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Document 62022CJ0585

    Arrêt de la Cour (première chambre) du 4 octobre 2024.
    X BV contre Staatssecretaris van Financiën.
    Renvoi préjudiciel – Liberté d’établissement – Article 49 TFUE – Impôt sur les sociétés – Emprunt transfrontalier intragroupe aux fins du financement de l’acquisition ou de l’augmentation d’une participation dans une société non liée au groupe concerné qui devient, à la suite de cette opération, liée à ce groupe – Déduction des intérêts versés au titre de cet emprunt – Emprunt contracté à des conditions de pleine concurrence – Notion de “montage purement artificiel” – Principe de proportionnalité.
    Affaire C-585/22.

    Court reports – general

    ECLI identifier: ECLI:EU:C:2024:822

     ARRÊT DE LA COUR (première chambre)

    4 octobre 2024 ( *1 )

    « Renvoi préjudiciel – Liberté d’établissement – Article 49 TFUE – Impôt sur les sociétés – Emprunt transfrontalier intragroupe aux fins du financement de l’acquisition ou de l’augmentation d’une participation dans une société non liée au groupe concerné qui devient, à la suite de cette opération, liée à ce groupe – Déduction des intérêts versés au titre de cet emprunt – Emprunt contracté à des conditions de pleine concurrence – Notion de “montage purement artificiel” – Principe de proportionnalité »

    Dans l’affaire C‑585/22,

    ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Hoge Raad der Nederlanden (Cour suprême des Pays-Bas), par décision du 2 septembre 2022, parvenue à la Cour le 7 septembre 2022, dans la procédure

    X BV

    contre

    Staatssecretaris van Financiën,

    LA COUR (première chambre),

    composée de M. A. Arabadjiev, président de chambre, MM. T. von Danwitz, P. G. Xuereb, A. Kumin et Mme I. Ziemele (rapporteure), juges,

    avocat général : M. N. Emiliou,

    greffier : Mme A. Lamote, administratrice,

    vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 15 novembre 2023,

    considérant les observations présentées :

    pour X BV, par MM. S. C. W. Douma et R. van Scharrenburg, conseillers fiscaux,

    pour le gouvernement néerlandais, par Mmes M. K. Bulterman et M. H. S. Gijzen, en qualité d’agents,

    pour le gouvernement belge, par MM. S. Baeyens et J.-C. Halleux, en qualité d’agents,

    pour le gouvernement espagnol, par M. L. Aguilera Ruiz, en qualité d’agent,

    pour la Commission européenne, par M. W. Roels, en qualité d’agent,

    ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 14 mars 2024,

    rend le présent

    Arrêt

    1

    La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation des articles 49, 56 et 63 TFUE.

    2

    Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant X BV, une société de droit néerlandais, au Staatssecretaris van Financiën (secrétaire d’État aux Finances, Pays-Bas) (ci-après l’« administration fiscale ») au sujet de la possibilité de déduire fiscalement les intérêts payés au titre d’un emprunt intragroupe, contracté afin de financer l’acquisition d’une société non liée au groupe concerné.

    Le cadre juridique néerlandais

    3

    L’article 10a de la Wet op de vennootschapsbelasting 1969 (loi de 1969 relative à l’impôt sur les sociétés), telle qu’en vigueur en 2007 (Stb. 2006, no 631) (ci-après la « loi relative à l’impôt sur les sociétés »), prévoit :

    « 1.   Dans le cadre de la détermination du bénéfice [...], ne viennent pas en déduction les intérêts – frais et résultats de change compris – relatifs à des dettes dues, en droit ou en fait, directement ou indirectement, à une entité liée ou à une personne physique liée dans la mesure où les dettes ont, en droit ou en fait, directement ou indirectement, un lien avec une des opérations juridiques suivantes :

    [...]

    c)

    l’acquisition ou l’augmentation d’une participation par le contribuable, par une entité qui est liée à celui-ci et soumise à l’impôt [sur les sociétés] ou par une personne physique qui est liée à ce contribuable et réside aux Pays-Bas, dans une entité qui, à la suite de cette acquisition ou [de cette] augmentation de participation, est une entité qui est liée audit contribuable.

    [...]

    3.   Le paragraphe 1 n’est pas applicable si le contribuable rend plausible :

    a)

    le fait que l’emprunt et l’opération juridique qui y est liée se fondent, dans une mesure déterminante, sur des considérations économiques ; ou

    b)

    le fait qu’il est prélevé, en fin de compte, sur les intérêts dans le chef de celui à qui les intérêts, en droit ou en fait, directement ou indirectement, sont dus un impôt sur les bénéfices ou sur le revenu qui, selon les critères néerlandais, est raisonnable et qu’il n’y a pas de compensations de pertes ou de droits d’un autre type pour les années ayant précédé l’année où la dette a été contractée, ce qui a pour conséquence qu’il n’est dû sur les intérêts, en fin de compte, aucun impôt selon les critères raisonnables visés, excepté dans le cas où il est plausible que la dette a été contractée en vue de la compensation de pertes ou de droits d’un autre type qui sont nés l’année même ou naîtront à court terme. Un impôt prélevé sur les bénéfices est raisonnable selon les normes néerlandaises s’il entraîne un prélèvement à un taux d’au moins 10 % sur un bénéfice imposable déterminé selon les normes néerlandaises [...]

    4.   Aux fins du présent article [...], est réputée être une entité liée au contribuable :

    a)

    une entité dans laquelle le contribuable a une participation d’au moins un tiers ;

    b)

    une entité qui a une participation d’au moins un tiers dans le contribuable ;

    c)

    une entité dans laquelle un tiers a une participation d’au moins un tiers, alors que ce tiers a également une participation d’au moins un tiers dans le contribuable.

    [...] »

    Le litige au principal et les questions préjudicielles

    4

    X fait partie d’un groupe de sociétés multinational. L’associé unique de X est A, une société de droit belge, dont les actions étaient détenues par B, une autre société de droit belge, à hauteur de 39 % du capital de celle-ci pendant la période allant de l’année 2000 au 22 décembre 2002, et à hauteur de 44,47 % de ce capital depuis cette dernière date. Les autres actions de A étaient cotées à la Bourse de Bruxelles (Belgique) et étaient donc détenues par le public.

    5

    Le groupe constitué par B et A comprend C, une société établie en Belgique. Entre l’année 1999 et l’année 2010, C avait, à des fins fiscales, le statut de « centre de coordination », au sens de la législation fiscale belge. À ce titre, C bénéficiait d’un régime fiscal spécial, en vertu duquel, notamment, son bénéfice imposable était déterminé forfaitairement et elle ne devait retenir aucun précompte mobilier sur les paiements d’intérêts. Au cours de l’année 2000, A détenait 53,05 % des actions ou parts de C et B détenait 46,95 % des actions ou parts de C. Le 22 décembre 2002, la participation de A et de B est devenue, respectivement, de 64,3 % et de 27,8 % des actions ou parts dans C, les 7,9 % restants étant détenus par des tiers.

    6

    Au cours de l’année 2000, X a acquis auprès de tiers 72 % des actions de F, une société de droit néerlandais, et A a acquis auprès de ces tiers les 28 % restants de ces actions. X a financé l’acquisition desdites actions par des emprunts contractés auprès de C, qui a utilisé à cet effet des fonds propres obtenus par un apport en capital effectué par A.

    7

    Dans l’avis d’imposition adressé à X pour l’exercice 2007 au titre de l’impôt sur les sociétés, l’administration fiscale a refusé la déduction des intérêts payés par cette société à C. X a contesté ce refus, d’abord, devant le rechtbank Gelderland (tribunal de Gueldre, Pays‑Bas) et, ensuite, devant le Gerechtshof Arnhem‑Leeuwarden (cour d’appel d’Arnhem-Leeuwarden, Pays‑Bas). Cette dernière juridiction a notamment jugé, dans son arrêt du 20 octobre 2020, que les articles 49, 56 et 63 TFUE ne s’opposaient pas à la limitation de la déduction des intérêts prévue à l’article 10a de la loi relative à l’impôt sur les sociétés, selon lequel ne sont pas déduits les intérêts au titre de dettes contractées auprès d’une entité liée, dans la mesure où ces dettes se rapportent à l’acquisition ou à l’augmentation d’une participation dans une entité qui, à la suite de cette acquisition ou de cette augmentation, devient une entité liée au contribuable, sauf si ce dernier prouve que l’une des deux conditions visées à cet article 10a, paragraphe 3, est satisfaite.

    8

    X a formé un pourvoi en cassation contre cet arrêt devant le Hoge Raad der Nederlanden (Cour suprême des Pays-Bas), qui est la juridiction de renvoi. Cette juridiction considère que la législation nationale en cause au principal est susceptible de défavoriser les situations transfrontalières. En effet, une entité résidente, liée au contribuable, satisferait en général à la condition prévue à l’article 10a, paragraphe 3, sous b), de la loi relative à l’impôt sur les sociétés, tandis qu’une entité non-résidente, liée à ce contribuable, remplirait, de fait, moins souvent cette exigence et la déduction des intérêts débiteurs relatifs à un prêt contracté auprès de cette dernière entité ne serait possible que s’il était satisfait à la condition prévue à l’article 10a, paragraphe 3, sous a), de cette loi.

    9

    Une telle restriction serait néanmoins justifiée, selon la juridiction de renvoi, par la nécessité de la lutte contre la fraude et l’évasion fiscales, dès lors que la législation en cause au principal viserait spécifiquement à faire obstacle à des comportements de deux ou de plusieurs entités liées consistant à créer des montages purement artificiels, dépourvus de réalité économique, dans le but d’éluder l’impôt normalement dû sur les bénéfices générés par des activités réalisées sur le territoire national au moyen d’intérêts débiteurs générés artificiellement, à savoir dus au titre d’une dette d’emprunt contractée de manière arbitraire et sans motifs économiques.

    10

    Cette juridiction précise que les dettes d’emprunt sont contractées de manière arbitraire et sans motifs économiques, notamment, lorsque, au sein d’un groupe d’entités liées, le mode de financement d’une opération, elle-même économiquement fondée, est dicté par des motifs fiscaux dans une mesure telle qu’en font partie des actes juridiques qui ne sont pas nécessaires à la réalisation des objectifs économiquement fondés et qui, sans ces motifs fiscaux, n’auraient pas été effectués, même si les intérêts débiteurs sur ces dettes sont identiques à ceux qui auraient été convenus entre des entreprises indépendantes. La législation en cause au principal concernerait donc une érosion de la base d’imposition non pas du fait d’intérêts débiteurs excessifs, mais par des intérêts débiteurs suscités artificiellement.

    11

    La juridiction de renvoi estime que le refus total de la déduction des intérêts débiteurs ainsi générés artificiellement serait proportionné à l’objectif de la lutte contre la fraude et l’évasion fiscales, puisque, d’une part, il se limiterait aux situations où l’emprunt au sein d’un groupe de sociétés liées est dicté par des motifs fiscaux dans une mesure telle que cet emprunt n’est pas nécessaire à la réalisation d’objectifs économiquement fondés et que ledit emprunt n’aurait pas été contracté entre des entités entre lesquelles il n’existe aucune relation spéciale, et, d’autre part, les conditions devant être satisfaites pour apporter la preuve et pour effectuer la déduction des intérêts débiteurs ne seraient pas à ce point strictes que cette déduction ne présenterait aucune portée effective.

    12

    Cette juridiction se demande, cependant, si son analyse demeure fondée au regard, notamment, de l’arrêt du 20 janvier 2021, Lexel (C‑484/19, EU:C:2021:34, points 51 et 56). D’une part, elle s’interroge sur le point de savoir s’il peut être déduit de cet arrêt que les opérations contractées à des conditions de pleine concurrence ne constituent pas, pour ce seul motif, des montages purement artificiels. En effet, au point 56 dudit arrêt, la Cour a jugé, en substance, que la législation nationale en cause dans cette affaire était susceptible d’inclure dans son champ d’application des transactions qui ont été conclues dans des conditions de pleine concurrence et qui, par conséquent, ne constituent pas des montages purement artificiels ou fictifs élaborés dans le but d’éluder l’impôt normalement dû sur les bénéfices générés par des activités réalisées sur le territoire national. D’autre part, elle se demande s’il convient d’accorder de l’importance à la circonstance que, à la différence de la législation en cause dans l’affaire ayant donné lieu à cet arrêt, la législation en cause au principal dans la présente affaire porte non seulement sur un transfert de participations intragroupe, mais aussi sur l’acquisition d’une entité externe qui devient, à la suite de cette acquisition, une entité liée au groupe.

    13

    Dans ces conditions, le Hoge Raad der Nederlanden (Cour suprême des Pays-Bas) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

    « 1)

    Les articles 49, 56 et/ou 63 TFUE doivent-ils être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une législation nationale en vertu de laquelle, dans la détermination du bénéfice d’un contribuable, les intérêts pour une dette d’emprunt contractée auprès d’une entité liée à ce contribuable, dette qui se rapporte à l’acquisition ou à l’augmentation d’une participation dans une entité qui, après cette acquisition ou cette augmentation, est une entité liée, ne sont pas susceptibles de faire l’objet d’une déduction, parce que cette dette doit être considérée comme un montage purement artificiel (ou comme faisant partie d’un tel montage), peu importe si, en elle-même, elle a été contractée à des conditions de pleine concurrence ?

    2)

    Si la première question appelle une réponse négative, les articles 49, 56 et/ou 63 TFUE doivent-ils être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une législation nationale en vertu de laquelle, dans la détermination du bénéfice d’un contribuable, la déduction des intérêts pour une dette d’emprunt qui est contractée auprès d’une entité liée à ce contribuable et qui est considérée comme un montage purement artificiel (ou comme faisant partie d’un tel montage), dette qui se rapporte à l’acquisition ou à l’augmentation d’une participation dans une entité qui, après cette acquisition ou cette augmentation, est une entité liée, est intégralement refusée, même si, en lui-même, le montant de ces intérêts ne dépasse pas celui qui aurait été convenu entre des entreprises indépendantes ?

    3)

    La réponse à la première et/ou à la deuxième question est-elle différente si l’acquisition ou l’augmentation concernée de la participation se rapporte a) à une entité qui était déjà, avant cette acquisition ou cette augmentation, une entité liée audit contribuable, ou bien b) à une entité qui ne devient une entité liée au même contribuable qu’après ladite acquisition ou ladite augmentation ? »

    Sur la demande de réouverture de la phase orale de la procédure

    14

    Par un acte déposé au greffe de la Cour le 10 avril 2024, à la suite de la présentation des conclusions de M. l’avocat général, X a demandé à ce que la réouverture de la phase orale de la procédure soit ordonnée, en application de l’article 83 du règlement de procédure de la Cour.

    15

    À l’appui de cette demande, X considère, en substance, que, en appelant la Cour à revoir la position qu’elle a adoptée dans l’arrêt du 20 janvier 2021, Lexel (C‑484/19, EU:C:2021:34), M. l’avocat général se fonde, au point 71 de ses conclusions, sur un argument qui n’aurait pas été débattu entre les parties. Partant, X souhaiterait faire valoir des arguments portant sur le respect du principe de sécurité juridique, en estimant qu’une période de transition serait nécessaire, si l’approche préconisée par M. l’avocat général était entérinée par la Cour, et que cette approche aurait des effets potentiellement discriminatoires à son égard, en raison de son établissement aux Pays-Bas, et non en Suède. X souhaiterait également aborder la question des effets de ladite approche sur la jurisprudence de la Cour de l’Association européenne de libre-échange (AELE).

    16

    À cet égard, il convient de rappeler que, en vertu de l’article 252, second alinéa, TFUE, l’avocat général présente publiquement, en toute impartialité et en toute indépendance, des conclusions motivées sur les affaires qui, conformément au statut de la Cour de justice de l’Union européenne, requièrent son intervention. La Cour n’est liée ni par ces conclusions ni par la motivation au terme de laquelle l’avocat général parvient à celles‑ci (arrêt du 21 décembre 2023, Chief Appeals Officer e.a., C‑488/21, EU:C:2023:1013, point 34 ainsi que jurisprudence citée).

    17

    En outre, le désaccord d’un intéressé visé à l’article 23 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne avec les conclusions de l’avocat général, quelles que soient les questions que ce dernier examine dans ses conclusions, ne peut constituer en soi un motif justifiant la réouverture de la phase orale de la procédure (arrêt du 21 décembre 2023, Chief Appeals Officer e.a., C‑488/21, EU:C:2023:1013, point 35 ainsi que jurisprudence citée).

    18

    Certes, la Cour peut, à tout moment, l’avocat général entendu, ordonner la réouverture de la phase orale de la procédure, conformément à l’article 83 du règlement de procédure, notamment si elle considère qu’elle est insuffisamment éclairée, ou lorsqu’une partie a soumis, après la clôture de cette phase de la procédure, un fait nouveau de nature à exercer une influence décisive sur sa décision, ou encore lorsque l’affaire doit être tranchée sur la base d’un argument qui n’a pas été débattu entre les parties ou les intéressés visés à l’article 23 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne (arrêt du 21 décembre 2023, Chief Appeals Officer e.a., C‑488/21, EU:C:2023:1013, point 36).

    19

    Toutefois, en l’occurrence, tel n’est pas le cas. En effet, d’une part, force est de relever que la question de la portée de l’arrêt du 20 janvier 2021, Lexel (C‑484/19, EU:C:2021:34), a été débattue lors des phases écrite et orale de la procédure. D’autre part, la demande de réouverture de la phase orale de la procédure ne contient aucun fait nouveau de nature à exercer une influence décisive sur la décision que la Cour est appelée à rendre dans cette affaire.

    20

    Dans ces conditions, la Cour considère, l’avocat général entendu, qu’elle est suffisamment éclairée par les différents arguments qui ont été débattus devant elle et, en conséquence, qu’il n’y a pas lieu d’ordonner la réouverture de la phase orale de la procédure.

    Sur les questions préjudicielles

    21

    Par ses trois questions, qu’il convient d’examiner ensemble, la juridiction de renvoi demande, en substance, si les articles 49, 56 et 63 TFUE doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une législation nationale en vertu de laquelle, dans la détermination du bénéfice d’un contribuable, la déduction des intérêts versés au titre d’une dette d’emprunt contractée auprès d’une entité liée, relative à l’acquisition ou à l’augmentation d’une participation dans une autre entité, qui devient, à la suite de cette acquisition ou de cette augmentation, une entité liée à ce contribuable, est intégralement refusée lorsque cette dette est considérée comme constituant un montage purement artificiel ou faisant partie d’un tel montage, et cela même si ladite dette a été contractée à des conditions de pleine concurrence et si le montant de ces intérêts ne dépasse pas celui qui aurait été convenu entre des entreprises indépendantes.

    22

    D’emblée, il y a lieu de relever que le litige au principal est afférent à un avis d’imposition au titre de l’exercice 2007, de sorte que le traité CE s’applique ratione temporis à celui-ci. Cela étant, l’interprétation des dispositions du traite FUE relatives à la liberté d’établissement, à la libre prestation de services et à la libre circulation des capitaux valant, en tout état de cause, également pour les dispositions correspondantes du traité CE, il sera fait référence aux articles 49, 56 et 63 TFUE, visés par la juridiction de renvoi.

    Sur la liberté fondamentale applicable

    23

    Il résulte d’une jurisprudence constante que, pour déterminer si une législation nationale relève de l’une ou de l’autre des libertés fondamentales garanties par le traité FUE, il convient de prendre en considération l’objet de la législation concernée (arrêt du 16 février 2023, Gallaher, C‑707/20, EU:C:2023:101, point 55 et jurisprudence citée).

    24

    Ainsi, relève du champ d’application de l’article 49 TFUE une législation nationale qui a vocation à s’appliquer aux seules participations permettant d’exercer une influence certaine sur les décisions d’une société et de déterminer les activités de celle-ci (arrêt du 16 février 2023, Gallaher, C‑707/20, EU:C:2023:101, point 56 et jurisprudence citée).

    25

    Il ressort en outre de la jurisprudence de la Cour que, dans la mesure où une réglementation nationale ne vise que des relations au sein d’un groupe de sociétés, elle affecte de manière prépondérante la liberté d’établissement (arrêt du 16 février 2023, Gallaher, C‑707/20, EU:C:2023:101, point 58 et jurisprudence citée).

    26

    En l’occurrence, la législation nationale en cause au principal porte sur le traitement fiscal des intérêts versés au titre de dettes d’emprunt contractées par un contribuable auprès d’une entité ou d’une personne physique liée à ce contribuable, dans la mesure où ces dettes se rapportent à l’acquisition ou à l’augmentation d’une participation dans une autre entité qui devient, à la suite de cette acquisition ou de cette augmentation, une entité également liée à ce contribuable.

    27

    En vertu de l’article 10a, paragraphe 4, de la loi relative à l’impôt sur les sociétés, des entités sont liées lorsque l’une détient directement ou indirectement 33,3 % des participations dans l’autre, ou bien lorsqu’une troisième entité détient directement ou indirectement 33,3 % de participations dans les deux autres entités.

    28

    Conformément à la jurisprudence de la Cour, un tel pourcentage est susceptible de conférer à la société participante une influence certaine sur les décisions de la société avec laquelle elle est liée (voir, en ce sens, arrêt du 31 mai 2018, Hornbach-Baumarkt, C‑382/16, EU:C:2018:366, point 29).

    29

    Par conséquent, dès lors que l’objet de la législation en cause au principal porte sur le traitement fiscal des intérêts versés au titre de dettes au sein d’un groupe de sociétés, entre des entités susceptibles d’avoir directement ou indirectement une influence certaine l’une sur l’autre, cette législation relève du champ d’application de la liberté d’établissement.

    30

    À supposer que le régime fiscal en cause au principal comporte des effets restrictifs sur la libre prestation des services ou sur la libre circulation des capitaux, de tels effets seraient la conséquence inéluctable d’une éventuelle entrave à la liberté d’établissement et ils ne justifient pas un examen distinct des questions préjudicielles au regard des articles 56 et 63 TFUE (voir, par analogie, arrêt du 17 mars 2022, AllianzGI-Fonds AEVN, C‑545/19, EU:C:2022:193, point 34 et jurisprudence citée).

    31

    Il convient, dès lors, de répondre aux questions préjudicielles au regard de l’article 49 TFUE.

    32

    À cet égard, il importe de rappeler que cet article impose la suppression des restrictions à la liberté d’établissement des ressortissants d’un État membre sur le territoire d’un autre État membre. Cette liberté comprend, pour les sociétés constituées en conformité avec la législation d’un État membre et ayant leur siège statutaire, leur administration centrale ou leur principal établissement à l’intérieur de l’Union européenne, le droit d’exercer leur activité dans d’autres États membres par l’intermédiaire d’une filiale, d’une succursale ou d’une agence (arrêt du 20 janvier 2021, Lexel, C‑484/19, EU:C:2021:34, point 33 et jurisprudence citée).

    33

    Une différence de traitement résultant de la législation d’un État membre au détriment des sociétés qui exercent leur liberté d’établissement n’est admissible que si elle concerne des situations qui ne sont pas objectivement comparables ou si elle est justifiée par une raison impérieuse d’intérêt général et proportionnée à cet objectif, ce qui implique qu’elle soit propre à garantir, de façon cohérente et systématique, la réalisation de l’objectif poursuivi et qu’elle n’aille pas au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre celui-ci [voir, en ce sens, arrêts du 7 septembre 2022, Cilevičs e.a., C‑391/20, EU:C:2022:638, point 65 ainsi que jurisprudence citée, et du 22 septembre 2022, W (Déductibilité des pertes définitives d’un établissement stable non-résident), C‑538/20, EU:C:2022:717, point 18 ainsi que jurisprudence citée].

    Sur l’existence d’une différence de traitement

    34

    Il importe de relever que, dans la mesure où une société mère, établie dans un État membre, exerce son activité dans un autre État membre par l’intermédiaire d’une filiale, sa liberté d’établissement peut être affectée par toute restriction qui frappe cette dernière (voir, en ce sens, arrêt du 3 mars 2020, Vodafone Magyarország, C‑75/18, EU:C:2020:139, point 41).

    35

    En outre, dans une situation impliquant un groupe de sociétés et portant sur le refus opposé par l’administration fiscale d’un État membre à une société établie dans cet État membre, dont la société mère est établie dans un autre État membre, d’autoriser la déduction de certaines charges d’intérêts versés à une autre société du même groupe, établie dans cet autre État membre, alors que cette déduction aurait été possible si la société bénéficiaire de ces intérêts avait été établie dans le premier État membre, la Cour a jugé qu’une telle différence de traitement avait une incidence négative sur la liberté d’établissement (voir, en ce sens, arrêt du 20 janvier 2021, Lexel, C‑484/19, EU:C:2021:34, points 40 et 41).

    36

    Il convient donc d’examiner si la législation en cause au principal conduit à une différence de traitement ayant une incidence négative sur la liberté d’établissement.

    37

    Il importe de rappeler que sont, à cet égard, prohibées non seulement les discriminations ostensibles fondées sur le lieu du siège des sociétés, mais encore toutes formes dissimulées de discrimination qui, par application d’autres critères de distinction, aboutissent en fait au même résultat (arrêt du 3 mars 2020, Tesco-Global Áruházak, C‑323/18, EU:C:2020:140, point 62 et jurisprudence citée).

    38

    En particulier, un régime fiscal qui prévoit un critère de différenciation apparemment objectif, mais qui défavorise dans la plupart des cas, compte tenu de ses caractéristiques, les sociétés ayant leur siège dans un autre État membre et étant dans une situation comparable à celle de sociétés ayant leur siège dans l’État membre d’imposition constitue une discrimination indirecte fondée sur le lieu du siège des sociétés interdite aux articles 49 et 54 TFUE (voir, en ce sens, arrêt du 21 décembre 2023, Cofidis, C‑340/22, EU:C:2023:1019, point 42 et jurisprudence citée).

    39

    En l’occurrence, il convient de relever que l’article 10a, paragraphe 1, sous c), de la loi relative à l’impôt sur les sociétés, qui prévoit le refus de déduction des intérêts versés au titre de dettes d’emprunt contractées auprès d’une entité liée, dans les conditions visées à cette disposition, ne fait aucune distinction selon que le groupe de sociétés concerné est transfrontalier ou non (voir, par analogie, arrêt du 22 février 2018, X et X, C‑398/16 et C‑399/16, EU:C:2018:110, point 35).

    40

    L’article 10a, paragraphe 3, sous a) et b), de cette loi, qui prévoit les conditions selon lesquelles une telle déduction est néanmoins possible, est également indistinctement applicable aux situations internes et transfrontalières.

    41

    Toutefois, la juridiction de renvoi considère, comme mentionné au point 8 du présent arrêt, que l’article 10a, paragraphe 3, sous b), de la loi relative à l’impôt sur les sociétés qui exige qu’il soit établi, premièrement, qu’un impôt est en définitive prélevé sur les intérêts en question et, deuxièmement, que cet impôt est raisonnable selon les critères du droit néerlandais, à savoir qu’il entraîne une imposition d’au moins 10 % sur le bénéfice imposable déterminé selon ces critères, a néanmoins pour effet de défavoriser les situations transfrontalières.

    42

    Il appartiendra à la juridiction de renvoi, qui est seule compétente pour apprécier les faits du litige au principal et pour interpréter la législation nationale concernée, de déterminer si une imposition à un taux inférieur à 10 % sur le bénéfice imposable déterminé selon lesdits critères est susceptible de s’appliquer aux entités liées bénéficiaires d’intérêts ayant leur siège aux Pays-Bas.

    43

    Si tel n’était pas le cas ou si, bien que possible en théorie, une telle imposition n’était pas appliquée en pratique, il conviendrait de considérer que l’article 10a, paragraphe 3, sous b), de la loi relative à l’impôt sur les sociétés, tout en prévoyant une condition apparemment objective, instaure une condition qui sera, en fait, satisfaite dans le cas d’une société établie aux Pays-Bas qui verse des intérêts à une entité liée établie dans cet État membre. Il s’ensuivrait également que seules les sociétés établies aux Pays-Bas qui versent des intérêts à une entité liée établie dans un autre État membre pourraient se trouver dans une situation où cette condition n’est pas satisfaite, lorsque ce dernier État membre, à l’instar du Royaume de Belgique en l’occurrence, soumet cette entité à un impôt moins élevé.

    44

    Par conséquent, si une imposition à un taux inférieur à 10 % n’était pas pratiquée dans le cadre du régime fiscal néerlandais, la conséquence inéluctable et non aléatoire (voir, a contrario, arrêt du 3 mars 2020, Tesco-Global Áruházak, C‑323/18, EU:C:2020:140, point 72) d’une condition telle que celle prévue à l’article 10a, paragraphe 3, sous b), de la loi relative à l’impôt sur les sociétés serait qu’elle affecterait uniquement les situations transfrontalières.

    45

    Ce faisant, le traitement défavorable d’une société, filiale d’une société mère établie dans un autre État membre, fondé sur le lieu du siège de l’entité liée bénéficiaire des intérêts payés par cette filiale est susceptible de dissuader cette société mère d’exercer une activité aux Pays-Bas par l’intermédiaire de ladite filiale, tout en maintenant cette entité liée dans cet autre État membre, dans lequel elle est soumise à un régime fiscal favorable. Ainsi que l’a relevé, en substance, M. l’avocat général au point 44 de ses conclusions, un tel traitement défavorable est susceptible également de dissuader une société mère, établie aux Pays-Bas, d’exercer sa liberté d’établissement en constituant une entité liée dans un autre État membre dans lequel elle serait soumise à un régime fiscal favorable.

    46

    Au regard de l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de constater que, tout en étant indistinctement applicable, la législation en cause au principal comporte une différence de traitement susceptible d’affecter l’exercice de la liberté d’établissement.

    47

    Il convient donc de vérifier, conformément à la jurisprudence citée au point 33 du présent arrêt, si cette différence de traitement concerne des situations qui ne sont pas objectivement comparables.

    Sur la comparabilité des situations

    48

    Il découle de la jurisprudence de la Cour, d’une part, que le caractère comparable ou non d’une situation transfrontalière avec une situation interne doit être examiné en tenant compte de l’objectif poursuivi par les dispositions de la législation nationale concernée ainsi que de l’objet et du contenu de ces dernières, et, d’autre part, que seuls les critères de distinction pertinents établis par cette législation doivent être pris en compte afin d’apprécier si la différence de traitement résultant de ladite législation reflète une différence de situation objective (arrêt du 27 avril 2023, L Fund, C‑537/20, EU:C:2023:339, point 54 et jurisprudence citée).

    49

    Ainsi qu’il est relevé au point 29 du présent arrêt, la législation nationale en cause au principal a pour objet le traitement fiscal des intérêts versés au titre de dettes au sein d’un groupe de sociétés entre des entités susceptibles d’avoir directement ou indirectement une influence certaine l’une sur l’autre. Cette législation vise à conférer la possibilité de déduire, dans le cadre de la détermination du bénéfice, les intérêts relatifs à des dettes dues à une entité liée uniquement lorsque ces intérêts débiteurs ne sont pas générés artificiellement.

    50

    Or, il convient de relever que, à l’égard d’un avantage fiscal, tel que la possibilité de déduire, dans le cadre de la détermination du bénéfice, les intérêts relatifs à des dettes dues à une entité liée, un contribuable ne se trouve pas dans une situation différente selon que l’entité bénéficiaire de ces intérêts est établie ou non dans le même État membre ou selon qu’elle est soumise, dans un autre État membre, à un traitement fiscal plus ou moins avantageux (voir, par analogie, arrêt du 5 juillet 2012, SIAT, C‑318/10, EU:C:2012:415, point 31). Dans tous ces cas de figure, l’emprunt au titre duquel lesdits intérêts sont versés ainsi que l’opération juridique qui y est liée peuvent se fonder sur des considérations économiques.

    51

    Dans ces conditions, et sans préjudice de l’examen du caractère éventuellement justifié de la législation en cause au principal au titre d’une raison impérieuse d’intérêt général, il convient de considérer qu’une société ne se trouve pas dans une situation différente en raison du seul fait que l’entité liée, bénéficiaire des intérêts concernés, est établie dans un autre État membre, dans lequel ces intérêts sont soumis à un taux qui ne dépasse pas 10 % sur un bénéfice imposable déterminé selon les critères du droit néerlandais.

    52

    Par ailleurs, la Cour a jugé que la situation dans laquelle une société établie dans un État membre verse des intérêts pour un emprunt contracté auprès d’une société liée établie dans un autre État membre appartenant au même groupe n’est pas différente, en ce qui concerne le paiement de ces intérêts, d’une situation dans laquelle le bénéficiaire desdits intérêts est une société du groupe établie dans le même État membre (arrêt du 20 janvier 2021, Lexel, C‑484/19, EU:C:2021:34, point 44).

    Sur la justification

    53

    Il y a lieu d’examiner, à la lumière de la jurisprudence citée au point 32 du présent arrêt, si la différence de traitement en cause au principal peut être justifiée par une raison impérieuse d’intérêt général et si elle est proportionnée à cet objectif.

    Sur l’existence d’une raison impérieuse d’intérêt général

    54

    La juridiction de renvoi, les gouvernements ayant présenté des observations ainsi que la Commission européenne font valoir que la restriction engendrée par la législation en cause au principal est justifiée par la nécessité de prévenir la fraude et l’évasion fiscales. En particulier, la juridiction de renvoi précise, comme mentionné au point 9 du présent arrêt, que cette législation vise à prévenir l’érosion de la base d’imposition aux Pays-Bas au moyen d’intérêts débiteurs générés artificiellement, c’est-à-dire dus au titre d’une dette d’emprunt contractée de manière arbitraire et sans motifs économiques, notamment, lorsque, au sein d’un groupe d’entités liées, le mode de financement d’une opération économiquement fondée est dicté par des motifs fiscaux dans une mesure telle qu’en font partie des actes juridiques qui ne sont pas nécessaires à la réalisation des objectifs économiquement fondés et qui, sans ces motifs fiscaux, n’auraient pas été effectués.

    55

    À cet égard, la Cour a jugé que la lutte contre l’évasion et la fraude fiscales constitue une raison impérieuse d’intérêt général susceptible de justifier une restriction à l’exercice des libertés de circulation garanties par le traité FUE (voir, en ce sens, arrêts du 5 juillet 2012, SIAT, C‑318/10, EU:C:2012:415, point 36, ainsi que du 7 septembre 2017, Eqiom et Enka, C‑6/16, EU:C:2017:641, point 63).

    56

    Une mesure nationale restreignant la liberté d’établissement peut également être justifiée lorsqu’elle vise à lutter contre les montages purement artificiels, dont le but est d’échapper à l’emprise de la législation de l’État membre concerné (arrêt du 1er avril 2014, Felixstowe Dock and Railway Company e.a., C‑80/12, EU:C:2014:200, point 31).

    57

    Conformément à une jurisprudence constante, pour qu’une restriction à la liberté d’établissement prévue à l’article 49 TFUE puisse être justifiée par les motifs visés aux points 55 et 56 du présent arrêt, l’objet spécifique d’une telle restriction doit être de faire obstacle à des comportements consistant à créer des montages purement artificiels, dépourvus de réalité économique, dans le but d’éluder l’impôt normalement dû sur les bénéfices générés par des activités réalisées sur le territoire national [voir, notamment, arrêts du 12 septembre 2006, Cadbury Schweppes et Cadbury Schweppes Overseas, C‑196/04, EU:C:2006:544, points 51 et 55 ; du 13 mars 2007, Test Claimants in the Thin Cap Group Litigation, C‑524/04, EU:C:2007:161, points 72 et 74 ; du 26 février 2019, X (Sociétés intermédiaires établies dans des pays tiers), C‑135/17, EU:C:2019:136, point 73, ainsi que du 20 janvier 2021, Lexel, C‑484/19, EU:C:2021:34, point 49).

    58

    La Cour a également précisé que le principe d’interdiction des pratiques abusives s’applique, en matière fiscale, lorsque la recherche d’un avantage fiscal constitue le but essentiel des opérations concernées (arrêt du 26 février 2019, N Luxembourg 1 e.a., C‑115/16, C‑118/16, C‑119/16 et C‑299/16, EU:C:2019:134, point 107 ainsi que jurisprudence citée).

    59

    En effet, si la recherche, par un contribuable, du régime fiscal le plus avantageux pour lui ne saurait, en tant que telle, fonder une présomption générale de fraude ou d’abus, il n’en demeure pas moins que ce contribuable ne saurait bénéficier d’un droit ou d’un avantage découlant du droit de l’Union lorsque l’opération concernée est purement artificielle sur le plan économique et vise à échapper à l’emprise de la législation de l’État membre concerné (arrêt du 26 février 2019, N Luxembourg 1 e.a., C‑115/16, C‑118/16, C‑119/16 et C‑299/16, EU:C:2019:134, point 109 ainsi que jurisprudence citée).

    60

    Il importe de relever, à cet égard, que la Cour a constaté dans les affaires ayant donné lieu à l’arrêt du 22 février 2018, X et X (C‑398/16 et C‑399/16, EU:C:2018:110, points 46 et 48), dans lesquelles était en cause l’article 10a, paragraphe 2, sous b), de la loi relative à l’impôt sur les sociétés, telle qu’en vigueur en 2004, lequel correspond, en substance, à l’article 10a, paragraphe 3, sous b), de la loi relative à l’impôt sur les sociétés, comme l’a confirmé la juridiction de renvoi dans l’affaire au principal, que cette disposition poursuit indéniablement l’objectif de lutte contre l’évasion et la fraude fiscales et vise à empêcher que des fonds propres d’un groupe ne soient présentés, de manière factice, comme étant des fonds empruntés par une entité néerlandaise de ce groupe et que les intérêts de cet emprunt puissent venir en déduction du résultat imposable aux Pays-Bas.

    61

    La circonstance que la législation en cause au principal porte non seulement sur les situations où un contribuable contracte une dette d’emprunt auprès d’une entité liée en vue du financement de l’acquisition ou de l’augmentation d’une participation dans une entité qui était déjà liée à ce contribuable, à l’instar de ce qui était en cause dans les affaires ayant donné lieu à l’arrêt du 22 février 2018, X et X (C‑398/16 et C‑399/16, EU:C:2018:110), mais aussi sur celles où une entité ne devient une entité liée au même contribuable qu’à la suite de cette acquisition ou de cette augmentation, comme en l’occurrence, ne remet pas en cause cette appréciation. En effet dans tous ces cas de figure, ainsi que l’a relevé M. l’avocat général au point 58 de ses conclusions, cette législation vise à prévenir le caractère artificiel des opérations concernées, qui trouve son origine dans la redirection de fonds propres et dans leur conversion en capitaux d’emprunt.

    Sur la proportionnalité

    62

    Ainsi qu’il ressort du point 33 du présent arrêt, il convient encore d’apprécier si la législation en cause au principal est propre à garantir, de façon cohérente et systématique, la réalisation de l’objectif poursuivi.

    63

    À cet égard, il convient de rappeler que, en vertu de la législation en cause au principal, un contribuable peut déduire de son bénéfice imposable les intérêts versés au titre de dettes d’emprunt contractées auprès d’entités liées qui se rapportent à l’acquisition ou à l’augmentation d’une participation dans une entité qui devient liée après cette acquisition ou cette augmentation, uniquement s’il démontre que les conditions prévues à l’article 10a, paragraphe 3, sous a) ou b), de la loi relative à l’impôt sur les sociétés sont satisfaites.

    64

    Cette législation est donc propre à garantir la réalisation de l’objectif poursuivi, et ce de façon cohérente et systématique, dès lors qu’elle permet de neutraliser les effets des comportements de deux ou de plusieurs entités liées consistant à créer des montages purement artificiels, dépourvus de réalité économique, dans le but d’éluder l’impôt normalement dû sur les bénéfices générés par des activités réalisées sur le territoire national, en excluant de la déduction les intérêts débiteurs générés artificiellement ou, à tout le moins, en garantissant que ces intérêts sont imposés à un taux raisonnable dans l’État membre du bénéficiaire et que l’impôt sur les bénéfices ne soit totalement éludé.

    65

    Partant, il convient de vérifier si la restriction en cause au principal ne va pas au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre cet objectif.

    66

    À cet égard, la constatation de l’existence d’un montage purement artificiel exige, outre un élément subjectif consistant en la volonté d’obtenir un avantage fiscal, qu’il ressorte d’un ensemble d’éléments objectifs que, malgré un respect formel des conditions prévues par le droit de l’Union, l’objectif poursuivi par la liberté d’établissement n’a pas été atteint (voir, en ce sens, arrêt du 12 septembre 2006, Cadbury Schweppes et Cadbury Schweppes Overseas, C‑196/04, EU:C:2006:544, point 64 ainsi que jurisprudence citée, et, par analogie, arrêt du 26 février 2019, N Luxembourg 1 e.a., C‑115/16, C‑118/16, C‑119/16 et C‑299/16, EU:C:2019:134, point 124 ainsi que jurisprudence citée).

    67

    La Cour a jugé que peut être considérée comme n’allant pas au-delà de ce qui est nécessaire pour prévenir des pratiques abusives une législation nationale qui se fonde sur un examen d’éléments objectifs et vérifiables pour déterminer si une transaction présente le caractère d’un montage purement artificiel uniquement à des fins fiscales et qui, dans chaque cas où l’existence d’un tel montage ne peut être exclue, met le contribuable concerné en mesure, sans le soumettre à des contraintes administratives excessives, de produire des éléments concernant les éventuelles raisons commerciales pour lesquelles cette transaction a été conclue [voir, en ce sens, arrêt du 26 février 2019, X (Sociétés intermédiaires établies dans des pays tiers), C‑135/17, EU:C:2019:136, point 87 et jurisprudence citée].

    68

    Pour vérifier si une opération poursuit un objectif de fraude et d’abus, les autorités nationales compétentes ne sauraient se contenter d’appliquer des critères généraux prédéterminés, mais doivent procéder à un examen individuel de l’ensemble de l’opération concernée. L’institution d’une mesure fiscale revêtant une portée générale excluant automatiquement certaines catégories de contribuables de l’avantage fiscal, sans que l’administration fiscale soit tenue de fournir ne serait-ce qu’un commencement de preuve ou d’indice de fraude et d’abus, irait au-delà de ce qui est nécessaire pour éviter les fraudes et les abus (arrêt du 7 septembre 2017, Eqiom et Enka, C‑6/16, EU:C:2017:641, point 32 ainsi que jurisprudence citée).

    69

    En l’occurrence, la législation en cause au principal instaure une présomption selon laquelle les intérêts versés au titre de dettes d’emprunt contractées selon les critères précisés à l’article 10a, paragraphe 1, sous c), de la loi relative à l’impôt sur les sociétés constituent ou font partie des montages purement artificiels.

    70

    Ces critères, notamment le fait que ces dettes d’emprunt sont dues à une entité liée et ont un lien avec l’acquisition ou l’augmentation d’une participation dans une entité qui, à la suite de cette acquisition ou de cette augmentation, est une entité liée, constituent des indices, au sens de la jurisprudence rappelée au point 68 du présent arrêt, de l’existence d’un montage purement artificiel.

    71

    La possibilité pour le contribuable de renverser cette présomption en démontrant que sont satisfaites les conditions prévues à l’article 10a, paragraphe 3, sous a) et b), de la loi relative à l’impôt sur les sociétés permet de limiter le refus de la déduction des intérêts d’emprunt aux seules situations où l’emprunt au sein d’un groupe de sociétés liées est dicté par des motifs fiscaux dans une mesure telle que cet emprunt n’est pas nécessaire à la réalisation d’objectifs économiquement fondés et qu’il n’aurait absolument pas été contracté entre des entités n’entretenant pas de relations spéciales.

    72

    Il découle à cet égard des explications de la juridiction de renvoi que la condition prévue à l’article 10a, paragraphe 3, sous a), de la loi relative à l’impôt sur les sociétés porte tant sur le motif de l’emprunt et de l’opération juridique qui y est liée que sur les éléments objectifs caractérisant cet emprunt et cette opération juridique, le contribuable devant démontrer que ceux-ci sont justifiés par des considérations économiques et qu’ils auraient pu être convenus entre des entités en l’absence de ces relations spéciales. Il s’ensuit, selon cette juridiction et tel que mentionné au point 10 du présent arrêt, que, conformément à sa jurisprudence, les dettes d’emprunt contractées de manière arbitraire et sans motifs économiques constituent des montages purement artificiels, même si, en eux-mêmes, les intérêts débiteurs sur ces dettes sont identiques à ceux qui auraient été convenus entre des entreprises indépendantes.

    73

    Or, ainsi qu’il ressort du point 12 du présent arrêt, la juridiction de renvoi se demande s’il est possible de déduire de l’arrêt du 20 janvier 2021, Lexel (C‑484/19, EU:C:2021:34), et, notamment, du point 56 de celui-ci que des opérations consistant à contracter des dettes auprès d’une entité liée au contribuable ne constituent pas, par définition, des montages purement artificiels lorsqu’elles ont été établies à des conditions de pleine concurrence.

    74

    À cet égard, il importe de rappeler, premièrement, que la Cour a jugé que la circonstance qu’une société s’est vu octroyer un prêt par une autre société dans des conditions qui ne correspondent pas à ce que les sociétés concernées auraient convenu dans des conditions de pleine concurrence constitue pour l’État membre de résidence de la société emprunteuse un élément objectif et vérifiable par des tiers pour déterminer si la transaction concernée constitue, en tout ou en partie, un montage purement artificiel dont le but essentiel est d’échapper à l’emprise de la législation fiscale de cet État membre. Il convient alors de déterminer si, en l’absence de relations spéciales entre les sociétés concernées, le prêt en cause n’aurait pas été accordé ou si celui-ci aurait été accordé pour un montant ou à un taux d’intérêt différents (voir, en ce sens, arrêt du 13 mars 2007, Test Claimants in the Thin Cap Group Litigation, C‑524/04, EU:C:2007:161, point 81).

    75

    Il découle de cette jurisprudence que l’examen du respect des conditions de pleine concurrence porte non seulement sur les stipulations du contrat d’emprunt relatives, notamment, au montant ou au taux d’intérêt, mais également sur la logique économique de l’emprunt en cause et des opérations juridiques qui y sont liées. En effet, ce dernier examen implique de vérifier la validité économique de cet emprunt et des opérations juridiques qui y sont liées, en s’assurant que de telles opérations auraient pu être conclues entre les sociétés parties en l’absence de relations spéciales.

    76

    Un examen visant à s’assurer que non seulement les conditions de l’emprunt en cause, mais également le fait même de contracter celui-ci ainsi que les opérations juridiques qui y sont liées correspondent à ce que les sociétés auraient convenu dans des circonstances de pleine concurrence revient à s’assurer de la réalité économique des transactions dont l’absence constitue, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence rappelée aux points 57, 59 et 67 du présent arrêt, l’un des éléments déterminants dans la qualification d’une transaction de montage purement artificiel.

    77

    Deuxièmement, ainsi que la Cour l’a rappelé dans l’arrêt du 21 décembre 2023, BMW Bank e.a. (C‑38/21, C‑47/21 et C‑232/21, EU:C:2023:1014, points 281 et 283), postérieur à l’arrêt du 20 janvier 2021, Lexel (C‑484/19, EU:C:2021:34), il découle du principe général de droit selon lequel les justiciables ne sauraient frauduleusement ou abusivement se prévaloir des normes du droit de l’Union qu’un État membre doit refuser, même en l’absence de dispositions du droit national prévoyant un tel refus, le bénéfice des dispositions du droit de l’Union lorsque celles-ci sont invoquées par une personne non pas en vue de réaliser les objectifs de ces dernières dispositions, mais dans le but de bénéficier d’un avantage accordé à cette personne par le droit de l’Union, alors que les conditions objectives requises aux fins de l’obtention de l’avantage recherché, prévues par le droit de l’Union, ne sont que formellement satisfaites.

    78

    Il s’ensuit que l’examen des seules conditions formelles des transactions ne saurait suffire afin d’apprécier la réalité économique d’une opération déterminée.

    79

    Troisièmement, la Cour a indiqué, au point 29 de l’arrêt du 20 janvier 2021, Lexel (C‑484/19, EU:C:2021:34), que, en dépit d’une proximité théorique, la législation suédoise en cause dans l’affaire ayant donné lieu à cet arrêt et les règles néerlandaises relatives aux entités fiscales diffèrent sensiblement dans leurs conséquences pratiques.

    80

    En effet, la Cour a considéré que l’objectif spécifique de la législation en cause dans ladite affaire n’était pas de lutter contre des montages purement artificiels, qu’elle s’inscrivait dans le cadre de la lutte contre la planification fiscale agressive sous la forme de déduction de charges d’intérêts et que l’application de ladite législation ne se limitait pas à de tels montages, dès lors que pouvaient également tomber sous le coup de l’interdiction des déductions les transactions conclues dans des conditions de pleine concurrence, à savoir dans des conditions analogues à celles qui s’appliqueraient entre des sociétés indépendantes. En effet, l’intention de la société concernée de contracter une dette, principalement pour des raisons fiscales, était suffisante pour justifier le refus du droit de déduction dans une situation transfrontalière (arrêt du 20 janvier 2021, Lexel, C‑484/19, EU:C:2021:34, points 52 à 54).

    81

    La Cour a également relevé que la législation en cause dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 20 janvier 2021, Lexel (C‑484/19, EU:C:2021:34, point 53), était susceptible de s’appliquer aux dettes résultant de transactions de droit civil, à savoir celles conclues dans des conditions de pleine concurrence, sans pour autant concerner des montages fictifs.

    82

    Il s’ensuit que la Cour n’a pas pris position, dans cet arrêt, sur le cas de figure visé par la législation en cause au principal dans le but spécifique de lutter contre les montages purement artificiels, ainsi qu’il ressort des points 60 et 61 du présent arrêt, à savoir lorsque les dettes sont contractées sans motifs économiques, alors même que les conditions d’emprunt correspondent à celles qui auraient été convenues entre des entreprises indépendantes.

    83

    En particulier, ainsi qu’il ressort de l’arrêt du 20 janvier 2021, Lexel (C‑484/19, EU:C:2021:34), la validité économique de l’emprunt et des opérations liées à celui-ci en cause dans l’affaire ayant donné lieu à cet arrêt n’avait été ni contestée devant la Cour, ni examinée par cette dernière.

    84

    Par conséquent, il ne saurait être déduit du point 56 de l’arrêt du 20 janvier 2021, Lexel (C‑484/19, EU:C:2021:34), que, dans l’hypothèse où un emprunt et les opérations liées à celui-ci ne sont pas justifiés par des considérations économiques, le seul fait que les conditions de cet emprunt correspondent à celles qui auraient été convenues entre des entreprises indépendantes implique que ledit emprunt et ces opérations ne constituent pas, par définition, des montages purement artificiels.

    85

    Dès lors, il convient de considérer que la nécessité d’établir qu’un emprunt et l’opération juridique qui y est liée se fondent, dans une mesure déterminante, sur des considérations économiques n’apparaît pas comme allant au-delà de ce qui est nécessaire afin d’atteindre l’objectif poursuivi.

    86

    La juridiction de renvoi demande, en outre, si un refus total du droit à déduction ne va pas au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre l’objectif poursuivi, dès lors que, au point 51 de l’arrêt du 20 janvier 2021, Lexel (C‑484/19, EU:C:2021:34), la Cour a rappelé sa jurisprudence selon laquelle, lorsque les autorités fiscales considèrent, à l’issue de la vérification des éléments concernant les éventuelles raisons commerciales pour lesquelles une transaction a été conclue, qu’un prêt contracté par un contribuable auprès d’une entité liée constitue un montage purement artificiel, dépourvu de raisons commerciales réelles, le principe de proportionnalité requiert que le refus du droit à déduction se limite à la fraction des intérêts versés au titre de ce prêt qui dépasse ce qui aurait été convenu en l’absence de relations spéciales entre les parties.

    87

    Or, ainsi que l’a relevé M. l’avocat général aux points 103 à 105 de ses conclusions, lorsque le caractère artificiel d’une opération donnée résulte d’un taux d’intérêt exceptionnellement élevé sur un prêt intragroupe qui reflète par ailleurs la réalité économique, le principe de proportionnalité exige de retrancher la fraction des intérêts versés au titre de ce prêt qui dépasse le taux habituel du marché. Le refus de toute déduction de ces intérêts irait au-delà de l’objectif de prévention des montages purement artificiels.

    88

    En revanche, lorsque le prêt en cause est, en lui-même, dénué de justification économique et que, en l’absence de la relation spéciale entre les sociétés concernées et l’avantage fiscal recherché, ce prêt n’aurait jamais été contracté, il est conforme au principe de proportionnalité de refuser la déduction de l’intégralité desdits intérêts, dès lors qu’un tel montage purement artificiel doit être ignoré par les autorités fiscales lors du calcul de l’impôt sur les sociétés dû. Le refus de la déduction d’une fraction seulement des intérêts versés au titre dudit prêt permettrait au contribuable d’obtenir une partie, voire l’intégralité, de l’avantage fiscal recherché par des moyens abusifs, ce qui remettrait en cause la cohérence du régime concerné.

    89

    Une telle législation n’apparaît pas non plus contraire aux exigences découlant du principe de sécurité juridique qui doivent être respectées afin qu’une législation ne soit pas considérée comme allant au-delà de ce qui est nécessaire afin d’atteindre l’objectif poursuivi (voir, en ce sens, arrêt du 5 juillet 2012, SIAT, C‑318/10, EU:C:2012:415, point 59).

    90

    À cet égard, la Cour a jugé que le principe de sécurité juridique exige que les règles de droit soient claires, précises et prévisibles dans leurs effets, en particulier lorsqu’elles peuvent avoir sur les individus et les entreprises des conséquences défavorables (voir, en ce sens, arrêt du 5 juillet 2012, SIAT, C‑318/10, EU:C:2012:415, point 58 et jurisprudence citée).

    91

    Or, à l’instar de M. l’avocat général aux points 87 et 88 de ses conclusions, il convient de relever qu’il est inévitable qu’une disposition visant à s’opposer à des pratiques abusives ait recours à des notions abstraites permettant d’appréhender le plus grand nombre de situations créées à des fins d’évasion et de fraude fiscales.

    92

    Toutefois, l’emploi de notions abstraites n’implique pas que l’application de la législation en cause au principal soit laissée à l’entière discrétion de l’administration fiscale, la rendant imprévisible dans ses effets, dès lors que, ainsi qu’il est rappelé aux points 70 et 71 du présent arrêt, cette application est soumise à des critères clairement établis dans celle-ci, permettant au contribuable de déterminer au préalable et avec la précision suffisante le champ d’application de celle-ci, sans laisser subsister les incertitudes quant à son applicabilité (voir, en ce sens, arrêt du 5 juillet 2012, SIAT, C‑318/10, EU:C:2012:415, point 57).

    93

    Compte tenu de l’ensemble de ce qui précède, il convient de répondre aux questions posées que l’article 49 TFUE doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à une législation nationale en vertu de laquelle, dans la détermination du bénéfice d’un contribuable, la déduction des intérêts versés au titre d’une dette d’emprunt contractée auprès d’une entité liée, relative à l’acquisition ou à l’augmentation d’une participation dans une autre entité qui devient, à la suite de cette acquisition ou de cette augmentation, une entité liée à ce contribuable, est intégralement refusée, lorsque cette dette est considérée comme constituant un montage purement artificiel ou faisant partie d’un tel montage, et cela même si ladite dette a été contractée à des conditions de pleine concurrence et si le montant de ces intérêts ne dépasse pas celui qui aurait été convenu entre des entreprises indépendantes.

    Sur les dépens

    94

    La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

     

    Par ces motifs, la Cour (première chambre) dit pour droit :

     

    L’article 49 TFUE

     

    doit être interprété en ce sens que :

     

    il ne s’oppose pas à une législation nationale en vertu de laquelle, dans la détermination du bénéfice d’un contribuable, la déduction des intérêts versés au titre d’une dette d’emprunt contractée auprès d’une entité liée, relative à l’acquisition ou à l’augmentation d’une participation dans une autre entité qui devient, à la suite de cette acquisition ou de cette augmentation, une entité liée à ce contribuable, est intégralement refusée, lorsque cette dette est considérée comme constituant un montage purement artificiel ou faisant partie d’un tel montage, et cela même si ladite dette a été contractée à des conditions de pleine concurrence et si le montant de ces intérêts ne dépasse pas celui qui aurait été convenu entre des entreprises indépendantes.

     

    Signatures


    ( *1 ) Langue de procédure : le néerlandais.

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