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Document 62020CJ0022

Arrêt de la Cour (quatrième chambre) du 2 septembre 2021.
Commission européenne contre Royaume de Suède.
Manquement d’État – Directive 91/271/CEE – Articles 4, 5, 10 et 15 – Traitement des eaux urbaines résiduaires – Traitement secondaire ou équivalent des eaux urbaines résiduaires provenant d’agglomérations de certaines dimensions – Traitement plus rigoureux des rejets dans des zones sensibles – Article 4, paragraphe 3, TUE – Vérification des données communiquées par les États membres – Obligation de coopération loyale.
Affaire C-22/20.

Court reports – general

ECLI identifier: ECLI:EU:C:2021:669

 ARRÊT DE LA COUR (quatrième chambre)

2 septembre 2021 ( *1 )

« Manquement d’État – Directive 91/271/CEE – Articles 4, 5, 10 et 15 – Traitement des eaux urbaines résiduaires – Traitement secondaire ou équivalent des eaux urbaines résiduaires provenant d’agglomérations de certaines dimensions – Traitement plus rigoureux des rejets dans des zones sensibles – Article 4, paragraphe 3, TUE – Vérification des données communiquées par les États membres – Obligation de coopération loyale »

Dans l’affaire C‑22/20,

ayant pour objet un recours en manquement au titre de l’article 258 TFUE, introduit le 17 janvier 2020,

Commission européenne, représentée par MM. E. Manhaeve, C. Hermes et K. Simonsson ainsi que par Mme E. Ljung Rasmussen, en qualité d’agents,

partie requérante,

contre

Royaume de Suède, représenté par M. O. Simonsson ainsi que par Mmes R. Shahsavan Eriksson, C. Meyer-Seitz, M. Salborn Hodgson, H. Shev et H. Eklinder, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

LA COUR (quatrième chambre),

composée de M. M. Vilaras, président de chambre, MM. N. Piçarra, D. Šváby, S. Rodin (rapporteur) et Mme K. Jürimäe, juges,

avocat général : Mme J. Kokott,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

ayant entendu l’avocate générale en ses conclusions à l’audience du 25 mars 2021,

rend le présent

Arrêt

1

Par sa requête, la Commission européenne demande à la Cour de constater que :

en ne communiquant pas à la Commission les informations nécessaires pour vérifier l’exactitude des allégations selon lesquelles les eaux urbaines résiduaires rejetées par les stations d’épuration des agglomérations de Habo et de Töreboda satisfont aux exigences de la directive 91/271/CEE du Conseil, du 21 mai 1991, relative au traitement des eaux urbaines résiduaires (JO 1991, L 135, p. 40), telle que modifiée par le règlement (CE) no 1137/2008 du Parlement européen et du Conseil, du 22 octobre 2008 (JO 2008, L 311, p. 1) (ci-après la « directive 91/271 ») , le Royaume de Suède a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 4, paragraphe 3, TUE ;

en ne veillant pas à ce que, avant d’être rejetées, les eaux urbaines résiduaires provenant des agglomérations de Lycksele, de Malå, de Mockfjärd, de Pajala, de Robertsfors et de Tänndalen soient soumises à un traitement secondaire ou à un traitement équivalent conformément aux exigences de la directive 91/271, le Royaume de Suède a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 4 de ladite directive, lu en combinaison avec les articles 10 et 15 de celle-ci, et

en ne veillant pas à ce que, avant d’être rejetées, les eaux urbaines résiduaires provenant des agglomérations de Borås, de Skoghall, de Habo et de Töreboda fassent l’objet d’un traitement plus rigoureux que celui qui est décrit à l’article 4 de la directive 91/271 et soient conformes aux exigences de celle-ci, le Royaume de Suède a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 5 de ladite directive, lu en combinaison avec les articles 10 et 15 de celle-ci.

Le cadre juridique

2

L’article 1er de la directive 91/271 énonce :

« La présente directive concerne la collecte, le traitement et le rejet des eaux urbaines résiduaires ainsi que le traitement et le rejet des eaux usées provenant de certains secteurs industriels.

La présente directive a pour objet de protéger l’environnement contre une détérioration due aux rejets des eaux résiduaires précitées. »

3

L’article 4 de cette directive se lit comme suit :

« 1.   Les États membres veillent à ce que les eaux urbaines résiduaires qui pénètrent dans les systèmes de collecte soient, avant d’être rejetées, soumises à un traitement secondaire ou à un traitement équivalent selon les modalités suivantes :

au plus tard le 31 décembre 2000 pour tous les rejets provenant d’agglomérations ayant un [équivalent habitant (EH)] de plus de 15000,

au plus tard le 31 décembre 2005 pour tous les rejets provenant d’agglomérations ayant un EH compris entre 10 000et 15000,

au plus tard le 31 décembre 2005 pour les rejets, dans des eaux douces et des estuaires, provenant d’agglomérations ayant un EH compris entre 2000 et 10000.

[...]

2.   Les rejets d’eaux urbaines résiduaires dans des eaux situées dans des régions de haute montagne (à une altitude supérieure à 1500 mètres), où il est difficile d’appliquer un traitement biologique efficace à cause des basses températures, peuvent faire l’objet d’un traitement moins rigoureux que celui prescrit au paragraphe 1, à condition que des études approfondies indiquent que ces rejets n’altèrent pas l’environnement.

3.   Les rejets des stations d’épuration des eaux urbaines résiduaires visées aux paragraphes 1 et 2 doivent répondre aux prescriptions pertinentes de l’annexe I, point B. La Commission peut modifier ces prescriptions. Ces mesures, qui visent à modifier des éléments non essentiels de la présente directive, sont arrêtées en conformité avec la procédure de réglementation avec contrôle visée à l’article 18, paragraphe 3.

4.   La charge exprimée en EH est calculée sur la base de la charge moyenne maximale hebdomadaire qui pénètre dans la station d’épuration au cours de l’année, à l’exclusion des situations inhabituelles comme celles qui sont dues à de fortes précipitations. »

4

L’article 5 de ladite directive prévoit :

« 1.   Aux fins du paragraphe 2, les États membres identifient, pour le 31 décembre 1993, les zones sensibles sur la base des critères définis à l’annexe II.

2.   Les États membres veillent à ce que les eaux urbaines résiduaires qui entrent dans les systèmes de collecte fassent l’objet, avant d’être rejetées dans des zones sensibles, d’un traitement plus rigoureux que celui qui est décrit à l’article 4, et ce au plus tard le 31 décembre 1998 pour tous les rejets provenant d’agglomérations ayant un EH de plus de 10000.

3.   Les rejets des stations d’épuration des eaux urbaines résiduaires visées au paragraphe 2 doivent répondre aux prescriptions pertinentes de l’annexe I, point B. La Commission peut modifier ces prescriptions. Ces mesures, qui visent à modifier des éléments non essentiels de la présente directive, sont arrêtées en conformité avec la procédure de réglementation avec contrôle visée à l’article 18, paragraphe 3.

4.   Toutefois, les conditions requises d’une station d’épuration au titre des paragraphes 2 et 3 ne s’appliquent pas nécessairement aux zones sensibles, s’il peut être prouvé que le pourcentage minimal de réduction de la charge globale entrant dans toutes les stations d’épuration des eaux résiduaires urbaines de cette zone atteint au moins 75 % pour la quantité totale de phosphore et au moins 75 % pour la quantité totale d’azote.

5.   Pour les rejets des stations d’épuration d’eaux urbaines qui sont situées dans les bassins versants pertinents des zones sensibles et qui contribuent à la pollution de ces zones, les paragraphes 2, 3 et 4 sont applicables.

Lorsque les bassins versants visés au premier alinéa sont situés, en totalité ou en partie, dans un autre État membre, l’article 9 s’applique.

6.   Les États membres veillent à ce que la liste des zones sensibles soit revue au moins tous les quatre ans.

7.   Les États membres veillent à ce que les zones identifiées comme sensibles à la suite de la révision prévue au paragraphe 6 se conforment aux exigences précitées dans un délai de sept ans.

8.   Un État membre n’est pas tenu d’identifier des zones sensibles aux fins de la présente directive s’il applique sur l’ensemble de son territoire le traitement prévu aux paragraphes 2, 3 et 4. »

5

Aux termes de l’article 10 de la même directive :

« Les États membres veillent à ce que les stations d’épuration des eaux urbaines résiduaires construites pour satisfaire aux exigences des articles 4, 5, 6 et 7 soient conçues, construites, exploitées et entretenues de manière à avoir un rendement suffisant dans toutes les conditions climatiques normales du lieu où elles sont situées. Il convient de tenir compte des variations saisonnières de la charge lors de la conception de ces installations. »

6

L’article 15 de la directive 91/271 prévoit :

« 1.   Les autorités compétentes ou les organes appropriés surveillent :

les rejets provenant des stations d’épuration des eaux urbaines résiduaires, afin d’en vérifier la conformité avec les prescriptions de l’annexe I point B suivant les procédures de contrôle fixées à l’annexe I point D,

les quantités et la composition des boues d’épuration déversées dans les eaux de surface.

2.   Les autorités compétentes ou les organes appropriés surveillent les eaux réceptrices de rejets provenant de stations d’épuration des eaux urbaines résiduaires et de rejets directs tels que décrits à l’article 13, lorsqu’il y a lieu de craindre que l’environnement récepteur soit fortement altéré par ces rejets.

3.   En cas de rejets soumis aux dispositions de l’article 6 et en cas d’évacuation de boues dans les eaux de surface, les États membres établissent une surveillance et effectuent toute étude éventuellement requise pour garantir que le rejet ou l’évacuation n’altère pas l’environnement.

4.   Les informations recueillies par les autorités compétentes ou les organes appropriés conformément aux paragraphes 1, 2 et 3 sont conservées dans l’État membre et mises à la disposition de la Commission dans les six mois qui suivent la réception d’une demande à cet effet.

5.   La Commission peut arrêter les principes directeurs pour la surveillance visée aux paragraphes 1, 2 et 3, en conformité avec la procédure de réglementation visée à l’article 18, paragraphe 2. »

7

L’annexe I, point B, de cette directive est ainsi libellée :

« Rejets provenant des stations d’épuration des eaux urbaines résiduaires dans les eaux réceptrices [...]

1.

Les stations d’épuration des eaux usées sont conçues ou modifiées de manière que des échantillons représentatifs des eaux usées entrantes et des effluents traités puissent être obtenus avant rejet dans les eaux réceptrices.

2.

Les rejets provenant des stations d’épuration des eaux urbaines résiduaires, traités conformément aux articles 4 et 5 de la présente directive, répondent aux prescriptions figurant au tableau 1.

3.

Les rejets des stations d’épuration des eaux urbaines résiduaires dans des zones sensibles sujettes à eutrophisation, telles qu’identifiées à l’annexe II point A lettre a), répondent en outre aux prescriptions figurant au tableau 2 de la présente annexe.

4.

Des prescriptions plus rigoureuses que celles qui figurent aux tableaux 1 et/ou 2 sont, au besoin, appliquées pour garantir que les eaux réceptrices satisfont à toute autre directive en la matière.

5.

Les points d’évacuation des eaux urbaines résiduaires sont choisis, dans toute la mesure du possible, de manière à réduire au minimum les effets sur les eaux réceptrices. »

8

L’annexe I, point D, de ladite directive dispose :

« Méthodes de référence pour le suivi et l’évaluation des résultats

1.

Les États membres veillent à ce que soit appliquée une méthode de surveillance qui corresponde au moins aux exigences décrites ci-dessous.

Des méthodes autres que celles prévues aux points 2, 3 et 4 peuvent être utilisées, à condition qu’il puisse être prouvé qu’elles permettent d’obtenir des résultats équivalents.

Les États membres fournissent à la Commission toutes les informations pertinentes concernant les méthodes appliquées. Si la Commission estime que les conditions énoncées aux points 2, 3 et 4 ne sont pas remplies, elle soumet au Conseil une proposition appropriée.

2.

Des échantillons sont prélevés sur une période de 24 heures, proportionnellement au débit ou à intervalles réguliers, en un point bien déterminé à la sortie et, en cas de nécessité, à l’entrée de la station d’épuration, afin de vérifier si les prescriptions de la présente directive en matière de rejets d’eaux usées sont respectées.

De saines pratiques internationales de laboratoire seront appliquées pour que la dégradation des échantillons soit la plus faible possible entre le moment de la collecte et celui de l’analyse.

3.

Le nombre minimum d’échantillons à prélever à intervalles réguliers au cours d’une année entière est fixé en fonction de la taille de la station d’épuration :

– EH compris entre 2 000 et 9 999 :

12 échantillons au cours de la première année.

4 échantillons les années suivantes s’il peut être démontré que les eaux respectent les dispositions de la présente directive pendant la première année ; si l’un des 4 échantillons ne correspond pas aux normes, 12 échantillons sont prélevés l’année suivante.

– EH compris entre 10 000 et 49 999 :

12 échantillons.

– EH de 50 000 ou plus :

24 échantillons.

4.

On considère que les eaux usées traitées respectent les valeurs fixées pour les différents paramètres si, pour chaque paramètre considéré individuellement, les échantillons prélevés montrent que les valeurs correspondantes sont respectées, en fonction des dispositions suivantes :

a) pour les paramètres figurant au tableau 1 et à l’article 2 point 7, le nombre maximal d’échantillons qui peuvent ne pas correspondre aux valeurs en concentration et/ou aux pourcentages de réduction indiqués au tableau 1 et à l’article 2 point 7 est précisé au tableau 3 ;

b) pour les paramètres figurant au tableau 1 et exprimés en valeurs de concentration, le nombre maximal d’échantillons prélevés dans des conditions d’exploitation normales ne doit pas s’écarter de plus de 100 % des valeurs paramétriques. Pour les valeurs en concentration se rapportant au total des matières solides en suspension, l’écart peut aller jusqu’à 150 % ;

c) pour les paramètres figurant au tableau 2, la moyenne annuelle des échantillons doit, pour chaque paramètre, respecter les valeurs correspondantes.

5.

Pour la qualité d’eau considérée, il n’est pas tenu compte des valeurs extrêmes si elles sont dues à des circonstances exceptionnelles, telles que de fortes précipitations. »

9

Les tableaux 1 à 3 de l’annexe I de la même directive sont libellés comme suit :

« Tableau 1 : Prescriptions relatives aux rejets provenant des stations d’épuration des eaux urbaines résiduaires et soumises aux dispositions des articles 4 et 5 de la présente directive. On appliquera la valeur de la concentration ou le pourcentage de réduction.

Paramètres

Concentration

Pourcentage minimal de réduction (1)

Méthode de mesure de référence

Demande biochimique en oxygène (DBO5 à 20 °C) sans nitrification (2)

25 mg/l O2

70–90

40 aux termes de l’article 4 paragraphe 2

Échantillon homogénéisé, non filtré, non décanté. Détermination de l’oxygène dissous avant et après une incubation de 5 jours à 20 °C ± 1 °C, dans l’obscurité complète. Addition d’un inhibiteur de nitrification.

Demande chimique en oxygène (DCO)

125 mg/l O2

75

Échantillon homogénéisé, non filtré, non décanté. Bichromate de potassium.

Total des matières solides en suspension

35 mg/l (3)

35 aux termes de l’article 4 paragraphe 2 (plus de 10 000 EH)

60 aux termes de l’article 4 paragraphe 2 (de 2 000 à 10 000 EH)

90 (3)

90 aux termes de l’article 4 paragraphe 2 (plus de 10 000 EH)

70 aux termes de l’article 4 paragraphe 2 (de 2 000 à 10 000 EH)

— Filtration d’un échantillon représentatif sur une membrane de 0,45 μm, séchage à 105 °C et pesée.

— Centrifugation d’un échantillon représentatif (pendant 5 minutes au moins, avec accélération moyenne de 2 800 à 3 200 g), séchage à 105 °C, pesée.

(1) Réduction par rapport aux valeurs à l’entrée.

(2) Ce paramètre peut être remplacé par un autre : carbone organique total (COT) ou demande totale en oxygène (DTO), si une relation peut être établie entre la DB05 et le paramètre de substitution.

(3) Cette exigence est facultative.

Les analyses relatives aux rejets provenant du lagunage doivent être effectuées sur des échantillons filtrés ; toutefois, la concentration du total des matières solides en suspension dans les échantillons d’eau non filtrée ne doit pas dépasser 150 mg/l.

Tableau 2 : Prescriptions relatives aux rejets provenant des stations d’épuration des eaux urbaines résiduaires et effectués dans des zones sensibles sujettes à eutrophisation, telles qu’identifiées à l’annexe II, point A a). En fonction des conditions locales, on appliquera un seul paramètre ou les deux. La valeur de la concentration ou le pourcentage de réduction seront appliqués.

Paramètres

Concentration

Pourcentage minimal de réduction (1)

Méthode de mesure de référence

Phosphore total

2 mg/l (EH compris entre 10 000 et 100 000)

80

Spectrophotométrie par absorption moléculaire

1 mg/l (EH de plus de 100 000)

Azote total (2)

15 mg/l (EH compris entre 10 000 et 100 000) (3)

70–80

Spectrophotométrie par absorption moléculaire

10 mg/l (EH de plus de 100 000) (3)

(1) Réduction par rapport aux valeurs à l’entrée.

(2) Azote total signifie le total de l’azote dosé selon la méthode de Kjeldahl (azote organique et ammoniacal), de l’azote contenu dans les nitrates et de l’azote contenu dans les nitrites.

(3) Ces valeurs de la concentration sont des moyennes annuelles, selon l’annexe I, point D 4 c). Toutefois, les exigences pour l’azote peuvent être vérifiées en utilisant des moyennes journalières quand il est prouvé, conformément à l’annexe I, point D 1, que le même niveau de la protection est obtenu. Dans ce cas, la moyenne journalière ne peut pas dépasser 20 mg/l d’azote total pour tous les échantillons, quand la température de l’effluent dans le réacteur biologique est supérieure ou égale à 12 °C. La condition concernant la température pourrait être remplacée par une limitation du temps de fonctionnement tenant compte des conditions climatiques régionales.

Tableau 3

Nombre d’échantillons prélevés au cours d’une année déterminée

Nombre maximal d’échantillons pouvant ne pas être conformes

4-7

1

8-16

2

17-28

3

29-40

4

41-53

5

54-67

6

68-81

7

82-95

8

96-110

9

111-125

10

126-140

11

141-155

12

156-171

13

172-187

14

188-203

15

204-219

16

220-235

17

236-251

18

252-268

19

269-284

20

285-300

21

301-317

22

318-334

23

335-350

24

351-365

25 »

La procédure précontentieuse

10

Le 29 janvier 2010, la Commission a adressé au Royaume de Suède une lettre de mise en demeure par laquelle elle a interrogé cet État membre sur la conformité de son système de traitement des eaux urbaines résiduaires à la directive 91/271.

11

Plus particulièrement, la Commission a considéré, d’une part, que ledit État membre avait omis de veiller à ce que les eaux résiduaires de treize agglomérations soient soumises à un traitement secondaire ou à un traitement équivalent conformément aux exigences de l’article 4, paragraphes 1 et 3, de la directive 91/271. D’autre part, cette institution a estimé que le même État membre avait omis de veiller à ce que les eaux résiduaires de trois agglomérations fassent l’objet d’un traitement plus rigoureux que celui qui est décrit à l’article 4 de cette directive, conformément aux exigences de l’article 5, paragraphes 2 et 3, de celle-ci.

12

Le Royaume de Suède a répondu à cette mise en demeure par lettres du 1er avril et du 4 novembre 2010.

13

N’étant pas satisfaite des explications fournies par cet État membre, la Commission a décidé de lui adresser, le 25 septembre 2015, une lettre de mise en demeure complémentaire, dans laquelle elle identifiait 11 agglomérations supplémentaires qui ne disposaient pas d’un système de traitement secondaire ou d’un système de traitement équivalent et 26 agglomérations supplémentaires pour lesquelles cet État membre n’avait pas veillé à effectuer un traitement plus rigoureux, au sens de l’article 5, paragraphes 2 et 3, de la directive 91/271. En outre, la Commission a invité le Royaume de Suède à donner des éclaircissements sur la situation de deux agglomérations au sujet desquelles cette institution estimait qu’il avait manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 4, paragraphes 1 et 3, de la directive 91/271.

14

Le 25 novembre 2015, le Royaume de Suède a répondu à la lettre de mise en demeure complémentaire.

15

À la suite de la réception du rapport, établi conformément à l’article 15 de la directive 91/271, communiqué par le Royaume de Suède en 2016, la Commission a constaté qu’un nombre encore plus important d’agglomérations de cet État membre ne respectaient pas les exigences de cette directive.

16

Le 28 avril 2017, la Commission a adressé au Royaume de Suède une seconde lettre de mise en demeure complémentaire, par laquelle cette institution a, d’une part, précisé que l’article 15 de la directive 91/271 constituait une base juridique additionnelle du manquement aux obligations incombant à cet État membre au titre de celle-ci et, d’autre part, mentionné les agglomérations additionnelles identifiées comme étant non conformes aux exigences de la directive 91/271 suite au rapport annuel.

17

Le Royaume de Suède a répondu à la seconde lettre de mise en demeure complémentaire par lettres du 28 juin 2017 et du 6 novembre 2018. En outre, le dossier du manquement a été discuté lors de réunions en 2017 et 2018 entre la Commission et les autorités suédoises.

18

Le 8 novembre 2018, la Commission a adressé au Royaume de Suède un avis motivé dans lequel elle a imputé à cet État membre la violation de l’article 4 de la directive 91/271, lu en combinaison avec ses articles 10 et 15, en ce qui concerne 12 agglomérations et la violation de l’article 5 de cette directive, lu en combinaison avec les articles 10 et 15 de celle-ci, en ce qui concerne 9 agglomérations. L’une de ces agglomérations présentant une non-conformité de ses installations au regard des deux articles à la fois, le nombre total des agglomérations concernées s’élevait à 20. En outre, la Commission a constaté que le Royaume de Suède violait également l’article 4, paragraphe 3, TUE en ce qui concerne 4 agglomérations au sujet desquelles cet État membre avait fait valoir l’action de la rétention naturelle sans pour autant communiquer les informations étayant les affirmations contenues dans sa réponse à la seconde lettre de mise en demeure complémentaire.

19

Le Royaume de Suède a répondu à cet avis motivé par lettres du 11 et du 21 janvier 2019.

20

N’étant pas satisfaite par ces réponses, la Commission a introduit le présent recours.

Sur le recours

21

À l’appui de son recours, la Commission soulève, en substance, trois griefs tirés, le premier, de la violation de l’article 4 de la directive 91/271, lu en combinaison avec les articles 10 et 15 de cette directive, le deuxième, de la violation de l’article 5 de la directive 91/271, lu en combinaison avec les articles 10 et 15 de ladite directive et, le troisième, de la violation de l’article 4, paragraphe 3, TUE.

Sur le premier grief, tiré d’un manquement aux obligations incombant au Royaume de Suède en vertu de l’article 4 de la directive 91/271, lu en combinaison avec les articles 10 et 15 de celle-ci

Argumentation des parties

22

La Commission considère, d’une part, qu’une violation de l’article 4 de la directive 91/271 se produit lorsqu’il y a une violation de l’article 15 de cette directive, qui prévoit le nombre d’échantillons devant être prélevés et les intervalles de leur prélèvement, dans la mesure où, en l’absence du respect de ce dernier article, il n’est pas possible de vérifier si les exigences de l’article 4 de la directive 91/271 sont respectées. D’autre part, la Commission estime que le respect de l’article 4 de la directive 91/271, lu en combinaison avec l’article 15 de cette directive, constitue une condition pour que les exigences de l’article 10 de ladite directive, relatives à la conception, à la construction, à l’exploitation et à l’entretien des stations d’épuration, puissent être satisfaites.

23

Premièrement, la Commission fait valoir que la dérogation visée à l’article 4, paragraphe 2, de la directive 91/271 s’applique uniquement lorsque quatre conditions cumulatives sont réunies, lesquelles ne sont pas vérifiées dans le cadre de la présente affaire. Selon cette institution, afin qu’une agglomération soit exemptée du traitement secondaire des eaux résiduaires, il convient que, premièrement, il s’agisse d’eaux urbaines résiduaires rejetées dans des régions de haute montagne, définies en tant que les régions situées à une altitude supérieure à 1500 mètres, deuxièmement, il soit difficile d’appliquer un traitement biologique efficace, troisièmement, un traitement biologique efficace soit difficile à appliquer à cause des basses températures et, quatrièmement, des études approfondies indiquent que les rejets n’altèrent pas l’environnement.

24

Deuxièmement, la Commission fait valoir qu’il ressort de l’article 4, paragraphe 3, de la directive 91/271 que les rejets des eaux urbaines résiduaires d’agglomérations ayant une charge supérieure à 2000 EH doivent satisfaire aux prescriptions établies à l’annexe I, point B, de cette directive. Le point B.2 de ladite annexe opérerait un renvoi aux exigences du tableau 1 de celle-ci, duquel il ressortirait que la concentration maximale autorisée pour la demande biochimique en oxygène (ci-après la « DBO5 ») est de 25 mg/l et que le pourcentage minimal de réduction autorisé pour la DBO5 est de 70 % à 90 %, ou de 40 % si la dérogation visée à l’article 4, paragraphe 2, de ladite directive est applicable. Cette institution fait valoir que la concentration maximale autorisée pour la demande chimique en oxygène (ci-après la « DCO ») est de 125 mg/l et que le pourcentage minimal de réduction pour la DCO est de 75 %. Les deux paramètres portant sur ces valeurs seraient alternatifs, de sorte que chaque exigence pourrait être respectée en se conformant à la valeur limite soit de la concentration maximale, soit du pourcentage minimal de réduction.

25

Troisièmement, s’agissant des exigences portant sur la surveillance, relevant de l’article 15, paragraphe 1, de la directive 91/271, lu en combinaison avec l’annexe I, point D, de cette directive, la Commission soutient qu’il ressort de l’annexe I, point D.3, deuxième tiret, de celle-ci que 12 échantillons au moins doivent être prélevés à des intervalles réguliers au cours d’une année entière pour une charge comprise entre 10000 et 49999 EH, et 24 échantillons pour une charge de 50000 EH ou plus. Si la charge se situe entre 2000 et 9999 EH, 12 échantillons doivent être prélevés au cours de la première année. Ainsi, lorsque les exigences de la directive 91/271 sont respectées, le prélèvement de quatre échantillons par an suffirait par la suite.

26

Quatrièmement, la Commission rappelle que, conformément à l’annexe I, point D.4, de la directive 91/271, les eaux résiduaires traitées sont présumées respecter les exigences en ce qui concerne les paramètres figurant au tableau 1 de cette annexe si le nombre d’échantillons qui ne respectent pas les exigences se situe, comme prévu dans le tableau 3 de ladite annexe, de 1 pour 4 à 7 échantillons, de 2 pour 8 à 16 échantillons, de 3 pour 17 à 28 échantillons, de 4 pour 29 à 40 échantillons et de 5 pour 41 à 53 échantillons. En outre, les échantillons, en ce qui concerne la DBO5 et la DCO, exprimées en valeurs de concentration, ne devraient pas s’écarter de plus de 100 % des valeurs limites.

27

La Commission soutient que, à la date fixée pour se conformer à l’avis motivé, soit le 9 janvier 2019, le Royaume de Suède violait l’article 4 de la directive 91/271, lu en combinaison avec les articles 10 et 15 de celle-ci, en ce qui concerne six agglomérations, soit celles de Lycksele, de Malå, de Mockfjärd, de Pajala, de Robertsfors et de Tänndalen.

28

En premier lieu, s’agissant de l’agglomération de Lycksele, dont la station d’épuration possède une capacité de traitement des eaux résiduaires pour un EH de 14000, la Commission fait valoir que le Royaume de Suède a admis, dans sa réponse à l’avis motivé, que ladite agglomération n’a pas respecté les exigences ni pour la DBO5 ni pour la DCO, mais qu’il a indiqué que lesdites exigences seront respectées vers la fin de l’année 2020. La Commission fait valoir que 24 échantillons ont été prélevés à la station d’épuration de Lycksele entre le 7 novembre 2017 et le 6 novembre 2018, que la concentration en DBO5 était supérieure à la valeur limite de 25 mg/l dans tous les échantillons et que la concentration en DCO était supérieure à la valeur limite de 125 mg/l dans 10 échantillons, alors que le nombre maximal d’échantillons non conformes autorisé est de 4.

29

En deuxième lieu, en ce qui concerne l’agglomération de Malå, dont la station d’épuration possède une capacité de traitement des eaux résiduaires pour un EH de 5000, la Commission fait valoir qu’il ressort de la réponse du Royaume de Suède à l’avis motivé que ladite agglomération n’a respecté les exigences de valeurs maximales de concentration pour ce qui concerne ni la DBO5 ni la DCO. La Commission soutient que, d’une part, 25 échantillons ont été prélevés pour vérifier la concentration en DCO dans les eaux rejetées entre le 9 novembre 2017 et le 7 novembre 2018, et que celle-ci était supérieure à la valeur limite de 125 mg/l dans 4 échantillons, alors que le nombre maximal d’échantillons non conformes autorisé était de 3. D’autre part, 13 échantillons ont été prélevés en vue de vérifier le pourcentage de réduction de la DCO entre le 9 novembre 2017 et le 7 novembre 2018 et il en serait ressorti que cette réduction était inférieure au pourcentage minimal de réduction, à savoir 70 %, dans trois cas, alors que le nombre maximal d’échantillons non conformes autorisé était de 2.

30

S’agissant de la concentration en DBO5, la Commission soutient que celle-ci a été mesurée 25 fois et que la concentration maximale de 25 mg/l a été dépassée dans 19 échantillons, alors que le nombre maximal autorisé d’échantillons non conformes est de 3. Elle ajoute que 7 échantillons s’écartaient de plus de 100 % de la valeur limite. La Commission conteste à cet égard l’argument du Royaume de Suède selon lequel ladite agglomération relève de la dérogation visée à l’article 4, paragraphe 2, de la directive 91/271, dans la mesure où elle ne se situe pas à une altitude d’au moins 1500 mètres.

31

En troisième lieu, s’agissant de l’agglomération de Mockfjärd, dont la station d’épuration possède une capacité de traitement des eaux résiduaires pour un EH de 3000, la Commission fait valoir qu’il ressort de la réponse du Royaume de Suède à l’avis motivé que 19 échantillons ont été prélevés en vue de la vérification de la concentration en DBO5 dans les eaux rejetées et 17 échantillons en ce qui concerne la concentration en DCO entre le 11 janvier et le 27 décembre 2018. Or, entre le 17 mai et le 17 octobre 2018, aucun échantillon n’a été prélevé. En raison du fait que l’annexe I, point D.3, de la directive 91/271 exige que les échantillons doivent être prélevés à des intervalles réguliers au cours d’une année entière, la Commission considère que, en l’absence d’un tel prélèvement sur une période de cinq mois, ni les exigences relatives au contrôle ni celles relatives aux valeurs maximales de concentration en DBO5 et en DCO dans ces rejets ont été respectées.

32

En quatrième lieu, en ce qui concerne l’agglomération de Pajala, dont la station d’épuration possède une capacité de traitement des eaux résiduaires pour un EH de 2400, la Commission fait valoir qu’il ressort de la réponse du Royaume de Suède à l’avis motivé que 29 échantillons ont été prélevés entre le 16 novembre 2017 et le 1er novembre 2018. S’agissant de la concentration en DCO, celle-ci était supérieure à 125 mg/l dans 11 échantillons, alors que le nombre maximal des échantillons non conformes autorisé est de 4.

33

Pour ce qui est de la concentration en DBO5, la Commission observe, d’une part, que 20 échantillons dépassaient la concentration maximale de 25 mg/l, alors que le nombre maximal d’échantillons non conformes autorisé est de 4. D’autre part, 9 échantillons s’écartaient de plus de 100 % de la valeur limite. En outre, cette institution ajoute que la réduction de la DBO5 présente dans les eaux rejetées a été mesurée 25 fois et que 12 échantillons présentaient un résultat inférieur au pourcentage minimal de réduction de 70 %, alors que le nombre maximal d’échantillons non conformes autorisé est de 3. La Commission conteste à cet égard l’argument du Royaume de Suède selon lequel ladite agglomération relève de la dérogation visée à l’article 4, paragraphe 2, de la directive 91/271, dans la mesure où elle ne se situe pas à une altitude d’au moins 1500 mètres.

34

En cinquième lieu, s’agissant de l’agglomération de Robertsfors, dont la station d’épuration possède une capacité de traitement des eaux résiduaires pour un EH de 2800, la Commission fait valoir qu’il ressort de la réponse du Royaume de Suède à l’avis motivé que ladite agglomération avait éprouvé certaines difficultés, au cours de l’année 2018 mais qu’elle respectait les exigences de la directive 91/271 depuis le 23 octobre 2018. La Commission fait valoir qu’il ressort de ladite réponse que 30 échantillons ont été prélevés en vue de la vérification des paramètres relatifs à la DBO5 entre le 20 décembre 2017 et le 12 décembre 2018. 21 échantillons ont été prélevés et, d’une part, la réduction de la DBO5 a été inférieure à la valeur limite de 70 % à 7 occasions au cours de l’année 2018, alors que le nombre maximal d’échantillons non conformes autorisé est de 3. D’autre part, la concentration en DBO5 a dépassé la valeur limite de 25 mg/l à 20 reprises alors que le nombre maximal d’échantillons non conformes autorisé est de 4 et, de plus, le dépassement était supérieur à 100 % dans 8 cas. La Commission conteste à cet égard l’argument du Royaume de Suède selon lequel ladite agglomération relève de la dérogation visée à l’article 4, paragraphe 2, de la directive 91/271, dans la mesure où elle ne se situe pas à une altitude d’au moins 1500 mètres.

35

En sixième lieu, en ce qui concerne l’agglomération de Tänndalen, dont la station d’épuration possède une capacité de traitement des eaux résiduaires pour un EH de 6000, la Commission fait valoir qu’il ressort de la réponse du Royaume de Suède à l’avis motivé que 35 échantillons ont été prélevés en vue de la vérification des paramètres relatifs à la DBO5 entre le 3 janvier et le 12 décembre 2018, mais que, étant donné que tous portaient sur la concentration en DBO5 dans les effluents, aucune information relative au pourcentage de réduction n’est disponible. La Commission ajoute que la concentration en DBO5 a dépassé la valeur limite de 25 mg/l dans 6 échantillons, alors que le nombre maximal d’échantillons non conformes autorisé est de 4 et que 1 échantillon a dépassé la concentration maximale de plus de 100 %.

36

Selon la Commission, une lettre du 20 décembre 2018 de la commune de Härjedalen, dont l’agglomération de Tänndalen fait partie, contredit les allégations du Royaume de Suède, dans la mesure où il en ressort que la surveillance pour l’année 2018 fait apparaître que l’exigence en matière de rejet pour la DBO5 ne pourrait pas être respectée.

37

Le Royaume de Suède fait valoir que la position de la Commission, selon laquelle il existe une violation de l’article 4 de la directive 91/271, dès lors qu’il y a une violation de l’article 15 de cette directive, ne saurait être admise dans la mesure où l’annexe I, points B et D, de la directive 91/271 prévoit uniquement des indications succinctes relatives à la construction des stations d’épuration et au prélèvement des échantillons et non pas des critères spécifiques.

38

Ainsi, le Royaume de Suède avance qu’il ressort de la jurisprudence de la Cour qu’un seul échantillon répondant aux prescriptions prévues à l’annexe I, point B, de la directive 91/271 suffit pour prouver que les obligations découlant de l’article 4 de cette dernière ont été respectées par l’État membre concerné. Le Royaume de Suède estime que l’argument de la Commission selon lequel un État membre doit prouver la prise d’échantillons conformes pendant une période de douze mois pour que les exigences en matière de rejets de l’article 4 de la directive 91/271, lu en combinaison avec son article 15, puissent être considérées comme respectées, ne saurait être retenu.

39

Le Royaume de Suède soutient qu’une telle interprétation empêcherait l’objectif de la procédure précontentieuse, dans la mesure où la Commission octroie notamment à l’État membre concerné un délai, normalement de deux mois, pour se conformer à l’avis motivé. Or, s’il lui faut prouver la prise d’échantillons conformes pendant une période de douze mois, il lui est impossible de se conformer à une telle demande.

40

Le Royaume de Suède considère que la Commission fait une lecture erronée de l’article 4, paragraphe 2, de la directive 91/271, dans la mesure où cette institution considère que ladite dérogation ne s’applique qu’à des régions se trouvant à une altitude supérieure à 1500 mètres. Cet État membre estime que le facteur déterminant qui permet l’application de la dérogation visée à cette disposition sont les basses températures qui rendent difficile l’application d’un traitement efficace, ainsi que cela ressort expressément du libellé de l’article 4, paragraphe 2, de la directive 91/271.

41

En premier lieu, en ce qui concerne l’agglomération de Lycksele, si le Royaume de Suède ne conteste pas que les valeurs constatées de concentration de la DBO5 et de la DCO dans sa station d’épuration ne respectent pas les exigences de la directive 91/271, il précise que des travaux sont en cours pour remédier à cette situation et qu’il est prévu qu’il soit satisfait aux exigences de cette directive au plus tard à la fin de l’année 2020 ou au début de l’année 2021.

42

En deuxième lieu, s’agissant de l’agglomération de Malå, le Royaume de Suède ne conteste pas que celle-ci ne respecte pas les exigences de la directive 91/271 en ce qui concerne les valeurs de concentration en DCO fixées par la directive 91/271. En revanche, le Royaume de Suède considère, en ce qui concerne les valeurs de concentration en DBO5, que cette agglomération doit bénéficier de la dérogation prévue à l’article 4, paragraphe 2, de cette directive en raison des basses températures dans ladite agglomération. En tout état de cause, cet État membre soutient qu’il était prévu que la station d’épuration de Malå serait conforme aux exigences de l’article 4 de la directive 91/271 au plus tard au cours du printemps 2021.

43

En troisième lieu, s’agissant de l’agglomération de Mockfjärd, le Royaume de Suède soutient qu’il ressort des résultats relatifs au contrôle des valeurs de concentration en DBO5 effectué entre le 11 janvier et le 27 décembre 2018 ainsi que celui portant sur les valeurs de concentration en DCO entre le 19 décembre 2017 et le 6 décembre 2018 que ladite agglomération respectait les exigences de la directive 91/271. Cet État membre avance que, d’une part, s’agissant de la DBO5, 3 des 19 échantillons présentaient une concentration supérieure à 25 mg/l O2, ce qui correspond au nombre d’échantillons non conformes autorisé. D’autre part, s’agissant des exigences en matière de concentration en DCO, tous les échantillons, à l’exception d’un seul, étaient conformes, la concentration relevée étant inférieure à 125 mg/l O2.

44

En outre, les échantillons n’ont pas été prélevés entre le 17 mai et le 17 octobre 2018 en raison de travaux dans la station d’épuration. Selon le Royaume de Suède, seuls quatre échantillons devaient être prélevés dans cette agglomération au cours de l’année 2018 pour satisfaire aux exigences de la directive 91/271, dès lors que, sur la base des échantillons prélevés pendant l’année 2017, les résultats de la surveillance ont montré que la station d’épuration répondait aux exigences de cette directive, tant pour la DBO5 que pour la DCO.

45

En quatrième lieu, en ce qui concerne l’agglomération de Pajala, le Royaume de Suède ne conteste pas que sa station d’épuration ne respecte pas les exigences de la directive 91/271 relatives aux valeurs autorisées de la DCO, mais qu’elle respecte celles relatives à la DBO5. À cet égard, en raison des basses températures et compte tenu du fait que la documentation existante indique que les rejets de la station d’épuration de Pajala sont relativement faibles et n’altèrent pas l’environnement, la dérogation visée à l’article 4, paragraphe 2, de la directive 91/271 devrait s’appliquer. En tout état de cause, le Royaume de Suède soutient qu’une nouvelle station d’épuration sera construite dans cette agglomération et qu’il est prévu qu’il sera satisfait aux exigences de l’article 4, paragraphe 1, de cette directive en matière de rejets au cours du printemps ou de l’été 2022.

46

En cinquième lieu, s’agissant de l’agglomération de Robertsfors, le Royaume de Suède considère que cette agglomération respecte les exigences de la directive 91/271 relatives aux valeurs maximales de concentration en DBO5, dans la mesure où la dérogation prévue à l’article 4, paragraphe 2, de cette directive lui est applicable. En outre, cet État membre fait valoir que, au cours de l’année 2018, la station d’épuration de Robertsfors a connu plusieurs incidents de fonctionnement, auxquels il a été remédié. Il ressortirait des résultats recueillis entre le 20 décembre 2017 et le 12 décembre 2018 que, depuis le 23 octobre 2018, cette station d’épuration répond aux exigences de l’article 4 de la directive 91/271 en ce qui concerne la concentration en DBO5, dans la mesure où la totalité des 6 échantillons prélevés après cette date ferait état d’un pourcentage de réduction de celle-ci supérieur à 70.

47

En sixième et dernier lieu, en ce qui concerne l’agglomération de Tänndalen, le Royaume de Suède fait valoir que, s’agissant de la période comprise entre le 3 janvier et le 12 décembre 2018, les rejets de la station d’épuration de Tänndalen ont dépassé les valeurs maximales de concentration en DBO5 jusqu’au 18 avril 2018. Toutefois, depuis le 16 mai 2018, tous les échantillons prélevés auraient permis de constater que les eaux résiduaires rejetées affichaient des valeurs inférieures au seuil maximal de concentration de 25 mg/l O2. Le Royaume de Suède considère que, dans la mesure où la totalité des échantillons prélevés entre le 16 mai 2018 et le 15 mai 2019 affiche des valeurs inférieures à la concentration maximale autorisée de 25mg/l O2, ladite agglomération respecte les exigences de la directive 91/271.

Appréciation de la Cour

– Observations liminaires

48

En premier lieu, il convient de rappeler que, d’une part, selon l’article 4 de la directive 91/271, les États membres veillent à ce que les eaux urbaines résiduaires qui pénètrent dans les systèmes de collecte soient, avant d’être rejetées, soumises à un traitement secondaire ou à un traitement équivalent. D’autre part, en vertu de l’article 5, paragraphes 2 et 3, de cette directive, ils veillent à ce que les eaux urbaines résiduaires qui entrent dans les systèmes de collecte fassent l’objet, avant d’être rejetées dans des zones sensibles, d’un traitement plus rigoureux que celui qui est décrit à l’article 4 de ladite directive. Dans l’un et l’autre cas, les rejets doivent répondre aux prescriptions de l’annexe I, point B, de la même directive.

49

En deuxième lieu, la Cour a jugé que, dès lors qu’un État membre est en mesure de présenter un échantillon répondant aux prescriptions de l’annexe I, point B, de la directive 91/271, les obligations découlant de l’article 4 de cette dernière doivent être considérées comme respectées, cet article n’imposant pas que des prélèvements d’échantillons soient effectués, comme cela est prévu à l’annexe I, point D, de cette directive, durant une année entière. Rien ne permet de considérer qu’il en va différemment en ce qui concerne le respect des obligations découlant de l’article 5 de la directive 91/271, lequel ne renvoie pas davantage aux dispositions de l’annexe I, point D, de la directive 91/271 (arrêt du 10 mars 2016, Commission/Espagne, C‑38/15, non publié, EU:C:2016:156, point 24).

50

En troisième lieu, il y a lieu de distinguer les obligations de résultat qui incombent aux États membres au titre des articles 4 et 5 de la directive 91/271, en vue de vérifier la conformité des rejets des stations d’épuration des eaux urbaines résiduaires aux prescriptions de l’annexe I, point B, de cette directive, de l’obligation continue à laquelle ils sont tenus en vertu de l’article 15 de ladite directive, afin de garantir que ces rejets remplissent au fil du temps les conditions de qualité requises dès la mise en fonctionnement de l’installation de traitement (arrêt du 10 mars 2016, Commission/Espagne, C‑38/15, non publié, EU:C:2016:156, point 25).

51

Il s’ensuit que l’article 15 de la directive 91/271 a une portée autonome et un objectif différent par rapport aux articles 4 et 5 de celle-ci. Dès lors, la violation éventuelle des obligations de contrôle découlant de cet article 15 n’implique pas automatiquement la violation des exigences prévues auxdits articles 4 et 5.

52

Partant, la thèse de la Commission selon laquelle la violation des articles 4 ou 5 de la directive 91/271 se produit lorsqu’il y a une violation de l’article 15 de cette directive ne saurait prospérer.

53

En outre, s’agissant de l’interprétation de l’article 4, paragraphe 2, de la directive 91/271, ainsi que l’a relevé Mme l’avocate générale au point 32 de ses conclusions, le champ d’application de cette disposition se limite sans ambiguïté à des régions de haute montagne clairement définies, situées à une altitude supérieure à 1500 mètres. Dès lors, l’interprétation de cette disposition soutenue par le Royaume de Suède, telle que rappelée au point 40 du présent arrêt, aboutirait à une interprétation contra legem de cette disposition, de sorte qu’elle ne saurait être retenue (voir, en ce sens, arrêt du 1er octobre 2020, Entoma, C‑526/19, EU:C:2020:769, point 43).

54

Partant, il convient de rejeter l’argument du Royaume de Suède tiré de l’application de la dérogation prévue à l’article 4, paragraphe 2, de la directive 91/271.

55

C’est à la lumière de ces observations qu’il convient d’apprécier l’existence du manquement pour les agglomérations faisant l’objet du présent recours.

– Sur les agglomérations de Malå, Pajala et Lycksele

56

En ce qui concerne les agglomérations de Malå, de Pajala et de Lycksele, il convient de relever que les parties s’accordent sur le fait que les valeurs de concentration en DCO sont supérieures à celles autorisées par l’article 4, paragraphe 3, et par l’annexe I, point B, de la directive 91/271. En ce qui concerne la dernière agglomération, les parties s’accordent également sur le fait que la concentration en DBO5 est supérieure à celle autorisée par ces dispositions.

57

Pour justifier le manquement reproché, le Royaume de Suède a allégué, d’une part, s’agissant de l’agglomération de Lycksele, que les exigences relatives aux concentrations en DCO et en DBO5 seraient respectées vers la fin de l’année 2020. D’autre part, s’agissant de la concentration en DBO5 dans les agglomérations de Malå et Pajala, sans contester le fait que les concentrations en DBO5 dépassent celles autorisées par l’article 4, paragraphe 3, et par l’annexe I, point B, de la directive 91/271, le Royaume de Suède a, toutefois, invoqué la dérogation prévue à l’article 4, paragraphe 2, de cette directive.

58

À cet égard, d’une part, il convient de rappeler que l’existence d’un manquement devant être appréciée en fonction de la situation de l’État membre concerné telle qu’elle se présentait au terme du délai fixé dans l’avis motivé, les changements intervenus par la suite ne sauraient être pris en compte par la Cour [arrêt du 5 mars 2020, Commission/Chypre (Collecte et épuration des eaux urbaines résiduaires), C‑248/19, non publié, EU:C:2020:171, point 22 et jurisprudence citée].

59

En l’occurrence, le délai fixé dans l’avis motivé étant le 8 janvier 2019, le respect éventuel des exigences de la directive 91/271 intervenu après cette date ne saurait être pris en compte.

60

D’autre part, ainsi qu’il ressort des points 53 et 54 du présent arrêt, la dérogation prévue à l’article 4, paragraphe 2, de la directive 91/271 ne saurait être utilement invoquée par cet État membre, de sorte qu’il y a lieu de constater que le manquement aux obligations visées à l’article 4 de la directive 91/271 est fondé.

61

En outre, s’agissant de l’obligation prévue à l’article 10 de cette directive, selon laquelle les stations d’épuration doivent être conçues, construites, exploitées et entretenues de manière à avoir un rendement suffisant dans toutes les conditions climatiques normales du lieu où elles sont situées, son respect présuppose notamment que les exigences prévues à l’article 4 de cette directive soient satisfaites [arrêt du 5 mars 2020, Commission/Chypre (Collecte et épuration des eaux urbaines résiduaires), C‑248/19, non publié, EU:C:2020:171, point 37 et jurisprudence citée].

62

Par conséquent, ladite obligation ne saurait être considérée comme étant remplie dans les agglomérations où l’obligation de soumettre la totalité des eaux urbaines résiduaires à un traitement secondaire ou équivalent, telle que prévue à l’article 4 de la directive 91/271, n’est pas remplie [arrêt du 5 mars 2020, Commission/Chypre (Collecte et épuration des eaux urbaines résiduaires), C‑248/19, non publié, EU:C:2020:171, point 38 et jurisprudence citée].

63

Dans ces conditions, il convient de constater que, en ne veillant pas à ce que, avant d’être rejetées, les eaux résiduaires des agglomérations de Lycksele, de Malå et de Pajala soient soumises à un traitement secondaire ou à un traitement équivalent, le Royaume de Suède a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 4 de la directive 91/271, lu en combinaison avec l’article 10 de celle-ci.

– Sur l’agglomération de Mockfjärd

64

S’agissant de l’agglomération de Mockfjärd, il y a lieu de relever que la Commission estime que, en raison du fait qu’aucun échantillon n’a été prélevé entre le 16 mai et le 18 octobre 2018, conformément à l’annexe I, point D.3, de la directive 91/271, le Royaume de Suède a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 4 de la directive 91/271, lu en combinaison avec les articles 10 et 15 de celle-ci.

65

La Commission ne conteste pas, d’une part, s’agissant de la concentration en DBO5, que, entre le 11 janvier et le 27 décembre 2018, seuls 3 des 19 échantillons prélevés présentaient une concentration supérieure à celle autorisée par la directive 91/271. D’autre part, la Commission ne conteste pas non plus, s’agissant de la concentration en DCO, que, entre le 19 décembre 2017 et le 6 décembre 2018, tous les échantillons, à l’exception d’un seul, étaient conformes aux exigences du tableau 3 de l’annexe I de la directive 91/271, selon lequel la non-conformité de 3 échantillons au maximum est admise sur 17 à 28 échantillons prélevés par an.

66

Partant, il y a lieu de considérer que la Commission vise à établir le manquement à l’article 4 de ladite directive pour la seule raison tirée de l’absence de prélèvement des échantillons à intervalles réguliers, conformément à l’article 15 de cette directive, lu en combinaison avec l’annexe I, point D.3, de celle-ci.

67

Or, d’une part, la thèse de la Commission selon laquelle la violation de l’article 15 de la directive 91/271 implique automatiquement une violation de l’article 4 de celle-ci a été rejetée au point 51 du présent arrêt.

68

D’autre part, ainsi qu’il ressort du point 49 du présent arrêt, dès lors qu’un État membre est en mesure de présenter un échantillon répondant aux prescriptions de l’annexe I, point B, de la directive 91/271, les obligations découlant de l’article 4 de cette dernière doivent être considérées comme respectées, cet article n’imposant pas que des prélèvements d’échantillons soient effectués, comme cela est prévu à l’annexe I, point D, de cette directive, durant une année entière.

69

Dans ces conditions, il y a lieu de rejeter le recours de la Commission en ce qui concerne l’agglomération de Mockfjärd.

– Sur l’agglomération de Robertsfors

70

En ce qui concerne l’agglomération de Robertsfors, il y a lieu de relever, d’une part, que le Royaume de Suède ne conteste pas que, au cours de l’année 2018, la station d’épuration de ladite agglomération a connu plusieurs incidents de fonctionnement, auxquels il a été remédié. D’autre part, la Commission ne conteste pas que, depuis le 23 octobre 2018, les six échantillons prélevés pour contrôler la concentration en DBO5 ont tous présenté une réduction d’au moins 70 %, ce qui était conforme aux exigences de l’article 4 de la directive 91/271.

71

À titre liminaire, il y a lieu, ainsi qu’il ressort des points 53 et 54 du présent arrêt, d’écarter l’argument du Royaume de Suède tiré de l’application de la dérogation prévue à l’article 4, paragraphe 2, de la directive 91/271.

72

En outre, d’une part, la thèse de la Commission selon laquelle la violation de l’article 15 de la directive 91/271 implique automatiquement une violation de l’article 4 de cette directive a été rejetée au point 51 du présent arrêt.

73

D’autre part, ainsi qu’il ressort des points 48 à 52 du présent arrêt, l’article 4 de la directive 91/271 ne renvoie pas à l’annexe I, point D, de celle-ci, de sorte que, dès lors que le Royaume de Suède est en mesure de présenter un échantillon répondant aux prescriptions de l’annexe I, point B, de cette directive pour la période visée par le présent recours, les obligations découlant de l’article 4 de cette dernière doivent être considérées comme respectées.

74

En l’occurrence, les parties ne contestent pas que, depuis le 23 octobre 2018, les six échantillons prélevés pour contrôler la concentration en DBO5 ont tous été conformes aux exigences de la directive 91/271.

75

Partant, il y a lieu de rejeter le recours de la Commission en ce qui concerne l’agglomération de Robertsfors.

– Sur l’agglomération de Tänndalen

76

En ce qui concerne l’agglomération de Tänndalen, les parties ne contestent pas que 35 échantillons ont été prélevés pour contrôler la concentration en DBO5 entre le 3 janvier et le 12 décembre 2018 et que 6 de ces échantillons dépassaient la concentration autorisée par la directive 91/271, de sorte que, jusqu’au 18 avril 2018, la station d’épuration de cette agglomération ne respectait pas les exigences de celle-ci.

77

Le Royaume de Suède avance que tous les échantillons prélevés entre le 16 mai 2018 et le 15 mai 2019 ont permis de constater que les eaux résiduaires rejetées avaient des valeurs inférieures au seuil maximal de concentration.

78

À cet égard, ainsi que rappelé aux points 58 et 59 du présent arrêt, le délai fixé dans l’avis motivé étant le 8 janvier 2019, le respect éventuel des exigences de la directive 91/271 intervenu après cette date ne saurait être pris en compte.

79

Cependant, d’une part, la thèse de la Commission selon laquelle la violation de l’article 15 de la directive 91/271 implique automatiquement une violation de l’article 4 de celle-ci a été rejetée au point 51 du présent arrêt.

80

D’autre part, ainsi qu’il ressort également des points 48 à 52 du présent arrêt, l’article 4 de la directive 91/271 ne renvoie pas à l’annexe I, point D, de celle-ci, de sorte que, dès lors que le Royaume de Suède est en mesure de présenter un échantillon répondant aux prescriptions de l’annexe I, point B, de cette directive pour la période visée par le présent recours, les obligations incombant à cet État membre en vertu de l’article 4 de ladite directive doivent être considérées comme respectées.

81

En l’occurrence, l’ensemble des échantillons recueillis entre le 16 mai 2018 et le 8 janvier 2019 était conforme aux prescriptions établies par la directive 91/271.

82

Il s’ensuit que le recours de la Commission doit être rejeté en ce qui concerne l’agglomération de Tänndalen.

Sur le deuxième grief, tiré d’un manquement aux obligations incombant au Royaume de Suède en vertu de l’article 5 de la directive 91/271, lu en combinaison avec les articles 10 et 15 de celle-ci

Argumentation des parties

83

La Commission considère, d’une part, qu’une violation de l’article 5 de la directive 91/271 se produit lorsqu’il y a une violation de l’article 15 de cette directive, qui prévoit le nombre d’échantillons devant être prélevés et les intervalles de leur prélèvement, dans la mesure où, en l’absence du respect de ce dernier article, il n’est pas possible de vérifier si les exigences de l’article 5 de la directive 91/271 ont été respectées. D’autre part, la Commission estime que le respect de cette dernière disposition, lue en combinaison avec l’article 15 de cette directive, constitue une condition pour que les exigences de l’article 10 de ladite directive, relatives à la conception, à la construction, à l’exploitation et à l’entretien des stations d’épuration, puissent être considérées comme étant satisfaites.

84

La Commission fait valoir qu’il ressort de l’article 5, paragraphe 2, de la directive 91/271 que les rejets d’eaux urbaines résiduaires des agglomérations ayant un EH de plus de 10000 doivent faire l’objet d’un traitement plus rigoureux que celui prévu à l’article 4 de cette directive. Il ressortirait de l’article 5, paragraphe 3, de ladite directive que de tels rejets doivent répondre aux exigences pertinentes de l’annexe I, point B, de celle-ci qui renvoie aux tableaux 1 et 2 de cette annexe.

85

La Commission rappelle que les deux critères, appliqués alternativement, portent sur l’azote dans les eaux résiduaires, soit la concentration maximale autorisée pour l’azote qui est de 15 mg/l pour les agglomérations affichant un EH compris entre 10000 et 100000 et de 10 mg/l pour les agglomérations ayant un EH de plus de 100000 EH, et le pourcentage minimal de réduction pour l’azote qui doit être de 70 % à 80 %. En outre, la Commission fait valoir que l’annexe I, point D.4.a, de la directive 91/271 prévoit que les eaux résiduaires traitées sont présumées respecter les exigences du tableau 2 de cette annexe en ce qui concerne l’azote, si la valeur annuelle moyenne des échantillons ne dépasse pas la valeur limite applicable.

86

La Commission fait valoir que, en ce qui concerne les agglomérations de Borås, de Skoghall, de Habo et de Töreboda, le Royaume de Suède a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 5 de la directive 91/271, lu en combinaison avec les articles 10 et 15 de celle-ci.

87

En premier lieu, s’agissant de l’agglomération de Borås, dont les stations d’épuration traitaient ou traitent des eaux résiduaires pour des EH, respectivement, de 110000 et de 150000, la Commission soutient qu’il ressort de la réponse du Royaume de Suède à l’avis motivé que l’ancienne station d’épuration, mise à l’arrêt le 28 mai 2018, n’a pas respecté les exigences de la directive 91/271, mais que la nouvelle station respecte ces exigences depuis le 17 septembre 2018.

88

La Commission fait valoir que le tableau des résultats relatifs aux concentrations en azote, soumis par le Royaume de Suède, ne permet pas de déterminer quels résultats proviennent de quelle station d’épuration et que, en tout état de cause, ledit tableau montre que les exigences de la directive 91/271 relatives aux valeurs maximales de concentration en azote n’étaient pas respectées au cours de la période comprise entre le 1er novembre 2017 et le 31 octobre 2018. En effet, durant cette période d’un an, la valeur annuelle moyenne des échantillons s’élevait à 18 mg/l, alors que la valeur limite est de 10 mg/l.

89

En deuxième lieu, en ce qui concerne l’agglomération de Skoghall, dont les stations d’épuration possèdent une capacité de traitement des eaux résiduaires pour des EH, respectivement, de 5457 et de 15000, la Commission fait valoir qu’il ressort de la réponse à l’avis motivé que dans l’une des deux stations d’épuration, la valeur limite de concentration en azote a été dépassée au cours de la période de douze mois comprise entre le 9 novembre 2017 et le 6 novembre 2018, ce qui n’a pas été contesté par le Royaume de Suède. À cet égard, la Commission avance que la valeur annuelle moyenne des échantillons s’est élevée à 17 mg/l, alors que la valeur limite est de 15 mg/l.

90

En troisième lieu, s’agissant de l’agglomération de Habo, dont la station d’épuration possède une capacité de traitement des eaux résiduaires pour un EH de 17000, la Commission estime que seulement 33 % de l’azote ont été éliminés dans ladite station et que le Royaume de Suède n’a nullement étayé ses allégations selon lesquelles la réduction de l’azote entre Habo et la mer Baltique était de 78 à 87 %. Selon la Commission, le modèle Hydrological Predictions for the Environment (prévisions hydrologiques pour l’environnement, ci-après le « modèle HYPE ») ne permet pas de déterminer si l’agglomération de Habo respecte ou non les exigences de la directive 91/271. Il ressortirait du modèle HYPE que la réduction de l’azote dans tous les lacs et cours d’eau entre Habo et la mer Baltique s’élève à 87 %, avant que les eaux résiduaires n’atteignent la zone littorale sensible. Par ailleurs, une déclaration officielle de l’Institut météorologique et hydrologique de Suède (ci-après l’« IMHS ») indiquerait que la réduction totale de l’azote, qui prend en compte également la rétention naturelle, s’élèverait à 91 %.

91

Or, la Commission fait valoir qu’il ressort de la réponse du Royaume de Suède à l’avis motivé, d’une part, que la valeur annuelle moyenne de la réduction de la concentration en azote constaté dans la station d’épuration de Habo ne serait que de 32 % et, d’autre part, que ladite station d’épuration ne serait même pas équipée pour traiter l’azote. La Commission estime que, si le Royaume de Suède s’appuie sur le modèle HYPE, il n’a pas communiqué les informations pertinentes pour vérifier les données alléguées, de sorte que cette institution considère que la réduction en azote pour Habo est de 32 %, alors que le pourcentage minimal de réduction doit se situer entre 70 % et 80 %.

92

En quatrième lieu, en ce qui concerne l’agglomération de Töreboda, dont la station d’épuration possède une capacité de traitement des eaux résiduaires pour un EH de 35500, la Commission fait valoir qu’il ressort de la réponse du Royaume de Suède à l’avis motivé que cet État membre a soutenu d’une part, que les exigences relatives à la concentration en DBO5 étaient respectées. D’autre part, pour, essentiellement, les mêmes raisons que celles avancées pour l’agglomération de Habo, il a soutenu que la réduction de la concentration en azote assuré par la station d’épuration de Töreboda était de 43 %, ce pourcentage atteignant 71 % par la prise en compte de la rétention naturelle avant que les eaux résiduaires n’atteignent les zones côtières sensibles.

93

La Commission soutient qu’il ressort de ladite réponse que 50 échantillons ont été prélevés en vue de la vérification de la concentration en DBO5 à la station d’épuration de Töreboda entre le 8 novembre 2017 et le 6 novembre 2018. Or, selon cette institution, des échantillons n’ont pas été prélevés dans les eaux entrantes et sortantes entre le 8 novembre 2017 et le 3 janvier 2018, de telle sorte que la réduction n’a pas été déclarée pour cette période et que les exigences en matière de contrôle de l’annexe I, point D.3, de la directive 91/271 n’étaient pas respectées.

94

En outre, la Commission fait valoir que la concentration maximale de 25 mg/l a été dépassée dans 18 échantillons, alors que le nombre maximal d’échantillons non conformes autorisé était de 5 et que 3 échantillons dépassaient de plus de 100 % cette valeur limite. Dès lors que cette agglomération ne respecterait pas les exigences découlant de l’article 4 de la directive 91/271, elle ne respecterait pas non plus celles relevant de l’article 5 de cette directive qui prévoit l’obligation d’un traitement plus rigoureux pour les stations d’épuration ayant un EH de plus de 10000.

95

Pour ce qui est de la réduction de la concentration en azote, la Commission fait valoir qu’il ressort de la réponse du Royaume de Suède à l’avis motivé que, d’une part, la valeur annuelle moyenne de la réduction de l’azote à la station d’épuration est de 43 %, alors que le pourcentage minimal de réduction doit se situer entre 70 % et 80 % et, d’autre part, que ladite station d’épuration n’est pas équipée pour traiter l’azote. La Commission avance qu’aucune information permettant de vérifier les informations communiquées par le Royaume de Suède ou les informations postérieures à l’année 2013 ne lui a été transmise.

96

À titre liminaire, le Royaume de Suède conteste, pour les mêmes raisons avancées dans le cadre du grief tiré d’un manquement aux obligations découlant de l’article 4 de la directive 91/271, lu en combinaison avec les articles 10 et 15 de celle-ci, la thèse de la Commission selon laquelle la violation de l’article 15 entraîne les violations des articles 5 et 10 de cette directive.

97

En premier lieu, s’agissant de l’agglomération de Borås, le Royaume de Suède considère que l’argumentation de la Commission selon laquelle il n’est pas possible d’identifier la station d’épuration sur laquelle porte les résultats dont il fait état ne saurait être retenue. Il ressortirait en effet de sa réponse à l’avis motivé que la station d’épuration de Gässlösa était en service jusqu’au 28 mai 2018 et que, à partir de cette date, la station de Sobacken a été mise en service. À cet égard, le Royaume de Suède avance que, pour la période comprise entre le 28 mai 2018 et le 9 mai 2019, la concentration en azote des eaux résiduaires rejetées par cette station était inférieure à la valeur limite annuelle moyenne de 10 mg/l, de sorte que ladite station respecte les exigences de la directive 91/271.

98

En deuxième lieu, en ce qui concerne l’agglomération de Skoghall, ayant recours à deux stations d’épuration, le Royaume de Suède soutient que les échantillons prélevés à la station de Sättersviken ont montré une concentration en azote de 17 mg/l en raison des difficultés provoquées par la fonte des neiges, conjuguée à une longue période de faibles températures. Or, des mesures auraient été prises pour remédier à ce problème, de telle sorte que, entre le 4 juin 2018 et le 15 mai 2019, les concentrations en azote dans les eaux rejetées par la station d’épuration de Sättersviken seraient inférieures à la valeur limite annuelle moyenne de 15 mg/l.

99

En troisième lieu, s’agissant de l’agglomération de Habo, le Royaume de Suède fait valoir que l’analyse de 26 échantillons, prélevés entre le 14 novembre 2017 et le 13 novembre 2018, montre que le pourcentage de réduction de la charge en azote à la station d’épuration de Habo était en moyenne de 32 %. Toutefois, le Royaume de Suède avance que la concentration en azote dans les eaux rejetées par cette station d’épuration est réduite de 87 % par l’effet de la rétention naturelle qui, selon la jurisprudence de la Cour, peut être prise en compte aux fins du calcul de réduction de la charge en azote.

100

Il ressortirait en effet de la déclaration de l’IMHS, elle-même fondée sur les données disponibles sur le site Internet de la Sveriges lantbruksuniversitet (université suédoise des sciences de l’agriculture, ci-après la « SLU »), que le modèle HYPE démontre le pourcentage de réduction naturelle de la charge en azote entre la station d’épuration et la mer à concurrence de 87 %. Dans la mesure où la station d’épuration de Habo réalise une réduction en azote de 32 % et la rétention naturelle aboutit à 87 %, la rétention totale s’élève à 91 % au total, le Royaume de Suède considère qu’il respecte les exigences de la directive 91/271 à cet égard.

101

En quatrième lieu, en ce qui concerne l’agglomération de Töreboda, le Royaume de Suède soutient, en ce qui concerne la concentration en DBO5, que, d’une part, il ressort du tableau 2 de l’annexe I de la directive 91/271 que les valeurs de concentration et les pourcentages de réduction sont appliqués de manière alternative. D’autre part, il ressort du tableau 3 de cette annexe que, si le nombre d’échantillons prélevés au cours d’une année déterminée doit être compris entre 17 et 28, 3 de ceux-ci au maximum peuvent ne pas être conformes. Or, entre le 4 janvier et le 11 octobre 2018, 22 des 23 échantillons prélevés à des intervalles réguliers auraient été conformes aux exigences de pourcentage minimal de réduction, alors que ladite station n’avait à prélever que 12 échantillons au cours de cette année.

102

En ce qui concerne la rétention de l’azote, le Royaume de Suède fait valoir que, entre le 10 novembre 2017 et le 6 novembre 2018, le pourcentage de réduction de la charge en azote de la station d’épuration de Töreboda, déterminé sur la base de 54 échantillons, était de 32 %, alors que la réduction due à la rétention naturelle aboutissait à une réduction de 50 % de cette charge.

103

Il ressortirait de la déclaration de l’IMHS, elle-même fondée sur les données disponibles sur le site Internet de la SLU, que le modèle HYPE démontre le pourcentage de réduction naturelle de la charge en azote entre la station d’épuration et la mer à concurrence de 50 %. Compte tenu du fait que la réduction dans la station d’épuration s’élève à 43 %, la rétention totale de l’azote aboutit à 71 % au total.

Appréciation de la Cour

104

À titre liminaire, il convient de relever qu’il y a lieu d’examiner le manquement aux obligations découlant de l’article 5 de la directive 91/271, lu en combinaison avec les articles 10 et 15 de celle-ci, à la lumière des points 48 à 52 du présent arrêt.

– Sur l’agglomération de Töreboda

105

La Commission reproche au Royaume de Suède, en substance, d’avoir méconnu l’article 5 de la directive 91/271, lu en combinaison avec les articles 10 et 15 de celle-ci, en raison du fait que, d’une part, la station d’épuration de ladite agglomération ne respecte pas les exigences de l’article 4 de ladite directive, relatives à la concentration en DBO5, de sorte qu’elle ne saurait, a fortiori, respecter les exigences plus strictes de l’article 5 de celle-ci. D’autre part, la Commission considère que les exigences en ce qui concerne la teneur en azote des eaux traitées ne sont pas respectées non plus.

106

À cet égard, d’une part, la thèse de la Commission selon laquelle la violation de l’article 15 de la directive 91/271 implique automatiquement une violation de l’article 5 de cette directive a été rejetée au point 51 du présent arrêt.

107

D’autre part, ainsi qu’il ressort des points 48 à 52 du présent arrêt, l’article 5 de la directive 91/271 ne renvoie pas à l’annexe I, point D, de celle-ci, de sorte que, dès lors que le Royaume de Suède est en mesure de présenter un échantillon répondant aux prescriptions de l’annexe I, point B, de cette directive pour la période visée par le présent recours, les obligations découlant de l’article 5 de cette dernière doivent être considérées comme respectées.

108

À cet égard, bien qu’il soit constant entre les parties que le Royaume de Suède a communiqué 50 échantillons pour la période comprise entre le 8 novembre 2017 et le 6 novembre 2018, cet État membre conteste le fait que 9 échantillons non conformes au cours du premier semestre de l’année 2018 montrent que la station d’épuration de cette agglomération réduit insuffisamment la concentration en DBO5.

109

Toutefois, compte tenu du fait que, aux fins de satisfaire aux obligations de l’article 5 de la directive 91/271, ledit État membre peut se limiter à produire un seul échantillon répondant aux prescriptions de l’annexe I, point B, de la directive 91/271, le nombre exact des échantillons non conformes est sans pertinence pour apprécier l’existence d’un manquement aux obligations découlant dudit article.

110

La Commission ne contestant pas que le Royaume de Suède a présenté au moins un échantillon conforme aux exigences de l’annexe I, point B, de la directive 91/271, le recours doit être rejeté en ce qu’il porte sur la concentration en DBO5 dans l’agglomération de Töreboda.

111

En ce qui concerne le pourcentage de réduction de la concentration en azote présent dans ces eaux, il convient de rappeler, d’une part, que, en vertu de l’article 5, paragraphe 2, de la directive 91/271, les autorités compétentes sont tenues de prendre les mesures nécessaires afin que, pour tous les rejets provenant d’agglomérations ayant un EH de plus de 10000, les eaux urbaines résiduaires qui entrent dans les systèmes de collecte fassent l’objet, avant d’être rejetées dans des zones sensibles, d’un traitement plus rigoureux que celui qui est décrit à l’article 4 de cette directive, et ce au plus tard le 31 décembre 1998.

112

D’autre part, l’article 5, paragraphe 3, de la directive 91/271 renvoie au point B de l’annexe I de celle-ci qui, à son tour, renvoie aux prescriptions figurant dans le tableau 2 de cette annexe. Ledit tableau exige, en ce qui concerne l’azote, soit une réduction permettant d’atteindre une norme de 15 mg/l pour les agglomérations ayant un EH se situant entre 10000 et 100000, soit un pourcentage minimal de réduction de 70 à 80 %.

113

Ainsi, la Cour a déjà constaté qu’aucune disposition de la directive 91/271 ne s’oppose à ce que la rétention naturelle de l’azote puisse être considérée comme une méthode d’élimination de l’azote des eaux urbaines résiduaires (arrêts du 6 octobre 2009, Commission/Finlande, C‑335/07, EU:C:2009:612, point 86, et du 6 octobre 2009, Commission/Suède, C‑438/07, EU:C:2009:613, point 97).

114

En l’occurrence, si le Royaume de Suède ne conteste pas que la station d’épuration de l’agglomération de Töreboda ne dispose d’aucun équipement particulier pour réduire la concentration en azote présente dans les eaux usées et n’en élimine donc qu’environ 43 %, cet État membre avance que la rétention naturelle de 50 % supplémentaires doit être prise en compte, de sorte que l’azote présent dans les eaux résiduaires est réduit de 71 % au total avant d’atteindre les eaux côtières sensibles.

115

À cet égard, en premier lieu, ainsi qu’il a été relevé par Mme l’avocate générale aux points 109 et 110 de ses conclusions, si la Commission a avancé que le Royaume de Suède n’avait pas produit de données pertinentes lui permettant de vérifier les allégations relatives à la rétention naturelle de l’azote, elle n’a indiqué précisément ni dans l’avis motivé ni dans ses écrits de procédure de quelles mesures elle avait besoin pour pouvoir valider le modèle HYPE, de sorte que le Royaume de Suède n’a pas été en mesure de produire précisément les données demandées par la Commission.

116

En second lieu, dans la mesure où le Royaume de Suède s’est référé aux données disponibles sur le site Internet de la SLU, il a, de ce fait, contesté de manière substantielle et détaillée les données présentées par la Commission et les conséquences qui en découlent (voir, par analogie, arrêt du 18 octobre 2012, Commission/Royaume-Uni, C‑301/10, EU:C:2012:633, point 72 et jurisprudence citée).

117

Dans ces conditions, ainsi que l’a indiqué Mme l’avocate générale au point 111 de ses conclusions, la Commission aurait dû examiner le contenu des données disponibles sur le site Internet en question et, le cas échéant, demander, si nécessaire, une prolongation du délai ou une suspension de la procédure.

118

Or, la Commission, d’une part, n’ayant pas demandé, de manière claire et précise, des mesures spécifiques visant à vérifier le modèle HYPE et, d’autre part, n’étant pas en mesure de mettre en cause de manière convaincante l’argumentation du Royaume de Suède relative à la rétention naturelle de l’azote, il convient de constater qu’elle n’est pas parvenue à démontrer le manquement à l’article 5 de la directive 91/271 en ce qui concerne le rejet de l’azote par la station d’épuration de l’agglomération de Töreboda.

119

Dans ces conditions, il y a lieu de constater que le recours en manquement doit être rejeté en ce qui concerne l’agglomération de Töreboda.

– Sur l’agglomération de Borås

120

En ce qui concerne l’agglomération de Borås, il y a lieu d’examiner le manquement aux obligations relatives aux valeurs limites et à la réduction de la concentration en azote dans les eaux résiduaires, visées à l’article 5 de la directive 91/271, lu en combinaison avec les articles 10 et 15 de celle-ci, à la lumière des points 111 à 113 du présent arrêt.

121

En l’occurrence, il convient de constater que, ainsi que l’a relevé Mme l’avocate générale aux points 95 à 97 de ses conclusions, si le Royaume de Suède a, en raison du remplacement de l’ancienne station d’épuration de cette agglomération le 28 mai 2018, initialement communiqué une valeur moyenne annuelle de concentration en azote de 18 mg/l pour les deux installations, il n’en reste pas moins que cet État membre a produit, dans son mémoire en défense, des données supplémentaires provenant d’échantillons recueillis entre le 28 mai 2018 et le 5 septembre 2019 et qui établissent une moyenne annuelle de 9 mg/l ainsi qu’une réduction moyenne de 70 % de la concentration en azote.

122

Ainsi qu’il ressort des points 58 et 59 du présent arrêt, le délai fixé dans l’avis motivé étant le 8 janvier 2019, le respect éventuel des exigences de la directive 91/271 intervenu après cette date ne saurait être pris en compte.

123

Cela étant, d’une part, la thèse de la Commission selon laquelle la violation de l’article 15 de la directive 91/271 implique automatiquement une violation de l’article 5 de cette directive étant rejetée au point 51 du présent arrêt, et, d’autre part, le Royaume de Suède ayant produit des échantillons conformes aux exigences de ladite directive pour la période comprise entre le 28 mai 2018 et le 8 janvier 2019, il y a lieu de constater que la station d’épuration de l’agglomération de Borås était conforme aux exigences imposées par les articles 5 et 10 de la même directive à cette dernière date.

124

Dans ces conditions, il y a lieu de constater que le recours en manquement doit être rejeté en ce qui concerne l’agglomération de Borås.

– Sur l’agglomération de Skoghall

125

En ce qui concerne l’agglomération de Skoghall, il y a lieu d’examiner le manquement aux obligations relatives aux valeurs limites et à la réduction de la concentration d’azote dans les eaux résiduaires, visées à l’article 5 de la directive 91/271, lu en combinaison avec les articles 10 et 15 de celle-ci, à la lumière des points 111 à 113 du présent arrêt.

126

En l’occurrence, ainsi que l’a relevé Mme l’avocate générale aux points 102 et 103 de ses conclusions, si le Royaume de Suède a admis que, pour l’une des stations d’épuration de ladite agglomération, la concentration en azote dans les eaux traitées par celle-ci présentait, pour la période comprise entre le 9 novembre 2017 et le 6 novembre 2018, une valeur moyenne annuelle de 17 mg/l, il n’en reste pas moins que cet État membre a produit, dans son mémoire en défense, des données supplémentaires provenant d’échantillons recueillis entre le 6 avril 2018 et le 15 mai 2019 et qui établissent une moyenne annuelle de 12 mg/l et une réduction moyenne de 73 % de la concentration en azote.

127

Ainsi qu’il ressort des points 58 et 59 du présent arrêt, le délai fixé dans l’avis motivé étant le 8 janvier 2019, le respect éventuel des exigences de la directive 91/271 intervenu après cette date ne saurait être pris en compte.

128

Cela étant, d’une part, la thèse de la Commission selon laquelle la violation de l’article 15 de la directive 91/271 implique automatiquement une violation de l’article 5 de cette directive étant rejetée au point 51 du présent arrêt, et, d’autre part, le Royaume de Suède ayant produit des échantillons conformes aux exigences de ladite directive pour la période comprise entre le 6 avril 2018 et le 8 janvier 2019, il y a lieu de constater que la station d’épuration de l’agglomération de Skoghall était conforme aux exigences visées aux articles 5 et 10 de la même directive à cette dernière date.

129

Dans ces conditions, il y a lieu de constater que le recours en manquement doit être rejeté en ce qui concerne l’agglomération de Skoghall.

– Sur l’agglomération de Habo

130

S’agissant de l’agglomération de Habo, il y a lieu d’examiner le manquement aux obligations relatives aux valeurs limites et à la réduction de la concentration d’azote dans les eaux résiduaires, visées à l’article 5 de la directive 91/271, lu en combinaison avec les articles 10 et 15 de celle-ci, à la lumière des points 111 à 113 du présent arrêt.

131

En l’occurrence, si le Royaume de Suède ne conteste pas que la station d’épuration de l’agglomération de Habo ne dispose d’aucun équipement particulier pour réduire l’azote dans les eaux usées et n’en élimine donc qu’environ 30 %, ce qui conduit à une moyenne annuelle de 40 mg/l, cet État membre avance que la rétention naturelle de 87 % supplémentaires doit être prise en compte, de sorte que l’azote présent dans les eaux résiduaires est réduit de 91 % au total avant d’atteindre les eaux côtières sensibles.

132

À cet égard, en premier lieu, ainsi que l’a relevé Mme l’avocate générale aux points 109 et 110 de ses conclusions, si la Commission a avancé que le Royaume de Suède ne lui avait pas communiqué de données pertinentes lui permettant de vérifier les allégations de cet État membre relatives à la rétention naturelle de l’azote, elle n’a indiqué précisément ni dans l’avis motivé ni au cours de la procédure juridictionnelle de quelles mesures elle avait besoin pour pouvoir valider le modèle HYPE, de sorte que le Royaume de Suède n’a pas été en mesure de produire précisément les données demandées par la Commission.

133

En second lieu, ainsi qu’il ressort des points 110 et 111 desdites conclusions, le Royaume de Suède a fait référence aux données disponibles sur le site Internet de la SLU, de sorte que la Commission aurait dû examiner le contenu de ces données disponibles sur ledit site Internet et, le cas échéant, demander, si nécessaire, une prolongation du délai ou une suspension de la procédure.

134

Or, la Commission, d’une part, n’ayant pas demandé, de manière claire et précise, des mesures spécifiques visant à vérifier le modèle HYPE et, d’autre part, n’étant pas en mesure de mettre en cause de manière convaincante l’argumentation du Royaume de Suède relative à la rétention naturelle de l’azote, il convient de constater qu’elle n’est pas parvenue à démontrer le manquement à l’article 5 de la directive 91/271 en ce qui concerne le rejet de l’azote dans l’agglomération de Habo.

135

Dans ces conditions, il y a lieu de constater que le recours en manquement doit être rejeté en ce qui concerne l’agglomération de Habo.

Sur le troisième grief, tiré d’un manquement aux obligations incombant au Royaume de Suède en vertu de l’article 4, paragraphe 3, TUE

Argumentation des parties

136

La Commission fait valoir que, en ayant omis de lui communiquer les données pertinentes relatives aux agglomérations de Habo et de Töreboda, de manière à permettre à cette institution de vérifier les arguments opposés par le Royaume de Suède aux manquements qui lui sont reprochés en ce qui concerne ces deux agglomérations, cet État membre a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 4, paragraphe 3, TUE.

137

À cet égard, la Commission fait valoir qu’il n’est pas suffisant pour un État membre de formuler de simples allégations sans donner à cette institution les moyens d’en vérifier la véracité. Ainsi, la Commission soutient que, si le Royaume de Suède affirme que le modèle HYPE, utilisé dans le cadre du calcul de la rétention en azote, se fonde sur des mesures réelles, cette institution n’a pas reçu d’informations de cet État membre relatives à la rétention calculée de manière individuelle pour chaque agglomération, de sorte qu’elle n’a pu vérifier ces allégations.

138

Plus précisément, cette institution n’aurait été en mesure ni de contrôler si la rétention naturelle de l’azote s’effectuait dans les proportions alléguées ni d’effectuer une appréciation scientifique objective de la véracité des allégations du Royaume de Suède quant aux modalités ayant permis de déterminer le pourcentage de rétention. À cet égard, la Commission soutient que, ne disposant pas elle-même de pouvoirs d’investigation à cet égard, le principe de coopération loyale exige qu’un État membre lui fournisse les éléments nécessaires pour vérifier si les dispositions d’une directive ont été mises en œuvre de manière correcte.

139

En l’espèce, les données qui auraient été communiquées à la Commission, sur lesquelles se fonde la déclaration officielle de l’IMHS, proviendraient d’une base de données qui n’est pas hébergée par l’IMHS et qui ne préciserait pas la teneur en azote des cours d’eau pour la période postérieure à l’année 2013. La Commission ajoute que même les données provenant de ladite base ne permettent pas de déterminer l’ampleur de la rétention de l’azote.

140

Le Royaume de Suède rétorque que, d’une part, il a bien communiqué des informations pertinentes et, d’autre part, de telles informations proviennent des données de la surveillance environnementale librement accessibles sur le site Internet de la SLU qui, dans le cadre de la surveillance environnementale, a collecté des données concernant les eaux douces. L’IMHS utiliserait ces données pour ses travaux de validation et de calibrage.

141

En outre, le Royaume de Suède soutient que tant le modèle HYPE que les modèles précédents sur lesquels celui-ci se fonde sont bien documentés et ont fait l’objet d’examens ainsi que d’essais scientifiques avec des résultats publiés dans plusieurs études et articles scientifiques. Cet État membre avance que deux études scientifiques démontrent qu’il s’agit d’un modèle fiable et souligne, d’une part, que les validations et les calibrages sont réalisés par rapport à des données mesurées par la SLU et, d’autre part, que les études citées affirment que le site Internet de l’IMHS dispose d’un outil permettant de visualiser l’écart moyen, exprimé en pourcentage, entre les valeurs du modèle et les données mesurées.

142

En outre, dans sa réponse à la lettre de mise en demeure du 28 juin 2017, le Royaume de Suède aurait fourni des explications détaillées au sujet du modèle HYPE et communiqué à la Commission des informations de l’IMHS indiquant comment s’opèrent les transports et les pertes d’azote ainsi que la rétention naturelle finale qui est ainsi obtenue à Habo et à Töreboda. Partant, cet État membre conclut qu’il a fait tout ce qui lui était possible pour coopérer avec la Commission.

Appréciation de la Cour

143

Il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante relative à la charge de la preuve dans le cadre d’une procédure en manquement au titre de l’article 258 TFUE, il incombe à la Commission d’établir l’existence du manquement allégué. C’est elle qui doit apporter à la Cour les éléments nécessaires à la vérification par celle-ci de l’existence de ce manquement, sans pouvoir se fonder sur une présomption quelconque [arrêt du 14 janvier 2021, Commission/Italie (Contribution à l’achat de carburants), C‑63/19, EU:C:2021:18, point 74 et jurisprudence citée].

144

Les États membres sont cependant tenus, en vertu de l’article 4, paragraphe 3, TUE, de faciliter à la Commission l’accomplissement de sa mission, qui consiste, notamment, selon l’article 17, paragraphe 1, TUE, à veiller à l’application des dispositions du traité FUE ainsi que des dispositions prises par les institutions en vertu de celui-ci. En particulier, il convient de tenir compte du fait que, s’agissant de vérifier l’application correcte en pratique des dispositions nationales destinées à assurer la mise en œuvre effective d’une directive, la Commission, qui ne dispose pas de pouvoirs propres d’investigation en la matière, est largement tributaire des éléments fournis par d’éventuels plaignants ainsi que par l’État membre concerné (arrêt du 18 octobre 2012, Commission/Royaume-Uni, C‑301/10, EU:C:2012:633, point 71 et jurisprudence citée).

145

En l’occurrence, il y a lieu de relever que le Royaume de Suède a répondu à la demande de la Commission de lui communiquer les résultats de mesures plus récents concernant la réduction de l’azote dans les agglomérations de Habo et de Töreboda en renvoyant à la déclaration de l’IMHS qui indiquait que celle-ci était effectivement fondée sur des mesures plus récentes de cette teneur mais que celles-ci n’étaient pas disponibles sur son site Internet en raison du fait qu’elles provenaient de la base de données d’une autre institution.

146

Cependant, ce n’est que lors de la procédure devant la Cour, à savoir dans son mémoire en défense, que le Royaume de Suède a informé la Commission que lesdites données étaient hébergées par la SLU et qu’elles étaient librement disponibles sur le site Internet de cette université.

147

Il convient de relever que, ce faisant, le Royaume de Suède a communiqué, pendant la procédure précontentieuse, à la Commission des informations incomplètes et a fait obstacle au bon déroulement de la présente procédure.

148

Ainsi que l’a relevé Mme l’avocate générale au point 123 de ses conclusions, bien que la Commission ait contesté le manque de données spécifiques, cet État membre n’a ni communiqué de telles données ni indiqué la source de données plus récentes ou leur référence sur Internet. Cette carence a nui à la préparation du présent recours par la Commission.

149

Il en résulte que, en ne fournissant pas à la Commission, au cours de la procédure précontentieuse, les informations dont elle aurait eu besoin pour apprécier si les stations d’épuration des agglomérations de Habo et de Töreboda satisfaisaient aux exigences de la directive 91/271, le Royaume de Suède a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 4, paragraphe 3, TUE.

150

Il ressort de l’ensemble des considérations qui précèdent que :

en ne veillant pas à ce que, avant d’être rejetées, les eaux résiduaires des agglomérations de Lycksele, de Malå et de Pajala soient soumises à un traitement secondaire ou à un traitement équivalent, le Royaume de Suède a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 4 de la directive 91/271, lu en combinaison avec l’article 10 de celle-ci, et

en ne fournissant pas à la Commission, au cours de la procédure précontentieuse, les informations dont elle aurait eu besoin pour apprécier si les stations d’épuration des agglomérations de Habo et de Töreboda satisfaisaient aux exigences de la directive 91/271, le Royaume de Suède a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 4, paragraphe 3, TUE.

Sur les dépens

151

Conformément à l’article 138, paragraphe 3, du règlement de procédure de la Cour, la Commission et le Royaume de Suède supporteront chacun leurs propres dépens, les parties ayant succombé respectivement sur un ou plusieurs chefs.

 

Par ces motifs, la Cour (quatrième chambre) déclare et arrête :

 

1)

En ne veillant pas à ce que, avant d’être rejetées, les eaux résiduaires des agglomérations de Lycksele, de Malå et de Pajala soient soumises à un traitement secondaire ou à un traitement équivalent, le Royaume de Suède a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 4 de la directive 91/271/CEE du Conseil, du 21 mai 1991, relative au traitement des eaux urbaines résiduaires, telle que modifiée par le règlement (CE) no 1137/2008 du Parlement européen et du Conseil, du 22 octobre 2008, lu en combinaison avec l’article 10 de la directive 91/271, telle que modifiée par le règlement no 1137/2008, et

en ne fournissant pas à la Commission européenne, au cours de la procédure précontentieuse, les informations dont elle aurait eu besoin pour apprécier si les stations d’épuration des agglomérations de Habo et de Töreboda satisfaisaient aux exigences de la directive 91/271, telle que modifiée par le règlement no 1137/2008, le Royaume de Suède a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 4, paragraphe 3, TUE.

 

2)

Le recours est rejeté pour le surplus.

 

3)

La Commission européenne et le Royaume de Suède supportent leurs propres dépens.

 

Signatures


( *1 ) Langue de procédure : le suédois.

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