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Document 62020CJ0361

Arrêt de la Cour (septième chambre) du 13 janvier 2022.
YG contre Commission européenne.
Pourvoi – Fonction publique – Fonctionnaire – Promotion – Exercice de promotion 2017 – Décision de ne pas promouvoir le requérant – Article 45, paragraphe 1, du statut des fonctionnaires de l’Union européenne – Comparaison des mérites – Principe d’égalité de traitement – Obligation de motivation.
Affaire C-361/20 P.

ECLI identifier: ECLI:EU:C:2022:17

ARRÊT DE LA COUR (septième chambre)

13 janvier 2022 (*)

« Pourvoi – Fonction publique – Fonctionnaire – Promotion – Exercice de promotion 2017 – Décision de ne pas promouvoir le requérant – Article 45, paragraphe 1, du statut des fonctionnaires de l’Union européenne – Comparaison des mérites – Principe d’égalité de traitement – Obligation de motivation »

Dans l’affaire C‑361/20 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 4 août 2020,

YG, représenté par Mes A. Champetier et S. Rodrigues, avocats,

partie requérante,

l’autre partie à la procédure étant :

Commission européenne, représentée par MM. L. Hohenecker et L. Vernier ainsi que par Mme L. Radu Bouyon, en qualité d’agents,

partie défenderesse en première instance,

LA COUR (septième chambre),

composée de Mme I. Ziemele (rapporteur), présidente de la sixième chambre, faisant fonction de président de la septième chambre, MM. P. G. Xuereb et A. Kumin, juges,

avocat général : Mme J. Kokott,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

vu la décision prise, l’avocate générale entendue, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1        Par son pourvoi, le requérant demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 28 mai 2020, YG/Commission (T‑518/18, non publié, ci-après l’« arrêt attaqué», EU:T:2020:221), par lequel celui-ci a rejeté son recours tendant à l’annulation de la décision de la Commission européenne du 13 novembre 2017 de ne pas le promouvoir au titre de l’exercice de promotion 2017 (ci-après la « décision litigieuse »).

 Le cadre juridique

 Le statut

2        L’article 45, paragraphe 1, du statut des fonctionnaires de l’Union européenne, dans sa version applicable au litige (ci-après le « statut »), est libellé comme suit :

« La promotion est attribuée par décision de l’autorité investie du pouvoir de nomination [(ci-après l’« AIPN »)] en considération de l’article 6, paragraphe 2. À moins que la procédure prévue à l’article 4 et à l’article 29, paragraphe 1, ne s’applique, les fonctionnaires ne peuvent être promus que s’ils occupent un emploi qui correspond à l’un des emplois types indiqués à l’annexe I, section A, pour le grade immédiatement supérieur. La promotion entraîne pour le fonctionnaire la nomination au grade supérieur du groupe de fonctions auquel il appartient. Elle se fait exclusivement au choix, parmi les fonctionnaires justifiant d’un minimum de deux ans d’ancienneté dans leur grade, après examen comparatif des mérites des fonctionnaires ayant vocation à la promotion. Aux fins de l’examen comparatif des mérites, [l’AIPN] prend en considération, en particulier, les rapports dont les fonctionnaires ont fait l’objet, l’utilisation dans l’exercice de leurs fonctions des langues autres que la langue dont ils ont justifié posséder une connaissance approfondie conformément à l’article 28, point f), et le niveau des responsabilités exercées. »

 Les DGE

3        L’article 4 de la décision de la Commission C(2013) 8968 final, du 16 décembre 2013, portant dispositions générales d’exécution de l’article 45 du statut (ci-après les « DGE »), intitulé « Base de la procédure de promotion », est rédigé comme suit :

« 1.      L’examen comparatif des mérites des fonctionnaires promouvables constitue la base de la procédure de promotion. Le système électronique sécurisé gérant l’exercice contient les informations nécessaires à cet examen comparatif. Aux fins de cet examen, [l’AIPN] prend en considération, en particulier :

a)      les rapports dont les fonctionnaires ont fait l’objet depuis leur dernière promotion ou, à défaut, depuis leur recrutement et en particulier les rapports d’évaluation établis conformément aux dispositions générales d’exécution de l’article 43 du statut ;

b)      l’utilisation par les fonctionnaires, dans l’exercice de leurs fonctions, de langues autres que la langue dont ils ont justifié posséder une connaissance approfondie conformément à l’article 28, point f), du statut ; et

c)      le niveau des responsabilités exercées.

2.      En cas d’égalité de mérites entre fonctionnaires promouvables sur la base des trois éléments visés au paragraphe 1, [l’AIPN] peut, à titre subsidiaire, prendre en considération d’autres éléments. »

4        L’article 5 des DGE, intitulé « Procédure de promotion », énonce :

« 1.      L’exercice de promotion n’est lancé qu’après la finalisation de l’exercice d’évaluation organisé la même année. La fin de l’exercice d’évaluation est annoncée par la direction générale [(DG)] chargée du personnel au moyen de la publication d’une information administrative.

2.      En début d’exercice, la [DG] responsable des ressources humaines informe les directions générales des modalités de l’exercice en cours, en donnant des indications sur les possibilités budgétaires de l’année en cours.

3.      Dans chaque [DG], les directeurs consultent l’évaluateur visé dans les dispositions générales d’exécution de l’article 43 du statut.

4.      Dans chaque [DG], à la suite de la consultation visée au paragraphe 3, le directeur général, les directeurs généraux adjoints, les directeurs et, le cas échéant, les conseillers principaux procèdent à l’examen comparatif des mérites des fonctionnaires promouvables. Si une [DG] est la [DG] de tutelle d’une agence exécutive, le directeur exécutif de cette agence prend aussi part à cet examen, même s’il est détaché d’une autre [DG].

5.      À la suite de l’examen visé au paragraphe 4, le directeur général procède à un échange de vues avec une délégation nommée par le comité central du personnel.

6.      À la suite de l’échange de vues visé au paragraphe 5, le directeur général communique à l’ensemble du personnel de sa [DG] la liste des fonctionnaires qu’il souhaite proposer à la promotion et transmet cette liste au comité paritaire de promotion visé à l’annexe I.

7.      Dans un délai de cinq jours ouvrables à compter de la publication de cette liste, le titulaire de poste dont le nom ne figure pas sur cette liste peut, de manière dûment motivée, contester cet état de fait auprès du comité paritaire de promotion. À la suite de la réception des listes visées au paragraphe 6, le comité paritaire de promotion procède, en tenant compte des éventuelles contestations, à l’examen comparatif des mérites des fonctionnaires promouvables et soumet à l’attention de [l’AIPN] la liste des fonctionnaires qu’il recommande de promouvoir. Il lui transmet en même temps les contestations et divergences éventuelles visées à l’annexe III.

8.      Après avoir reçu les informations mentionnées au paragraphe 7, et ayant à sa disposition les dossiers de tous les fonctionnaires promouvables, [l’AIPN] procède à un dernier examen comparatif des mérites des fonctionnaires promouvables et, en tenant compte des disponibilités budgétaires, adopte la liste des fonctionnaires promus. La promotion entraîne pour le fonctionnaire concerné la nomination au grade supérieur du groupe de fonctions auquel il appartient.

9.      La liste des fonctionnaires promus est portée à l’attention de l’ensemble du personnel de la Commission, y compris les fonctionnaires détachés dans l’intérêt du service auprès d’une agence exécutive, au moyen de la publication d’une information administrative. Chaque fonctionnaire est invité à consulter son dossier de promotion.

10.      Les promotions prennent effet le 1er janvier de l’année de l’exercice de promotion. Si, à cette date, le fonctionnaire ne possède pas l’ancienneté dans le grade ou n’occupe pas un emploi du type que requiert l’article 45, paragraphe 1, du statut, la promotion prend effet le premier jour du premier mois complet pendant lequel il possède l’ancienneté requise ou occupe un emploi du type requis.

11.      La publication de la liste des fonctionnaires promus visée au paragraphe 9 vaut communication de la décision au sens de l’article 25 du statut. Le délai de trois mois prévu à l’article 90, paragraphe 2, du statut pour introduire une réclamation court à partir du jour suivant celui de la publication de cette liste.

[...] »

 Les antécédents du litige

5        Les antécédents du litige ont été exposés aux points 1 à 9 de l’arrêt attaqué dans les termes suivants :

« 1      Le requérant, YG, est un fonctionnaire titulaire de la Commission [...] de grade AST 8 travaillant depuis le 16 avril 2014 à la [DG] de l’informatique. [Auparavant], il travaillait à la DG “Eurostat” de la Commission depuis le 1er avril 2000 et au Parlement européen du 1er mars 2009 au 15 avril 2014.

2      Le 1er janvier 2017, le requérant comptait cinq années d’ancienneté dans son grade.

3      Par publication aux Informations administratives no 013-2017, du 3 avril 2017, adressée à tous les fonctionnaires de la Commission, cette institution a lancé l’exercice de promotion 2017.

4      Le 19 juin 2017, la liste des fonctionnaires proposés à la promotion a été publiée dans le système intégré de gestion des ressources humaines de la Commission, dénommé Sysper. Le nom du requérant n’y figurait pas.

5      Le 22 juin 2017, le requérant a introduit un recours contre l’absence d’inscription de son nom sur la liste des fonctionnaires proposés à la promotion.

6      D’abord, le recours a été examiné par le groupe de travail paritaire, qui a émis l’avis de ne pas recommander la promotion du requérant. Ensuite, le comité paritaire de promotion a, après examen du dossier et comparaison des mérites dans le grade, émis un avis se ralliant à celui du groupe de travail paritaire.

7      Le 13 novembre 2017, la Commission, en tant [qu’AIPN], a publié la [décision litigieuse]. Le nom du requérant n’y figurait pas.

8      Le 25 janvier 2018, le requérant a introduit une réclamation au titre de l’article 90, paragraphe 2, du [statut] contre cette décision.

9      Par décision du [17] mai 2018, la Commission a rejeté la réclamation du requérant (ci-après la “décision portant rejet de la réclamation”). »

 La procédure devant le Tribunal et l’arrêt attaqué

6        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 31 août 2018, le requérant a introduit un recours fondé sur l’article 270 TFUE, par lequel il a demandé au Tribunal d’annuler la décision litigieuse et la décision portant rejet de la réclamation.

7        Ce recours était fondé sur deux moyens, tirés, le premier, d’une violation de l’article 45 du statut, d’erreurs manifestes d’appréciation, d’une méconnaissance du principe d’égalité de traitement et d’une motivation insuffisante et, le second, d’une violation du principe de « bonne administration pour défaut de diligence ».

8        S’agissant du premier moyen, le Tribunal a notamment, en premier lieu, examiné l’évaluation des mérites du requérant par l’AIPN. À cet égard, au point 40 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a relevé que l’exposé des extraits pertinents des rapports de notation du requérant pour les années 2012 à 2016 figurant dans la décision litigieuse démontrait clairement que l’AIPN avait tenu compte des mérites qui y étaient décrits aux fins de l’examen comparatif.

9        En deuxième lieu, concernant le bien-fondé de l’examen comparatif des mérites du requérant avec ceux des fonctionnaires promus, le Tribunal a relevé, au point 47 de l’arrêt attaqué, que la décision portant rejet de la réclamation indiquait, de manière générale, et à l’aune de brefs extraits des rapports de notation pour l’année 2016 des fonctionnaires A, B, C, D, E et F, que la comparaison des mérites du requérant avec ceux des fonctionnaires promus, dont ceux de la DG de l’informatique, n’avait révélé aucune erreur manifeste d’appréciation et, d’autre part, que les responsabilités de ces fonctionnaires étaient semblables à celles du requérant. Le Tribunal a également indiqué, au point 48 de l’arrêt attaqué, que, en réponse à une demande en ce sens du Tribunal, la Commission avait précisé que, parmi les fonctionnaires mentionnés dans cette décision, les fonctionnaires A, B, C, D, E et F n’étaient pas issus de la DG de l’informatique, tandis que tel était le cas s’agissant des fonctionnaires X, Y et Z, dont elle avait révélé en cours d’instance tant l’identité que les mérites, et avait produit les rapports de notation pour l’année 2016 des sept autres fonctionnaires de cette DG promus au grade AST 9.

10      Le Tribunal a ensuite procédé, aux points 50 à 53 de l’arrêt attaqué, à une appréciation des griefs spécifiques contestant le bien-fondé de l’examen comparatif des mérites du requérant avec ceux de certains des fonctionnaires promus, identifiés dans la décision portant rejet de la réclamation, et a conclu, au point 54 de cet arrêt, que, en l’absence d’erreur manifeste d’appréciation, ces griefs devaient être rejetés comme étant non fondés. Il a en outre jugé qu’il en était de même de la comparaison des mérites avec les autres fonctionnaires promus de la DG de l’informatique, identifiés seulement en cours d’instance.

11      En troisième lieu, s’agissant du caractère suffisant de la motivation de la décision portant rejet de la réclamation, le Tribunal a notamment souligné, au point 59 de l’arrêt attaqué, qu’une simple insuffisance de la motivation exposée dans cette décision n’était pas de nature à justifier l’annulation de la décision contestée lorsque des précisions complémentaires étaient apportées par l’AIPN en cours d’instance aux fins de la pallier.

12      Le Tribunal a, par conséquent, rejeté le premier moyen dans son ensemble comme étant non fondé.

13      Pour ce qui concerne le second moyen, tiré d’une violation du principe de bonne administration en raison d’un défaut de diligence de la part de l’AIPN, le Tribunal a notamment indiqué, au point 65 de l’arrêt attaqué, que le requérant n’avait pas expliqué dans quelle mesure ce moyen était tiré d’illégalités autres que celles déjà invoquées dans le cadre du premier moyen, de sorte qu’il a, au point 67 de cet arrêt, également rejeté ledit moyen comme étant non fondé, ainsi que le recours dans sa totalité.

14      Toutefois, considérant que le requérant avait été incité par la Commission à introduire son recours, notamment en raison de la motivation imprécise, voire lacunaire, de la décision portant rejet de la réclamation s’agissant de l’examen comparatif des mérites, le Tribunal a jugé qu’il y avait lieu de la condamner à supporter ses propres dépens et ceux exposés par le requérant.

 Les conclusions des parties

15      Par le présent pourvoi, le requérant demande à la Cour :

–        d’annuler partiellement l’arrêt attaqué et de déclarer son recours dans l’affaire T-518/18 recevable et fondé, en confirmant la condamnation aux dépens de la Commission et, par conséquent ;

–        d’annuler la décision litigieuse et la décision portant rejet de la réclamation, ou, à défaut,

–        de renvoyer l’affaire devant le Tribunal pour qu’il statue.

16      La Commission demande à la Cour :

–        de rejeter le pourvoi dans son intégralité et

–        de condamner le requérant aux dépens.

 Sur le pourvoi

17      À l’appui de son pourvoi, le requérant soulève deux moyens, tirés, le premier, d’une dénaturation des éléments de preuve, d’une violation des droits de la défense et d’erreurs de droit ainsi que, le second, d’une motivation insuffisante et contradictoire de l’arrêt attaqué.

 Sur le premier moyen

 Sur la première branche

–       Argumentation des parties

18      Le requérant fait valoir que le Tribunal a, au point 50 de l’arrêt attaqué, dénaturé des éléments de preuve et violé ses droits de la défense.

19      Tout d’abord, le requérant fait valoir que, en jugeant au point 50 de l’arrêt attaqué que la Commission pouvait légitimement comparer le requérant avec les fonctionnaires E et F, le Tribunal a dénaturé des éléments de preuve, dans la mesure où les rapports concernant ces derniers n’ont jamais été comparés à ceux du requérant durant l’exercice de promotion, lesdits fonctionnaires ne travaillant pas à la DG de l’informatique et n’ayant apparemment pas saisi le comité paritaire de promotion. Une telle dénaturation des éléments de preuve aboutirait à une erreur de droit en ce qui concerne l’appréciation, par le Tribunal, de l’examen comparatif des mérites requis par l’article 45 du statut et par le principe d’égalité de traitement. Ensuite, le Tribunal aurait également dénaturé les preuves en ce qu’il ne saurait être déduit des rapports de notation produits que le requérant aurait fait l’objet de « critiques assez prononcées ». Enfin, la position du requérant à cet égard, exposée dans sa réplique au mémoire en défense devant le Tribunal, n’aurait pas été prise en considération, ce qui constituerait une violation des droits de la défense.

20      La Commission conteste cette argumentation.

–       Appréciation de la Cour

21      D’emblée, il y a lieu de relever que, par le premier grief de la première branche de son premier moyen, le requérant allègue non pas une dénaturation des éléments de preuve, mais une erreur de droit, tirée de ce que la comparaison des mérites des fonctionnaires susceptibles d’être promus saurait être effectuée non pas au regard de l’institution dans son ensemble, mais uniquement au regard de la DG dont relèvent ces fonctionnaires. Ainsi, le requérant conteste, en substance, l’appréciation du Tribunal, exposée au point 50 de l’arrêt attaqué, selon laquelle c’est sans commettre d’erreur manifeste d’appréciation que l’AIPN a considéré que, eu égard aux responsabilités en cause et aux performances dans l’exercice des fonctions respectives, les mérites du requérant étaient inférieurs à ceux de deux fonctionnaires issus de directions générales autres que la DG de l’informatique.

22      Ce grief ne saurait être accueilli.

23      Il ressort expressément des termes de l’article 45, paragraphe 1, du statut, lu en combinaison avec l’article 5, paragraphe 8, des DGE, que, dans le cadre d’une procédure de promotion, l’AIPN est tenue d’effectuer son choix sur la base d’un examen comparatif des mérites des fonctionnaires ayant vocation à la promotion, un tel examen devant être élargi à tous les fonctionnaires promouvables, quelles que soient les fonctions exercées. En effet, une telle exigence est l’expression à la fois du principe d’égalité de traitement des fonctionnaires et de celui de leur vocation à la carrière. Or, il serait porté atteinte à ces principes si cet examen était limité aux seuls fonctionnaires susceptibles d’être promus au sein d’une même DG.

24      Il s’ensuit que c’est sans commettre d’erreur de droit que le Tribunal a jugé, au point 50 de l’arrêt attaqué, que l’AIPN pouvait, dans le cadre de son examen comparatif des mérites, légitimement comparer les mérites du requérant avec ceux des fonctionnaires relevant de directions générales autres que la DG de l’informatique.

25      Par le deuxième grief de la première branche de son premier moyen, le requérant invoque une dénaturation des éléments de preuve, au motif qu’il ne saurait être déduit des rapports de notation produits qu’il aurait fait l’objet de « critiques assez prononcées ».

26      Selon la jurisprudence constante de la Cour, il ressort de l’article 256, paragraphe 1, TFUE et de l’article 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne que le pourvoi est limité aux questions de droit et que le Tribunal est, dès lors, seul compétent pour constater et apprécier les faits pertinents ainsi que les éléments de preuve. L’appréciation des faits et des éléments de preuve ne constitue pas, sous réserve du cas de la dénaturation, une question de droit soumise, comme telle, au contrôle de la Cour dans le cadre d’un pourvoi. Une telle dénaturation doit ressortir de façon manifeste des pièces du dossier, sans qu’il soit nécessaire de procéder à une nouvelle appréciation des faits et des preuves (arrêt du 10 juillet 2019, VG/Commission, C‑19/18 P, EU:C:2019:578, point 47 et jurisprudence citée).

27      Lorsqu’il allègue une dénaturation d’éléments de preuve par le Tribunal, un requérant doit, en application de l’article 256  TFUE, de l’article 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et de l’article 168, paragraphe 1, sous d), du règlement de procédure de la Cour, indiquer de façon précise les éléments qui auraient été dénaturés par celui-ci et démontrer les erreurs d’analyse qui, dans son appréciation, auraient conduit le Tribunal à cette dénaturation (arrêt du 10 juillet 2019, VG/Commission, C‑19/18 P, EU:C:2019:578, point 48 et jurisprudence citée).

28      En l’occurrence, le requérant, après avoir cité, au point 21 de son pourvoi, un passage de son rapport de notation pour l’année 2016 qui, selon lui, pouvait être le seul visé au point 50 de l’arrêt attaqué, se borne à indiquer, au point 22 de son pourvoi, qu’il ne peut être inféré de ce passage qu’il aurait fait l’objet de « critiques assez prononcées » et qu’affirmer que son travail en tant que chef de projet a fait l’objet de telles critiques « est quelque peu exagéré au regard du contenu des rapports et même de l’évaluation faite de ce travail par la [Commission] dans les documents figurant dans le dossier ». Or, d’une part, il ne ressort aucunement du point 50 de l’arrêt attaqué que le Tribunal a fondé son appréciation selon laquelle le travail du requérant en tant que chef de projet avait fait l’objet de « critiques assez prononcées » exclusivement sur ledit passage. D’autre part, même si l’examen à effectuer à cet égard avait dû se concentrer sur le passage en question, il y a lieu de relever que le requérant n’a pas établi que, en interprétant la remarque selon laquelle, « comme déjà rapporté pendant les deux dernières années, [la tâche du requérant] nécessite que celui-ci s’investisse plus dans la gestion de son projet, y compris la gestion de son équipe et des parties prenantes » comme étant une critique assez prononcée, le Tribunal s’est livré à une lecture manifestement incorrecte de ce texte.

29      Le deuxième grief de la première branche du premier moyen doit, partant, être rejeté.

30      Par le troisième grief de la première branche du premier moyen, le requérant fait valoir que la position exposée dans sa réplique au mémoire en défense devant le Tribunal n’a pas été prise en considération, ce qui constituerait une violation des droits de la défense.

31      À cet égard, il y a lieu de rappeler que, dans le cadre du pourvoi, le contrôle de la Cour a pour objet, notamment, de vérifier si le Tribunal a répondu à suffisance de droit à l’ensemble des arguments invoqués par le requérant (arrêt du 25 juin 2020, Commission/CX, C‑131/19 P, non publié, EU:C:2020:502, point 33 et jurisprudence citée).

32      Par ailleurs, le moyen tiré d’un défaut de réponse du Tribunal à des arguments invoqués en première instance revient, en substance, à invoquer une violation de l’obligation de motivation qui découle de l’article 36 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, applicable au Tribunal en vertu de l’article 53, premier alinéa, du même statut, et des articles 117 et 119 du règlement de procédure du Tribunal (voir, en ce sens, arrêt du 25 juin 2020, Commission/CX, C‑131/19 P, non publié, EU:C:2020:502, point 34 et jurisprudence citée).

33      Il ressort également de la jurisprudence constante de la Cour que l’obligation de motivation n’impose pas au Tribunal de fournir un exposé qui suivrait, de manière exhaustive et un par un, tous les raisonnements articulés par les parties au litige, et que la motivation du Tribunal peut donc être implicite à condition qu’elle permette aux intéressés de connaître les raisons pour lesquelles le Tribunal n’a pas fait droit à leurs arguments et à la Cour de disposer des éléments suffisants pour exercer son contrôle (arrêt du 25 juin 2020, Commission/CX, C‑131/19 P, non publié, EU:C:2020:502, point 35 et jurisprudence citée).

34      En l’occurrence, le Tribunal, au point 50 de l’arrêt attaqué, a jugé qu’il ne pouvait être reproché à l’AIPN d’avoir commis une erreur manifeste d’appréciation en considérant que, eu égard aux responsabilités en cause et aux performances dans l’exercice des fonctions respectives, les mérites du requérant étaient inférieurs à ceux de deux autres fonctionnaires promus.

35      Or, dès lors que, aux points pertinents de sa réplique, le requérant s’est limité à invoquer des motifs visant à expliquer les raisons pour lesquelles il n’avait pas été en mesure de répondre aux attentes de sa hiérarchie, il y a lieu de considérer que de tels arguments étaient dépourvus de toute pertinence aux fins de l’évaluation comparative des mérites du requérant avec ceux des autres fonctionnaires promouvables. Le Tribunal n’ayant pas, conformément à la jurisprudence rappelée au point 33 du présent arrêt, l’obligation de prendre spécifiquement position sur de tels arguments, leur rejet doit être considéré comme étant implicite.

36      Dans ces conditions, il y a lieu de rejeter le troisième grief de la première branche du premier moyen ainsi que cette première branche dans son ensemble.

 Sur la seconde branche

–       Argumentation des parties

37      Le requérant fait valoir que le Tribunal a violé ses droits de la défense au motif que, aux points 23 à 30, 41 et 50 à 53 de l’arrêt attaqué, celui‑ci n’a pas tenu compte des informations qu’il lui a communiquées dans sa lettre du 21 mars 2019 et dans ses réponses aux questions du Tribunal du 22 novembre 2019.

38      En particulier, dans l’arrêt attaqué, le Tribunal se concentrerait sur une comparaison avec des extraits de rapports de notation concernant des fonctionnaires promus, qui, pour leur grande majorité, n’auraient jamais été comparés avec le requérant lors de l’exercice de promotion, parce qu’ils ne relèvent pas de la même DG que ce dernier et qu’ils n’ont pas saisi le comité paritaire de promotion.

39      La Commission conteste cette argumentation.

–       Appréciation de la Cour

40      Pour ce qui concerne la prétendue violation des droits de la défense résultant de l’absence de prise en compte des arguments qui auraient été fournies par le requérant dans le cadre de la procédure devant le Tribunal, il a été rappelé au point 32 du présent arrêt que le moyen tiré d’un défaut de réponse du Tribunal à des arguments invoqués en première instance revient, en substance, à invoquer une violation de l’obligation de motivation qui découle de l’article 36 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, applicable au Tribunal en vertu de l’article 53, premier alinéa, du même statut, et des articles 117 et 119 du règlement de procédure du Tribunal.

41      Il convient, par ailleurs, de rappeler également que l’obligation de motivation prévue à l’article 296 TFUE constitue une formalité substantielle qui doit être distinguée de la question du bien‑fondé de la motivation, celui‑ci relevant de la légalité au fond de l’acte litigieux. En effet, la motivation d’une décision consiste à exprimer formellement les motifs sur lesquels repose cette décision. Si ces motifs sont entachés d’erreurs, celles‑ci entachent la légalité au fond de la décision, mais non la motivation de celle‑ci, qui peut être suffisante tout en exprimant des motifs erronés. Il s’ensuit que les griefs et les arguments visant à contester le bien‑fondé d’un acte sont dénués de pertinence dans le cadre d’un moyen tiré du défaut ou de l’insuffisance de motivation (arrêt du 18 juin 2015, Ipatau/Conseil, C‑535/14 P, EU:C:2015:407, point 37 et jurisprudence citée).

42      À cet égard, il y a lieu de relever, premièrement, que, dans sa lettre du 21 mars 2019, le requérant a indiqué, en réponse à une demande du Tribunal, qu’il ne souhaitait pas demander la tenue d’une audience de plaidoiries. Dans cette lettre, le requérant a également communiqué au Tribunal certains éléments factuels censés lui apporter des clarifications relatives au niveau de responsabilités aux fins de la comparaison des mérites.

43      Or, outre le fait qu’il n’incombait pas au Tribunal de prendre spécifiquement position, dans l’arrêt attaqué, sur les considérations formulées par le requérant aux fins de sa demande de tenue d’une audience de plaidoiries, force est de constater que le Tribunal, aux points 46 à 56 de l’arrêt attaqué, a spécifiquement pris position sur la comparaison des mérites du requérant avec ceux des fonctionnaires promus.

44      Deuxièmement, s’agissant des informations communiquées par le requérant par lettre du 22 novembre 2019 en réponse aux questions du Tribunal, force est de constater que, au point 48 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a relevé, d’une part, que « [d]ans ses observations sur la réponse de la Commission, le requérant n’a pas contesté que les mérites des fonctionnaires ainsi identifiés justifiaient leur promotion au titre de l’exercice de promotion 2017, tout en relevant que les tâches et les niveaux de responsabilité de, notamment, deux de ces fonctionnaires n’étaient pas supérieurs aux siens et que les connaissances, la compétence et l’expertise requises en dépendaient. »

45      Le Tribunal a, d’autre part, procédé, aux points 49 à 54 de l’arrêt attaqué, à l’appréciation des griefs spécifiques du requérant contestant le bien-fondé de l’examen comparatif de ses mérites avec ceux des fonctionnaires promus identifiés.

46      Il s’ensuit que l’arrêt attaqué est, à cet égard, motivé à suffisance de droit.

47      Au demeurant, même à supposer que, par la présente branche, le requérant invoquerait une erreur de droit tirée de ce que le Tribunal n’aurait pas censuré la Commission du fait de la comparaison des mérites du requérant avec ceux de fonctionnaires qui ne relevaient pas de la même DG, il suffit de constater qu’un tel grief se confond avec le premier grief invoqué dans le cadre de la première branche du présent moyen et qu’il doit être écarté pour les mêmes motifs.

48      Eu égard aux considérations qui précèdent, il y a lieu de rejeter la seconde branche du premier moyen ainsi que le premier moyen dans son ensemble.

 Sur le second moyen

 Argumentation des parties

49      Par son second moyen, dirigé à l’encontre des points 60, 61 et 65 de l’arrêt attaqué, le requérant allègue une motivation insuffisante et contradictoire de l’arrêt attaqué.

50      Le requérant fait valoir, en premier lieu, que, au point 60 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a jugé que la décision portant rejet de la réclamation a donné des indications importantes sur les raisons pour lesquelles l’AIPN avait décidé de ne pas le promouvoir. Toutefois, cette décision aurait présenté, afin d’étayer la thèse qui y est soutenue, des extraits concernant des fonctionnaires promus qui ne relevaient pas de la DG de l’informatique et qui n’ont pas saisi le comité paritaire de promotion. En outre, s’agissant du point 61 de l’arrêt attaqué, dès lors que les rapports de sept fonctionnaires de cette DG, promus au grade AST 9, n’auraient été présentés qu’à la fin de la procédure, à la demande expresse du Tribunal, la constatation de ce dernier selon laquelle « le requérant n’a pas été en mesure de préciser et d’étayer davantage ses griefs visant à faire constater l’existence d’erreurs manifestes d’appréciation ou un traitement inégal à son égard dans le cadre de l’examen comparatif des mérites » serait difficile à comprendre.

51      En second lieu, le requérant fait grief au Tribunal d’avoir, au point 65 de l’arrêt attaqué, jugé qu’il avait omis « d’expliquer dans quelle mesure le second moyen est tiré d’illégalités autres que celles déjà invoquées dans le cadre du premier moyen ». À cet égard, le requérant relève que son argumentation devant le Tribunal était fondée sur le fait que, ni dans la décision portant rejet de la réclamation ni dans son mémoire en défense en première instance, la Commission n’avait présenté les preuves naturelles et pertinentes établissant qu’un examen comparatif des mérites avait été équitablement mené.

52      La Commission considère que le premier grief soulevé dans le cadre du second moyen n’est pas fondé. Le second grief de ce moyen serait irrecevable et, en tout état de cause, non fondé.

 Appréciation de la Cour

53      Il convient de rappeler, premièrement, ainsi qu’il a déjà été relevé au point 41 du présent arrêt, que l’obligation de motivation prévue à l’article 296 TFUE constitue une formalité substantielle qui doit être distinguée de la question du bien-fondé de la motivation, celui-ci relevant de la légalité au fond de l’acte litigieux. Or, par l’argumentation soulevée à l’appui du premier grief de son second moyen, le requérant, loin de faire valoir un défaut de motivation s’agissant des points 60 et 61 de l’arrêt attaqué, vise en réalité à remettre en cause la conclusion du Tribunal selon laquelle l’AIPN était en droit, dans le cadre de son examen comparatif des mérites, de comparer les mérites du requérant avec ceux des fonctionnaires relevant de directions générales autres que la DG de l’informatique. Cette argumentation se recoupe donc avec celle soulevée par le requérant au soutien de son premier moyen, à laquelle il fait d’ailleurs explicitement référence pour étayer le premier grief de son second moyen.

54      Étant donné que, ainsi que la Cour l’a relevé au point 24 du présent arrêt, c’est sans commettre d’erreur de droit que le Tribunal a jugé, dans l’arrêt attaqué, que l’AIPN pouvait, dans le cadre de son examen comparatif des mérites, légitimement comparer les mérites du requérant avec ceux des fonctionnaires relevant de directions générales autres que la DG de l’informatique, l’argumentation du requérant visant les points 60 et 61 de cet arrêt ne saurait donc prospérer.

55      Deuxièmement, s’agissant de l’existence éventuelle d’une motivation contradictoire, il convient de relever que le requérant se borne à alléguer que la dernière partie du point 61 de l’arrêt attaqué serait difficile à comprendre. Or, à ce point 61, le Tribunal s’est limité à constater que sa conclusion selon laquelle la Commission n’avait pas violé son obligation de motivation, en dépit du fait que certaines informations complémentaires n’avaient été produites qu’au cours de la procédure en première instance, était confirmée par le fait que, même sur la base de ces informations complémentaires, le requérant n’avait pas été en mesure de préciser et d’étayer davantage ses griefs visant à faire constater l’existence d’erreurs manifestes d’appréciation ou un traitement inégal à son égard dans le cadre de l’examen comparatif des mérites. Le requérant n’a pas démontré en quoi, en tirant cette conclusion, le Tribunal aurait procédé à un raisonnement contradictoire.

56      Il s’ensuit qu’il y a lieu de rejeter le premier grief du second moyen comme étant non fondé.

57      S’agissant du second grief de ce moyen, visant le point 65 de l’arrêt attaqué, il suffit de constater que le requérant se borne à indiquer, sans autres précisions, que l’appréciation par le Tribunal de son second moyen est entachée des mêmes vices que celle de son premier moyen ou, à tout le moins, d’une motivation contradictoire.

58      À cet égard, selon une jurisprudence constante de la Cour, il résulte de l’article 256 TFUE, de l’article 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, de l’article 168, paragraphe 1, sous d), et de l’article 169 du règlement de procédure de la Cour qu’un pourvoi doit indiquer de façon précise les éléments critiqués de l’arrêt ou de l’ordonnance dont l’annulation est demandée ainsi que les arguments juridiques qui soutiennent de manière spécifique cette demande, sous peine d’irrecevabilité du pourvoi (ordonnance du 24 novembre 2016, Petraitis/Commission, C‑137/16 P, non publiée, EU:C:2016:904, point 16).

59      En l’absence de toute indication ou précision à cet égard, le second grief du second moyen est irrecevable.

60      Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de rejeter le second moyen comme étant, en partie, irrecevable et, en partie, non fondé, ainsi que le pourvoi dans son ensemble.

 Sur les dépens

61      En vertu de l’article 184, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour, lorsque le pourvoi n’est pas fondé, la Cour statue sur les dépens.

62      Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, de ce règlement, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, de celui‑ci, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

63      La Commission ayant conclu à la condamnation de YG aux dépens et celui-ci ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de le condamner à supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par la Commission.

Par ces motifs, la Cour (septième chambre) déclare et arrête :

1)      Le pourvoi est rejeté.

2)      YG est condamné aux dépens.


Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.

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