et aux partenaires sociaux pour la définition des modalités détaillées d’application desdits principes et prescriptions, aux fins de prendre en compte la réalité des situations spécifiques nationales, sectorielles et saisonnières.

    5        L’article 2, premier alinéa, de ladite directive dispose:

    «Les États membres mettent en vigueur les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à la présente directive au plus tard le 10 juillet 2001 ou s’assurent, au plus tard à cette date, que les partenaires sociaux ont mis en place les dispositions nécessaires par voie d’accord, les États membres devant prendre toute disposition nécessaire leur permettant d’être à tout moment en mesure de garantir les résultats imposés par la présente directive. Ils en informent immédiatement la Commission.»

    6        Aux termes de la clause 1 de l’accord-cadre, celui-ci a pour objet:

    «a)      d’améliorer la qualité du travail à durée déterminée en assurant le respect du principe de non-discrimination;

    b)      d’établir un cadre pour prévenir les abus résultant de l’utilisation de contrats ou de relations de travail à durée déterminée successifs.»

    7        La clause 4 de l’accord-cadre, intitulée «Principe de non-discrimination», stipule:

    «1.      Pour ce qui concerne les conditions d’emploi, les travailleurs à durée déterminée ne sont pas traités d’une manière moins favorable que les travailleurs à durée indéterminée comparables au seul motif qu’ils travaillent à durée déterminée, à moins qu’un traitement différent [ne] soit justifié par des raisons objectives.

    [...]

    4.      Les critères de périodes d’ancienneté relatifs à des conditions particulières d’emploi sont les mêmes pour les travailleurs à durée déterminée que pour les travailleurs à durée indéterminée, sauf lorsque des critères de périodes d’ancienneté différents sont justifiés par des raisons objectives.»

     La réglementation espagnole

     La réglementation applicable aux agents publics

    8        La loi 7/2007 portant statut de base des agents publics (Ley 7/2007 del Estatuto Básico del Empleado Público), du 12 avril 2007 (BOE n° 89, du 13 avril 2007, p. 16270, ci-après la «LEBEP»), s’applique, conformément à son article 2, paragraphe 1, au personnel statutaire et, le cas échéant, aux agents contractuels travaillant, notamment, dans les administrations des communautés autonomes.

    9        L’article 8, paragraphe 2, de la LEBEP prévoit que les agents publics sont classés en fonctionnaires de carrière («funcionarios de carrera»), en fonctionnaires intérimaires («funcionarios interinos»), en agents contractuels («personal laboral»), qu’il s’agisse de personnel permanent, à durée indéterminée ou déterminée, et en personnel auxiliaire («personal eventual»).

    10      L’article 9, paragraphe 1, de la LEBEP dispose:

    «Sont fonctionnaires de carrière les personnes qui, en vertu d’une nomination légale, relèvent d’une administration publique en vertu d’une relation statutaire régie par le droit administratif, en vue d’accomplir des services professionnels rémunérés à caractère permanent.»

    11      L’article 22, paragraphe 1, de la LEBEP dispose que «les éléments de rémunération des fonctionnaires de carrière se répartissent entre éléments de base et éléments complémentaires». Aux termes du paragraphe 2 de cet article, les premiers sont «ceux qui rémunèrent le fonctionnaire en fonction de l’appartenance de sa catégorie ou de son échelon à un sous-groupe de classement professionnel ou, en l’absence de sous-groupe, à un groupe de classement professionnel, et de son ancienneté dans ce dernier».

    12      L’article 23 de la LEBEP, intitulé «Rémunérations de base», est rédigé comme suit:

    «Les rémunérations de base, qui sont établies par la loi de finances de l’État, sont composées uniquement et exclusivement des éléments suivants:

    a)      le traitement prévu pour chaque sous-groupe de classement professionnel ou, en l’absence de sous-groupe, chaque groupe de classement professionnel;

    b)      les triennats qui consistent en un montant fixe, propre à chaque sous-groupe de classement professionnel, ou, en l’absence de sous-groupe, chaque groupe de classement professionnel, pour chaque période de trois années de service.»

    13      L’article 25 de la LEBEP, intitulé «Rémunérations des fonctionnaires intérimaires», reconnaît, à son paragraphe 2, au bénéfice de ces derniers «les triennats d’ancienneté correspondant aux services effectués avant l’entrée en vigueur [de ladite loi], qui ne produiront des effets sur les rémunérations qu’à partir de l’entrée en vigueur de [la LEBEP]».

    14      L’article 27 de la LEBEP, intitulé «Rémunération des agents contractuels», prévoit que «[l]a rémunération des agents contractuels est déterminée conformément aux dispositions du droit du travail, la convention collective applicable, le cas échéant, et le contrat de travail, toujours dans le respect des dispositions de l’article 21 [de la LEBEP]».

    15      La loi 70/1978, relative à la reconnaissance des périodes de service antérieures dans l’administration publique (Ley 70/1978 de reconocimiento de servicios previos en la Administración pública), du 26 décembre 1978 (BOE n° 9, du 10 janvier 1979, p. 464), détermine la manière dont il convient de décompter, en ce qui concerne les fonctionnaires, les périodes de service antérieures dans l’administration publique aux fins de la constitution et de la liquidation du droit aux primes triennales d’ancienneté. L’article 1er, paragraphe 2, de cette loi dispose:

    «Sont considérées comme des périodes de service effectif toutes les périodes indistinctement accomplies dans les secteurs de l’administration publique visés au paragraphe précédent, qu’elles aient été accomplies en qualité de fonctionnaire d’emploi (à durée déterminée ou intérimaire) ou sous le régime de contrat administratif ou de travail, que ces contrats aient ou non été conclus par écrit.»

    16      L’article 1er du décret royal 1461/1982, portant mesures d’application de la loi 70/1978 (Real Decreto 1461/1982 por el que se dictan normas de aplicación de la Ley 70/1978), du 25 juin 1982 (BOE n° 159, du 5 juillet 1982, p. 18334), est libellé comme suit:

    «1.      Aux fins du décompte des triennats, il sera tenu compte de toutes les périodes de service accomplies par les fonctionnaires de carrière dans toute administration publique visée à l’article 1er de la [loi 70/1978] sans considération du régime juridique sous lequel lesdites périodes ont été accomplies, à l’exception de celles revêtant le caractère de prestations personnelles obligatoires.

    […]

    2.      Aucune période ne pourra être prise en compte plus d’une fois, quand bien même le fonctionnaire aurait accompli simultanément des périodes de service dans un ou plusieurs services d’une même administration ou dans différentes administrations publiques.

    Les services accomplis sous le régime de contrat administratif ou de travail ne sont pas pris en compte lorsque, au terme de la relation juridique avec l’administration et à réception de l’indemnisation correspondante, l’intéressé renonce à tout autre droit susceptible de découler desdits services.»

    17      Selon la juridiction de renvoi, l’article 1er, paragraphe 2, second alinéa, du décret royal 1461/1982 ne trouve aucune base juridique, ni expresse ni implicite, dans le libellé et la finalité de la loi 70/1978, de sorte que cette disposition est inapplicable en ce qu’elle comporte une disposition dérogatoire et contraire au principe de la hiérarchie des normes.

     Le statut des travailleurs

    18      L’article 15, paragraphe 6, deuxième alinéa, du statut des travailleurs, dans sa version résultant du décret législatif royal 1/1995 portant approbation du texte refondu de la loi portant statut des travailleurs (Real Decreto Legislativo 1/1995 por el que se aprueba el texto refundido de la Ley del Estatuto de los Trabajadores), du 24 mars 1995 (BOE n° 75, du 29 mars 1995, p. 9654), est rédigé comme suit:

    «Lorsqu’un droit ou une condition de travail déterminée est reconnu(e) par des dispositions légales ou réglementaires ou par des conventions collectives en fonction de l’ancienneté du travailleur, ledit droit ou ladite condition devra être calculé(e) selon les mêmes critères pour l’ensemble des travailleurs, quelle que soit la nature de leur contrat de travail.»

    19      L’article 25, paragraphe 1, du statut des travailleurs, dans sa version résultant du décret législatif royal 1/1995, dispose:

    «Le travailleur, en fonction du travail fourni, pourra avoir droit à un avantage économique selon les termes fixés par convention collective ou contrat individuel.»

     La convention collective des agents contractuels de l’Imdeco

    20      La convention collective des agents contractuels de l’Imdeco, dans sa version applicable au litige au principal (BOP de Córdoba n° 26, 11 février 2010, ci-après la «convention collective»), prévoit, à son article 36, le droit à une prime d’ancienneté correspondant à un pourcentage du salaire de base augmentant à partir de la deuxième année du contrat.

    21      En vertu de l’article 2 de cette convention collective, ledit article 36 «concerne tous les membres du personnel au service d’Imdeco inscrits au tableau des effectifs contractuels, qu’ils soient travailleurs permanents, à la demande, intérimaires ou à durée déterminée».

    22      Selon la juridiction de renvoi, l’article 36 de la convention collective a été interprété par le Tribunal Superior de Justicia de Andalucía (Cour supérieure de justice d’Andalousie), dans son arrêt n° 349/2010, qui est conforme sur ce point à l’approche du Tribunal Supremo (Cour suprême) dans un arrêt du 24 novembre 2009, en ce sens que «[l]es travailleurs temporaires au service [de l’Imdeco] (pour ce qui nous intéresse ici) ont le droit de percevoir la prime d’ancienneté même en cas d’interruptions supérieures à 20 jours ouvrables entre leurs différents contrats, pour autant qu’il puisse être affirmé que l’essence de la relation de travail n’a pas été remise en cause».

     Le litige au principal et les questions préjudicielles

    23      Mme Rivas Montes est employée par l’Imdeco en qualité d’auxiliaire administrative. Elle a été engagée par ce dernier dans le cadre de plusieurs contrats de travail à durée déterminée qui ont couvert les périodes comprises entre le 8 mai et le 13 septembre 1998, le 14 avril et le 23 septembre 1999, le 14 mai et le 16 mai 2001, le 25 juin et le 25 septembre 2001, le 28 septembre et le 27 décembre 2001, ainsi que depuis le 9 janvier 2002.

    24      Le 23 mars 2011, Mme Rivas Montes a saisi l’Imdeco d’une réclamation administrative précontentieuse, en application de l’article 36 de la convention collective, afin que celui-ci prenne en compte toutes les périodes de travail effectif antérieures au 9 janvier 2002 aux fins du calcul de la prime d’ancienneté à laquelle elle estime avoir droit.

    25      Par décision du 12 mai 2011, l’Imdeco a accueilli en partie sa réclamation en prenant compte, aux fins du calcul de ladite prime d’ancienneté, des périodes de travail accomplies depuis le 14 mai 2001. En revanche, il a refusé de prendre en compte les périodes d’activité antérieures à cette date, au motif que la période d’environ 20 mois qui s’est écoulée entre le 23 septembre 1999 et le 14 mai 2001 représente une durée suffisante pour considérer comme rompue l’unité d’ensemble du lien de travail.

    26      Le 2 août 2011, Mme Rivas Montes a introduit un recours devant le Juzgado de lo Social n° 1 de Córdoba (juge des affaires sociales n° 1 de Cordoue) en vue d’obtenir l’annulation partielle de ladite décision.

    27      Dans la demande de décision préjudicielle, la juridiction de renvoi relève que, en application de l’article 1er, paragraphe 2, de la loi 70/1978, l’Imdeco n’aurait pas pu invoquer à l’égard de Mme Rivas Montes la doctrine dite de l’«unité d’ensemble du lien de travail». L’absence de prise en compte, aux fins du calcul de sa prime d’ancienneté prévue par la convention collective, des périodes de travail accomplies entre le 8 mai et le 13 septembre 1998 ainsi que entre le 14 avril et le 23 septembre 1999, correspondant à 292 journées de travail effectif au service de l’Imdeco, serait dès lors due au seul fait que la relation de travail de Mme Rivas Montes revêt un caractère contractuel de droit privé.

    28      Ladite juridiction se demande si une telle différence de traitement, qui se fonde sur la seule nature contractuelle ou statutaire de la relation de travail, est conforme au principe général d’égalité de traitement reconnu par le droit de l’Union. En effet, selon la jurisprudence de la Cour résultant des arrêts du 23 mars 1982, Levin (53/81, Rec. p. 1035), et du 3 juillet 1986, Lawrie-Blum (66/85, Rec. p. 2121), la notion de «travailleur» viserait aussi bien les travailleurs employés durablement que les travailleurs temporaires ou saisonniers, les travailleurs frontaliers, ainsi que toutes les autres personnes qui exercent leur activité au moyen de prestations de services, y compris, en dehors de l’exception prévue à l’article 45, paragraphe 4, TFUE, les fonctionnaires ou agents de l’administration publique. En l’absence de violation du principe d’égalité de traitement, la juridiction de renvoi devrait alors examiner si l’interruption durant une période d’environ 20 mois de la relation contractuelle est de nature à permettre de considérer l’unité d’ensemble du lien de travail entre Mme Rivas Montes et l’Imdeco comme rompue.

    29      Dans ces conditions, le Juzgado de lo Social nº 1 de Córdoba a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:

    «1)      Est-il conforme au principe d’égalité communautaire (tel qu’il a été dégagé par la Cour de justice de l’Union européenne) qu’une administration publique donnée (en l’espèce l’Imdeco) se fonde, aux fins du calcul du complément de rémunération d’ancienneté de ses employés, exclusivement sur la nature statutaire ou contractuelle (de droit privé) du lien juridique qui la lie à ces derniers, et que, par application de ce critère, dans la première hypothèse (personnel statutaire), elle prenne en compte indistinctement, en application du statut national des fonctionnaires en vigueur, toutes les périodes antérieures de service effectif accomplies dans n’importe quel secteur de l’administration publique en général (c’est-à-dire tant dans l’administration publique concernée, en l’espèce l’Imdeco, que dans toute autre administration publique), alors que, en revanche, dans la seconde hypothèse (personnel contractuel), elle ne prenne en compte, en application du droit du travail en vigueur et de son interprétation par la jurisprudence, que les périodes antérieures de service effectif accomplies dans l’administration publique concernée (Imdeco), à condition toutefois que l’enchaînement des contrats qui sous-tendent la prestation des services en question n’ait pas été interrompu dans le temps d’une manière permettant de considérer que l’unité d’ensemble du lien juridique de travail a été rompue, ce qui exclurait alors la prise en compte des jours de travail immédiatement antérieurs à la rupture en question?

    2)      S’il convient de répondre par la négative à la question qui précède (c’est-à-dire si la Cour considère qu’un tel comportement d’une administration publique, en l’espèce l’Imdeco, est contraire au principe d’égalité communautaire), le retour à un état conforme au principe d’égalité implique-t-il, en l’espèce, d’appliquer le statut national des fonctionnaires aux agents contractuels soumis au droit privé du travail?»

     Sur les questions préjudicielles

    30      Par ses questions, qu’il convient d’examiner ensemble, la juridiction de renvoi demande en substance si le principe d’égalité de traitement doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une réglementation nationale telle que celle en cause au principal qui établit une différence de traitement entre le personnel statutaire et les agents contractuels pour le calcul d’une prime d’ancienneté en ce qui concerne la prise en compte des périodes antérieures de service effectif accomplies au service de l’administration.

    31      L’Imdeco et le gouvernement espagnol contestant l’existence d’une telle différence de traitement dans l’ordre juridique national, il convient de rappeler à titre liminaire que la Cour n’est pas compétente pour interpréter le droit interne d’un État membre. Il n’appartient donc pas à la Cour de se prononcer, dans le cadre d’un renvoi préjudiciel au titre de l’article 267 TFUE, sur l’interprétation des dispositions nationales et de juger si la juridiction de renvoi a correctement interprété celles-ci. Dans le cadre de la répartition des compétences entre les juridictions de l’Union européenne et celles des États membres, il incombe en revanche à la Cour de prendre en compte le contexte factuel et réglementaire dans lequel s’insèrent les questions préjudicielles, tel que défini par la décision de renvoi (voir arrêt du 13 décembre 2012, Caves Krier Frères, C-379/11, non encore publié au Recueil, points 35 à 37 et jurisprudence citée).

    32      Dès lors, quelles que soient les critiques émises par le gouvernement espagnol à l’encontre de l’interprétation du droit national retenue par la juridiction de renvoi, l’examen du présent renvoi préjudiciel doit être effectué au regard de l’interprétation de ce droit donnée par cette juridiction (voir, par analogie, arrêt Caves Krier Frères, précité, point 38).

    33      En vertu de l’article 53, paragraphe 2, de son règlement de procédure, lorsqu’elle est manifestement incompétente pour connaître d’une affaire, la Cour, l’avocat général entendu, peut à tout moment décider de statuer par voie d’ordonnance motivée, sans poursuivre la procédure.

    34      Par ailleurs, en vertu de l’article 99 du même règlement de procédure, lorsque la réponse à une question posée à titre préjudiciel peut être clairement déduite de la jurisprudence, la Cour peut, à tout moment, l’avocat général entendu, décider de statuer par voie d’ordonnance motivée.

    35      Il y a lieu de faire application desdites dispositions du règlement de procédure dans la présente affaire. En effet, la réponse aux questions posées par la juridiction de renvoi peut être clairement déduite de la jurisprudence de la Cour, en particulier des ordonnances du 11 novembre 2010, Vino (C‑20/10, ci-après l’«ordonnance Vino I»), et du 22 juin 2011, Vino (C‑161/11, ci-après l’«ordonnance Vino II»). Il ressort de cette jurisprudence que la Cour est manifestement incompétente pour répondre à ces questions.

    36      Ainsi que la Cour l’a rappelé au point 52 de l’ordonnance Vino I et au point 21 de l’ordonnance Vino II, le principe d’égalité de traitement fait partie de l’ordre juridique de l’Union. Il ressort en effet d’une jurisprudence constante que ce principe constitue un principe général du droit de l’Union qui revêt un caractère fondamental, consacré désormais par les articles 20 et 21 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la «Charte»), laquelle, conformément à l’article 6, paragraphe 1, premier alinéa, TUE, a, depuis le 1er décembre 2009, la même valeur juridique que les traités.

    37      Toutefois, les dispositions de la Charte s’adressent, en vertu de l’article 51, paragraphe 1, de celle-ci, aux États membres uniquement lorsqu’ils mettent en œuvre le droit de l’Union. En vertu du paragraphe 2 de ce même article, ladite Charte n’étend pas le champ d’application du droit de l’Union au-delà des compétences de l’Union, ni ne crée aucune compétence ni aucune tâche nouvelle pour l’Union et ne modifie pas les compétences et tâches définies par les traités (ordonnances Vino I, point 52, ainsi que Vino II, point 23 et jurisprudence citée).

    38      Ainsi, dans le cadre d’un renvoi préjudiciel au titre de l’article 267 TFUE, la Cour est appelée à interpréter le droit de l’Union dans les limites des compétences attribuées à celle-ci (ordonnance Vino II, point 25 et jurisprudence citée).

    39      Il convient donc de vérifier si une différence de traitement telle que celle décrite au point 30 de la présente ordonnance relève du droit de l’Union.

    40      À cet égard, il y a lieu de relever d’emblée qu’un travailleur tel que Mme Rivas Montes, qui est lié à son employeur par un contrat de travail à durée déterminée, est susceptible de relever du champ d’application de l’accord-cadre qui figure en annexe de la directive 1999/70.

    41      Comme il ressort des considérants 14 et 17 de ladite directive ainsi que du troisième alinéa du préambule de l’accord-cadre, des points 7 à 10 des considérations générales et de la clause 1 de celui-ci, cet accord-cadre n’a cependant pas pour objet d’harmoniser l’ensemble des règles nationales relatives aux contrats de travail à durée déterminée, mais vise uniquement, en fixant des principes généraux et des prescriptions minimales, à établir un cadre général pour assurer l’égalité de traitement pour les travailleurs à durée déterminée, en les protégeant contre la discrimination, et à prévenir les abus découlant de l’utilisation de relations de travail ou de contrats de travail à durée déterminée successifs (ordonnances Vino I, point 54 et jurisprudence citée, ainsi que Vino II, point 27).

    42      Or, la clause 4 de l’accord-cadre, qui concerne spécifiquement l’application du principe de non-discrimination, se borne à prévoir, selon son libellé, que les travailleurs à durée déterminée ne doivent pas être traités, pour les conditions d’emploi, d’une manière moins favorable que les travailleurs à durée indéterminée comparables, à moins qu’un traitement différent ne soit justifié par des raisons objectives (ordonnances Vino I, point 55, et Vino II, point 28).

    43      Il s’ensuit que, dans le domaine des contrats de travail à durée déterminée, le principe de non-discrimination a été mis en œuvre et concrétisé par l’accord-cadre uniquement en ce qui concerne les différences de traitement entre les travailleurs à durée déterminée et les travailleurs à durée indéterminée qui se trouvent dans une situation comparable (ordonnances Vino I, point 56 et jurisprudence citée, ainsi que Vino II, point 28).

    44      En revanche, les éventuelles différences de traitement entre le personnel statutaire et les agents contractuels, comme celles dont fait l’objet, selon la juridiction de renvoi, Mme Rivas Montes dans l’affaire au principal, ne relèvent pas du principe de non-discrimination consacré par l’accord-cadre (voir, en ce sens, ordonnances Vino I, point 57, et Vino II, point 28).

    45      En effet, une telle différence de traitement est fondée non pas sur la durée déterminée ou indéterminée de la relation de travail, mais sur le caractère statutaire ou contractuel de celle-ci. Or, il est constant que les agents contractuels peuvent être engagés tant pour une durée déterminée que pour une durée indéterminée.

    46      Dans l’affaire au principal, il ressort certes de la décision de renvoi que Mme Rivas Montes est liée à son employeur par un contrat de travail à durée déterminée. Par ailleurs, l’exposé de la jurisprudence des juridictions espagnoles effectué tant par la juridiction de renvoi que par Mme Rivas Montes pourrait éventuellement suggérer que certaines décisions juridictionnelles nationales, en particulier un arrêt du Tribunal Supremo du 24 novembre 2009, auraient appliqué le traitement différent allégué à des agents contractuels «temporaires».

    47      Toutefois, force est de constater que, ainsi qu’il ressort déjà du point 30 de la présente ordonnance, les questions posées par la juridiction de renvoi ne font état, selon le libellé même de celles-ci, d’aucune différence de traitement entre travailleurs à durée déterminée et travailleurs à durée indéterminée, mais visent uniquement une différence de traitement entre le personnel statutaire et les agents contractuels qui serait fondée sur la nature juridique de leur relation de travail.

    48      En outre, aucun élément du dossier dont dispose la Cour ne fait ressortir qu’il existerait, dans l’affaire au principal, une différence de traitement entre les agents contractuels ayant, comme Mme Rivas Montes, été engagés par l’Imdeco pour une durée déterminée et les agents contractuels embauchés par ce dernier pour une durée indéterminée.

    49      Au demeurant, à l’instar de la juridiction de renvoi, ni les parties au principal ni le gouvernement espagnol non plus que la Commission n’ont fait valoir l’existence d’une telle différence de traitement au détriment des seuls agents contractuels engagés pour une durée déterminée par l’Imdeco. Bien au contraire, ce dernier soutient à cet égard que la réglementation nationale applicable aux agents contractuels employés à son service ne comporte, pour ce qui concerne le calcul des primes d’ancienneté, aucune différence de traitement en raison de la durée de la relation contractuelle.

    50      La Cour n’étant pas compétente, conformément à la jurisprudence rappelée aux points 31 et 32 de la présente ordonnance, pour interpréter le droit interne des États membres, il appartient à la seule juridiction de renvoi d’effectuer les vérifications nécessaires à cet égard dans l’exercice de ses compétences dans le cadre de l’affaire au principal.

    51      Dans ces conditions, dans la présente affaire, il convient de considérer, comme cela résulte explicitement des questions posées par la juridiction de renvoi, et sous réserve des vérifications qu’il incombe à cette dernière d’effectuer, que la différence de traitement alléguée dans le litige au principal et à propos de laquelle la Cour est interrogée est fondée non pas sur la durée déterminée ou indéterminée de la relation de travail, mais sur la nature juridique de celle-ci. Or, ainsi qu’il a déjà été indiqué au point 44 de la présente ordonnance, une telle différence de traitement ne relève pas du principe de non-discrimination consacré par l’accord-cadre.

    52      Dans ces conditions, eu égard aux informations fournies à la Cour par la juridiction de renvoi, il apparaît que la différence de traitement faisant l’objet des questions posées par cette dernière ne relève pas du droit de l’Union (ordonnances Vino I, point 64, et Vino II, point 30).

    53      Il s’ensuit que cette différence de traitement relève uniquement du droit national, dont l’interprétation appartient exclusivement à la juridiction de renvoi (ordonnance Vino II, point 35).

    54      Il convient dès lors de constater que la Cour est manifestement incompétente pour répondre aux questions posées par le Juzgado de lo Social n° 1 de Córdoba.

     Sur les dépens

    55      La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

    Par ces motifs, la Cour (huitième chambre) dit pour droit:

    La Cour de justice de l’Union européenne est manifestement incompétente pour répondre aux questions posées à titre préjudiciel par le Juzgado de lo Social n° 1 de Córdoba (Espagne), par décision du 27 février 2012.

    Signatures


    * Langue de procédure: l’espagnol.

    Nahoru